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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 5, 4 avril 2024, n° 21/05985

PARIS

Arrêt

Infirmation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Renard

Conseillers :

Mme Soudry, Mme Prigent

Avocats :

Me Carbuccia, Me Pavon-Grangier

T. com. Paris, 13e ch., du 11 janv. 2021…

11 janvier 2021

EXPOSE DU LITIGE

Mme [C] [G] est styliste et dessinatrice de mode.

La société [J] [K] Import Export ([J] [K]) est spécialisée dans le secteur d'activité du commerce de gros d'habillement, de chaussures et fait fabriquer des vêtements de prêt à porter féminin sous la marque [J] [K] qu'elle revend soit au sein de ses boutiques en propre, soit par le biais de multimarques.

Mme [G] a collaboré avec la société [J] [K] à partir de 1987, sur la création des collections été/hiver de prêt à porter féminin dont elle suivait également la fabrication en Inde.

En 2011, Mme [G] a créé la société [C][G] & Co pour facturer une partie de ses prestations.

Par courrier du 17 juillet 2019, la société [J] [K] a informé Mme [G] et la société [C][G] & Co qu'elle résiliait le contrat de prestations de service compte tenu de difficultés économiques et notifiait à chacune de ces deux parties un préavis de 6 mois.

Mme [G] et la société [C][G] & Co ont assigné la société [J] [K] par acte d'huissier de justice du 7 octobre 2020 en indemnisation sur le fondement de la rupture brutale des relations commerciales, estimant que les deux chèques de 16 000 euros émis par la société [J] [K] ne compensaient pas le préjudice subi suite à la rupture des relations commerciales.

Par jugement du 11 janvier 2021, le tribunal de commerce de Paris a :

- Condamné la société [J] [K] à payer à :

o Mme [C] [G] la somme de 27 000,32 euros d'indemnité au titre de la rupture brutale de la relation commerciale et débouté Mme [C] [G] du surplus de sa demande à ce titre,

o la société [C][G] & Co la somme de 5 333,66 euros d'indemnité au titre de la rupture brutale de la relation commerciale et débouté la société [C][G] & Co du surplus de sa demande à ce titre,

- Débouté les demanderesses de leur demande de publication du présent jugement,

- Condamné la société [J] [K] à payer à chacune des demanderesses la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- Rejeté comme inopérantes ou mal fondées toutes conclusions plus amples ou contraires au présent jugement et en a débouté respectivement les parties,

- Ordonné l'exécution provisoire du présent dispositif assortie d'une constitution de garantie pour la somme de 15 000 euros de la part de Mme [G],

- Condamné la société [J] [K] aux dépens.

Par déclaration du 29 mars 2021, Mme [C] [G] et la société [C][G] & Co ont interjeté appel du jugement en ce qu'il a :

- Débouté les demanderesses de leur demande de publication du présent jugement,

- Rejeté comme inopérantes ou mal fondées toutes conclusions plus amples ou contraires au présent jugement et en a débouté respectivement les parties,

- Ordonné l'exécution provisoire du présent dispositif assortie d'une constitution de garantie pour la somme de 15 000 euros de la part de Mme [C] [G].

Par ses dernières conclusions notifiées le 22 novembre 2023, Mme [C] [G] et la société NB & Co demandent, au visa des articles L. 442-1 et L. 442-4 du code de commerce, de :

- Juger les appelantes recevables et bien fondées en leur appel,

- Débouter la société [J] [K] de ses demandes,

- Infirmer le jugement du 11 janvier 2021 du tribunal de commerce de Paris

* en ce qu'il a limité la condamnation de la société [J] [K] à l'indemnisation des appelantes de 6 mois de préavis au titre de la rupture brutale de la relation commerciale, les déboutant du surplus de leur demande à ce titre,

* en ce qu'il a débouté les appelantes de leur demande de publication du jugement,

Statuant à nouveau, ajoutant aux condamnations prononcées par le tribunal de commerce

- Condamner la société [J] [K] à payer à Mme [C] [G] la somme de 116 991,68 euros à titre d'indemnité de préavis, avec intérêts à compter de l'assignation du 7 octobre 2020,

- Ordonner que les 15 000 euros consignés à la Caisse des Dépôts et Consignations en exécution du jugement infirmé, et les intérêts afférents, soient versés à Mme [G],

- Condamner la société [J] [K] à payer à [C][G] & Co la somme de 45 608,34 euros, à titre d'indemnité de préavis, avec intérêts à compter de l'assignation du 7 octobre 2020,

- Condamner la société [J] [K] à publier à ses frais la décision à intervenir dans un quotidien national tel "Les Echos" ou "le Monde", sous un mois à compter de la signification, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, et à en justifier auprès du conseil des appelantes,

- Condamner la société [J] [K] à payer la somme de 5000 euros à chacune des demanderesses, au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

Par ses dernières conclusions notifiées le 27 septembre 2021, la société [J] [K] demande, au visa des articles 57, 562 et 901 du code de procédure civile, L. 442-1 et L. 442-4 du code de commerce, et 414-1 du code de procédure civile, de :

In limine litis

- Constater et juger que la Cour n'est saisie d'aucune demande relative aux chefs du jugement du 11 janvier 2021 ayant :

- Condamné la société [J] [K] Import à payer à :

* Mme [C] [G] la somme de 27 000,32 euros d'indemnité au titre de la rupture brutale de la relation commerciale et débouté Mme [C] [G] du surplus de sa demande à ce titre,

* La société [C][G] & Co la somme de 5 333,66 euros d'indemnité au titre de la rupture brutale de la relation commerciale et débouté la société [C][G] & Co du surplus de sa demande à ce titre.

En conséquence, il est demandé à la cour, à titre principal

- Recevoir la société [J] [K] en ses écritures, et l'y disant bien fondée,

- Confirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Paris en date du 11 janvier 2021 en ce qu'il a :

* Débouté Mme [C] [G] et la société [C][G] & Co de leur demande de publication du présent jugement,

* Ordonné l'exécution provisoire du présent dispositif assortie d'une constitution de garantie pour la somme de 15 000 euros de la part de Mme [G],

A titre subsidiaire,

Si la cour d'appel s'estimait saisie des demandes relatives à l'indemnisation de Mme [G] et de la société [C][G] & Co :

- Déclarer la société [J] [K] recevable et bien fondée en son appel incident et y faisant droit,

- Infirmer le jugement en ce qu'il a considéré que les difficultés économiques de la société [J] [K] n'étaient pas de nature à l'exonérer de toute responsabilité sur le fondement des dispositions de l'article L. 442-1 II° code de commerce,

Statuant à nouveau,

- Juger que la rupture des relations entre la société [J] [K] et Mme [C] [G] et la société [C][G] & Co ne procède pas d'une intention délibérée, mais était dictée par des contingences économiques liées à des difficultés économiques de nature à l'exonérer de toute responsabilité sur le fondement des dispositions de l'article L. 442-1 II° code de commerce,

En conséquence,

A titre infiniment subsidiaire,

- Débouter Mme [C] [G] et la société [C][G] & Co de toutes leurs demandes, fins et conclusions ;

- Infirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Paris en date du 11 janvier 2021 en ce qu'il a considéré que la société [J] [K] a rompu brutalement ses relations commerciales avec Mme [C] [G] et la société [C][G] & Co ;

- Confirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Paris en date du 11 janvier 2021 en ce qu'il a jugé le préavis de rupture de 6 mois suffisant au titre de la rupture ;

- Infirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Paris en date du 11 janvier 2021 en ce qu'il a condamné la société [J] [K] à verser à :

* Mme [C] [G] la somme de 27 000,32 euros d'indemnité au titre de la rupture brutale de la relation commerciale et débouté Mme [C] [G] du surplus de sa demande à ce titre,

* la société [C][G] & Co la somme de 5 333,66 euros d'indemnité au titre de la rupture brutale de la relation commerciale et débouté la SARL [C][G] & Co du surplus de sa demande à ce titre.

