Livv
Décisions

CA Aix-en-Provence, ch. 3-4, 28 mars 2024, n° 22/16862

AIX-EN-PROVENCE

Arrêt

Autre

CA Aix-en-Provence n° 22/16862

28 mars 2024

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 3-4

ARRÊT

DU 28 MARS 2024

N° 2024/62

Rôle N° RG 22/16862 - N° Portalis DBVB-V-B7G-BKP5C

[B] [M]

C/

[P] [I]

[R] [H]

[S] [M]

[O] [L] [A] veuve [M]

[O] [Z] [M] divorcée [D]

[K] [J], [Y] [M]

[C] [U], [N] [M] veuve [M]

SCI CHRISTYAN

S.C.I. CASTAIN REAL ESTATE WORLDWIDE

S.C.I. SOGETERRIERS

SCI SYLPHALINE B

SCI CASTAIN

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Gilles ALLIGIER

Me Sandra JUSTON

Me Jean-françois JOURDAN

Décision déférée à la Cour :

Ordonnance du juge de la mise en état du tribunal judiciaire de GRASSE en date du 18 Novembre 2022 enregistrée au répertoire général sous le n° 21/02139.

APPELANT

Monsieur [B] [M]

né le [Date naissance 14] 1977

demeurant [Adresse 13]

représenté par Me Gilles ALLIGIER, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

INTIMES

Monsieur [P] [I] pris en sa qualité d'usufruitier de parts sociales de la société Sogeterriers

né le [Date naissance 10] 1971, demeurant [Adresse 15]

défaillant

Monsieur [R] [H] pris en sa qualité d'usufruitier de parts sociales de la société Sogeterriers

né le [Date naissance 8] 1968 à [Localité 18] (21), demeurant [Adresse 16]

défaillant

Monsieur [S] [M] pris en sa qualité d'associé de la Société SOGETERRIERS

né le [Date naissance 2] 1986, demeurant [Adresse 6]

représenté par Me Sandra JUSTON de la SCP BADIE, SIMON-THIBAUD, JUSTON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, et assisté de Me Sandrine TURRIN, avocat au barreau de GRASSE, plaidant

Madame [O] [L] [A] épouse [M] agissant en sa qualité d'usufruitière de parts sociales de la Société SOGETERRIERS

née le [Date naissance 5] 1962, demeurant [Adresse 6]

représentée par Me Sandra JUSTON de la SCP BADIE, SIMON-THIBAUD, JUSTON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, et assistée de Me Sandrine TURRIN, avocat au barreau de GRASSE, plaidant

Madame [O] [M] prise en sa qualité d'associée de la société Sogeterriers

née le [Date naissance 9] 1969, demeurant [Adresse 7]

défaillante

Madame [K] [M] prise en sa qualité d'associée de la société Sogeterriers

née le [Date naissance 1] 1967, demeurant [Adresse 11]

défaillante

Madame [C] [M] prise en sa qualité d'usufruitière de parts sociales de la société Sogeterriers

née le [Date naissance 12] 1936, demeurant [Adresse 17]

défaillante

Société CASTAIN REAL ESTATE WORLDWIDE S.C.I. représentée par son représentant légal en exercice, dont le siège social est sis [Adresse 4]

représentée par Me Jean-françois JOURDAN de la SCP JF JOURDAN - PG WATTECAMPS ET ASSOCIÉS, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, et assistée de Me Chloé ADELBRECHT-VIGNES avocat au barerau des HAUTS DE SEINE plaidant et substituant Me Jean-fabrice BRUN, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE

Société SOGETERRIERS S.C.I. représentée par son représentant légal en exercice, dont le siège social est sis [Adresse 3]

représentée par Me Jean-françois JOURDAN de la SCP JF JOURDAN - PG WATTECAMPS ET ASSOCIÉS, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, et assistée de Me Chloé ADELBRECHT-VIGNES avocat au barerau des HAUTS DE SEINE plaidant et substituant Me Jean-fabrice BRUN, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE

Société SYLPHALINE B SCI prise en la personne de son représentant légal en exercice

dont le siège social est sis [Adresse 3]

représentée par Me Sandra JUSTON de la SCP BADIE, SIMON-THIBAUD, JUSTON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, et assistée de Me Sandrine TURRIN, avocat au barreau de GRASSE, plaidant

Société CASTAIN SCI prise en la personne de son représentant légal en exercice, dont le siège social est sis [Adresse 3]

représentée par Me Sandra JUSTON de la SCP BADIE, SIMON-THIBAUD, JUSTON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, et assistée de Me Sandrine TURRIN, avocat au barreau de GRASSE, plaidant

Société CHRISTYAN SCI prise en la personne de son représentant légal en exercice, dont le siège social est sis [Adresse 6]

représentée par Me Sandra JUSTON de la SCP BADIE, SIMON-THIBAUD, JUSTON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, et assistée de Me Sandrine TURRIN, avocat au barreau de GRASSE, plaidant

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 13 Février 2024 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Madame Anne-Laurence CHALBOS, Président a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Anne-Laurence CHALBOS, Président

Madame Laetitia VIGNON, Conseiller

Madame Gaëlle MARTIN, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Valérie VIOLET.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 28 Mars 2024.

ARRÊT

Défaut,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 28 Mars 2024,

Signé par Madame Anne-Laurence CHALBOS, Président et Madame Valérie VIOLET, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

La SCI Sogeterriers était historiquement détenue par la famille [M], qui s'est rapprochée en 2008 de M. [W] [X] afin de valoriser l'actif immobilier de la société.

M. [X] et ses enfants sont ainsi entrés au capital de la SCI Sogeterriers par l'intermédiaire de différentes sociétés.

La SCI Sogeterriers était propriétaire d'un terrain à Antibes, sur lequel était exploitée une activité de scierie par la société Centrale antiboise des bois (CAB), titulaire d'un bail commercial.

Le projet de valorisation du terrain conduit par la SCI Sogeterriers, impliquant le départ de la société CAB, détenue par la famille [M] et présidée par M. [B] [M], a donné lieu à des différends, relatifs notamment à l'indemnité d'éviction due à la société CAB.

Par deux actes notariés du 24 juin 2015, la SCI Sogeterriers a consenti à la SCI Sogeterriers B la cession de la partie haute du terrain et un bail à construction sur la partie basse avec promesse de cession.

Par actes du 2 mai 2016, M. [B] [M] a cédé à la SCI Castain Real Estate Worldwide (dite CREW France), filiale de la SCI Sogeterriers, la nue-propriété des 2020 parts sociales, numérotées 7736 à 9755, qu'il détenait au sein de SCI Sogeterriers, pour le prix de 300000 euros et la SCI CREW France a consenti à M. [B] [M] une promesse unilatérale de cession portant sur les mêmes parts, à intervenir entre le 1er juillet 2026 et le 30 juin 2028, pour le prix de 400000 euros.

Le même jour, deux protocoles transactionnels ont été signés :

- l'un entre la SAS CAB, ses associés et la SCI Sogeterriers, destiné à mettre fin aux différends liés au bail commercial,

- l'autre entre tous les associés et usufruitiers de droits de la SCI Sogeterriers, aux termes duquel les associés renonçaient à toute contestation ou remise en cause des décisions collectives prises jusqu'au jour du protocole, y compris celle du 2 mai 2016 autorisant la cession de parts de M. [B] [M] à la SCI CREW France, à toute contestation ou remise en cause des statuts mis à jour, et des décisions ou actes concernant la SCI CREW France, ses filiales ou sous-filiales et la SCI Sogeterriers B.

Par assemblée générale extraordinaire du 23 janvier 2018 les associés ont décidé de l'augmentation du capital de la société, qui s'est traduite par la création de 72800 parts sociales nouvelles lors de l'assemblée générale mixte du 21 mars 2018.

Déplorant la mainmise de la famille [X] sur la SCI Sogeterriers à leur détriment, certains membres de la famille [M] ont engagé des procédures à l'encontre de la SCI Sogeterriers, ses gérants ainsi que l'ensemble des associés et usufruitiers.

