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Décisions

CA Paris, Pôle 5 - ch. 3, 4 avril 2024, n° 22/15510

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Société Française du Radiotéléphone (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Recoules

Conseillers :

Mme Leroy, Mme Lebée

Avocats :

Me Baechlin, Me Aynes, Me Etevenard, Me Peyron

TJ Bobigny, ch. 5 sect. 1, du 19 mai 202…

19 mai 2022

FAITS ET PROCÉDURE

Par acte sous seing privé en date du 22 décembre 2011, la SCI du [Adresse 2] a donné à bail à la Société française du radiotéléphone (SFR) des locaux commerciaux situés [Adresse 2] (93).

Le bail a été consenti pour un loyer annuel de 48.430 euros, hors taxes et hors charges. Par ailleurs, la durée du bail a commencé à courir le 1er octobre 2011 pour une durée de 9 ans, soit jusqu'au 30 septembre 2020.

Par acte d'huissier en date des 26 et 29 juin 2020, la SCI [Adresse 2] a fait délivrer un congé à SFR pour le 31 décembre 2020 comportant dénégation au statut des baux commerciaux faute pour SFR d'être immatriculé au RCS pour les locaux objets du bail.

Par acte d'huissier en date du 4 janvier 2021, SFR a assigné la SCI [Adresse 2] devant le tribunal judiciaire de Bobigny.

Par jugement du 19 mai 2022, le tribunal judiciaire de Bobigny a, notamment :

- dit que le congé-dénégation notifié les 26 et 29 juin 2020 par la SCI du [Adresse 2] a mis fin, à compter du 31 décembre 2020 minuit, au bail la liant à la société SFR et portant sur des locaux situés à [Localité 7] ;

- dit que la société SFR n'a pas droit au renouvellement de son bail ni droit à indemnité d'éviction et qu'elle est occupante sans droit ni titre des locaux depuis le 1er janvier 2021 ;

- ordonné, à défaut de restitution volontaire des lieux au plus tard le 31 décembre 2023 à minuit, l'expulsion de la société SFR avec toutes conséquences de droit ;

- condamné la société SFR à payer à la SCI du [Adresse 2], à compter du 1er janvier 2021 et jusqu'à la libération effective des lieux par la remise des clefs, une indemnité d'occupation mensuelle d'un montant égal à celui du loyer qui aurait été dû si le bail s'était poursuivi majoré des charges et taxes ;

- débouté la société SFR de sa demande d'indemnité d'éviction ;

- condamné la société SFR aux dépens, lesquels pourront être recouvrés directement par Maître Jean-Marc Peyron, avocat associé de la SELAS DS Avocats, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;

- dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par déclaration du 28 août 2022, la Société française du radiotéléphone SFR a interjeté appel partiel du jugement en ce qu'il a dit que la société SFR n'avait pas droit au renouvellement de son bail ni droit à indemnité d'éviction et qu'elle était occupante sans droit ni titre des locaux depuis le 1er janvier 2021 ; ordonné, à défaut de restitution volontaire des lieux au plus tard le 31 décembre 2023 à minuit, l'expulsion de la société SFR et de tous occupants de son chef des lieux situés à [Adresse 2], avec le concours, en tant que de besoin, de la force publique et d'un serrurier ; dit que les meubles et objets meublant se trouvant sur place donneraient lieu à l'application des dispositions des articles L. 433-1 et suivants et R. 433-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution ; débouté la société SFR de sa demande d'indemnité d'éviction ; condamné la société SFR aux dépens, lesquels pourront être recouvrés directement par Maître Jean-Marc Peyron, avocat associé de la société DS Avocats, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ; rappelé que l'exécution provisoire est de droit ; rejeté toute demande plus ample ou contraire.

Par conclusions déposées le 14 février 2023, la SCI du [Adresse 2] a interjeté appel incident partiel du jugement en ses dispositions lui faisant grief.

Saisi par la SCI du [Adresse 2], le Premier président de la cour d'appel de Paris a, par ordonnance du 21 juillet 2023, ordonné l'arrêt de l'exécution provisoire du jugement rendu le 19 mai 2022 par le tribunal judiciaire de Paris.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 17 janvier 2024.

