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Décisions

CA Aix-en-Provence, ch. 3-4, 4 avril 2024, n° 23/00260

AIX-EN-PROVENCE

Arrêt

Infirmation partielle

PARTIES

Défendeur :

Lou Prevost (SARL), Real Gestion (SARL), Groupe Fiduciel (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Chalbos

Conseillers :

Mme Vignon, Mme Martin

Avocats :

Me Allali, Me Parravicini, Me Tollinchi, Me Badie, Me Guedj, Me De Caudemberg

T. com. Nice, du 12 mai 2017, n° 2016F00…

12 mai 2017

La SARL Lisem, qui exploitait un hôtel à [Localité 19], était détenue par M. [A] [D] à hauteur de 360 parts et Mme [B] [D] à hauteur de 440 parts, cette dernière étant désignée gérante.

La société a fait l'objet d'une procédure de redressement judiciaire et a bénéficié d'un plan de redressement arrêté par jugement du tribunal de commerce de Nice du 29 juillet 2010.

Le 21 mai 2013, la SARL Lou Prévost, représentée par son gérant M. [T] [G], a acquis les 800 parts constituant le capital de la SARL Lisem pour le prix de 4000 euros, ainsi que le compte courant d'associée de Mme [B] [D] pour le prix de 139000 euros.

La cession était actée par une assemblée générale extraordinaire de la SARL Lisem tenue le même jour, désignant M. [T] [G] en qualité de gérant.

Pour la rédaction des actes et les formalités y afférentes, la SARL Lou Prévost avait sollicité l'assistance de la société Fiduciaire Management Group ayant pour nom commercial 'Groupe Fiduciel', société en participation créée entre MM [W] [V] et [C] [M], suivant devis du 14 mai 2013.

Les actes étaient signés dans les locaux de la SARL Real Gestion, constituée entre les mêmes associés, en l'absence des cédants, la signature figurant sous le nom de ces derniers étant celle de leur père M. [E] [D].

La SARL Lou Prevost remettait trois chèques établis à l'ordre de '[D]' pour les montants respectifs de 4000 euros, correspondant au prix de cession des parts, 55000 euros et 20000 euros au titre de la première échéance du prix de cession du compte courant de Mme [D].

M. [T] [G] s'est plaint auprès de Mme [B] [D], M. [E] [D], les sociétés Real Gestion et 'Groupe Fiduciel' de ce que la société Lisem devait supporter un passif trouvant son origine antérieurement à la cession et qui lui avait été dissimulé, reprochant aux sociétés Real Gestion et 'Groupe Fiduciel' une faute professionnelle dans la rédaction des actes et se prévalant auprès de Mme [D] de la clause de garantie de passif insérée à l'acte de cession.

La société Lisem faisait l'objet d'une nouvelle procédure de redressement judiciaire sur résolution du plan prononcée le 8 juillet 2015.

Par acte du 7 avril 2016, la société Lou Prévost a fait assigner devant le tribunal de commerce de Nice Mme [B] [D], M. [A] [D], les sociétés Real Gestion et Fiduciaire Management Group aux fins d'obtenir la condamnation in solidum des défendeurs à lui payer diverses sommes au titre de la garantie de passif et 100000 euros de dommages et intérêts.

Par acte du 4 octobre 2016, la société Lou Prévost a fait assigner en intervention forcée M. [W] [V] et M. [C] [M], tous deux pris en leur qualité de participant, de co-gérant et de liquidateur de la société en participation Fiduciaire Management Group.

La société Lou Prévost demandait au tribunal d'annuler les actes de cession du 21 mai 2013 pour dol et de :

- condamner M. [A] [D] à restituer la somme de 1800 euros montant du prix de cession de ses parts,

- condamner Mme [B] [D] à restituer les sommes de 2200 euros au titre du prix de cession de ses parts, 91000 euros versée au titre de la cession de créance, 5623,56 euros au titre des travaux lui incombant,

- condamner in solidum M. [W] [V] et M. [C] [M] à restituer la somme de 3478,86 euros représentant les honoraires et frais des actes du 21 mai 2013,

- condamner in solidum la SARL Real Gestion, Mme [B] [D], M. [A] [D], M. [W] [V] et M. [C] [M] à lui payer la somme de 200000 euros de dommages et intérêts,

- subsidiairement, condamner conjointement la SARL Real Gestion, Mme [B] [D], M. [A] [D], M. [W] [V] et M. [C] [M] à lui payer les sommes de :

- 77381,16 euros au titre du contentieux prud'homal avec Mme [S] outre les cotisations et charges sociales sur ladite somme soit 115762 euros à parfaire,

- 43822,52 euros,

- 100000 euros de dommages et intérêts.

Mme [B] [D] et M. [A] [D] soutenaient la nullité des actes de cession signés par leur père sans procuration de leur part.

Par jugement du 12 mai 2017, le tribunal de commerce de Nice a :

- déclaré nul et de nul effet l'acte de cession des parts sociales en date du 21 mai 2013,

- déclaré nul et de nul effet l'acte de cession de créance en date du 21 mai 2013,

- condamné M. [A] [D] au paiement de la somme de 1 800 euros en restitution du prix de

cession des parts sociales outre intérêts au taux légal à compter du 7 juin 2016 date de l'assignation,

- condamné Mme [B] [D] au paiement de la somme de 2 200 euros en restitution du prix de cession des parts sociales et de la somme de 91 000 euros en restitution de la somme versée au titre de la cession de créance du 21 mai 2013,

- condamné Mme [B] [D] au paiement de la somme de 5 623,56 euros outre intérêts au taux légal à compter du 7 juin 2016 date de l'assignation en restitution des travaux incombant à Mme [B] [D],

- condamné solidairement M. [C] [M], M. [W] [V] cogérants de la société Groupe Fiduciel et la SARL Real Gestion au paiement à la SARL Lou Prévost de la somme de 3 478,86 euros en restitution des honoraires et frais d'acte du 21 mai2013,