Une procédure a ainsi été introduite le 17 avril 2019 par M. [E] [M], tendant notamment à l'annulation de la promesse de vente conclue le 24 juin 2015 entre la SCI Sogeterriers et la SCI Sogeterriers B, à l'annulation du protocole transactionnel conclu le 2 mai 2016 entre les associés et usufruitiers de droits de la SCI Sogeterriers et à l'annulation de la décision collective du 2 mai 2016 pour abus de majorité.

M. [B] [M] s'est associé aux demandes de M. [E] [M].

Par jugement du 28 juin 2022, le tribunal judiciaire de Grasse a notamment rejeté la demande des consorts [E] [M], [K] [M] et [B] [M] tendant à l'annulation du protocole transactionnel du 2 mai 2016.

Mme [K] [M] a également saisi le tribunal judiciaire de Grasse par acte du 16 mars 2020, pour demander notamment l'annulation des décisions d'assemblées générales relatives à l'augmentation de capital réalisée en 2018 et de toutes les décisions collectives postérieures.

M. [B] [M], s'associait à ces demandes.

Par ordonnance du 17 décembre 2021, le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Grasse a entre autres dispositions déclaré Mme [K] [M] et M. [B] [M] irrecevables en leurs demandes.

Par arrêt du 20 octobre 2022, la cour d'appel, qui n'était saisie d'aucun appel principal ou incident de M. [B] [M], a confirmé, dans les limites de sa saisine, l'ordonnance entreprise.

M. [B] [M] a à son tour fait assigner par actes des 27 et 28 avril 2021 la SCI Sogeterriers, ses gérants ainsi que l'ensemble des associés et usufruitiers devant le tribunal judiciaire de Grasse.

Il demandait au tribunal de prononcer l'annulation de l'acte de cession de la nue-propriété de parts sociales de la SCI Sogeterriers intervenue le 2 mai 2016 entre lui-même et la SCI CREW France et de la promesse de cession consentie le même jour par la SCI CREW, l'annulation de toutes les assemblées générales intervenues postérieurement au 2 mai 2016 et l'annulation de l'augmentation de capital du 23 janvier 2018.

Il sollicitait également l'allocation de dommages et intérêts pour préjudices financier et moral en lien avec les nullités invoquées.

Les SCI Sogeterriers et CREW France ont saisi le juge de la mise en état aux fins d'entendre déclarer M. [B] [M] irrecevable en ses demandes.

Par ordonnance du 18 novembre 2022, le juge de la mise en état a statué comme suit :

- déclare M. [B] [M] irrecevable à agir en annulation de l'acte de cession de la nue-propriété de parts sociales de la société Sogeterriers intervenue le 2 mai 2016 entre lui et la SCI Castain Real Estate Worldwide, ainsi que de la promesse unilatérale de cession de parts sociales signée entre les mêmes parties le même jour, du fait de l'autorité de la chose jugée attachée au protocole d'accord du 2 mai 2016 ;

- déclare irrecevable, en sa qualité d'usufruitier, M. [B] [M] à solliciter l'annulation de l'ensemb1e des assemblées générales postérieures au 2 mai 2016, du fait d'un défaut de qualité à agir et de l'autorité de la chose jugée attachée à l'ordonnance de mise en état rendue le 17 décembre 2021 dans le cadre de la procédure 20/1313 ;

- déclare irrecevable, en sa qualité d'usufruitier, M. [B] [M] à solliciter l'annulation de l'augmentation de capital de la société Sogeterriers, décidée lors de l'Assemblée générale du 23 janvier 2018, du fait d'un défaut de qualité à agir et de la prescription;

- dit n'y avoir lieu à renvoyer l'examen des fins de non-recevoir soulevées devant la juridiction de jugement, à défaut de devoir statuer préalablement sur une question de fond ;

- constate le dessaisissement du tribunal en l'état de la présente décision ;

- dit que si un recours est exercé contre la présente décision dans le délai d'appel, le rétablissement au rôle de la procédure pourra être effectué sur simple production d'un arrêt infirmatif ;

