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Décisions

CA Douai, soc. d salle 3, 29 mars 2024, n° 22/01441

DOUAI

Arrêt

Autre

CA Douai n° 22/01441

29 mars 2024

ARRÊT DU

29 Mars 2024

N° 389/24

N° RG 22/01441 - N° Portalis DBVT-V-B7G-URYC

VCL/VM

Jugement du

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de Lille

en date du

22 Septembre 2022

(RG 21/00762 -section 2 )

GROSSE :

Aux avocats

le 29 Mars 2024

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

Chambre Sociale

- Prud'Hommes-

APPELANT :

M. [N] [X]

[Adresse 3]

[Localité 2]

représenté par Me Anne DURIEZ, avocat au barreau de LILLE

INTIMÉE :

S.A. SNCF RESEAU

[Adresse 1]

[Localité 4]

représentée par Me Frédéric DARTIGEAS, avocat au barreau de LILLE

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ

Pierre NOUBEL

: PRÉSIDENT DE CHAMBRE

Virginie CLAVERT

: CONSEILLER

Laure BERNARD

: CONSEILLER

GREFFIER lors des débats : Valérie DOIZE

DÉBATS : à l'audience publique du 18 Janvier 2024

ARRÊT : Contradictoire

prononcé par sa mise à disposition au greffe le 29 Mars 2024,

les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, signé par Pierre NOUBEL, Président et par Serge LAWECKI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE : rendue le 28 Décembre 2023

EXPOSE DU LITIGE ET PRÉTENTIONS RESPECTIVES DES PARTIES :

La SNCF RESEAU a engagé M. [N] [X] par contrat de travail à durée indéterminée à compter du 12 mai 1997 en qualité d'attaché opérateur sur un poste de contrôleur à bord des trains.

Au dernier état de la relation contractuelle, il exerçait les fonctions de technicien commercial principal qualification E, niveau 2, position 20 échelon 8.

La relation de travail est soumise à la convention collective nationale de la branche ferroviaire.

Par lettre datée du 12 mai 2017 notifiée le 24 mai 2017, M. [N] [X] s'est vu notifier un blâme sans inscription.

Contestant cette sanction et arguant d'une discrimination fondée sur son orientation sexuelle, M. [N] [X] a saisi le 16 juillet 2019 le conseil de prud'hommes de Lille qui, par jugement du 22 septembre 2022, a rendu la décision suivante':

- juge que la sanction de blâme sans inscription à l'encontre de M. [N] [X] est proportionnée et conforme au règlement d'indépendance,

- juge que M. [N] [X] n'a pas été victime d'inégalité de traitement et qu'il n'a pas apporté la preuve d'une quelconque discrimination fondée sur son orientation sexuelle,

- juge que la SNCF RESEAU n'a pas manqué à son obligation de sécurité,

- déboute M. [N] [X] de l'intégralité de ses demandes,

- déboute la SNCF RESEAU de sa demande d'article 700 du code de procédure civile,

- condamne M. [N] [X] aux entiers dépens.

M. [N] [X] a relevé appel de ce jugement, par déclaration électronique du 20 octobre 2022.

Par ordonnance du 7 juillet 2023, le conseiller de la mise en état a':

- débouté la SNCF RESEAU de sa demande de caducité de la déclaration d'appel,

- débouté M. [N] [X] de sa demande visant à voir déclarer irrecevables les conclusions de la SNCF RESEAU,

- laissé à chacune des parties la charge de leurs propres dépens d'incident,

- débouté les parties de leurs demandes au titre de leurs frais irrépétibles.

Vu les dernières conclusions notifiées par RPVA le 6 juin 2023 aux termes desquelles M. [N] [X] demande à la cour d'infirmer le jugement déféré et de :

- annuler la sanction de blâme sans inscription en date du 24 mai 2017,

- condamner la SNCF RESEAU au paiement de la somme de 5000 euros nets à titre de dommages et intérêts pour préjudice subi,

- juger que M. [X] a été victime, à titre principal, d'une discrimination fondée sur son orientation sexuelle,

-à titre subsidiaire, juger que M. [X] a été victime d'une rupture d'égalité de traitement,

- en conséquence, condamner la SNCF RESEAU au paiement de la somme de 20'000 euros nets à titre de dommages et intérêts,

- ordonner à la SNCF RESEAU de procéder à une reconstitution de sa carrière avec obligation d'attribuer une rémunération correspondant à la classification résultant du reclassement considéré, à savoir la qualification Cadre F, à compter du 1er octobre 2014 et pour l'avenir,

- condamner la SNCF RESEAU au paiement de la somme de 9567,54 euros bruts à titre de rappel de salaire, outre 956,75 euros bruts de congés payés afférents,

- en tout état de cause, juger que la SNCF RESEAU a manqué à son obligation de sécurité à l'encontre de M. [X],

- condamner la SNCF RESEAU au paiement de la somme de 25000 euros nets à titre de dommages et intérêts pour le préjudice subi pendant le temps contractuel du fait du manquement à l'obligation de sécurité de résultat,

- condamner la SNCF RESEAU à verser à M. [X] la somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'en tous les frais et dépens avec droit de recouvrement au profit de Maître Anne DURIEZ conformément à l'article 699 du code de procédure civile,

- débouter la SNCF RESEAU de l'intégralité de ses demandes.

