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Décisions

CA Amiens, ch. économique, 4 avril 2024, n° 22/02298

AMIENS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Défendeur :

SCI Ryns, Resto Kebab (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Grevin

Conseillers :

Mme Leroy-Richard, Mme Dubaele

Avocats :

Me Dongmo Guimfak, Me Sabaly, Me Bibard, Me Derbise

CA Amiens n° 22/02298

3 avril 2024

DECISION

Par acte notarié en date du 12 juillet 2016 la SCI Ryns a consenti un bail commercial à la société Resto kebab [Localité 5] portant sur des locaux sis à [Adresse 3] et comprenant un local à usage commercial et une partie à usage d'habitation.

Par acte sous seing privé en date du 11 septembre 2017 la partie à usage d'habitation a été donnée à bail par M. [B] [H] à M. [Z] [W] moyennant un loyer mensuel initial de 300 euros.

Se prévalant de loyers impayés M. [H] a fait délivrer le 30 juillet 2019 à M. [W] un commandement de payer la somme en principal de 1800 euros .

Par exploit d'huissier en date du 17 septembre 2021 la société Resto kebab [Localité 5] et M. [H] ont fait assigner M. [W] devant le tribunal judiciaire d'Amiens aux fins de voir constater la résiliation du bail pour défaut de paiement des loyers et des charges à compter du 30 septembre 2019, d'ordonner la libération des lieux et à défaut l'expulsion du locataire, de voir condamner celui-ci au paiement d' une indemnité d'occupation mensuelle équivalente au montant du loyer, de la somme de 2543 euros au titre de l'arriéré locatif et de la somme de 2000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement du tribunal judiciaire d'Amiens en date du 14 mars 2022, M. [W] a été débouté de l'ensemble de ses demandes et il a été constaté l'acquisition de la clause résolutoire au 30 septembre 2019, il a été ordonné à M. [W] de quitter et vider les lieux, à défaut son expulsion a été ordonnée deux mois après la signification d'un commandement de quitter les lieux y compris avec le concours de la force publique.

Par ailleurs M. [W] a été condamné à payer à la société Resto kebab [Localité 5] représentée par son gérant M. [H] la somme de 9443,94 euros au titre des loyers arrêtés au mois de septembre 2021 avec intérêts au taux légal à compter de la décision et une indemnité mensuelle d'occupation à compter du 30 septembre 2019 fixée au montant du loyer et des charges outre une somme de 300 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et au paiement des entiers dépens qui comprendront le coût du commandement de payer de son signalement à la commission de coordination des actions de prévention des expulsions locatives, de l'assignation et de sa notification à la préfecture.

Par déclaration reçue au greffe de la cour le 9 mai 2022 M. [W] a interjeté appel de cette décision en toutes ses dispositions.

Par acte en date du 14 juin 2022 M. [W] a fait assigner en intervention forcée la SCI Ryns.

Par ordonnance du conseiller de la mise en état en date du 9 mars 2023 la SCI Ryns a été déboutée de sa demande tendant au prononcé de la caducité de la déclaration d'appel. Par ailleurs l'assignation en intervention forcée de la société Ryns a été déclarée irrecevable et la société Ryns a été mise hors de cause.

Aux termes de ses conclusions remises le 25 juillet 2022 M. [W] a demandé à la cour de prononcer la nullité du contrat de bail en date du 11 septembre 2017 et d'infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions et statuant à nouveau de débouter la société Resto kebab [Localité 5] de l'ensemble de ses demandes et de la condamner au paiement de la somme de 2000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et au paiement des entiers dépens.

Aux termes de ses conclusions remises le 8 novembre 2022 la société Resto kebab [Localité 5] et M. [H] ont demandé à la cour de confirmer la décision entreprise en toutes ses dispositions , de débouter M. [W] de ses demandes et de le condamner au paiement d'une somme de 1500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et au paiement des entiers dépens.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 11 janvier 2024.

SUR CE

M. [W] soutient qu'il a contracté un bail d'habitation avec M. [H] qui est le gérant de la société par laquelle il a été embauché selon un contrat de travail à durée déterminée.

Il fait valoir que cependant le local à usage d'habitation n'appartient pas au bailleur M. [H] mais à la SCI Ryns qui est l'unique propriétaire et alors que M. [H] n'a aucune qualité pour contracter et n'est pas en possession d'un mandat du propriétaire.

Il considère que n'ayant pas été informé de la situation du local, il y a eu dol.

Il ajoute que selon l'article L 145-31 du code de commerce sauf stipulation contraire du bail ou accord du bailleur toute sous-location totale ou partielle du local, objet du bail commercial, est interdite et qu'en l'espèce le contrat de bail commercial interdisait toute sous-location.

Il fait valoir qu'il est fondé à invoquer la nullité du contrat de bail pour vice de son consentement.

Il soutient que le contrat de location étant nul il ne produit aucun effet et qu'ainsi le bailleur doit être débouté de ses demandes en paiement.

Les intimés soutiennent que la position de l'appelant a évolué dès lors qu'après avoir nié avoir contracté un bail d'habitation, il sollicite désormais la nullité de ce bail pour dol.

Ils font valoir que le bail commercial porte sur un immeuble à usage commercial et à usage d'habitation et que ce bail précise très clairement que le bailleur autorise dès la signature du bail le preneur à sous louer la partie à usage d'habitation.

Ils soutiennent que du fait de cette autorisation expresse la société Resto kebab [Localité 5] était fondée à lui accorder un bail d'habitation signé par son gérant.

Ils ajoutent que les conditions de la sous location sont parfaitement régulières et qu'aucune manoeuvre n'a été entreprise pour surprendre le consentement de l'appelant ce qui ne présentait aucun intérêt pour les intimés.

Selon l'article 1137 du code civil le dol est le fait pour un contractant d'obtenir le consentement de l'autre par des manoeuvres ou des mensonges et constitue également un dol la dissimulation intentionnelle par l'un des cocontractants d'une information dont il sait le caractère déterminant pour l'autre partie.

Le seul fait que M. [W] ait ignoré que le local d'habitation qui lui était donné en location par la société Resto kebab [Localité 5] à laquelle il réglait ses loyers faisait partie d'un bail commercial et appartenait ainsi à un tiers ne saurait constituer un dol viciant son consentement dès lors que cette location ou sous location était dûment autorisée par le propriétaire des lieux le bailleur commercial selon les termes précis du bail commercial.

M. [W] n'établit aucunement dans ces conditions qu'il aurait renoncé à ce bail s'il avait détenu cette information et donc ne justifie pas du caractère déterminant de cette information sur son consentement.

Il convient en conséquence de débouter M. [W] de sa demande tendant à voir constater la nullité du contrat de location le liant à la société Restokebab [Localité 5] représentée par son gérant M. [H]

M. [W] ne conteste par aucun moyen le montant des sommes mises à sa charge en première instance et les différents chefs découlant de l'application de la clause résolutoire il convient de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions.

Sur les frais irrépétibles et les dépens.

Il convient de condamner M. [W] qui succombe en son appel aux entiers dépens d'appel et au paiement d'une somme de 750 euros à la société Resto kebab [Localité 5] représentée par son gérant M. [H] sur le fondement de l'article 700 du code de procédure cvile au titre des frais non compris dans les dépens exposés à hauteur d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant publiquement contradictoirement et par mise à disposition de la décision au greffe,

Confirme la décision entreprise en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

Déboute M. [W] de sa demande tendant à voir constater la nullité du contrat de location ;

Condamne M.[Z] [W] à payer à la société Resto kebab [Localité 5] représentée par son gérant M. [H] une somme de 750 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais non compris dans les dépens exposés à hauteur d'appel ;

Le condamne aux entiers dépens d'appel.