- condamne M. [B] [M] à payer la somme globale de 3000 euros à la SCI Sylphaline B, la SCI Castain, M. [S] [M], Mme [O] [A] épouse [M], et la SCI Christyan en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamne M. [B] [M] à payer la somme globale de 3000 euros à la SCI Sogeterriers et la SCI Castain Real Estate Worldwide en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- déboute M. [B] [M] de sa demande formée en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamne M. [B] [M] aux entiers dépens du présent incident, qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

M. [B] [M] a interjeté appel de cette décision le 19 décembre 2022.

Par conclusions déposées le 9 février 2023, signifiées le 8 mars 2023, l'appelant demande à la cour de :

- réformer l'ordonnance du juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Grasse du 18 novembre 2022,

Statuant à nouveau :

Vu l'article 789 du code de procédure civile,

- renvoyer l'affaire devant la formation de jugement pour qu'il soit statué sur les fins de non-recevoir soulevées par les demandeurs à l'incident et les autres codéfendeurs à l'instance principale.

Subsidiairement :

Vu les articles 1101, 1108, 1109, 1112, 1116 anciens du code civil, 2052 ancien, 31 et 32, 794 du code de procédure civile, 1355 du code civil,

- juger que l'assemblée générale du 2 mai 2016 de la SCI Sogeterriers n'a pas autorité de la chose jugée.

- juger que le protocole transactionnel entre la SAS C.A.B., Mme [K] [M], Mme [C] [M] et la SCI Sogeterriers n'a pas autorité de la chose jugée relativement aux demandes de nullité formulées par M. [B] [M] dans son exploit introductif d'instance,

- juger que la transaction du 2 mai 2016 ne pourrait avoir autorité de la chose jugée que sur les décisions collectives des associés qui ne se confondent pas avec un acte de cession de parts ou de nue-propriété de parts,

- juger que le protocole transactionnel entre les associés et usufruitiers de la SCI

Sogeterriers n'a pas autorité de la chose jugée sur l'acte de cession de parts objet de l'exploit introductif d'instance et sur les actes subséquents à celui-ci,

- juger que la nullité d'un acte qui se prescrit par cinq ans emporte la nullité des actes subséquents à cet acte alors même que la nullité des actes subséquents relève de la prescription triennale,

- juger que la prescription triennale de l'article 1844-14 du code civil n'a pas pour effet de rendre prescrite la nullité des actes subséquents à un acte dont la nullité est prononcée,

- juger que si la nullité de la cession était prononcée par le juge du fond, cela remettrait les parties dans le statut ante cession et que la qualité pour agir quant à la nullité des assemblée générale dépend de la décision du juge du fond sur la nullité de la cession de la nue-propriété des parts,

- juger que dans une telle hypothèse M. [B] [M] se retrouverait propriétaire de la pleine propriété de ses titres et qu'en cette qualité il aurait intérêt et qualité pour solliciter l'annulation des assemblée générales de la société dont le capital social est notamment composé de ces titres,

- juger que les fins de non-recevoir soulevées par demandeurs à l'incident sont intimement liées à la décision du juge du fond,

- juger que l'ordonnance de mise en état rendue le 17 décembre 2021 dans le cadre de la procédure 20/1313 n'a pas de caractère définitif en l'état du pourvoi en cassation en cours,

- juger que les causes de nullité soulevée dans la procédure 20/1313 ne sont pas identiques aux causes de nullité soulevées par M. [B] [M] dans la cadre de la procédure qu'il a initiée et qui a donné lieu à l'ordonnance objet de la présente instance d'appel,

- juger que l'ordonnance de mise en état rendue le 17 décembre 2021 dans le cadre de la procédure 20/1313 n'a pas autorité de la chose jugée,

- juger que M. [B] [M] a qualité et intérêt pour agir,

- juger que les défendeurs à la procédure au fond et/ou demandeurs à l'incident ne rapportent pas la preuve de la fraude alléguée,

