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Décisions

CA Riom, 3e ch. civ. et com., 8 novembre 2023, n° 22/00010

RIOM

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Acilam (SAS), Etilam (SAS)

Défendeur :

Forterro France (SAS), Allianz Iard (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Dubled-Vacheron

Conseillers :

Mme Theuil-Dif, Mme Dufayet

Avocats :

Me Lacquit, Me Douillard, Me Gutton Perrin, Me Rousseau, Me Vignancour-de-Barruel, Me Chatain

T. com. Clermont-Ferrand, du 16 sept. 20…

16 septembre 2021

Le groupe ACILAM est spécialisé dans le laminage à froid de feuillards de précision en aciers et inox, nus et revêtus.

Cette société est la société mère des sociétés ACIERS COSTE et ETILAM.

La société SYLOB est spécialisée dans le développement et le déploiement de progiciels de gestion intégrée (la société SYLOB a été absorbée par la société SILOG laquelle a changé de dénomination pour devenir la société FORTERRO France.).

La société SYLOB est assurée par la société Allianz IARD au titre de sa responsabilité civile professionnelle.

Souhaitant renouveler son système de gestion informatique et permettre la gestion intégrée de ses différentes entités, la société ACILAM a fait appel en 2013 aux services de la société SYLOB pour la réalisation et le déploiement d'un ERP (Enterprise Resource Planning). La société ACIERS COSTE utilisait jusque-là le prologiciel SYLOB7 développé par la société SYLOB et la société ETILAM rachetée à la société ARCELOR MITTAL en 2013, utilisait le système informatique SAP d'ARCELOR MITTAL. Suite au rachat de l'entreprise, cette utilisation devait prendre fin au mois de septembre 2014.

Dans ce contexte, la société ACILAM a transmis un cahier des charges à la société SYLOB au mois de décembre 2013 et un contrat a été signé le 4 février 2014 prévoyant:

' un démarrage au cours du mois de juillet 2014 pour le site de la société ETILAM, site pilote, puis en autonomie sur les deux autres sites des sociétés GORCY et ACIERS COSTE au cours du mois de septembre 2014 ;

' un coût estimatif évalué à 249 643 euros HT et plafonné à 258 193 euros HT hors frais de déplacement.

Ce contrat a fait l'objet de plusieurs avenants pour un montant total de 46 800 euros HT s'ajoutant au montant initialement convenu.

Déplorant des retards dans la mise en oeuvre du projet et des dysfonctionnements coûteux en temps et en personnels, la société ACILAM a proposé un plan d'action. Le 13 octobre 2014, la société SYLOB a acté le non-respect des délais convenus et proposé d'arrêter le démarrage du site pilote au 20 octobre 2014. Un nouveau calendrier a ensuite été convenu pour un démarrage du site pilote début décembre.

Au mois d'avril 2015, la société ACILAM s'est plainte auprès de la société SYLOB de dysfonctionnements majeurs, d'un projet non abouti, de l'impossibilité de mettre en oeuvre les synergies du groupe que devait permettre le déploiement d'un ERP. Elle a reproché à la société SYLOB de conditionner l'exécution de ses obligations au paiement de factures contestées et à la signature d'un nouveau contrat accessoire au contrat initial ayant pour objet la mise en place d'une assistance post déploiement.

Pour éviter une discontinuité de service, la société ACILAM a demandé le transfert du prologiciel SYLOB sur un serveur virtuel. La société SYLOB a refusé d'intervenir faute pour la société ACILAM d'avoir réglé une facture de 47 456.74 euros.

De son côté, la société ACILAM a invoqué le bénéfice de l'exception d'inexécution pour suspendre le paiement de cette facture.

A la demande de la société ACILAM, le président du tribunal de commerce de Chaumont a, par ordonnance du 12 août 2015, ordonné en référé une expertise et désigné pour y procéder M. [P].

Parallèlement les parties sont parvenues à établir les 3 et 14 septembre 2015 un protocole transactionnel. La liste des points à traiter ainsi qu'un calendrier d'exécution figurent en annexe de ce protocole. Cet accord n'étant pas respecté les mesures d'expertise ont repris leur cours et M. [P] a conclu son compte-rendu de seconde réunion d'expertise comme suit :

« 1 Il apparait clairement que la société SYLOB n'a pas mesuré correctement l'étendue des différences entre le cahier des charges et le standard SYLOB9, comme cela ressortait déjà de la première réunion d'expertise.

2 L'infrastructure informatique et le réseau d'ACILAM sont modernes et performants. Les lenteurs et crash de l'ERP ne lui sont pas imputables.

3 ACILAM a fait confiance à SYLOB qui « connaissait le métier du Groupe ».

4 L'architecture de l'ERP est mal pensée, avec par exemple les caractéristiques des produits, stockées dans une table séparée avec une gestion en ligne, ce qui ralenti considérablement les requêtes.

5 Il est nécessaire d'utiliser Excel ou Access en complément de SYLOB9, qui n'est donc pas un progiciel métier complètement intégré, ce qui était une demande de base dans le cahier des charges.

6 Le module traçabilité présente encore, au 15 mars 2017, des bugs lors de l'édition d'étiquettes.

7 Le module Eurofactor n'est pas complètement déployé au 15 mars 2017.

8 Le module de planification à capacité finie n'est pas utilisable de manière satisfaisante au 15 mars 2017 et plante dès que l'on demande une planification sur trois jours avec deux critères.

9 L'arrêté de stock ne fonctionne pas au 15 mars 2017.

10 La méthode de chiffrage du préjudice utilisée est cohérente. Il reste à définir clairement une date de début pour le calcul du retard de déploiement. »

La société SYLOB, a alors déclaré un sinistre auprès de son assureur, la société ALLIANZ qui a assigné en référé les sociétés ACILAM et SYLOB aux fins que les mesures d'expertise lui soient déclarées communes et opposables et que la mission de l'expert soit modifiée.

Par ordonnance du 21 juin 2017, le président du tribunal de commerce de Chaumont a fait droit aux demandes de la société ALLIANZ.

L'expert a déposé son rapport définitif le 28 septembre 2020 et conclut en substance après réponses aux dires déposés en cours d'expertise :

-que le cahier des charges a été respecté ;

-qu'ACILAM est entièrement responsable du dérapage du planning à partir du mois de juin 2014

-que la société SYLOB a correctement évalué les besoins exprimés par ses clients et répondu aux besoins exprimés ; qu'elle a agi dans les règles de l'art du marché des prologiciels informatiques et n'a pas failli à ses obligations de conseils.

Par exploits d'huissier de justice des 27 et 30 septembre 2019, les sociétés ACILAM et ETILAM ont fait assigner la société SYLOB et son assureur devant le tribunal de commerce de Clermont-Ferrand aux fins qu'il soit statué sur le fond du dossier et plus précisément sur les préjudices subis par les appelantes et leur indemnisation.

Par jugement du 16 septembre 2021, le tribunal de commerce de Clermont-Ferrand a notamment :

-débouté la société ACILAM des demandes formulées au titre du dol et de la résolution du contrat ;

-condamné la société SYLOB à payer à la société ACILAM la somme de 25 584 euros;

-condamné la société ACILAM à payer à la société SYLOB la somme de 198 981,49 euros.

Suivant déclaration du 22 décembre 2021, les sociétés ACILAM et ETLAM ont relevé appel de cette décision.

Aux termes de conclusions notifiées par RPVA le 26 avril 2023, elles demandent à la cour de :

In limine litis ' sur la nullité de la procédure d'expertise :

' infirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Clermont-Ferrand le 16 septembre 2021 en ce qu'il a les a déboutées de leur demande tendant à voir prononcer la nullité des opérations d'expertise ;

Et, jugeant à nouveau :

' prononcer la nullité des opérations d'expertise et du rapport d'expertise ;

' a titre subsidiaire, écarter le rapport d'expertise ;

A titre principal, sur la nullité du contrat pour cause de dol :

- infirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Clermont-Ferrand le 16 septembre 2021 en ce qu'il a :

- « dit que le contrat conclu le 4 février 2014 entre la SAS ACILAM et la SAS SYLOB est valable et opposable aux parties, et que la SAS SYLOB n'a manqué ni à son obligation de conseil ni à son obligation de délivrance » ;

- « débouté la SAS ACILAM de ses demandes à titre principal sur le prétendu dol » ;

Et, jugeant à nouveau :

- juger que le consentement de la société ACILAM est vicié dès lors que la société SYLOB a usé de manoeuvres dolosives pour l'obtenir ;

- prononcer la nullité du contrat conclu entre les sociétés ACILAM et SYLOB le 4 février 2014 ;

-condamner en conséquence la société FORTERRO FRANCE, venue aux droits de la société SYLOB, in solidum avec la société ALLIANZ, à payer à la société ACILAM la somme de 15 570 766 € en réparation de ses préjudices.

A titre subsidiaire, sur les manquements de la société SYLOB à ses obligations contractuelles

-Infirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Clermont-Ferrand le 16 septembre 2021 en ce qu'il a :

- « dit que le contrat conclu le 4 février 2014 entre la SAS ACILAM et la SAS SYLOB est valable et opposable aux parties, et que la SAS SYLOB n'a manqué ni à son obligation de conseil ni à son obligation de délivrance » ;

- « débouté la SAS ACILAM de ses demandes à titre subsidiaire sur les prétendus manquements contractuels de la SAS SYLOB » ;

Et, jugeant à nouveau :

-dire que la société SYLOB a manqué à son devoir de conseil et de renseignement ainsi qu'à son obligation de délivrance conforme ;

-prononcer la résolution judiciaire du contrat conclu entre les sociétés ACILAM et SYLOB le 4 février 2014;

-condamner en conséquence la société FORTERRO FRANCE, venue aux droits de la société SYLOB, in solidum avec la société ALLIANZ, à payer à la société ACILAM la somme de 15 570 766 € en réparation de ses préjudices ;

En tout état de cause, sur les demandes reconventionnelles de la société SYLOB:

-infirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Clermont-Ferrand le 16 septembre 2021 en ce qu'il a :

- « dit que les demandes d'indemnisations formulées par la SAS SYLOB ne sont pas prescrites » ;

- « condamné la SAS ACILAM à payer et porter à la SAS SYLOB la somme totale de 198 981,49 € en réparation des préjudices subis par cette dernière dans le cadre de la mise en place de l'ERP SYLOB9 et au titre des factures impayées dans le cadre du contrat conclu entre ces sociétés le 4 février 2014 » ;

Et, jugeant à nouveau :

-juger, à titre principal, que les demandes formulées par la société FORTERRO FRANCE, venue aux droits de la société SYLOB, au titre de l'indemnisation des préjudices sont prescrites ;

-juger, à titre subsidiaire, que les demandes formulées par la société FORTERRO FANCE, venues aux droits de la société SYLOB, ne sont pas fondées ;

-débouter en conséquence la société FORTERRO FRANCE, venue aux droits de la société SYLOB, de ses demandes indemnitaires ;

Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens :

-infirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Clermont-Ferrand le 16 septembre 2021 en ce qu'il a :

- condamné la société ACILAM à payer et porter à la société SYLOB et à la société ALLIANZ la somme de 10 000 € chacune au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné la société ACILAM à hauteur de 90% et la société SYLOB à hauteur de 10% aux entiers dépens de l'instance comprenant le coût de l'expertise judiciaire et les frais de greffe.

Exposé du litige

Et, jugeant à nouveau :

-condamner la société FORTERRO FRANCE, venue aux droits de la société SYLOB, in solidum avec la société ALLIANZ, à verser à chacune des sociétés ACILAM et ETILAM la somme de 90 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

-condamner la société FORTERRO FRANCE, venue aux droits de la société SYLOB, in solidum avec la société ALLIANZ, aux entiers dépens de première instance et d'appels distraits, pour ces derniers, au profit de Maître Sophie Lacquit, avocat en son affirmation de droit.

En tout état de cause:

Rejeter toutes demandes contraires.

Aux termes de ses conclusions N°2 notifiées le 16 mars 2023, la société FORTERRO France demande à la cour au visa des articles 167, 276, 282 et suivants du code de procédure civile, 1116, 1134, 1135, 1147, 1149, 1184, 1602, 1603 et 1604 du code civil dans leur rédaction à celle de l'ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016, 2224, 2239, 2240 et 2241 du code civil, de :

-confirmer le jugement prononcé le 16 septembre 2021 par le tribunal de commerce de Clermont-Ferrand en ce qu'il :

Débouté les sociétés ACILAM et ETILAM de leur demande de nullité des opérations d'expertise et du rapport déposé,

Dit que le contrat conclu le 4 février 2014 entre la SAS ACILAM et la SAS SYLOB est valable et opposable aux parties, et que la SAS SYLOB n'a manqué ni à son obligation de conseil ni à son obligation de délivrance,

Déboute la SAS ACILAM de ses demandes à titre principal sur le prétendu dol,

Déboute la SAS ACILAM de ses demandes à titre subsidiaire sur les prétendus manquements contractuels de la SAS SYLOB,

Dit que les demandes d'indemnisation formulées par la SAS SYLOB ne sont pas prescrites,

Dit que le contrat conclu entre la SAS SYLOB et la SAS ACILAM a été valablement exécuté par la SAS SYLOB, à l'exception des obligations ayant été reconnues comme griefs à son encontre aux termes du rapport communique par l'expert judiciaire,

Condamne la SAS SYLOB à payer et porter à la SAS ACILAM la somme de 25 584 euros en règlement des préjudices subis dans le cadre de la mise en place de I'ERP SYLOB9,

Dit que la garantie de la société ALLIANZ IARD n'a vocation à être mobilisée que dans les limites des conditions, plafonds, déductions et exclusions de la police d'assurance Responsabilité Civile souscrite par la SAS SYLOB ;

A titre subsidiaire,

Si la cour devait prononcer la nullité des opérations d'expertise et du rapport déposé au greffe du tribunal de commerce de Chaumont le 28 septembre 2020 par M. l'expert [P] :

-Conserver aux débats à titre de pièce le rapport déposé au greffe du tribunal de commerce de Chaumont le 28 septembre 2020 par M. l'expert [P], car il est corroboré par de nombreuses pièces versées par les parties ;

Pour le surplus, réformer le jugement prononcé le 16 septembre 2021 par le tribunal de commerce de Clermont -Ferrand en ce qu'il :

Condamne la SAS ACILAM à payer et porter à la SAS SYLOB la somme totale de 198 981,49 en réparation des préjudices subis par cette dernière dans la mise en place de l'ERP SYLOB9 et au titre des factures impayées dans le cadre du contrat conclu entre ces sociétés le 4 février 2014,

Condamne la SAS ACILAM à payer et porter à la SAS SYLOB la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Et, statuant à nouveau :

-Condamner la société ACILAM à lui verser les sommes suivantes :

* 381.845, 67 euros en réparation des préjudices subis du fait des violations par la société ACILAM de ses obligations découlant du contrat conclu le 4 février 2014 entre les sociétés SYLOB et ACILAM et de ses suites, ayant été reconnus comme des griefs à son encontre aux termes du rapport communiqué le 28 septembre 2020 par M. l'expert [I] [P];

*53.343,49 euros au titre des factures impayées émises au titre du contrat conclu le 4 février 2014 entre les sociétés SYLOB et ACILAM ;

-Condamner in solidum les sociétés ACILAM et ETILAM à lui verser chacune la somme de 80.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre l'intégralité des dépens de l'expertise conduite par M. [I] [P] et condamner notamment les sociétés ACILAM et ETILAM à lui rembourser la somme de 12.000 euros versée en décembre 2019 par la société SYLOB pour assurer la poursuite des opérations d'expertise ;

Condamner in solidum les sociétés ACILAM et ETILAM à payer les dépens de l'instance.

Par conclusions déposées et notifiées le 17 juin 2022, la SA Allianz IARD demande à la cour, au visa des articles 9 et 276 du code de procédure civile ainsi que les anciens articles 1134 et 1150 du code civil, de :

-Confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a alloué à ACILAM une somme de 25.584 euros, mise à la charge d'Allianz au titre de la mobilisation de sa garantie d'assurance,

Statuant à nouveau sur ce dernier point :

-Débouter les appelantes de l'intégralité de leurs demandes financières

Subsidiairement,

-Réduire le montant mis à sa charge à la somme de 24.084 euros, après application de la franchise contractuelle de 1.500 euros applicable en vertu de la police souscrite par SYLOB et opposable par principe aux tiers ;

A titre très infiniment subsidiaire :

-Si par impossible la cour devait infirmer le jugement entrepris et considérer que SYLOB encourt une part de responsabilité devant la conduire à indemniser les appelantes d'un préjudice allant au-delà de celui fixé par le tribunal, dire que sa garantie n'aurait vocation à être mobilisée que dans les limites des conditions, plafonds, déductions et exclusions de la police d'assurance RC souscrite par SYLOB.

En tout état de cause :

-Condamner ACILAM et ETILAM à lui payer une somme de 122.479,60 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Il sera renvoyé aux conclusions des parties pour plus ample exposé de leurs moyens.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 25 mai 2023.

Motivation :

I-In limine litis ' sur la nullité de la procédure d'expertise :

Suivant les dispositions de l'article 175 du code de procédure civile « la nullité des décisions et actes d'exécution relatifs aux mesures d'instruction est soumise aux dispositions qui régissent la nullité des actes de procédure »

L'article 117 du code de procédure civile énumère limitativement les exceptions de nullité pour vice de fond, au titre desquelles figure le défaut de pouvoir ou de capacité d'une partie ou d'un représentant d'une partie.

A défaut, l'article 114 du code de procédure civile soumet la nullité des actes pour vice de forme à la l'existence d'un texte prévoyant expressément la cause de nullité (sauf violation d'une formalité d'ordre public ou d'une formalité substantielle) et d'un grief, entendu comme une désorganisation des droits de la défense.

En l'espèce, la société ACILAM soulève la nullité du rapport d'expertise au visa des articles 237, 239 et 175 du code de procédure civile.

Elle reproche à l'expert d'avoir, en cours de mission, radicalement modifié sa position, reniant les déclarations faites par la société SYLOB lors de la première réunion d'expertise et la portée de l'accord transactionnel intervenu entre les parties en septembre 2015.

C'est donc un manque d'objectivité que la société ACILAM reproche à l'expert, ainsi qu'elle a pu le faire dans les nombreux dires adressés à ce dernier.

La cour observe que :

- la première réunion a eu lieu le 30 août 2016. Or le 19 décembre 2018, le conseil de la société ACILAM a confirmé au magistrat chargé du contrôle des expertises qu'il ne sollicitait pas la récusation de l'expert alors même qu'il indiquait dans une requête du mois de décembre 2019 que l'expert « est confronté à des difficultés manifestes dans la conduite de la procédure qui le conduisent manifestement à manquer à ses devoirs notamment au respect des délais impartis et au devoir d'accomplir sa mission avec conscience, objectivité et impartialité. »

-par deux ordonnances des 1er février 2019 et 14 mars 2019, le magistrat chargé des opérations d'expertises a confirmé l'expert dans sa mission. Ce magistrat a effectué plusieurs réunions ayant permis aux parties d'exposer leurs griefs.

La question de l'objectivité de l'expert a été déjà examinée et le magistrat chargé du contrôle de l'expertise n'a pas discerné dans l'attitude de M. [P] de motif permettant de légitimer son remplacement.

La société ACILAM évoque une volteface de l'expert.

A l'issue de la première réunion, M. [P] a pu effectivement indiquer :

« 1-Il apparaît clairement que SYLOB n'a pas mesuré correctement l'étendue des différences entre le cahier des charges d'ETILAM/ACILAM et le standard SYLOB9.

2-SYLOB dit que le cahier des charges était trop léger et souligne par exemple la difficulté du module de traçabilité. SYLOB a pourtant effectué un audit, payant, en 2014, pour préparer la migration de SYLOB 7 à SYLOB9.

3-les deux parties reconnaissent une « erreur de casting évidente » dès le départ, avec le directeur de projet mis en place par SYLOB, M. [Y] [R].

4-la situations s'est très nettement améliorée depuis janvier 2016 et l'arrivée de M. [D] comme chef de projet.

5-une signature le 4 février pour un démarrage en juillet, juste avant une période de congé avec deux mois d'analyse préalable avant les analyses détaillées, et trop optimiste : un projet de migration d'ERP nécessite raisonnablement 10 à 12 mois comme cela a été confirmé par M. [D].

6-Mme [N] a indiqué que toutes les ressources humaines nécessaires ont été allouées. Elle reconnaît cependant que « ça a été un peu juste ». Elle évoque « à un moment, une salle de huit personnes pour ACILAM, au mois de septembre 2015, pendant deux mois ». SYLOB9 est donc très éloigné du cahier des charges pour en arriver à ces chiffres, après plus d'un an de retard de déploiement. »

Cependant, sauf à méconnaître le fait que l'analyse des dysfonctionnements survenus dans la conception et le déploiement d'un ERP suppose le recueil d'un grand nombre d'éléments techniques ainsi que la confrontation des dires des parties pour permettre à l'expert de se forger un avis précis sur les causes du litige, l'évolution de l'expert dans l'analyse du dossier ne permet pas de caractériser un manque d'objectivité ou d'impartialité de sa part.

La société ACILAM fait valoir que l'expert n'aurait retenu que les griefs formulés par le donneur d'ordre ne pouvant ou n'ayant pas été traités par le prestataire.

Cependant, l'expert s'est livré à une analyse détaillée de la chronologie des relations contractuelles et du déploiement de l'ERP et décrit précisément la méthodologie employée dans le cadre de l'expertise.

Il n'est pas démontré qu'il ait ignoré les remarques ou les dires formulés par les appelants.

Ainsi, la société ACILAM ne démontre pas en quoi l'expert aurait manqué à son devoir d'objectivité et ne rapporte aucune preuve selon laquelle ce dernier aurait été influencé ou aurait fait preuve de partialité.

Par ailleurs, il convient de rappeler qu'une irrégularité de forme n'est pas de nature à entraîner la nullité s'il n'est pas démontré qu'elle a eu un effet négatif sur les droits des parties. En l'espèce, les appelantes ne rapportent pas la preuve que le comportement de l'expert leur aurait causé un grief, entendu comme une désorganisation des droits de la défense. Elles ont été destinataires des documents relatifs à l'expertise et ont été mises en capacité de présenter des observations et de répondre à celles qui leur étaient adressées.

Il est également soutenu que l'expert a nié la portée de l'accord transactionnel intervenu le 2 septembre 2015.

La chronologie des évènements permet de constater que les relations entre les parties se sont tendues en avril-mai 2015. Alors que l'expert était désigné par ordonnance du 12 août 2015, les parties se sont rapprochées pour établir le 2 septembre un protocole aux termes duquel :

- elles rappellent la naissance des relations contractuelles,

-signalent le retard de démarrage de l'ERP sur le site ETILAM « pour des raisons que les parties n'entendent pas développer dans le présent acte ».

-soulignent leur volonté de poursuivre leurs relations commerciales

-établissent la liste des points à traiter et un calendrier

-désignent les personnes en charge du pilotage du projet

-prévoient la souscription par ACILAM d'une extension de garantie ainsi que les conditions de règlements des factures des états réalisés par SYLOB ;

-conviennent que la société ACILAM renoncera à se prévaloir d'un quelconque préjudice sous réserve de la parfaite exécution par SYLOB de ses obligations.

Ce protocole n'emporte pas reconnaissance par la société SYLOB de l'ensemble des griefs soulevés par les sociétés ACILAM et ETILAM.

L'expert s'est livré à une analyse globale des difficultés rencontrées par les parties avant et après le mois de septembre 2015. Il apparaît en effet que le compte-rendu de la réunion des 12 et 13 novembre 2014, après la mise en production, portait sur des optimisations des modules de traçabilité et de sous-traitance ainsi que sur des actions à mener par ACILAM qui, faisant usage du terme optimisation, reconnaissait alors que le logiciel était conforme aux besoins exprimés dans le cahier des charges, à l'analyse préalable et aux analyses détaillées.

De besoins nouveaux sont apparus et des demandes d'améliorations et d'optimisation ont été exprimées lors des sessions de recette. Le protocole du mois de septembre 2015 montre ainsi que 24 points n'étaient pas inscrits au périmètre initial du projet.

Dès lors, l'expert ne pouvait figer son analyse au protocole transactionnel et devait prendre en compte l'ensemble du processus de déploiement de l'ERP. Ce faisant, il n'a pas failli à son obligation d'impartialité et d'objectivité.

Le moyen suivant lequel, l'incapacité de la société SYLOB à éclairer immédiatement l'expert sur son propre projet traduirait sans conteste « sa totale incompétence » est sans lien avec la valeur du rapport d'expertise.

La compagnie Allianz est intervenue après que la société SYLOB a établi une déclaration de sinistre.

Elle a obtenu du tribunal une modification de la mission d'expertise, pour qu'il soit tenu compte des griefs de l'ensemble des parties, élargissant ainsi le champ d'examen de l'expert judiciaire.

Le fait de bénéficier d'une assistance juridique et technique au cours des opérations d'expertise pour faire valoir au mieux son point de vue et d'avoir ainsi emporté sur certains point la conviction de l'expert, ne traduit pas ipso facto l'incompétence technique de la société SYLOB.

Enfin, il n'est pas démontré que l'expert a excédé les limites de sa mission.

La demande de nullité du rapport d'expertise et celle tendant à le voir écarté des débats ont été justement rejetées par le tribunal. Le jugement sera confirmé sur ce point.

II. Sur la demande principale de nullité du contrat pour cause de dol :

Les sociétés ACILAM et ETILAM exposent que le projet de déploiement d'un nouvel ERP est né du changement de dimension du groupe ACILAM. La société SYLOB apparaissait comme un partenaire privilégié connaissant le groupe ACILAM pour lui fournir le prologiciel SYLOB 7. Ce prologiciel était utilisé par les ACIERS COSTE situés à [Localité 9].

La société ETILAM utilisait les ressources informatiques du groupe ARCELOR MITTAL dont elle faisait précédemment partie. Elle avait à sa disposition un ERP SAP, dont le maintien jusqu'en septembre 2014 avait été négocié lors de son rachat.

Les appelantes soutiennent que dans ce contexte, il était essentiel pour la société ACILAM de disposer d'un ERP répondant au changement de dimension du groupe, pour gérer un groupe multi-sociétés et multi-sites, et ce dans un calendrier restreint. Le cahier des charges contenait tous les points déterminants du consentement d'ACILAM.

Il est fait grief à la société SYLOB :

1-d'avoir menti en présentant SYLOB9 comme une application multi-sociétés et multi-sites alors que cette fonctionnalité n'était pas gérée par SYLOB 9 lors de la signature du contrat puisque c'est la seconde version de SYLOB 9 qui possédait cette fonctionnalité. Cette carence, sur une donnée déterminante du consentement d'ACILAM a été dénoncée dès le 30 avril 2015 époque à laquelle les appelantes ne souhaitaient pas obtenir la nullité du contrat.

2- d'avoir eu conscience que le temps alloué au projet ne serait pas de 5 mois mais de 10 à 12 mois et d'avoir délibérément dissimulé cette information en s'engageant à déployer le progiciel sur les trois sites en septembre 2014.

3- d'avoir certifié que cette solution serait déployée par un chef de projet ayant une expérience cumulée de dizaine de projets alors que ce dernier n'était pas rompu au fonctionnement de SYLOB 9, ce que la société SYLOB a reconnu en admettant « une erreur de casting »

Les intimés répliquent en substance :

-que les conditions de la reconnaissance du dol et de sa sanction sont restrictives ;

-qu'aucune des prétendues manoeuvres dolosives invoquées par les appelantes n'existe;

-que l'ERP SYLOB9 disposait au moment de la conclusion du contrat avec ACILAM d'un module multi-sociétés pleinement fonctionnel et déjà utilisé ; qu'ACILAM a disposé de l'architecture de multi-sociétés en monobase, telle que décrite dans le guide de paramétrage en juin 2014 ;

-que le contrat ne prévoyait pas de planning impératif mais un planning prévisionnel ; ACILAM s'est abstenue de porter à la connaissance de SYLOB l'information essentielle selon laquelle elle avait un impératif absolu en novembre 2014, elle n'a par ailleurs pas clairement exprimé ses besoins ;

- que si le chef de projet ne bénéficiait pas d'une expérience suffisante pour le logiciel SYLOB9, pour autant l'expert et les juges de 1ère instance ont estimé qu'ACILAM était entièrement responsable du planning prévisionnel ; que l'expert impute le retard pris dans le déploiement de SYLOB9 aux défaillances d'ACILAM.

-que les appelantes ne rapportent aucune démonstration de fond concernant le prétendu dol à propos de la rédaction du contrat.

Sur ce :

L'ancien article 1109 du code civil applicable à l'espèce, dispose « qu'il n'y a point de consentement valable, si le consentement n'a été donné que par erreur, ou s'il a été extorqué par violence ou surpris par dol »

L'ancien article 1116 du code civil précise que « le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les manoeuvres pratiqués par l'une des parties sont telles, qu'il est évident que, sans ces manoeuvres, l'autre partie n'aurait pas contracté. Il ne se présume pas et doit être prouvé ».

Selon l'ancien article 1117 du code civil, la convention contractée par violence, erreur ou dol donne lieu à une action en nullité ou en rescision.

La caractérisation du dol nécessite donc la démonstration de manoeuvres dolosives ou de mensonges, d'une intention dolosive ayant provoqué une erreur déterminante du consentement et émanant de son cocontractant

Aux termes de son rapport l'expert indique que deux solutions ont été proposées à ACILAM : soit le logiciel SYLOB7 était déployé sur tout le site appelé ensuite à migrer en version 9, soit la version 9 était mise en place sur le nouveau site (avec un délai plus long) avant d'être déployée sur les autres sites.

La société ACILAM ne conteste pas que la proposition commerciale qui lui a été communiquée le 31 janvier 2014 correspondait en tous points à son cahier des charges. L'expert souligne qu'elle l'a validée sans réserve et qu'elle a validé les analyses détaillées qui devaient exprimer ses besoins métier de manière exhaustive.

La proposition commerciale produite en pièce 1.2 par la société ACILAM décrit les objectifs du projet d'évolution du système d'information comme suit :

-rationnaliser votre organisation, vous appuyer sur des processus standards et optimisés,

-disposer de tableaux de bords et d'indicateurs pour mieux piloter votre activité,

-fiabiliser et mutualiser les informations, fluidi'er les échanges de données notamment du devis à la facturation,

-gagner en réactivité face aux demandes de vos clients,

-diminuer les conflits d'exploitation de votre système d'information.

Il est précisé au paragraphe 5 « description de la solution proposée » : la migration des modules existants de SYLOB 7 vers SYLOB 9 et l'ajout de modules complémentaires de SYLOB 9 dont le module « Inter-Sociétés ».

Au paragraphe 6.2.1 il est préconisé d'avoir un seul serveur sur un site central : « Ci-après, nous vous proposons donc une solution globale permettant de centraliser les informations des différents sites sur un serveur unique qui serait basé sur le site pilote de votre choix. »

Dans le récapitulatif page 24, il est indiqué que le module inter-sociétés correspond aux prestations suivantes :

Echanges de données automatiques entre 2 sociétés équipées de solutions SYLOB.

Intégration des échanges pré-paramètres suivants :

Commandes achat/Commande ventes,

Bon de Livraison/Bon de Réception,

Facture Vente/Facture Achat,

Transfert de données de base : Articles, Données Techniques, Clients,

Fournisseurs.

En fonction de vos besoins, le paramétrage d'autres fichiers d'échanges pourra être chiffré. »

C'est sur cette proposition que la société ACILAM s'est engagée. La proposition faite s'oriente vers une monobase (stockage des données des différentes sociétés dans une même base de données)

La société SYLOB a noté « Nous avons pris pour hypothèse de base que vous utiliseriez au maximum les possibilités standards qu'offre la solution SYLOB9 et de ce fait que l'on limiterait le développement de spécifiques au strict minimum. Dans tous les cas, ceux-ci devront être analysés et validés lors de Ia phase d'analyse préalable. »

La fonction multi-sociétés fait donc partie de l'offre contractuelle. Aux termes de ses conclusions l'expert a considéré que l'ERP SYLOB 9 était conforme au cahier des charges fin septembre 2014, exception faite du module d'affacturage et de l'interface de comptabilité Sage.

Le contrat a été passé le 4 février 2014. Le prologiciel a donc été en totale adéquation avec le cahier des charges postérieurement à la signature du contrat.

La cour observe :

- l'attestation produite avec le dire N°8 de SYLOB (page 417 du rapport d'expertise) permet de constater qu'un des deux éléments essentiels au consentement de la société ACILAM, soit la fonctionnalité « multi- sociétés » était déjà en place dès l'année 2013. Le contenu du support de formation de la version 1 de SYLOB 9 indique que cette fonctionnalité était présente dès la première version.

Les mentions portées par l'expert dans le compte-rendu de la première réunion ne permettent pas de contredire cet état de fait dès lors qu'à ce stade de l'expertise, il ne disposait pas de tous les éléments d'analyse nécessaires et qu'il a pris en considération les informations apportées dans le dire N°8.

Il n'est donc pas prouvé que la société SYLOB a délibérément menti à son client en prétendant que le produit proposé disposait d'une fonctionnalité en réalité inexistante.

Par ailleurs le tribunal a pu justement considérer que le fait d'évoquer 5 ans après la signature du contrat l'existence d'un dol concernant la gestion multi-sociétés, après avoir manifesté son intention de poursuivre l'exécution du contrat en signant un protocole d'accord, ne permet pas de considérer que cet élément était un élément essentiel dans la mise en place de l'ERP et donc de son consentement.

S'agissait des délais, il importe de souligner que quatre propositions commerciales ont été adressées à la société ACILAM. Selon celle-ci, l'exigence de délais a été présentée comme l'enjeu du projet ce qui a été reconnu par la société SYLOB dans la réponse apportée au cahier des charges de la société ACILAM. « L'enjeu de ce projet est d'abord la mise sous contrôle rapide et donc un calendrier très court pour réaliser le déploiement de l'ERP ».

Toutefois, le contrat signé le 4 février 2014, faisant la loi des parties, ne prévoit pas de planning impératif et d'ailleurs aucune pénalité de retard en cas de non-respect de ces délais n'est mentionnée. Seul un planning prévisionnel est annexé à la proposition commerciale acceptée allant du mois de février 2014 jusqu'au mois d'octobre de la même année pour la phase « assistance au démarrage ».

Par ailleurs, le caractère essentiel des délais était lié au fait que la société ETILAM n'avait plus d'accès à l'ERP SAP à compter du mois de septembre 2014. Or cet état de fait n'a pas été porté à la connaissance de la société SYLOB.

La question du délai n'avait d'influence que sur le choix du prologiciel, M.[Z] ayant déclaré au cours des réunions d'expertise que l'impossibilité de tenir le calendrier serré de développement était le seul point qui aurait pu faire basculer le choix d'ACILAM pour SYLOB 7, SYLOB 9 ayant été présenté comme une bonne solution pour répondre au cahier des charges.

Afin de respecter le planning prévu ainsi que l'enveloppe budgétaire, les propositions commerciales se sont basées sur l'hypothèse d'une utilisation maximum des fonctionnalités standard de SYLOB 9 afin de limiter les développements spécifiques.

L'expert précise que la phase d'analyse préalable s'est déroulée conformément au planning prévisionnel, qui a complètement dérapé en juillet 2014. Il ajoute qu'un projet d'une telle ampleur aurait dû être mené en 10 à 12 mois.

Il fait observer que s'agissant d'un projet informatique lourd chaque partie doit informer l'autre du maximum d'informations surtout si elles sont critiques ce que n'a pas fait la société ACILAM, M. [Z] ayant indiqué au cours d'une réunion de novembre 2018, que SYLOB n'avait pas besoin de savoir que c'était un impératif absolu.

En conséquence, SYLOB ne s'étant pas engagée formellement sur un délai et étant dans l'ignorance du caractère absolu de cet impératif, il ne peut être considéré que le prévisionnel s'analyserait comme des manoeuvres dolosives pour induire en erreur le client sur la rapidité de mise en oeuvre de la solution proposée. L'absence de manoeuvres dolosives est également caractérisée par le fait que SYLOB ne pouvait anticiper le retard engendré par les propres défaillances d'ACILAM.

L'expert relève ainsi après une analyse particulièrement détaillée de la chronologie des faits, que 4 sessions de recettes sont intervenues en septembre 2014 après plusieurs retards entièrement imputables à ACILAM.

Enfin, la société SYLOB se serait engagée à confier cette commande à un chef de projet expérimenté alors que ce dernier ne maîtrisait pas SYLOB 9.

L'erreur sur la capacité d'un salarié à mener à bien un projet ne s'analyse pas en des manoeuvres dolosives le terme « erreur » étant intrinsèquement contraire à celui de « manoeuvres ». La cour observe qu'ACILAM a également fait le même type d'erreur puisqu'elle n'a pas recruté de technicien pour effectuer en interne le développement des états et qu'elle a finalement passé une commande de sous-traitance à SYLOB en juillet 2014.

Il résulte de ce qui précède que les éléments constitutifs du dol ne sont pas établis. Le jugement sera donc confirmé sur ce point.

III. Sur l'exécution du contrat :

Les appelantes soutiennent que la société SYLOB a manqué à ses obligations contractuelles et sollicitent la résolution judiciaire du contrat.

-sur le manquement allégué à l'obligation de conseil et de renseignement

Elles indiquent que la société SYLOB a fait valoir dans le cadre des négociations que SYLOB 9 était la solution aux besoins d'ACILAM dont elle avait pu analyser les besoins alors qu'en réalité elle ne s'était pas informée sur l'étendue de ces besoins et n'avait pas avisé ACILAM des risques inhérents à la mise en place d'un progiciel nouveau et à l'impossibilité de tenir les délais.

Dans l'hypothèse où le cahier des charges aurait manqué de précisions, SYLOB aurait dû tenir compte du fait que son client était profane en matière d'ERP, indiquer à ACILAM que le cahier des charges était insuffisant, appeler son attention sur la nécessité d'une phase d'analyse des besoins et sur le degré de détail attendu.

Elles considèrent que SYLOB a manqué de professionnalisme en n'affectant pas au projet les moyens humains suffisants et lui reprochent d'avoir maintenu ACILAM dans la croyance erronée qu'elle serait en mesure de respecter l'impératif de délais. Elles ajoutent que pour sa part, ACILAM a tout mis en oeuvre pour que le projet aboutisse en participant à l'intégralité des réunions et en informant SYLOB de ses difficultés et contestent fermement la responsabilité d'ACILAM dans le retard pris.

Les intimées répondent que les appelantes n'ont jamais été capables d'exprimer leurs besoins alors que le rapport d'expertise met en exergue le fait que SYLOB a pris connaissance des besoins d'ACILAM et qu'en matière de contrats complexes, tels que les contrats informatiques, la jurisprudence met à la charge de l'acquéreur un devoir de collaboration.

Au cours de la phase d'analyse menée par SYLOB, cette dernière a rédigé un guide de paramétrage et des analyses détaillées ; les documents ont été soumis à l'appréciation d'ACILAM, qui les a intégralement validés sans réserve. SYLOB a donc fait le nécessaire pour amener ACILAM à exprimer ses besoins et à respecter son obligation de se renseigner sur les besoins de son client

Elles reprochent à ACILAM un manque de collaboration fautif caractérisé notamment par des carences dans l'expression de ses besoins, auxquelles il convient d'ajouter celles tenant à la transmission tardive des maquettes des états.

Sur ce :

Les contrats informatiques conclus entre deux professionnels sont soumis à une obligation précontractuelle de renseignement spéciale, impliquant, outre l'obligation d'information générale, un devoir de conseil et de mise en garde pesant sur le prestataire et un devoir de collaboration pesant sur le client.

L'obligation de renseignement s'apprécie en fonction de la qualité du client qui peut être un simple utilisateur novice ou un professionnel. Elle s'apprécie également en fonction de son domaine d'activité et des compétences dont il dispose au sein de sa structure.

Enfin l'information s'apprécie en fonction des besoins et objectifs définis par les besoins du client.

Le vendeur professionnel d'un matériel informatique est donc tenu d'une obligation de renseignement ou de conseil envers un client dépourvu de toute compétence en la matière. En retour, il appartient au client de formuler ses besoins de manière claire.

Les sociétés SYLOB et ACILAM entretenaient des relations contractuelles depuis plusieurs années. L'ancienneté de cette relation fait qu'elles se sont tout naturellement rapprochées pour permettre à ACILAM de mener à bien son projet. Cela ne signifie pas que la société SYLOB avait ab initio une connaissance précise des besoins de son client suite à l'acquisition d'une nouvelle société.

La société SYLOB avait donc l'obligation de recueillir tous les renseignements nécessaires à l'élaboration de sa proposition commerciale.

L'expert a repris de façon chronologique et détaillée l'évolution du projet de déploiement de l'ERP SYLOB 9.

La société ACILAM a pris contact avec la société SYLOB en novembre 2013 en lui adressant un cahier des charges.

Pour la société SYLOB la mise en place de l'ERP supposait :

-la définition d'un périmètre global d'après le cahier des charges pour estimer l'enveloppe financière de la proposition

-la contractualisation

-l'analyse préalable permettant de déterminer les points métiers s'écartant du prologiciel et nécessitant des développements spécifiques

-l'analyse détaillée de ces points

-les prototypages

-le recettage

-la mise en production et l'accompagnement en post-production.

Il résulte de l'expertise que le cahier des charges d'ACILAM était assez réduit puisqu'il comportait 11 pages. La société ACILAM a adopté sans réserve la dernière proposition présentée par la société SYLOB.

L'expert en a donc justement déduit que le client (ACILAM) considérait alors que la proposition était conforme au cahier des charges établi par ses soins.

La phase d'analyses qui a suivi s'est déroulée en quatre sessions. A l'issue de chacune de celles-ci, SYLOB traduisait en termes informatiques l'analyse qui avait été soumise à validation après expression des besoins du client.

Cette phase d'analyse constitue une élaboration « pas à pas » du projet au cours de laquelle la société SYLOB devait prodiguer ses conseils et donner tous les renseignements utiles. A cette occasion, ACILAM devait de son côté être suffisamment précise dans l'expression de ses besoins puisqu'elle seule détenait les éléments de contexte inhérents à son activité.

L'expert retient :

-que SYLOB a impliqué sa cliente de manière active dans cette phase « critique » conformément aux règles de l'art en matière informatique. La proposition de SYLOB correspondait aux besoins exprimés.

-que tous les points à risques relevés ont donné lieu à des analyses détaillées. L'analyse était logique et rigoureuse. La méthodologie interactive était cohérente avec les règles de l'art en matière informatique.

-ACILAM a validé ces analyses détaillées.

-ACILAM avait une bonne compréhension des questions posées et des analyses détaillées qui lui étaient transmises puisqu'elle a demandé des modifications. Elle a validé les analyses détaillées qui devaient exprimer ses besoins métier de manière exhaustive.

En conclusions, l'expert retient que la société SYLOB a agi dans les règles de l'art que ce soit dans la première phase dite l'analyse détaillée du projet ou dans celle de l'installation du prologiciel. La méthodologie retenue lors des phases d'analyses préalables et détaillées est conforme aux règles de l'art sur le marché informatique.

Le nombre de réunions qui se sont tenues au cours de cette phase d'analyse témoigne de la volonté de la société SYLOB d'appréhender précisément les besoins de son client. La validation de la dernière proposition permettait à SYLOB de considérer que celle-ci avait pu exprimer l'ensemble de ses besoins et qu'il avait été apporté une réponse adéquate à ceux-ci.

L'expert souligne que si la société ACILAM considérait que l'application n'était pas conforme à ses besoins elle devait au titre de son obligation de collaboration active l'indiquer en amont ou s'opposer à la mise en production, ce qui n'a pas été le cas.

Il ajoute que certains besoins métiers d'ACILAM ont été oubliés, mal ou incomplètement exprimés lors de la phase d'analyses détaillées et indique que les points qui sont remontés à l'issue des sessions de test des flux métiers incombaient pour partie à SYLOB et pour partie à ACILAM. Sur les 38 points qui relevaient de SYLOB 12 étaient des bugs, 23 des demandes d'amélioration et 3 des demandes d'actualisation, paramétrages et questionnements.

La réunion des 12 et 13 novembre 2014 portait sur des questions d'optimisations.

Il n'est donc pas établi que la société SYLOB a manqué au cours de la phase précontractuelle comme en phase d'analyse du projet à son devoir de renseignement et de conseil, ce devoir s'exerçant dans la limite du degré de coopération de la société ACILAM qui avait manifestement sous-estimé l'implication en interne que supposait la mise en oeuvre de son projet.

-sur le manquement allégué à l'obligation de délivrance :

Les appelantes font valoir que le déploiement sur l'ensemble des sites n'est pas intervenu dans les délais prévus (septembre 2014) et que le produit livré n'était pas conforme aux stipulations contractuelles (dysfonctionnements relevés dans le protocole amiable, lors des mesures d'expertise judiciaire et dans le rapport d'expertise). Elles affirment que le prologiciel SYLOB 9 n'était pas conforme au contrat.

Les intimées répondent qu'ACILAM n'a jamais été en capacité d'exprimer ses besoins et qu'aucun des griefs formulés par les appelantes n'est de nature à rendre l'ERP impropre à son usage ni de causer un préjudice tel qu'il justifierait la résolution du contrat.

Sur ce :

La délivrance d'un logiciel est dite « en cascade », elle se décompose en plusieurs étapes. L'expert précise sur ce point qu'il est tout à fait normal dans la vie d'un ERP (et plus encore dans le cas présent) que des besoins nouveaux émergent et que des demandes d'amélioration et d'optimisations soient exprimées, y compris après les sessions de recettes.

Le contrat de déploiement d'un logiciel doit être résolu aux torts du prestataire dès lors que, tenu d'une obligation de résultat, celui-ci n'a pas été capable de régler les anomalies bloquantes et récurrentes dont se plaint le client.

L'expert indique que l'ERP SYLOB 9 était conforme au cahier des charges fin septembre 2014, exception faite du module d'affacturage et de l'interface de comptabilité SAGE. Les transferts de compétence prévus contractuellement avaient été effectués.

L'expert contredit l'affirmation d'ACILAM suivant laquelle l'ERP aurait toujours été en phase de test au cours des opérations d'expertise. Il indique que les réunions des 12 et 13 novembre 2014 ne portaient que sur des questions d'optimisations, ce qui signifie que le logiciel était conforme aux besoins exprimés.

Il précise que certains besoins métiers ont été oubliés, mal ou incomplètement exprimés lors des analyses préalables détaillées.

S'agissant du planning, il note qu'ACILAM n'a fourni que début juin des informations essentielles (telles que les caractéristiques articles) pour un démarrage en juillet, mettant ainsi en péril le projet.

Il souligne qu'aucun technicien n'a été recruté par ACILAM qui s'est résolue tardivement à passer un contrat de sous-traitance en juillet 2014 avec SYLOB.

L'expert précise que les maquettes des états en version définitive auraient impérativement dû être prêtes et transmises à SYLOB dès son acceptation de la sous-traitance, pour conserver une chance de déployer l'ERP fin juillet 2014. Or au cours du comité de pilotage du 15 juillet 2014, ACILAM devait encore réaliser un nombre important d'actions et le paramétrage des routeurs du réseau informatique d'ETILAM était bloqué par ARCELOR MITTAL.

L'expert impute pour partie le retard pris par ACILAM dans les actions à exécuter à la faiblesse de moyens humains et de temps consacré au déploiement de l'ERP. Il indique ainsi que le directeur du projet y a consacré deux jours en août 2014 et le chef de projet n'y a pas consacré un seul jour.

L'ERP a finalement été mis en production avec trois mois de retard le 20 octobre 2014.

L'expert tire de ses observations la conclusion qu'ACILAM est entièrement responsable du dérapage du planning prévisionnel par son manque de maîtrise et d'implication dans le projet SYLOB 9. Il ajoute que pour réussir il aurait fallu un chef de projet plus impliqué pour organiser en interne les réunions de suivi, harceler au besoin les utilisateurs clés et la direction pour collecter et transmettre les informations et les retours d'analyse le plus rapidement possible, préparer les maquettes des états, évaluer les transferts de compétences et la formation des futurs utilisateurs.

Ainsi le développement de SYLOB 9 à bref délai ne pouvait aboutir qu'avec une collaboration active des deux parties ce qui n'a pas été le cas en raison du manque d'investissement de la société ACILAM.

S'agissant de la démarche de SYLOB, l'expert indique que la démarche d'analyse préalable, la démarche d'analyses détaillées, la gestion du planning du projet et la phase d'installation sont conformes aux règles de l'art en informatique.

L'expert a examiné point par point les critiques techniques faites par les appelantes. Ces critiques sont au nombre de 34.

A cette occasion il a rappelé que SYLOB était un prologiciel adapté pour ACILAM et non conçu pour elle.

Il a écarté 26 griefs sur 34 après analyse technique.

Les griefs retenus portent :

-sur le calcul des règles de gestion par établissement et import : imputé à SYLOB. Cette demande était au périmètre initial du projet mais n'a pas été jugée prioritaire par SYLOB amenant ACILAM à développer un logiciel spécifique en interne

-le dysfonctionnement dans l'interface SYLOB 9 SAGE : ce grief résolu a été retenu pour trois mois

-l'interface à l'affacturage : ce grief est imputé pour moitié à chaque partie

-la défectuosité de la DEB : l'impact financier de ce désordre est limité à 1.5 à 2 heures par mois pour une saisie manuelle,

-de nombreuses défaillances lors des inventaires

-des problèmes de valorisation des stocks : grief partagé à 50%

-un datawarehouse incomplet

L'expert a répondu précisément aux dires déposés et les appelantes ne livrent pas d'analyses techniques approfondies permettant d'invalider les conclusions expertales.

Il est ainsi établi que plusieurs griefs sont infondés, d'autres sont imputables pour moitié aux parties en cause, certains ont été réglés et enfin, ceux qui subsistent ne font pas obstacle au fonctionnement de l'activité et du système. Cette liste comparée à celle du protocole d'accord de 2015 permet de constater que 3 des griefs mentionnés en 2015 ne sont pas résolus, dont un imputable pour moitié à chaque partie.

En considération de l'ensemble de ces observations, il apparaît que c'est à bon droit que le tribunal a rejeté la demande de résolution du contrat, les manquements de la société SYLOB à son obligation de résultat ne rendant pas le logiciel impropre à son usage et ne causant pas un préjudice tel qu'il justifie la résolution.

Le jugement sera donc confirmé sur ce point.

IV-Sur les demandes indemnitaires de la société ACILAM :

Les appelantes soutiennent que le rapport du sapiteur financier ne reflète qu'une infime partie de leur préjudice. Elles soutiennent que celui-ci s'élève à 15 570 766 euros.

Le tribunal a retenu que le protocole d'accord, même exécuté partiellement, devait être retenu comme référence pour le chiffrage du préjudice.

Le sapiteur financier a proposé deux évaluations en soulignant le fait que les réclamations d'ACILAM étaient exponentielles passant de 3 934 965 euros à 16 533 000 euros au 31 décembre 2018.

Au regard des éléments de motivation susvisés, la cour considère que le sapiteur s'est justement basé sur les griefs retenus pas l'expert technique.

Ainsi le préjudice s'établit comme suit :

-calcul des règles de gestion par établissement et par import : 150 euros

-dysfonctionnement SYLOB9 SAGE : 2 070 euros

-module d'intégration des règlements : 3 400 euros

-affacturage : 230 euros

-DEB : 460 euros

-défaillances dans les inventaires : 14 574 euros

Valorisation des stocks : 900 euros (après partage de responsabilité)

-datawarehouse : 3800 euros

La somme sollicitée par ACILAM est qualifiée d'« aberrante» par le sapiteur et n'est en rien justifiée par les pièces du dossier.

L'expert a justement écarté la demande fondée sur l'impossibilité de poursuivre le développement du groupe lié au fait que « les ressources humaines ont été accaparées par les débordements du projet et qu'en conséquence le groupe ACILAM n'a pas pu se consacrer à d'autres projets »

Or le retard pris est imputable à ACILAM et le temps consacré par le personnel ACILAM en interne au développement du projet tel que relevé par l'expert a été totalement insuffisant.

De la même façon l'impact sur la valeur du groupe a été écarté.

La société Allianz estime pour sa part que le tribunal a commis une erreur dans son évaluation en allouant des dommages et intérêts après avoir jugé que la société SYLOB n'avait commis aucune faute.

La décision du tribunal apparaît légitime dès lors qu'il a pu considérer que les manquements de la société SYLOB ne remplissaient pas les caractères de gravité permettant de prononcer une résolution du contrat mais justifiaient une indemnisation.

En conséquence, le jugement sera confirmé en ce qu'il a indemnisé le préjudice de l'appelante à concurrence de 25 584 euros.

V. Sur les demandes reconventionnelles de la société SYLOB

-sur la recevabilité des demandes présentées :

Les appelantes soulèvent l'irrecevabilité des demandes présentés par la société SYLOB au motif que les fautes qu'elle invoque étaient connues ou auraient dû l'être en 2014, de sorte que la société SYLOB qui les évoque par conclusions du 17 décembre 2020 est irrecevable en sa demande.

Suivant les dispositions de l'article 2224 du code civil, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

Les parties divergent sur le point de départ de la prescription, la société SYLOB indiquant qu'elle n'a eu connaissance des faits lui permettant d'exercer son action que lorsqu'il lui est apparu qu'aucune solution négociée ne serait envisageable.

La société SYLOB ajoute que certaines réclamations correspondent à du temps passé en 2016 et 2017 et non facturé ; que la reconnaissance partielle du débiteur de la créance à travers les paiements effectués en décembre 2015 et février 2016 ont interrompu la prescription.

En l'espèce, le tribunal a justement considéré qu'après s'être inscrite dans une solution négociée, la société SYLOB a eu connaissance le 21 septembre 2016, date du courrier de l'expert aux parties les informant de la désignation d'un sapiteur des faits lui permettant d'agir.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a jugé recevables les demandes de SYLOB.

Sur le fond, les appelantes soutiennent que les dépassements invoqués par SYLOB lui sont exclusivement imputables et qu'elle ne peut se prévaloir d'un quelconque préjudice.

La société SYLOB évoque au soutien de sa demande un accroissement constant de ses effectifs pour mener à bien le projet. Elle demande à la cour de ne pas tenir compte des préjudices antérieurs à la signature du protocole d'accord.

Sur ce :

L'article 6.1.3.3 du contrat prévoit que la société SYLOB conservera à sa charge les dépassements de jours de paramétrage et d'assistance prévus au contrat.

Toutefois la prise en charge des dépassements s'entend à périmètre constant. Or il résulte de l'expertise technique que le périmètre a évolué puisqu'ACILAM a mal communiqué sur ses besoins métier.

Il peut donc être légitimement tenu compte des sommes retenues par le sapiteur au titre du défaut de collaboration, tout comme les sommes correspondant à des dépenses qui auraient dû être supportées par ACILAM (import des données et formation des utilisateurs).

En revanche, si le protocole d'accord n'a pas abouti il n'en demeure pas moins que ce protocole a été un temps suivi d'application par les parties.

La cour se basera donc sur la seconde analyse du sapiteur financier suivant laquelle le préjudice de la société SYLOB s'élève à la somme de 145 638 euros HT à laquelle s'ajoute celle de 53 343,49 euros correspondant au solde de factures impayées.

Les appelantes considèrent que le taux retenu est largement surévalué mais ne fournissent aucune méthode de calcul différente de la valorisation à 900 euros la journée.

Le jugement sera donc confirmé sur ce point.

VI- Sur l'application de la franchise :

La société Allianz produit aux débats les conditions particulières du contrat qui la lie à la société SYLOB. Suivant les conditions du paragraphe « montant des garanties et des franchises » une franchise de 1 500 euros s'applique à la garantie responsabilité civile contractuelle.

Cette franchise étant opposable aux tiers, elle sera déduite des sommes dues par la compagnie d'assurance aux appelantes. Le jugement sera confirmé en ce qu'il a jugé que la garantie d'Allianz n'avait vocation à être mobilisée que dans les limites des conditions, plafonds, déductions et exclusions de la police d'assurance.

VII. sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens

Les sociétés ACILAM et ETILAM succombant pour l'essentiel de leurs demandes seront condamnées aux dépens d'appel.

Il serait inéquitable de laisser à la charge des intimés leurs frais de défense.

La cour observe que les demandes présentées à concurrence de 80 000 euros par la société FORTERRO, et 122 479,60 euros par la société Allianz excède les sommes habituellement sollicitées. Toutefois, la demande présentée par les appelantes à concurrence de 90 000 euros démontre l'importance des frais engagés par chaque partie pour la défense de ses intérêts en cause d'appel et justifie ainsi pour partie les demandes présentées par les intimées qui seront limitées à 35 000 euros chacune.

Dispositif

Par ces motifs :

La cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort, l'arrêt étant mis à disposition des parties au greffe de la juridiction ;

Confirme le jugement critiqué en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant ;

Condamne in solidum la société ACILAM et la société ETILAM à verser à la société Allianz IARD la somme de 35 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne in solidum la société ACILAM et la société ETILAM à verser à la société FORTERRO France venant aux droits de la société SYLOB la somme de 35 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne in solidum la société ACILAM et la société ETILAM aux dépens d'appel.