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Décisions

CA Rennes, 3e ch. com., 9 avril 2024, n° 22/04581

RENNES

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Demandeur :

BC Wear (SAS)

Défendeur :

Territoire Redskins (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Contamine

Conseillers :

Mme Clement, Mme Jeorger-Le Gac

Avocats :

Me Le Leon, Me Chaudet, Me Petit, Me Quenault

CA Rennes n° 22/04581

8 avril 2024

La société BC WEAR a été constituée le 8 juin 2016 par Mme [F]. Son siège social a été fixé [Adresse 5] à [Localité 1].

Le 24 juin 2016 M. [U] [J] a cédé à la société BC WEAR le contrat d'agent commercial qui le liait à la société TERRITOIRE REDSKINS. La société TERRITOIRE REDSKINS a donné son accord à cette cession.

En septembre 2017, la société TERRITOIRE REDSKINS a fait l'objet d'une procédure de redressement judiciaire devant le tribunal de commerce de Nanterre suivie d'un plan de redressement sur 9 ans.

Le 1er novembre 2017 la société BC WEAR et M. [Y] ont régularisé un contrat de travail à effet du 2 janvier 2018.

Le 17 décembre 2018 Mme [F] a cédé les actions de BC Wear à M. [Y] et Mme [H] sa mère, laquelle a pris le présidence de la société BC WEAR.

Le 20 juin 2019 la société TERRITOIRE REDSKINS a notifié à la société BC WEAR la résiliation du contrat d'agent commercial motifs pris de ses fautes graves (manquement à l'obligation de non concurrence et baisse importante des chiffres d'affaires dénotant un désintérêt pour les produits REDSKINS).

Par acte du 23 juillet 2019, la société BC WEAR a saisi le tribunal de commerce de Saint- Brieuc aux fins de voir condamner la société TERRITOIRE REDSKINS à lui régler une indemnité compensatrice de préavis et une indemnité légale de cessation de mandat.

Par jugement avant dire droit du 10 mai 2021, le tribunal de commerce de Saint-Brieuc a fait injonction à la société BC WEAR de produire tous documents lui ayant permis d'ouvrir une boîte postale à Benodet sous l'intitulé M. [Y] -société BC WEAR-[Adresse 8].

Il a également sollicité l'avis du ministère public sur la gestion de fait de M. [Y] à compter du 1er novembre 2017, date de la signature de son contrat de travail avec la société BC WEAR et a sursis à statuer dans l'attente de cette communication et de l'avis du Ministère Public.

Le parquet de Quimper a indiqué au tribunal de commerce que M. [Y] avait été condamné par le tribunal de commerce de Quimper le 11 juillet 2014 à une interdiction de gérer pour une période de 10 ans.

La société BC WEAR a communiqué les documents d'ouverture de sa boîte postale.

Par jugement du 13 juin 2022 le tribunal de commerce de Saint - Brieuc a :

- Dit et jugé qu'il était compétent pour connaître des demandes de la société BC WEAR ;

- Débouté la société TERRITOIRE REDSKINS de sa demande d'incompétence territoriale du tribunal de commerce de Saint Brieuc au profit du tribunal de commerce de Quimper ;

- Dit et jugé que la société BC WEAR est une société fictive créée dans le but de permettre à M. [B] [Y] d'en assurer la gestion de fait ;

- Dit et jugé que la société BC WEAR est affectée de nullité en application du principe fraus omnia corrumpit avec toutes ses conséquences de droit ;

- Déclaré irrecevable la société BC WEAR en sa saisine du tribunal de commerce de Saint-Brieuc

- Condamné la société BC WEAR à payer à la société TERRITOIRE REDSKINS la somme de 2.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile;

- Condamné la société BC WEAR aux entiers dépens ;

- Débouté les parties de leurs plus amples demandes, fins et conclusions ou contraires au dispositif du présent jugement ;

- Liquidé au titre des dépens les frais de greffe an titre du présent jugement 5 la somme de 73,22 euros TTC.