- débouter la SCI Sogeterriers et la société Castain Real Estate Worldwide (CREW France) d'une part, et les SCI Sylphaline B, Castain, M. [S] [M] , Mme [O] [M] et la SCI Christyan d'autre part, de toutes leurs demandes visées dans le dispositif de leurs conclusions notifiées dans le cadre de la procédure d'incident,

En tout état de cause :

Vu les articles 699 et 700 du code de procédure civile,

- condamner la SCI Sogeterriers et la société Castain Real Estate Worldwide (CREW France) d'une part, et les SCI Sylphaline B, Castain, M. [S] [M] , Mme [O] [M] et la SCI Christyan d'autre part, à payer chacun à M. [B] [M] la somme de 3 500 euros au titre des frais irrépétibles, ainsi qu'aux entiers dépens,

- débouter toutes parties de toutes demandes, fins et conclusions contraires aux présentes.

Par conclusions déposées et notifiées le 9 mars 2023, les SCI Sogeterriers et CREW France demandent à la cour de :

Vu les articles 32-1, 122, 474, 480, 538, 571, 612, 613, 789, 790 et 794 du code de procédure civile, 1240 du code civil, 1844 al. 3 dans sa version en vigueur avant la loi du 19 juillet 2019 et 1844-14 du Code civil, 2044 à 2053 du code civil dans leur version en vigueur avant le 20 novembre 2016,

- confirmer l'ordonnance du juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Grasse en date du 18 novembre 2022 dans toutes ses dispositions,

- débouter M. [B] [M] de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions,

En tout état de cause,

- condamner M. [B] [M] à verser à la SCI Sogeterriers et à la société Castain Real Estate Worldwide la somme de 7500 euros chacune en réparation de leur préjudice lié à l'appel abusif de ce dernier ;

- Condamner M. [B] [M] à verser à la SCI Sogeterriers et à la SCI Castain Real Estate Worldwide la somme de 15000 euros chacune sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de la présente instance.

Par conclusions déposées et notifiées le 8 mars 2023, M. [S] [M], Mme [O] [M] née [A], la SCI Christyan, la SCI Sylphaline B et la SCI Castain demandent à la cour de :

Vu les articles 32-1, 122, 480, 789, 791 et 954 du code de procédure civile, 1103, 1240, 1355, 1625, 1844 alinéa 3, 1844-14, 2044 à 2052, 2053 et 2224 du code civil,

- débouter M. [B] [M] de toutes demandes, fins et conclusions,

- confirmer en tous points l'ordonnance du juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Grasse du 18 novembre 2022,

- déclarer ainsi irrecevables l'ensemble des demandes de M. [B] [M] :

- pour se heurter à la chose jugée en dernier ressort dont est revêtu le protocole d'accord du 2 mai 2016 valant transaction définitive conformément aux dispositions des articles 2044 et suivants du code civil, en leur rédaction applicable en la cause, et plus particulièrement de l'article 2052 du même code, cette transaction n'ayant en outre pas été contestée par M. [B] [M] pour quelque vice du consentement que ce soit dans le délai de 5 ans visé à l'Article 2224 du code civil ;

- pour se heurter encore à la décision collective des associés de la société Sogeterriers du 2 mai 2016, à laquelle il a voté favorablement, qui a entériné la cession de la nue-propriété des parts sociales de M. [B] [M] à la société CREW France, alors expressément agréée pour cela, toute action en contestation de cette décision étant prescrite par l'écoulement du délai de 3 ans visé à l'article 1844-14 du code civil ;

- pour se heurter à la prescription, concernant les assemblées générales de la société Sogeterriers des 24 mai 2016, 6 décembre 2017, 23 janvier 2018, 15 février 2018 et 21 mars 2018, toute action en contestation de ces décisions étant prescrite par l'écoulement du délai de 3 ans visé à l'article 1844-14 du code civil ;

- pour fraudes commises envers la société Sogeterriers dont il est usufruitier de droits et contre la société CREW France, son cessionnaire, filiale à 99,9 % de la société Sogeterriers, ainsi qu'envers tous leurs associés ;

