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Décisions

CA Aix-en-Provence, ch. 1-1, 9 avril 2024, n° 20/02088

AIX-EN-PROVENCE

Arrêt

Autre

CA Aix-en-Provence n° 20/02088

9 avril 2024

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-1

ARRÊT AU FOND

DU 09 AVRIL 2024

N° 2024/154

Rôle N° RG 20/02088 - N° Portalis DBVB-V-B7E-BFST2

SCI TERAMO

C/

[X] [C]

[L] [F]

[J] [I]

S.C.P. FREDERIC BRINCOURT LAURENTCIAVATTI

S.A.R.L. SARL BEAUMONT

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

- Me Sébastien BADIE

- Me Paul GUEDJ

- Me Erick AVENARD

- Me Louisa STRABONI

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de Marseille en date du 10 Décembre 2019 enregistré au répertoire général sous le n° 17/12095.

APPELANTE

SCI TERAMO, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège,

demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Sébastien BADIE de la SCP BADIE, SIMON-THIBAUD, JUSTON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substituée par Me Roselyne SIMON-THIBAUD, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE et ayant pour avocat plaidant Me Philippe PIETTE de la SCP VIDAL-NAQUET AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de MARSEILLE,

INTIMES

Maître [X] [C], notaire,

demeurant [Adresse 4]

S.C.P. FREDERIC BRINCOURT [X] [C] désormais dénommée SCP Frédéric BRINCOURT et [X] [C] Société titulaire d'un Office Notarial prise en la personne de son représentant en exercice domicilié en cette qualité

demeurant [Adresse 6]

tous deux représentés par Me Paul GUEDJ de la SCP COHEN GUEDJ - MONTERO - DAVAL GUEDJ, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substituée par Me Maud DAVAL-GUEDJ, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, et ayant pour avocat plaidant Me Thomas DJOURNO, avocat au barreau de MARSEILLE

Monsieur [L] [F]

né le 19 Août 1972 à [Localité 9],

demeurant [Adresse 2]

représenté par Me Erick AVENARD de l'ASSOCIATION AVENARD-FERRATA AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de MARSEILLE

Monsieur [J] [I]

né le 20 Septembre 1973 à [Localité 7],

demeurant [Adresse 3]

S.A.R.L. BEAUMONT, prise en la personne de son gérant en exercice domicilié es qualité

demeurant [Adresse 3]

tous deux représentés par Me Louisa STRABONI de la SELARL VIDAPARM, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 05 Mars 2024 en audience publique devant la cour composée de :

Monsieur Olivier BRUE, Président

Madame Catherine OUVREL, Conseillère

Madame Fabienne ALLARD, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Anaïs DOVINA.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 09 Avril 2024.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcée par mise à disposition au greffe le 09 Avril 2024,

Signé par Monsieur Olivier BRUE, Président et Madame Anaïs DOVINA, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

Par acte authentique reçu par Me [X] [C], notaire à [Localité 8], le 25 octobre 2012, la société civile immobilière (SCI) Beaumont et la société à responsabilité limitée (SARL) Beaumont ont vendu à la SCI Teramo onze appartements, tous loués, au sein de la copropriété sise [Adresse 10] à [Localité 8].

Au cours de la première moitié de l'année 2013, la ville de [Localité 8] a initié une procédure de péril simple concernant l'immeuble et en a avisé le syndic de la copropriété par lettre recommandée du 17 mai 2013, réitérée le 22 novembre 2013.

Par acte notarié reçu par le même notaire le 16 juillet 2013, la SCI Teramo a acquis de la SARL Beaumont trois nouveaux lots (n°41, 46 et 47) au sein de la même copropriété.

Le 25 avril 2014, le maire de la commune de [Localité 8] a pris un arrêté de péril non imminent concernant l'immeuble du [Adresse 10], transformé le 19 mai 2014 en arrêté de péril imminent, imposant à la copropriété de réaliser des travaux de mise en sécurité des sous-faces des balcons à l'arrière du bâtiment dans les quinze jours, tout en interdisant l'accès à certaines parties communes et en autorisant les locataires à suspendre le paiement de leur loyer.

Des travaux conservatoires ont été réalisés mais se sont révélés insuffisants pour que la commune lève l'arrêté de péril imminent. Les copropriétaires en ont été avisés par courrier du 8 août 2014.

Un administrateur provisoire de la copropriété a été désigné le 19 novembre 2014 à l'initiative de M. [L] [F], copropriétaire. Une assemblée générale du 9 février 2015 a voté les travaux nécessaires à la levée de l'arrêté de péril imminent. Ceux ci n'ont cependant jamais été réalisés et, le 20 mars 2018, la préfète des Bouches du Rhône a pris un arrêté d'insalubrité emportant interdiction temporaire d'habiter les lieux.

Soutenant que son consentement a été vicié lors de la vente du 16 juillet 2013, la SCI Teramo a, par actes des 16 et 19 octobre 2017, assigné la SARL Beaumont, M. [J] [I] et M. [L] [F] en leur qualité de syndic bénévole, M. [X] [C], notaire, et la société civile professionnelle (SCP) Brincourt-[C] devant le tribunal de grande instance de Marseille afin d'obtenir des dommages-intérêts.

En cours de procédure, par conclusions du 15 octobre 2018, elle a formulé une demande additionnelle au titre de la vente du 25 octobre 2012.

Par jugement du 10 décembre 2019, cette juridiction a :

- rejeté la fin de non recevoir soulevée par M. [L] [F] ;

- débouté la SCI Teramo de ses demandes ;

- condamné la SCI Teramo à payer, en application de l'article 700 du code de procédure civile, les sommes de 2 500 € à la SARL Beaumont et M. [I], ensemble, M. [C] et la SCP Brincourt-[C] ensemble ainsi qu'à M. [F] ;

- condamné la SCI Teramo aux dépens.

Pour statuer ainsi, il a considéré que :

Sur les vices du consentement :

- l'arrêté de péril, pris en 2010, a été levé avant la vente du 25 octobre 2012, de sorte que l'absence de mention de cet arrêté dans l'acte de vente ne consacre aucune réticence dolosive ;

- le consentement de la SCI Teramo lors de l'acte de vente du 16 juillet 2013 a été vicié si on considère, d'une part que l'acte ne contient aucune mention relative à l'arrêté de péril du 17 mai 2013 alors que M. [J] [I], syndic bénévole, mais également représentant de la société venderesse, en avait été informé par la commune et que la partie administrative de l'état de mutation n'a pas été renseigné dans l'acte ;

Sur les manquements fautifs du notaire : en annexant à l'acte un état de mutation incomplet et en s'abstenant d'effectuer les vérifications complémentaires qui l'auraient conduit à découvrir l'existence de la procédure de péril, l'officier ministériel a commis une faute ;

Sur les manquements reprochés à M. [L] [F] : aucune pièce ne démontre qu'il était le syndic bénévole de la copropriété au moment des ventes litigieuses, de sorte qu'aucune faute ne peut lui être reprochée.

En revanche, selon le tribunal, la demande indemnitaire de la SCI Teramo ne peut prospérer au motif qu'en dépit des fautes relevées, elle ne démontre pas le préjudice qu'elle allègue.

Par acte du 10 février 2020, dont la régularité et la recevabilité ne sont pas contestées, la SCI Teramo a relevé appel de cette décision, en ce qu'elle l'a déboutée de toutes ses demandes et condamnée à verser 2 500 € à la SARL Beaumont et à M. [I], ensemble, 2 500 € à M. [C] et à la SCP Brincourt, et 2500 € à M. [F], a rejeté toute autre demande et l'a condamnée aux dépens.