Au soutien de ses prétentions, M. [N] [X] expose que':

- Sur la discrimination, à tout le moins le non-respect du principe d'égalité de traitement': il a subi une stagnation professionnelle de 2010 à 2013 en raison de difficultés relationnelles avec son supérieur hiérarchique de l'époque, M. [TO], ce dernier faisant régulièrement des remarques quant à son orientation sexuelle.' Il n'a eu aucun entretien annuel sur cette période'; son travail était dévalué, n'était pas apprécié de façon objective'et aucun objectif ne lui était assigné de sorte qu'il ne pouvait être inscrit au tableau d'avancement et qu'il ne percevait aucune prime sur performances. Son retard de carrière, estimé à environ 4 ans, n'a jamais été rattrapé'; il a stagné pendant 14 ans à la qualification E du statut d'agent de maîtrise, alors que ses collègues, d'une ancienneté inférieure, ont accédé plus rapidement à la qualification F.' Il en possède pourtant les qualités et les connaissances nécessaires comme en attestent ses notations, par les responsables de service au sein desquels il a travaillé dans le cadre de sa mobilité. 'Malgré ses alertes, il n'a observé aucun changement, si ce n'est une dégradation de sa situation principalement à compter de 2018, ce d'autant que Mme [V] souhaitait le pousser à quitter le service afin d'offrir son poste à un de ses proches, et à le sanctionner de l'alerte effectuée contre elle. Celle-ci ne prenait, ainsi, pas en compte ses évaluations positives, lui imposait des missions ou il ne disposait pas de compétences entraînant logiquement une mauvaise notation et lui imposait des missions sans l'en informer. Sa prime individuelle ne lui était pas non plus versée ou de manière restreinte, alors même que lorsque des objectifs lui étaient fixés, ils étaient atteints voire dépassés. Sa hiérarchie tentait également de réduire sa rémunération en falsifiant sa demande de rémunération de ses heures supplémentaires au profit d'une demande de jours de récupération dans le cadre de missions de volontaires de l'information dont le nombre lui était limité. Ses convocations aux visites médicales ne lui étaient pas non plus transmises ni inscrites dans son agenda Outlook et l'employeur refusait de lui verser ses tickets restaurant. Sans motif, l'employeur a souhaité récupérer son ordinateur portable, alors même qu'il s'en servait quotidiennement dans le cadre de sa mission et aucune communication n'a, en outre, été réalisée suite à son départ en détachement à l'EIM, le conduisant à continuer à recevoir de nombreux mails afférents à ses anciennes missions. M [X] doit, par suite, se voir allouer des dommages et intérêts, outre une reconstitution de sa carrière à l'échelon F et le rappel de salaire y afférent.

- Sur le blâme': il a fait l'objet d'une sanction en répression de l'alerte qu'il a formulée s'agissant du comportement de sa supérieure hiérarchique, Mme [V], en parfaite méconnaissance des protocoles mis en place par la direction de l'éthique et de la déontologie de la SNCF, l'employeur motivant ladite sanction par des accusations mensongères et propos diffamatoires à l'encontre de Mme [V], ce qui doit conduire à l'annulation dudit blâme. Aucune enquête n'a, en outre, été menée suite au droit d'alerte de M. [X] et l'enquête partiale réalisée contre lui a été menée par son supérieur hiérarchique. Par ailleurs et subsidiairement, la sanction est abusive, en ce que la SNCF RESEAU ne rapporte pas la preuve qui lui incombe de la matérialité et de la gravité des griefs'lesquels sont imprécis et ne peuvent reposer sur l'exercice normal de sa liberté d'expression.

Les faits de harcèlement sexuel sont infondés et aucune sanction ne peut en tout état de cause être prise à cet égard concernant des faits allégués remontant à plus de 10 mois. Aucun grief ne peut en outre lui être reproché en lien avec l'insistance pour accéder à la qualification F, alors même qu'il subissait une discrimination. Dans le même sens, il n'est justifié d'aucune attitude perturbant l'équipe et créant une ambiance délétère. Il est, dès lors, bien fondé à obtenir réparation du préjudice moral subi en lien avec cette sanction.

- Sur le non-respect de l'obligation de sécurité': l'employeur, parfaitement informé de sa situation, en particulier s'agissant des difficultés dans ses rapports avec M. [TO] puis avec Mme [V], ses supérieurs hiérarchiques, n'a pris aucune mesure pour le préserver dans sa santé et dans sa sécurité. Sa prise de poste au sein du pôle régional ingénierie et projets SNCF Manche Nord SNCF de Lille a été difficile, faute d'accompagnement et de soutien internes, suite à l'abandon de son poste par son prédécesseur pendant une année. Il s'est vu refuser de passer des entretiens individuels annuels et a fait l'objet de réflexions homophobes et de critiques injustifiées de la part de M. [TO]. Mme [V] a, pour sa part, dégradé ses conditions de travail, ce qui a eu un impact important sur son état de santé le conduisant à des arrêts maladie, à une hospitalisation et à la reconnaissance d'un accident du travail. Il en a subi un préjudice moral et financier lié à la perte de revenus pendant ses arrêts maladie.

Vu les dernières conclusions notifiées par RPVA le 11 avril 2023, dans lesquelles la SNCF RESEAU intimée, demande à la cour de :

- confirmer le jugement déféré sauf en ce qui concerne les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner M. [N] [X] à lui payer 2000 euros au titre des frais irrépétibles non compris dans les dépens engagés en première instance et 2000 euros sur le même fondement en cause d'appel,

- condamner M. [N] [X] aux dépens.

A l'appui de ses prétentions, la SNCF RESEAU soutient que':

- Conformément au statut SNCF, la juridiction prud'homale n'est compétente que pour examiner la bonne application des dispositions statutaires à la situation de M. [X] et non pour apprécier la légalité de ces dispositions.

- sur l'absence de discrimination quant au déroulement de carrière de M. [N] [X]': l'appelant ne produit pas d'élément laissant supposer l'existence d'une discrimination commise à son encontre. En particulier, il n'a fait l'objet d'aucune stagnation professionnelle, étant rappelé que les promotions sont réalisées au choix et non de façon automatique, en fonction de l'expérience acquise par l'agent et de la maîtrise de l'emploi tenu'; que dans ce cadre, il a pu bénéficier d'une évolution tous les 9 mois en moyenne'; qu'il n'est éligible à la qualification F que depuis le 1er janvier 2018 , qu'il dispose d'une ancienneté sur la qualification inférieure à d'autres agents et qu'en tout état de cause, l'avancement en qualification dépend des vacances au sein de cette qualification, ce alors qu'il ne disposait pas des qualités et connaissances nécessaires pour passer du collège Maîtrise au collège Cadre. Il n'occupait pas non plus de poste comparable à ceux des personnes auxquelles il se compare.