Le 19 juillet 2022 la société BC WEAR a fait appel du jugement.

Elle a déposé une deuxième déclaration d'appel le 7 octobre 2022.

Les deux procédures ont été jointes par ordonnance du 27 octobre 2022.

Par jugement du 8 février 2023, le tribunal de commerce de Nanterre a prononcé l'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire à l'égard de la société TERRITOIRE REDSKINS, et désigné Maître [P] en qualité de liquidateur de la société TERRITOIRE REDSKINS.

La procédure a fait l'objet d'une interruption d'instance le 9 mars 2023.

Par acte du 15 mai 2023, la société BC WEAR a assigné en intervention forcée Maître [P] ès qualités de liquidateur de la société TERRITOIRE REDSKINS.

La société BC WEAR a déclaré sa créance le 3 avril 2023.

L'ordonnance de clôture est en date du 18 janvier 2024.

MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES

Dans ses écritures notifiées le 17 octobre 2023 la société BC WEAR demande à la cour au visa des articles L. 134-4, L. 134-11 et L. 134-12 du code de commerce, R. 134-I et R. 134-3 du code de commerce, de :

- Prononcer la jonction des procédures enregistrées par le greffe de la cour sous les numéros 22/04581 et 22/05613 ;

- Recevoir la SAS BC WEAR en son appel et après l'y avoir déclarée bien fondée ;

- Réformer en toutes ses dispositions le jugement du tribunal de commerce de Saint-Brieuc en date du 13 juin 2022.

En conséquence :

- Juger que la résiliation du mandat d'agent commercial de la société BC WEAR ne repose sur aucune faute grave ;

- Juger la société BC WEAR bien fondée en sa demande tendant à être réparée du préjudice qu'elle a subi du fait de la résiliation du mandant d'agent commercial.

En conséquence :

- Fixer au passif de la société TERRITOIRE REDSKINS la créance provisionnelle de la société BC WEAR au titre de l'indemnité de résiliation de mandat à hauteur de 230.014 euros, sauf mémoire ;

- Fixer au passif de la société TERRITOIRE REDSKINS la créance provisionnelle de la société BC WEAR au titre de l'indemnité de préavis de résiliation de mandat d'agent commercial à hauteur de 28.751,83 euros HT soit 34.502,l9 euros TTC ;

- Fixer au passif de la société TERRITOIRE REDSKINS la créance due par la société BC WEAR à un montant de 10 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens ;

- Condamner la société TERRITOIRE REDSKINS, représentée par Maitre [L] [P] à produire, si besoin sous astreinte, la copie certifiée conforme par un expert-comptable de toutes les opérations directes et indirectes du secteur de la société BC WEAR pour la période allant du 24 juin 2016 au 20 juin 2019, lesdits justificatifs devant comprendre, sans restriction de gamme de produits et pour toute la clientèle concernée les commandes factures, les avoirs, 1e journal des ventes et le registre des clients, lettre et non lettre

- Condamner la société TERRITOIRE REDSKINS, représentée par Maitre [L] [P] à produire l'attestation d'un expert-comptable certifiant et garantissant le caractère exhaustif des documents ainsi produits.

Dans ses écritures notifiées le 18 juillet 2023, Maître [P], ès qualité de liquidateur judiciaire de la société TERRITOIRE REDSKINS demande à la cour de :

A titre principal,

- Déclarer irrecevables les demandes de production sous astreintes de documents formulées par la société BC WEAR à l'encontre de Maître [P] ès qualités ;

- Confirmer en toutes ses dispositions le Jugement rendu le 13 juin 2022 par le tribunal de commerce de Saint Brieuc.

A titre subsidiaire,

- Déclarer la société BC WEAR irrecevable en toutes ses demandes ;

En tout état de cause,

- Débouter la société BC WEAR de l'ensemble de ses demandes, moyens, fins et conclusions ;

- Condamner la société BC WEAR à payer la somme de 8.000 euros à Maître [P] ès-qualités au titre de l'article 700 du CPC ainsi qu'aux dépens, dont distraction est sollicitée au profit de Maître Laurent PETIT conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

Il est renvoyé à la lecture des conclusions précitées pour un plus ample exposé des demandes et moyens développés par les parties.

DISCUSSION

La nullité de la société BC WEAR

Maître [P], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société TERRITOIRE REDSKINS soutient le caractère frauduleux de la société BC WEAR laquelle est destinée à confier à M. [Y] la gestion d'une société alors qu'il a été condamné à une interdiction de gérer.

Le liquidateur se fonde sur le déplacement du siège social de la société au domicile de M. [Y] et sur le fait que M. [Y] est son unique interlocuteur. Il estime que cette situation dénote une gestion de fait. Il en tire pour conséquence la nullité de la société BC WEAR et l'irrecevabilité des demandes qu'elle présente.

La société BC WEAR fait valoir que la demande en nullité par voie d'exception est prescrite et qu'en tout état de cause le caractère fictif de la société n'est pas établi.

Toutes les actions en nullité en matière de société se prescrivent par trois ans à compter du jour où la nullité est encourue sauf exception (action en nullité d'une fusion ou scission de sociétés).

Après l'expiration du délai de prescription, en l'espèce acquis le 21 juin 2019, la nullité invoquée par voie d'exception est imprescriptible (article 1185 du code civil) sauf si celui qui l'invoque n'a pas lui-même exécuté l'acte critiqué. A la condition cependant que l'exécution soit régulière.

La société TERRITOIRE REDSKINS est en relation commerciale avec la société BC WEAR depuis l'application du contrat de cession de mandat d'agent commercial soit depuis le 24 juin 2016.

Le liquidateur es qualités doit donc établir que ses relations avec son agent commercial sont irrégulières.

Dans les sociétés commerciales, la nullité de la société ne peut résulter que d'une disposition expresse du livre II du code de commerce. Pour les sociétés de capitaux et pour la SARL, la loi ne prévoit aucun cas de nullité expresse. Une société peut être annulée en cas de fraude, en application de l'adage fraus omnia corrumpit. Dans un tel cas la société fictive possède les apparences d'une véritable société, c'est-à-dire un siège social, une dénomination sociale, qui a accompli toutes les formalités de publicité nécessaires. Elle n'a pourtant aucune existence propre et est destinée à masquer les agissements d'un tiers qu'il ait ou non la qualité d'associé.

Le liquidateur estime que M. [Y] dirige la société ce qui lui confère son caractère frauduleux puisqu'il est atteint par une interdiction de gérer.

Le siège social de la société BC WEAR est situé [Adresse 5] à [Localité 1] 22 730.

La procédure devant le tribunal de commerce a établi que les documents transmis par M. [Y] mentionnent l'ouverture d'une boîte postale pour la réexpédition des courriers de la société BC WEAR à l'adresse personnelle de M [Y] [Adresse 2].

Cette organisation ne découle que de l'essence même du contrat de travail de M. [Y] avec la société BC WEAR.

La contrat de travail effectif à compter du 2 janvier 2018 précise en effet :

ARTICLE 1 - ENGAGEMENT PERIODE

La société SASU BC WEAR engage M.[Y], en qualité de responsable commercial ZONE OUEST DE LA FRANCE ainsi que pour les achats sur l'Afrique du nord le moyen orient l'asie et l'Europe et tout autres destinations pour les besoins de l'entreprise pour une période indéterminée en CD1 à la date du 2 Janvier 2018.

...

A titre d'information les lieux de travail de MR [Y] est itinérant en raison de la nature de ses activités; toutefois, il sera rattaché administrativement à l'établissement de [Localité 1], [Adresse 5]

M [Y] [B] compte tenu de la nature de ses fonctions; prend l'engagement d'accepter tout changement de lieu de travail nécessité par l'intérêt du fonctionnement de l'entreprise sur l'ensemble du territoire français où la société exerce ou exercera ses activités ...

ARTICLE 3 FONCTIONS ET ATTRIBUTIONS

M. [Y] [B] exercera ses fonctions en tant que responsable de zone ouest de la France

M. [Y] sera chargé principalement :

- De mettre en place et d'assurer un développement significatif d'un réseau commercial basé sur la méthode de vente sur des périmètres convenus avec la Direction Générale et de contribuer au développement significatif des ventes en rapport avec les moyens mobilisés, rechercher et faire fabriquer des collections auprès de nos fournisseurs sur l'Europe l'Asie le Moyen Orient , l'Afrique du nord et toute autres régions suivant les besoins de l'entreprise.

Ces missions et activités ne sont pas limitatives. Les missions peuvent évoluer en fonction de la stratégie de l'entreprise sans que cela constitue une modification substantielle du contrat de travail.

- Monter un réseau maillé et développer les ventes ;

- Effectuer toute mission commerciale spécifique qui serait demandée par la direction,

- D'assurer le suivi des opérations de ventes.

...

ARTICLE 4 - OBLIGATIONS PROFESSIONNELLES M. [Y] [B] s'engage également à :

- Effectuer personnellement tous les déplacements et visites qui lui seront prescrits par la société SASU BC WEAR dans les conditions et délais out lui seront fixés.

...

M. [Y] s'est vu attribuer de larges missions et des initiatives considérables. Pour les respecter il devait être réactif et pouvoir répondre aux sollicitations de son employeur.

C'est la raison pour laquelle en raison de commodités personnelles une boîte postale a été ouverte près de son domicile. M. [Y] ne bénéficiait pas d'un poste de travail au siège de BC WEAR. Compte tenu de son obligation d'effectuer des visites pour développer le réseau y compris à l'étranger, la boîte postale lui évitait des allers-retours à [Localité 1]. Son rattachement au siège de la société n'est qu'une formalité administrative sans incidence sur l'effectivité de ses missions depuis son domicile.

En outre à défaut d'établir que la société BC WEAR employait d'autres salariés, il entrait dans les attributions de M. [Y] d'être en contact régulier avec la société TERRITOIRE REDSKINS et d'être son interlocuteur principal.

Ce contexte contredit la thèse selon laquelle M. [Y] exercerait la gestion de la société à la place des présidentes successives de BC WEAR, Mme [F] et Mme [H].

La direction de fait d'une société se caractérise par des actes positifs accomplis en toute indépendance dans l'administration et la gestion de l'entreprise.

Il appartient donc au liquidateur es qualités d'établir que M. [Y] a dépassé les missions mises à sa charge en s'immisçant dans le contrôle de la société BC WEAR.

Il ne verse aucune pièce comptable de nature à démontrer que M. [Y] avait la signature des chèques émis par la société BC WEAR ou une quelconque procuration sur les comptes, situation qui caractérise une véritable direction et gestion de fait.

M. [Y] a été condamné par le tribunal correctionnel de Quimper le 11 juillet 2014 à une interdiction d'exercer une profession commerciale ou industrielle, de diriger, administrer gérer ou contrôler une entreprise ou une société pour une durée de 10 ans. Il a signé une déclaration de non condamnation le 8 avril 2016. Cette condamnation et cette fausse déclaration ne sont pourtant pas susceptibles d'établir une gestion de fait ni d'affecter la régularité de la société BC WEAR dont M. [Y] n'est pas le représentant statutaire.

A défaut d'établir le caractère fictif de la société BC WEAR le mandant est tenu de lui verser les indemnités auxquelles elle a droit à la suite de la rupture du contrat.

Le jugement est infirmé de ce chef.

Les indemnités

Article L. 134-11 du code de commerce :

Un contrat à durée déterminée qui continue à être exécuté par les deux parties après son terme est réputé transformé en un contrat à durée indéterminée.

Lorsque le contrat d'agence est à durée indéterminée, chacune des parties peut y mettre fin moyennant un préavis. Les dispositions du présent article sont applicables au contrat à durée déterminée transformé en contrat à durée indéterminée. Dans ce cas, le calcul de la durée du préavis tient compte de la période à durée déterminée qui précède.

La durée du préavis est d'un mois pour la première année du contrat, de deux mois pour la deuxième année commencée, de trois mois pour la troisième année commencée et les années suivantes. En l'absence de convention contraire, la fin du délai de préavis coïncide avec la fin d'un mois civil.

Les parties ne peuvent convenir de délais de préavis plus courts. Si elles conviennent de délais plus longs, le délai de préavis prévu pour le mandant ne doit pas être plus court que celui qui est prévu pour l'agent.

Ces dispositions ne s'appliquent pas lorsque le contrat prend fin en raison d'une faute grave de l'une des parties ou de la survenance d'un cas de force majeure.

Article L. 134-12 :

En cas de cessation de ses relations avec le mandant, l'agent commercial a droit à une indemnité compensatrice en réparation du préjudice subi.

L'agent commercial perd le droit à réparation s'il n'a pas notifié au mandant, dans un délai d'un an à compter de la cessation du contrat, qu'il entend faire valoir ses droits.

Les ayants droit de l'agent commercial bénéficient également du droit à réparation lorsque la cessation du contrat est due au décès de l'agent.

Article L. 134-13 :

La réparation prévue à l'article L. 134-12 n'est pas due dans les cas suivants :

1° La cessation du contrat est provoquée par la faute grave de l'agent commercial ;

2° La cessation du contrat résulte de l'initiative de l'agent à moins que cette cessation ne soit justifiée par des circonstances imputables au mandant ou dues à l'âge, l'infirmité ou la maladie de l'agent commercial, par suite desquels la poursuite de son activité ne peut plus être raisonnablement exigée ;

3° Selon un accord avec le mandant, l'agent commercial cède à un tiers les droits et obligations qu'il détient en vertu du contrat d'agence.

La lettre de rupture du contrat de la société REDSKINS liste les griefs opposés à la société BC WEAR :

Madame la Gérante

La société DAYTONA est une concurrente de notre entreprise et votre société ne peut par conséquent travailler avec elle en dehors de notre accord express et préalable.

Nous joignons à toutes fins à la présente lettre, une copie de votre compte Instagram datée de ce jour.

Nous considérons que toute poursuite de notre relation est ainsi impossible en raison de vos agissements déloyaux outre la constatation d'une baisse très importante des chiffres d'affaires qui ne peut s'expliquer autrement que par un désintérêt total à l'égard de nos produits.

Vos affirmations concernant Mme [F] sont à l'évidence fausses dés lors que la période considérée n'a généré aucune commande.

La gravité de vos agissements entraîne la terminaison immédiate et sans préavis de 1'ensemble de nos conventions, dés réception de la présente, et nous prions nos services comptables de nous transmettre le relevé final des créances/dettes existant entre nos entreprises.

La société REDSKINS reproche à la société BC WEAR de travailler pour une société concurrente ainsi qu'une baisse de ses résultats. Il appartient au liquidateur es qualités de le démontrer pour éviter de régler ce qui est dû à l'agent commercial.

La convention de cession de mandat d'agent commercial du 24 juin 2016 ne prévoit pas de clause de non concurrence à la charge de la société BC WEAR.

Elle comporte une clause d'exclusivité à son profit :

A compter de cette date (au cours de l'année 1996) la société TERRITOIRE REDSKINS SA siret 334027992 a confié à Monsieur [U] [J] le mandat d'agent commercial régi par les dispositions des articles L. 134-1 et suivants du Code de Commerce pour la commercialisation de leurs produits soit les collections d'habillement cuir et textile sur les départements suivants 17 -18- 22- 29 - 35-37- 41-44- 45 - 49 - 50- 53- 56-72 -79 - 85 et 86, région géographique sur laquelle il bénéficie de l'exclusivité de la représentation pour les produits ci-dessus mentionnés hormis pour les clients exclus suivis par la société REDSKINS, soit les grands comptes ; les magasins REDSKINS en propre, filiales ou affiliés ; grands magasins spécialisés ; vents par correspondance ; vente sur internet ; spécialistes du déstockage.

En vertu des dispositions de l'article L. 134-3 du code de commerce l 'agent commercial peut accepter sans autorisation la représentation de nouveaux mandants.

Toutefois, il ne peut accepter la représentation d'une entreprise concurrente de celle de son mandant sans accord de ce dernier.

La société DAYTONA est spécialisée dans le vêtement de cuir.

Mais les éléments versés par le liquidateur es qualités ne permettent de confirmer que la société BC WEAR a manqué à son obligation de loyauté.

La pièce 11 est une succession de photographies minuscules inexploitables. Elles sont insuffisantes à caractériser la présentation des produits DAYTONA par la société BC WEAR.

En outre le liquidateur es qualités ne verse aucune pièce de nature à établir la baisse du chiffre d'affaires de BC WEAR. La lettre de résiliation n'est pas davantage détaillée et caractérisée.

En revanche dès le 25 juillet 2017 la présidente de la société BC WEAR a alerté la société TERRITOIRE REDSKINS :

Nous vous adressons ce courrier afin de vous faire part de la situation catastrophique que nous rencontrons avec votre Marque REDSKINS sur les deux dernières saisons Eté 2017 et Hiver 2017

Lors de la réception de la collection nous avons constaté que vous nous avez fournis des produits des années passées il n'y avait aucune création dans le style pas de pulls pas de polos..

Spécifiquement dans votre ligne ' urbaine de sport' où nous étions attendus par nos clients.

Nous avons du faire des ventes uniquement sur du réassort nous ne pouvons plus vivre cette situation vous mettez notre entreprise en péril car nous avons perdu 29 clients sur cette période et 50 % de notre chiffre d'affaire.

Ceci donne une image négative de la marque sur le marché et pour nos clients.

De plus il semblerait que soit lancée une nouvelle marque sur le marché par vos équipes sous le nom de 'AAKON MOEW '

Nous attendons de votre part une réaction très forte pour trouver des solutions et nous permettre de reprendre des parts de marché chez nos distributeurs .

Il se déduit de ces plaintes que la baisse des résultats reprochés à BC WEAR pourrait également provenir du manque d'investissement du mandant. La procédure collective qui a abouti à la liquidation de la société REDSKINS accrédite cette thèse.

Dans ces conditions la résiliation du mandat d'agent commercial de la société BC WEAR ne repose sur aucune faute grave. Le mandant est tenu de lui régler ses indemnités.

Dans sa déclaration de créance, pièce 15, BC WEAR n'a déclaré que 230 014 euros au titre de l'indemnité de résiliation, 28.751,83 euros HT pour l'indemnité de préavis et 10.000 euros pour l'article 700.

Les déclarations pour mémoire ne sont pas des déclarations de créances.

Il convient de fixer au passif de la société TERRITOIRE REDSKINS la créance de la société BC WEAR à la somme de 230 014 euros au titre de l'indemnité de résiliation et à la somme de 28.751,83 euros HT au titre de l'indemnité de préavis.

La demande de production de nouvelles pièces est sans objet et donc non fondée.

Les demandes annexes

Il n'est pas inéquitable de rejeter les demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Maître [P], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société TERRITOIRE REDSKINS est condamné aux dépens de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour,

- Infirme le jugement sauf en ce qu'il a débouté la société TERRITOIRE REDSKINS de sa demande d'incompétence territoriale du tribunal de commerce de Saint-Brieuc au profit du tribunal de commerce de Quimper ;

Statuant à nouveau :

- Fixe au passif de la société TERRITOIRE REDSKINS la créance de la société BC WEAR à la somme de 230 014 euros au titre de l'indemnité de résiliation et à la somme de 28.751,83 euros HT au titre de l'indemnité de préavis ;

- Condamne Maître [P], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société TERRITOIRE REDSKINS aux dépens de première instance et d'appel ;

- Rejette les autres demandes des parties .