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Décisions

Cass. soc., 15 février 2023, n° 21-30.342

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Mariette

Rapporteur :

M. Barincou

Avocat :

SCP Célice, Texidor, Périer

Aix-en-Provence, ch. 4-2, du 4 juin 2021

4 juin 2021

Faits et procédure 
1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 4 juin 2021), Mme [I] a été engagée, le 1er décembre 
2010, par l'association Fouque (l'association) en qualité de surveillante de nuit au sein d'une 
maison d'enfants à caractère social. 
2. En juin 2018, à la suite du signalement de la salariée et d'un délégué syndical, l'inspection du 
travail a effectué un contrôle au sein de l'établissement au cours duquel la salariée a remis la 
copie d'un courriel adressé par l'équipe éducative aux responsables de l'association pour dénoncer 
des incidents se déroulant la nuit, notamment de possibles agressions sexuelles commises par 
certains enfants accueillis sur d'autres. 
3. L'inspection du travail a ensuite adressé un courrier à l'employeur au sujet des postes de 
veilleurs de nuit et informé le procureur de la République de faits ne relevant pas de ses 
compétences mais lui paraissant mettre en danger les salariés et les enfants confiés à cette 
institution. 
4. Le procureur de la République a ouvert une première enquête, pour agression sexuelle sur 
mineurs, classée sans suite le 4 décembre 2018 pour absence d'infraction, puis une seconde 
enquête visant la salariée et un délégué syndical pour dénonciation mensongère, elle aussi classée 
sans suite à la même date, au motif que l'infraction était insuffisamment caractérisée. 
5. Licenciée par lettre du 31 janvier 2019 et estimant que ce licenciement était en lien avec la 
dénonciation des manquements constatés au sein de l'établissement, elle a saisi la formation de 
référé de la juridiction prud'homale pour obtenir sa réintégration. 
Examen des moyens
Sur le premier moyen, ci-après annexé
6. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de 
statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen
qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le second moyen
Enoncé du moyen
7. L'employeur fait grief à l'arrêt de dire que le licenciement est nul et qu'un licenciement nul 
constitue un trouble manifestement illicite, d'ordonner la réintégration immédiate de la salariée à 
son poste au sein de l'association et de le condamner à lui payer une somme à titre d'indemnité 
d'éviction au 6 janvier 2021, alors :
« 1°/ que le salarié qui entend dénoncer des actes illicites dont il a eu connaissance dans 
l'exercice de ses fonctions, et notamment des faits constitutifs d'un crime ou d'un délit, doit 
respecter une procédure graduée, qui subordonne la saisine directe d'une autorité judiciaire ou 
administrative, soit à l'absence de réaction de l'employeur à un signalement interne, soit à la 
preuve d'un danger grave et imminent ou d'un risque de dommages irréversibles ; qu'en l'espèce, 
l'association Fouque reprochait à la salariée d'avoir communiqué à l'inspectrice du travail un 
courrier d'alerte interne couvert par le secret professionnel évoquant des incidents de nature 
sexuelle au sein d'un groupe d'enfants, alors qu'elle était informée que cette alerte avait été traitée 
par la direction, laquelle avait procédé à une enquête qui avait révélé la pratique de jeux à 
connotation sexuelle (''cap ou pas cap'') par les enfants, sans abus ni agression sexuels, puis avait 
décidé avec l'équipe éducative des mesures à prendre pour renforcer la surveillance des enfants, 
mettre un terme à ces jeux et prévenir toute dérive ; que la salariée, qui avait reconnu au cours de 
l'enquête de police avoir été informée du traitement interne de cette alerte, avait cependant 
dissimulé cette information à l'inspectrice du travail, lui laissant accroire que le courrier d'alerte 
de l'équipe éducative était resté sans réponse ; qu'en refusant de rechercher si la salariée avait 
respecté la procédure d'alerte graduée avant de dénoncer des faits d'agression sexuelle, au motif 
erroné que la procédure d'alerte graduée n'est pas applicable en cas de dénonciation de faits 
constitutifs d'un crime ou d'un délit, la cour d'appel a violé l'article L. 1132-3-3 du code du travail 
interprété à la lumière de l'article 10 de la convention européenne de sauvegarde des droits de 
l'homme et des libertés fondamentales ;
2°/ que l'exercice de la liberté d'expression comporte des devoirs et des responsabilités, parmi 
lesquels celui de ne pas divulguer des informations mettant en cause la réputation d'autrui sans 