Statuant à nouveau,

- Débouter Mme [C] [G] et la société [C][G] & Co de leurs demandes, fins et conclusions,

En tout état de cause,

- Confirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Paris en date du 11 janvier 2021 en ce qu'il a :

* Débouté Madame [C] [G] et la société [C][G] & Co de leur demande de publication du présent jugement,

* Ordonné l'exécution provisoire du présent dispositif assortie d'une constitution de garantie pour la somme de 15 000 euros de la part de Madame [G],

- Condamner Madame [C] [G] et la société [C][G] & Co à verser à la société [J] [K] Import la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamner Madame [C] [G] et la société [C][G] & Co aux entiers dépens de l'instance.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 14 décembre 2023.

La cour renvoie, pour un plus ample exposé des faits, prétentions et moyens des parties, à la décision déférée et aux écritures susvisées, en application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS

Sur l'effet dévolutif de l'appel,

En vertu de l'article 562 du code de procédure civile, dans sa rédaction issue du décret n° 2017-891 du 6 mai 2017, l'appel défère à la cour la connaissance des chefs de jugement qu'il critique expressément et de ceux qui en dépendent, la dévolution ne s'opérant pour le tout que lorsque l'appel tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible.

En outre, seul l'acte d'appel opère la dévolution des chefs critiqués du jugement. 

Il en résulte que lorsque la déclaration d'appel tend à la réformation du jugement sans mentionner les chefs de jugement qui sont critiqués, l'effet dévolutif n'opère pas. Par ailleurs, aux termes de l'article 901 du même code, la déclaration d'appel est faite par acte contenant, outre les mentions prescrites par l'article 58, et à peine de nullité (4°) les chefs du jugement expressément critiqués auxquels l'appel est limité, sauf si l'appel tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible.

Le fait que la déclaration d'appel ne mentionne pas les dispositions du jugement ayant condamné la société [J] [K] à payer à :

- Mme [C] [G] la somme de 27 000,32 euros d'indemnité au titre de la rupture brutale de la relation commerciale et débouté Mme [C] [G] du surplus de sa demande à ce titre,

- la société [C][G] & Co la somme de 5 333,66 euros d'indemnité au titre de la rupture brutale de la relation commerciale et débouté la société [C][G] & Co du surplus de sa demande à ce titre,

Mais celles du jugement ayant "rejeté comme inopérantes ou mal fondées toutes conclusions plus amples ou contraires au présent jugement et en a débouté respectivement les parties," inclut nécessairement que Mme [C] [G] et la société [C][G] & Co contestent le jugement en ce que le tribunal ne leur a pas accordé la totalité de leurs demandes quant à l'indemnité de rupture.

En conséquence, aux termes de la déclaration d'appel, la cour d'appel est saisie de la contestation relative au montant de l'indemnité de rupture allouée à Mme [C] [G] et à la société [C][G] & Co.

Sur la rupture brutale des relations commerciales

L'article L. 442-1 II du code de commerce énonce que :

"II. - Engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par toute personne exerçant des activités de production, de distribution ou de services de rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, en l'absence d'un préavis écrit qui tienne compte notamment de la durée de la relation commerciale, en référence aux usages du commerce ou aux accords interprofessionnels.

En cas de litige entre les parties sur la durée du préavis, la responsabilité de l'auteur de la rupture ne peut être engagée du chef d'une durée insuffisante dès lors qu'il a respecté un préavis de dix-huit mois.

Les dispositions du présent II ne font pas obstacle à la faculté de résiliation sans préavis, en cas d'inexécution par l'autre partie de ses obligations ou en cas de force majeure."

La relation commerciale, pour être établie au sens de ces dispositions, doit présenter un caractère suivi, stable et habituel. Le critère de la stabilité s'entend de la stabilité prévisible, de sorte que la victime de la rupture devait pouvoir raisonnablement anticiper pour l'avenir une certaine continuité du flux d'affaires avec son partenaire commercial.

Le texte précité vise à sanctionner, non la rupture elle-même, mais sa brutalité caractérisée par l'absence de préavis écrit ou l'insuffisance de préavis.

Le délai de préavis doit s'entendre du temps nécessaire à l'entreprise délaissée pour se réorganiser en fonction de la durée, de la nature et des spécificités de la relation commerciale établie, du produit ou du service concerné.