De plus, il n'a pas perçu l'intégralité de la gratification intitulée «'La Prime'», n'ayant pas atteint ses objectifs et compte tenu de son taux de présence annuelle, ce d'autant que sa performance individuelle ainsi que ses qualités de service ne donnaient pas entière satisfaction à son employeur. De même, les autres éléments invoqués ne sont pas établis, étant précisé qu'il a toujours fait l'objet d'un EIA, à l'unique exception de l'année 2012 valant pour l'exercice 2011. Aucune falsification d'un formulaire de Volontaire de l'information n'a, en outre, été réalisée, alors même que le nombre d'heures accomplies dans ce cadre se trouve plafonné et soumis à la validation du supérieur hiérarchique. Dans le même sens, concernant les convocations aux visites médicales, celles-ci ont toujours été adressées au salarié, sauf à une unique reprise avec un oubli de sa conseillère en mobilité. Il a également toujours obtenu le versement de ses tickets restaurant et n'a jamais été privé de son outil de travail.

Dans le même sens, une communication a été réalisée concernant son départ en détachement à l'EIM Enfin, l'employeur n'avait pas connaissance de l'orientation sexuelle de M. [X].

- sur l'absence de manquement à l'obligation de sécurité': d'une part, les éléments médicaux produits en cause d'instance ne permettent pas d'établir un lien entre son état de santé et son activité professionnelle et l'employeur n'en avait pas connaissance avant l'instance prud'homale. D'autre part, la direction de l'éthique et de la déontologie de la SNCF a pu diligenter une enquête par le biais de la direction des ressources humaines de l'établissement direction ingénierie et projets (et non par la DRH de l'établissement I&P Manche Nord dont dépend M. [X]), laquelle a mis en évidence que l'alerte émise le 7 février 2017 par M. [N] [X] n'était pas fondée, Mme [V] n'étant pas dans une démarche harcelante. Au contraire, il a été mis en évidence l'attitude de M. [N] [X], désinvolte et désobligeante, perturbant l'équipe et créant une ambiance délétère'; que ce comportement, caractérisant la mauvaise foi du salarié, a obligé l'employeur à faire usage de son pouvoir disciplinaire de manière proportionnée. M. [X] n'a, en outre, jamais subi de réflexions homophobes et ne peut se prévaloir d'une absence d'accompagnement professionnel au regard des 44 actions de formation suivies pour un total de 1421 heures de formation.

- sur le bien-fondé de la sanction disciplinaire, le rapport d'enquête a mis en évidence de nombreux faits fautifs de M. [X] lesquels ont justifié la sanction. Le salarié ne peut, en outre, se prévaloir d'une quelconque protection de l'article L1152-2 du code du travail dès lors qu'aucun fait de harcèlement n'a été établi et que l'exercice de sa liberté d'expression était manifestement abusif. La procédure disciplinaire a, en outre, été scrupuleusement respectée avec une demande d'explications écrites, sans que la nature de la sanction prononcée ne justifie d'entretien avec le chef d'établissement. La sanction était, par ailleurs, proportionnée se situant au 2ème niveau sur 10 sanctions définies au sein du statut SNCF.

La clôture a été prononcée par ordonnance du 28 décembre 2023.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, pour un plus ample exposé des faits, prétentions et moyens des parties, il est renvoyé aux dernières conclusions susvisées.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur le blâme sans inscription du 24 mai 2017':

Il résulte des dispositions de l'article L1333-1 du code du travail qu'en cas de litige relatif à une sanction disciplinaire, la juridiction saisie apprécie la régularité de la procédure suivie et si les faits reprochés au salarié sont de nature à justifier une sanction, que l'employeur fournit les éléments retenus pour prendre la sanction et qu'au vu de ces éléments et de ceux qui sont fournis par le salarié à l'appui de ses allégations, la juridiction forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si un doute subsiste, il profite au salarié.

Aux termes de l'article L1333-2 du même code, la juridiction peut annuler une sanction irrégulière en la forme, injustifiée ou disproportionnée à la faute commise.

En l'espèce, il résulte des pièces produites que M. [N] [X] a été sanctionné le 24 mai 2017 d'un blâme sans inscription motivé par des accusations mensongères et propos diffamatoires à l'encontre de Mme [V], sa supérieure hiérarchique, des plaisanteries lourdes par des piques ou réflexions portant atteinte aux personnes de son entourage professionnel voire même des faits qui peuvent s'apparenter à du harcèlement sexuel, une insistance inappropriée pour accéder à la qualification F voire une forme de chantage et une attitude désinvolte et désobligeante qui perturbe l'équipe et crée une ambiance délétère.

Le statut des relations collectives applicable au sein de la société SNCF RESEAU fixe une échelle de sanctions applicables par l'employeur au rang desquelles figure le blâme sans inscription.

L'article 4 du chapitre 9 intitulé «'garanties disciplinaires et sanctions'» prévoit, ainsi, que le salarié pour lequel une sanction est envisagée par l'employeur doit être informé par écrit des griefs retenus à 6 jours ouvrables pour lui permettre de donner des explications par écrit. Tel a été le cas en l'espèce.

L'organisation d'un entretien n'est, en outre, prévue qu'à compter du blâme avec inscription et ne s'imposait, dès lors, pas.

Cette sanction a, par ailleurs, été prise à l'issue d'une enquête menée par deux membres de la direction des ressources humaines située à [Localité 5], M. [U] [W], responsable relations sociales, et Mme [H] [G], conseillère en relations sociales. Aucun élément ne permet de démontrer que ces deux enquêteurs ont été supérieurs hiérarchiques, subordonnés ou collègues de M. [X] ou de toute personne mise en cause par l'alerte, ou encore entretenaient des relations amicales ou inamicales avec l'intéressé, ce qui aurait alors exclu, conformément à la charte de déontologie dans la conduite d'enquêtes, toute participation des intéressés à ladite enquête.

