Livv
Décisions

Cass. 1re civ., 21 novembre 2018, n° 17-26.869

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

Aix-en-Provence, du 20 juill. 2017

20 juillet 2017

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 20 juillet 2017), qu'une ordonnance du 16 octobre 2015 rendue par le président d'un tribunal de grande instance a, sur le fondement de l'article 1565 du code de procédure civile, conféré force exécutoire à une transaction datée des 10 et 15 juillet 2003, conclue entre M. X... et M. Y... ; que ce dernier a saisi le président du tribunal, statuant en la forme des référés, aux fins de rétractation de cette ordonnance ;

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt d'accueillir cette demande et de refuser l'homologation de la transaction, alors, selon le moyen :

1°/ que le contrôle du juge statuant, en application des articles 1565 et 1566 du code de procédure civile, sur une demande tendant à conférer force exécutoire à une transaction, ne peut porter que sur l'existence, la nature de la convention qui lui est soumise et sur sa conformité à l'ordre public et aux bonnes moeurs ; qu'en conséquence, en ce qu'elle avait constaté l'existence du protocole transactionnel des 10 et 15 juillet 2003 ainsi que celle de concessions réciproques entre les parties, sa conformité à l'ordre public et aux bonnes moeurs étant constante, la cour d'appel ne pouvait refuser d'homologuer l'acte qui lui était soumis ; qu' en prononçant néanmoins la rétractation de l'ordonnance d'homologation entreprise, pour des considérations de fond prises d'une prétendue non-réalisation de la condition suspensive contenue au dit protocole, la cour d'appel a violé par refus d'application les textes précités ;

2°/ que les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits ; qu'après avoir successivement relevé qu'aux termes du protocole des 10 et 15 juillet 2003, « signé dans la perspective que M. Y... puisse échapper à la démolition de son bien en déposant un permis de construire destiné à "régulariser" la construction », M. Y... s'engageait entre autres à « supprimer divers aménagements à l'occasion de la demande de permis de construire qu'il devait déposer » et que le protocole « est soumis à la condition suspensive d'obtention par M. Y... d'un permis de construire (modificatif et/ou de régularisation) définitif légalisant la construction litigieuse », la cour a constaté que la demande de permis de construire finalement déposée par M. Y... le 27 avril 2016 et « portant sur quelques aménagements du bâtiment (
) ne correspond(ait) pas à celle qui devait être déposée aux termes du protocole, ce qui n'est pas contestable » ; qu'en conséquence la cour d'appel a mis en lumière qu'en violation de ses obligations, M. Y... n'a pas déposé la demande de permis nécessaire à la réalisation de la clause suspensive ; qu'en disant cependant qu'en raison du refus de ce permis la condition suspensive n'a pas été réalisée, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, en violation de l'article 1103 du code civil ;

3°/ que les contrats devant être négociés, formés et exécutés de bonne foi, les parties à un protocole transactionnel doivent respecter un devoir de loyauté, de coopération et de collaboration ; qu'en conséquence, le juge doit rechercher si la partie arguant de la caducité d'une transaction ne l'a pas volontairement provoquée afin d'échapper à l'exécution de ses propres concessions, manquant ainsi à son obligation de bonne foi ; qu'en rétractant l'ordonnance ayant homologué le protocole transactionnel des 10 et 15 juillet 2003, sans rechercher comme elle y était invitée si M. Y..., en déposant en cause d'appel, treize ans après la signature de l'acte, un permis de construire manifestement non conforme aux dispositions contractuelles et non destiné à régulariser la construction litigieuse, n'avait pas fait un usage déloyal de la clause suspensive conditionnant l'exécution du dit protocole à l'obtention d'un permis de construire (modificatif et/ou de régularisation) définitif légalisant la construction litigieuse, à seule fin que cette clause ne se réalise pas et que l'acte devienne caduque, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1104 du code civil ;

Mais attendu, d'abord, qu'il résulte des articles 1565 et 1566 du code de procédure civile, dans leur rédaction issue du décret n° 2012-66 du 20 janvier 2012, applicables en la cause, qu'il entre dans les pouvoirs du juge de refuser de rendre exécutoire une transaction dont il a constaté l'absence de formation ; que la cour d'appel, qui a relevé que l'article 7 du protocole stipulait que celui-ci était soumis à la condition suspensive de l'obtention par M. Y... d'un permis de construire définitif, modificatif ou de régularisation de la construction litigieuse, et que le permis de construire déposé par celui-ci le 27 avril 2016 avait été refusé le 10 août suivant, en a exactement déduit, sans méconnaître son office, que la condition suspensive étant défaillie, la transaction, devenue caduque, ne pouvait être homologuée ;

Attendu, ensuite, que, dès lors qu'elle avait constaté que la réalisation du protocole était conditionnée par l'obtention par M. Y... d'un permis de construire et que la demande déposée par celui-ci avait été rejetée, la cour d'appel ne pouvait, sans excéder les pouvoirs qu'elle tient des articles 1565 et 1566 du code de procédure civile, contrôler si cette demande était conforme aux prévisions contractuelles ni rechercher si M. Y... n'avait pas fait un usage déloyal de la clause suspensive ;

D'où il suit que le moyen, qui critique un motif surabondant en sa deuxième branche, n'est pas fondé pour le surplus ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un novembre deux mille dix-huit.