MOYENS ET PRÉTENTIONS

Aux termes de ses conclusions signifiées le 8 janvier 2024, la Société française du radiotéléphone (SFR), appelante à titre principal et intimée à titre incident, demande à la cour de :

1. A titre principal,

- confirmer le jugement du 19 mai 2022 du tribunal judiciaire de Bobigny (RG n° 21/66) en ce qu'il a dit que le montant de l'indemnité d'occupation s'élèvera à une somme égale au dernier loyer en vigueur entre les parties ;

- infirmer le jugement en ses autres dispositions et, notamment, en ce qu'il a :

- « Dit que la société SFR n'a pas droit au renouvellement de son bail ni droit à indemnité d'éviction et qu'elle est occupante sans droit ni titre des locaux depuis le 1er janvier 2021 ;

- ordonné, à défaut de restitution volontaire des lieux au plus tard le 31 décembre 2023 à minuit, l'expulsion de la société SFR et de tous occupants de son chef des lieux situés à [Adresse 2], avec le concours, en tant que de besoin, de la force publique et d'un serrurier ;

- dit que les meubles et objets meublant se trouvant sur place donneront lieu à l'application des dispositions des articles L. 433-1 et suivants et R. 433-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution ;

- débouté la société SFR de sa demande d'indemnité d'éviction ;

- condamné la société SFR aux dépens, lesquels pourront être recouvrés directement par Maître Jean-Marc Peyron, avocat associé de la SELAS DS Avocats, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;

- rappelé que l'exécution provisoire est de droit,

- rejeté toute demande plus ample ou contraire ».

Statuant à nouveau,

- condamner la SCI du [Adresse 2] à verser à SFR une indemnité d'éviction conformément aux dispositions de l'article L. 145-14 du code de commerce ;

- désigner tel expert qu'il plaira, avec pour mission de :

1°) se rendre sur place et visiter les locaux faisant l'objet du bail conclu le 22 décembre 2011 entre SFR et la SCI, sis [Adresse 2]), après en avoir préalablement avisé les parties et leur avocat ;

2°) recueillir les explications des parties ;

3°) prendre connaissance des pièces de la cause, se faire remettre et/ou consulter tous documents utiles, notamment comptables ou fiscaux, entendre tous sachant ;

4°) donner tous éléments permettant de déterminer le montant de l'indemnité d'éviction due en application des dispositions des articles L. 145-1 et suivants du code de commerce et, à cette fin, notamment mais non exclusivement :

- décrire l'activité et l'exploitation situées dans les locaux précités ;

- préciser la surface des locaux et en établir une description détaillée ;

- indiquer les commodités ou, au contraire, les inconvénients que présentent lesdits locaux pour l'exploitation et/ou l'activité considérée ;

- donner toutes précisions techniques et opérationnelles sur le transfert de l'activité, ses conditions, les délais envisageables et l'ensemble de tous les coûts, charges, frais et accessoires de toutes nature que le transfert générera ;

- donner toutes précisions techniques et opérationnelles sur la réinstallation, si tant est qu'elle soit possible, de l'activité, ses conditions, les délais envisageables et l'ensemble de tous les coûts, charges, frais et accessoires de toutes nature que le transfert générera ;

- plus généralement, fournir tous éléments de toute nature, permettant d'évaluer tous les postes susceptibles de constituer l'indemnité d'éviction que SFR pourrait revendiquer ;

5°) donner tous éléments permettant de déterminer le montant de l'indemnité d'occupation qui serait due par SFR s'il était jugé que le bail commercial du 22 décembre 2011 a pris fin le 31 décembre 2020 sans renouvellement ;

6°) répondre aux dires des parties qu'il aura recueillis au cours d'une réunion de synthèse qu'il provoquera après la diffusion de son pré-rapport mais avant le dépôt de son rapport et le cas échéant, compléter ses investigations ;

- dire que l'expert exercera sa mission conformément aux articles 232 à 248 et 263 à 284 du code de procédure civile ;

- débouter la SCI du [Adresse 2] de sa demande d'expulsion visant SFR, et sa demande de voir fixer le montant de l'indemnité d'occupation au double du montant du dernier loyer ;