Il n'est pas contesté que Mme [G] a entretenu des relations commerciales régulières avec la société [J] [K] durant 32 ans et la société [C][G] & Co durant 8 ans ce qui caractérise une relation commerciale établie.

Le 17 juillet 2019, la société [J] [K] adressait le courrier suivant à la société [C][G] & Co :

"Comme suite à notre entretien du 1er juillet 2019, nous vous confirmons par la présente notre intention de résilier le contrat de prestations de services qui nous lie à votre société.

Comme vous le savez, le groupe [J] [K] rencontre actuellement des difficultés importantes, et nous enregistrons à la fois une baisse continue de notre chiffre d'affaires ainsi que des résultats déficitaires depuis plusieurs années.

Ces difficultés économiques nous obligent aujourd'hui à réduire l'ensemble de nos charges et à résilier le contrat de prestations pour lequel vous étiez en charge de l'élaboration de deux collections par an.

Nous vous notifions par la présente la rupture de ce contrat avec un préavis de six mois qui prendra effet à compter de la réception de cette lettre, pour laquelle nous vous remercions d'accuser réception."

La société [J] [K] invoque une dégradation du marché dans le secteur d'activité de la distribution textile et une diminution significative des ventes pour justifier la rupture des relations commerciales.

Elle justifie des résultats suivants :

Chiffre d'affaires,

Résultats d'exploitation,

2016

19 441 957 €

- 737 798 €

2017

16 207 513 €

- 446 334 €

2018

14 527 448 €

- 614 407 €

2019

11 073 070 €

- 1 672 444 €

La société [J] [K] établit que la société Galeries Lafayette a mis fin au cours de l'année 2019 aux contrats de promotion personnalisée et de présentation des produits [J] [K] commercialisés dans différents magasins Galeries Lafayette en France.

Il résulte des résultats de la société [J] [K] que la dégradation de ceux-ci a été progressive en lien avec la crise dans le domaine de la distribution de textile ce qui permettait d'anticiper les décisions à prendre relatives à la durée des contrats en cours avec les partenaires économiques.

La société [J] [K] indique que Mme [C] [G] était informée de la dégradation de la situation économique de la société.

Mme [X] [K], présidente du conseil de surveillance de la société [J] [K], atteste le 26 octobre 2020 que Mme [G] était informée de la situation économique :"Nous parlions régulièrement des ventes qui étaient de plus en plus faibles, et Mme [C] [G] avait à sa disposition et consultait régulièrement les résultats sur nos cahiers de collection avec les chiffres de vente détaillés après chaque collection, elle les même photocopiait et constatait à quel point les commandes baissaient.

Cela fait 3 à 4 ans que j'ai informé [C] [G] du caractère préoccupant de la situation et de notre décision d'arrêter les stylistes free-lance ainsi que les agences de publicité dans le but d'assainir la situation financière de plus en plus dramatique"

La société ne lui a confirmé qu'en juillet 2019 une décision dont elle était informée depuis près de 2 ans.

Cependant, il n'appartenait pas à Mme [G] de prendre les décisions relatives à l'avenir de la société et celle-ci n'a été informée de la rupture des relations que par courrier du 17 juillet 2019, date de début du préavis. Le fait qu'elle ait été informée de la dégradation de la situation est sans incidence sur la date du début du préavis.

En conséquence, si la situation économique de la société [J] [K] justifiait la rupture des relations commerciales, celle-ci disposait du temps nécessaire pour accorder aux collaborateurs les délais de préavis légaux.

La société [J] [K] a accordé à Mme [G] et à la société [C][G]&Co un préavis de six mois.

Le 29 juin 2020, Mme [G] indiquait à la société [J] [K] que les sommes correspondantes aux six mois de préavis résultant de la rupture des contrats n'avaient toujours pas été versées. Par courrier du 1er juillet 2020 la société [J] [K] contestait le montant des sommes réclamées.

Par courriel du 16 juillet 2020, Mme [G] accusait réception des sommes réglées au titre du préavis en précisant qu'elles ne correspondaient pas aux factures émises, et ne compensait absolument pas le préjudice subi du fait de la brutalité de la cessation de la relation commerciale après 32 ans de collaboration. Elle ajoutait que les tentatives de règlement amiable du différend pendant près d'une année n'ayant pas abouti, elle demandait à son conseil de diligenter une procédure judiciaire.

Il ne peut donc être retenu que Mme [G] et la société [C][G]&Co ont accepté d'être indemnisées du préjudice subi à la suite de la rupture de la relation commerciale par l'octroi d'un préavis de six mois.

Les 4 réservations de vols dont un à la demande de la société [J] [K] ne démontrent pas que Mme [G] exerçait son activité pour d'autres sociétés.

Si les contrats passés entre les parties jusqu'à l'an 2000 contenait une clause d'exclusivité exigeant de Mme [G] qu'elle garantisse l'originalité de ses croquis et s'engage à en réserver l'exclusivité pour la saison concernée, qu'elle s'interdise toute collaboration avec un tiers en Inde pendant les voyages financés par la société [K], ainsi que de mettre en rapport les fournisseurs avec toute personne physique ou morale susceptible de concurrencer ou de porter atteinte à [J] [K], la preuve n'est pas rapportée de la signature de nouveaux contrats postérieurement à cette date.

Cependant, la nature de l'activité exercée dans un domaine concurrentiel et créatif ainsi que le volume d'affaires réalisées imposaient à Mme [G] un état de dépendance à l'égard de la société [J] [K].

La durée de la relation commerciale et la nature de l'activité exercée justifiaient que Mme [G] bénéficie d'un préavis de 18 mois lors de la rupture. Cette durée de préavis est également applicable à la société [C][G]&Co qui a été créée en 2011 uniquement dans le but de facturer une partie des prestations réalisées par Mme [G].

La société d'expertise comptable atteste le 11juin 2021 que la marge brute a été calculée en soustrayant le montant des achats de matière première du chiffre d'affaires figurant sur les déclarations de résultat et que Mme [G] exerçant une activité à prédominance intellectuelle, ne faisant aucunement appel à des services extérieurs ni à du personnel pour ses créations, il n'y a pas matière à déterminer une marge sur coût variable.

L'indemnité de rupture sera fixée sur la base de la marge brute réalisée.

Il résulte des pièces comptables versées aux débats que Mme [G] a réalisé les chiffres d'affaires suivants durant les trois dernières années complètes d'exercice de son activité :

Exercice 2016 : 78 846 €

Exercice 2017 : 80 667 €

Exercice 2018 : 80 333 €

Ce qui a généré la marge brute suivante :

Exercice 2016 : 74 707 €

Exercice 2017 : 74 881 €

Exercice 2018 : 76 972 €

Soit une marge brute moyenne par mois de 75520 / 12 = 6293 €

Soit pour 18 mois : 18 x 6293 € = 113 274 €

Mme [C] [G] ayant perçu de la société [J] [K] la somme de 13 333 euros et la somme de 27.000,32 euros soit au total, 40 333,32 euros, cette dernière sera condamnée à lui verser une indemnité de 113 274 € - 40 333,32 € = 72 940,68 euros.

Cette somme portera intérêts au taux légal à compter du jugement du 11 janvier 2021 du tribunal de commerce de Paris en application de l'article 1231-7 du code civil.

Il résulte des pièces comptables versées aux débats que la société [C][G]&Co a réalisé les chiffres d'affaires suivants durant les trois dernières années complètes d'exercice de son activité :

Exercice 2016 : 66 487 €

Exercice 2017 : 69 930 €

Exercice 2018 : 56 380 €

Ce qui a généré la marge brute suivante :

Exercice 2016 : 30 434 €

Exercice 2017 : 30 318 €

Exercice 2018 : 31 820 €

Soit une marge brute par mois de 30 857 / 12 = 2571 €.

Soit pour 18 mois : 2571 X 18 = 46 278 €

La société [C][G]&Co ayant perçu de la société [J] [K] la somme de 13 333 euros et la somme de 5333,66 euros soit au total,18 666,66 euros, cette dernière sera condamnée à lui verser une indemnité de 46 278 € - 18 666,66 € = 27 611,34 euros.

Cette somme portera intérêts au taux légal à compter du jugement du 11 janvier 2021 du tribunal de commerce de Paris, en application de l'article 1231-7 du code civil.

Sur la demande de déconsignation de la somme de 15 000 euros

Le jugement a ordonné l'exécution provisoire du présent dispositif assortie d'une constitution de garantie pour la somme de 15 000 euros de la part de Mme [G] qui justifie, aux termes d'une déclaration de consignation en date du 28 mai 2021, avoir consigné la somme prévue à la caisse des dépôts et consignations. Cette déconsignation sera ordonnée au bénéfice de Mme [G] à hauteur de la somme de 15 000 € augmentée des intérêts y afférents.

Sur la demande de publication de la décision,

L'article L. 442-4 du code de commerce dispose : pour l'application des articles L. 442-1, L. 442-2, L. 442-3, L. 442-7 et L.442-8, l'action est introduite devant la juridiction civile ou commerciale compétente par toute personne justifiant d'un intérêt, par le ministère public, par le ministre chargé de l'économie ou par le président de l'Autorité de la concurrence lorsque ce dernier constate, à l'occasion des affaires qui relèvent de sa compétence, une pratique mentionnée aux articles précités. "La juridiction ordonne systématiquement la publication, la diffusion ou l'affichage de sa décision ou d'un extrait de celle-ci selon les modalités qu'elle précise. Elle peut ordonner l'insertion de la décision ou de l'extrait de celle-ci dans le rapport établi sur les opérations de l'exercice par les gérants, le conseil d'administration ou le directoire de l'entreprise. Les frais sont supportés par la personne condamnée."

Au vu de ces dispositions, la publication du dispositif du présent arrêt sera ordonné sur le site internet de la société [J] [K], à ses frais, durant 15 jours, dans le délai d'un mois à compter de la signification de la décision, sans qu'il y ait lieu de prononcer d'astreinte.

Sur les demandes accessoires,

Les dispositions de première instance relatives aux frais irrépétibles et aux dépens seront confirmées.

La société [J] [K], qui succombe, sera condamnée aux dépens d'appel et devra verser à Mme [C] [G] et à la société [C][G] & Co la somme de 5000 € chacune sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Dit qu'aux termes de la déclaration d'appel, la cour d'appel est saisie de la contestation relative au montant de l'indemnité de rupture allouée à Mme [C] [G] et à la société [C][G] & Co,

Infirme le jugement en ce qu'il a condamné la société [J] [K] Import à payer au titre de la rupture brutale de la relation commerciale à Mme [C] [G] la somme de 27 000,32 euros d'indemnité et débouté Mme [C] [G] du surplus de sa demande à ce titre, et à la société [C][G] & Co la somme de 5 333,66 euros d'indemnité au titre de la rupture brutale de la relation commerciale et débouté la société [C][G] & Co du surplus de sa demande à ce titre et en ce qu'il a débouté les appelantes de leur demande de publication du jugement,

Statuant à nouveau,

Condamne la société [J] [K] Import Export à payer à Mme [C] [G] la somme de 72 940,68 euros à titre d'indemnité de rupture, avec intérêts à compter du 11 janvier 2021,

Condamne la société [J] [K] Import Export à payer à la société [C][G] & Co la somme de 27 611,34 euros à titre d'indemnité de rupture, avec intérêts à compter du 11 janvier 2021,

Ordonne que la somme de 15 000 euros consignée à la Caisse des Dépôts et Consignations en exécution du jugement infirmé, et les intérêts y afférents, soient versés à Madame [G],

Condamne la société [J] [K] Import Export à publier le dispositif du présent arrêt sur son site internet, à ses frais, durant 15 jours, dans le délai d'un mois à compter de la signification de la décision,

Condamne la société [J] [K] Import Export à payer la somme de 5000 euros à Mme [C] [G] et la somme de 5000 euros à la société [C][G] & Co au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la société [J] [K] Import Export aux dépens d'appel.