CA Versailles, 12e ch., 25 octobre 2016, n° 16/03420
VERSAILLES
Arrêt
Autre
PARTIES
Défendeur :
B-Pack Services (SA), B-Pack (SAS)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Rosenthal
Conseillers :
M. Leplat, M. Ardisson
FAITS
Vu le contredit formé le 26 avril 2016, par Ignaki A. à l'encontre d'un jugement rendu le 15 avril 2016 par le tribunal de commerce de Nanterre qui :
* s'est déclaré incompétent au profit du tribunal de grande instance de Nanterre par application de la loi 2007-1544 et du décret 1009-1205 du 9 octobre 2009,
* a dit qu'à défaut de contredit dans les délais légaux, le dossier sera transmis à la juridiction susvisée ;
* a condamné le demandeur aux dépens ;
Vu les observations écrites en date des 26 avril et 7 septembre 2016, énoncées à l'appui du contredit, oralement soutenues à l'audience, par lesquelles Ignaki A. demande à la cour de:
* déclarer recevable et fondé le contredit,
* annuler le jugement,
* évoquer le fond du litige,
* condamner solidairement les sociétés B-Pack Services et B-Pack au paiement de la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens ;
Vu les observations écrites en date du 24 juin 2016, oralement soutenues à l'audience, aux termes desquelles la société B-Pack Services, la société B-Pack, défenderesses au contredit, Julien N., Xavier B., Bruno C., Frédéric M., intervenants volontaires et défendeurs au contredit, prient la cour de:
* dire irrecevable et infondé le contredit,
* confirmer le jugement du tribunal de commerce en ce qu'il s'est déclaré matériellement incompétent au profit du tribunal de grande instance de Nanterre,
* à titre subsidiaire, dire qu'il n'est pas de bonne justice de donner à l'affaire une solution définitive en privant les parties du double degré de juridiction,
* débouter Ignaki A. de sa demande d'évocation,
* condamner Ignaki A. au paiement de la somme de 10.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens ;
SUR CE, LA COUR,
Considérant que, pour un exposé complet des faits et de la procédure, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux écritures des parties ; qu'il convient de rappeler que :
* Ignaki A. a assigné devant le tribunal de commerce de Nanterre les sociétés B-Pack et B-Pack Services afin notamment qu'il leur soit fait interdiction d'exploiter des logiciels dont il est le créateur en indivision, que lui soit allouée la somme de 1 million d'euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral subi du chef de la contrefaçon du droit d'auteur protégeant ces logiciels, que soit ordonnée une mesure d'expertise afin d'évaluer son dommage patrimonial,
* Julien N., Xavier B., Bruno C., Frédéric M. sont intervenus volontairement à l'instance,
* le tribunal de commerce de Nanterre a initié une procédure de conciliation laquelle a échoué,
* les parties ont été convoquées pour l'audience de plaidoiries du 10 mars 2016,
* en la présence des conseils des parties et du demandeur, le tribunal a relevé d'office son incompétence au profit du tribunal de grande instance,
* c'est dans ces circonstances qu'est intervenu le jugement déféré ;
Sur la recevabilité du contredit :
Considérant que les sociétés B-Pack et B-Pack Services, Julien N., Xavier B., Bruno C., Frédéric M. soulèvent l'irrecevabilité du contredit dès lors que
Ignaki A. aurait acquiescé à l'exception d'incompétence relevée d'office par le tribunal ;
Considérant que Ignaki A. réplique que les parties s'étaient mises d'accord pour faire trancher le litige par le tribunal de commerce de Nanterre pour ne pas en retarder la solution, que les défenderesses n'ont jamais soulevé une exception d'incompétence, que le tribunal, après avoir ouvert une procédure de conciliation, ne pouvait plus décliner d'office son incompétence, que cependant, lors de l'audience de plaidoiries, il a soulevé d'office son incompétence sans autre formalité, de sorte que le jugement ne peut qu'être annulé;
Qu'il fait valoir que le jour de l'audience, il a reconnu l'existence des dispositions instituant la compétence d'attribution du tribunal de grande instance de Nanterre sans pour autant acquiescé au jugement ;
Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article 129-5 du code de procédure civile, les décisions prises par le juge dans le cadre de la délégation de la mission de conciliation sont des mesures d'administration judiciaire, qu'en se bornant à ouvrir une conciliation le tribunal de commerce n'a nullement accepté sa compétence ;
Considérant que le tribunal pouvait à l'audience de plaidoiries relever d'office son incompétence en raison de la violation d'une règle de compétence d'attribution d'ordre public, comme en l’espèce ;
Considérant qu'aux termes du jugement faisant foi jusqu'à inscription de faux, le premier juge a relevé que :
A cette audience, les conseils des parties étaient présents ainsi que le demandeur en personne,
Le juge, constatant que les écritures du demandeur étaient prises principalement sur la base des articles L.112-1, L.113-1, L.126-6 et L.331-3 du code de la propriété intellectuelle et que la solution du litige consistait en premier lieu à déterminer l'existence et le contenu des droits de propriété sur un logiciel, a soulevé l'incompétence du tribunal de commerce en précisant aux parties que selon lui et en attendant le résultat du délibéré, le litige relevait de la compétence du tribunal de grande instance,
Les deux parties ont immédiatement donné leur accord pour que l'affaire soit jugée par le tribunal de grande instance compétent,
L'affaire a été mise en délibéré pour un jugement qui sera rendu par mise à disposition au greffe le 15/04/ 2016 ;
Considérant ainsi, que contrairement à ce que soutient Ignaki A., le tribunal de commerce n'a pas omis de solliciter les observations des parties et n'a aucunement méconnu le principe de la contradiction visé par l'article 16 du code de procédure civile ;
Que Ignaki A., ayant donné son accord pour que l'affaire soit jugée par le tribunal de grande instance, celui-ci a acquiescé à l'incompétence d'attribution relevée par le tribunal, de sorte qu'il ne peut plus la contester par la voie d'un contredit afin de voir évoquer l’affaire ;
Qu'il s'ensuit que le contredit formé par Ignaki A. est irrecevable et qu'il n'y a lieu ni de prononcer la nullité du jugement ni d'examiner la demande d’évocation ;
Sur les autres demandes :
Considérant qu'il résulte du sens de l'arrêt que Ignaki A. ne saurait bénéficier des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ; qu'en revanche, l'équité commande de le condamner, sur ce même fondement, à verser à la société B-Pack Services, la société B-Pack, défenderesses au contredit, Julien N., Xavier B., Bruno C., Frédéric M., ensemble, une indemnité de 3.000 euros ;
Que Ignaki A. supportera les frais du contredit ;
PAR CES MOTIFS
Dit le contredit irrecevable,
Condamne Ignaki A. à payer à la société B-Pack Services, la société B-Pack, défenderesses au contredit, Julien N., Xavier B., Bruno C., Frédéric M., ensemble, la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Rejette toutes autres demandes,
Condamne Ignaki A. aux frais du contredit,
prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.