2. A titre subsidiaire, dans le cas où la cour d'appel confirmait le jugement en ce qu'il a débouté SFR de sa demande d'indemnité d'éviction ;

- confirmer le jugement en ce qu'il a dit que le montant de l'indemnité d'occupation s'élèvera à une somme égale au dernier loyer en vigueur entre les parties ;

- infirmer le jugement en ce qu'il n'a accordé à SFR qu'un délai expirant au 31 décembre 2023 pour quitter les lieux,

Statuant à nouveau,

- accorder à SFR un délai pour quitter les lieux expirant au 30 juin 2025 ;

- débouter la SCI du [Adresse 2] de sa demande de voir fixer le montant de l'indemnité d'occupation au double du montant du dernier loyer ;

4. En tout état de cause

- confirmer le jugement en ce qu'il a dit que le montant de l'indemnité d'occupation s'élèvera à une somme égale au dernier loyer en vigueur entre les parties ;

- débouter la SCI du 153 avenue Jean Jaurès de sa demande de voir fixer le montant de l'indemnité d'occupation au double du montant du dernier loyer ;

- condamner la SCI du [Adresse 2] à SFR à verser à SFR 25.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'instance d'appel, dont distraction au profit de maître Jeanne Baechlin, avocate au barreau de Paris, en application de l'article 699 du code de procédure civile.

Au soutien de ses prétentions, SFR fait valoir que :

- sur le bénéfice du statut des baux commerciaux, les parties ont volontairement soumis leur relation contractuelle au statut des baux commerciaux, lequel inclut le droit au renouvellement en faveur du preneur et son corollaire, le droit à une indemnité d'éviction ; que les parties ont conclu divers actes depuis 1998, intitulés « bail commercial », fondés sur le décret du 30 septembre 1953 ou les articles L. 145-1 à L. 145-60 du code de commerce, précisant que les locaux sont donnés à bail conformément au régime des baux commerciaux, conclus pour une durée de neuf ans avec faculté de résiliation triennale pour le preneur et interdisant la sous-location ; que l'analyse du bail expiré du 22 décembre 2011 met en évidence la volonté des parties ; que la nouvelle jurisprudence de la Cour de cassation devra être appliquée, laquelle admet qu'un preneur, fût-il commerçant, exerçant une activité commerciale peut se prévaloir de la soumission volontaire au statut des baux commerciaux et donc de la dispense de la condition d'immatriculation (Civ. 3ème, 28 mai 2020, pourvoi n° 19-15.001) ;

- sur le caractère accessoire des locaux, elle est admise à soulever, conformément à l'article 563 du code de procédure civile, le moyen nouveau tiré du caractère accessoire des locaux loués ; que la société SFR a son local principal à son siège social situé au [Adresse 3], de sorte que les autres établissements, dont celui litigieux, sont des établissements secondaires donc accessoires au principal ; que les locaux litigieux abritent des installations techniques complexes qui permettent à SFR d'exploiter son fonds, de sorte, qu'étant nécessaires à l'activité de SFR, ils sont « accessoires et doivent être protégés par le statut des baux commerciaux afin de ne pas compromettre (son) activité principale » ; que la SCI savait que les locaux loués étaient des locaux accessoires au regard de la destination du bail et de l'avenant n° 2 du 25 mai 2004 ;

À titre subsidiaire, sur la demande d'expulsion, elle sollicite des délais de grâce pour quitter les lieux au 30 juin 2025, conformément aux dispositions de l'article L. 412-4 du code des procédures civiles d'exécution compte-tenu de la complexité du déménagement liée aux équipements techniques de l'opérateur, rendant impossible un départ sans délai ; que l'expulsion sans délai serait préjudiciable à l'organisation des Jeux Olympiques de Paris 2024 ainsi qu'aux clients de SFR, que sont les entreprises et les usagers du service public.

Par conclusions du 26 janvier 2024, la Société française du radiotéléphone (SFR) demande à la cour de révoquer l'ordonnance de clôture rendue le 17 janvier 2024 et expose les mêmes moyens et dispositif que ceux contenus dans les conclusions déposées le 8 janvier 2024 ci-dessus reproduits.

Aux termes de ses conclusions signifiées le 11 janvier 2024, la SCI du [Adresse 2], intimée à titre principal et appelante à titre incident, demande à la cour de :

- dire et juger qu'à la date de délivrance du congé notifié les 26 et 29 juin 2020, la société SFR n'était pas immatriculée au registre du commerce et des sociétés pour les locaux loués ;

- juger en conséquence que la société SFR ne peut bénéficier d'un quelconque droit à renouvellement de son bail ;

- déclarer parfaitement valable et valide le congé notifié les 26 et 29 juin 2020 ;

- juger en conséquence que le bail du 22 novembre 2011 est expiré depuis le 31 décembre 2020 et que la société SFR est occupante sans droit ni titre des locaux objet du bail litigieux depuis le 1er janvier 2021 ;

En conséquence, confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a :

- dit que ledit congé a mis fin, à compter du 31 décembre 2020 minuit, au bail litigieux ;

- dit que la société SFR n'a pas droit au renouvellement de son bail ni droit à indemnité d'éviction et qu'elle est occupante sans droit ni titre des locaux depuis le 1er janvier 2021 ;

Pour le surplus, infirmer le jugement en ses autres dispositions faisant grief à la SCI du [Adresse 2] et n'ayant pas intégralement fait droit à ses demandes de première instance ;

Statuant à nouveau,

- ordonner l'expulsion de la société SFR et de celle de tous occupants de son chef des locaux situés à [Localité 7], et ce à compter de la signification de la décision à intervenir ;

- ordonner le transport et la séquestration des meubles et objet mobiliers garnissant les lieux loués dans tel garde-meubles aux frais risques et périls de la société SFR, et ce en garantie de toutes sommes qui pourront être dues, conformément aux articles L. 433-1 et R. 433-1 du code des procédures civiles d'exécution ;

- fixer le montant de l'indemnité d'occupation due par la société SFR à compter du 1er janvier 2021 et jusqu'à la date de restitution des lieux loués, au double du montant du dernier loyer, et l'y condamner ;

- condamner la société SFR aux entiers dépens de la présente procédure, qui pourront être recouvrés directement par Maître Frédérique Etevenard, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;

- condamner enfin la société SFR à payer à la SCI du [Adresse 2] la somme de 10.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Au soutien de ses prétentions, la SCI 153 avenue Jean Jaurès oppose que :

- sur le droit au renouvellement de la société SFR, le statut des baux commerciaux ne peut être appliqué dès lors que la société SFR n'a procédé à son immatriculation pour les locaux loués que postérieurement à la délivrance du congé ayant mis fin à son bail, alors que l'immatriculation est une condition de l'application du statut au sens de l'article L. 145-1 du code de commerce ; qu'aucune renonciation du bailleur à délivrer congé pour défaut d'immatriculation n'est prouvée en l'espèce ; que le bail était un bail commercial, en raison non pas d'une volonté des parties de se soumettre conventionnellement au statut des baux commerciaux, mais par un effet de plein droit au regard de la caractérisation de ses conditions d'application ; que les parties n'ont jamais contesté son effet de plein droit ; qu'aux termes de l'article L. 145-9 du code de commerce, le bailleur peut valablement, dans la période des six mois précédant le terme contractuel du bail, délivrer un congé prenant effet en cours de tacite prolongation du bail, ce qui exclut tout motif frauduleux ; que les locaux litigieux ne sont pas des locaux accessoires :

- sur l'octroi de délais de grâce, que le délai demandé dépasse le délai maximum autorisé par l'article 412-4 du code des procédures civiles d'exécution ; que cette demande n'est pas justifiée, étant observé qu'elle a un chiffre d'affaires de 8 milliards d'euros et de nombreuses installations de télécommunication situées sur l'ensemble du territoire français ;

En application de l'article 455 du code de procédure civile, il convient de se référer aux conclusions ci-dessus visées pour un plus ample exposé des moyens et prétentions de l'appelant.

SUR CE,

Conformément aux dispositions des articles 4 et 954 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions. Il n'y a pas lieu de statuer sur les demandes aux fins de voir 'donner acte' ou de 'dire', lorsqu'elles ne constituent pas des prétentions visant à conférer un droit à la partie qui les requiert mais ne sont en réalité que de simples allégations ou un rappel des moyens invoqués.