La procédure a été clôturée par ordonnance en date du 24 octobre 2023.

M. [C], la SCP Frédéric Brincourt - Laurent Giustianini, M. [I] et la SARL Beaumont ont sollicité le rejet des dernières conclusions notifiées par la SCI Teramo le 23 octobre 2023.

Par arrêt du 9 janvier 2024, la cour, après avoir constaté que l'instance avait été interrompue par la cessation des fonctions d'un avocat constitué dans la procédure, de sorte que la SCI Teramo s'est trouvée dans l'impossibilité de notifier ses conclusions plus tôt, a ordonné la révocation de l'ordonnance de clôture et invité M. [C] et la SCP Frédéric Brincourt - Laurent Giustianini, d'une part, M. [I] et la SARL Beaumont d'autre part à conclure avant le 6 février 2024 en réplique aux conclusions notifiées par la SCI Teramo le 23 octobre 2023.

La procédure a été clôturée au 20 février 2024.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Dans ses dernières conclusions, régulièrement notifiées le 23 octobre 2023, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des moyens, la SCI Teramo demande à la cour de :

' confirmer le jugement en ce qu'il a retenu la responsabilité de M. [C], de la SARL Beaumont et de M. [J] [I], syndic bénévole de la copropriété ;

' l'infirmer pour le surplus de ses dispositions ;

' condamner in solidum les intimés à lui payer les sommes de 1 553 898 € et 520 438 € en réparation de ses préjudices directement liés aux fautes volontaires commises ;

' condamner in solidum les intimés à lui payer une somme de 200 000 € à titre de dommages-intérêts destinés à sanctionner 'les fautes volontaires commises pour la tromper et l'amener à s'engager' :

' condamner les intimés à lui payer une indemnité de 40 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens de première instance et d'appel.

Au soutien de son appel et de ses prétentions, elle fait valoir que :

Sur la recevabilité des demandes : le visa erroné, dans ses conclusions, de l'article 1240 du code civil, est indifférent sur son intérêt à agir dès lors que l'ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016 a repris à l'identique les dispositions de l'article 1382 du code civil ;

Sur le dol :

- lors de la vente du 16 juillet 2013, elle n'a pas été avisée de la procédure de péril en cours sur l'immeuble, celle-ci n'ayant été portée à sa connaissance que le 6 août 2014 et c'est à l'occasion de l'expertise ordonnée par le tribunal administratif, en 2018, qu'elle a découvert que l'immeuble avait déjà fait l'objet d'un premier arrêté de péril en 2010 concernant les balcons de l'immeuble, de sorte que la première procédure de péril fonde celle qui a ensuite été reprise en 2013/2014 ;

- le silence de la société venderesse sur ces arrêtés de péril consacre une réticence dolosive, d'autant plus manifeste que son gérant était également syndic de l'immeuble ;

Sur les manquements fautifs du notaire :

- lors de la vente du 25 octobre 2012, M. [C] n'a pas réclamé au syndic le carnet d'entretien de l'immeuble exigé par l'article 18 de la loi de 1965, ne s'est pas davantage inquiété des mentions portées sur les états hypothécaires alors que ces documents l'auraient alerté sur l'état de l'immeuble et n'a pas pris la précaution d'interpeller les services municipaux en réclamant un état de non péril ;

- lors de la vente du 16 juillet 2013, M. [C] a accepté d'annexer à son acte un état de mutation qui, n'étant pas renseigné, ne pouvait l'informer sur la situation de l'immeuble et n'a pas annexé à l'acte notarié l'ensemble des documents relatifs à la copropriété ;

- ces carences engagent sa responsabilité puisqu'en sa qualité de professionnel du droit, il n'aurait pas dû se contenter d'insérer à l'acte une clause de décharge, mais, afin d'assurer l'efficacité de ses actes, d'informer et conseiller les parties, se renseigner auprès des services de la ville ;

- cette négligence lui cause un préjudice puisque des diligences auprès de la commune, notamment pour obtenir un arrêté de non péril, lui auraient permis de découvrir que la copropriété devait réaliser d'importants travaux ;

Sur la responsabilité de MM. [F] et [I] :

- ils ont tous deux été avisés en 2013, en leur qualité de syndic bénévole de l'immeuble, comme tel chargé de l'entretien de la copropriété, des demandes de la commune de [Localité 8] et de la procédure en cours et ne l'en ont pas informée, notamment en remettant en 2013 un état daté exhaustif, ce qui consacre une faute délictuelle engageant leur responsabilité ;

- M. [I] ne peut utilement contester sa qualité de syndic bénévole dès lors qu'il est désigné dans les actes de vente de 2012 et 2013 comme syndic bénévole, même si l'acte de 2012 mentionne '[J] [F]' à la faveur d'une erreur matérielle ;

- M. [L] [F] a été destinataire, en qualité de syndic bénévole apparent, des correspondances de la ville sans jamais contester cette qualité et est désigné par un copropriétaire comme tel.

Sur les préjudices :

- si elle avait été informée en 2013 de l'état réel de l'immeuble, elle aurait pris des renseignements lui permettant d'appréhender le coût des travaux nécessaires et leur impact financier pour négocier le prix d'achat ;

- la réparation du préjudice doit être intégrale, ce qui implique de réparer, au titre des ventes conclues en 2012, les pertes de loyers (1 006 393 € ), le coût du relogement des locataires qui a été supporté par le commune mais qui lui sera réclamé, la dépréciation des biens acquis (486 666 € ), le coût des travaux de sécurisation (36 910 € rapportés aux millièmes dont elle est propriétaire), le préjudice bancaire lié à la déchéance du terme dans les contrats de crédit (54 545 €), le préjudice financier induit par la nécessité de souscrire un nouvel emprunt (8 144 € au titre des intérêts d'emprunts), et, de même, au titre des ventes de 2013, les pertes de loyers ( 283 338 €), le coût du relogement des locataires qui a été supporté par le commune mais qui lui sera réclamé à hauteur de 31 008 €, la dépréciation des biens acquis (176 338 €), le coût des travaux de sécurisation (10 066 € rapportés aux millièmes dont elle est propriétaire), le préjudice bancaire lié à la déchéance du terme dans les contrats de crédit (17 417 €) et le préjudice financier induit par la nécessité de souscrire un nouvel emprunt (2 221 €), ainsi que les frais de procédure au titre d'impayés auquel elle n'a pu faire face à hauteur de 8 453 €.

Dans leurs dernières conclusions d'intimés et d'appel incident, régulièrement notifiées le 20 octobre 2023, auxquelles il convient de renvoyer pour un exposé plus exhaustif des moyens, la SARL Beaumont et M. [I] demandent à la cour, au visa de l'article 1240 du code civil, de :

A titre principal,

' constater l'irrecevabilité des conclusions de la SCI Teramo ;

A titre subsidiaire, au fond,

' infirmer le jugement en ce qu'il a déclaré M. [I] responsable de la dissimulation de la procédure de péril dans l'acte de vente du 16 juillet 2013 ;

' confirmer le jugement en ce qu'il a rejeté les demandes indemnitaires et en ses dispositions relatives à l'article 700 du code de procédure civile ;

Y ajoutant,

' condamner la SCI Teramo à leur payer la somme de 5 000 € chacun en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens de première instance et d'appel.

Ils font valoir que :

- la réticence dolosive suppose une intention de dissimuler, par rétention, une information, or la SCI Teramo, professionnel de l'immobilier, ne pouvait ignorer l'état de l'immeuble au regard de la modicité du prix d'acquisition ;

- s'agissant de la vente du 25 octobre 2012, l'arrêté de péril de 2010 n'avait pas à être porté à la connaissance de la SCI Teramo dès lorsqu'il avait été levé le 6 décembre 2010 ;

- s'agissant de la vente du 16 juillet 2013, M. [I], que ce soit en sa qualité de syndic bénévole ou de gérant de la SARL Beaumont, n'a été informé par la commune de la procédure de péril que le 2 décembre 2013, date à laquelle il a reçu le courrier recommandé et aucune pièce probante ne démontre qu'il a retiré le courrier recommandé du 17 mai 2013, mais, en tout état de cause, dès lors que ce courrier ne mentionnait pas de travaux à effectuer, il n'avait pas à être porté à la connaissance de l'acquéreur et la SCI Teramo, qui était déjà propriétaire à cette date de onze lots connaissait l'état de l'immeuble.

S'agissant des préjudices, ils font observer que si la SCI Teramo avait payé les charges de copropriété destinés à financer les travaux, l'arrêté de péril, qui est toujours en cours, aurait été levé, de sorte que le préjudice dont elle se plaint procède exclusivement de sa carence.

Dans ses dernières conclusions d'intimé, régulièrement notifiées le 30 octobre 2023, auxquelles il convient de renvoyer pour un exposé plus exhaustif des moyens, M. [L] [F] demande à la cour, au visa des article 1382, 1383, 1315, 1353 du code civil, de :

' confirmer le jugement en ce qu'il a rejeté les demandes de la SCI Teramo à son encontre et condamné celle-ci à lui payer 2 500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

' rejeter toutes les demandes formulées à son encontre ;

' condamner la SCI Teramo à lui payer 4 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

Il fait valoir que :

- les demandes de la SCI Teramo sont irrecevables en ce qu'elles ne sont pas fondées en droit, puisque l'appelante invoque, au soutien de ses prétentions, les dispositions de l'article 1240 du code civil, qui est inapplicable dès lors que les actes juridiques litigieux sont antérieurs à l'ordonnance du 10 février 2016 ;

- bien que copropriétaire, il n'a jamais été syndic bénévole de la copropriété ainsi que le démontrent les actes notariés litigieux mais également d'autres actes de vente de lots au sein de la même copropriété qui mentionnent tous M. [J] [I] en cette qualité ;

- l'acte du 25 octobre 2012 contient une erreur matérielle, le notaire ayant remplacé le 'o' de [I] par un 'a' , mais l'adresse du syndic, qui est mentionné dans l'acte, correspond bien à celle de M. [I] ;

- le fait qu'une assemblée générale de copropriétaires se soit tenue à son domicile le 7 décembre 2010 ne démontre pas pour autant qu'il était syndic bénévole ;

- l'envoi en 2014, par la commune, à tort, d'un courrier le désignant comme syndic bénévole ne suffit pas pour démontrer qu'il occupait réellement cette fonction qu'il a toujours contestée, notamment dans un courrier en réponse adressé à la commune, étant observé au surplus que ce courrier est postérieur aux deux ventes litigieuses.

Il fait observer que la SCI Teramo prétend avoir été victime d'une tromperie par réticence dolosive alors que sa gérante est également gérante de la SCI Favara qui, en 2014, a acquis trois lots au sein de la copropriété en toute connaissance de la situation de péril de l'immeuble.

Il soutient enfin que la SCI Teramo est seule responsable de son préjudice puisque l'arrêté de péril de 2014 n'a pu être levé par sa seule faute, du fait de l'absence de règlement par ses soins de sa quote part des charges destinées à financer les travaux.

Dans leurs dernières conclusions d'intimés et d'appel incident, régulièrement notifiées le 4 août 2020, auxquelles il convient de renvoyer pour un exposé plus exhaustif des moyens, M. [C] et la SCP Frédéric Brincourt Laurent Giustianini anciennement dénommée SCP Frédéric Brincourt [X] [C] demandent à la cour, au visa des articles 1240 et 2224 du code civil, de :

' dire et juger prescrites les demandes de la SCI Teramo à leur encontre s'agissant de l'acte du 25 octobre 2012 et subsidiairement, la débouter de l'ensemble de ses demandes à ce titre ;

En toute hypothèse,

' confirmer le jugement en ce qu'il a débouté la SCI Teramo de l'ensemble de ses demandes ;

' la condamner à leur payer la somme de 30 000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive outre 10 000 € au titre des frais irrépétibles ainsi qu'aux entiers dépens, ceux d'appel distraits au profit de leur avocat.

Ils font valoir que :

Sur la prescription : l'action en responsabilité au titre de la vente du 25 octobre 2012 est prescrite en ce que l'acte mentionne que la SCI Teramo reconnaît avoir eu connaissance de l'absence d'information transmise par le syndic, de sorte que le délai de prescription a commencé à courir à cette date, or, sa demande de dommages-intérêts au titre de cette vente a été formulée pour la première fois plus de cinq ans après ;

Sur les fautes reprochées au notaire :

- le notaire, en recevant l'acte reçu le 25 octobre 2012, a informé la SCI Teramo que le syndic bénévole ne lui avait transmis aucune information concernant la copropriété, de sorte que celle-ci ne peut se plaindre d'une quelconque carence, mais en tout état de cause, aucune faute ne peut lui être reprochée au motif que l'arrêté de péril de 2010 a été levé bien avant la vente ;

- si le notaire est tenu de vérifier les informations relatives aux droits qu'il authentifie, cette obligation n'est pas de résultat et le notaire peut s'en remettre aux apparences dès lors qu'elles ne sont pas douteuses, or, en l'espèce, il n'a pas lui même été informé de la procédure de péril en cours en 2013 et, ayant annexé à son acte l'extrait du plan cadastral, la note de renseignement d'urbanisme délivrée en date du 8 avril 2013 par le service d'urbanisme de la chambre des notaires des Bouches du Rhône et l'état daté, aucun indice ne pouvait lui laisser penser qu'il devait douter des déclarations de la société venderesse, étant rappelé que l'arrêté de péril n'a été pris que le 19 mai 2014 et qu'il n'a jamais eu connaissance de celui pris en 2010 ;

- le notaire n'est pas tenu de réclamer un arrêté de non péril et même s'il l'avait sollicité, il n'est pas établi qu'il aurait obtenu une réponse positive de la commune ;

- le dol commis par la société venderesse absorbe toute causalité, de sorte que le notaire ne peut être tenu pour responsable de la rétention des informations.

Ils ajoutent que la SCI Teramo, propriétaire depuis 2012 de lots loués dans l'immeuble, ne pouvait ignorer l'état de celui-ci en sa qualité de professionnelle de l'immobilier et ne démontre pas que celui-ci a été déterminant de l'achat puisqu'en 2014, alors que la situation de péril était connue, la SCI Favara, dont la gérante est également celle de la SCI Teramo, a de nouveau acquis des lots dans cette copropriété.

Sur le préjudice, ils soutiennent que, nul ne pouvant se prévaloir de sa propre turpitude, la SCI Teramo n'est pas fondée à se prévaloir d'un quelconque dommage alors qu'elle est à l'origine, par le non paiement des charges, de l'impossibilité de lever l'arrêté de péril et que, s'agissant de la réfaction du prix, à supposer que cette demande soit fondée, elle ne peut peser que sur la venderesse.

Selon eux, la démarche de la SCI Teramo, qui n'a pas cru devoir solliciter une résolution de la vente et a préféré spéculer, est manifestement abusive.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la recevabilité des conclusions

M. [I] et la SARL Beaumont soutiennent que les conclusions de l'appelante sont irrecevables au motif que les demandes sont partiellement fondées sur l'article 1240 du code civil, inapplicable au litige en ce que les actes litigieux sont antérieurs à l'ordonnance du 10 février 2016.

Cependant, l'erreur d'une partie sur le fondement juridique applicable à l'action n'a pas pour effet de rendre ses conclusions irrecevables. Le moyen est afférent au bien fondé de l'action et non des conclusions elles-mêmes.

Sur la recevabilité des demandes indemnitaires

M. [F] conclut à l'irrecevabilité des demandes indemnitaires au motif que les dispositions de l'article 1240 du code civil, issues de l'ordonnance du 10 février 2016, sont inapplicables au litige.

En application de l'article 31 du code de procédure civile, l'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d'agir aux seules personnes qu'elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé.

La qualification légale de fin de non-recevoir résulte des textes qui la prévoient expressément, à savoir le défaut de qualité, d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la forclusion et l'autorité de chose jugée et de ceux sanctionnent une exigence particulière par une irrecevabilité.

Or, aucun texte ne sanctionne l'erreur de fondement juridique par une fin de non recevoir.

En conséquence, le visa par le demandeur de textes inapplicables n'affecte pas la recevabilité des demandes, mais leur bien fondé, sous réserve des pouvoirs accordés au juge pour restituer à la demande dont il est saisi sa véritable qualification juridique et trancher le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables en vérifiant que les conditions d'application de la loi sont remplies.

En conséquence, aucune fin de non recevoir ne peut être opposée à la SCI Teramo au motif qu'elle fonde ses demandes sur l'article 1240 du code civil et non sur l'article 1382 ancien du code civil seul applicable au litige au regard de des actes contestés.

Sur la prescription

L'action en responsabilité contre le notaire est une action personnelle qui se prescrit par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

En l'espèce, la SCI Teramo se plaint du non respect par le notaire de ses obligations professionnelles lors des ventes reçues les 25 octobre 2012 et 16 juillet 2013.

S'agissant de la première, l'action est fondée sur une faute du notaire en ce qu'il n'aurait pas sollicité du vendeur ou du syndic les documents afférents à l'état de l'immeuble et aurait été négligent en ne vérifiant pas auprès de la commune que l'immeuble vendu n'était l'objet d'aucune procédure de péril.

L'acte authentique reçu le 25 octobre 2012 par Me [C] mentionne que les biens vendus ne font l'objet d'aucune injonction de travaux. En page 26, il mentionne que 'l'état contenant les informations prévues par l'article 5 du décret du 17 mars 1967 modifié sur la copropriété n'a pas été délivré par le syndic' et que 'l'acquéreur déclare faire son affaire personnelle de cette situation sans recours contre le vendeur'.

Les faits permettant à la victime d'agir doivent être entendus comme ceux révélant dans toute son ampleur et son étendue le manquement fautif engageant la responsabilité de son auteur.

Or, la SCI Teramo n'a su que les diligences du notaire étaient insuffisantes que le jour où elle a appris que l'immeuble avait été l'objet d'un arrêté de péril en 2010.

Parmi les documents produits aux débats, le courrier électronique de M. [R], expert désigné par le tribunal administratif, permet de dater la transmission à la SCI Teramo de l'information afférente à la procédure de péril de 2010 au 27 juin 2018.

C'est donc seulement à compter de cette date que la société Teramo a connu les faits (à savoir l'insuffisance des diligences du notaire) lui permettant d'agir au titre de la vente du 25 octobre 2012, étant rappelé que la recevabilité de l'action ne préjuge pas de son bien fondé.

Le délai de prescription de l'action a donc commencé à courir le 27 juin 2018.

La SCI Teramo a formulé des prétentions à ce titre pour la première fois par des conclusions du 15 octobre 2018.

En conséquence, l'action en responsabilité exercée contre le notaire en ce qui concerne la vente reçue par celui-ci le 25 octobre 2012, n'est pas prescrite.

Sur le dol

A titre liminaire, il sera rappelé que les contrats conclus avant l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, soit au 1er octobre 2016, demeurent soumis à la loi ancienne.

Tel est le cas en l'espèce, les actes contestés étant datés des 25 octobre 2012 et 16 juillet 2013.

En application de l'article 1116 du code civil, dans sa version antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les manoeuvres pratiquées par l'une des parties sont telles qu'il est évident que, sans elles, l'autre partie n'aurait pas contracté. Il ne se présume pas, et doit être prouvé.

Selon l'article 1117 du même code, le contractant victime d'un dol peut exercer une action en réduction du prix de vente et solliciter l'indemnisation des dommages que le dol lui a causés.

Le dol suppose des man'uvres délibérées destinées à provoquer une erreur de nature à vicier le consentement du contractant. Il renvoie à une tromperie qui conduit l'autre partie à conclure le

contrat sur une fausse conviction, c'est à dire une erreur provoquée. Il implique par conséquent, la preuve d'un élément matériel et d'un élément intentionnel.

Le manquement à une obligation pré-contractuelle d'information ne peut suffire à caractériser le dol par réticence, si ne s'y ajoute la constatation du caractère intentionnel de ce manquement et d'une erreur déterminante provoquée par celui-ci.

En l'espèce, la SCI Teramo reproche à la SARL Beaumont de lui avoir dissimulé l'état réel de l'immeuble, tant lors de la vente du 25 octobre 2012 que lors de celle du 16 juillet 2013, plus précisément d'avoir sciemment dissimulé l'existence de procédures administratives de péril affectant l'immeuble.

S'agissant de la première vente, reçue le 25 octobre 2012, il n'est contesté par aucune des parties que l'immeuble a fait l'objet d'un arrêté de péril le 5 novembre 2010 à la suite d'une expertise réalisée par M. [R] qui a conclu à l'existence d'un péril grave et imminent en raison de 'pathologies lourdes sur le balcon du 3ème étage avec risque grave et imminent de ruine sur la [Adresse 10] ainsi que sur l'avancée de toiture au dernier étage avec risque imminent de ruine sur la [Adresse 10]'. L'arrêté a préconisé la mise en place d'un périmètre de sécurité et l'interdiction d'utilisation et d'occupation des balcons.

Cependant, le registre des arrêtés de la commune de [Localité 8] contient également un arrêté n°10/699/DPSP du 16 décembre 2010, faisant état de travaux de purge et de consolidation selon attestation du 8 décembre 2010. Ces travaux étant ceux visés par l'arrêté de péril imminent n°10/619/DPSP du 5 novembre 2010, l'arrêté a autorisé l'occupation et l'utilisation de l'ensemble des balcons de l'immeuble.

En conséquence, l'arrêté de péril a été levé le 16 décembre 2010.

S'agissant de la vente du 16 juillet 2013, il ressort des documents produits par les parties que :

- le 23 avril 2013, les services techniques de la commune de [Localité 8] ont établi un rapport de visite faisant état sur la façade arrière de l'immeuble, d'une dégradation du revêtement en sous face des balcons du 6ème et du 1er étage, d'un éclatement des structures maçonnées avec risque, à terme, de déstabilisation des ouvrages et de chute des matériaux de maçonnerie sur les personnes et d'une dégradation des revêtements en sous-face des autres balcons, préconisant afin de préserver la sécurité du public, l'engagement d'une phase contradictoire de péril ;

- le 17 mai 2013, un courrier a été adressé à 'M. [I] (SARL Beaumont)' afin de lui demander d'informer sous 21 jours les copropriétaires de la situation de dangerosité de l'immeuble et de transmettre sous deux mois au service de la prévention et de la gestion des risques, un courrier faisant état des mesures envisagées afin de mettre fin au péril, précisant qu'à défaut, la commune prendrait un arrêté de péril ;

- par un courrier du 22 novembre 2013, la commune, prenant acte de l'absence de réponse à son courrier du 17 mai 2013, a sollicité la transmission sous un mois d'un échéancier de travaux ;

- le 25 avril 2014, par arrêté n°14/231/SPGR, la commune a déclaré l'immeuble en état de péril imminent, notifié aux copropriétaires leur obligation, dans un délai de six mois, de réaliser des travaux propres à mettre fin durablement au péril tenant à l'état du revêtement en sous face des balcons ;

- le 19 mai 2014, un arrêté n°14/274/SPGR a imposé aux copropriétaires de réaliser sous quinze jours des travaux de mise en sécurité tout en interdisant l'accès aux balcons côté cour et l'accès à la cour arrière du rez de chaussée.

Il résulte de ces éléments que si l'immeuble a été l'objet, à deux reprises, d'arrêtés de péril imminent, les désordres ayant motivé ces arrêtés n'étaient pas les mêmes en 2010 et 2013.

En 2010, ils concernaient le balcon du 3ème étage avec un risque grave et imminent de ruine sur la [Adresse 10] et l'avancée de toiture au dernier étage avec risque imminent de ruine également sur la [Adresse 10].

En 2013, les dégradations consacrant un état de ruine concernaient, les balcons en façade arrière et non sur la [Adresse 10].

Les désordres à l'origine des arrêtés étant différents, la société venderesse, qui avait réalisé les travaux permettant la levée du premier arrêté en décembre 2010, n'était pas tenue d'en informer l'acquéreur lors de la vente conclue le 25 octobre 2012.

La levée de l'arrêté de péril est due à la réalisation des travaux propres à remédier aux causes du péril. Lorsqu'un immeuble est l'objet d'une telle procédure, la non réalisation des travaux préconisés a pour effet d'empêcher la levée de l'arrêté. Il en résulte qu'après réalisation des travaux, l'état de l'immeuble ne justifie plus aucune alerte concernant les éléments de construction qui en étaient l'objet.

Le vendeur n'a donc aucune obligation de signaler, dans le cadre de la vente, l'existence de cet antécédent. Les visites du bien avant achat sont destinées à permettre à l'acheteur de connaitre l'état matériel de l'immeuble, de sorte qu'en l'espèce, la SCI Teramo avait connaissance de l'état général de l'immeuble.

L'absence d'information quant à l'existence près de deux ans plus tôt, d'une procédure de péril qui s'est soldée par un arrêté de levée du péril après réalisation des travaux exigés par l'autorité administrative, ne caractérise donc aucune réticence dolosive du vendeur au sens de l'article 1116 ancien du code civil.

Lors de la vente reçue le 16 juillet 2013, la procédure de péril était en cours depuis quelques mois.

Dans l'acte notarié, la SARL Beaumont, représentée par M. [I], déclare que les biens ne font l'objet d'aucune injonction de travaux et que 'à sa connaissance, aucun travaux nécessaire à la sauvegarde de l'immeuble n'a été décidé depuis la signature de l'avant contrat'.

L'acte indique également que l'état contenant les informations prévues par l'article 5 du décret du 17 mars 1967 modifié sur la copropriété a été délivré par le syndic le 16 juillet 2013 et que l'acquéreur déclare en avoir prix parfaite connaissance, tant par la lecture qui lui en a été faite par le notaire que par les explications qui lui ont été données par ce dernier.

Enfin, il précise que le syndic actuel de la copropriété est M. [J] [I], syndic bénévole, demeurant [Adresse 5].

M. [I] était donc à la fois syndic de l'immeuble et représentant de la SARL Beaumont, vendeur des lots de copropriété objets du contrat.

L'état daté délivré par le syndic le 16 juillet 2013, annexé à l'acte de vente, n'est pas renseigné, hormis en ce qui concerne l'absence de sommes dues par le copropriétaire cédant. Aucune information n'y figure, sinon celle relative à l'absence de procédure en cours.

Au paragraphe 'autres renseignements susceptibles d'intéresser les parties' ne figure aucune mention. La partie 'dossier technique et environnemental', notamment les renseignements afférents au carnet d'entretien de l'immeuble, n'est pas renseignée, pas plus que celle afférente aux mesures administratives, notamment l'existence d'un arrêté de péril'.

L'historique de la procédure de péril initiée en 2013 est le suivant : le 23 avril 2013, les services techniques de la ville de [Localité 8] ont établi un rapport de visite technique de l'immeuble, faisant ressortir l'existence d'une dégradation de la façade arrière de l'immeuble, notamment une dégradation du revêtement en sous-face des balcons des 6ème et 1er étage, un éclatement des structures maçonnées (structures métalliques visibles et non protégées), avec risque, à terme, de déstabilisation des ouvrages et de chute des matériaux de maçonnerie sur les personnes et de dégradation des revêtements en sous-face des autres balcons. Le rapport conclut que, compte tenu des désordres constatés et des risques potentiels pouvant compromettre la sécurité du public, des travaux de réparation définitifs ou de démolition sont nécessaires, de même que l'engagement de la phase contradictoire de péril.

Par courrier du 17 mai 2013, la commune a adressé un courrier LRAR à 'M. [I] (SARL Beaumont), syndic bénévole de la copropriété, de la procédure en cours. Ce courrier fait expressément référence à la visite technique du 23 avril 2013 et attire l'attention de son destinataire sur l'importance de la situation de l'immeuble, sous statut de la copropriété et dont il est le syndic bénévole, lui transmettant le rapport de visite et l'enjoignant à informer sous 21 jours les copropriétaires de la situation dangereuse de l'immeuble et sous deux mois de transmettre au service de la prévention et de la gestion des risques un courrier faisant état des mesures envisagées pour mettre fin au péril. Le courrier rappelle ensuite que si, à l'issue du délai imparti, aucune volonté des copropriétaire de remédier au péril n'est exprimée, la commune prendra un arrêté de péril et exposera les copropriétaires défaillants, d'une part à la réalisation des travaux aux frais avancés de la commune, d'autre part à des sanctions pénales et que les loyers et toute somme versée en contrepartie de l'occupation des logements cessent d'être dûs.

Ce courrier a été suivi d'un deuxième, également adressé à M. [I] en la même qualité le 22 novembre 2013, prenant acte de l'absence de réponse et portant injonction de transmettre sous un mois l'échéancier de travaux.

Il résulte de ces éléments qu'un courrier recommandé avec avis de réception a été adressé avant la signature de l'acte authentique à M. [I], syndic, qui était également le gérant de la société venderesse et son mandataire lors de la vente.

Il n'est pas contesté qu'aucune information n'a été donnée par le vendeur à la SCI Teramo, acquéreur de trois appartements dans la copropriété frappée de péril.

M. [I], prétend ne pas avoir reçu le courrier du 17 mai 2013. Celui a cependant envoyé à son adresse, [Adresse 5].

Il reconnaît d'ailleurs avoir reçu le deuxième courrier, en date du 22 novembre 2013 qui a été envoyé par lettre recommandée avec avis de réception à la même adresse.

Cependant, si aucun justificatif de réception du courrier du 17 mai 2013 par M. [I] n'est produit aux débats, le rapport technique dressé par les services techniques, dont la commune rappelle la teneur dans ce courrier, a été précédé d'une visite sur place et donc nécessairement d'une information délivrée au syndic de la copropriété. M. [I] ne peut donc utilement soutenir avec tout ignoré de la procédure initiée par la commune.

Par ailleurs, non seulement il n'a fourni à l'acquéreur aucune information concernant cette procédure, mais, en sa qualité de syndic bénévole de l'immeuble, il a remis au notaire un état daté non renseigné. Or, son comportement en qualité de représentant de la société venderesse doit être analysé à l'aune de sa carence en qualité de syndic bénévole dès lors que l'état daté remis au notaire ne comporte pas, manifestement à dessein, les informations requises par la loi.

Un tel comportement traduit une volonté de dissimuler une information qui était essentielle pour l'acquéreur en ce qu'elle était susceptible d'influer sur la valeur des biens acquis mais également leur rentabilité puisque de nature à justifier la cessation du versement des loyers et de toute somme due en contrepartie de l'occupation des biens.

Par conséquent, le dol commis par la SARL Beaumont, dont le gérant était syndic bénévole de la copropriété et, en cette qualité, informé de l'état très dégradé de l'immeuble, est démontré.

Sur la responsabilité de M. [I]

M. [J] [I] est désigné dans tous les actes notariés, notamment l'acte de vente du 16 juillet 2013, comme le syndic bénévole de la copropriété, ce qu'il ne conteste pas.

En cette qualité, il lui appartenait d'établir l'état daté demandé par le notaire. Or, les conditions dans lesquels cet état daté a été rédigé, au mépris des obligations réglementaires, ont été exposés plus haut.

L'absence de diligences de l'intéressé est à mettre en perspective avec son rôle dans la vente litigieuse puisqu'il était également le représentant de la société venderesse qui avait tout intérêt à dissimuler l'état de péril de l'immeuble.

M. [I] ne justifie pas des raisons pour lesquelles il a remis au notaire un état daté non renseigné, sauf à prétendre qu'il ignorait tout de la procédure de péril en cours. Or, cet argument n'est pas pertinent dès lors que la commune lui a adressé un courrier recommandé dès le 17 mai afin de l'en informer et que si aucune preuve n'est rapportée qu'il a signé l'avis de réception de ce courrier adressé à son domicile, la procédure communale fait suite à la visite un mois plus tôt de plusieurs agents des services techniques de la ville, alertés sur les risques de chute des balcons à l'arrière de l'immeuble, qui n'a pu se dérouler sans l'information préalable du syndic.

Il en résulte que M. [I] a commis une faute susceptible d'engager sa responsabilité.

Sur les manquements fautifs reprochés au notaire

Les notaires, institués pour donner aux conventions des parties les formes légales et l'authenticité, doivent mettre en 'uvre tous les moyens adéquats et nécessaires afin d'assurer l'efficacité de leurs actes.

Un acte efficace s'entend d'un acte conforme à la volonté des parties et, à ce titre, les notaires ont le devoir d'éclairer les parties sur le contenu et les effets des engagements afin qu'elles puissent y consentir en toute connaissance de cause.

En effet, l'efficacité d'un acte dépend directement du respect de la volonté des parties que le notaire doit protéger par des conseils juridiques avisés. En sa qualité d'officier public chargé d'assurer la sécurité des actes juridiques, il doit aux parties son aide technique et ne peut se retrancher derrière le caractère secondaire ou purement formel du rôle qu'il a joué.

Par ailleurs, le notaire est tenu d'éclairer les parties et d'appeler leur attention, de manière complète et circonstanciée, sur la portée et les effets ainsi que sur les risques des actes auxquels il est requis de donner la forme authentique.

Il lui incombe de prouver l'exécution de son devoir de conseil.

Le notaire est ainsi responsable de tout manquement aux devoirs que lui impose sa charge, étant précisé que la faute même très légère, analysée par comparaison avec la conduite qu'aurait dû avoir un notaire avisé, juriste compétent et méfiant, peut être source de responsabilité.

Il appartient cependant à celui qui agit en responsabilité civile à l'encontre d'un notaire sur le fondement de l'article 1382 du code civil, de démontrer la faute commise par celui-ci mais également le lien de causalité qui existe entre le préjudice dont il se plaint et cette faute.

En l'espèce, dans ses conclusions, la SCI Teramo vise les articles 1240 et suivants du code civil. Il a été rappelé plus haut que le litige est soumis aux dispositions du code civil antérieures à l'ordonnance du 10 février 2016, en ce que les faits générateurs de responsabilité ne sont tous produits avant l'entrée en vigueur de ce texte, mais en tout état de cause, l'ordonnance précitée a repris à l'identique, à l'article 1240 du code civil les dispositions de l'article 1382 ancien du code civil. L'erreur est donc sans incidence, les intimés ayant été en mesure de connaitre les fondements sur lesquels reposent les prétentions de la SCI Teramo.

S'agissant de la vente reçue le 25 octobre 2012, aucun manquement fautif ne peut être reproché au notaire. La procédure de péril de 2010, près de deux ans avant la signature de l'acte s'est soldée, après réalisation des travaux, par un arrêté de levée du péril. En conséquence, le notaire n'avait pas l'obligation d'en informer l'acquéreur.

En revanche, l'acte reçu le 16 avril 2013 comporte en annexe un état daté insusceptible d'informer l'acheteur puisqu'il ne contient aucune information, son auteur ne l'ayant pas renseigné.

Or, si le notaire n'est pas responsable d'un état daté mensonger, il en va différemment lorsque celui-ci n'est pas correctement renseigné. En l'espèce, l'état daté délivré le jour de la vente n'est renseigné que de manière très parcellaire. Il ne contient aucune réponse, positive ou négative, aux questions afférentes à l'état du bien, notamment à celles concernant l'existence d'une procédure de péril et aucun renseignement concernant le carnet d'entretien de l'immeuble.

Sa lecture est édifiante, qui aurait dû alerter le notaire et le conduire, avant de recevoir l'acte authentique, à interpeller le syndic, qui était également le représentant de la société venderesse, en lui demandant de fournir un état daté conforme.

L'article 5 du décret du 17 mars 1967 impose au syndic une véritable obligation préalable d'information à l'égard de l'acquéreur, qui doit intervenir avant l'établissement de l'acte de vente. La finalité de cet article est, notamment d'éclairer le candidat acquéreur sur les conséquences financières de son projet d'acquisition. La première partie est consacrée aux dettes du vendeur, la deuxième à la créance du vendeur à l'égard du syndicat, et la troisième aux sommes que le nouveau copropriétaire doit s'attendre à supporter, notamment les travaux de conservation, ou d'entretien de l'immeuble, les travaux portant sur les éléments d'équipement commun, les travaux d'amélioration, et les dépenses afférentes aux études techniques.

Le notaire qui instrumente en matière de vente de lots de copropriété est garant de la délivrance d'un état daté conforme aux exigences du décret.

Or, un arrêté de péril, en ce qu'il contraint les copropriétaires à réaliser des travaux, a une incidente déterminante sur les sommes que l'acquéreur doit s'attendre à supporter lorsqu'il sera copropriétaire.

En l'espèce, le notaire a annexé à son acte un état daté non signé et non renseigné.

Or, au jour où cet état daté, dont le notaire s'est contenté, a été établi, la procédure de péril était en cours.

Les informations attendues étaient donc susceptibles d'être déterminantes et le notaire, professionnel du droit avisé, aurait dû exiger du syndic qu'il fasse diligence en lui remettant un état daté renseigné, sans se contenter, comme il l'a fait, du document sans valeur qu'il a accepté d'annexer à son acte authentique. Au besoin, il devait refuser de recevoir l'acte jusqu'à ce que le syndic fasse diligence.

Le notaire ne peut utilement se retrancher derrière l'attitude dolosive de M. [I], à la fois représentant de la venderesse et syndic. L'intervention dans les ventes d'immeuble d'un officier ministériel est destinée, par une stricte exigence quant au respect des règles de droit, à protéger les contractants.

En l'espèce, M. [C], notaire, n'a fait preuve d'aucune exigence, alors qu'il devait, afin d'assurer l'efficacité de l'acte, se soucier du respect des dispositions réglementaires susceptibles d'avoir une incidence sur le consentement de l'acquéreur.

Par ailleurs, il ne justifie pas avoir informé la SCI Teramo des risques inhérents à l'acte compte tenu de la teneur de cet état daté.

S'il ne saurait lui être reproché d'avoir tu l'existence de la procédure de péril, dont aucun élément ne démontre qu'il en avait connaissance ou pouvait raisonnablement l'anticiper, il avait le devoir impérieux d'assurer le respect par les parties des dispositions réglementaires afférentes à la copropriété, et, sinon de contrôler la pertinence des réponses du syndic, à tout le moins d'exiger que l'état daté soit dûment renseigné et à défaut, d'informer la SCI Teramo, acquéreur, des risques inhérents à l'acte.

Or, M. [C] ne produit aucune pièce démontrant qu'il a attiré l'attention de la SCI Teramo sur les risques pris en regard de l'insuffisance des informations figurant dans l'état daté.

En revanche, il ne peut être reproché au notaire de ne pas avoir effectué lui même des investigations auprès de la commune afin de rechercher si l'immeuble était concerné par une procédure de péril. Dès lors qu'il n'était en possession d'aucune information de nature à lui faire suspecter l'existence d'une telle procédure et que les biens objets de la vente étaient loués, rien ne pouvait lui faire douter de l'existence d'un quelconque péril.

Par ailleurs, le notaire n'est pas tenu, sauf difficulté objectivée avant la signature de l'acte authentique, de requérir un certificat d'urbanisme et de compléter ses investigations en s'adressant à la commune pour vérifier l'inexistence de toute procédure de péril.

En tout état cause, en l'espèce, M. [C], notaire, a bien commis une faute susceptible d'engager sa responsabilité à l'égard de la SCI Teramo.

Sur les manquements fautifs reprochés à M. [L] [F]

M. [F] est propriétaire de plusieurs lots au sein de la copropriété. Il est à l'origine de la saisine du président du tribunal aux fins d'obtenir la désignation d'un administrateur provisoire de la copropriété en novembre 2014.

La SCI Teramo lui reproche ne pas avoir fait diligence en sa qualité de syndic bénévole.

Cependant, M. [L] [F] conteste avoir jamais exercé la fonction de syndic bénévole de la copropriété et la SCI Teramo ne démontre par aucune pièce qu'il a assumé ces fonctions à quelque période que ce soit.

Certes, l'acte du 25 octobre 2012 le désigne comme syndic bénévole mais il s'agit manifestement d'une erreur matérielle, puisque que l'adresse renseignée dans l'acte est celle de M. [J] [I] et que les deux patronymes différent seulement par une lettre.

Par ailleurs, si la commune a, en 2014, adressé à M. [F] un courrier en qualité de syndic, ce courrier est insuffisant pour lui reconnaître cette qualité, dès lors qu'aucune autre pièce ne démontre qu'il a effectivement été désigné dans cette fonction ou qu'il s'est comporté comme syndic de fait ou syndic bénévole.

La réunion de copropriétaires organisée à son domicile ne constitue pas non plus une preuve, les copropriétaires pouvant prendre l'initiative de telles réunions sans pour autant accepter d'endosser cette responsabilité.

En conséquence, les éléments produits par la SCI Teramo à l'encontre de M. [F] sont insuffisants pour considérer qu'il a, en qualité de syndic bénévole, commis une faute engageant sa responsabilité à son égard.

Sur les préjudices

La responsabilité, qu'elle soit contractuelle ou délictuelle, suppose pour justifier une condamnation indemnitaire, la démonstration d'un dommage en lien de causalité avec les manquements fautifs allégués.

En l'espèce, la SCI Teramo a succombé en première instance au motif, selon le tribunal, qu'elle ne justifiait par aucune pièce probante de ses préjudices.

Devant la cour, la SCI Teramo justifie, pièces à l'appui, de l'ensemble des préjudices, financiers, qu'elle allègue.

Cependant, lorsque la vente a eu lieu le 16 juillet 2013, la SCI Teramo était déjà propriétaire de onze lots au sein de la copropriété.

Aucun manquement fautif n'est objectivé en ce qui concerne la vente, le 25 octobre 2012, de ces lots.

Or, l'état de péril, retenu par l'arrêté du 25 avril 2014, qui a été suivi par un arrêté d'insalubrité le 20 mars 2018, procède de l'absence d'entretien de l'immeuble par les copropriétaires, qui l'ont laissé se dégrader sans procéder aux travaux indispensables à sa conservation.

La SCI Teramo, en sa qualité de copropriétaire depuis 2012, en est responsable par son inaction, de même que les autres copropriétaires.

L'arrêté du 20 mars 2018 est édifiant en ce qui concerne l'état général de l'immeuble, qui stigmatise notamment un défaut d'étanchéité de la toiture engendrant des fuites au dernier étage, le mauvais état des marches d'escalier, la dégradation des murs et des peintures, le mauvais état ou l'absence des fenêtres de la cage d'escalier, la présence de peintures au plomb accessibles, la dangerosité et la déstructuration des balcons de la façade sur cour, le défaut de sécurité des garde-corps du sixième étage, la dangerosité de l'installation électrique, l'absence d'éclairage, l'encombrement et le défaut d'entretien régulier de la cage d'escalier et de l'ensemble des parties communes, l'absence de porte d'accès à l'immeuble et à la cour, une fuite d'eau sur la terrasse du logement situé au rez de chaussée, la présente importante d'encombrants, de déchets putrescibles dans la cour arrière et dans les locaux situés dans le couloir d'accès à la cour et la présence de nuisibles.

Même si l'arrêté de péril de 2013 n'est pas justifié par tous ces désordres, ceux-ci ne sont pas apparus subitement en 2014. Ils témoignent de l'état très dégradé de l'immeuble et de son absence d'entretien au cours des années qui ont précédé.

La SCI Teramo ne produit aucune pièce justifiant qu'entre le 25 octobre 2012 et le 25 avril 2014, alors qu'elle était propriétaire de onze lots, elle a interpellé le syndic ou la copropriété sur la nécessité d'entretenir l'immeuble et de réaliser des travaux.

Alors que l'immeuble était occupé par des familles que l'Etat et la commune ont dû reloger, cette absence de réaction traduit une indifférence pour le moins fautive et qui lui a d'ailleurs valu une condamnation par le tribunal correctionnel de Marseille par jugement du 30 août 2023.

Ce jugement révèle que des arrêtés individuels ont également été pris contre les propriétaires, dont la SCI Teramo, en 2019 et que le tribunal judiciaire de Marseille par jugement du 8 novembre 2022, a annulé une résolution de l'assemblée générale des copropriétaires du 16 juillet 2020 approuvant le remboursement d'une somme de près de 47 000 € à la SCI Teramo au titre de sommes qui auraient été dépensées pour le compte de la copropriété au motif que cette délibération était le fruit d'un abus de majorité.

A ces éléments s'ajoute le fait, comme le font remarquer les intimés, qu'en 2014, lorsque les travaux ont été votés afin de remédier à la dangerosité de l'immeuble, la SCI Teramo n'a pas réglé la quote-part de charges qui lui incombait afin de financer les travaux indispensables à la remise en état de l'immeuble et à la levée de l'arrêté de péril.

La motivation du jugement correctionnel en ce qui concerne la responsabilité pénale de la SCI Teramo est également instructive, qui révèle que celle-ci, avec les autres copropriétaires majoritaires au sein de la copropriété, ont rendu impossible la réalisation des travaux prescrits par l'arrêté de péril municipal et a fortiori de ceux de l'arrêté d'insalubrité qui se recoupaient et procédaient des mêmes causes. Le tribunal ajoute les procès verbaux d'assemblée générale démontrent l'absence de volonté réelle des copropriétaires de se conformer à leurs obligations, ce qui a définitivement compromis la réalisation des travaux nécessaires. Il relève également que les copropriétaires n'ont engagé aucune action concrète permettant de réaliser les travaux et qu'aucun d'entre eux n'a sollicité la mise à l'ordre du jour de l'assemblée générale le vote des travaux susceptibles de mettre fin à l'insalubrité. Il a écarté, d'une part toute responsabilité du syndic en exercice depuis 2015, notant qu'il avait fait diligence mais s'était heurté à un blocage organisé des copropriétaires auquel il avait fini par se résigner, d'autre part toute incidence de la procédure d'expropriation qui a, un temps, été envisagée concernant l'immeuble.

Certes, l'infraction donc SCI Teramo a été déclarée coupable, aux côtés d'autres copropriétaires, est afférente à la période du 29 avril 2019 au 13 octobre 2021, mais ce jugement confirme, d'une part que le péril affectant l'immeuble a pour origine un défaut d'entretien de l'immeuble qui existait déjà au cours de la période où la SCI Teramo était propriétaire de onze lots, d'autre part, que celle-ci est responsable, avec les autres copropriétaires, des préjudices financiers qui en découle et dont elle demande la réparation dans le cadre du présent litige.

Les préjudices financiers allégués par la SCI Teramo sont donc la conséquence de son inertie et de sa carence et, si la SARL Beaumont, M. [I] et M. [C] ont indiscutablement commis des fautes, celles-ci ne sont à l'origine ni de l'entier, ni d'une part quelconque du préjudice dont elle demande réparation.

S'agissant du notaire, si le manquement à un devoir de conseil peut être à l'origine d'une perte de chance de ne pas acquérir, il appartient à celui qui s'en prévaut, de démontrer la chance perdue, parce que, mieux informé, il n'aurait pas accepté d'acheter.

Or, en l'espèce, il n'est pas démontré que, mieux informée, la SCI Teramo, qui était déjà propriétaire de onze lots et, en cette qualité, responsable de l'état de l'immeuble, aurait renoncé à l'acquisition des lots supplémentaires en 2013.

Il est même démontré que la SCI Favara, dont la gérante est également celle de la SCI Teramo, a procédé à un nouvel achat de lots au sein de cette copropriété alors qu'elle avait connaissance de la procédure de péril.

En conséquence, aucune perte de chance en lien de causalité avec le manquement du notaire à son devoir de conseil, n'est démontrée.

Le jugement est en conséquence confirmé en ce qu'il a débouté la SCI Teramo de l'ensemble de ses demandes à l'encontre de la SARL Beaumont, de M. [J] [I], de M. [L] [F], de M. [C], notaire et de la SCP Frédéric Brincourt [X] [C] désormais dénommée Frédéric Brincourt Laurent Giustianini.

Sur la demande de dommages-intérêts pour procédure abusive

L'exercice du droit d'ester en justice, de même que la défense à une telle action, constituent en principe un droit et ne dégénèrent en abus pouvant donner naissance à une dette de dommages et intérêts que dans le cas où le titulaire de ce droit en fait, à dessein de nuire, un usage préjudiciable à autrui.

Le seul rejet des prétentions d'un plaideur, y compris par confirmation en appel d'une décision de première instance, ne caractérise pas automatiquement un abus du droit d'ester en justice.

Par ailleurs, l'appréciation inexacte qu'une partie fait de ses droits n'est pas à elle seule constitutive d'une faute, sauf s'il est démontré que le demandeur ne peut, à l'évidence, croire au succès de ses prétentions.

En l'espèce, si la SCI Teramo est déboutée de ses demandes, M. [C] et la SCP Frédéric Brincourt Laurent Giustianini ne caractérise aucun abus dans l'exercice de son droit de soumettre le litige à un tribunal, alors que la cour a retenu l'existence d'une faute du notaire lors de la vente reçue le 16 juillet 2013.

En conséquence, M. [C] et la SCP Frédéric Brincourt Laurent Giustianini seront déboutés de leur demande de dommages-intérêts pour procédure abusive.

Sur les dépens et frais irrépétibles

Les dispositions du jugement relatives aux dépens sont confirmées, de même que celles afférentes à l'indemnité pour frais irrépétibles allouée à M. [L] [F].

Elles sont, en revanche, infirmées en ce qui concerne l'indemnité de l'article 700 du code de procédure civile allouée à la SARL Beaumont, M. [I], M. [C] et la SCP Frédéric Brincourt [X] [C].

La SCI Teramo, qui succombe, supportera la charge des entiers dépens de première instance et d'appel et n'est pas fondée à solliciter une indemnité au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

L'équité commande de dire n'y avoir lieu à condamnation en application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de la SARL Beaumont, de M. [J] [I], de M. [X] [C] et de la SCP Frédéric Brincourt et Laurent Giustianini au titre des frais irrépétibles exposés en première instance et devant la cour.

L'équité commande en revanche d'allouer à M. [L] [F] une indemnité de 2 500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais non compris dans les dépens exposés devant la cour.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire et en dernier ressort

DIT n'y avoir lieu à irrecevabilité des conclusions de la SCI Teramo en date du 23 octobre 2023 ;

ECARTE les fins de non recevoir et déclare les demandes de la SCI Teramo recevables ;

CONFIRME le jugement en ce qu'il a débouté la SCI Teramo de ses demandes et l'a condamnée à payer à M. [L] [F] la somme de 2 500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens ;

L'INFIRME pour le surplus des dispositions soumises à la cour ;

Statuant à nouveau sur les points infirmés et y ajoutant,

DÉBOUTE M. [C] et la SCP Frédéric Brincourt Laurent Giustianini de leur demande de dommages-intérêts pour procédure abusive ;

DÉBOUTE la SCI Teramo de sa demande en application de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés devant la cour ;

CONDAMNe la SCI Teramo à payer à M. [L] [F] une indemnité de 2 500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais exposés en appel ;

DIT n'y avoir lieu à condamnation en application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de la SARL Beaumont, de M. [J] [I], de M. [X] [C] et de la SCP Frédéric Brincourt et Laurent Giustianini au titre des frais irrépétibles exposés en première instance et devant la cour ;

CONDAMNE la SCI Teramo aux entiers dépens d'appel et accorde aux avocats qui en ont fait la demande, le bénéfice de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRESIDENT