Décisions
CA Douai, soc. c salle 1, 29 mars 2024, n° 22/00106
DOUAI
Arrêt
Autre
ARRÊT DU
29 Mars 2024
N° 439/24
N° RG 22/00106 - N° Portalis DBVT-V-B7G-UCLJ
MLB / SL
Jugement du
Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de LENS
en date du
17 Janvier 2022
(RG 20/00162 -section )
GROSSE :
aux avocats
le 29 Mars 2024
République Française
Au nom du Peuple Français
COUR D'APPEL DE DOUAI
Chambre Sociale
- Prud'Hommes-
APPELANT :
Mme [J] [Y]
[Adresse 5]
[Localité 3]
représentée par Me Gérald VAIRON, avocat au barreau de BETHUNE
INTIMÉE :
S.A.R.L. JELY CONTACT
[Adresse 2]
[Localité 4]
représentée par Me Jérôme WATRELOT, avocat au barreau de PARIS substitué par Me Benoît DUBESSAY, avocat au barreau de PARIS
S.A.S. CARREFOUR PROXIMITE FRANCE
[Adresse 8]
[Localité 1]
représentée par Me Jérôme WATRELOT, avocat au barreau de PARIS substitué par Me Benoît DUBESSAY, avocat au barreau de PARIS
DÉBATS : à l'audience publique du 17 Janvier 2024
Tenue par Muriel LE BELLEC
magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les parties ou leurs représentants ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré,
les parties ayant été avisées à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe.
GREFFIER : Nadine BERLY
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ
Muriel LE BELLEC
: conseiller faisant fonction de
PRESIDENT DE CHAMBRE
Gilles GUTIERREZ
: CONSEILLER
Nathalie RICHEZ-SAULE
: CONSEILLER
ARRÊT : Contradictoire
prononcé par sa mise à disposition au greffe le 29 Mars 2024,
les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, signé par Muriel LE BELLEC, conseiller désigné pour exercer les fonctions de président et par Serge LAWECKI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
ORDONNANCE DE CLÔTURE : rendue le 20/12/2023
EXPOSÉ DES FAITS
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Mme [Y], née le 12 avril 1976, a été embauchée par contrat de travail à durée indéterminée à compter du 10 mai 2004 en qualité de caissière employée libre-service par la société Penny Market.
La relation de travail était régie par la convention collective des commerces de détail et de gros à prédominance alimentaires.
Elle était initialement affectée au magasin de [Localité 7], exploité en dernier lieu par la société Carrefour Proximité France, à laquelle son contrat de travail a été transféré.
Elle a été promue en février 2009 au poste d'adjoint chef de magasin et affectée à compter d'avril 2017 au magasin de [Localité 4], [Adresse 6].
Mme [Y] a été placée en arrêt de travail sans discontinuer à compter du 12 juin 2018.
Elle a saisi le conseil de prud'hommes de Lens le 28 février 2019 d'une demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail et de diverses demandes liées à l'exécution et la rupture de son contrat de travail.
Le 22 mai 2019, la société Jely Contact a repris le magasin de [Localité 4] en location-gérance. Le contrat de travail de Mme [Y] lui a été transféré. La société Jely Contact a informé Mme [Y] que s'appliquait désormais la convention collective de commerce de détail des fruits et légumes, épiceries et produits laitiers puisque l'effectif était inférieur à 11 salariés, que ses avantages sociaux individuels seraient maintenus et intégrés à sa rémunération mensuelle brute, qui s'élèverait en conséquence à 2'183 euros.
Le 20 novembre 2019, le médecin du travail a déclaré Mme [Y] inapte à son poste en précisant que son état de santé faisait obstacle à tout reclassement dans un emploi.
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Mme [Y] a été convoquée par lettre recommandée du 23 novembre 2019 à un entretien préalable à un éventuel licenciement le 4 décembre 2019, à l'issue duquel la société Jely Contact l'a licenciée pour inaptitude et impossibilité de reclassement le 9 décembre 2019.
Mme [Y] a saisi le conseil de prud'hommes de Lens le 23 juin 2020 de demandes présentées cette fois contre la société Carrefour Proximité France et la société Jely Contact.
Par jugement de départage en date du 17 janvier 2022 le conseil de prud'hommes a débouté Mme [Y] de l'ensemble de ses demandes, la société Carrefour Proximité France et la société Jely Contact de leurs demandes fondées sur de l'article 700 du code de procédure civile et condamné Mme [Y] aux dépens.
Les 25 et 26 janvier 2022, Mme [Y] a interjeté appel de ce jugement.
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Les deux procédures ont été jointes par ordonnance du 27 avril 2022.
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Par ses conclusions reçues le 10 février 2022 auxquelles il convient de se reporter pour un exposé détaillé des prétentions et moyens, Mme [Y] demande à la cour de':
«'statuant à nouveau,
Infirmer la décision déférée
Il est demandé à la cour de juger que'la partie défenderesse's'est rendue coupable d'une violation de son obligation de santé au travail.
Il est demandé à la cour de condamner la partie défenderesse à payer à la demanderesse une somme de 10'000 euros de dommages et intérêts sur ce fondement.
Il est demandé à la juridiction saisie du litige de juger que l'employeur s'est rendu coupable d'un travail clandestin au sens de l'article L.8223-1 du code du travail et de le condamner à lui payer à la requérante une somme de 13'098 euros de dommages et intérêts pour travail clandestin.
Il est demandé à la cour de juger que l'employeur's'est rendu coupable de harcèlement moral et de le condamner à payer à la requérante une somme de 15'000 euros à titre de dommages et intérêts.
Pour le cas où le harcèlement moral ne serait pas reconnu, il est demandé à la cour de juger que l'employeur s'est rendu coupable d'une exécution déloyale et de mauvaise foi du contrat de travail et de condamner la société à payer à la requérante une somme de 15'000 euros à titre de dommages et intérêts.
Il est demandé à la cour de prononcer la résiliation judiciaire du contrat aux torts de l'employeur'avec effet au 9 décembre 2019.
Pour le cas où la résiliation judiciaire ne serait pas prononcée il y aurait lieu de juger que le licenciement est dénué de fondement.
Il est demandé en tous les cas l'application de la législation protectrice des inaptitudes d'origine professionnelle ou liées à un accident du travail.
Il est demandé à la cour de juger que l'employeur s'est rendu coupable de manquements gravement fautifs à l'origine de l'inaptitude de la salariée.
Il est demandé à la juridiction saisie du litige de condamner les'deux sociétés défenderesses in solidum à payer à la salariée'en cas de non reconnaissance de la résiliation mais seulement d'un licenciement dénué de fondement les sommes suivantes':
dommages et intérêts pour licenciement nul subsidiairement pour licenciement sans cause réelle et sérieuse 30'000 euros
indemnité compensatrice de préavis payée compte tenu de la responsabilité de l'employeur' 3'557,62 euros
indemnité de licenciement 8'547,26 x 2 soit 17'094,52 euros
Si le harcèlement moral est admis, c'est le licenciement nul dont il est demandé la reconnaissance.
Pour le cas où le harcèlement moral ne serait pas reconnu, il est demandé à la cour de juger que la résiliation judiciaire aura les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et abusif.
Il est dans les deux cas demandé au conseil de prud'hommes de condamner l'employeur à payer à Mme [Y] les sommes suivantes, hors les sommes déjà réclamées':
- dommages et intérêts pour licenciement abusif et dénué de cause réelle et sérieuse 30'000 euros
- indemnité compensatrice de préavis dont le paiement est dû puisque le licenciement sera considéré comme étant de la responsabilité de l'employeur, deux mois de salaire soit 1'778,81 x 2 = 3557,62 euros
- indemnité de licenciement (1'778,51 x ¿ x 10) + (1'778,51 x 1/3 x 5) pour les années au-delà de la dixième année dans la mesure où la salariée a 15 ans d'ancienneté 7'410,45 euros
- remboursement du trop-perçu déduit 131,64 euros
- remboursement de la prétendue absence 587,67 euros
- remboursement de la déduction des parts 1'595,33 euros
Il est ailleurs demandé à la cour d'appliquer les dispositions de l'article L.1235-3-1 du code du travail sur la nullité de la rupture et subsidiairement pour le cas où la nullité ne serait pas prononcée, de ne pas appliquer les barèmes prévus par les textes.
Il est demandé à la cour de juger que doit être écartée la notion de montant maximal d'indemnisation prévu par l'article 1235-3 du code du travail en raison de son inconventionnalité, ce plafonnement violant les dispositions de l'article 24 de la Charte sociale européenne et des articles 4 et 10 de la convention 158 de l'OIT ainsi que la notion de droit au procès équitable.
Très subsidiairement et pour le cas où la cour estimerait que le barème est conventionnel, il y aurait lieu de toute façon d'ajouter au dommages et intérêts plafonnés une somme de 10'000 euros de dommages et intérêts au visa de l'article 1382 devenu l'article 1240 du code civil.
Il est demandé à la cour de condamner l'employeur à payer à la requérante une somme de 4'000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.'»
Par ses conclusions reçues le 10 mai 2022, auxquelles il convient de se reporter pour un exposé détaillé des prétentions et moyens, la société Carrefour Proximité France sollicite de la cour':
- A titre principal qu'elle confirme le jugement en ce qu'il a débouté Mme [Y] de l'ensemble de ses demandes formulées contre elle et en conséquence la déboute de l'ensemble de ses demandes,
- A titre subsidiaire, s'agissant des dommages et intérêts au titre de l'exécution du contrat de travail, qu'elle limite à de plus justes proportions leur montant, faute pour Mme [Y] de justifier de la réalité de son préjudice, s'agissant des demandes au titre de la rupture du contrat de travail, si la cour devait considérer que le licenciement est nul, qu'elle limite à la somme de 13'098 euros l'indemnité de licenciement nul en application de l'article L.1235-1 du code du travail, si la cour devait considérer que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse, qu'elle limite à la somme de 6'549 euros l'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse en application de l'article L.1235-3 du code du travail, si la cour devait considérer que l'inaptitude de Mme [Y] était d'origine professionnelle, qu'elle limite à la somme de 8'547,26 euros le rappel d'indemnité spéciale de licenciement,
- En tout état de cause qu'elle condamne Mme [Y] au paiement des sommes respectives de 1'500 euros et 2'500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en première instance et en appel.
Par ses conclusions reçues le 10 mai 2022, auxquelles il convient de se reporter pour un exposé détaillé des prétentions et moyens, la société Jely Contact sollicite de la cour':
- A titre principal qu'elle confirme le jugement en ce qu'il a débouté Mme [Y] de l'ensemble de ses demandes formulées contre elle et en conséquence la déboute de l'ensemble de ses demandes,
- A titre subsidiaire, s'agissant des dommages et intérêts au titre de l'exécution du contrat de travail, qu'elle limite à de plus justes proportions leur montant, faute pour Mme [Y] de justifier de la réalité de son préjudice, s'agissant des demandes au titre de la rupture du contrat de travail, si la cour devait considérer que le licenciement est nul, qu'elle limite à la somme de 13'098 euros l'indemnité de licenciement nul en application de l'article L.1235-1 du code du travail, si la cour devait considérer que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse, qu'elle limite à la somme de 6'549 euros l'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse en application de l'article L.1235-3 du code du travail, si la cour devait considérer que l'inaptitude de Mme [Y] était d'origine professionnelle, qu'elle limite à la somme de 8'547,26 euros le rappel d'indemnité spéciale de licenciement,
- En tout état de cause qu'elle condamne Mme [Y] au paiement des sommes respectives de 1'500 euros et 2'500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en première instance et en appel.
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La clôture de la procédure a été ordonnée le'20 décembre 2023.
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MOTIFS DE L'ARRET
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Sur la demande de confirmation du jugement tiré de la rédaction du dispositif des conclusions de l'appelante
La société Carrefour Proximité France et la société Jely Contact demandent à la cour de confirmer le jugement au motif principal que le dispositif des conclusions de l'appelante ne permet pas d'identifier contre quelle société les demandes sont formulées.
Mme [Y] ne répond pas sur ce point.
Selon l'article 954 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.
Le dispositif des conclusions de Mme [Y] vise la partie défenderesse ou l'employeur, sans distinguer la société Carrefour Proximité France et la société Jely Contact. Il s'en déduit nécessairement que ses demandes sont dirigées contre les deux sociétés in solidum, ce que l'appelante précise au demeurant pour ses demandes au titre de la rupture du contrat de travail dans le dispositif de ses conclusions et pour ses demandes au titre de l'exécution du contrat de travail dans la partie discussion.
Sur la demande au titre de la violation de l'obligation de santé au travail
En application des articles L.4121-1 et L.4121-2 du code du travail, Mme [Y] invoque au titre des manquements de l'employeur à son obligation de sécurité, une dégradation de la situation, une altercation avec la supérieure hiérarchique qui l'avait mutée d'un magasin à l'autre et auprès de laquelle elle se plaignait de ses conditions de travail déplorables, la rétention de documents importants pour la caisse primaire d'assurance maladie et l'assureur de son crédit immobilier, sa mutation sur le point de vente de [Localité 4] en contrepartie de la validation des congés payés auxquels elle avait droit, l'inorganisation de la société en matière de gestion du temps de travail, une situation de surmenage.
La société Carrefour Proximité France conteste tout manquement.
La société Jely Contact souligne qu'elle n'était pas l'employeur de Mme [Y] au moment où les faits qu'elle invoque se seraient produits. Elle reprend à son compte l'argumentaire développé par la société Carrefour Proximité France.
Mme [Y] ne produit pas d'élément probant de nature à établir que sa mutation sur le magasin de [Localité 4] lui aurait été imposée au moyen d'un chantage sur ses congés payés. Mme [O], adjointe chef de magasin, fait état de cet «'ultimatum'» sans qu'il ressorte de son attestation qu'elle a été personnellement témoin des propos imputés à la responsable de secteur. Une telle situation est d'autant moins vraisemblable que les congés payés étaient un droit de la salariée, comme elle l'indique elle-même, et non une faveur que son employeur pouvait lui refuser et que sa mutation de [Localité 7] à [Localité 4] s'inscrit dans le cadre de la clause de mobilité figurant dans son contrat de travail, dont elle ne discute pas la validité.
Mme [Y] produit divers mails adressés à son employeur pour lui demander la régularisation de documents dans le cadre de son arrêt de travail. Particulièrement, elle lui a indiqué le 12 novembre 2018 avoir été informée par la caisse primaire d'assurance maladie de [Localité 4] que la demande d'attestation formée par l'organisme le 19 octobre 2018 était restée sans suite. Elle lui a également adressé le 9 décembre 2018 des documents à remplir pour sa compagnie d'assurance dans le cadre de la prise en charge de son crédit immobilier et l'a relancé par mails des 3 et 10 janvier 2019 en indiquant que son précédent message était resté sans suite. Elle lui a fait part à chaque fois de l'importance et de l'urgence de ses demandes.
La société Carrefour Proximité France ne fait pas d'observation sur ce point et produit un courrier de la caisse primaire d'assurance maladie du 26 octobre 2018 dont il ressort qu'elle n'avait pas adressé à cette date une attestation de salaire complète mais qu'elle avait omis de mentionner les salaires bruts des mois de mars et avril 2018.
S'agissant de l'inorganisation de la société en matière de gestion du temps de travail et de son surmenage, Mme [Y] fait état au fil de ses conclusions d'une répartition inéquitable des fermetures du magasin, d'une inorganisation qui l'a contrainte à travailler 54 heures sur une semaine malgré plusieurs alertes, des temps de repos et de passation entre responsables et caissières non respectés, des horaires affichés tardivement et systématiquement modifiés sans délai de prévenance.
Aucun élément n'est produit dont il résulterait l'existence de difficultés concernant les temps de passation et de prise de poste.
Mme [Y] expose que la règle est l'alternance concernant la fermeture du magasin entre responsable et adjoints mais qu'entre le 10 avril 2017 et le 17 juin 2018 elle a effectué 163 fermetures, Mme [A], également adjointe chef de magasin, 134 et Mme [B], chef de magasin, 27. Elle produit au soutien de ses dires les feuilles de décompte du temps de travail. Sans contester ces chiffres, les intimées invoquent en réponse la répartition des fermetures pour la seule période du mois de mai 2018, qui montre d'ailleurs que Mme [Y] est la salariée ayant effectué le plus de fermetures.
Mme [K], employée principale au sein du magasin de [Localité 4], atteste que les horaires étaient modifiés pratiquement tous les jours. Elle ajoute que le magasin était en sous-effectif malgré plusieurs demandes auprès de la chef de secteur et du chef de magasin et qu'au cours de la semaine du 21 au 27 mai 2018 aucune solution n'avait été apportée par Mme [X], chef de secteur, avant qu'elle parte en vacances, de sorte qu'ils ont dû se débrouiller seuls pour trouver du personnel et que Mme [Y] a dû travailler 54 heures cette semaine.
La société Carrefour Proximité France produit un tableau en vue de démontrer que l'effectif du magasin était en adéquation avec son chiffre d'affaires. Elle se prévaut de façon inopérante du compte rendu d'entretien de Mme [Y] en date du 20 mars 2017 portant sur l'année civile 2016 pour soutenir que la salariée était satisfaite de sa charge de travail, cet élément étant antérieur à la mutation de Mme [Y] à [Localité 4]. Les éléments produits et particulièrement les feuilles de décompte du temps de travail signée par Mme [Y] ne permettent pas toutefois de mettre en évidence une surcharge chronique de travail.
La société Carrefour Proximité France convient que le magasin d'affectation de Mme [Y] a dû faire face au cours de la semaine du 21 au 27 mai 2018 à l'absence de Mme [A], en congés, et de Mme [B], en raison du décès d'un membre de sa famille. Elle précise que Mme [X], également en congé, était remplacée par M. [E] et soutient avoir pris les mesures nécessaires, avec la fermeture exceptionnelle du magasin l'après-midi du samedi 26 mai 2018 et le renfort de deux salariés d'autres magasins, Messieurs [S] et [D]. Elle conteste que Mme [Y] ait travaillé 54 heures cette semaine et soutient qu'elle a travaillé 48 heures comprenant les temps de pause et un temps de formation.
Alors que Mme [N] atteste qu'elle avait alerté Mme [X], notamment le samedi 19 mai 2018, sur la situation du magasin de [Localité 4] et de Mme [Y], la société Carrefour Proximité France ne produit aucun élément justifiant qu'elle a pris les mesures préventives nécessaires. Le compte rendu de la «'conf call'» du 16 mai 2018 fait seulement ressortir le remplacement de la chef de secteur par M. [E] du 21 au 30 mai 2018. Il résulte d'ailleurs de l'attestation de Mme [X] qu'aucune mesure n'avait été prise préventivement concernant le magasin de [Localité 4] puisque la chef de secteur ne fait allusion qu'à ce qui a été fait par son remplaçant et Mme [Y]. Le témoignage de ce dernier n'est pas produit et il ressort des attestations produites par Mme [Y] et des sms qu'elle a échangés avec ses collègues et le chef de secteur remplaçant au cours de la semaine du 21 mai qu'elle a été contrainte de se démener pour trouver des solutions de dépannage de dernière minute auprès des autres magasins et de prendre l'initiative de fermer le magasin le 26 mai après-midi parce qu'elle n'avait pas de solution. Le planning des magasins prévoit curieusement l'affectation de Messieurs [S] et [D] en même temps à [Localité 4] et sur d'autres magasins et la feuille de décompte du temps de travail ne permet pas de conforter leur présence effective au sein du magasin de [Localité 4] la semaine 21, même si Mme [Y] conclut qu'il y a bien eu une visite de M. [S] le lundi 21 mai et que M. [D] est venu deux après-midis. La feuille de décompte du temps de travail signée par la salariée contredit toutefois son affirmation selon laquelle elle était seule présente sur le point de vente cette semaine. M. [W], secrétaire du comité d'entreprise, atteste avoir été informé de la situation le samedi 26 mai 2018. Il témoigne de la grande détresse manifestée par Mme [Y], qui était «'au bout du rouleau'». Il indique avoir alerté la directrice des ressources humaines, laquelle a contacté le binôme de la chef de secteur, puis l'a rappelé pour lui dire qu'une solution avait été trouvée.
Plusieurs collègues de Mme [Y] attestent qu'elle était épuisée à l'issue de cette période de travail, qu'elle s'est écroulée en évoquant la situation lors d'une réunion le 8 juin 2018, au cours de laquelle elle était en larmes, avait du mal à parler et à tenir debout, et qu'elle a craqué lors d'une discussion le 11 juin 2018 avec Mme [X] qui, selon l'attestation de Mme [C], hôtesse de caisse, s'est déchargée de toute responsabilité et, selon M. [P], n'a manifesté aucune compassion pour ce que Mme [Y] avait enduré.
La feuille de décompte du temps de travail signée par Mme [Y] fait toutefois apparaitre qu'elle a en définitive travaillé 48 heures cette semaine et non pas 54 heures comme elle le prétend. Cette pièce n'est pas utilement contredite par l'ajout manuscrit de la mention «'soit 54 h'», qui ne correspond d'ailleurs pas au cumul des horaires indiqués pour chaque jour, sur un document non signé par les parties. Elle ne l'est pas davantage par les attestations émanant de collègues qui ne travaillaient ni au même lieu ni aux mêmes heures que Mme [Y].
Mme [Y] affirme que le nécessaire repos de douze heures entre chaque prise de poste n'était pas respecté, sans citer aucun exemple d'un tel manquement. Les feuilles de décompte du temps de travail qu'elle a signées font au contraire ressortir que ce temps de repos était respecté.
En définitive, il est établi que Mme [Y] a éprouvé des difficultés à obtenir des documents nécessaires à la prise en charge financière de son arrêt de travail, qu'elle assurait plus souvent que ses collègues les fermetures du magasin, que les horaires planifiés faisaient l'objet de modifications fréquentes et surtout qu'elle a dû assumer une semaine de travail particulièrement lourde et stressante du 21 au 27 mai 2018, faute pour l'employeur d'avoir mis en place une organisation et des moyens adaptés aux circonstances.
Le préjudice subi par Mme [Y] du fait du manquement de son employeur à son obligation de prendre les mesures nécessaires pour assurer la protection de sa santé sera indemnisé par l'octroi de la somme de 2 000 euros. Les deux employeurs successifs seront condamnés in solidum au paiement de cette somme en application de l'article L.1224-2 du code du travail, le fait générateur de la créance étant antérieur au transfert du contrat de travail.
Sur la demande d'indemnité pour harcèlement moral ou exécution déloyale du contrat de travail
Selon l'article 954 du code de procédure civile, les conclusions d'appel doivent formuler expressément les moyens de fait et de droit sur lesquelles chacune des prétentions est fondée avec indication pour chaque prétention des pièces invoquées et de leur numérotation.
Mme [Y] invoque en application des articles L.1152-1 et L.1154-1 du code du travail, au titre du harcèlement moral, une charge de travail excessive à plusieurs reprises, sans aide efficace apportée, des méthodes de management de sa supérieure hiérarchique peu respectueuses finalement couvertes par la directrice des ressources humaines, l'altération de son état de santé.
Ainsi que le relève la société Carrefour Proximité France, de même que la société Jely Contact qui indique reprendre son argumentaire, Mme [Y] ne précise pas les méthodes de management litigieuses caractérisant selon elle des agissements de harcèlement moral. Elle ne vise aucune pièce.
Il résulte de ce qui précède qu'il n'est pas établi que Mme [Y] a fait face à plusieurs reprises à une charge de travail excessive mais qu'elle a travaillé à hauteur de la durée maximale hebdomadaire de travail la semaine du 21 au 28 mai 2018, dans des conditions rendues difficiles par l'absence d'organisation en amont du planning pour tenir compte de l'absence de la chef de magasin et de l'autre adjointe.
Cet élément isolé ne peut caractériser à lui seul un harcèlement moral, quand bien même les documents notamment médicaux produits démontrent son retentissement sur l'état de santé de la salariée.
Mme [Y] invoque subsidiairement une exécution déloyale et de mauvaise foi du contrat de travail en faisant valoir qu'elle n'avait jamais eu de difficulté et que sa mutation lui a été imposée sur un point de vente connu par la direction des ressources humaines comme étant difficile de par sa clientèle et le rythme de travail.
La société Carrefour Proximité France répond qu'elle a affecté Mme [Y] sur un magasin distant de 3 kilomètres de celui de [Localité 7] dans le cadre de la stricte application de la clause de mobilité insérée au contrat de travail.
Mme [Y] ne démontre aucun abus de pouvoir de l'employeur dans la mise en oeuvre de la clause de mobilité.
Le jugement est confirmé en ce qu'il a débouté Mme [Y] de ces chefs de demande.
Sur la demande en paiement d'une indemnité pour travail dissimulé
A titre liminaire, il y a lieu d'observer, en application de l'article 954 du code de procédure civile, que la cour n'est pas saisie de la demande en paiement d'heures supplémentaires évoquée par Mme [Y] dans le corps de ses conclusions, en l'absence de prétention énoncée sur ce point dans le dispositif.
Au soutien de sa demande d'indemnité pour travail dissimulé, Mme [Y] fait valoir le refus de la société Carrefour Proximité France à plusieurs reprises et notamment à l'occasion de «'cette semaine de mai 2017'» de faire figurer la totalité des heures effectuées sur le bulletin de salaire.
La société Carrefour Proximité France répond que les heures supplémentaires étaient stockées sur un compte d'heures et récupérées ou réglées, ce qui résulte effectivement des mentions figurant sur les bulletins de salaire.
Il n'est pas établi que la totalité des heures supplémentaires effectuées par Mme [Y] n'ont pas été mentionnées sur les bulletins de salaire dans le compteur des heures à récupérer, étant rappelé que la salariée signait les feuilles de décompte du temps de travail et qu'il en ressort en particulier qu'elle a travaillé 48 heures et non pas 54 heures la semaine du 21 au 27 mai 2018.
En l'absence de démonstration que l'employeur aurait intentionnellement dissimulé sur les bulletins de salaire le nombre des heures de travail effectuées, il convient de confirmer le jugement qui a débouté Mme [Y] de sa demande en paiement de l'indemnité forfaitaire prévue par l'article L.8223-1 du code du travail.
Sur la demande de résiliation du contrat de travail
Un salarié est fondé à obtenir la résiliation judiciaire de son contrat de travail en cas de manquement de l'employeur en rendant la poursuite impossible.
Au soutien de sa demande, Mme [Y] invoque les atteintes à la santé au travail, le harcèlement moral, des heures supplémentaires occasionnant le dépassement de la durée maximale de travail de 44 heures, la non prise en compte des difficultés du point de vente dans le cadre déplorable d'une mutation imposée en échange d'une prise de congés payés qui étaient dus, l'exécution déloyale et de mauvaise foi du contrat de travail perdurant au-delà de l'arrêt maladie avec le «'zèle'» mis par l'employeur à répondre aux différentes demandes concernant la subrogation vis-à-vis de la sécurité sociale.
La société Carrefour Proximité France répond que Mme [Y] ne peut formuler des demandes relatives à la rupture de son contrat de travail qu'à l'encontre de la société Jely Contact, son employeur au moment de la rupture du contrat de travail et que les demandes formulées contre elle sont mal dirigées.
Elle ajoute en tout état de cause s'agissant de la demande de résiliation judiciaire que la salariée n'a pas été amenée à travailler dans des conditions déplorables au sein du magasin de [Localité 4], qu'elle n'a pas été victime d'un harcèlement moral de la part de Mme [X], qu'elle ne s'est pas vue imposer une mutation sur [Localité 4] sous peine de se voir refuser ses vacances et qu'elle ne s'est pas vue priver du règlement de ses heures supplémentaires. La société Jely Contact développe la même argumentation.
Il résulte de ce qui précède que Mme [Y] n'a pas été victime de harcèlement moral, qu'elle n'a pas effectué d'heures supplémentaires au-delà de la durée maximale du travail, laquelle n'est pas de 44 heures par semaine mais de 44 heures par semaine en moyenne sur une période de 12 semaines consécutives et de 48 heures sur une semaine quelconque selon l'article 28.3 de la convention collective alors applicable, et que sa mutation ne lui a pas été imposé en échange d'une prise de congés payés. En revanche, le manquement de la société Carrefour Proximité France à son obligation lui imposant de prendre des mesures pour protéger la santé physique et morale de la salariée est établi, de même que son manquement dans la régularisation des documents nécessaires pour la prise en charge de son arrêt de travail par la sécurité sociale.
Le manquement à l'obligation de sécurité constituait à lui seul un manquement grave qui rendait impossible la poursuite du contrat de travail et justifiait la résiliation du contrat de travail aux torts de l'employeur, étant précisé, Mme [Y] ayant été licenciée après sa demande de résiliation judiciaire, que la date de la rupture est fixée à la date d'envoi de la lettre de licenciement le 9 décembre 2019. La résiliation ainsi prononcée produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et ouvre droit pour la salariée aux indemnités de rupture et à des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. En application de l'article L.1224-1 du code du travail, la salariée ne peut obtenir la condamnation que de la société Jely Contact au paiement de ces indemnités, la société Jely Contact étant son employeur au moment de la rupture du contrat de travail.
Les règles protectrices des victimes d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle s'appliquent dès lors que l'inaptitude du salarié, quel que soit le moment où elle est constatée et invoquée, a au moins partiellement pour origine cet accident ou cette maladie, et que l'employeur avait connaissance de cette origine professionnelle au moment du licenciement.
En l'espèce, Mme [Y] a été placée en arrêt de travail à compter du 12 juin 2018 au titre d'un accident du travail survenu le 11 juin 2018, consistant en un échange au sein du magasin de [Localité 7] avec sa chef de secteur. Cet échange, qualifié par Mme [Y] d'altercation et par Mme [X] de discussion, portait sur les conditions de travail de Mme [Y] au cours de la semaine du 21 mai. Mme [X] convient que Mme [Y] n'était pas contente et que le ton est monté. Mme [Y] produit deux témoignages de salariés ayant assisté à cet échange. Mme [C] explique que malgré tout ce que Mme [Y] lui disait, Mme [X] jurait que si elle avait été au courant elle aurait fait ce qu'il fallait, que la discussion est montée crescendo compte tenu du stress accumulé par Mme [Y], qu'elle s'est mise à pleurer, que s'en est suivi l'arrêt de travail de Mme [Y]. M. [P] atteste que l'absence de compassion de Mme [X] pour ce que Mme [Y] avait enduré a créé un «'pétage de plomb'», qu'il n'avait jamais vu sa collègue dans un tel état de tension, qu'elle avait les larmes aux yeux et «'bouillonnait'», qu'elle a rencontré son médecin qui l'a placée en arrêt de travail.
Son médecin traitant indique que le 12 juin 2018, Mme [Y] était en pleurs, stressée et présentait des manifestations dépressives rapportées à son travail. Mme [Y] a fait l'objet d'un arrêt de travail continu depuis cette date. Elle produit un courrier d'un médecin psychiatre en date du 13 novembre 2018 mentionnant qu'elle présente un pré-burnout (surmenage, fatigue physique et émotionnelle, anxiété, troubles du sommeil) avec un élément de type post-traumatique (rêves de travail, ruminations).
Le 20 novembre 2019, le médecin du travail a déclaré Mme [Y] inapte à son poste en précisant que son état de santé faisait obstacle à tout reclassement dans un emploi.
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Par décision du 15 octobre 2018, la caisse primaire d'assurance maladie a écarté la qualification d'accident du travail au motif que «'le lien de subordination à l'employeur n'est pas établi au moment de l'accident'; celui-ci étant survenu au cours d'activités personnelles n'ayant pas de relation avec le travail'». Il ressort des conclusions des parties que cette décision a été confirmée par la commission de recours amiable et fait l'objet d'un recours juridictionnel devant le pôle social du tribunal judiciaire.
La décision de la caisse ne lie pas le juge du travail. Il résulte de la chronologie et de la teneur des éléments ci-dessus que l'inaptitude de Mme [Y] a au moins partiellement pour origine la discussion qui s'est tenue le 11 juin 2018 avec la chef de secteur de Mme [Y], dans des locaux de l'entreprise, au sujet des conditions de travail de Mme [Y], qui a provoqué les lésions psychiques constatées par ses collègues témoins de la discussion et son médecin, et que l'employeur en avait connaissance puisqu'il était informé de la déclaration d'accident du travail de Mme [Y], comme il résulte des bulletins de salaire, et des recours exercé par Mme [Y] contre la décision de la caisse primaire d'assurance maladie.
Le jugement est donc infirmé et il est retenu que s'appliquaient les règles protectrices des victimes d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle.
En application de l'article L.1226-14 du code du travail, l'employeur est redevable de l'indemnité compensatrice d'un montant égal à celui de l'indemnité compensatrice de préavis prévue à l'article L.1234-5, ainsi que de l'indemnité spéciale de licenciement égale au double de l'indemnité prévue par l'article L.1234-9.
Il convient d'allouer à Mme [Y] la somme demandée de 3'557,62 euros à titre d'indemnité compensatrice d'un montant égal à celui de l'indemnité compensatrice de préavis et la somme de 8'547,26 euros euros au titre du reliquat d'indemnité spéciale de licenciement.
Compte tenu de l'ancienneté de la salariée, de sa rémunération brute mensuelle, de son âge, de sa capacité à retrouver un nouvel emploi et des justificatifs de son indemnisation au titre de l'assurance chômage jusqu'en mai 2020, le barème prévu par l'article L.1235-3 du code du travail permet une indemnisation adéquate et appropriée, au sens de la Convention n° 158 de l'OIT sur le licenciement. Au regard du préjudice que l'appelante a subi du fait de la perte injustifiée de son emploi, il convient de lui allouer la somme de 13'098 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
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Mme [Y] ne justifie pas d'un préjudice distinct de la perte de son emploi à l'appui de sa demande de dommages et intérêts au titre de l'article 1240 du code civil.
Sur le solde de tout compte
Mme [Y] critique la déduction sur le solde de tout compte des sommes de 1'595,33 euros, 587,67 euros et 131,64 euros.
La première retenue au titre de la «'déduction départ'», et non «'des parts'» comme soutenu par l'appelante, est justifiée par la sortie des effectifs de la salariée le 10 décembre 2019 et vient en déduction de la rémunération de 2'183 euros applicable à un mois entier.
La deuxième retenue pour absence non rémunérée de la salariée du 1er au 9 décembre 2019 s'explique par son absence pour maladie, Mme [Y] invoquant de façon surprenante une «'prétendue absence'».
Enfin la dernière retenue résulte du solde négatif accumulé chaque mois sur les bulletins de salaire en raison de la participation de la salariée au financement de sa complémentaire santé avancée par l'employeur faute pour la Mme [Y], en arrêt de travail, de percevoir un salaire.
Le jugement est confirmé en ce qu'il a débouté Mme [Y] de ses demandes de ce chef.
Sur les demandes accessoires
Il ne serait pas équitable de laisser à la charge de Mme [Y] les frais qu'elle a dû exposer et qui ne sont pas compris dans les dépens. Il convient de condamner in solidum les sociétés intimées à lui payer la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
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PAR CES MOTIFS
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La cour statuant après débats en audience publique par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe,
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Infirme le jugement déféré en ce qu'il a débouté Mme [Y] de sa demande d'indemnité pour manquement de l'employeur à son obligation de sécurité et de sa demande de résiliation judiciaire du contrat de travail et statuant à nouveau'de ces chefs :
Dit que l'employeur a manqué à son obligation de sécurité.
Prononce la résiliation judiciaire du contrat de travail à effet du 9 décembre 2019.
Dit que la rupture du contrat de travail produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Dit que les règles protectrices des victimes d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle s'appliquent.
Condamne la société Carrefour Proximité France et la société Jely Contact in solidum à verser à Mme [Y]'la somme de 2'000 euros à titre d'indemnité pour manquement à l'obligation de sécurité.
Condamne la société Jely Contact à payer à Mme [Y] les sommes suivantes':
3'557,62 euros à titre d'indemnité compensatrice d'un montant égal à celui de l'indemnité compensatrice de préavis
8'547,26 euros au titre du reliquat d'indemnité spéciale de licenciement.
13'098 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
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Confirme pour le surplus le jugement entrepris, sauf sur les dépens.
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Condamne in solidum la société Carrefour Proximité France et la société Jely Contact à verser à Mme [Y] la somme de 1'500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
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Condamne'in solidum la société Carrefour Proximité France et la société Jely Contact aux dépens.
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le greffier
Serge LAWECKI
le conseiller désigné pour exercer
les fonctions de président de chambre
Muriel LE BELLEC
29 Mars 2024
N° 439/24
N° RG 22/00106 - N° Portalis DBVT-V-B7G-UCLJ
MLB / SL
Jugement du
Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de LENS
en date du
17 Janvier 2022
(RG 20/00162 -section )
GROSSE :
aux avocats
le 29 Mars 2024
République Française
Au nom du Peuple Français
COUR D'APPEL DE DOUAI
Chambre Sociale
- Prud'Hommes-
APPELANT :
Mme [J] [Y]
[Adresse 5]
[Localité 3]
représentée par Me Gérald VAIRON, avocat au barreau de BETHUNE
INTIMÉE :
S.A.R.L. JELY CONTACT
[Adresse 2]
[Localité 4]
représentée par Me Jérôme WATRELOT, avocat au barreau de PARIS substitué par Me Benoît DUBESSAY, avocat au barreau de PARIS
S.A.S. CARREFOUR PROXIMITE FRANCE
[Adresse 8]
[Localité 1]
représentée par Me Jérôme WATRELOT, avocat au barreau de PARIS substitué par Me Benoît DUBESSAY, avocat au barreau de PARIS
DÉBATS : à l'audience publique du 17 Janvier 2024
Tenue par Muriel LE BELLEC
magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les parties ou leurs représentants ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré,
les parties ayant été avisées à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe.
GREFFIER : Nadine BERLY
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ
Muriel LE BELLEC
: conseiller faisant fonction de
PRESIDENT DE CHAMBRE
Gilles GUTIERREZ
: CONSEILLER
Nathalie RICHEZ-SAULE
: CONSEILLER
ARRÊT : Contradictoire
prononcé par sa mise à disposition au greffe le 29 Mars 2024,
les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, signé par Muriel LE BELLEC, conseiller désigné pour exercer les fonctions de président et par Serge LAWECKI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
ORDONNANCE DE CLÔTURE : rendue le 20/12/2023
EXPOSÉ DES FAITS
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Mme [Y], née le 12 avril 1976, a été embauchée par contrat de travail à durée indéterminée à compter du 10 mai 2004 en qualité de caissière employée libre-service par la société Penny Market.
La relation de travail était régie par la convention collective des commerces de détail et de gros à prédominance alimentaires.
Elle était initialement affectée au magasin de [Localité 7], exploité en dernier lieu par la société Carrefour Proximité France, à laquelle son contrat de travail a été transféré.
Elle a été promue en février 2009 au poste d'adjoint chef de magasin et affectée à compter d'avril 2017 au magasin de [Localité 4], [Adresse 6].
Mme [Y] a été placée en arrêt de travail sans discontinuer à compter du 12 juin 2018.
Elle a saisi le conseil de prud'hommes de Lens le 28 février 2019 d'une demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail et de diverses demandes liées à l'exécution et la rupture de son contrat de travail.
Le 22 mai 2019, la société Jely Contact a repris le magasin de [Localité 4] en location-gérance. Le contrat de travail de Mme [Y] lui a été transféré. La société Jely Contact a informé Mme [Y] que s'appliquait désormais la convention collective de commerce de détail des fruits et légumes, épiceries et produits laitiers puisque l'effectif était inférieur à 11 salariés, que ses avantages sociaux individuels seraient maintenus et intégrés à sa rémunération mensuelle brute, qui s'élèverait en conséquence à 2'183 euros.
Le 20 novembre 2019, le médecin du travail a déclaré Mme [Y] inapte à son poste en précisant que son état de santé faisait obstacle à tout reclassement dans un emploi.
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Mme [Y] a été convoquée par lettre recommandée du 23 novembre 2019 à un entretien préalable à un éventuel licenciement le 4 décembre 2019, à l'issue duquel la société Jely Contact l'a licenciée pour inaptitude et impossibilité de reclassement le 9 décembre 2019.
Mme [Y] a saisi le conseil de prud'hommes de Lens le 23 juin 2020 de demandes présentées cette fois contre la société Carrefour Proximité France et la société Jely Contact.
Par jugement de départage en date du 17 janvier 2022 le conseil de prud'hommes a débouté Mme [Y] de l'ensemble de ses demandes, la société Carrefour Proximité France et la société Jely Contact de leurs demandes fondées sur de l'article 700 du code de procédure civile et condamné Mme [Y] aux dépens.
Les 25 et 26 janvier 2022, Mme [Y] a interjeté appel de ce jugement.
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Les deux procédures ont été jointes par ordonnance du 27 avril 2022.
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Par ses conclusions reçues le 10 février 2022 auxquelles il convient de se reporter pour un exposé détaillé des prétentions et moyens, Mme [Y] demande à la cour de':
«'statuant à nouveau,
Infirmer la décision déférée
Il est demandé à la cour de juger que'la partie défenderesse's'est rendue coupable d'une violation de son obligation de santé au travail.
Il est demandé à la cour de condamner la partie défenderesse à payer à la demanderesse une somme de 10'000 euros de dommages et intérêts sur ce fondement.
Il est demandé à la juridiction saisie du litige de juger que l'employeur s'est rendu coupable d'un travail clandestin au sens de l'article L.8223-1 du code du travail et de le condamner à lui payer à la requérante une somme de 13'098 euros de dommages et intérêts pour travail clandestin.
Il est demandé à la cour de juger que l'employeur's'est rendu coupable de harcèlement moral et de le condamner à payer à la requérante une somme de 15'000 euros à titre de dommages et intérêts.
Pour le cas où le harcèlement moral ne serait pas reconnu, il est demandé à la cour de juger que l'employeur s'est rendu coupable d'une exécution déloyale et de mauvaise foi du contrat de travail et de condamner la société à payer à la requérante une somme de 15'000 euros à titre de dommages et intérêts.
Il est demandé à la cour de prononcer la résiliation judiciaire du contrat aux torts de l'employeur'avec effet au 9 décembre 2019.
Pour le cas où la résiliation judiciaire ne serait pas prononcée il y aurait lieu de juger que le licenciement est dénué de fondement.
Il est demandé en tous les cas l'application de la législation protectrice des inaptitudes d'origine professionnelle ou liées à un accident du travail.
Il est demandé à la cour de juger que l'employeur s'est rendu coupable de manquements gravement fautifs à l'origine de l'inaptitude de la salariée.
Il est demandé à la juridiction saisie du litige de condamner les'deux sociétés défenderesses in solidum à payer à la salariée'en cas de non reconnaissance de la résiliation mais seulement d'un licenciement dénué de fondement les sommes suivantes':
dommages et intérêts pour licenciement nul subsidiairement pour licenciement sans cause réelle et sérieuse 30'000 euros
indemnité compensatrice de préavis payée compte tenu de la responsabilité de l'employeur' 3'557,62 euros
indemnité de licenciement 8'547,26 x 2 soit 17'094,52 euros
Si le harcèlement moral est admis, c'est le licenciement nul dont il est demandé la reconnaissance.
Pour le cas où le harcèlement moral ne serait pas reconnu, il est demandé à la cour de juger que la résiliation judiciaire aura les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et abusif.
Il est dans les deux cas demandé au conseil de prud'hommes de condamner l'employeur à payer à Mme [Y] les sommes suivantes, hors les sommes déjà réclamées':
- dommages et intérêts pour licenciement abusif et dénué de cause réelle et sérieuse 30'000 euros
- indemnité compensatrice de préavis dont le paiement est dû puisque le licenciement sera considéré comme étant de la responsabilité de l'employeur, deux mois de salaire soit 1'778,81 x 2 = 3557,62 euros
- indemnité de licenciement (1'778,51 x ¿ x 10) + (1'778,51 x 1/3 x 5) pour les années au-delà de la dixième année dans la mesure où la salariée a 15 ans d'ancienneté 7'410,45 euros
- remboursement du trop-perçu déduit 131,64 euros
- remboursement de la prétendue absence 587,67 euros
- remboursement de la déduction des parts 1'595,33 euros
Il est ailleurs demandé à la cour d'appliquer les dispositions de l'article L.1235-3-1 du code du travail sur la nullité de la rupture et subsidiairement pour le cas où la nullité ne serait pas prononcée, de ne pas appliquer les barèmes prévus par les textes.
Il est demandé à la cour de juger que doit être écartée la notion de montant maximal d'indemnisation prévu par l'article 1235-3 du code du travail en raison de son inconventionnalité, ce plafonnement violant les dispositions de l'article 24 de la Charte sociale européenne et des articles 4 et 10 de la convention 158 de l'OIT ainsi que la notion de droit au procès équitable.
Très subsidiairement et pour le cas où la cour estimerait que le barème est conventionnel, il y aurait lieu de toute façon d'ajouter au dommages et intérêts plafonnés une somme de 10'000 euros de dommages et intérêts au visa de l'article 1382 devenu l'article 1240 du code civil.
Il est demandé à la cour de condamner l'employeur à payer à la requérante une somme de 4'000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.'»
Par ses conclusions reçues le 10 mai 2022, auxquelles il convient de se reporter pour un exposé détaillé des prétentions et moyens, la société Carrefour Proximité France sollicite de la cour':
- A titre principal qu'elle confirme le jugement en ce qu'il a débouté Mme [Y] de l'ensemble de ses demandes formulées contre elle et en conséquence la déboute de l'ensemble de ses demandes,
- A titre subsidiaire, s'agissant des dommages et intérêts au titre de l'exécution du contrat de travail, qu'elle limite à de plus justes proportions leur montant, faute pour Mme [Y] de justifier de la réalité de son préjudice, s'agissant des demandes au titre de la rupture du contrat de travail, si la cour devait considérer que le licenciement est nul, qu'elle limite à la somme de 13'098 euros l'indemnité de licenciement nul en application de l'article L.1235-1 du code du travail, si la cour devait considérer que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse, qu'elle limite à la somme de 6'549 euros l'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse en application de l'article L.1235-3 du code du travail, si la cour devait considérer que l'inaptitude de Mme [Y] était d'origine professionnelle, qu'elle limite à la somme de 8'547,26 euros le rappel d'indemnité spéciale de licenciement,
- En tout état de cause qu'elle condamne Mme [Y] au paiement des sommes respectives de 1'500 euros et 2'500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en première instance et en appel.
Par ses conclusions reçues le 10 mai 2022, auxquelles il convient de se reporter pour un exposé détaillé des prétentions et moyens, la société Jely Contact sollicite de la cour':
- A titre principal qu'elle confirme le jugement en ce qu'il a débouté Mme [Y] de l'ensemble de ses demandes formulées contre elle et en conséquence la déboute de l'ensemble de ses demandes,
- A titre subsidiaire, s'agissant des dommages et intérêts au titre de l'exécution du contrat de travail, qu'elle limite à de plus justes proportions leur montant, faute pour Mme [Y] de justifier de la réalité de son préjudice, s'agissant des demandes au titre de la rupture du contrat de travail, si la cour devait considérer que le licenciement est nul, qu'elle limite à la somme de 13'098 euros l'indemnité de licenciement nul en application de l'article L.1235-1 du code du travail, si la cour devait considérer que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse, qu'elle limite à la somme de 6'549 euros l'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse en application de l'article L.1235-3 du code du travail, si la cour devait considérer que l'inaptitude de Mme [Y] était d'origine professionnelle, qu'elle limite à la somme de 8'547,26 euros le rappel d'indemnité spéciale de licenciement,
- En tout état de cause qu'elle condamne Mme [Y] au paiement des sommes respectives de 1'500 euros et 2'500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en première instance et en appel.
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La clôture de la procédure a été ordonnée le'20 décembre 2023.
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MOTIFS DE L'ARRET
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Sur la demande de confirmation du jugement tiré de la rédaction du dispositif des conclusions de l'appelante
La société Carrefour Proximité France et la société Jely Contact demandent à la cour de confirmer le jugement au motif principal que le dispositif des conclusions de l'appelante ne permet pas d'identifier contre quelle société les demandes sont formulées.
Mme [Y] ne répond pas sur ce point.
Selon l'article 954 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.
Le dispositif des conclusions de Mme [Y] vise la partie défenderesse ou l'employeur, sans distinguer la société Carrefour Proximité France et la société Jely Contact. Il s'en déduit nécessairement que ses demandes sont dirigées contre les deux sociétés in solidum, ce que l'appelante précise au demeurant pour ses demandes au titre de la rupture du contrat de travail dans le dispositif de ses conclusions et pour ses demandes au titre de l'exécution du contrat de travail dans la partie discussion.
Sur la demande au titre de la violation de l'obligation de santé au travail
En application des articles L.4121-1 et L.4121-2 du code du travail, Mme [Y] invoque au titre des manquements de l'employeur à son obligation de sécurité, une dégradation de la situation, une altercation avec la supérieure hiérarchique qui l'avait mutée d'un magasin à l'autre et auprès de laquelle elle se plaignait de ses conditions de travail déplorables, la rétention de documents importants pour la caisse primaire d'assurance maladie et l'assureur de son crédit immobilier, sa mutation sur le point de vente de [Localité 4] en contrepartie de la validation des congés payés auxquels elle avait droit, l'inorganisation de la société en matière de gestion du temps de travail, une situation de surmenage.
La société Carrefour Proximité France conteste tout manquement.
La société Jely Contact souligne qu'elle n'était pas l'employeur de Mme [Y] au moment où les faits qu'elle invoque se seraient produits. Elle reprend à son compte l'argumentaire développé par la société Carrefour Proximité France.
Mme [Y] ne produit pas d'élément probant de nature à établir que sa mutation sur le magasin de [Localité 4] lui aurait été imposée au moyen d'un chantage sur ses congés payés. Mme [O], adjointe chef de magasin, fait état de cet «'ultimatum'» sans qu'il ressorte de son attestation qu'elle a été personnellement témoin des propos imputés à la responsable de secteur. Une telle situation est d'autant moins vraisemblable que les congés payés étaient un droit de la salariée, comme elle l'indique elle-même, et non une faveur que son employeur pouvait lui refuser et que sa mutation de [Localité 7] à [Localité 4] s'inscrit dans le cadre de la clause de mobilité figurant dans son contrat de travail, dont elle ne discute pas la validité.
Mme [Y] produit divers mails adressés à son employeur pour lui demander la régularisation de documents dans le cadre de son arrêt de travail. Particulièrement, elle lui a indiqué le 12 novembre 2018 avoir été informée par la caisse primaire d'assurance maladie de [Localité 4] que la demande d'attestation formée par l'organisme le 19 octobre 2018 était restée sans suite. Elle lui a également adressé le 9 décembre 2018 des documents à remplir pour sa compagnie d'assurance dans le cadre de la prise en charge de son crédit immobilier et l'a relancé par mails des 3 et 10 janvier 2019 en indiquant que son précédent message était resté sans suite. Elle lui a fait part à chaque fois de l'importance et de l'urgence de ses demandes.
La société Carrefour Proximité France ne fait pas d'observation sur ce point et produit un courrier de la caisse primaire d'assurance maladie du 26 octobre 2018 dont il ressort qu'elle n'avait pas adressé à cette date une attestation de salaire complète mais qu'elle avait omis de mentionner les salaires bruts des mois de mars et avril 2018.
S'agissant de l'inorganisation de la société en matière de gestion du temps de travail et de son surmenage, Mme [Y] fait état au fil de ses conclusions d'une répartition inéquitable des fermetures du magasin, d'une inorganisation qui l'a contrainte à travailler 54 heures sur une semaine malgré plusieurs alertes, des temps de repos et de passation entre responsables et caissières non respectés, des horaires affichés tardivement et systématiquement modifiés sans délai de prévenance.
Aucun élément n'est produit dont il résulterait l'existence de difficultés concernant les temps de passation et de prise de poste.
Mme [Y] expose que la règle est l'alternance concernant la fermeture du magasin entre responsable et adjoints mais qu'entre le 10 avril 2017 et le 17 juin 2018 elle a effectué 163 fermetures, Mme [A], également adjointe chef de magasin, 134 et Mme [B], chef de magasin, 27. Elle produit au soutien de ses dires les feuilles de décompte du temps de travail. Sans contester ces chiffres, les intimées invoquent en réponse la répartition des fermetures pour la seule période du mois de mai 2018, qui montre d'ailleurs que Mme [Y] est la salariée ayant effectué le plus de fermetures.
Mme [K], employée principale au sein du magasin de [Localité 4], atteste que les horaires étaient modifiés pratiquement tous les jours. Elle ajoute que le magasin était en sous-effectif malgré plusieurs demandes auprès de la chef de secteur et du chef de magasin et qu'au cours de la semaine du 21 au 27 mai 2018 aucune solution n'avait été apportée par Mme [X], chef de secteur, avant qu'elle parte en vacances, de sorte qu'ils ont dû se débrouiller seuls pour trouver du personnel et que Mme [Y] a dû travailler 54 heures cette semaine.
La société Carrefour Proximité France produit un tableau en vue de démontrer que l'effectif du magasin était en adéquation avec son chiffre d'affaires. Elle se prévaut de façon inopérante du compte rendu d'entretien de Mme [Y] en date du 20 mars 2017 portant sur l'année civile 2016 pour soutenir que la salariée était satisfaite de sa charge de travail, cet élément étant antérieur à la mutation de Mme [Y] à [Localité 4]. Les éléments produits et particulièrement les feuilles de décompte du temps de travail signée par Mme [Y] ne permettent pas toutefois de mettre en évidence une surcharge chronique de travail.
La société Carrefour Proximité France convient que le magasin d'affectation de Mme [Y] a dû faire face au cours de la semaine du 21 au 27 mai 2018 à l'absence de Mme [A], en congés, et de Mme [B], en raison du décès d'un membre de sa famille. Elle précise que Mme [X], également en congé, était remplacée par M. [E] et soutient avoir pris les mesures nécessaires, avec la fermeture exceptionnelle du magasin l'après-midi du samedi 26 mai 2018 et le renfort de deux salariés d'autres magasins, Messieurs [S] et [D]. Elle conteste que Mme [Y] ait travaillé 54 heures cette semaine et soutient qu'elle a travaillé 48 heures comprenant les temps de pause et un temps de formation.
Alors que Mme [N] atteste qu'elle avait alerté Mme [X], notamment le samedi 19 mai 2018, sur la situation du magasin de [Localité 4] et de Mme [Y], la société Carrefour Proximité France ne produit aucun élément justifiant qu'elle a pris les mesures préventives nécessaires. Le compte rendu de la «'conf call'» du 16 mai 2018 fait seulement ressortir le remplacement de la chef de secteur par M. [E] du 21 au 30 mai 2018. Il résulte d'ailleurs de l'attestation de Mme [X] qu'aucune mesure n'avait été prise préventivement concernant le magasin de [Localité 4] puisque la chef de secteur ne fait allusion qu'à ce qui a été fait par son remplaçant et Mme [Y]. Le témoignage de ce dernier n'est pas produit et il ressort des attestations produites par Mme [Y] et des sms qu'elle a échangés avec ses collègues et le chef de secteur remplaçant au cours de la semaine du 21 mai qu'elle a été contrainte de se démener pour trouver des solutions de dépannage de dernière minute auprès des autres magasins et de prendre l'initiative de fermer le magasin le 26 mai après-midi parce qu'elle n'avait pas de solution. Le planning des magasins prévoit curieusement l'affectation de Messieurs [S] et [D] en même temps à [Localité 4] et sur d'autres magasins et la feuille de décompte du temps de travail ne permet pas de conforter leur présence effective au sein du magasin de [Localité 4] la semaine 21, même si Mme [Y] conclut qu'il y a bien eu une visite de M. [S] le lundi 21 mai et que M. [D] est venu deux après-midis. La feuille de décompte du temps de travail signée par la salariée contredit toutefois son affirmation selon laquelle elle était seule présente sur le point de vente cette semaine. M. [W], secrétaire du comité d'entreprise, atteste avoir été informé de la situation le samedi 26 mai 2018. Il témoigne de la grande détresse manifestée par Mme [Y], qui était «'au bout du rouleau'». Il indique avoir alerté la directrice des ressources humaines, laquelle a contacté le binôme de la chef de secteur, puis l'a rappelé pour lui dire qu'une solution avait été trouvée.
Plusieurs collègues de Mme [Y] attestent qu'elle était épuisée à l'issue de cette période de travail, qu'elle s'est écroulée en évoquant la situation lors d'une réunion le 8 juin 2018, au cours de laquelle elle était en larmes, avait du mal à parler et à tenir debout, et qu'elle a craqué lors d'une discussion le 11 juin 2018 avec Mme [X] qui, selon l'attestation de Mme [C], hôtesse de caisse, s'est déchargée de toute responsabilité et, selon M. [P], n'a manifesté aucune compassion pour ce que Mme [Y] avait enduré.
La feuille de décompte du temps de travail signée par Mme [Y] fait toutefois apparaitre qu'elle a en définitive travaillé 48 heures cette semaine et non pas 54 heures comme elle le prétend. Cette pièce n'est pas utilement contredite par l'ajout manuscrit de la mention «'soit 54 h'», qui ne correspond d'ailleurs pas au cumul des horaires indiqués pour chaque jour, sur un document non signé par les parties. Elle ne l'est pas davantage par les attestations émanant de collègues qui ne travaillaient ni au même lieu ni aux mêmes heures que Mme [Y].
Mme [Y] affirme que le nécessaire repos de douze heures entre chaque prise de poste n'était pas respecté, sans citer aucun exemple d'un tel manquement. Les feuilles de décompte du temps de travail qu'elle a signées font au contraire ressortir que ce temps de repos était respecté.
En définitive, il est établi que Mme [Y] a éprouvé des difficultés à obtenir des documents nécessaires à la prise en charge financière de son arrêt de travail, qu'elle assurait plus souvent que ses collègues les fermetures du magasin, que les horaires planifiés faisaient l'objet de modifications fréquentes et surtout qu'elle a dû assumer une semaine de travail particulièrement lourde et stressante du 21 au 27 mai 2018, faute pour l'employeur d'avoir mis en place une organisation et des moyens adaptés aux circonstances.
Le préjudice subi par Mme [Y] du fait du manquement de son employeur à son obligation de prendre les mesures nécessaires pour assurer la protection de sa santé sera indemnisé par l'octroi de la somme de 2 000 euros. Les deux employeurs successifs seront condamnés in solidum au paiement de cette somme en application de l'article L.1224-2 du code du travail, le fait générateur de la créance étant antérieur au transfert du contrat de travail.
Sur la demande d'indemnité pour harcèlement moral ou exécution déloyale du contrat de travail
Selon l'article 954 du code de procédure civile, les conclusions d'appel doivent formuler expressément les moyens de fait et de droit sur lesquelles chacune des prétentions est fondée avec indication pour chaque prétention des pièces invoquées et de leur numérotation.
Mme [Y] invoque en application des articles L.1152-1 et L.1154-1 du code du travail, au titre du harcèlement moral, une charge de travail excessive à plusieurs reprises, sans aide efficace apportée, des méthodes de management de sa supérieure hiérarchique peu respectueuses finalement couvertes par la directrice des ressources humaines, l'altération de son état de santé.
Ainsi que le relève la société Carrefour Proximité France, de même que la société Jely Contact qui indique reprendre son argumentaire, Mme [Y] ne précise pas les méthodes de management litigieuses caractérisant selon elle des agissements de harcèlement moral. Elle ne vise aucune pièce.
Il résulte de ce qui précède qu'il n'est pas établi que Mme [Y] a fait face à plusieurs reprises à une charge de travail excessive mais qu'elle a travaillé à hauteur de la durée maximale hebdomadaire de travail la semaine du 21 au 28 mai 2018, dans des conditions rendues difficiles par l'absence d'organisation en amont du planning pour tenir compte de l'absence de la chef de magasin et de l'autre adjointe.
Cet élément isolé ne peut caractériser à lui seul un harcèlement moral, quand bien même les documents notamment médicaux produits démontrent son retentissement sur l'état de santé de la salariée.
Mme [Y] invoque subsidiairement une exécution déloyale et de mauvaise foi du contrat de travail en faisant valoir qu'elle n'avait jamais eu de difficulté et que sa mutation lui a été imposée sur un point de vente connu par la direction des ressources humaines comme étant difficile de par sa clientèle et le rythme de travail.
La société Carrefour Proximité France répond qu'elle a affecté Mme [Y] sur un magasin distant de 3 kilomètres de celui de [Localité 7] dans le cadre de la stricte application de la clause de mobilité insérée au contrat de travail.
Mme [Y] ne démontre aucun abus de pouvoir de l'employeur dans la mise en oeuvre de la clause de mobilité.
Le jugement est confirmé en ce qu'il a débouté Mme [Y] de ces chefs de demande.
Sur la demande en paiement d'une indemnité pour travail dissimulé
A titre liminaire, il y a lieu d'observer, en application de l'article 954 du code de procédure civile, que la cour n'est pas saisie de la demande en paiement d'heures supplémentaires évoquée par Mme [Y] dans le corps de ses conclusions, en l'absence de prétention énoncée sur ce point dans le dispositif.
Au soutien de sa demande d'indemnité pour travail dissimulé, Mme [Y] fait valoir le refus de la société Carrefour Proximité France à plusieurs reprises et notamment à l'occasion de «'cette semaine de mai 2017'» de faire figurer la totalité des heures effectuées sur le bulletin de salaire.
La société Carrefour Proximité France répond que les heures supplémentaires étaient stockées sur un compte d'heures et récupérées ou réglées, ce qui résulte effectivement des mentions figurant sur les bulletins de salaire.
Il n'est pas établi que la totalité des heures supplémentaires effectuées par Mme [Y] n'ont pas été mentionnées sur les bulletins de salaire dans le compteur des heures à récupérer, étant rappelé que la salariée signait les feuilles de décompte du temps de travail et qu'il en ressort en particulier qu'elle a travaillé 48 heures et non pas 54 heures la semaine du 21 au 27 mai 2018.
En l'absence de démonstration que l'employeur aurait intentionnellement dissimulé sur les bulletins de salaire le nombre des heures de travail effectuées, il convient de confirmer le jugement qui a débouté Mme [Y] de sa demande en paiement de l'indemnité forfaitaire prévue par l'article L.8223-1 du code du travail.
Sur la demande de résiliation du contrat de travail
Un salarié est fondé à obtenir la résiliation judiciaire de son contrat de travail en cas de manquement de l'employeur en rendant la poursuite impossible.
Au soutien de sa demande, Mme [Y] invoque les atteintes à la santé au travail, le harcèlement moral, des heures supplémentaires occasionnant le dépassement de la durée maximale de travail de 44 heures, la non prise en compte des difficultés du point de vente dans le cadre déplorable d'une mutation imposée en échange d'une prise de congés payés qui étaient dus, l'exécution déloyale et de mauvaise foi du contrat de travail perdurant au-delà de l'arrêt maladie avec le «'zèle'» mis par l'employeur à répondre aux différentes demandes concernant la subrogation vis-à-vis de la sécurité sociale.
La société Carrefour Proximité France répond que Mme [Y] ne peut formuler des demandes relatives à la rupture de son contrat de travail qu'à l'encontre de la société Jely Contact, son employeur au moment de la rupture du contrat de travail et que les demandes formulées contre elle sont mal dirigées.
Elle ajoute en tout état de cause s'agissant de la demande de résiliation judiciaire que la salariée n'a pas été amenée à travailler dans des conditions déplorables au sein du magasin de [Localité 4], qu'elle n'a pas été victime d'un harcèlement moral de la part de Mme [X], qu'elle ne s'est pas vue imposer une mutation sur [Localité 4] sous peine de se voir refuser ses vacances et qu'elle ne s'est pas vue priver du règlement de ses heures supplémentaires. La société Jely Contact développe la même argumentation.
Il résulte de ce qui précède que Mme [Y] n'a pas été victime de harcèlement moral, qu'elle n'a pas effectué d'heures supplémentaires au-delà de la durée maximale du travail, laquelle n'est pas de 44 heures par semaine mais de 44 heures par semaine en moyenne sur une période de 12 semaines consécutives et de 48 heures sur une semaine quelconque selon l'article 28.3 de la convention collective alors applicable, et que sa mutation ne lui a pas été imposé en échange d'une prise de congés payés. En revanche, le manquement de la société Carrefour Proximité France à son obligation lui imposant de prendre des mesures pour protéger la santé physique et morale de la salariée est établi, de même que son manquement dans la régularisation des documents nécessaires pour la prise en charge de son arrêt de travail par la sécurité sociale.
Le manquement à l'obligation de sécurité constituait à lui seul un manquement grave qui rendait impossible la poursuite du contrat de travail et justifiait la résiliation du contrat de travail aux torts de l'employeur, étant précisé, Mme [Y] ayant été licenciée après sa demande de résiliation judiciaire, que la date de la rupture est fixée à la date d'envoi de la lettre de licenciement le 9 décembre 2019. La résiliation ainsi prononcée produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et ouvre droit pour la salariée aux indemnités de rupture et à des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. En application de l'article L.1224-1 du code du travail, la salariée ne peut obtenir la condamnation que de la société Jely Contact au paiement de ces indemnités, la société Jely Contact étant son employeur au moment de la rupture du contrat de travail.
Les règles protectrices des victimes d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle s'appliquent dès lors que l'inaptitude du salarié, quel que soit le moment où elle est constatée et invoquée, a au moins partiellement pour origine cet accident ou cette maladie, et que l'employeur avait connaissance de cette origine professionnelle au moment du licenciement.
En l'espèce, Mme [Y] a été placée en arrêt de travail à compter du 12 juin 2018 au titre d'un accident du travail survenu le 11 juin 2018, consistant en un échange au sein du magasin de [Localité 7] avec sa chef de secteur. Cet échange, qualifié par Mme [Y] d'altercation et par Mme [X] de discussion, portait sur les conditions de travail de Mme [Y] au cours de la semaine du 21 mai. Mme [X] convient que Mme [Y] n'était pas contente et que le ton est monté. Mme [Y] produit deux témoignages de salariés ayant assisté à cet échange. Mme [C] explique que malgré tout ce que Mme [Y] lui disait, Mme [X] jurait que si elle avait été au courant elle aurait fait ce qu'il fallait, que la discussion est montée crescendo compte tenu du stress accumulé par Mme [Y], qu'elle s'est mise à pleurer, que s'en est suivi l'arrêt de travail de Mme [Y]. M. [P] atteste que l'absence de compassion de Mme [X] pour ce que Mme [Y] avait enduré a créé un «'pétage de plomb'», qu'il n'avait jamais vu sa collègue dans un tel état de tension, qu'elle avait les larmes aux yeux et «'bouillonnait'», qu'elle a rencontré son médecin qui l'a placée en arrêt de travail.
Son médecin traitant indique que le 12 juin 2018, Mme [Y] était en pleurs, stressée et présentait des manifestations dépressives rapportées à son travail. Mme [Y] a fait l'objet d'un arrêt de travail continu depuis cette date. Elle produit un courrier d'un médecin psychiatre en date du 13 novembre 2018 mentionnant qu'elle présente un pré-burnout (surmenage, fatigue physique et émotionnelle, anxiété, troubles du sommeil) avec un élément de type post-traumatique (rêves de travail, ruminations).
Le 20 novembre 2019, le médecin du travail a déclaré Mme [Y] inapte à son poste en précisant que son état de santé faisait obstacle à tout reclassement dans un emploi.
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Par décision du 15 octobre 2018, la caisse primaire d'assurance maladie a écarté la qualification d'accident du travail au motif que «'le lien de subordination à l'employeur n'est pas établi au moment de l'accident'; celui-ci étant survenu au cours d'activités personnelles n'ayant pas de relation avec le travail'». Il ressort des conclusions des parties que cette décision a été confirmée par la commission de recours amiable et fait l'objet d'un recours juridictionnel devant le pôle social du tribunal judiciaire.
La décision de la caisse ne lie pas le juge du travail. Il résulte de la chronologie et de la teneur des éléments ci-dessus que l'inaptitude de Mme [Y] a au moins partiellement pour origine la discussion qui s'est tenue le 11 juin 2018 avec la chef de secteur de Mme [Y], dans des locaux de l'entreprise, au sujet des conditions de travail de Mme [Y], qui a provoqué les lésions psychiques constatées par ses collègues témoins de la discussion et son médecin, et que l'employeur en avait connaissance puisqu'il était informé de la déclaration d'accident du travail de Mme [Y], comme il résulte des bulletins de salaire, et des recours exercé par Mme [Y] contre la décision de la caisse primaire d'assurance maladie.
Le jugement est donc infirmé et il est retenu que s'appliquaient les règles protectrices des victimes d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle.
En application de l'article L.1226-14 du code du travail, l'employeur est redevable de l'indemnité compensatrice d'un montant égal à celui de l'indemnité compensatrice de préavis prévue à l'article L.1234-5, ainsi que de l'indemnité spéciale de licenciement égale au double de l'indemnité prévue par l'article L.1234-9.
Il convient d'allouer à Mme [Y] la somme demandée de 3'557,62 euros à titre d'indemnité compensatrice d'un montant égal à celui de l'indemnité compensatrice de préavis et la somme de 8'547,26 euros euros au titre du reliquat d'indemnité spéciale de licenciement.
Compte tenu de l'ancienneté de la salariée, de sa rémunération brute mensuelle, de son âge, de sa capacité à retrouver un nouvel emploi et des justificatifs de son indemnisation au titre de l'assurance chômage jusqu'en mai 2020, le barème prévu par l'article L.1235-3 du code du travail permet une indemnisation adéquate et appropriée, au sens de la Convention n° 158 de l'OIT sur le licenciement. Au regard du préjudice que l'appelante a subi du fait de la perte injustifiée de son emploi, il convient de lui allouer la somme de 13'098 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
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Mme [Y] ne justifie pas d'un préjudice distinct de la perte de son emploi à l'appui de sa demande de dommages et intérêts au titre de l'article 1240 du code civil.
Sur le solde de tout compte
Mme [Y] critique la déduction sur le solde de tout compte des sommes de 1'595,33 euros, 587,67 euros et 131,64 euros.
La première retenue au titre de la «'déduction départ'», et non «'des parts'» comme soutenu par l'appelante, est justifiée par la sortie des effectifs de la salariée le 10 décembre 2019 et vient en déduction de la rémunération de 2'183 euros applicable à un mois entier.
La deuxième retenue pour absence non rémunérée de la salariée du 1er au 9 décembre 2019 s'explique par son absence pour maladie, Mme [Y] invoquant de façon surprenante une «'prétendue absence'».
Enfin la dernière retenue résulte du solde négatif accumulé chaque mois sur les bulletins de salaire en raison de la participation de la salariée au financement de sa complémentaire santé avancée par l'employeur faute pour la Mme [Y], en arrêt de travail, de percevoir un salaire.
Le jugement est confirmé en ce qu'il a débouté Mme [Y] de ses demandes de ce chef.
Sur les demandes accessoires
Il ne serait pas équitable de laisser à la charge de Mme [Y] les frais qu'elle a dû exposer et qui ne sont pas compris dans les dépens. Il convient de condamner in solidum les sociétés intimées à lui payer la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
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PAR CES MOTIFS
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La cour statuant après débats en audience publique par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe,
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Infirme le jugement déféré en ce qu'il a débouté Mme [Y] de sa demande d'indemnité pour manquement de l'employeur à son obligation de sécurité et de sa demande de résiliation judiciaire du contrat de travail et statuant à nouveau'de ces chefs :
Dit que l'employeur a manqué à son obligation de sécurité.
Prononce la résiliation judiciaire du contrat de travail à effet du 9 décembre 2019.
Dit que la rupture du contrat de travail produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Dit que les règles protectrices des victimes d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle s'appliquent.
Condamne la société Carrefour Proximité France et la société Jely Contact in solidum à verser à Mme [Y]'la somme de 2'000 euros à titre d'indemnité pour manquement à l'obligation de sécurité.
Condamne la société Jely Contact à payer à Mme [Y] les sommes suivantes':
3'557,62 euros à titre d'indemnité compensatrice d'un montant égal à celui de l'indemnité compensatrice de préavis
8'547,26 euros au titre du reliquat d'indemnité spéciale de licenciement.
13'098 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
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Confirme pour le surplus le jugement entrepris, sauf sur les dépens.
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Condamne in solidum la société Carrefour Proximité France et la société Jely Contact à verser à Mme [Y] la somme de 1'500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
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Condamne'in solidum la société Carrefour Proximité France et la société Jely Contact aux dépens.
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le greffier
Serge LAWECKI
le conseiller désigné pour exercer
les fonctions de président de chambre
Muriel LE BELLEC