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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 4, 3 avril 2024, n° 21/08732

PARIS

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Demandeur :

Shalimaar China Limited (Sté)

Défendeur :

Pâtisseries Paris Saint Sulpice (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Bodard-Hermant

Conseillers :

Mme Depelley, M. Richaud

Avocats :

Me Denarie, Me Pinchou

T. com. Paris, 9e ch., du 12 avr. 2021, …

12 avril 2021

EXPOSÉ DU LITIGE

La société Pâtisseries Paris Saint Sulpice (P2S2), qui a pour activité l'exploitation des marques Pierre Hermé [Localité 5] depuis 2001, fabrique et commercialise des produits Pierre Hermé tels que gâteaux, viennoiseries, macarons et chocolats.

En 2007, cette société a fait appel à la société de droit hongkongais Shalimaar China Limited (Shalimaar), créée en 1999 par M. [X], pour la fourniture d'emballages de ses macarons.

En juin 2012, M. [X] a créé la société de droit français Casa GrassiFrance, laquelle a notamment établi des factures pour la livraison des boîtes commandées par la société P2S2.

Par lettre recommandée du 16 novembre 2017, la société Casa [X] France a mis en demeure la société P2S2 de lui payer la somme de 55.633,09 €, correspondant à des factures échues et non réglées; puis, par lettres recommandées des 18 décembre 2017 et 9 février 2018, elle s'est à nouveau plainte d'impayés et a demandé à la société P2S2 un meilleur encadrement de leurs relations commerciales, en particulier de lui faire part des commandes qu'elle entendait faire fabriquer d'ici la fin de l'année 2018.

Le médiateur des entreprises, saisi par M. [X], a informé ce dernier le 3 juillet 2018 qu'elle clôturait le dossier suite au refus de Pierre Hermé de donner suite à sa demande de médiation.

C'est dans ces circonstances que les 26 juillet et 18 septembre 2019, les sociétés Casa [X] France et Shalimaar China Limited ont fait assigner la société Pâtisseries Paris Saint Sulpice devant le tribunal de commerce de Paris pour l'entendre condamner à leur payer différentes factures et pénalités de retard ainsi que des dommages-intérêts pour menace de rupture brutale des relations commerciales et rupture brutale des relations commerciales. 

Par jugement du 12 avril 2021, le tribunal a :

- débouté la société Casa [X] France et la société Shalimaar China Limited de leurs demandes visant à la condamnation de la société Pâtisseries Paris Saint Sulpice, nom commercial "Pierre Hermé [Localité 5]" à payer à la société Casa [X] France les sommes suivantes :

* 4.176 € au titre de la facture n° 2017 210,

* 1.116 € au titre de la facture n° 2017 134, 756 € au titre de la facture n° 2017 147,

* 12.954,05 € au titre de la facture n° 2017 136,

* 1.821,16 € au titre de la facture n° 2018 405

* et 1.545 € au titre de la facture n° 2017 146,

- dit n'y avoir lieu à se prononcer sur la compensation,

- débouté la société Casa [X] France et la société Shalimaar China Limited de leurs demandes visant à la condamnation de la société Pâtisseries Paris Saint Sulpice, nom commercial "Pierre Hermé [Localité 5]", à payer à la société Casa [X] France les sommes suivantes :

* 1.456,02 pour des frais de stockage,

* 4.308,33 € pour des frais de livraison et de transports additionnels,

* 490 € pour des frais de chargement/déchargement,

* 1.423,74 € pour des frais payés à la société Scol, 479,61 € pour des frais de stockage,

* 90 € pour des frais de destruction de marchandises,

- débouté la société Casa [X] France et la société Shalimaar China Limited de leurs demandes visant à la condamnation de la société Pâtisseries Paris Saint Sulpice, nom commercial "Pierre Hermé [Localité 5]" à payer les sommes de 11.399,01 € et 100.000 € sur le fondement de l'article L 442-6-1 5° ancien du code de commerce,

- débouté la société Casa [X] France et la société Shalimaar China Limited de leurs demandes visant à la publication du jugement dans la presse,

- condamné solidairement la société Casa [X] France et la société Shalimaar China Limited à payer à la société Pâtisseries Paris Saint Sulpice, nom commercial "Pierre Hermé [Localité 5]" la somme de 7.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté les parties de leurs autres demandes, plus amples ou contraires,

- d'office, ordonné l'exécution provisoire du jugement,

- condamné solidairement la société Casa [X] France et la société Shalimaar China Limited aux dépens.

La société Casa [X] France et la société Shalimaar China Limited ont relevé appel du jugement par déclaration reçue au greffe le 5 mai 2021.

Par ordonnance du 30 août 2022, le conseiller de la mise en état a dit que l'incident tendant à voir dire irrecevable une demande nouvelle en cause d'appel excédait les pouvoirs du conseiller de la mise en état.

Les sociétés Casa [X] France et Shalimaar China Limited, par leurs dernières conclusions déposées et notifiées le 15 décembre 2022, demandent à la cour :

1) au visa de l'article 909 du code de procédure civile :

- de déclarer irrecevables les conclusions notifiées le 16 septembre 2022 par la société Pâtisseries Paris Saint Sulpice et, en conséquence, les écarter purement et simplement,

- très subsidiairement, de rejeter la demande de la société Pâtisseries Paris Saint Sulpice tendant à voir déclarer irrecevables :

* les demandes au profit de la société Casa [X] France (1.545 € à titre d'indemnité de retard, 11.399,01 € à titre de menaces de rupture brutale des relations commerciales établies et 100.000 € à titre de dommages-intérêts pour rupture des relations commerciales,

* les demandes au profit de la société Shalimaar China Limited (50.000 € à titre de dommages-intérêts pour rupture brutale des relations commerciales),

2) au visa des articles 1134,1142 et 1147 du code civil dans leurs versions en vigueur avant le 1er octobre 2016, des articles 1103 et 1217 du code civil dans leurs versions en vigueur après le 1er octobre 2016, de l'article 1143-2 du code civil, de l'article L. 442-6-1 5° du code de commerce en vigueur jusqu'au 26 avril 2017 ainsi que des articles L. 442-1 et suivants du code de commerce, d'infirmer le jugement en toutes ses dispositions et :

a) condamner la société Pâtisseries Paris Saint Sulpice à verser à la société Casa [X] France les sommes suivantes :

- 4.176 € TTC au titre de la facture n° 2017 210,

- 1.116 € TTC au titre de la facture n° 2017 134,

- 756 € TTC au titre de la facture n° 2017 147,

- 12.594,05 € TTC au titre de la facture n° 2017 136,

- 1.821,16 € TTC au titre de la facture n° 2018 405,

b) sur le marché 2016, condamner la société Pâtisseries Paris Saint Sulpice à payer à la société Casa [X] France les sommes suivantes :

- 1.456,02 € TTC, à titre de dommages-intérêts, pour les frais de stockage qu'elle a dû débourser,

- 4.308,33 € TTC, à titre de dommages-intérêts, pour les frais de livraisons et transports additionnels qu'elle a dû débourser,

- 490 € de frais de chargement/déchargement qu'elle a dû exposer,

- 1.423,74 € TTC de dommages-intérêts au titre des frais qu'elle a été contrainte de payer à la société Scol,

c) sur le marché 2017, condamner la société Pâtisseries Paris Saint Sulpice à payer à la société Casa [X] France les sommes suivantes :

- 479,61 € TTC, à titre de dommages-intérêts, pour les frais de stockage qu'elle a dû débourser,

- 90 €, à titre de dommages-intérêts, pour les frais de destruction de marchandises qu'elle a dû payer,

d) condamner la société Pâtisserie Paris Saint Sulpice à verser à la société Casa [X] France la somme de 1.545 € à titre de pénalités de retard,

e) dire et juger que les conditions de la compensation invoquée par la société Pâtisseries Paris Saint Sulpice ne sont pas réunies pour ses factures de :

- 28.794,38 € de frais aériens,

- 9.936 € de conditionnement,

f) dire que les sommes susvisées produiront intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 16 novembre 2017 et que les intérêts échus produiront intérêts capitalisés à compter du 16 novembre 2018,

g) condamner la société Pâtisseries Paris Saint Sulpice à verser à la société Casa [X]

France :

- la somme de 11.399,01 €, à titre de dommages-intérêts, pour menaces de rupture brutale des relations commerciales,

- la somme de 100.000 €, à titre de dommages-intérêts, pour rupture brutale des relations commerciales,

h) condamner la société Pâtisseries Paris Saint Sulpice à verser à la société Shalimaar China Limited la somme de 50.000 €, à titre de dommages-intérêts, pour rupture brutale des relations commerciales,

i) ordonner la publication de l'arrêt à intervenir dans deux revues au choix des sociétés appelantes, avec un plafond de 5.000 € par publication,

j) condamner la société Pâtisseries Paris Saint Sulpice à verser tant à la société Casa [X] France qu'à la société Shalimaar China Limited la somme de 7.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

k) la condamner en tous les dépens de première instance et d'appel, lesquels pourront être recouvrés par Me Etienne Denarié, avocat, dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile.

La société Pâtisseries Paris Saint Sulpice-P2S2, par ses dernières conclusions déposées et notifiées le 16 septembre 2022, demande à la cour :

1) à titre principal, au visa des articles 562 et 564 du code de procédure civile, de dire irrecevables les demandes des sociétés Casa [X] et Shalimaar China Limited suivantes tendant à la voir condamner à verser :

* à la société Casa [X] :

- la somme de 1.545 € à titre de pénalités de retard,

- la somme de 11.399,01 €, à titre de dommages-intérêts, pour menaces de rupture brutale des relations commerciales,

- la somme de 100.000 € pour rupture brutale des relations commerciales,

* et à la société Shalimaar China Limited la somme de 50.000 € à titre de dommages-intérêts, pour rupture brutale des relations commerciales,

2) sur les autres demandes, confirmer intégralement le jugement en ce qu'il en a débouté les appelantes,

3) y ajoutant, condamner solidairement les sociétés Shalimaar et Casa [X] à lui payer la somme complémentaire de 10.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et les condamner aux entiers dépens,

4) à titre subsidiaire :

- dire mal fondées les sociétés Casa [X] et Shalimaar en toutes leurs demandes,

- confirmer intégralement le jugement en ce qu'il en a débouté les appelantes.

La clôture de l'instruction a été prononcée par ordonnance du 2 janvier 2024.

SUR CE LA COUR

1) Sur la recevabilité des conclusions de la société P2S2 déposées et notifiées le 16 septembre 2022 :

Moyens des parties,

Les appelantes font valoir que la société P2S2 n'a répondu à leurs conclusions du 12 janvier 2022 que le 16 septembre 2022, soit au-delà du délai de 3 mois imposé par l'article 909 du code de procédure civile.

La société P2S2 n'a pas répondu sur ce point.

Réponse de la cour,

L'article 909 du code de procédure civile est libellé comme suit : "L'intimé dispose, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, d'un délai de trois mois à compter de la notification des conclusions de l'appelante prévues à l'article 908 pour remettre ses conclusions au greffe et former, le cas échéant, appel incident ou appel provoqué".

En l'espèce, il apparaît que :

- conformément à l'article 908 du code de procédure civile, les appelantes ont remis au greffe leurs conclusions le 22 juillet 2021, soit dans les trois mois de la déclaration d'appel,

- conformément à l'article 909 du code de procédure civile, l'intimée a remis au greffe ses conclusions le 13 octobre 2021, dans le délai de 3 mois prévu par ce texte.

Aucun délai n'est ensuite imposé aux parties pour conclure à nouveau.

En conséquence, les conclusions de l'intimée du 16 septembre 2022 sont recevables.

2) Sur la recevabilité de certaines demandes des appelantes :

Moyens des parties,

L'intimée soutient que sont irrecevables comme nouvelles en cause d'appel les demandes des appelantes tendant à sa condamnation à verser :

- à la société Casa [X] les sommes de 1.545 € pour pénalités de retard, 11.399,01 €, à titre de dommages-intérêts, pour menaces de rupture brutale des relations commerciales et 100.000 €, à titre de dommages-intérêts, pour rupture brutale des relations commerciales,

- à la société Shalimaar China Limited la somme de 50.000 €, à titre de dommages-intérêts, pour rupture brutale des relations commerciales.

Invoquant les dispositions des articles 562 et 564 du code de procédure civile, l'intimée fait valoir que ce n'est que dans leurs conclusions signifiées le 12 janvier 2022 que les appelantes ont remplacé leurs demandes présentées de façon groupée en leur deux noms en première instance par des demandes distinctes pour chacun d'elles; elle en déduit que ces demandes sont nouvelles puisqu'elles n'ont pas été examinées en première instance et qu'elles ne peuvent être déférées à la cour en raison de l'effet dévolutif de l'appel et du principe d'immutabilité du litige; elle ajoute qu'une prétention nouvelle est celle qui diffère de celle soumise aux premiers juges, par son objet, par les parties qui en sont l'auteur ou par les qualités attribuées à son auteur.

Les appelantes demandent à voir déclarer recevables leurs demandes en exposant :

- que la société P2S2 reconnaît qu'elle a travaillé indifféremment avec chacune d'elles qui font partie du même groupe,

- que c'est la raison pour laquelle, elles avaient formulé certaines demandes de condamnation indistinctement,

- qu'elles ont dissocié leurs demandes par conclusions du 12 janvier 2022, répondant ainsi à l'un des motifs retenus par le tribunal,

- que ces demandes ne sont pas nouvelles puisqu'elles tendent aux mêmes fins si ce n'est que les demandes de condamnations, au lieu d'être sollicitées indifféremment au profit des deux sociétés, le sont individuellement.

Réponse de la cour,

Il est constant qu'après avoir formé des demandes de condamnations à leur profit à toutes deux, la société Casa [X] France et la société Shalimaar China Limited ont, par conclusions du 12 janvier 2022, individualisé leurs demandes.

Il demeure qu'il ne s'agit pas de prétentions nouvelles dans la mesure où ces deux sociétés avaient toutes deux formé ces demandes en première instance, que leurs demandes tendent aux mêmes fins et n'ont consisté en cause d'appel qu'à individualiser les prétentions de chacune d'elles.

En conséquence, l'irrecevabilité soulevée par la société P2S2 sera écartée.

3) Sur les demandes de paiement des factures :

a) sur la facture n° 2017 210 d'un montant de 4.176 € TTC :

Il s'agit d'une facture datée du 15 novembre 2017 émanant de la société Casa [X] portant la référence "marché boîtes imprimées 2015" et détaillée comme suit :

- 1.800 € HT, soit 2.160 € TTC au titre de 6 livraisons supplémentaires,

- 480 € HT, soit 576 € TTC au titre du coût de stockage,

- 1.200 € HT, soit 1.440 €TTC au titre des frais financiers (3 % de 40.000 €) correspondant à la valeur pour six mois de la marchandise totale stockée.

Pour contester devoir cette facture, la société P2S2 fait valoir :

- qu'elle été adressée au mois de juin 2017 à Pierre Hermé [Localité 4] pour un montant de 1.401,60 HKD et payée le 24 juillet 2017,

- que la facture refaite par la société Casa [X] 5 mois plus tard n'est pas justifiée puisque déjà payée et portant le même numéro que la précédente.

Mais il ressort des pièces produites par les appelantes (n° 1, 2, 7 et 14) et de leurs explications non contredites par la société P2S2 que :

- suite à un appel d'offres concernant le marché 2015, la société Shalimaar China Limited (ci-après Shalimaar) a établi un devis du 16 novembre 2014 accepté par la société P2S2 portant sur la production et l'expédition des boîtes à destination pour partie de [Localité 4] en 12 livraisons et pour partie en France en 6 livraisons,

- concernant le stockage en Chine, l'appel d'offres stipulait : "pas de stockage-one shot",

- pour la commande destinée à la France, la société P2S2 a exigé de se faire livrer en plus de fois que prévu,

- la dernière commande n'étant intervenue que le 6 juillet 2016, la société Shalimaar a été contrainte de stocker les marchandises plus de 6 mois supplémentaires par rapport à ce qui avait été convenu,

- par courriel du 21 février 2017, la société Shalimaar a informé la société P2S2 que son usine en Chine ne souhaitait plus garder de fabrication de 2015 en ses stocks et qu'elle avait encore en stock 64 cartons de boîtes initialement prévues pour [Localité 4] ; elle lui suggérait alors de faire partir 20 cartons en France,

- la société P2S2 n'a pas donné suite à sa demande.

La facture en litige ne fait donc pas double emploi avec celle de juin 2017 d'un montant de 1.401,60 HKD qui correspond au paiement des boîtes.

Dans ces conditions, la société Casa [X] est bien fondée à obtenir paiement des sommes facturées, dont les montants ne sont pas en eux-mêmes critiqués par l'intimée.

b) Sur la facture n° 2017 134 d'un montant de 1.116 € :

Il s'agit d'une facture établie par la société Casa [X] le 27 août 2017 pour paiement de 400 boîtes ; elle est ainsi détaillée :

- 580 € HT (696 € TTC) au titre du paiement des boîtes,

- 350 € HT (420 € TTC) au titre du coût du transport vers la France des marchandises initialement destinées à rejoindre [Localité 4].

Les appelantes font valoir :

- que par une dernière livraison, reçue le 29 août 2017, elle a liquidé les stocks qui occupaient l'espace de l'usine chinoise,

- que le 9 février 2018, elle a mis en demeure la société P2S2 de s'acquitter de cette facture, mais n'a pas obtenu satisfaction,

- que contrairement à ce que soutient la société P2S2, la livraison des 400 boîtes est intervenue comme le prouve la lettre de voiture émise par le transporteur Transports Prévost, cosignée par les sociétés Dachser et Scol, cette dernière étant le prestataire de la société P2S2.

La société P2S2 conteste devoir la facture au motif que la marchandise n'a pas été livrée ; elle ajoute que le bon de livraison, qui est communiqué 3 ans après sa demande formulée les 17 novembre et 4 décembre 2017, ne correspond pas à la facture pas plus qu'au bon de commande passé 2,5 mois avant la prétendue livraison concernée.

La cour constate que la société Casa [X] fonde sa demande sur ses pièces n° 8 et 8.1; or la première est un bon de commande du 10 avril 2017 portant en tout sur 2.000 pièces avec comme site d'expédition "Stock chez Fournisseur" et comme site de réception "Scol [Localité 6]", la date de livraison souhaitée étant le 17 avril 2017, la seconde est une lettre de voiture portant les signatures des Transports Prévost, de Dachser et de Scol, toutes les autres mentions étant illisibles.

En cet état, la société Casa [X] ne rapporte pas la preuve que le montant facturé lui est dû.

c) Sur la facture 2017 147 d'un montant de 756 € :

Le 20 décembre 2017, la société Casa [X] a facturé à la société P2S2 la somme de 756 € TTC, détaillée comme suit :

- marchandise oubliée par votre transitaire en Chine fin septembre 2017 : 312 € HT,

- frais de transport express (DHL) : 263 € HT,

- frais de destruction en janvier 2018 : 55 € HT.

Les appelantes font valoir :

- que la société P2S2 a commandé à la société Shalimaar 600 pièces devant être livrées à la société Scol, commande correspondant à des thermoformages oubliés à quai par le transitaire de Pierre Hermé,

- que la commande portait sur un réapprovisionnement de thermos supplémentaires par rapport à ceux initialement prévus au titre du marché de Noël dès mai 2017,

- qu'elles ont procédé à leur envoi et à leur livraison par DHL chez Scol à [Localité 6], mais que cette livraison a été refusée sans motif,

- que la mise en demeure de payer du 9 février 2018 par la société Casa [X] est restée sans effet,

- que la société P2SE ne démontre pas avoir dû acquérir des thermos auprès d'un tiers en raison d'un retard de livraison.

Pour s'opposer au paiement de cette facture, la société P2S2 réplique :

- qu'aucune preuve de livraison n'est versée aux débats,

- que la facture correspond à des thermos non livrés en temps et en heure,

- qu'elle a dû acquérir des thermos en remplacement auprès d'un tiers, raison pour laquelle le bon de commande joint à la facture vise un prix unitaire nul,

- que toutefois, elle est disposée à prendre en charge le coût de destruction des marchandises, soit 55 € HT.

Il ressort des pièces 17,18 et 19 produites par les appelantes les éléments suivants :

- Par bon de commande du 10 novembre 2017, la société P2S2 a commandé à la société Shalimaar 600 "Thermo 20 macarons (boîte initiation Rouge/0r 2017", devant être livrés à Scol [Localité 6], pour un prix mentionné égal à zéro,

- le bordereau établi par DHL montre que cette livraison a été refusée par le destinataire à [Localité 6] le 6 décembre 2017.

La société P2S2 ne prouve en aucune façon avoir dû acquérir des Thermos auprès d'un tiers en raison d'un retard de livraison.

En conséquence, si elle ne doit pas payer le coût des marchandises commandées pour un prix nul, il lui incombe de payer les frais de livraison et de destruction des marchandises, soit 318 € HT outre la TVA.

d) Sur la facture 2017 136 d'un montant de 12.594 € :

Les appelantes font valoir :

- que la société P2S2 reste devoir ce montant sur des marchandises livrées correspondant à des bons de commande 12479 et 12486,

- que le bon de livraison communiqué en pièce 22 prouve la livraison de 26 palettes,

- que l'émission d'une facture de 14.085,07 € est justifiée par la volonté de la société Casa [X] de se faire payer au moins une partie des sommes dues par la société P2S2 alors que sa banque exerçait une forte pression pour que son compte soit alimenté,

- que si la société P2S2 a payé la somme de 14.085,07 € il reste dû un solde de 12.594 €,

- que les mises en demeure de la société Casa [X] des 18 décembre 2017 et 9 février 2018 sont restées vaines.

La société P2S2 objecte ne pas devoir cette facture en précisant :

- qu'une première facture de 26.179 € lui a été adressé, mais que cette facture était erronée en l'absence de livraison d'une partie des marchandises (commandes 12479 et 12486),

- que la société Casa [X] a alors émis une facture rectifiée d'un montant de 14.085,07 € qu'elle lui a adressé le 20 novembre 2017,

- que c'est le montant de cette facture qui figure dans "le décompte définitif établi et accepté par les parties le 7 décembre" et donc réglé dans le cadre du règlement global de 40.316,05 €, selon son tableau sous côte 17.

L'examen des pièces versées aux débats par les parties montre les éléments suivants :

- par bons de commande 12479 et 12486 des 7 et 9 septembre 2017, la société P2S2 a commandé à la société Shalimaar des boîtes illustrées pour les prix respectifs de 5.168,95 TTC € et 5.780,16 € TTC (720 pièces), avec livraison souhaitée le 11 septembre 2017,

- le bon de livraison n° 2017 09-1 émis par la société Casa [X] mentionne les boîtes objet des commandes 12478 et 12486 (960 pièces), soit 6 palettes sur la livraison de 26 palettes,

- suivant lettre de voiture, 26 palettes ont été prises en charge le 15 septembre 2017 et livrées par Dachser au "Stock Pierre Hermé" à [Localité 6] le 18 septembre 2017.

La société P2S2 ne conteste ni la commande, ni la livraison.

Si la société Casa [X] a envoyé une première facture de 26.719 € qui n'est pas produite et en tout état de cause n'est pas en litige, il apparaît :

- qu'elle a ensuite émis une facture 2017 136 R pour un montant de 14.085,07 € correspondant à des commandes 11835 et 12377, les commandes 12479 et 12486 n'y étant pas facturées comme non livrées,

- qu'ensuite elle a émis une autre facture 2017 136 pour réclamer le solde restant dû sur la livraison des commandes 12479 et 12486.

Le tableau établissant un décompte entre les parties (pièce 17 de l'intimée) ne mentionne pas cette dernière facture.

La société P2S2 doit donc payer à la société Casa [X] la somme de 12.594 € restant due.

e) Sur la facture 2018 405 d'un montant de 1.821,16 € :

Cette facture à échéance au 30 juin 2018 porte les mentions "Reliquat marché Noël 2017" ainsi que "Marchandises oubliées en Chine par votre transitaire en septembre dernier" ; pour un montant total de 1517,64 € et de 1.821,16 € TTC, elle détaille comme articles facturés

- Boîtes Rouge Noël 12 macarons ...........749,70 €

- Boîtes Rouge Noël 40 macarons ...........351,94 €

- Thermo 20 macarons .............................416,00 €

Les appelantes font valoir :

- qu'il s'agit de marchandises restées à quai en Chine du fait de la négligence du prestataire mandaté par la société P2S2,

- que la société P2S2 ne démontre pas qu'elles seraient responsables d'un quelconque retard

- qu'elles ont tenté d'inclure les marchandises dans une livraison au titre du solde du marché 2016, mais que la société P2S2 a refusé.

La société P2S2 conteste devoir la facture soutenant que les marchandises ont été livrées avec 9 mois de retard.

S'il apparaît d'un courriel du 27 août 2018 que la société P2S2 a refusé la livraison, les appelantes ne démontrent en aucune façon que le mandataire de la société P2S2 aurait laissé les marchandises à quai en Chine. Dès lors, la société P2S2 est bien fondée à leur opposer un retard important de livraison et un refus des marchandises ; la société Casa [X] sera donc déboutées de sa demande de paiement de cette facture.

4) Sur les demandes de dommages-intérêts au titre du marché 2016 :

Les appelantes soutiennent qu'elles ont dû débourser les montants suivants :

- 1.456,02 € TTC pour frais de stockage,

- 4.308,33 € TTC pour frais de livraison et de transport additionnels,

- 490 € € TTC pour frais de chargement/déchargement,

- 1.423,74 € TTC au titre des frais qu'elle a été contrainte de payer à la société Scol.

Elles exposent :

- que suivant l'état récapitulatif du marché du 24 avril 2016, les sociétés Shalimaar et P2S2 ont convenu que la première vendrait à la seconde une importante quantité de boîtes, thermoformages et papier anti-graisse, les marchandises à destination de la France représentant un chiffre d'affaires de 271.051 € et celles à destination de Hongkong de 426.658,50 €,

- que la société P2S2 n'a versé initialement qu'un acompte de 22.000 €,

- que le tableau (sous sa pièce 50), jamais contesté, intégrait un stockage pendant 12 mois jusqu'à fin juin 2017 ainsi que 12 livraisons à Hongkong (une par mois) et 15 livraisons en France, les livraisons de l'ensemble des marchandises pouvant débuter dès le 28 mai 2016,

- qu'au-delà du mois de juin 2017 et pendant 6 mois, elles ont été contraintes de trouver des solutions de stockage pour les marchandises non livrées,

- que la société Casa [X] a dû payer des frais additionnels de 6.254,35 € à la société Dachser ainsi que la somme de 1.423,74 € à la société Scol,

- que pour importer ces marchandises de Chine, la société Casa [X] a dû avancer une somme supérieure à 100.000 € pour payer ses fournisseurs chinois, alors que le groupe Shalimaar n'avait pas encore été payé.

La société P2S2 s'oppose à ces demandes en faisant valoir :

- que leurs montants ne lui ont jamais été facturés et qu'elle ne les a jamais acceptés,

- que ces frais correspondent à des factures de la société Dascher pour 6.254,35 € et de la société Scol pour 1.423,74 € et que la société Casa [X] ne prouve pas les avoir payées.

Il convient de retenir que la société P2S2 ne conteste en aucune façon le tableau produit en pièce 50 par les appelantes qui prévoyait un stockage pendant 12 mois jusque fin juin 2017 ; les appelantes démontrent avoir dû stocker les marchandises de juillet à décembre 2017 en produisant les factures de la société Scol pour un montant de 1.423,74 €.

Par ailleurs, la société Dascher a facturé à la société Casa [X] la somme totale de 6.254,35 € pour différents frais en juillet, août et décembre 2017 ainsi qu'en mars 2018.

La société P2 S2 ne prétend pas qu'il s'agirait de frais qui auraient été engagés pour des produits autres que ceux du marché de 2016. C'est en vain qu'elle met en doute le non-règlement des factures par la société Casa [X], les sociétés Dachser et Scol, à les supposer non payées, n'ayant pas renoncé à obtenir le règlement de leurs factures.

La société P2S2, qui a manqué à ses obligations contractuelles, devra donc payer les sommes réclamées, à titre de dommages-intérêts.

5) Sur les demandes concernant le marché 2017 :

a) Les appelantes contestent d'abord la compensation opérée par la société P2S2 au titre de deux factures qu'elle a établies : l'une n° 2017-11-002 du 16 novembre 2017 d'un montant de 28.791,74 € pour affrétement par voie aérienne de sa marchandise, l'autre n° 2017-11-022 du 30 novembre 2017 d'un montant de 9.936 € pour le conditionnement de thermoformages dans les boîtes.

Elles font valoir pour l'essentiel :

- que la société P2S2 ne versait que des acomptes dérisoires et que la société Shalimaar s'est trouvée dans une situation délicate lorsque ses propres fournisseurs lui ont demandé de payer la totalité de la marchandise du marché de Noël avant livraison,

- que les conteneurs ont été bloqués jusqu'à ce que M. [X] trouve la somme de 75.000 €,

- que c'est la société P2S2 qui s'est chargée du transport aérien et que la société Casa [X] n'a accepté de prendre à sa charge que le transport de 30 % d'un conteneur,

- que le placement des thermos dans les boîtes ne faisait pas partie du devis initial.

- qu'elles n'ont jamais accepté de compensation avec leurs propres factures.

La société P2S2 réplique :

- que la société [X] a accepté, par courriel du 20 novembre 2017, d'assumer les frais du transport aérien,

- que conformément au cahier des charges, chaque boîte devait contenir les thermos nécessaires à la conservation des produits, qu'une grande partie des boîtes commandées les 18 octobre et 2 novembre 2017 ne les contenaient pas et qu'elle a dû confier leur placement à la société Scol pour le prix de 9.336 €.

Il ressort des pièces produites que :

- par courriel du 20 novembre 2017, M. [X] a écrit à la société P2S2 : "même si nous estimons que l'expédition du conteneur 2 par avion vient en large partie de la gestion hasardeuse de nos containers en Asie par votre prestataire logistique, nous avons pris la décision d'en assumer tous les frais",

- par courriel postérieur du 4 décembre 2017, M. [X] a écrit : "nous contestons les déductions de votre propre facture pour un montant de 28.791,74 € et 9.336 €".

Dans ce dernier courriel, M. [X] n'a aucunement indiqué les motifs de sa contestation.

Les appelantes précisent elles-mêmes dans leurs conclusions que les conteneurs étaient bloqués du fait qu'elles n'étaient pas en mesure de payer leurs propres fournisseurs.

Les échanges de courriels entre les parties des 26 et 27 septembre 2017 révèlent :

- d'une part qu'un container étant bloqué en douane, la société P2S2 a souhaité l'acheminement de ses produits par voie aérienne, d'abord à concurrence de 30 % puis en totalité

- d'autre part, que les thermos devaient être fournis avec les boîtes lors du transport aérien.

En raison de l'absence de fourniture des thermos dans les boîtes, la société P2S2 a dû confier leur conditionnement à la société Scol pour un coût de 9.333 €.

La société Casa [X] qui doit payer les deux factures de fret aérien et de conditionnement est mal fondée à s'opposer à la compensation avec ses propres factures.

b) La société Casa [X] demande, à titre de dommages-intérêts, la somme de 479,61 € TTC pour frais de stockage qu'elle a dû débourser et 90 € pour frais de destruction des marchandises.

Elle se réfère à sa facture n° 2018 405 d'un montant de 1.821,16 € TTC correspondant selon elle à des marchandises restées à quai en Chine et jamais demandées par la société P2S2, pour soutenir que confrontée au problème de stockage, le groupe Shalimaar a pris l'initiative de les rapatrier en France et que la société P2S2 a refusé leur livraison ; elle ajoute que par "courriel du 7 décembre à 10h24", la société P2S2 s'était engagée à payer les stocks non réclamés.

Le courriel cité par la société Casa [X] ne renferme pas un engagement clair et précis de payer le stock dont elle a refusé la livraison.

La société P2S2 n'ayant pas engagé sa responsabilité en refusant les marchandises facturées à hauteur de 1.821,16 € TTC et livrées avec un retard important, les demandes de dommages-intérêts de la société Casa [X] seront rejetées.

6) Sur la somme de 1.545 € demandée à titre de pénalités de retard :

Le 20 décembre 2017, la société Casa [X] a établi une facture n° 2017 146 de 1.545 € pour intérêts de retard sur le règlement des factures à échéance au 31 octobre 2017, réglées le 20 décembre 2017 (factures 132 à 141 + facture 208).

La société P2S2 se borne à répondre que les retards dans les paiements sont entièrement imputables aux manquements de la société Casa [X], sans indiquer quelles commandes ont précisément été livrées avec retard, ni contester le décompte des intérêts calculés par les appelantes.

En conséquence, la société P2S2 devra payer la somme réclamée au titre des pénalités de retard.

7) Sur la demande de paiement de la somme de 11.399,01 € pour menaces de rupture des relations commerciales

Les appelantes invoquent les dispositions de l'ancien article L. 442-6-1 4° du code de commerce aux termes duquel engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé, le fait par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers, d'obtenir ou tenter d'obtenir, sous la menace d'une rupture totale ou partielle des relations commerciales, des conditions manifestement abusives concernant les prix, les délais de paiement, les modalités de paiement ou les services ne relevant pas des obligations d'achat et de vente.

Elles font valoir, en fait, d'abord :

- que la société Casa [X] s'était engagée à prendre en charge le transport de Mme [H] (employée de la société P2S2) mais que cette dernière a exigé de voyager en étant surclassée,

- qu'en réponse au courriel de M. [X] lui faisant remarquer que le fait de réaliser un business important avec sa société ne l'autorisait pas à faire n'importe quoi en termes de gestion, Mme [H] lui a répondu le 28 mars 2016 : "A vous de voir, sans celà d'autres fournisseurs compétents font la queue derrière vous pour être sélectionné à cet appel d'offre",

- que les manœuvres de Mme [H] tendant à obtenir un billet d'avion avoisinant les 3.000 € constituent des menaces pour obtenir des conditions contractuelles abusives, ce qui justifie la somme de 2.899,01 € demandée à titre de dommages-intérêts.

Pour réclamer en sus la somme de 8.500 €, à titre de dommages-intérêts, elles ajoutent :

- que par courriel du 19 décembre 2015, le groupe Shalimaar avait alerté Mme [H] sur le fait qu'une fois encore, il était contraint d'avancer des fonds à ses fournisseurs alors que la société P2S2 restait lui devoir la somme de 8.500 € pour des factures échues impayées,

- que Mme [H] lui a répliqué, par courriel du même jour : "Il est hors de question que le lancement de production dépende de cela ; donc soit vous lancer la prod et vous modifier le contrat en écrivant précisément les dates et lieu de mad en Chine et France et non 15 mars fob Yantian et c'est une question de confiance au niveau du paiement, soit cela ne peut se faire. J'ai l'habitude de travailler avec des fournisseurs qui respectent leur date sans pression permanente",

- que Mme [H] sous-entendait qu'elle pouvait mettre brutalement un terme au marché et qu'elle avait à disposition des fournisseurs plus enclins à lancer des productions importantes sans être payés d'avance.

La société P2S2 conclut au rejet de la demande en répliquant :

- que ne sont pas réunies les conditions exigées par l'article visé, à savoir l'existence de relations commerciales établies et la tentative d'obtention, sous la menace de rupture, de conditions manifestement abusives,

- que lors de l'envoi des courriels de Mme [H] en avril 2016, c'est à dire au moment de l'appel d'offres, il n'existait pas de relations commerciales,

- que les demandes de Mme [H] ne sont que de simples conditions posées à tous les fournisseurs répondant à l'appel d'offres et ne sont pas abusives,

- que la société Casa [X] ne peut valablement se prévaloir de prétendues menaces de rupture en avril 2015, alors que la société P2S2 a fait appel à elle jusqu'en 2018.

La cour retient que l'exigence d'un voyage en classe affaires dans le cadre d'une procédure d'appel d'offres ne constitue pas des menaces en vue de l'obtention de conditions contractuelles abusives. Le rappel de l'existence de fournisseurs respectant leur date sans pression permanente ne constitue pas non plus de telles menaces.

En conséquence, la société Casa [X] sera déboutée de sa demande de dommages-intérêts.

8) Sur les demandes de dommages-intérêts pour rupture brutale de la relation commerciale établie :

Moyens des parties

Se fondant sur les dispositions de l'article L. 442-6 I 5° ancien du code de commerce, la société Casa [X] demande la somme de 100.000 €, à titre de dommages-intérêts, tandis que la société Shalimaar demande la somme de 50.000 €, à titre de dommages-intérêts.

Les appelantes soutiennent :

- qu'elles ont entretenu des relations commerciales avec la société P2S2 de 2007 à 2011 et de 2014 à 2018,

- qu'à partir de 2007, la société P2S2 a commandé progressivement de plus en plus de produits à la société Shalimaar, que ses commandes représentaient déjà 50 % du chiffre d'affaires total de cette société, puis 70 % en 2015, puis 80 % en 2016 et 2017,

- que c'est sans information préalable ni préavis que la société P2S2 a cessé de confier des commandes à la société Casa [X] qui n'a donc pu les répercuter à la société Shalimaar,

- que la qualification de relations commerciales établies n'est pas conditionnée par l'existence d'un échange permanent et continu entre les parties et qu'une succession de contrats ponctuels peut être suffisante pour caractériser une relation commerciale établie,

- que le texte du code de commerce n'exclut nullement les appels d'offres de la rupture brutale des relations commerciales et que le contraire aboutirait à considérer que les entreprises ont un blanc-seing dans la manière dont elles régissent leurs relations avec les fournisseurs,

- que le Groupe Shalimaar ne pouvait démarcher d'autres clients, sa trésorerie ayant été asséchée par la société P2S2,

- que vu les relations commerciales établies de 2007 à 2018, c'est un préavis de 12 mois qui aurait dû être accordé,

- que le chiffre d'affaires réalisé par la société Casa [X] ayant été de 315.376,55 € HT et la marge brute étant de l'ordre de 25 %, soit 78.844,14 € son préjudice direct financier est égal à cette somme,

- que le versement d'une somme complémentaire de 21.558,86 € est justifié pour tenir compte des difficultés importantes rencontrées avec sa banque et l'administration fiscale,

- que la société Shalimaar a nécessairement subi un préjudice dès lors qu'après avoir travaillé seule avec la société P2S2 de 2007 à 2012, puis par l'intermédiaire de la société Casa [X], la rupture brutale des relations commerciales l'a privée des commandes dont elle bénéficiait jusqu'en 2017,

- que de plus le comportement de la société P2S2 a altéré la réputation de la société Shalimaar en Chine et lui a fait perdre ses fournisseurs.

Pour s'opposer aux prétentions des appelantes, la société P2S2 fait valoir :

- que la société Casa [X], créée en 2012, n'a pu entretenir des relations avec elle à compter de 2007,

- qu'entre 2007 et 2011, elle n'a passé que des commandes ponctuelles et insignifiantes à la société Shalimaar,

- qu'en 2012 et 2013, elle n'a entretenu aucune relation commerciale avec la société Shalimaar, ni avec la société Casa [X],

- qu'à compter de 2015, la relation commerciale avec la société Casa [X] est devenue significative, mais s'organisait par le jeu d'appels d'offres, ce qui exclut qu'elle puisse être considérée comme établie,

- qu'en 2016 et 2017, le courant d'affaires significatif ne concernerait, selon les appelantes, que la société Casa [X].

- que pour le marché de noël 2018, l'offre de la société Casa [X] n'a pas été retenue en raison des prix proposés.

L'intimée conteste aussi les préjudices allégués par chacune des appelantes.

Réponse de la cour,

Ceci exposé, il convient de constater que si la société P2S2 a passé quelques commandes à la société Shalimar entre 2007 et 2011, il n'a plus existé aucune relation commerciale avec cette société, ni avec la société Casa [X] au cours des années 2012 et 2013.

Les appelantes, qui communiquent elles-mêmes sous leur pièce n° 11 un appel d'offres de la société P2S2 en 2014 pour des boîtes illustrées, ne contestent en aucune façon qu'à compter de cette année, les relations commerciales avec la société P2S2 se sont inscrites dans le cadre d'appels d'offres.

La société P2S2 justifie quant à elle par sa pièce n°1 de l'analyse de l'appel d'offres pour le marché de Noël 2017, qui a été ensuite remporté par les appelantes, et par sa pièce n° 21 qu'un appel d'offres a eu lieu pour le marché de Noël 2018 à laquelle ont participé les appelantes. Ces dernières ne contestent pas avoir vu leur candidature écartée après cette mise en concurrence.

La relation commerciale, pour être établie au sens de l'article L. 442-6 I 5° ancien du code de commerce, doit présenter un caractère suivi, stable et habituel, le partenaire commercial devant pouvoir raisonnablement anticiper pour l'avenir une continuité du flux d'affaires; en l'espèce si les relations ont présenté une durée significative de 2014 à 2017, elles ne revêtaient pas pour autant la stabilité requise compte tenu du recours à la procédure d'appel d'offres; en raison du recours à cette procédure, la relation commerciale qui présentait un caractère précaire, ne peut être qualifiée d'établie.

En conséquence, les demandes de dommages-intérêts de chacune des appelantes seront rejetées.

9) Sur les autres demandes des appelantes :

Les sommes dont la société P2S2 reste redevables produiront intérêts au taux légal à compter du jugement, soit du 12 avril 2021.

La capitalisation des intérêts sera ordonnée dans les conditions prévues par l'article 1343-2 du code civil.

Il n'y a pas lieu d'ordonner la publication du présent arrêt.

Chacune des parties qui succombe partiellement en ses demandes gardera la charge de ses dépens d'appel.

Vu les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, aucune indemnité de ce chef ne sera allouée aux appelantes ou à l'intimée.

PAR CES MOTIFS

Déclare recevables les conclusions de la société Pâtisseries Paris Saint Sulpice déposées et notifiées le 16 septembre 2022,

Déclare recevables les demandes des appelantes tendant à la condamnation de la société Pâtisseries Paris Saint Sulpice à payer :

- à la société Casa [X] France les sommes de 1.545 € pour pénalités de retard, 11.399,01 € pour menaces de rupture brutale des relations commerciales et 100.000 €, à titre de dommages-intérêts, pour rupture brutale des relations commerciales ;

- à la société Shalimaar China Limited la somme de 50.000 €, à titre de dommages-intérêts, pour rupture brutale des relations commerciales ;

Infirme le jugement seulement en ce qu'il a :

- débouté les sociétés Casa [X] France et Shalimaar China Limited de leurs demandes de paiement des factures n° 2017 210, n° 2017 147 et n° 2017 136 ;

- dit n'y avoir lieu de se prononcer sur la compensation ;

- débouté les sociétés Casa [X] France et Shalimaar China Limited de leurs demandes de paiement des sommes de 1.456,02 € pour frais de stockage, 4.308,33 € pour frais de transport et de livraison additionnels, 490 € pour frais de chargement/déchargement et 1.423,74 € pour frais payés à la société Scol ;

Statuant à nouveau sur ces chefs et y ajoutant,

Condamne la société Pâtisseries Paris Saint Sulpice à payer à la société Casa [X] France :

- la somme de 4.176 € TTC au titre de la facture n° 2017 210 ;

- la somme de 318 € HT, outre la TVA, au titre de la facture n° 2017 147 ;

- la somme de 12.594 € TTC au titre de la facture n° 2017 136 ;

- les sommes de 1.456,02 € TTC, 4.308,33 € TTC, 490 € et 1.423,74 € TTC, à titre de dommages-intérêts, au titre du marché 2016 ;

Dit que ces sommes produiront intérêts au taux légal à compter du 12 avril 2021, date du jugement ;

Condamne la société Pâtisseries Paris Saint Sulpice à payer à la société Casa [X] la somme de 1.545 € pour pénalités de retard ;

Ordonne la capitalisation des intérêts dans les conditions prévues par l'article 1343-2 du code civil ;

Déboute la société Casa [X] France et la société Shalimaar China Limite de toutes leurs autres demandes ;

Dit que chacune des parties conservera la charge de ses dépens d'appel et déboute chacune d'elles de ses demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Rejette toute autre demande.