Sur la demande de révocation de l'ordonnance de clôture

Aux termes de l'artic1e 15 du code de procédure civile, les parties doivent se faire connaître mutuellement en temps utile les moyens de fait sur lesquels elles fondent leurs prétentions, les éléments de preuve qu'elles produisent et les moyens de droit qu'elles invoquent, afin que chacune soit à même d'organiser sa défense.

Aux termes de 1'artic1e 802 du code de procédure civile, aucune conclusion ne peut être déposée ni aucune pièce produite aux débats après l'ordonnance de clôture, à peine d'irrecevabilité prononcée d'office. Sont cependant recevables les conclusions relatives aux loyers et intérêts, si leur décompte ne peut faire l'objet d'aucune contestation sérieuse.

Selon 1'artic1e 803 du code de procédure civile, l'ordonnance de clôture ne peut être révoquée que s'il se révèle une cause grave depuis qu'elle a été rendue. L'ordonnance de clôture peut être révoquée, d'office ou à la demande des parties, soit par ordonnance motivée du juge de la mise en état, soit, après 1'ouverture des débats, par décision du tribunal.

Selon 1'article 16 du code de procédure civile, le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction.

La société SFR allègue, au soutien de sa demande de report, d'incidents techniques ayant affecté le fonctionnement du RPVA sur la semaine du 11 janvier 2024.

Or, elle ne justifie pas de cet incident technique et la cour a été normalement destinataire des messages et conclusions signifiées le 11 janvier 2024 par l'intimée et de la demande de report de l'ordonnance de clôture présentée par l'appelante le 12 janvier 2024.

Par ailleurs, les parties étaient informées de la date de clôture et de plaidoirie, par avis de fixation en date du 7 novembre 2023, leur octroyant ainsi un délai raisonnable pour se mettre en état.

Enfin, l'appelante ne fait état d'aucune cause grave postérieure au prononcé de l'ordonnance de clôture du 17 janvier 2023 justifiant sa révocation.

Surabondamment, les conclusions signifiées le 26 janvier 2024 ne comportent que deux brefs paragraphes relatifs au rapport de M. [O], en date du 5 février 2023 versé aux débats le 12 mai 2023, sur lequel l'appelante avait tout loisir de conclure avant le 17 janvier 2023.

Ainsi, aucun infraction au respect du contradictoire ne peut être raisonnablement soutenue.

La demande de révocation de l'ordonnance de clôture sera rejetée et la cour statuera sur les dernières écritures de SFR en date du 8 janvier 2024.

Sur le bénéfice du statut des baux commerciaux

L'article L. 145-1 I du code de commerce dispose que « Les dispositions du présent chapitre s'appliquent aux baux des immeubles ou locaux dans lesquels un fonds est exploité, que ce fonds appartienne, soit à un commerçant ou à un industriel immatriculé au registre du commerce et des sociétés[...] et en outre:

1o Aux baux de locaux ou d'immeubles accessoires à l'exploitation d'un fonds de commerce quand leur privation est de nature à compromettre l'exploitation du fonds et qu'ils appartiennent au propriétaire du local ou de l'immeuble où est situé l'établissement principal. En cas de pluralité de propriétaires, les locaux accessoires doivent avoir été loués au vu et au su du bailleur en vue de l'utilisation jointe ; [...] »

Comme rappelé par le premier juge, le preneur qui n'est pas immatriculé à la date du congé n'a pas droit au renouvellement de son bail ni droit au paiement d'une indemnité d'éviction et est occupant sans droit ni titre à compter de la date d'effet du congé.

En l'espèce, c'est par motifs pertinents, auxquels la cour renvoie et qu'elle adopte, que le premier juge a rappelé le contexte juridique liant les parties et le fait non contesté de l'absence d'immatriculation de SFR au jour de la délivrance du congé dénégation, soit les 26 et 29 juin 2020, la régularisation de l'inscription au RCS ayant été fait postérieurement à la délivrance de cet acte, soit le 8 juillet 2020. Or, l'obligation légale d'inscription au registre du commerce et des sociétés pour bénéficier de la protection du statut des baux commerciaux s'apprécie au jour de la délivrance du congé.

