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Décisions

CA Chambéry, 1re ch., 4 avril 2024, n° 23/00619

CHAMBÉRY

Ordonnance

Autre

PARTIES

Demandeur :

CH.ART (SAS)

Défendeur :

Vigny Depierre Assurances (SARL), Axa France Iard (SA), Helmett (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Pirat

Avocats :

Me Fillard, SELARL Vailly Becker & Associés, SELARL Lexavoue Grenoble - Chambery, SELAS Pechenard et Associés, SELAS RTA Avocats, SELARL Lexavoue Lyon

Chambéry, 1ère ch., du 22 mars 2023, n° …

22 mars 2023

Faits et Procédure

Saisi les 20 et 25 septembre 2019 par M. [M] [G], pour concurrence déloyale, le tribunal de commerce d'Annecy a, suivant jugement rendu le 22 mars 2023 :

- Déclaré recevable l'action de M. [M] [G] et de la Compagnie Axa France Iard à l'encontre de la société V2-Courtage ;

- Dit que conjointement la société CH.ART, la société V2-Courtage, Mme [O] [V], et M. [F] [P] ont commis des actes de concurrence déloyale ou de dénigrement à l'égard de M. [M] [G];

- Condamné in solidum à ce titre la société CH.ART, la société V2-Courtage, Mme [O] [V], et M. [F] [P] à payer à M. [M] [G] la somme de 66 027 euros en réparation de son préjudice ;

- Condamné in solidum la société CH.ART, la société V2-Courtage, Mme [O] [V] et M. [F] [P] à payer à la compagnie Axa France Iard en réparation de son préjudice la somme de 8 518 euros, outre intérêts au taux légal à compter du 8 juillet 2020 avec capitalisation des intérêts par année entière ;

- Condamné in solidum Mme [O] [V], M. [F] [P], la société V2-Courtage, et la société CH.ART à payer à M. [M] [G] la somme de 10 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamné in solidum Mme [O] [V], M. [F] [P], la société V2-Courtage, et la société CH.ART à payer à la compagnie Axa France Iard la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamné in solidum Mme [O] [V], M. [F] [P], la société V2-Courtage, et la société CH.ART aux dépens issus de la procédure formée par M. [M] [G] à leur encontre, y compris les frais d'huissier et d'expertise informatique se rattachant aux contrats ;

- Condamné in solidum Mme [O] [V], M. [F] [P], la société V2-Courtage, et la société CH.ART aux dépens issus de l'intervention de la compagnie Axa France Iard à leur encontre, avec distraction au profit de la société Laffly et Associés Lexavoue Lyon ;

Mme [O] [V], M. [F] [P] et la SAS CH.ART ont fait appel le 14 avril 2023 de cette décision (n° DA 23/00609 et n° RG 23/00619) puis, les 17 et 19 juillet 2023, ont fait assigner M. [M] [G] et la société Axa France Iard, en référé devant Mme la première présidente de la cour d'appel de Chambéry afin de voir, en application des articles 515, 521 et 524 du code de procédure civile, arrêter l'exécution provisoire de la décision.

Par décision de référé en date du 5 décembre 202, la première présidente de la cour d'appel de Chambéry :

- déboutait M. [M] [G] de son exception de nullité des actes introductifs d'instance ;

- déboutait Mme [O] [V], M. [F] [P] et à la société CH.ART de leur demande d'arrêt de l'exécution provisoire ;

- condamnait in solidum Mme [O] [V], M. [F] [P] et la société CH.ART à verser à la société Axa France Iard et M. [M] [G] chacun la somme de 1 000 euros et au paiement des dépens.

Écritures sur l'incident,

Par écritures d'incident en date du 11 octobre 2023 et récapitulatives du 3 janvier 2024, régulièrement communiquées par voie électronique, M. [M] [G] sollicite de la conseillère de la mise en état de :

- in limine litis de prononcer la nullité de la déclaration d'appel du 14 avril 2023 ;

- à titre subsidiaire, déclarer irrecevables les conclusions d'appelants signifiées le 13 juillet 2023 ;

- à titre plus subsidiaire, ordonner la radiation de l'affaire ;

- en tout état de cause, condamner in solidum Mme [O] [V], M. [F] [P] et à la société CH.ART à lui payer une indemnité procédurale de 5 000 euros et les dépens.

Au soutien de ces demandes, M. [M] [G] fait valoir que :

la déclaration d'appel comporte pour Mme [O] [V], M. [F] [P] une adresse inexacte, n'occupant plus le domicile indiqué depuis plusieurs années puisqu'ils l'ont revendu le 4 décembre 2020. Cette mention erronée est de nature à lui causer grief puisqu'elle le prive de la possibilité de faire exécuter la décision à intervenir;

- les conclusions d'appelants sont irrecevables dès lors qu'elles mentionnent un domicile inexact pour Mme [O] [V], M. [F] [P] et leur déclaration d'appel doit être déclarée caduque ;

- les appelants ne justifient se trouver dans une situation ne leur permettant pas d'exécuter la décision.

Par écritures d'incident en date du10 janvier 2024, la société Vigny Depierre Assurances s'associait aux demandes de M. [M] [G].

La société Axa France Iard ne concluait pas sur l'incident.

Par écritures récapitulatives en réponse sur incident en date du 10 janvier 2014, régulièrement communiquées par voie électronique, Mme [O] [V], M. [F] [P] et à la société CH.ART sollicitent de la conseillère de la mise en état de :

- débouter M. [M] [G] de sa demande tendant à voir déclarer nulle et caduque la déclaration d'appel,

- octroyer un délai d'un an à Mme [O] [V], M. [F] [P] et à la société CH.ART pour exécuter le   jugement dont appel ;

- ordonner un sursis à statuer par conséquence et débouter M. [M] [G] de sa demande de radiation ;

- débouter M. [M] [G] et la société la société Axa France Iard de leurs demandes et condamner M. [M] [G] à leur payer une indemnité procédurale de 6 000 euros, outre les dépens.

Au soutien de leurs prétentions, Mme [O] [V], M. [F] [P] et la société CH.ART font valoir que :

- la mention erronée sur l'adresse est une nullité de forme pouvant être régularisée avant que le juge ne statue. Cette mention est rectifiée par leurs écritures d'incident et M. [M] [G] n'ignorait pas leur nouvelle adresse de sorte qu'il n'existe aucun grief ;

- ils ont besoin d'un délai pour exécuter le jugement, étant dans l'obligation de procéder à une vente immobilière.

Motifs et Décision,

- Sur la nullité de la déclaration d'appel,

Aux termes des articles 901 et 54 du code de procédure civile, la déclaration d'appel doit comporter l'adresse de l'appelant, à peine de nullité. Il s'agit d'une nullité d'un acte de procédure pour vice de forme

L'article 114 du même code énonce : « aucun acte de procédure ne peut être déclaré nul pour vice de forme si la nullité n'en est pas expressément prévue par la loi, sauf en cas d'inobservation d'une formalité substantielle ou d'ordre public.

La nullité ne peut être prononcée qu'à charge pour l'adversaire qui l'invoque de prouver le grief que lui cause l'irrégularité, même lorsqu'il s'agit d'une formalité substantielle ou d'ordre public ».

L'article 115 du même code prévoit « la nullité est couverte par la régularisation ultérieure de l'acte si aucune forclusion n'est intervenue et si la régularisation ne laisse subsister aucun grief ».

La déclaration d'appel effectuée par Mme [O] [V], M. [F] [P] et la société CH.ART contient pour les deux premiers appelants une adresse inexacte soit [Adresse 5] [Localité 10] alors qu'il n'est pas contesté qu'ils ne résident plus à cette adresse depuis fin 2020.

Mme [O] [V], M. [F] [P] n'ont pas régularisé la déclaration d'appel avant l'expiration du délai pour interjeter appel soit le 4 mai 2023. En effet, le jugement leur a été signifié régulièrement à étude par exploit d'huissier en date du 4 avril 2023 et ils ont régularisé l'irrégularité relative à leur adresse par écritures responsives sur incident en date du 7 décembre 2023.

Cependant, il convient de se placer en premier lieu au moment de la déclaration d'appel pour déterminer si un grief existait. Or, M. [M] [G] ne démontre pas l'existence d'un grief pouvant résulter du fait que l'inexactitude de l'adresse des appelants était de nature à nuire à l'exécution du jugement ou de l'arrêt à intervenir.

En effet, la signification du jugement entrepris a déjà été effectuée à l'adresse actuelle de Mme [O] [V], M. [F] [P], comme mentionné sur les actes de signification ; les décomptes adressés aux intéressés par l'huissier pour le paiement des sommes dues à M. [M] [G] en date du 1er septembre 2023 comportent leur nouvelle adresse ; la dénonciation de la saisie attribution en date du 15 septembre 2023 la mentionne également outre le procès-verbal de saisie attribution en date du 7 septembre 2023.

Ainsi, l'acte d'appel n'encourt pas la nullité dès lors qu'au moment de la commission de l'irrégularité (mention d'une adresse erronée), l'intimé connaissait déjà la nouvelle adresse des appelants et qu'il ne démontre dès lors pas l'existence d'un grief.

Sur la fin de non-recevoir tirée de l'irrecevabilité des premières conclusions d'appelants et la caducité de la déclaration d'appel

Le conseiller de la mise en état est actuellement compétent pour statuer sur une fin de non-recevoir qui concerne la procédure d'appel si sa décision n'est pas de nature à remettre en cause le jugement dont appel.

En application de l'article 961 du code de procédure civile, les conclusions des parties doivent à peine d'irrecevabilité, indiquer pour les personnes physiques leur domicile réel. Cette fin de non-recevoir peut être régularisée jusqu'à la clôture de la mise en état. S'agissant d'une fin de non-recevoir, l'existence d'un grief n'a pas être démontrée.

Mme [O] [V], M. [F] [P] ont indiqué leur nouveau domicile dans leurs écritures d'incident en date du 7 décembre 2023. La fin de non-recevoir a donc été régularisée.

M. [M] [G] soutient en se fondant sur la jurisprudence de la Cour de cassation en date du 13 janvier 2022 pourvoi 20-11081 que les appelants doivent justifier de l'effectivité de leur domicile allégué. Cette effectivité est parfaitement démontrée par les actes auxquels M. [M] [G] a lui-même procédé depuis avril 2023 et cette nouvelle adresse figure sur l'avis d'imposition des intéressés de 2022 et la fiche de salaire de Mme [V] de juin 2023.

Ainsi, la fin de non-recevoir sera rejetée.

Sur la radiation,

L'ancien article 526 al 1 et 2, applicable à la présente procédure introduite en première instance avant l'entrée en vigueur du décret du 19 décembre 2019, dispose que :

Lorsque l'exécution provisoire est de droit ou a été ordonnée, le premier président ou, dès qu'il est saisi, le conseiller de la mise en état peut, en cas d'appel, décider, à la demande de l'intimé et après avoir recueilli les observations des parties, la radiation du rôle de l'affaire lorsque l'appelant ne justifie pas avoir exécuté la décision frappée d'appel ou avoir procédé à la consignation autorisée dans les conditions prévues à l'article 521, à moins qu'il lui apparaisse que l'exécution serait de nature à entraîner des conséquences manifestement excessives ou que l'appelant est dans l'impossibilité d'exécuter la décision.

La demande de l'intimé doit, à peine d'irrecevabilité prononcée d'office, être présentée avant l'expiration des délais prescrits aux articles 905-2,909,910 et 911.

Le caractère manifestement excessif des conséquences de l'exécution provisoire doit s'apprécier, quel que soit le montant de la condamnation, exclusivement, au regard de la situation du débiteur, compte tenu de ses facultés, ou des facultés de remboursement du créancier (cass 2ème civ 12-11-1997 n° 95.20280).

La société Ch.Art a eu effectivement, au vu du rapport de gestion, un résultat déficitaire au 31 mai 2022, date de clôture de son bilan et a été mise en sommeil pendant deux ans à compter du 31 janvier 2023. Mais Mme [O] [V], M. [F] [P] ont déclaré pour les revenus 2022 la somme de 62 892 euros au titre de leurs salaires, mais aussi des revenus fonciers et ils n'ont pas contesté posséder des biens immobiliers et avoir perçu une forte somme à hauteur de plus de 450 000 euros en 2017, comme mentionné dans les écritures adverses et reprises par la première présidente en référé.

En conséquence, Mme [O] [V], M. [F] [P] et à la société CH.ART ne rapportent pas la preuve d'être dans l'impossibilité d'exécuter la décision ou que cette exécution entraînerait des conséquences excessives.

Le conseiller de la mise en état ne dispose pas des moyens d'aménagement de l'exécution de la décision entreprise (délais, garantie, consignation) lorsqu'il statue sur une demande de radiation. Dès lors, la demande de Mme [O] [V], M. [F] [P] tendant à l'obtention de délai sera rejetée.

En conséquence, il y a lieu d'ordonner la radiation de l'affaire du rôle.

Mme [O] [V], M. [F] [P] et à la société CH.ART seront condamnés in solidum aux dépens. L'équité commande de faire droit à la demande d'indemnité procédurale de M. [M] [G] à hauteur de 800 euros.

Par ces motifs,

Nous, Hélène Pirat, Présidente de la première chambre civile, conseillère de la mise en état, statuant publiquement, par ordonnance contradictoire, mise à disposition au greffe,

Déboutons M. [M] [G] et la société Vigny Depierre Assurances de l'exception de nullité de la déclaration d'appel et de la fin de non-recevoir tirée de l'irrecevabilité des conclusions d'appelant de nature à entraîner la caducité de l'appel,

Ordonnons la radiation de l'instance et son retrait du rang des affaires en cours, pour inexécution de la décision entreprise assortie de l'exécution provisoire,

Rappelons qu'en application de l'article 383 du code de procédure civile, l'affaire ne pourra être rétablie que sur justification de l'accomplissement des diligences ci-dessus,

Déboutons Mme [O] [V], M. [F] [P] et la société CH.ART de l'ensemble de leurs prétentions,

Condamnons Mme [O] [V], M. [F] [P] et la société CH.ART in solidum aux dépens de l'incdent,

Condamnons Mme [O] [V], M. [F] [P] et la société CH.ART in solidum à payer à M. [M] [G] une indemnité procédurale de 800 euros.