Cass. com., 15 octobre 1991, n° 90-11.657
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
Sur le moyen unique, pris en ses trois branches :
Attendu, selon l'arrêt déféré (Rennes, 14 décembre 1989), que la société Samua (la société) a été mise en règlement judiciaire par jugement du 2 octobre 1985 ; que quatre salariés, MM. X..., Y..., Z..., A..., qui avaient antérieurement assigné la société devant le conseil de prud'hommes en paiement de salaires et indemnités, ont, dès avant la publicité, le 17 octobre 1985, adressé au syndic, par l'intermédiaire du syndicat CFDT, une lettre, lui demandant de prendre acte de leurs créances ; que le Tribunal a considéré que les quatre salariés avaient valablement produit et a renvoyé la procédure à celle de la vérification des créances ;
Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté la demande d'admission des créances des salariés, alors, selon le pourvoi, d'une part, que la production s'opère par la remise au syndic, sous quelque forme que ce soit, d'une déclaration manifestant sans équivoque la volonté du créancier de se faire payer dans le cadre de la procédure collective, accompagnée d'un bordereau récapitulatif des pièces produites justifiant de l'existence et du montant de la créance ; qu'aucune autre formalité n'est exigée et qu'en particulier, lorsque la production est effectuée par un mandataire du créancier, aucune disposition légale ou réglementaire n'exige que le mandat soit joint à la déclaration ; qu'en jugeant que le mandataire aurait dû joindre à la production, à peine de nullité de celle-ci, le mandat que les créanciers lui avaient donné, la cour d'appel a violé les articles 40 de la loi du 13 juillet 1967 et 45 et suivants du décret du 22 décembre 1967 ; alors, d'autre part, que si celui qui représente une partie en justice doit, à l'exception des avocats, avoués et huissiers de justice, justifier qu'il en a reçu mandat, cette justification, dont la loi ne précise pas sous quelle forme elle doit être donnée, ne doit pas nécessairement l'être par écrit et résulte suffisamment de l'affirmation du mandant faite en justice selon laquelle il avait bien donné mandat à la personne dont la qualité de mandataire, est contestée ; qu'en l'espèce, l'affirmation des salariés, faite dans le cadre de l'instance et selon laquelle ils avaient bien donné mandat à la CFDT d'effectuer en leur nom la production de leurs créances au règlement judiciaire de leur employeur, établissait l'existence du mandat contesté ; qu'en jugeant que la production était nulle à défaut de pouvoir du mandataire, la cour d'appel, qui a ainsi confondu l'absence de mandat et la preuve de celui-ci, a violé les articles 416 et 117 du nouveau Code de procédure civile ; et alors, en toute hypothèse, que la cour d'appel ne pouvait, sans se contredire et violer l'article 455 du nouveau Code de procédure civile, affirmer d'une part, que la production faite sans mandat était irrégulière faute d'émaner des créanciers, et rejeter d'autre part, la demande tendant au relevé de forclusion au motif que les créanciers avaient produit dans les délais ;
Mais attendu, en premier lieu, que quiconque entend représenter ou assister une partie en justice doit justifier qu'il en a reçu le mandat ou la mission et ce, par écrit, à défaut de dispense légale ; que la cour d'appel a retenu à bon droit que la production équivalait à une demande en justice et que la preuve du mandat à fin de produire ne pouvait, à défaut d'écrit, résulter des circonstances de la cause ;
Attendu, en second lieu, qu'en retenant pour refuser le relevé de la forclusion, d'un côté, qu'il y a eu production de créance dans le délai par les créanciers qui avaient eu connaissance du jugement déclaratif et, d'un autre côté, que c'est uniquement du fait des créanciers que la production ne peut être acceptée pour avoir été faite irrégulièrement, la cour d'appel ne s'est pas contredite ;
D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.