Et le seul fait que M. [X] ait appartenu au pôle ressources humaines en région, en l'occurrence au service d'ingénierie et projets Manche Nord ne peut conduire à exclure de facto, comme enquêteur, toute personne appartenant à un service des ressources humaines au sein de la SNCF RESEAU ou encore appartenant au pôle RRH national, M. [W] et Mme [G] n'ayant tous deux jamais été les supérieurs hiérarchiques de l'intéressé.

La procédure mise en 'uvre concernant ladite sanction a donc été respectée.

Sur le fond, cette sanction repose sur les auditions réalisées de 8 salariés, suite à une alerte mise en 'uvre par un supérieur hiérarchique de M. [X] et l'enquête interne menée ayant abouti au rapport du 7 avril 2017.

Il résulte dudit rapport que notamment à compter de son EIA 2017 et de son impossibilité de postuler pour un poste relevant de la qualification F, le salarié a adopté des propos déplacés envers sa supérieure hiérarchique comme en attestent plusieurs témoignages (ex': «'Il a dit que B. n'avait pas de légitimité en terme de diplôme pour occuper ses fonctions actuelles et qu'elle s'entourerait de personnes de sa connaissance. Elle souhaiterait construire son propre réseau autour d'elle'» ou encore «'avec G, on se sent complètement isolé, il a pourri l'entourage. Il dit qu'on est du côté de B. Quand j'ai vu l'arrêt maladie de B., j'ai trouvé cela anormal. Ce n'est pas à elle de subir. J'ai demandé un rendez-vous avec [A] [E] pour l'informer que c'était de l'acharnement envers elle'» ou encore «'c'est lui qui harcèle B. si harcèlement il y aurait. Il est irrespectueux à travers son attitude. Il traîne la patte avant d'aller en réunion. Soit il souffle soit il met tout sur le ton de l'humour'» ou enfin, «'Il m'attaque sur ma personne, il remet en cause mes diplômes, la manière dont j'aurais obtenu mon poste de RRH, ma légitimité à tenir ce poste. Il dit que je suis carriériste, que je manipule l'équipe de manière malhonnête et véhicule cette idée autour de lui. (') Il sait ce qu'il fait, il cherche à m'atteindre pour en retirer un bénéfice lui-même'»).

De manière générale, M. [N] [X] est décrit comme «'perturbant' le collectif de travail par des «'piques'» et des réflexions quotidiennes telles que «'oh tu es grosse'», les salariés auditionnés évoquant une attitude choquante, déplacée et parfois désinvolte.

Les enquêteurs ont, en outre, conclu au nécessaire changement de poste de M. [X] «'afin de préserver et protéger l'équipe RH dans son ensemble face à l'attitude inappropriée et non professionnelle de l'intéressé qui instaure un climat délétère au sein de l'équipe, certains propos tenus par l'appelant laissant «'apparaître une certaine détermination et intention pour arriver à ses fins. M.A arrêterait ses démarches à l'encontre de Mme B. s'il obtenait la qualification F'».

Ainsi et sans qu'il soit besoin d'examiner tous les autres griefs allégués, il est établi le comportement inapproprié de M. [X], son attitude et ses propos désobligeants à l'égard de ses collègues de travail ainsi que la forme de chantage mise en place, lesquels légitiment le prononcé d'une sanction par la société SNCF RESEAU à l'encontre de M. [N] [X] dont la mauvaise foi se trouve, par ailleurs, soulignée dans le rapport précité.

A cet égard, si le salarié se prévaut d'une immunité inhérente à l'alerte mise en 'uvre par ses soins à l'encontre de Mme [V], cette immunité ne s'applique pas aux salariés de mauvaise foi ou lorsque les enquêtes mettent en lumière, comme en l'espèce, un comportement inapproprié dudit salarié, ce conformément au statut et à la charte précités.

Aucune prescription n'est, en outre, encourue le comportement de M. [N] [X] étant décrit au sein de l'enquête comme perdurant de façon continue.

Enfin, la sanction prononcée limitée à un blâme sans inscription, située au 2ème niveau de sanctions sur une échelle de 10 allant jusqu'à la radiation est proportionnée aux griefs établis.

M. [X] est, par conséquent, débouté de sa demande d'annulation du blâme sans inscription et débouté de sa demande de dommages et intérêts y afférente.

Le jugement entrepris est confirmé.

Sur la discrimination liée à l'orientation sexuelle et l'inégalité de traitement':

En application de l'article L. 1132-1 du code du travail, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte en raison, notamment, de son orientation sexuelle.

En application des articles L. 1132-1, L. 1134-1 et L. 2141-5 du code du travail, il appartient au salarié qui s'estime victime d'une discrimination directe ou indirecte de présenter des éléments de fait laissant supposer son existence. Il appartient au juge d'apprécier si ces éléments, pris dans leur ensemble, laissent présumer l'existence d'une telle discrimination et, dans l'affirmative, il incombe à l'employeur de prouver que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination étant rappelé que l'existence d'une discrimination n'implique pas nécessairement une comparaison avec la situation d'autres salariés.

Il résulte, par ailleurs, du principe d'égalité de traitement énoncé aux articles L. 2261-22 et L 2271-1 du code du travail que l'employeur est tenu d'assurer l'égalité de rémunération entre tous les salariés de l'un ou l'autre sexe, pour autant que les salariés en cause accomplissent un travail égal ou de valeur égale.

Conformément aux dispositions de l'article L. 3221-4 du code du travail, sont considérés comme ayant une valeur égale, les travaux qui exigent des salariés un ensemble comparable de connaissances professionnelles consacrées par un titre, un diplôme ou une pratique professionnelle, de capacités découlant de l'expérience acquise, de responsabilités, et de charge physique et nerveuse.

Il appartient à celui qui invoque une inégalité de traitement de démontrer au préalable qu'il exerce des fonctions identiques ou similaires à celles du salarié à qui il se compare. Si ces éléments sont rapportés, il incombe alors à l'employeur d'établir que les différences de traitement reposent sur des raisons objectives dont le juge peut contrôler la réalité et la pertinence.

En application de ce principe, si des mesures peuvent être réservées à certains salariés, c'est à la condition que tous ceux placés dans une situation identique, au regard de l'avantage en cause, aient la possibilité d'en bénéficier, à moins que la différence de traitement soit justifiée par des raisons objectives et pertinentes et que les règles déterminant les conditions d'éligibilité à la mesure soient préalablement définies et contrôlables.

En premier lieu, la cour relève que si M. [N] [X] se prévaut d'une discrimination liée à son orientation sexuelle, il ne fournit aucun élément permettant d'établir que l'employeur avait connaissance de cette orientation sexuelle, aucune des nombreuses pièces produites n'y faisant référence ni même allusion, nonobstant les allégations non étayées du salarié sur des remarques de son ancien supérieur hiérarchique.

Aucun lien ne peut, par suite, être établi entre les décisions prises par l'employeur et reprises ci-après dans le cadre de l'inégalité de traitement et une éventuelle discrimination liée à l'orientation sexuelle laquelle ne peut qu'être écartée.

Concernant l'inégalité de traitement, M. [N] [X] verse aux débats de nombreux éléments desquels il résulte que':

- Il n'a pas fait l'objet d'un entretien individuel annuel entre 2011 et 2013 alors qu'un tel entretien doit intervenir une fois par an entre décembre et février et que la reconnaissance de la performance exprimée par l'appréciation du manager sur le support EIA est prise en compte dans le dispositif de promotion et d'avancement.

- Il se trouve positionné au statut Agent de maîtrise, qualification E depuis le 1er octobre 2008 alors que le délai moyen pour passer de la qualification E à F est situé entre 115 mois et 120,79 mois soit entre 9 ans et demi et 10 ans.

- Son passage à la qualification F se trouve bloqué alors même qu'il a fait preuve d'une grande mobilité en signant le 27 septembre 2017 un contrat de prestations d'accompagnement professionnel et de formation avec l'affectation sur des missions variées telles que le dispositif ALPHA du 1er octobre au 31 décembre 2017 et la direction des achats du 13 août 2018 au 14 février 2019. Ses compétences étaient, en outre, reconnues et avérées au regard des retours donnés suite aux différentes missions réalisées (ex': mail de [J] [T] sur son passage à ALPHA :'«'[N] était un très bon élément chez ALPHA. Il a, de suite, constaté ceux qui pouvaient de ceux qui ne pouvaient pas et surtout ceux qui cherchaient à masquer qu'ils pouvaient. Il lui a fallu un petit temps d'adaptation mais c'est vraiment quelqu'un d'intéressant (de la culture ! ) avec des capacités. Ce qui peut l' handicaper c'est peut être sa franchise sur certaines prises de position ! mais c'est quelqu'un d'efficace à mon sens et qui sait mener à bien les missions qui lui sont confiées, qui sait aussi rendre compte quand il bloque ou quand il en a terminé. Personnellement, j'ai apprécié son passage à ALPHA et je ne flagorne pas'» ou encore le mail de la responsable ERC du 29 mai 2018 : «'Un grand merci pour le travail que tu as pu fournir pour porter ce beau projet'», ou, enfin, les mails de remerciements de septembre 2013 et novembre 2015 respectivement relatifs au contrat de [R] [B] et au travail sur l'alternance).

- Il ne lui était pas attribué le montant maximum de «'la Prime'» qui est un dispositif de reconnaissance des agents récompensant à la fois l'atteinte d'objectifs collectifs et la contribution individuelle à la performance de l'entreprise avec un montant moyen de 400 euros et un montant maximum de 600 euros, percevant entre 200 et 290 euros.

- Il n'a pas été informé par son employeur du rendez-vous avec le médecin du travail prévu le 15 décembre 2017.

- En novembre 2017, son compte Edenred n'a pas été alimenté en tickets restaurants, alors que son droit à cet égard était acquis.

- L'employeur a demandé début février 2018 à récupérer son ordinateur portable, alors qu'il se trouvait en mission de détachement, le conduisant à alerter son supérieur sur la privation de son seul outil de travail, ne disposant d'aucun ordinateur attribué dans ses différentes missions.

- Alors qu'il avait demandé à ce qu'une communication soit faite concernant son départ en mission en novembre 2017, il a reçu le 4 juin 2018 une demande relative à ses anciennes attributions, sollicitant, ainsi, de nouveau, la diffusion d'une information concernant son départ.

- Lorsqu'il s'est porté volontaire dans le cadre du dispositif «'Volontaire de l'information'», le nombre de VI réalisé a été limité à 5 par an par Mme [V] avec validation obligatoire par cette dernière et le formulaire d'option entre le paiement en heures supplémentaires ou la récupération des heures a, concernant les 3 et 4 mai 2018 été modifié par sa supérieure en faveur non pas du paiement des heures supplémentaires réclamées mais d'une récupération d'heures.

- Le 7 février 2017, il a signalé à M. [A] [E] être victime de harcèlement professionnel de la part de Mme [V], sa supérieure, outre un non-respect par cette dernière des principes de reconnaissance professionnelle et des conflits d'intérêts, ce qui a conduit à la mise en 'uvre d'une enquête déontologique interne et à son audition par M. [W], DRH Adjoint, et Mme [G], conseillère relations sociales.

- Compte tenu de l'alerte donnée en parallèle par Mme [V] le concernant, il a finalement été sanctionné d'un blâme sans inscription le 24 mai 2017 pour «'Accusations mensongères et propos diffamatoires à l'encontre de Mme [V], plaisanteries lourdes par des piques ou réflexions portant atteinte aux personnes de votre entourage professionnel voire même des faits qui peuvent s'apparenter à du harcèlement sexuel, insistance inappropriée pour accéder à la qualification F voire une forme de chantage et attitude désinvolte et désobligeante qui perturbe l'équipe et crée une ambiance délétère'», sans qu'aucune mesure ne soit prise à l'encontre de sa supérieure ni changement de supérieure hiérarchique. Or, il résulte du guide sur l'alerte professionnelle que l'émetteur d'alerte n'encourt aucune sanction disciplinaire du fait d'une alerte émise de bonne foi quel qu'en soit le résultat final.

- Une alternante en 2015-2016, Mme [WA] [Z] et une bénéficiaire d'un contrat de professionnalisation en 2010, Mme [O] [P], témoignent de l'investissement du salarié, de son grand professionnalisme, de son respect d'autrui et de l'absence de comportement harcelant.

- Suite à la communication du rapport d'enquête interne, il a subi un choc psychologique le 9 mai 2017 déclaré comme accident du travail et reconnu comme tel par la cour d'appel d'Amiens le 13 décembre 2022.

- Ces agissements ont eu des conséquences importantes sur son état de santé. Ainsi, le Dr [RD] [L] évoque des problèmes relationnels et une souffrance au travail durant l'année 2017, outre la mise en place d'un suivi psychiatrique auprès du Dr [HD]. Le médecin du travail décrit pour sa part un vécu délétère de son entretien individuel lié à la restitution de l'enquête interne, avec des insomnies et un trouble anxieux réactionnel. Le médecin généraliste de l'intéressé, le Dr [C], atteste pour sa part d'un état d'anxiété aigue avec poussée d'eczéma associée ainsi qu'un syndrome anxiodépressif aigu.

M. [N] [X] présente, par suite, des éléments de fait suffisamment précis laissant supposer l'existence d'une inégalité de traitement avec des salariés placés dans la même situation ou une situation similaire.

Il incombe, par suite, à la société SNCF RESEAU de prouver que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à toute inégalité de traitement.

En premier lieu, concernant l'absence d'entretien annuel entre 2011 et 2013, l'employeur démontre que si M. [N] [X] n'a effectivement pas fait l'objet d'un entretien annuel en 2012 pour l'année 2011 et à la date prévue en 2013 pour l'année 2012, un entretien annuel a été régularisé en octobre 2013 concernant l'année 2012.

Surtout, la société SNCF RESEAU démontre que M. [X] n'était, en tout état de cause, pas accessible à cette date à un avancement n'ayant pas atteint le nombre d'année nécessaire au grade antérieur, de sorte qu'il n'en est pas résulté de «'blocage'» d'évolution. Il ressort, en outre, des pièces versées que d'autres salariés étaient concernés par cette absence d'entretien (ex de Mme [K] [S] ' mail du 22 mai 2014) et que ce défaut d'entretien ne l'a pas non plus empêché de percevoir la prime dont il a d'ailleurs contesté le montant.

Enfin, l'intimée démontre que le moyen tiré de l'absence d'évaluation entre 2011 et 2013 a déjà fait l'objet d'un examen par la juridiction prud'homale (CPH de Paris du 15 décembre 2014, jugement devenu définitif) notamment sous l'angle de l'inégalité de traitement qui avait alors conclu au débouté de M. [X] de sa demande de dommages et intérêts formée à cet égard excluant toute inégalité.

Ainsi, la société SNCF RESEAU démontre que, nonobstant le caractère regrettable de l'absence d'entretien annuel en 2012, des éléments objectifs liés à l'absence d'atteinte par le salarié du nombre nécessaire d'années au grade précédent démontrent l'absence d'incidence de cette omission sur l'évolution de carrière de l'intéressé, ce d'autant que celui-ci a fait l'objet de façon continue de changements de position, de grade, de qualification, de niveau et de position (cf déroulé de carrière).

Concernant les difficultés liées aux tickets restaurant et à son ordinateur portable, il est constant que M. [X] a conclu le 27 septembre 2017 un contrat de prestations d'accompagnement professionnel et de formation en lien avec l'EIM consistant sur une période de l'ordre de deux années à réaliser différentes missions au sein de services différents susceptibles de présenter un poste à pourvoir.

Le salarié a, ainsi, été amené à accomplir différentes missions auprès, par exemple du dispositif Alpha ou encore de la direction des achats.

L'employeur démontre, tout d'abord, que l'abondement du compte Edenred en tickets restaurants incombe, dans le cadre du dispositif sus-évoqué, non pas du service d'origine mais de l'unité d'affectation, que l'éligibilité de M. [X] au bénéfice de tickets restaurants n'a jamais été remise en cause, que la salariée en charge de la validation du compte tickets restaurants, Mme [I] [F], s'est excusée pour sa validation tardive dudit compte Edenred et que l'ensemble des tickets restaurants dont devait bénéficier l'appelant lui a bien été versé.

Dans le même sens, concernant l'ordinateur portable de l'intéressé, si une demande a été faite de pouvoir récupérer cet ordinateur affecté au service RH au sein duquel M. [X] n'intervenait plus, la société SNCF RESEAU démontre qu'après avoir été informée par le salarié de l'absence d'ordinateur disponible au sein des lieux de missions, cette demande a été immédiatement retirée afin de permettre à ce dernier de conserver son outil de travail (échanges de mails entre [D] [V] et [I] [F] du 2 février 2018, au terme desquels la première écrit «'Il n'est bien sûr pas question de le priver de son outil de travail'»).

L'employeur démontre, par suite, que les décisions prises concernant les tickets restaurants et l'ordinateur portable se justifient par des éléments objectifs étrangers à toute inégalité de traitement.

Concernant l'absence d'information délivrée au titre du rendez-vous auprès de la médecine du travail du 15 décembre 2017, là encore, il ressort des pièces produites par la société SNCF RESEAU que cet oubli résulte de la situation particulière d'affectation de l'intéressé en missions, la conseillère mobilité chargée de l'en informer ayant oublié de le faire (mail du 15 décembre 2017': «'C'est un loupé de ma part j'ai cru qu'[N] était dans la boucle et ne lui ait pas transféré le mail. Désolée'»).

Dans le même sens, il est démontré par la production du relevé des visites auprès de la médecine du travail que M. [N] [X] a fait l'objet de 11 visites médicales entre le 16 juillet 2010 et le 5 février 2020, attestant d'un suivi régulier et surtout du fait que l'absence d'information donnée quant à la date de la visite médicale fixée ne s'est produite qu'à une unique reprise sur toute la relation de travail.

La société SNCF RESEAU démontre, par suite, que cet unique oubli concernant la diffusion d'une date de visite médicale se justifie par des éléments objectifs étrangers à toute inégalité de traitement.

Concernant le dispositif «'Volontaire de l'information'», il résulte du référentiel Voyageurs Directive et des principes de base de ce dispositif consistant à affecter des salariés de tous services à l'accueil et l'orientation des voyageurs en cas d'événement exceptionnel, grève' que l'engagement du volontaire sur un nombre d'interventions est expressément fixé à environ 5 par an (dont 3 programmées à vocation de maintenir les compétences et garantir la pratique). Il est recommandé de ne pas dépasser 6 heures pour une intervention programmée.

Ce dispositif prévoit également la validation par le N+1 de cette intervention du salarié en dehors de son service et l'organisation par ledit supérieur de la récupération des heures ou de leur paiement en heures supplémentaires.

L'employeur démontre, ainsi, qu'en limitant le nombre d'intervention à 5 par an et en demandant à M. [X] de faire valider au préalable cette intervention par son supérieur, Mme [V] n'a fait que respecter les directives données par l'entreprise concernant ce dispositif.

Concernant l'option donnée entre le paiement en heures supplémentaires ou la récupération, plusieurs fiches de relevé individuel d'utilisation d'un volontaire de l'information déposées par M. [X] attestent du paiement des heures supplémentaires, conformément à la demande du salarié. Et si à une unique reprise, l'option a été modifiée en faveur d'une récupération, ce sur la fiche des 3 et 4 mai 2018, il est justifié que Mme [V] a, là encore, appliqué une directive de l'employeur de prioriser ladite récupération, face à une période de grève exceptionnelle et de longue durée, la supérieure hiérarchique ayant d'ailleurs pris le soin de le mentionner expressément sur la fiche de relevé individuel.

Enfin et en tout état de cause, compte tenu de l'opposition formalisée par M. [N] [X] à ladite récupération, un paiement des heures supplémentaires a été validé.

La société SNCF RESEAU démontre, ainsi, que ce changement en faveur d'une récupération se trouve justifié par des éléments objectifs étrangers à toute inégalité de traitement en lien avec une grève de longue durée en cours à la SNCF, nécessitant de mobiliser de façon réitérée de nombreux volontaires de l'information.

Dans le même sens, s'agissant de l'absence de communication concernant son départ des fonctions de correspondant formation et alternance, la société SNCF RESEAU justifie de la diffusion en décembre 2017 d'un flash info informant les différents services de l'arrivée de Mme [KB] [M], au poste occupé jusqu'à présent par M. [N] [X].

Et le seul fait pour le salarié d'avoir reçu à une reprise, le 4 juin 2018, un mail d'un autre salarié concernant ses anciennes fonctions dont il ne relevait plus, ne permet pas d'affirmer l'existence d'une inégalité de traitement.

L'employeur justifie, dès lors, d'éléments objectifs à cet égard excluant toute inégalité de traitement.

Concernant le blâme sans inscription notifié à M. [X], il résulte des développements repris ci-dessus que la société SNCF RESEAU démontre que ladite sanction était légitime, proportionnée aux faits reprochés et a été prononcée en respectant la procédure prévue à cet effet.

Elle repose, dès lors, sur des éléments objectifs étrangers à toute inégalité de traitement.

En outre, il ne résulte pas de l'enquête interne menée de volonté de nuire à M. [X] ou encore de régler ses comptes avec ce dernier, les auditions ayant été réalisées par deux personnes qui ne correspondent pas à la ligne hiérarchique du salarié et de sa supérieure.

La société SNCF RESEAU démontre, à cet égard, au regard du contenu du rapport communiqué, que si Mme [V] peut adopter «'une attitude quelque peu dirigiste'» avec l'ensemble des membres de son équipe, aucun harcèlement moral ne peut lui être reproché, les enquêteurs ayant constaté que le sentiment de harcèlement moral évoqué par M. [X] reposait en réalité sur la seule frustration de ce dernier de ne pas obtenir la qualification F.

A cet égard, concernant le fait pour M. [N] [X] de ne pas avoir pu accéder à la qualification F correspondant à celle des cadres, il résulte de plusieurs évaluations de ce dernier que si les missions qui lui ont été confiées dans leur aspect technique ont la plupart du temps été remplies au regard des compétences professionnelles de l'intéressé, il apparaît, toutefois que ce dernier rencontrait des difficultés relationnelles.

Ainsi, il ressort de l'EIA 2017 que le travail en équipe et en collaboration dans l'intérêt collectif n'a pas été assez développé avec un manque de solidarité de M. [X] vis-à-vis de ses collègues et la nécessité pour celui-ci de développer son esprit d'ouverture et d'écoute. Il est également mis en évidence la nécessité de ne pas adopter trop rapidement une attitude d'opposition pouvant donner lieu à des jugements de valeurs, appelant à de meilleurs capacités d'adaptation dans l'objectif de réaliser un travail d'équipe efficace.

Ces remarques sont également reprises par Mme [I] [Y] dans la grille d'appréciation des agents accompagnés par l'EIM Hauts de France- exercice de notation 2020 qui fait état d'un «'agent ayant un relationnel agréable sur le premier semestre mais qui a pris des « libertés » en fin d'année avec l'équipe EIM. Cette attitude familière déplacée a fortement irrité le collectif de travail'». Elle évoque également le fait que les missions confiées sont réalisées mais sans être investies à fond, soulignant de ce fait que, dans ce contexte, la teneur des missions attribuées à [N] [X] est en deçà de ce qui est requis sur un poste à sa qualification. Elle souligne également un comportement inapproprié, déplacé indiquant «'Il a de réelles difficultés à se remettre en question suite aux recadrages faits sur son comportement déplacé, décalé. Il reproduit les mêmes écarts de comportement'».

Ces difficultés ont, en outre, été soulignées lors de la mission ALPHA, M. [J] [T] évoquant également la nécessité de faire preuve d'assertivité vis-à-vis de certaines personnes ou encore une franchise pouvant «'l'handicaper'» et ont également été reprises dans le cadre du rapport d'enquête interne qui souligne de la même façon un manque de solidarité professionnelle avec le reste de l'équipe ainsi qu'un manque de relationnel avec les différents managers.

La société SNCF RESEAU justifie, ainsi, par des éléments objectifs étrangers à toute inégalité de traitement l'absence de passage de M. [X] au statut de cadre (classification F), lesdits éléments ayant, en outre, été communiqués et expliqués à l'intéressé dans le cadre de son EIA 2017 («'[N] pourra envisager une évolution au collège cadre lorsqu'il aura développé les compétences suivantes: porter les orientations de l'entreprise, se montrer constructif, développer la coopération, s'inscrire dans le collectif de travail, gérer en toute autonomie les interfaces internes et externes, faire preuve d'une bonne compréhension des sujets de leurs enjeux, d'ouverture et d'innovation, être orienté résultats/clients et faire preuve de progression continue dans ses fonctions'»).

Il en va de même du paiement partiel de la prime annuelle, dispositif de reconnaissance des agents récompensant à la fois l'atteinte d'objectifs collectifs et la contribution individuelle à la performance de l'entreprise, les difficultés rencontrées par M. [N] [X] concernant le relationnel et l'absence de solidarité avec son équipe justifiant d'un versement partiel, caractérisant, ainsi, des éléments objectifs étrangers à toute inégalité de traitement.

Il résulte, par conséquent, de ces éléments pris dans leur ensemble que la société SNCF RESEAU justifie que les différences de traitement et notamment l'absence de passage à la classification F reposent sur des raisons objectives étrangères à toute discrimination.

M. [N] [X] est, par conséquent, débouté de sa demande de reconnaissance d'une inégalité de traitement et des dommages et intérêts y afférents et le jugement entrepris est confirmé.

Sur la reconstitution de carrière':

Le salarié discriminé peut prétendre à un reclassement dans le coefficient de rémunération qu'il aurait atteint en l'absence de discrimination ou d'inégalité de traitement.

M. [N] [X] étant débouté de sa demande de reconnaissance d'une inégalité de traitement, il ne peut être fait droit à sa demande de reconstitution de carrière.

Cette demande est, par conséquent, rejetée et le jugement entrepris est confirmé.

Sur l'obligation de sécurité':

Aux termes de l'article L. 4121-1 du code du travail, l'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. Ces mesures comprennent des actions de prévention des risques professionnels, y compris ceux mentionnés à l'article L4161-1, des actions d'information et de formation, et la mise en place d'une organisation et de moyens adaptés. L'employeur veille à l'adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l'amélioration des situations existantes.

L'obligation générale de sécurité se traduit par un principe de prévention au titre duquel les équipements de travail doivent être équipés, installés, utilisés, réglés et maintenus de manière à préserver la santé et la sécurité des travailleurs.

Respecte l'obligation de sécurité, l'employeur qui justifie avoir pris toutes les mesures de prévention prévues par les articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail (actions de prévention, d'information, de formation...).

Il incombe à la société SNCF RESEAU de rapporter la preuve du respect de cette obligation.

En l'espèce, s'il n'est pas contesté que M. [N] [X] a pris son poste au sein du pôle régional ingénierie et projets SNCF Manche Nord SNCF de Lille dans un contexte de vacance du poste pendant une année, l'intimée justifie des nombreuses formations suivies par l'intéressé afin de l'accompagner dans ses différentes prises de fonctions.

En outre, la société SNCF RESEAU démontre avoir mis en 'uvre une enquête interne après avoir été informée de l'alerte donnée par M. [N] [X] et Mme [V] laquelle a donné lieu à des auditions de plusieurs salariés et à l'élaboration d'un rapport d'enquête complet.

Elle justifie également après la réalisation de l'enquête interne avoir tenu compte des préconisations dudit rapport et notamment la nécessité de ne plus laisser le salarié et sa supérieure hiérarchique travailler ensemble en mettant en place avec l'accord de l'appelant une convention de prestations d'accompagnement professionnel le 27 septembre 2017 afin de permettre à ce dernier de sortir de son milieu professionnel pour être placé en missions dans différents services dans la perspective de découvrir de nouvelles fonctions et d'envisager un changement de poste.

Si les difficultés de santé de l'appelant résultent des éléments médicaux produits aux débats, force est de constater qu'elles ne trouvent pas leur origine dans un manquement de l'employeur à son obligation de sécurité, peu important qu'ait été reconnu comme accident du travail le malaise subi par l'intéressé sur son lieu de travail en lien avec le choc ressenti après avoir pris connaissance du contenu du rapport d'enquête le mettant en cause pour des comportements et propos inappropriés.

M. [N] [X] est débouté de sa demande de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité.

Sur les autres demandes':

Les dispositions du jugement entrepris afférentes aux dépens et aux frais irrépétibles exposés en première instance sont confirmées.

Succombant à l'instance, M. [N] [X] est condamné aux dépens d'appel.

L'équité commande de laisser à chaque partie la charge des frais irrépétibles par elle exposés en cause d'appel, de sorte que les demandes respectives formées à cet égard sont rejetées.

PAR CES MOTIFS':

La COUR,

CONFIRME le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Lille le 22 septembre 2022, dans l'ensemble de ses dispositions';

ET Y AJOUTANT,

CONDAMNE M. [N] [X] aux dépens d'appel';

DÉBOUTE les parties de leurs demandes respectives d'indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile';

DÉBOUTE les parties de leurs demandes plus amples et contraires.

LE GREFFIER

Serge LAWECKI

LE PRÉSIDENT

Pierre NOUBEL