- pour se heurter à l'autorité de la chose jugée attachée à l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence du 20 octobre 2022 pour les assemblées, décisions collectives et consultations écrites comprises entre le 6 décembre 2017 et le 21 mars 2018 ;

- pour se heurter à sa qualité d'usufruitier de droits de la société Sogeterriers, son droit de vote appartenant désormais en application notamment des dispositions de l'article 19 des statuts, au nu-propriétaire pour les assemblées, décisions collectives et consultations écrites postérieures au 2 mai 2016, y inclus les assemblées générales des 23 janvier et 21 mars 2018, en vertu des dispositions de l'article 1844 alinéa 3 du code civil,

- condamner pour procédure d'appel abusive M. [B] [M] au paiement de la somme de 7500 euros à chacun des concluants et intimés, les sociétés SCI Christyan, SCI Castain et SCI Sylphaline B, ainsi que Mme [O] [M] , née [A], et M. ,[S] [M] , soit une somme totale de 37500 euros,

- condamner en appel, en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile M. [B] [M] au paiement de la somme de 4000 euros à chacun des concluants et intimés, les sociétés SCI Christyan, SCI Castain et SCI Sylphaline B, ainsi que Mme [O] [M] , née [A], et M. [S] [M] , soit une somme totale de 20000 euros, tout comme aux entiers dépens.

Les autres intimés n'ont pas constitué avocat. MM [I] et [H] n'ayant pas été cités par remise de l'acte à leur personne, il sera statué par arrêt de défaut.

La procédure a été clôturée le 29 août 2023.

MOTIFS :

L'action introduite le 27 avril 2021 par M. [B] [T] devant le tribunal judiciaire de Grasse tend principalement à l'annulation de l'acte de cession de la nue-propriété de parts sociales de la SCI Sogeterriers intervenue le 2 mai 2016 entre lui-même et la SCI CREW France et de la promesse de cession consentie le même jour par la SCI CREW, les autres demandes n'étant présentées que comme la conséquence de cette annulation.

Les intimés opposent à M. [B] [M] l'irrecevabilité de cette demande en raison de l'autorité de la chose jugée attachée au protocole transactionnel signé le 2 mai 2016 entre tous les associés et usufruitiers de droits de la SCI Sogeterriers.

L'appelant ne conteste pas la validité du protocole transactionnel du 2 mai 2016 mais soutient que l'autorité de la chose jugée de cette transaction ne porte que sur les contestations qu'elle tranche, à savoir les seules décisions collectives des associés, et non pas sur les actes parallèles comme l'acte de cession de parts en nue-propriété, qui peuvent être attaqués pour vice du consentement.

Il convient en conséquence d'examiner le contenu et la portée dudit protocole pour apprécier la recevabilité de l'action de M. [B] [M], une telle recherche ne nécessitant pas, contrairement à ce que soutient l'appelant, que soit tranchée une question de fond justifiant le renvoi devant la formation de jugement.

Ainsi que le soulignent les intimés, le protocole transactionnel a été signé postérieurement à la cession de parts sociales en nue-propriété intervenue le même jour puisque M. [B] [M] a signé le protocole en tant que 'ancien associé devenu usufruitier de droits à l'issue des décisions de ce jour'.

Aux termes de l'article I de cet acte, M. [B] [M] a, avec d'autres associés et usufruitiers de droits, renoncé expressément et irrévocablement à toute contestation ou remise en cause judiciaire ou par tout autre moyen non seulement des décisions collectives prises jusqu'au 2 mai 2016, mais aussi des statuts mis à jour expressément et irrévocablement entérinés, et, concernant la SCI CREW France, ses filiales ou sous-filiales et la SCI Sogeterriers B, et/ou ses associés ou gérants, de toutes les décisions ou actes effectués au jour du protocole ou figurant dans les statuts desdites sociétés.

L'article IV précise que le protocole constitue une transaction définitive au sens des articles 2044 et suivants du code civil ayant entre les parties l'autorité de la chose jugée en dernier ressort par application des dispositions de l'article 2052 du code civil, que les parties soussignées se désistent et ou renoncent ainsi irrévocablement à toute action en cours ou à venir les unes envers les autres relativement à tous leurs rapports passés et jusqu'au jour de l'acte, traduits aux causes du protocole transactionnel et notamment dans tous les articles des statuts mis à jour joints, faisant partie intégrante du protocole et définitivement approuvés sans réserve, ainsi que dans les décisions collectives y compris celle du 2 mai 2016 jointe.

La cession de parts sociales en nue-propriété consentie à la SCI CREW France par M. [B] [M] le 2 mai 2016 constitue un acte indissociable de l'objet du protocole, entrant dans le champs de celui-ci au titre des actes de la SCI CREW et rapports passés entre les parties se traduisant par une modification des statuts de la société Sogeterriers irrévocablement entérinée par la transaction.

La cession s'est en effet traduite par une mise à jour des statuts au 2 mai 2016 concernant la répartition du capital, sur laquelle M. [B] [M] s'est interdit de revenir aux termes du protocole transactionnel.

C'est en conséquence à juste titre que le juge de la mise en état a considéré, sans avoir à trancher une question de fond relevant d'un renvoi à la formation de jugement, que M. [B] [M] était irrecevable à agir en annulation de la cession de parts du 2 mai 2016.

L'ordonnance sera confirmée sur ce point.

L'appelant, jugé irrecevable à agir en nullité de la cession de ses parts en nue-propriété sans examen au fond, ne peut donc se prévaloir de cette nullité pour poursuivre l'annulation des actes subséquents, cette demande ne pouvant qu'être jugée elle-même irrecevable.

Par ailleurs, ainsi que l'a relevé le premier juge, l'article 19VIII des statuts énonce que les usufruitiers sont irrecevables à contester toute décision collective quelque soit sa forme, à la seule exception des décisions collectives portant sur l'affectation des résultats.

M. [B] [M], qui ne poursuit pas l'annulation d'une décision collective particulière portant sur l'affectation des résultats mais celle de l'ensemble des décisions collectives auxquelles il estime qu'il aurait dû participer en tant qu'associé, est en conséquence dépourvu de qualité à agir en tant qu'usufruitier, comme déjà jugé par ordonnance rendue le 17 décembre 2021 par le juge de la mise en état dans la procédure suivie devant le tribunal judiciaire de Grasse sous le numéro 20/1313.

Le juge de la mise en état a également retenu à juste titre qu'en l'état de l'irrecevabilité de la demande d'annulation de la cession de parts, et en application de l'article 1844-14 du code civil, toute demande d'annulation de décisions collectives antérieures au 27 avril 2018 était irrecevable comme prescrite.

L'ordonnance entreprise sera confirmée en toutes ses dispositions.

Les intimés, qui ne démontrent pas que le droit pour M. [B] [M] d'agir en justice et d'exercer les recours prévus par la loi aurait dégénéré en abus, seront déboutés de leurs demandes respectives en dommages et intérêts pour appel abusif.

Partie succombante, M. [B] [M] sera condamné aux dépens d'appel ainsi qu'au paiement d'une indemnité pour frais irrépétibles au profit des intimés ayant constitué avocat, comme il sera dit au dispositif.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, par défaut,

Confirme l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Déboute la SCI Sogeterriers, la société Castain Real Estate Worldwide (CREW France), les SCI Sylphaline B, Castain, M. [S] [M], Mme [O] [M] et la SCI Christyan de leurs demandes respectives en dommages et intérêts pour appel abusif,

Condamne M. [B] [M] à payer, à titre d'indemnités pour frais irrépétibles d'appel :

- à la SCI Sogeterriers et la société Castain Real Estate Worldwide (CREW France), la somme globale de 3000 euros,

- à la SCI Sylphaline B, la SCI Castain, M. [S] [M], Mme [O] [M] et la SCI Christyan, la somme globale de 3000 euros,

Condamne M. [B] [M] aux dépens d'appel.

LE GREFFIER LE PRESIDENT