C'est par motifs tout aussi pertinents que le premier juge a écarté le moyen tiré d'une adoption volontaire du statut des baux commerciaux résultant des renvois multiples au décret de 1953 dans le bail dès lors qu'il n'est pas établi que le bailleur ait renoncé à se prévaloir du défaut d'immatriculation, dont il n'est par ailleurs pas démontré qu'il en ait eu connaissance avant la délivrance du congé dénégation, ni qu'il ait renoncé de façon non équivoque au droit de délivrer congé dans les conditions légales.

Contrairement à ce que soutient le preneur, il ne résulte pas davantage de termes clairs et non équivoque du contrat de bail litigieux que les parties aient souhaité soumettre volontairement et conventionnellement le contrat au statut des baux commerciaux dès lors que la nature commerciale de l'activité exercée par SFR dans des lieux justifiaient à elle seule la soumission du contrat de bail au statut.

En cause d'appel, SFR évoque un moyen nouveau et se prévaut de l'exception à l'obligation d'immatriculation au RCS résultant du caractère accessoire des locaux litigieux.

Il est constant que le propriétaire du fonds de commerce doit immatriculer tout local susceptible de relever des dispositions de l'article L. 145-1 du code de commerce, quel que soit le nombre d'établissements exploités dans le ressort du registre du commerce concerné, qu'il s'agisse de locaux principaux ou secondaires, exception faite des locaux accessoires.

Il ressort de l'extrait K bis d'immatriculation secondaire de la société SFR, daté 20 juillet 2020, dont le siège social est situé [Adresse 3] dans le [Localité 6], que sont déclarés dans le département de la Seine Saint Denis un établissement principal sis [Adresse 4] et un autre établissement sis [Adresse 2].

Cependant, conformément aux dispositions de l'article L. 145-1 1° du code de commerce, un local est accessoire lorsqu'il n'accueille aucune exploitation autonome mais qu'il est indispensable à l'exploitation du fonds de commerce relevant de l'établissement principal, que la société SFR n'identifie pas, et qu'en cas de pluralité de propriétaires, les locaux accessoires aient été loués au vu et au su du bailleur en vue d'une utilisation jointe, ce que la société SFR ne démontre pas.

Surabondamment est mentionné sur l'extrait K Bis un mode d'exploitation directe concernant l'établissement litigieux ce qui est corroboré par les études menées par la société Altice pour le compte de SFR, relative à l'étude d'impact de la fermeture du site d'[Localité 8] (pièces 18 et 19 de l'appelant), qui rappellent que le site gère plus de 100.000 clients téléphonie mobiles, plus de 100.000 clients internet résidentiels et plus de 500 clients entreprise, qu'il héberge 575 équipements télécoms actifs permettant notamment des services aux entreprises et aux particuliers.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a considéré que le bail du 22 décembre 2011 a pris fin le 31 décembre 2020 sans ouvrir droit à SFR au renouvellement du bail, que SFR est occupante sans droit ni titre depuis cette date et a ordonné son expulsion avec toutes conséquences de droit, a débouté SFR de sa demande d'indemnité d'éviction.

Sur l'octroi de délais de grâce

L'article L. 412-3 du code des procédures civiles d'exécution dispose que « Le juge peut accorder des délais renouvelables aux occupants ['] de locaux à usage professionnel, dont l'expulsion a été ordonnée judiciairement, chaque fois que le relogement des intéressés ne peut avoir lieu dans des conditions normales ['] »

L'article L. 412-4 du code des procédures civiles d'exécution prévoit que « La durée des délais prévus à l'article L. 412-3 ne peut, en aucun cas, être inférieure à un mois ni supérieure à un an. Pour la fixation de ces délais, il est tenu compte de la bonne ou mauvaise volonté manifestée par l'occupant dans l'exécution de ses obligations, ['] ainsi que des diligences que l'occupant justifie avoir faites en vue de son relogement.

En l'espèce, les locaux litigieux sont stratégiques pour SFR en ce que, comme relevé par l'expert des parties M. [O], le site gère plusieurs centaines de milliers de clients pour la téléphonie mobile et pour la fourniture d'un accès internet ce tant auprès de particuliers que d'entreprises privées ou de services publics et au regard de l'importance et de la sensibilité des équipements et infrastructures techniques qui sont installées. Ce point n'est d'ailleurs pas contesté par le bailleur.

Nonobstant, l'étude d'impact évoquée ci-dessus a non seulement chiffré les coûts de déménagement et de fermeture du site mais aussi établi un rétro planning des opérations d'audit et de réalisation du transfert et des travaux sur un nouveau site, lequel aboutissait, après les phases d'études préalables et les opérations de migrations diverses, à un départ du site occupé à la fin du 4ème trimestre 2024.

Or, bien qu'elle ait obtenu une suspension de l'exécution provisoire du jugement de première instance par ordonnance du premier président de la cour d'appel de Paris en date du 21 juillet 2023, SFR n'établit pas en quoi le calendrier prévisionnel établi pour le transfert de son activité sur un nouveau site ne serait pas réalisable à la date prévue et ne fournit aucun élément sur l'état d'avancement des opérations de transfert qui mettrait en exergue un glissement des opérations de transfert.

Dans ces conditions, il lui sera accordé un délai jusqu'au 31 décembre 2024 pour restituer les locaux.

Le jugement sera donc infirmé de ce chef.

Sur le montant de l'indemnité d'occupation

Conformément aux dispositions de l'article 1240 du code civil, l'occupation sans droit ni titre de locaux ouvre droit pour le propriétaire au paiement d'une indemnité d'occupation, de nature mixte, indemnitaires et compensatoires.

La société SFR, occupante sans droit ni titre depuis le 1er janvier 2021, est débitrice d'une indemnité d'occupation.

Il ressort de l'article XXI -1 du bail relatif à la clause résolutoire qu'en cas de résiliation le preneur sera débiteur de plein droit d'une indemnité d'occupation égale à 2 fois le montant du loyer principal majoré des charges outre les accessoires.

En l'absence d'élément qui permettrait de considérer cette clause comme manifestement excessive et de prétention du preneur en ce sens, il sera fait droit à la demande du bailleur à ce titre.

Le jugement sera donc infirmé de ce chef.

Sur les demandes accessoires

Le jugement sera confirmé en ses dispositions relatives aux frais irrépétibles et aux dépens.

Succombant ses prétentions, SFR sera condamnée à verser à la SCI du [Adresse 2] la somme de 10.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR, statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire rendu en dernier ressort ;

Rejette la demande de révocation de l'ordonnance de clôture ;

Confirme le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Bobigny le 19 mai 2022 en toute ces dispositions sauf en ce qu'il a ordonné, à défaut de restitution volontaire des lieux au plus tard le 31 décembre 2023 à minuit, l'expulsion de Société française de radiotéléphone et de tout occupant de son chef des lieux situés à [Adresse 2], avec le concours en tant que de besoin de la force publique et d'un serrurier et en ce qu'il a condamné la Société française de radiotéléphone à payer à la SCI du [Adresse 2] à compter du 1er janvier 2021 et jusqu'à libération effective des lieux par la remise des clés une indemnité d'occupation mensuelle d'un montant égal à celui du loyer qui aurait été dû si le bail s'était poursuivi majorer des charges des taxes ;

Statuant de nouveau,

Ordonne, à défaut de restitution volontaire des lieux au plus tard le 31 décembre 2024 à minuit, l'expulsion de la Société française de radiotéléphone et de tout occupant de son chef des lieux situés à [Adresse 2] ;

Condamne la Société française de radiotéléphone à payer à la SCI du [Adresse 2] à compter du 1er janvier 2021 et jusqu'à libération effective des lieux par la remise des clés une indemnité d'occupation mensuelle d'un montant égal à deux fois celui du loyer qui aurait été dû si le bail s'était poursuivi majorer des charges des taxes ;

Y ajoutant,

Condamne la Société française de radiotéléphone à payer à la SCI du [Adresse 2] la somme de 10.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la Société française de radiotéléphone à supporter la charge des dépens d'appel.