- condamné solidairement M. [C] [M], M. [W] [V] cogérants de la société Groupe Fiduciel, Mme [B] [D], M. [A] [D] et la SARL Real Gestion au paiement à la SARL Lou Prévost de la somme de 143 822,52 euros au titre des contentieux, dont le contentieux prud'homal '[S]', outre cotisations sociales et charges, le tout avec intérêts au taux légal à compter du 7 juin 2016 date de l'assignation,

- condamné solidairement M. [C] [M], M. [W] [V] cogérants de la société Groupe Fiduciel, Mme [B] [D], M. [A] [D] et la SARL Real Gestion au paiement à la SARL Lou Prévost de la somme de 10 000,00 euros au titre de dommages et intérêts,

- débouté la SARL Lou Prévost de ses autres demandes, fins et conclusions,

- débouté Mme [B] [D] et M. [A] [D] de leurs autres demandes, fins et conclusions,

- débouté M. [C] [M], M. [W] [V] cogérants de la société Groupe Fiduciel, et la SARL Real Gestion de leurs autres demandes fins et conclusions,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,

- condamné solidairement M. [C] [M], M. [W] [V] cogérants de la société Groupe Fiduciel, Mme [B] [D], M. [A] [D] et la SARL Real Gestion à payer à la SARL Lou Prévost la somme de 7 500,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens ;

Le tribunal a notamment retenu :

- que l'identité d'associés et de représentation légale entre les sociétés Real Gestion et Groupe Fiduciel était démontrée et que la SARL Real Gestion, M. [M] et M. [V] étaient indistinctement les rédacteurs des actes du 21 mai 2013,

- que les actes de cession avaient été signés dans un contexte de dol généralisé incontestable,

- que l'aggravation importante du passif avait compromis le redressement de la société Lisem et causé un préjudice à la société Lou Prévost.

MM [V] et [M] ont interjeté appel de cette décision le 30 mai 2017.

Un appel principal a également été formalisé par M. [A] [D] le 1er juin 2017.

Par ordonnance du 8 février 2018, le conseiller de la mise en état a ordonné le sursis à statuer jusqu'à la décision rendue par le juge d'instruction au tribunal de grande instance de Nice dans le cadre de la plainte déposée par Mme [B] [D] pour faux et usage de faux, usurpation d'identité, escroquerie, auprès du doyen des juges d'instruction au tribunal de grande instance de Nice.

Par ordonnance du 16 décembre 2022, le conseiller de la mise en état a ordonné la radiation de l'affaire, les parties n'ayant pas donné suite aux demandes d'information de la cour sur l'état d'avancement de la procédure pénale.

Exposé du litige

La SARL Lou Prévost a produit le 22 décembre 2022 l'ordonnance de non-lieu rendue le 28 juin 2022 par le juge d'instruction du tribunal judiciaire de Nice et sollicité de réenrôlement de l'affaire.

Par acte du 22 janvier 2024, Mme [B] [D] a fait assigner M. [E] [D] en intervention forcée, aux fins d'entendre :

- juger que les signatures figurant sur les actes attaqués par la société Lou Prévost et attribuées de manière inexacte à Mme [B] [D] ont été signées par M. [E] [D],

- juger que M. [E] [D] n'a jamais informé Mme [B] [D] de l'intention de procéder à des cessions et n'a jamais sollicité de mandat pour réaliser les actes du 21 mai 2023 (sic),

- juger que M. [E] [D] n'a pas informé Mme [B] [D] d'une assemblée générale visant à statuer sur une éventuelle cession ou un éventuel agrément d'un nouvel associé,

- mettre Mme [B] [D] hors de cause.

Par conclusions déposées et notifiées le 12 février 2024, M. [C] [M] et M. [W] [V] demandent à la cour, vu les articles 32-1, 554, 555 et 564 du code de procédure civile, 1147 ancien du code civil devenu 1231-1, 54 de la loi du 21 décembre 1971, de :

- recevoir M. [C] [M] et M. [W] [V] ès qualités en leur appel,

- le déclarer recevable et bien fondé ;

- infirmer le jugement rendu le 12 mai 2017 par le tribunal de commerce de Nice, notamment en ce qu'il a annulé les actes de cession, et condamné les concluants au paiement de diverses sommes au profit de la SARL Lou Prévost,

Statuant à nouveau,

- déclarer irrecevables les demandes de la SARL Lou Prévost en l'état de la ratification et de l'exécution de la cession de parts sociales, ainsi que de la clôture de la liquidation judiciaire de la SARL Lisem,

- déclarer irrecevable la demande nouvelle en cause d'appel de la SARL Lou Prévost visant à voir condamner de M. [C] [M] et de M. [W] [V] ès qualité à garantir les condamnations prononcées contre Mme [B] [D] et M. [A] [D],

- juger que M. [W] [V] ès qualités de participant et co-gérant et M. [C] [M] ès qualités de participant et de co-gérant de la société en participation (SEP) Fiduciaire Management Group sous le nom commercial ' Groupe Fiduciel' dissoute le 31 décembre 2014, ne sont pas les rédacteurs des actes litigieux,

- juger abusive la procédure diligentée par la société Lou Prévost à l'encontre de M. [W] [V] ès qualités de participant et co-gérant et M. [C] [M] ès qualités de participant et de co-gérant de la société en participation (SEP) Fiduciaire Management Group sous le nom commercial ' Groupe Fiduciel' dissoute le 31 décembre 2014,

- juger que M. [W] [V] ès qualité de participant et co-gérant et M. [C] [M] ès qualité de participant et de co-gérant de la société en participation (SEP)Fiduciaire Management Group sous le nom commercial ' Groupe Fiduciel' dissoute le 31 décembre 2014, n'ont pas contrevenu aux dispositions des articles 54 et suivants de la loi du 231 décembre 1971 ;

- juger que M. [W] [V] ès qualités de participant et co-gérant et M. [C] [M] ès qualités de participant et de co-gérant de la société en participation (SEP) Fiduciaire Management Group sous le nom commercial ' Groupe Fiduciel' dissoute le 31 décembre 2014, n'ont pas commis de faute, ni de dol ;

En conséquence,

- débouter la société Lou Prévost de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions à l'encontre des concluants ;

- prononcer la mise hors de cause de M. [W] [V] ès qualité de participant et co-gérant et M. [C] [M] ès qualité de participant et de co-gérant de la société en participation (SEP) Fiduciaire Management Group sous le nom commercial ' Groupe Fiduciel' dissoute le 31 décembre 2014,

- condamner la société Lou Prévost à payer M. [W] [V] ès qualité de participant et co-gérant et M. [C] [M] ès qualité de participant et de co-gérant de la société en participation (SEP) Fiduciaire Management Group sous le nom commercial ' Groupe Fiduciel' dissoute le 31 décembre 2014, la somme de 10000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,

En tout état de cause,

- condamner tout succombant à payer à M. [W] [V] ès qualité de participant et co-gérant et M. [C] [M] ès qualité de participant et de co-gérant de la société en participation (SEP) Fiduciaire Management Group sous le nom commercial ' Groupe Fiduciel' dissoute le 31 décembre 2014 la somme de 5000 euros sur le fondement de l'article 700 du CPC ainsi qu'aux entiers dépens, comprenant ceux de première instance.

Par conclusions déposées et notifiées le 31 janvier 2024, la société Real Gestion demande à la cour, vu l'ancien article 1147 devenu 1231-1 du code civil, vu l'article 564 du code de procédure civile, de :

- réformer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, et notamment en ce qu'il a annulé les actes de cession, et condamné la SARL Real Gestion au paiement de diverses sommes au profit de la SARL Lou Prévost,

Statuant à nouveau,

- déclarer irrecevables les demandes de la SARL Lou Prévost en l'état de la ratification et de l'exécution de la cession de parts sociales ainsi que de la clôture de la liquidation judiciaire de la SARL Lisem,

- déclarer irrecevable la demande nouvelle en appel de la SARL Lou Prévost visant à voir condamner la concluante à garantir les condamnations prononcées contre Mme [B] [D] et M. [A] [D] ,

- débouter l'ensemble des parties de toutes leurs demandes, fins et conclusions à l'encontre de la SARL Real Gestion,

- condamner tout succombant à payer à la SARL Real Gestion la somme de 5000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.

Par conclusions déposées et notifiées le 19 janvier 2024, M. [A] [D] demande à la cour, vu les articles 1599, 1382 ancien et 1240 nouveau du code civil, 285 et 287 du code de procédure civile, de :

Avant dire droit,

- juger que le premier juge a indiqué que les 'actes n'ont été signés que par M. [E] [D]' mais il n'a nullement pris position sur la question des pouvoirs admettant sans doute implicitement qu'ils étaient valables alors même que M. [A] [D] a toujours contesté avoir signé le moindre document en relation avec la vente dont il ignorait même l'existence,

- désigner tel expert graphologue qu'il plaira à la cour conformément aux articles 285 et 287 et suivants du code de procédure civile aux fins de procéder à la vérification des pouvoirs prétendument attribués à M. [D] [A] après prise d'échantillons d'écritures et communication des procurations du 17 mai 2013 (pièce n°12 et 13) afin de déterminer si M. [A] [D] est l'auteur des signatures et mentions manuscrites,

Dans l'attente, surseoir à statuer.

Subsidiairement au fond,

- constater que M. [A] [D] n'a pas signé :

~ Le procès-verbal de l'Assemblée Générale Extraordinaire de la société Lisem du 21 mai 2013,

~ L'acte de cession de parts sociales du 21 mai 2013,

~ L'acte de cession de créance du 21 mai 2013,

~ Les statuts mis à jour,

- constater que M. [A] [D] n'a pas participé à :

~ Une assemblée générale pour donner d'agréer préalablement à une éventuelle cession les cessionnaires qu'il ne connaît pas,

~ Une cession de parts,

~ Une assemblée générale prenant acte de la démission de la gérante, sa s'ur et nommant un nouveau gérant,

- constater que M. [A] [D] conteste être l'auteur de la signature au bas du pouvoir prétendument donné à M. [E] [D] pour être représenté à l'assemblée générale du 21 mai 2013,

- constater que M. [A] [D] n'a signé aucun acte et n'a procédé à aucune cession de parts les actes étant nuls et non avenus s'agissant de la cession du bien d'autrui,

En conséquence :

- confirmer le jugement du 12 mai 2017 en ce qu'il a :

- déclaré nul et de nul effet l'acte de cession des parts sociales en date du 21 mai 2013,

- déclaré nul et de nul effet l'acte de cession de créance en date du 21 mai 2013,

- infirmer le jugement dont appel pour le surplus et statuant à nouveau :

- débouter la SARL Lou Prévost de sa demande de condamnation de M. [A] [D] à restituer le prix de cession des parts (1800 euros) que ce dernier n'a pas perçu,

- débouter la SARL Lou Prévost de sa demande de condamnation de M. [A] [D] au paiement du passif apparu postérieurement à la cession soit selon la demanderesse 143822,52 euros que ce dernier n'a pas perçu,

- débouter la SARL Lou Prévost de sa demande de condamnation de M. [A] [D] au paiement d'une somme à titre de dommages et intérêts et au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- plus généralement débouter l'ensemble des parties de leurs demandes fins et conclusions en ce qu'elle sont dirigées contre M. [A] [D],

- condamner in solidum sur le fondement de l'article 1382 du code civil la société SARL Real Gestion, la société Groupe Fiduciel, M. [C] [M] et M. [W] [V] à payer à M. [A] [D] une somme de 10000 euros à titre de dommages et intérêts,

- condamner tout succombant in solidum à verser à M. [A] [D] une somme de 5000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Par conclusions déposées et notifiées le 15 février 2024, Mme [B] [D] demande à la cour de :

- dire et juger que si le tribunal de commerce de Nice a pris acte que les actes ont bien été signés par M. [E] [D] , il ne s'est pas prononcé à tort sur les pouvoirs, laissant planer un doute sur les dits pouvoirs, alors que Mme [B] [D] a toujours contesté avoir signé le moindre document en relation avec une vente qu'elle ignorait totalement,

- constater, que Mme [B] [D] , n'a pas signé :

- Le PV de l'AGE de la Société Lisem du 21 mai 2013,

- L'acte de cession ses parts sociales du 21 mai 2013,

- L'acte de cession de créance du 21 mai 2013,

- Les statuts mis à jour,

- constater, que Mme [B] [D], n'a pas participé à aucune AG pour agréer à une éventuelle cession de cession de parts,

- constater, que Mme [B] [D] n'a signé aucun acte de cession de parts et de créance,

- dire et juger, que Mme [B] [D] n'a jamais perçu une quelconque somme d'argent de la cession de parts sociales et de la cession de créance,

- dire et juger, que les sommes d'argent de la cession de parts sociales et de la cession de créance, ont toutes été encaissées par M. [E] [D] ,

En conséquence :

- confirmer le jugement du tribunal de commerce de Nice du 12 mai 2013 en qu'il a déclaré nul et de nul effet l'acte de cession de parts et l'acte de cession de créance du 21 mai 2013,

- infirmer le même jugement pour le surplus et de statuer à nouveau :

- débouter, la société Lou Prévost de sa condamnation de Mme [B] [D] au paiement des sommes de :

- 2200 euros en restitution du prix de cession des parts sociales,

- 91000 euros en restitution du prix de cession des créances,

- 5623,56 euros en restitution des travaux,

- débouter la société Lou Prévost de sa condamnation de Mme [B] [D], au paiement d'une somme au titre de dommages et intérêts et au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouter l'ensemble des parties de leurs demandes fins et conclusions, à l'endroit de Mme [B] [D],

- condamner M. [G], à verser à Mme [B] [D] , la somme de 20000 euros, à titre de dommages et intérêts, outre le remboursement de tout ses frais d'avocat,

- condamner in solidum, sur le fondement de l'article 1382 du code civil, la Société Real Gestion, la société Groupe Fiduciel, M. [M] et M. [V] à verser à Mme [B] [D] , la somme de 10000 euros à titre de dommages et intérêts,

- condamner tout succombant in solidum, à verser à Mme [B] [D], la somme de 5000 euros, au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions déposées et notifiées le 9 février 2024, la société Lou Prévost demande à la cour, vu les articles 1110, 1382, 1154 anciens du code civil, de :

- débouter M. [A] [D] de sa demande de sursis à statuer,

- confirmer la décision des premiers juges en ce qu'elle a annulé les actes de cession de parts sociales du 21 mai, 2013 et de cession de compte-courant du 21 mai 2013,

- débouter les appelants de leurs demandes devant la cour,

- ordonner en conséquence la restitution des sommes perçues à cette occasion par M. [A] [D] et Mme [B] [D],

- condamner M. [D] à restituer à la société Lou Prévost la somme de 1800 euros au titre du prix de cession des parts sociales.

- confirmer la décision des premiers juges en ce qu'elle a condamné Mme [B] [D] à payer à la société Lou Prévost la somme de 2200 euros au titre de la cession de parts sociales et la somme de 91000 euros au titre de la cession de compte courant,

Y ajoutant, la cour condamnera Mme [D] à payer la somme de 5623,56 euros correspondant aux travaux que la cédante devait réaliser et qui ont finalement été réglés par Lou Prévost,

- condamner M. [M] , M. [V] et la société Real Gestion à garantir le paiement de ces sommes à la SARL Lou Prévost, en ce que leurs fautes ont contribué à rendre inefficace les actes en question,

- assortir la condamnation des intérêts au taux légal à compter de l'assignation introductive d'instance,

- ordonner la capitalisation des intérêts,

- condamner in solidum M. [A] [D] , Mme [B] [D] , M. [M] , M. [V] et la société Real Gestion d'avoir à indemniser la société Lou Prévost de l'ensemble des préjudices subis, savoir :

Au titre des sommes payées par la société Lou Prévost pour le compte de la société Lisem, la somme de 66 923,51euros,

Au titre du préjudice moral subi, la somme de 20000 euros,

Au titre des frais de justice exposés, la somme de 30000 euros,

Au titre des honoraires et frais d'actes indûment perçus la somme de 3478,86 euros,

- assortir la condamnation à intervenir des intérêts au taux légal à compter de l'assignation introductive d'instance,

- ordonner la capitalisation des intérêts,

En outre, il serait inéquitable de laisser à la charge de la société Lou Prévost les dépens de l'instance, ceux d'appel distraits au profit de la SCP Guedj Montero et associés.

La procédure a été clôturée le 20 février 2024.

Postérieurement à la clôture et aux débats tenus à l'audience de plaidoiries du 20 février 2024, M. [E] [D] a constitué avocat et sollicité la réouverture des débats par courrier du 21 février 2024.

Motivation

MOTIFS :

Sur la recevabilité de l'assignation en intervention forcée :

MM [M] et [V] et la SARL Real Gestion développent, dans leurs conclusions respectives et au soutien de leurs demandes de rejet des prétentions de Mme [B] [D], le moyen tiré de l'irrecevabilité de l'assignation en intervention forcée délivrée par cette dernière le 22 janvier 2024 à M. [E] [D], au regard des articles 554 et 555 du code de procédure civile.

Il résulte des articles précités que les personnes qui n'étaient pas parties en première instance ne peuvent être appelées devant la cour que si l'évolution du litige implique leur mise en cause.

En l'espèce, Mme [D], qui, ainsi qu'elle le rappelle dans ses conclusions d'intimée et d'appelante à titre incident, a toujours soutenu, dès la première instance, qu'elle n'avait signé aucun acte de cession ni aucun pouvoir, et qui ne formule aucune prétention à l'encontre de M. [E] [D], n'établit aucunement en quoi l'évolution du litige impliquerait la mise en cause de ce dernier.

L'assignation en intervention forcée de M. [E] [D], délivrée moins d'un mois avant la clôture de l'instruction, plus de cinq ans après l'introduction de l'appel et plus d'un an après la réinscription au rôle après expiration du sursis à statuer, fondée sur des circonstances dont Mme [D] avait connaissance dès la première instance, apparaît ainsi purement dilatoire.

Elle sera déclarée irrecevable, sans qu'il y ait lieu à réouverture des débats au profit de M. [E] [D].

Sur la nullité des actes de cession du 21 mai 2013 :

Compte tenu de la date des actes de cession, le litige est soumis aux dispositions du code civil antérieures à l'ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016.

L'article 1156 du code civil issu de cette réforme, sanctionnant le défaut de pouvoir du représentant par une inopposabilité de l'acte au représenté, n'est, en particulier, pas applicable, les prétendus cédants étant recevables à agir en nullité relative de l'acte signé à leur insu.

Les actes de cession du 21 mai 2013 tels que produits notamment par la société Lou Prévost font apparaître Mme [B] [D] et M. [A] [D] comme ayant directement participé à l'acte et ayant eux-mêmes signé.

Il n'est fait aucune mention de l'intervention d'un mandataire ni aucune référence à une procuration, et une signature précédée de la mention manuscrite 'bon pour cession (...)' ou 'bon pour accord' est portée directement au dessus du nom de [B] [D] et de [A] [D].

Mme [B] [D] et M. [A] [D] prétendent toutefois qu'ils n'étaient pas présents aux actes et que la signature qui figure au-dessus de leur nom est celle de leur père M. [E] [D].

Cette circonstance de fait n'est contestée par aucune des parties et est notamment corroborée par:

- le fait que le paraphe porté en bas de pages des deux actes soit constitué des initiales 'JLC',

- les déclarations de M. [E] [D], relatées par le juge d'instruction du tribunal judiciaire de Nice dans son ordonnance de non-lieu du 29 juin 2022, aux termes desquelles l'intéressé reconnaissait avoir signé, sous le nom de ses enfants, la cession de parts sociales, la cession de créance et le procès-verbal d'assemblée générale extraordinaire du 21 mai 2013,

- les conclusions de la société Real Gestion, qui se présente comme la rédactrice des actes et expose que les consorts [D] étaient représentés par leur père, M. [E] [D].

La SARL Real Gestion, à laquelle la société Lou Prévost reproche notamment de ne pas avoir vérifié les pouvoirs du signataire, soutient que M. [E] [D] était titulaire de procurations signées par ses enfants.

Elle verse aux débats deux pouvoirs datés du 17 mai 2013, l'un établi au nom de Mme [B] [D], propriétaire de 440 parts sociales de la société Lisem, l'autre établi au nom de M. [A] [D], propriétaire de 360 parts sociales de la dite société.

Aux termes de chacun de ces actes, le signataire donne pouvoir à M. [E] [D] aux fins de le représenter à l'assemblée générale extraordinaire qui aura lieu le 21 mai 2013 à l'effet de délibérer sur l'ordre du jour suivant :

- cession de parts sociales,

- cession de créances,

- modification de la gérance,

- modification corrélative des statuts;

en conséquence, assister à cette assemblée, prendre part à toutes discussions et délibérations, émettre tous avis et tous votes ou s'abstenir sur les questions à l'ordre du jour, signer tous procès-verbaux et autres pièces découlant de la réalisation de l'ordre du jour.

Mme [B] [D] et M. [A] [D] contestent avoir signé ces pouvoirs.

M. [A] [D] demande pour sa part à la cour de désigner un expert en écriture conformément aux articles 285 et 287 et suivants du code de procédure civile aux fins de procéder à la vérification des signatures et mentions manuscrites des pouvoirs litigieux.

Il sera relevé en premier lieu que les pouvoirs versés aux débats ne sont que des copies autorisant tout montage et ne permettant pas de vérifier la sincérité de l'acte, même en recourant à un expert en écriture.

En tout état de cause, il résulte de l'article 287 précité qu'il n'y a pas lieu de recourir à la vérification d'écriture lorsqu'il peut être statué sans tenir compte de l'acte contesté.

Tel est le cas en l'espèce puisque les actes contestés ne conféraient à M. [E] [D] que le pouvoir de représenter les mandants pour assister à une assemblée générale, prendre part aux délibérations et effectuer les formalités y afférentes.

Ils ne lui conféraient en aucun cas le pouvoir de conclure un acte de cession qui constitue un acte de disposition nécessitant l'établissement d'un pouvoir spécial.

Il n'est par ailleurs justifié d'aucun acte portant, de manière non équivoque, ratification de ces cessions par [B] et [A] [D] et renonciation à se prévaloir de leur nullité.

Il sera relevé à cet égard qu'il ressort des motifs de l'ordonnance de non-lieu du 29 juin 2022 que l'hôtel restaurant était en réalité géré par M. [E] [D] qui ne pouvait être gérant de droit puisqu'il faisait l'objet d'une interdiction de gérer, et non par Mme [B] [D] qui n'était qu'une gérante de paille.

Les actes établis au nom de [B] et [A] [D] et signé par un tiers non muni d'un pouvoir de représentation et dont l'intervention n'est même pas mentionnée aux actes seront déclarés nuls au visa des articles 1108 ancien et 1184 du code civil, sans qu'il y ait lieu de recourir à une vérification d'écriture.

La société Lou Prévost n'est par conséquent pas fondée à reprocher un dol aux cédants, qui n'étaient pas valablement représentés aux actes de cession.

La clôture pour insuffisance d'actif de la liquidation judiciaire de la société Lisem rend impossible la restitution par la société Lou Prévost des parts sociales et du compte courant d'associé cédés, qui n'ont plus d'existence. Aucune demande n'est d'ailleurs formulée à ce titre par les consorts [D].

En l'absence de restitution, la société Lou Prévost ne peut cependant solliciter aucun remboursement des cédants au titre de dépenses prétendument engagées pour la conservation de la chose.

La société Lou Prévost sollicite la restitution des sommes prétendument perçues par M. [A] [D] et Mme [B] [D] au titre du prix de cession des parts sociales et du compte courant d'associé.

La société cessionnaire, qui a imprudemment établi des chèques au nom de '[D]' sans indication du prénom, qu'elle prétend avoir remis à M. [E] [D], lequel ne disposait d'aucun pouvoir à cet effet, puis remis à ce dernier, à sa demande et en toute illégalité, une somme en espèce de 16000 euros, ne démontre aucunement que ces chèques et espèces auraient été remis aux cédants désignés à l'acte et encaissés par ces derniers.

M. [A] [D] et Mme [B] [D], qui n'étaient pas valablement représentés aux actes de cession et auxquels la société Lou Prévost n'a remis aucun paiement, ne peuvent être tenus à aucune restitution.

La nullité des actes de cession pour un motif non imputable aux cédants conduit par ailleurs au rejet des demandes d'indemnisation formées par la société Lou Prévost à leur encontre.

Enfin, la nullité de l'acte de cession de créances conduit au rejet de la demande formée par la société Lou Prévost au titre de travaux mis à la charge de Mme [D] aux termes de cet acte.

Le jugement sera en conséquence infirmé sur ces points.

Sur les demandes formées par la société Lou Prévost contre MM [V] et [M] et la société Real Gestion :

MM [V] et [M] ainsi que la société Real Gestion sont mis en cause par la société Lou Prévost et les consorts [D], qui recherchent leur responsabilité en leur qualité de rédacteur des actes de cession du 21 mai 2013.

MM [V] et [M] opposent en premier lieu que si la SEP Fiduciaire Management Group (Groupe Fiduciel) avait effectivement établi une proposition de cession, elle avait fait appel à la société Real Gestion pour la rédaction des actes, entité distincte qui seule pouvait être considérée comme rédactrice et engager sa responsabilité à ce titre.

La société Lou Prévost a cependant contracté avec la société Fiduciaire Management Group ainsi qu'il résulte du devis établi le 14 mai 2013 à l'en-tête de cette dernière et accepté par la SARL Lou Prévost, portant sur les prestations de cession de parts sociales (montant 4000 euros), changement de gérant, cession de créance (montant 139000 euros) et mentionnant les diligences suivantes :

- vérification des données,

- rédaction des actes,

- suivi des formalités,

- obligation de résultat,

pour un coût de 1825,14 euros HT soit 2182,86 euros TTC.

C'est en conséquence la SEP Fiduciaire Management Group (Groupe Fiduciel), à travers ses deux co-participants MM [V] et [M], qui est engagée contractuellement à l'égard de la SARL Lou Prévost.

MM [V] et [M] affirment avoir sous-traité tout ou partie de la prestation à la SARL Real Gestion, dont ils sont également associés.

M. [M] a ainsi établi le 29 mai 2013, en sa qualité de gérant de la SARL Real Gestion, une attestation aux termes de laquelle il affirme avoir 'procédé à la cession des parts sociales de la société Lisem' entre les consorts [D] et la société Lou Prévost.

Il ressort des différentes factures versées aux débats que la société Real Gestion a facturé cette prestation non pas à la société Lou Prévost mais au contractant principal, la SEP Fiduciaire Management Group, avec laquelle elle est liée par une convention d'assistance et de gestion, tandis que la facture d'honoraires adressée à la société Lou Prévost a été établie par la SEP Fiduciaire Management Group.

Cette circonstance ne décharge aucunement MM [V] et [M], représentant la SEP Fiduciaire Management Group, de leurs obligations contractuelles à l'égard de la société Lou Prévost.

MM [V] et [M], co-participants de la société en participation contractante, sont en conséquence tenus à l'égard de la société Lou Prévost, in solidum avec la SARL Real Gestion qui se revendique rédactrice des actes litigieux, aux obligations incombant au rédacteur d'acte.

La société Lou Prévost reproche en premier lieu au rédacteur d'acte de ne pas s'être assuré de ce que M. [E] [D] était porteur d'une procuration valable pour représenter les cédants.

Contrairement à ce que soutient la société Real Gestion, si le défaut de pouvoir du mandataire est sanctionné par une nullité relative que seule la partie représentée peut demander, la société Lou Prévost, co-contractante, est pour sa part recevable à agir en réparation des conséquences préjudiciables d'une annulation imputable à un manquement du rédacteur d'acte, dès lors que la demande de nullité soutenue par les consorts [D] a prospéré, le moyen tiré d'une prétendue ratification des cessions par ces derniers ayant été rejeté.

D'autre part, la clôture pour insuffisance d'actif de la liquidation judiciaire de la société Lisem, qui entraîne la disparition des parts sociales et du compte courant cédés, rend impossible une restitution en nature en cas d'annulation des actes de cessions mais ne fait obstacle ni à une action en annulation de l'acte par un contractant, ni à une action en responsabilité contre le rédacteur de l'acte de cession, fondée sur des manquements commis à l'occasion de sa rédaction.

La demande de la société Real Gestion tendant à ce que soient déclarées irrecevables les demandes de la SARL Lou Prévost fondées sur l'annulation de la cession de parts sociales sera rejetée.

Le professionnel qui prête son concours à la rédaction d'un acte de cession est tenu d'une obligation d'information et de conseil à l'égard de son mandant et doit assurer l'efficacité et la sécurité juridique de cet acte.

Il est responsable des conséquences dommageables résultant d'un manquement à ces obligations.

En l'espèce la société Real Gestion a rédigé l'acte de cession de parts sociales et l'acte de cession de compte courant d'associé en mentionnant l'intervention des cédants, Mme [B] [D] et M. [A] [D] pour le premier acte et Mme [B] [D] pour le second, sans aucune mention de l'intervention d'un mandataire ni aucune référence à une procuration, alors qu'il est constant que les actes n'ont pas été signés par les parties ainsi désignées mais par leur père M. [E] [D].

Elle prétend s'être fait remettre par M. [E] [D] les procurations datées du 17 mai 2013 et établies l'une au nom de Mme [B] [D] et l'autre au nom de M. [A] [D].

Comme il a été dit précédemment, ces actes donnent pouvoir à M. [E] [D] de représenter le signataire à l'assemblée générale extraordinaire qui aura lieu le 21 mai 2013 à l'effet de délibérer sur une cession de parts sociales, une cession de créances, une modification de la gérance et une modification corrélative des statuts, d'assister à cette assemblée, prendre part à toutes discussions et délibérations, émettre tous avis et tous votes ou s'abstenir sur les questions à l'ordre du jour, signer tous procès-verbaux et autres pièces découlant de la réalisation de l'ordre du jour.

En faisant directement signer les actes litigieux par M. [E] [D] sans mentionner l'intervention d'un mandataire et en se contentant de procurations qui ne conféraient à ce dernier que le pouvoir de représenter les mandants pour assister à une assemblée générale, prendre part aux délibérations et effectuer les formalités y afférentes, et non pas signer à leur place l'acte de cession de leurs parts sociales et du compte courant d'associé de Mme [D], le rédacteur a manqué à son obligation d'assurer l'efficacité et la sécurité juridique de ces actes.

La société Lou Prévost reproche également à MM [V] et [M] et la société Real Gestion de ne pas avoir vérifié, notamment auprès du mandataire judiciaire, la situation de la société Lisem au regard de l'exécution du plan de redressement et de ne pas avoir fait diligence pour informer l'acquéreur sur l'existence d'un passif, et en particulier sur l'existence d'un contentieux prud'homal qui devait aboutir à la condamnation de la société Lisem au paiement d'une somme de 73509,56 euros à une ancienne salariée.

Il est cependant justifié par la production d'un mail adressé le 6 mai 2013 par Mme [N] [I] du cabinet Fiduciel à Maître Stéphanie Bienfait que le commissaire à l'exécution du plan a été consulté par le rédacteur de l'acte sur le projet de cession.

Le cabinet Fiduciel y fait notamment référence aux échéances 2012 et 2013 du plan de redressement non réglées et aux honoraires impayés du commissaire à l'exécution du plan.

La société Lou Prévost produit un courrier adressé par Maître Bienfait à M. [T] [G] le 6 août 2015, aux termes duquel le mandataire 'confirme ne pas avoir eu d'entrevue avec M. [M] de la société S2A Groupe Fiduciel dans le cadre de la procédure collective ouverte à l'encontre de la SARL Lisem'.

Les termes de ce courrier ne contredisent pas le fait que des échanges par mail soient intervenus entre une collaboratrice du cabinet Fiduciel et l'étude de Maître Bienfait à l'occasion de la cession des parts de la SARL Lisem.

Il ressort par ailleurs d'un document intitulé 'synthèse de la proposition de cession des parts de la SARL Lisem', établi par la société Groupe Fiduciel et signé par M. [T] [G], gérant de la société Lou Prévost, que cette dernière était informée de ce que le passif de la société Lisem comportait un arriéré de loyers de 14000 euros et deux échéances de plan pour un montant de 47000 euros.

S'agissant du contentieux prud'homal en cours, il ne peut être reproché au rédacteur de l'acte de n'avoir été destinataire d'aucune information sur ce point de la part de M. [D] [E] ou du commissaire à l'exécution du plan.

D'autre part, le rédacteur de l'acte a prévu une clause de garantie d'actif et de passif permettant de préserver les droits de l'acquéreur en cas de révélation d'un passif trouvant son origine antérieurement à la cession.

C'est à tort que la SARL Lou Prévost reproche au rédacteur de l'acte de ne pas avoir prévu d'assortir la garantie d'actif et de passif d'une garantie financière puisque compte tenu de la modicité du prix de cession des parts (4000 euros) la garantie financière était constituée par le crédit vendeur consenti à hauteur de 64000 euros pour le paiement du solde du prix de cession du compte courant, indissociable de la cession des parts.

Seule sera retenue à l'encontre des intervenants à la rédaction des actes la faute consistant à ne pas s'être assurés de la régularité des conditions d'intervention de M. [E] [D] en qualité de mandataire.

La société Lou Prévost formule à l'encontre de MM [V] et [M] et de la société Real Gestion une demande tendant à leur condamnation à garantir le paiement des restitutions de prix et remboursement de travaux mises à la charge des consorts [D], en ce que leurs fautes ont contribué à rendre inefficaces les actes en question.

Ainsi que le font valoir à juste titre MM [V] et [M] et la société Real Gestion, une telle demande, distincte des demandes d'indemnisation formées à leur encontre en première instance, et qui n'en constitue ni l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire, est nouvelle en cause d'appel et est en conséquence irrecevable en application de l'article 564 du code de procédure civile.

La SARL Lou Prévost est en revanche recevable et fondée à solliciter l'indemnisation des conséquences préjudiciables de la rédaction d'un acte encourant la nullité et l'ayant conduite à exposer des dépenses en pure perte pour la société cédée.

Elle prétend avoir payé pour le compte de la SARL Lisem une somme totale de 66923,51 euros détaillée comme suit :

- impôts 1296 euros et 337 euros,

- arriéré loyers 14191,56 euros,

- plan de redressement : 2 échéances de 23254,52 euros chacune,

- honoraires de Maître Bienfait : 2713,95 euros

- sommes dues à Idées Design : 1875,96 euros.

La SARL Lou Prévost ne maintient pas, en cause d'appel, sa demande en paiement des sommes mises à la charge de la SARL Lisem dans le cadre du contentieux prud'homal initié par Mme [S].

S'agissant du premier chef de réclamation, la société Lou Prévost produit la photocopie du recto de deux chèques émis par elle à l'ordre du Trésor public les 5 et 6 décembre 2013.

Elle ne justifie cependant pas avoir réglé ces sommes pour le compte de la SARL Lisem et non en paiement de ses propres dettes, faute de produire un avis de recouvrement ou une réclamation émis par Trésor public à l'encontre de la société Lisem pour les montants correspondants.

Aucun justificatif de paiement n'est produit concernant l'arriéré de loyer de 14191,56 euros.

Elle établit en revanche, par la production d'un relevé de son compte bancaire, que les annuités du plan de redressement de la société Lisem échues en juin 2012 et juin 2013 ont été réglées par deux chèques tirés sur son compte le 4 juillet 2013, d'un montant de 23254,52 euros chacun.

Il n'est produit aucun justificatif concernant le règlement d'honoraires dus à Maître Bienfait.

S'agissant du règlement d'une somme de 1875,96 euros intervenu par chèque du 29 mai 2013 au profit d'un créancier dénommé Idées Design, aucune pièce n'établit qu'il s'agissait d'une dette de la société Lisem et non de la société Lou Prévost.

La demande de la société Lou Prévost au titre des dépenses engagées pour le compte de la société Lisem sera en conséquence retenue à hauteur de 46509,04 euros correspondant aux annuités 2012 et 2013 du plan de redressement de la société Lisem.

Les manquements de MM [V] et [M] et de la société Real Gestion à leur obligation de résultat concernant l'efficacité et la sécurité juridique de l'acte, qui ont exposé la société Lou Prévost, du fait de la légitime contestation des consorts [D], à de longues procédures ainsi qu'à des frais engagés en pure perte, ont indéniablement causé à la société Lou Prévost un préjudice moral justifiant l'allocation à ce titre d'une somme de 5000 euros de dommages et intérêts.

La demande en paiement d'une somme de 30000 euros 'au titre des frais de justice exposés' sera en revanche rejetée en l'absence de toute précision et de tout justificatif concernant les frais invoqués.

En l'état de l'annulation des deux actes de cession du 21 mai 2013 en lien avec la faute des rédacteurs, il sera fait droit à la demande de remboursement des honoraires et frais réglés à hauteur de 3478,86 euros par la société Lou Prévost à la société Groupe Fiduciel pour la rédaction des actes et les formalités y afférentes.

Sur les demandes formées par les consorts [D] contre MM [V] et [M] et la société Real Gestion :

Les consorts [D], déchargés par la présente décision des conséquences de l'annulation des cessions dont ils contestaient la validité, ne démontrent pas subir un préjudice en lien avec la faute reprochée aux rédacteurs des actes et seront déboutés de leurs demandes respectives tendant à la condamnation in solidum sur le fondement de l'article 1382 du code civil de la société SARL Real Gestion, la société Groupe Fiduciel, M. [C] [M] et M. [W] [V] à payer à chacun d'entre eux une somme de 10000 euros à titre de dommages et intérêts.

Sur les autres demandes :

Mme [B] [D] sera déclarée irrecevables en ses demandes formées contre M. [G], ce dernier n'étant pas partie au procès.

Parties succombantes sur l'essentiel, MM [V] et [M] et la société Real Gestion seront condamnés in solidum aux dépens ainsi qu'au paiement, au profit des autres parties, d'une indemnité pour frais irrépétibles comme il sera dit au dispositif.

Dispositif

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, contradictoirement,

Dit n'y avoir lieu à réouverture des débats,

Déclare irrecevable l'assignation en intervention forcée délivrée par Mme [B] [D] le 22 janvier 2024 à M. [E] [D],

Dit n'y avoir lieu à expertise en écriture ni à vérification d'écriture,

Confirme, par motifs substitués, le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré nul et de nul effet l'acte de cession des parts sociales et l'acte de cession de créance en date du 21 mai 2013, et en ce qu'il a condamné solidairement M. [C] [M], M. [W] [V] et la SARL Real Gestion au paiement à la SARL Lou Prévost de la somme de 3 478,86 euros en restitution des honoraires et frais d'actes du 21 mai2013,

Infirme le jugement pour le surplus et statuant à nouveau,

Déboute la société Lou Prévost de l'ensemble de ses demandes à l'encontre de M. [A] [D] et de Mme [B] [D],

Déclare la société Lou Prévost irrecevable en sa demande tendant à la condamnation de MM [V] et [M] et de la société Real Gestion à garantir le paiement des restitutions de prix et remboursement de travaux mises à la charge des consorts [D],

Condamne in solidum M. [C] [M], M. [W] [V] et la SARL Real Gestion à payer à la SARL Lou Prévost, à titre de dommages et intérêts, les sommes de 46509,04 euros correspondant aux annuités 2012 et 2013 du plan de redressement de la société Lisem et de 5000 euros en réparation du préjudice moral,

Déboute la SARL Lou Prévost du surplus de ses demandes d'indemnisation,

Déboute M. [A] [D] et Mme [B] [D] de leurs demandes respectives en dommages et intérêts à l'encontre de la société SARL Real Gestion, la société Groupe Fiduciel, M. [C] [M] et M. [W] [V],

Déclare Mme [B] [D] irrecevable en sa demande en dommages et intérêts formée contre M. [G], non partie à l'instance,

Condamne in solidum M. [C] [M], M. [W] [V] et la SARL Real Gestion à payer, à titre d'indemnités pour frais irrépétibles de première instance et d'appel, à la SARL Lou Prévost, la somme de 6000 euros à M. [A] [D] la somme de 6000 euros et à Mme [B] [D] la somme de 6000 euros,

Condamne Mme [B] [D] aux dépens afférents à l'assignation en intervention forcée de M. [E] [D],

Condamne in solidum M. [C] [M], M. [W] [V] et la SARL Real Gestion aux dépens de première instance et d'appel, ceux d'appel étant recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.