avoir vérifié qu'elles sont exactes et dignes de confiance ; qu'un salarié ne peut en conséquence 
invoquer la protection de la liberté d'expression s'il a dénoncé des faits qu'il n'a pas lui-même 
constatés, en rapportant des déclarations dont il n'a pas cherché à vérifier l'exactitude ; que si le 
salarié peut invoquer son ignorance de la fausseté des faits dénoncés, c'est à la condition qu'elle 
soit légitime ; qu'en l'espèce, il est constant que la salariée a dénoncé auprès de l'inspection du 
travail des faits d'agression sexuelle sur mineurs qu'elle n'avait pas constatés, en appuyant ses 
accusations sur des documents internes à l'entreprise, sans préciser la suite qui y était donnée, et 
que cette dénonciation a conduit à l'ouverture d'une enquête de police clôturée par un classement 
sans suite, en raison de l'absence de toute infraction ; qu'en retenant qu'il ne pouvait être reproché 
à la salariée d'avoir dénoncé des faits d'agression sexuelle qu'elle n'avait pas constatés 
personnellement, ni de s'être emparée de documents internes à l'entreprise pour ''asseoir ses 
dires'', dès lors que ''rien ne permet de retenir qu'elle sût alors que les faits dénoncés étaient faux, 
ni qu'elle ait travesti le sens des documents dont elle s'est emparée'', cependant qu'il appartenait à 
la salariée d'effectuer des vérifications minimales avant de dénoncer auprès d'une autorité 
extérieure des faits d'agression sexuelle contre des mineurs mettant en cause la réputation de 
l'établissement qui les accueille, sans pouvoir opposer son ignorance pour justifier la 
dénonciation de faits inexistants, la cour d'appel a violé l'article L. 1132-3-3 du code du travail 
interprété à la lumière de l'article 10 de la convention européenne de sauvegarde des droits de 
l'homme et des libertés fondamentales ;
3°/ que l'exercice de la liberté d'expression comporte des devoirs et des responsabilités, parmi 
lesquels celui de ne pas divulguer des informations mettant en cause la réputation d'autrui sans 
avoir vérifié qu'elles sont exactes et dignes de confiance ; qu'un salarié ne peut en conséquence 
dénoncer des faits constitutifs d'un crime ou d'un délit qu'il n'a pas lui-même constatés, sur la 
base d'informations dont il n'a pas vérifié l'exactitude, sauf à justifier de l'impossibilité de vérifier 
ces informations ; qu'en l'espèce, il est constant qu'à la réception du courrier d'alerte de l'équipe 
éducative du 7 juin 2018, l'association Fouque avait effectué une enquête auprès de tous les 
enfants du groupe concerné, cette enquête ayant fait ressortir que les enfants se livraient à des 
jeux à connotation sexuelle, sans agression sexuelle et que la direction avait décidé, avec l'équipe 
éducative, des mesures à prendre pour mettre un terme à ces jeux et éviter toute dérive ; qu'au 
cours de l'enquête pénale, la salariée avait reconnu avoir été informée par l'équipe pédagogique 
du traitement des faits dénoncés dans le courrier du 7 juin 2018 ; qu'en reprochant cependant à 
l'association Fouque d'avoir ''manqué à la protection qu'elle devait à sa salariée laquelle n'avait 
aucun moyen de savoir si les faits qu'elle-même et ses collèges redoutaient été avérés ou non'', 
sans expliquer ce qui interdisait à la salariée, avant de dénoncer à l'inspection du travail des faits 
inexistants d'agression sexuelle sur mineurs, de saisir la direction pour avoir l'assurance que les 
incidents évoqués dans le courrier électronique du 7 juin 2018 ne couvraient aucune agression
sexuelle, la cour d'appel a violé l'article L. 1132-3-3 du code du travail interprété à la lumière de 
l'article 10 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés 
fondamentales ;
4°/ que ne peut invoquer la protection des lanceurs d'alerte le salarié qui a dénoncé, de mauvaise 
foi, des faits constitutifs d'un crime ou d'un délit dont il prétend avoir eu connaissance dans 
l'exercice de ses fonctions ; que la mauvaise foi résulte de la connaissance, par le salarié, de la 
fausseté des faits dénoncés ; qu'en l'espèce, il résulte du procès-verbal d'audition de la salariée par 
les services de police qu'elle reconnaissait, d'une part, n'avoir jamais constaté elle-même de faits 
d'agression sexuelle, ni les faits dénoncés sur le courrier d'alerte interne du 7 juin 2018 et, d'autre 
part, que l'équipe pédagogique lui avait indiqué que les faits dénoncés dans ce courrier avaient été 
traités et qu'ils avaient repris les enfants, ce qui impliquait que ces faits ne couvraient aucune 
agression sexuelle ; qu'en affirmant néanmoins que rien ne permettait de retenir que la salariée, 
qui n'avait pas elle-même constaté ces faits et qui avait cependant cru devoir faire état de 
documents internes pour ''asseoir ses dires'', ''sût que les faits dénoncés étaient faux'', la cour 
d'appel a méconnu les conséquences légales de ses propres constatations dont il s'évinçait que la 
salariée avait connaissance de la fausseté des faits qu'elle avait dénoncés, en violation de l'article 
L. 1132-3-3 du code du travail interprété à la lumière de l'article 10 de la convention européenne 
de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. »
Réponse de la Cour 
8. Aux termes de l'article L. 1132-3-3, alinéa 1er, du code du travail, dans sa rédaction issue de la 
loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016, aucune personne ne peut être écartée d'une procédure de 
recrutement ou de l'accès à un stage ou à une période de formation en entreprise, aucun salarié ne 
peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, 
notamment en matière de rémunération, au sens de l'article L. 3221-3, de mesures d'intéressement 
ou de distribution d'actions, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de 
classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat, pour 
avoir relaté ou témoigné, de bonne foi, de faits constitutifs d'un délit ou d'un crime dont il aurait 
eu connaissance dans l'exercice de ses fonctions.
9. Selon le deuxième alinéa de ce texte, aucune personne ne peut être écartée d'une procédure de 
recrutement ou de l'accès à un stage ou à une période de formation professionnelle, aucun salarié 
ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, 
notamment en matière de rémunération, au sens de l'article L. 3221-3, de mesures d'intéressement 
ou de distribution d'actions, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de 
classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat, pour 
avoir signalé une alerte dans le respect des articles 6 à 8 de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 
2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie 
économique.
10. Il en résulte, d'une part, que le salarié qui relate ou témoigne de faits constitutifs d'un délit ou 
d'un crime dont il aurait eu connaissance dans l'exercice de ses fonctions n'est pas tenu de 
signaler l'alerte dans les conditions prévues par l'article 8 de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 
2016 organisant une procédure d'alerte graduée et, d'autre part, qu'il ne peut être licencié pour ce 
motif, sauf mauvaise foi, laquelle ne peut résulter que de la connaissance de la fausseté des faits 
qu'il dénonce et non de la seule circonstance que les faits dénoncés ne sont pas établis.
11. La cour d'appel, qui a constaté que la lettre de licenciement faisait grief à la salariée d'avoir 
interpellé l'inspectrice du travail le 18 juin 2018 pour faire état de conditions de travail 
dangereuses pour elle-même et les enfants, d'avoir effectué sans autorisation une copie du cahier 
de liaison et transmis une copie de mails à l'inspectrice du travail, ces déclarations et ce 
comportement ayant eu pour conséquence l'ouverture d'une enquête pénale et l'audition des 
différents éducateurs de l'unité, ainsi que des enfants, en a exactement déduit que la protection de 
la salariée licenciée pour avoir dénoncé des faits susceptibles de constituer des agressions 
sexuelles, n'était conditionnée qu'à sa bonne foi, les conditions supplémentaires posées par les 
articles 6 à 8 de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 et imposées par l'alinéa 2 de l'article L. 
1132-3-3 du code du travail n'étant pas exigées par l'alinéa 1erde ce texte.
12. Elle a ensuite relevé que si la salariée avait dénoncé des faits d'agression sexuelle sans les 
avoir constatés elle-même, elle s'était appuyée pour cela sur des documents internes à l'entreprise 
et n'avait aucun moyen de savoir si les faits qu'elle-même et ses collègues redoutaient étaient ou 
non avérés alors que les services de police avaient dû procéder pour cela à une enquête 
approfondie, laquelle, loin de porter atteinte à la réputation de l'établissement, constituait, dans un 
souci de protection d'enfants déjà grandement fragilisés par les causes de leur placement et leur 
placement lui-même, une mesure parfaitement proportionnée aux éléments dont avait eu 
connaissance la salariée, dans l'exercice de ses fonctions, en sorte qu'il n'était pas démontré 
qu'elle savait que les faits qu'elle dénonçait étaient faux.
13. La cour d'appel, qui n'avait pas à procéder à une recherche que ses constatations rendaient 
inopérante, en a exactement déduit que le licenciement constituait un trouble manifestement 
illicite.
14. Le moyen n'est donc pas fondé. 
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi.