Décisions
CA Metz, 3e ch., 11 avril 2024, n° 22/01879
METZ
Arrêt
Autre
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
N° RG 22/01879 - N° Portalis DBVS-V-B7G-FZEX
Minute n° 24/00124
[I]
C/
[K]
Jugement Au fond, origine TJ de METZ, décision attaquée en date du 07 Juin 2022, enregistrée sous le n° 11-21-0540
COUR D'APPEL DE METZ
3ème CHAMBRE - TI
ARRÊT DU 11 AVRIL 2024
APPELANTE :
Madame [S] [I]
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentée par Me Philippe KAZMIERCZAK, avocat au barreau de METZ
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Partielle numéro 2022/004731 du 31/01/2023 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de METZ)
INTIMÉ :
Monsieur [L] [K]
[Adresse 4]
[Localité 2]
Représenté par Me Christine SALANAVE, avocat au barreau de METZ
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 08 Février 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés devant Mme GUIOT-MLYNARCZYK, Président de Chambre, qui a fait un rapport oral de l'affaire avant les plaidoiries.
A l'issue des débats, les parties ont été informées que la décision serait rendue par mise à disposition au greffe le 11 Avril 2024, en application du deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour composée de :
PRÉSIDENT : Mme GUIOT-MLYNARCZYK, Président de Chambre
ASSESSEURS : M. MICHEL, Conseiller
M. KOEHL, Conseiller
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Mme BAJEUX, Greffier
ARRÊT :
Contradictoire
Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;
Signé par Mme GUIOT-MLYNARCZYK, Présidente de Chambre, et par Mme BAJEUX, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSE DU LITIGE':
Par ordonnance du 29 mars 2021, le tribunal judiciaire de Metz a enjoint à Mme [S] [I] de payer à M. [L] [K] la somme de 5.000 euros en principal en vertu d'une reconnaissance de dette signée le 13 août 2021. Mme [I] a formé opposition le 7 mai 2021.
Devant le tribunal judiciaire, M. [K] a sollicité la condamnation de Mme [I] au paiement de la somme de 5.000 euros avec intérêts au taux légal à compter de la sommation interpellative du 2 octobre 2020 et d'une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Mme [I] a demandé au tribunal de prononcer la nullité de la reconnaissance de dette du 13 août 2020, débouter M. [K] de ses demandes et le condamner à lui payer la somme de 8.000 euros de dommages et intérêts et une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par jugement du 7 juin 2022, le tribunal judiciaire de Metz a'déclaré recevable l'opposition formée par Mme [I], mis à néant l'ordonnance d'injonction de payer et a :
- débouté Mme [I] de sa demande d'annulation de la reconnaissance de dette du 13 août 2020 et de sa demande reconventionnelle de dommages et intérêts
- condamné Mme [I] à verser à M. [K] la somme de 5.000 euros avec intérêts au taux légal à compter du 2 octobre 2020
- condamné Mme [I] à verser à M. [K] une indemnité de 600 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
Par déclaration d'appel déposée au greffe de la cour le 21 juillet 2022, Mme [I] a interjeté appel du jugement sauf en ce qu'il a déclaré recevable son opposition et mis à néant l'ordonnance portant injonction de payer du 29 mars 2021.
Aux termes de ses dernières conclusions du 21 octobre 2022, elle demande à la cour d'infirmer le jugement et de :
- prononcer la nullité de la reconnaissance de dette du 13 août 2020
- débouter M. [K] de l'ensemble de ses demandes
- condamner reconventionnellement M. [K] à lui payer une somme de 8.000 euros à titre de dommages et intérêts
- le condamner au paiement d'une somme de 2.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers de première instance et d'appel.
L'appelante soutient que l'intimé ne justifie pas de la créance qu'il invoque, qu'ils ont eu une relation intime, qu'il l'a harcelée pour apurer son passif, que le virement imposé par M. [K] en dépit de son refus résultait d'une intention libérale et que la reconnaissance de dette a été obtenue par contrainte et violence, l'intimé lui ayant occasionné des blessures avant de se livrer à un chantage et un harcèlement. Elle ajoute qu'aucune autorité ne s'attache au classement sans suite de sa plainte pénale, que les violences verbales et psychologiques sont caractérisées au vu des pièces produites et que le montant la reconnaissance de dette ne concorde pas avec celui réclamé, concluant à l'infirmation du jugement et au rejet de la demande.
Elle sollicite des dommages et intérêts pour le préjudice moral et matériel subi, au regard du harcèlement et violences qu'elle a subis, de son état dépressif réactionnel l'empêchant de reprendre son travail à temps plein, thérapeutique, des atteintes physiques et des pertes matérielles.
Aux termes de ses dernières conclusions du 9 janvier 2023, M. [K] demande à la cour de confirmer le jugement en toutes ses dispositions, débouter l'appelante de ses demandes et la condamner à lui payer la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel, y compris les frais d'injonction de payer et de sommation interpellative.
Il expose justifier de sa demande par les pièces produites, que Mme [I] ne prouve pas l'extorsion de son consentement par violence, contestant avoir été violent ou harcelant, qu'il lui a proposé son aide non pas pour lui donner de l'argent mais pour régler son assurance voiture, que la plainte pénale et les certificats médicaux sont postérieurs à la signification de l'injonction de payer et que la plainte a été classée sans suite. Il conteste les témoignages produits par l'appelante et soutient que la reconnaissance de dette a été établie en pleine connaissance de cause, sans aucune contrainte ni violence et que si sa créance est justifiée en son principe et son montant, il a entendu limiter sa demande à la somme reconnue par l'appelante.
Sur la demande reconventionnelle, il expose que l'appelante ne rapporte la preuve ni d'un dommage, ni d'un fait générateur, ni d'un lien de causalité, conteste être à l'origine de ses problèmes de santé, de la dégradation de son téléphone et l'avoir jamais fait travailler.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 12 octobre 2023.
MOTIFS DE LA DECISION':
Sur la demande en remboursement
Aux termes de l'article 1892 du code civil, le prêt de consommation est un contrat par lequel l'une des parties livre à l'autre une certaine quantité de choses qui se consomment par l'usage, à la charge pour cette dernière de lui en rendre autant de même espèce et qualité.
Selon l'article 1140 du même code, il y a violence lorsqu'une partie s'engage sous la pression d'une contrainte qui lui inspire la crainte d'exposer sa personne, sa fortune ou celles de ses proches à un mal considérable.
L'article1353 précise que celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver. Réciproquement celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.
En l'espèce, il résulte des pièces figurant au dossier que le 30 juillet 2020 M. [K] a effectué un virement d'un montant de 6.000 euros en faveur du compte bancaire de Mme [I]. Il n'est pas établi que ce versement a été imposé à l'appelante, aucun élément du dossier ne révélant que l'opération a été effectuée contre son gré ou par violence, alors qu'il ressort du SMS qu'elle le virement a été expressément sollicité par Mme [I] qui écrivait le jour même à l'intimé «'tu peux pas essayer le virement de nouveau'» puis le remerciait quelques heures plus tard alors qu'il s'était exécuté. Il n'est pas davantage démontré que la remise des fonds relève d'une intention libérale comme allégué. En effet, si dans plusieurs SMS l'intimé lui propose son soutien financier, il ne précise pas pour autant la nature ou les modalités de cette aide et il est relevé en outre que ces messages datés des 5, 6 et 15 juillet 2020, sont antérieurs de plusieurs semaines au virement litigieux et s'inscrivent dans une discussion ayant notamment pour objet le paiement de la prime d'assurance voiture de l'appelante que M. [K] justifie avoir ensuite réglée et dont il ne réclame pas le remboursement.
Mme [I] a établi le 13 août 2020 une reconnaissance de dette manuscrite pour le montant du virement dans laquelle elle s'est engagée à rembourser l'intégralité de cette somme le 15 août 2020. Si elle invoque la nullité pour avoir été extorqué par violences physiques, verbales et psychologiques, le premier juge a exactement estimé que ces violences ne sont pas établies, relevant à juste titre que les certificats médicaux produits sont postérieurs de plus de huit mois à la reconnaissance de dette, qu'aucun élément ne permet d'imputer l'état dépressif de Mme [I] et les fractures de deux dents à des agissements de l'intimé et que sa plainte a fait l'objet d'un classement sans suite au motif que les faits dénoncés n'ont pu être clairement établis par l'enquête. Aucun des témoignages produits par l'appelante ne fait état de la reconnaissance de dette et il est observé que les multiples SMS échangés entre les parties, contemporains à la signature de l'acte, ne l'évoquent pas non plus, notamment pour dénoncer une contrainte ou l'inexactitude de ses termes. Si en revanche dans un message du 1er septembre 2020, Mme [I] indique avoir été forcée à signer la reconnaissance, il est relevé que cette affirmation fait suite à des messages de M. [K] notamment des 29, 30 et 31 août 2020 demandant à être remboursé et qu'à plusieurs reprises l'appelante l'a informé par SMS, notamment des 28 et 29 août 2020 qu'elle lui rendrait l'argent («'je suis quelqu'un d'honnête ' ton fric tu l'auras'»), sans faire état de contrainte. Il s'ensuit que le jugement est confirmé en ce qu'il a débouté l'appelante de sa demande d'annulation de la reconnaissance de dette du 13 août 2020.
Un règlement de tout ou partie du solde de 5.000 euros que Mme [I] a déclaré devoir à l'intimé en suite de la sommation de payer interpellative qui lui a été délivrée le 2 octobre 2020, n'est ni établi, ni même allégué et l'existence d'un fait ayant produit l'extinction de l'obligation de remboursement n'est pas démontrée non plus. Le jugement est donc confirmé en ce qu'il a condamné l'appelante au paiement de ladite somme avec intérêt à compter du 2 octobre 2020.
Sur la demande de dommages et intérêts
L'article 1240 du code civil dispose que tout fait quelconque de l'homme qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.
C'est à juste titre que le premier juge a débouté l'appelante de sa demande de dommages et intérêts. Les violences physiques, verbales et psychologiques alléguées ne sont pas établies et la multitude de messages échangés ne procède pas uniquement de l'intimé mais aussi de l'appelante et ne caractérise pas le harcèlement dénoncé. Si certains de ces messages témoignent de relations chaotiques et de conversations parfois délétères, les propos employés à cette occasion sont vifs et blessants de part et d'autre. Les attestations produites ne sont pas plus probantes. L'objectivité de Mmes [G] [I] et [U] [W] est sujette à caution dès lors qu'elles sont respectivement la fille et la s'ur de l'appelante, M. [X] [J] et Mme [B] [T] qui n'ont pas rencontré M. [K], reprennent les dires de Mme [I] et si Mme [A] [M] indique le connaître personnellement, elle précise que c'est l'appelante qui lui a expliqué avoir été victime de violence verbale et physique et de harcèlement. Il n'est pas démontré par ailleurs que les problèmes de santé de l'appelante ont été causés par les agissements de l'intimé, notamment son état dépressif même si celui-ci est qualifié de «'réactionnel à un harcèlement de la part de son ex-conjoint'» par le Docteur [D] sans préciser pour autant si cette observation qui ne relève pas d'un examen médical, procède d'un constat personnel.
La dégradation du téléphone portable par l'intimé n'est objectivée par aucune pièce et il n'est pas davantage établi que l'appelante a travaillé en qualité d'aide à domicile au service de M. [K] sans la moindre rémunération. Le témoignage de Mme [G] [I] qui fait état de ce travail est sans réelle valeur probante et les quelques SMS échangés entre Mme [I] et une personne accueillie dans l'établissement de M. [K] ou encore avec celui-ci, notamment sur la possibilité de donner un médicament à un pensionnaire, ne permettent pas à eux seuls de caractériser l'exercice d'une activité pour le compte de l'intimé. En conséquence le jugement ayant rejeté la demande de dommages et intérêts est confirmé.
Sur les frais irrépétibles et les dépens
Les dispositions du jugement sur les frais irrépétibles et les dépens sont confirmées.
Mme [I], partie perdante, devra supporter les dépens d'appel qui comprendront les frais de la procédure d'injonction de payer, mais pas les frais de la sommation interpellative qui ne sont pas des frais indispensables à la procédure. Il est équitable qu'elle soit condamnée à verser à l'intimé la somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en sus de la somme déjà allouée en première instance. Il convient en outre de la débouter de sa propre demande de ce chef.
PAR CES MOTIFS :
LA COUR, statuant par arrêt contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition au greffe, conformément aux dispositions de l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
CONFIRME le jugement déféré en ce qu'il a débouté Mme [S] [I] de sa demande d'annulation de la reconnaissance de dette du 13 août 2020 et de sa demande reconventionnelle de dommages et intérêts et l'a condamnée à verser à M. [L] [K] la somme de 5.000 euros avec intérêts au taux légal à compter du 2 octobre 2020 et une indemnité de 600 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens';
Y ajoutant,
DÉBOUTE Mme [S] [I] de sa demande fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE Mme [S] [I] à payer à M. [L] [K] la somme de 1.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile;
CONDAMNE Mme [S] [I] aux dépens d'appel qui comprendront les frais de la procédure d'injonction de payer ;
DEBOUTE M. [L] [K] de sa demande de condamnation de Mme [S] [I] au paiement du coût de la sommation de payer interpellative du 2 octobre 2020.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
N° RG 22/01879 - N° Portalis DBVS-V-B7G-FZEX
Minute n° 24/00124
[I]
C/
[K]
Jugement Au fond, origine TJ de METZ, décision attaquée en date du 07 Juin 2022, enregistrée sous le n° 11-21-0540
COUR D'APPEL DE METZ
3ème CHAMBRE - TI
ARRÊT DU 11 AVRIL 2024
APPELANTE :
Madame [S] [I]
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentée par Me Philippe KAZMIERCZAK, avocat au barreau de METZ
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Partielle numéro 2022/004731 du 31/01/2023 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de METZ)
INTIMÉ :
Monsieur [L] [K]
[Adresse 4]
[Localité 2]
Représenté par Me Christine SALANAVE, avocat au barreau de METZ
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 08 Février 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés devant Mme GUIOT-MLYNARCZYK, Président de Chambre, qui a fait un rapport oral de l'affaire avant les plaidoiries.
A l'issue des débats, les parties ont été informées que la décision serait rendue par mise à disposition au greffe le 11 Avril 2024, en application du deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour composée de :
PRÉSIDENT : Mme GUIOT-MLYNARCZYK, Président de Chambre
ASSESSEURS : M. MICHEL, Conseiller
M. KOEHL, Conseiller
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Mme BAJEUX, Greffier
ARRÊT :
Contradictoire
Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;
Signé par Mme GUIOT-MLYNARCZYK, Présidente de Chambre, et par Mme BAJEUX, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSE DU LITIGE':
Par ordonnance du 29 mars 2021, le tribunal judiciaire de Metz a enjoint à Mme [S] [I] de payer à M. [L] [K] la somme de 5.000 euros en principal en vertu d'une reconnaissance de dette signée le 13 août 2021. Mme [I] a formé opposition le 7 mai 2021.
Devant le tribunal judiciaire, M. [K] a sollicité la condamnation de Mme [I] au paiement de la somme de 5.000 euros avec intérêts au taux légal à compter de la sommation interpellative du 2 octobre 2020 et d'une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Mme [I] a demandé au tribunal de prononcer la nullité de la reconnaissance de dette du 13 août 2020, débouter M. [K] de ses demandes et le condamner à lui payer la somme de 8.000 euros de dommages et intérêts et une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par jugement du 7 juin 2022, le tribunal judiciaire de Metz a'déclaré recevable l'opposition formée par Mme [I], mis à néant l'ordonnance d'injonction de payer et a :
- débouté Mme [I] de sa demande d'annulation de la reconnaissance de dette du 13 août 2020 et de sa demande reconventionnelle de dommages et intérêts
- condamné Mme [I] à verser à M. [K] la somme de 5.000 euros avec intérêts au taux légal à compter du 2 octobre 2020
- condamné Mme [I] à verser à M. [K] une indemnité de 600 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
Par déclaration d'appel déposée au greffe de la cour le 21 juillet 2022, Mme [I] a interjeté appel du jugement sauf en ce qu'il a déclaré recevable son opposition et mis à néant l'ordonnance portant injonction de payer du 29 mars 2021.
Aux termes de ses dernières conclusions du 21 octobre 2022, elle demande à la cour d'infirmer le jugement et de :
- prononcer la nullité de la reconnaissance de dette du 13 août 2020
- débouter M. [K] de l'ensemble de ses demandes
- condamner reconventionnellement M. [K] à lui payer une somme de 8.000 euros à titre de dommages et intérêts
- le condamner au paiement d'une somme de 2.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers de première instance et d'appel.
L'appelante soutient que l'intimé ne justifie pas de la créance qu'il invoque, qu'ils ont eu une relation intime, qu'il l'a harcelée pour apurer son passif, que le virement imposé par M. [K] en dépit de son refus résultait d'une intention libérale et que la reconnaissance de dette a été obtenue par contrainte et violence, l'intimé lui ayant occasionné des blessures avant de se livrer à un chantage et un harcèlement. Elle ajoute qu'aucune autorité ne s'attache au classement sans suite de sa plainte pénale, que les violences verbales et psychologiques sont caractérisées au vu des pièces produites et que le montant la reconnaissance de dette ne concorde pas avec celui réclamé, concluant à l'infirmation du jugement et au rejet de la demande.
Elle sollicite des dommages et intérêts pour le préjudice moral et matériel subi, au regard du harcèlement et violences qu'elle a subis, de son état dépressif réactionnel l'empêchant de reprendre son travail à temps plein, thérapeutique, des atteintes physiques et des pertes matérielles.
Aux termes de ses dernières conclusions du 9 janvier 2023, M. [K] demande à la cour de confirmer le jugement en toutes ses dispositions, débouter l'appelante de ses demandes et la condamner à lui payer la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel, y compris les frais d'injonction de payer et de sommation interpellative.
Il expose justifier de sa demande par les pièces produites, que Mme [I] ne prouve pas l'extorsion de son consentement par violence, contestant avoir été violent ou harcelant, qu'il lui a proposé son aide non pas pour lui donner de l'argent mais pour régler son assurance voiture, que la plainte pénale et les certificats médicaux sont postérieurs à la signification de l'injonction de payer et que la plainte a été classée sans suite. Il conteste les témoignages produits par l'appelante et soutient que la reconnaissance de dette a été établie en pleine connaissance de cause, sans aucune contrainte ni violence et que si sa créance est justifiée en son principe et son montant, il a entendu limiter sa demande à la somme reconnue par l'appelante.
Sur la demande reconventionnelle, il expose que l'appelante ne rapporte la preuve ni d'un dommage, ni d'un fait générateur, ni d'un lien de causalité, conteste être à l'origine de ses problèmes de santé, de la dégradation de son téléphone et l'avoir jamais fait travailler.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 12 octobre 2023.
MOTIFS DE LA DECISION':
Sur la demande en remboursement
Aux termes de l'article 1892 du code civil, le prêt de consommation est un contrat par lequel l'une des parties livre à l'autre une certaine quantité de choses qui se consomment par l'usage, à la charge pour cette dernière de lui en rendre autant de même espèce et qualité.
Selon l'article 1140 du même code, il y a violence lorsqu'une partie s'engage sous la pression d'une contrainte qui lui inspire la crainte d'exposer sa personne, sa fortune ou celles de ses proches à un mal considérable.
L'article1353 précise que celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver. Réciproquement celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.
En l'espèce, il résulte des pièces figurant au dossier que le 30 juillet 2020 M. [K] a effectué un virement d'un montant de 6.000 euros en faveur du compte bancaire de Mme [I]. Il n'est pas établi que ce versement a été imposé à l'appelante, aucun élément du dossier ne révélant que l'opération a été effectuée contre son gré ou par violence, alors qu'il ressort du SMS qu'elle le virement a été expressément sollicité par Mme [I] qui écrivait le jour même à l'intimé «'tu peux pas essayer le virement de nouveau'» puis le remerciait quelques heures plus tard alors qu'il s'était exécuté. Il n'est pas davantage démontré que la remise des fonds relève d'une intention libérale comme allégué. En effet, si dans plusieurs SMS l'intimé lui propose son soutien financier, il ne précise pas pour autant la nature ou les modalités de cette aide et il est relevé en outre que ces messages datés des 5, 6 et 15 juillet 2020, sont antérieurs de plusieurs semaines au virement litigieux et s'inscrivent dans une discussion ayant notamment pour objet le paiement de la prime d'assurance voiture de l'appelante que M. [K] justifie avoir ensuite réglée et dont il ne réclame pas le remboursement.
Mme [I] a établi le 13 août 2020 une reconnaissance de dette manuscrite pour le montant du virement dans laquelle elle s'est engagée à rembourser l'intégralité de cette somme le 15 août 2020. Si elle invoque la nullité pour avoir été extorqué par violences physiques, verbales et psychologiques, le premier juge a exactement estimé que ces violences ne sont pas établies, relevant à juste titre que les certificats médicaux produits sont postérieurs de plus de huit mois à la reconnaissance de dette, qu'aucun élément ne permet d'imputer l'état dépressif de Mme [I] et les fractures de deux dents à des agissements de l'intimé et que sa plainte a fait l'objet d'un classement sans suite au motif que les faits dénoncés n'ont pu être clairement établis par l'enquête. Aucun des témoignages produits par l'appelante ne fait état de la reconnaissance de dette et il est observé que les multiples SMS échangés entre les parties, contemporains à la signature de l'acte, ne l'évoquent pas non plus, notamment pour dénoncer une contrainte ou l'inexactitude de ses termes. Si en revanche dans un message du 1er septembre 2020, Mme [I] indique avoir été forcée à signer la reconnaissance, il est relevé que cette affirmation fait suite à des messages de M. [K] notamment des 29, 30 et 31 août 2020 demandant à être remboursé et qu'à plusieurs reprises l'appelante l'a informé par SMS, notamment des 28 et 29 août 2020 qu'elle lui rendrait l'argent («'je suis quelqu'un d'honnête ' ton fric tu l'auras'»), sans faire état de contrainte. Il s'ensuit que le jugement est confirmé en ce qu'il a débouté l'appelante de sa demande d'annulation de la reconnaissance de dette du 13 août 2020.
Un règlement de tout ou partie du solde de 5.000 euros que Mme [I] a déclaré devoir à l'intimé en suite de la sommation de payer interpellative qui lui a été délivrée le 2 octobre 2020, n'est ni établi, ni même allégué et l'existence d'un fait ayant produit l'extinction de l'obligation de remboursement n'est pas démontrée non plus. Le jugement est donc confirmé en ce qu'il a condamné l'appelante au paiement de ladite somme avec intérêt à compter du 2 octobre 2020.
Sur la demande de dommages et intérêts
L'article 1240 du code civil dispose que tout fait quelconque de l'homme qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.
C'est à juste titre que le premier juge a débouté l'appelante de sa demande de dommages et intérêts. Les violences physiques, verbales et psychologiques alléguées ne sont pas établies et la multitude de messages échangés ne procède pas uniquement de l'intimé mais aussi de l'appelante et ne caractérise pas le harcèlement dénoncé. Si certains de ces messages témoignent de relations chaotiques et de conversations parfois délétères, les propos employés à cette occasion sont vifs et blessants de part et d'autre. Les attestations produites ne sont pas plus probantes. L'objectivité de Mmes [G] [I] et [U] [W] est sujette à caution dès lors qu'elles sont respectivement la fille et la s'ur de l'appelante, M. [X] [J] et Mme [B] [T] qui n'ont pas rencontré M. [K], reprennent les dires de Mme [I] et si Mme [A] [M] indique le connaître personnellement, elle précise que c'est l'appelante qui lui a expliqué avoir été victime de violence verbale et physique et de harcèlement. Il n'est pas démontré par ailleurs que les problèmes de santé de l'appelante ont été causés par les agissements de l'intimé, notamment son état dépressif même si celui-ci est qualifié de «'réactionnel à un harcèlement de la part de son ex-conjoint'» par le Docteur [D] sans préciser pour autant si cette observation qui ne relève pas d'un examen médical, procède d'un constat personnel.
La dégradation du téléphone portable par l'intimé n'est objectivée par aucune pièce et il n'est pas davantage établi que l'appelante a travaillé en qualité d'aide à domicile au service de M. [K] sans la moindre rémunération. Le témoignage de Mme [G] [I] qui fait état de ce travail est sans réelle valeur probante et les quelques SMS échangés entre Mme [I] et une personne accueillie dans l'établissement de M. [K] ou encore avec celui-ci, notamment sur la possibilité de donner un médicament à un pensionnaire, ne permettent pas à eux seuls de caractériser l'exercice d'une activité pour le compte de l'intimé. En conséquence le jugement ayant rejeté la demande de dommages et intérêts est confirmé.
Sur les frais irrépétibles et les dépens
Les dispositions du jugement sur les frais irrépétibles et les dépens sont confirmées.
Mme [I], partie perdante, devra supporter les dépens d'appel qui comprendront les frais de la procédure d'injonction de payer, mais pas les frais de la sommation interpellative qui ne sont pas des frais indispensables à la procédure. Il est équitable qu'elle soit condamnée à verser à l'intimé la somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en sus de la somme déjà allouée en première instance. Il convient en outre de la débouter de sa propre demande de ce chef.
PAR CES MOTIFS :
LA COUR, statuant par arrêt contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition au greffe, conformément aux dispositions de l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
CONFIRME le jugement déféré en ce qu'il a débouté Mme [S] [I] de sa demande d'annulation de la reconnaissance de dette du 13 août 2020 et de sa demande reconventionnelle de dommages et intérêts et l'a condamnée à verser à M. [L] [K] la somme de 5.000 euros avec intérêts au taux légal à compter du 2 octobre 2020 et une indemnité de 600 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens';
Y ajoutant,
DÉBOUTE Mme [S] [I] de sa demande fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE Mme [S] [I] à payer à M. [L] [K] la somme de 1.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile;
CONDAMNE Mme [S] [I] aux dépens d'appel qui comprendront les frais de la procédure d'injonction de payer ;
DEBOUTE M. [L] [K] de sa demande de condamnation de Mme [S] [I] au paiement du coût de la sommation de payer interpellative du 2 octobre 2020.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT