CJUE, 3e ch., 18 avril 2024, n° C-765/22
COUR DE JUSTICE DE L’UNION EUROPEENNE
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Luis Carlos, Isidora, Angélica, Paula, Luis Francisco, Delfina
Défendeur :
Air Berlin Luftverkehrs KG, Victoriano, Bernabé, Jacinta, Sandra, Patricia, Juan Antonio, Verónica, Air Berlin Luftverkehrs KG, Air Berlin PLC & Co. Luftverkehrs KG
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président de chambre :
Me Martínez Domingo
Président :
M. Lenaerts
Avocat général :
M. Richard de la Tour
Avocats :
Me Martínez Domingo, Me Muñoz García
LA COUR (troisième chambre),
1 Les demandes de décision préjudicielle portent sur l’interprétation, d’une part, de l’article 7, paragraphe 1, et paragraphe 2, sous g) et h), et de l’article 35 du règlement (UE) 2015/848 du Parlement européen et du Conseil, du 20 mai 2015, relatif aux procédures d’insolvabilité (JO 2015, L 141, p. 19), lus en combinaison avec le considérant 72 de ce règlement, et, d’autre part, de l’article 3, paragraphe 2, de l’article 21, paragraphes 1 et 2, et de l’article 34 dudit règlement.
2 Ces demandes ont été présentées dans le cadre de deux litiges opposant, le premier, Luis Carlos, Severino, Isidora, Angélica, Paula, Luis Francisco et Delfina à Air Berlin Luftverkehrs KG, Sucursal en España (ci après « Air Berlin Espagne »), au sujet de la contestation de l’inventaire et de la liste des créanciers établis par le praticien de l’insolvabilité dans le cadre d’une procédure d’insolvabilité secondaire ouverte contre Air Berlin Espagne sur le territoire espagnol (affaire C 765/22) et, le second, Victoriano, Bernabé, Jacinta, Sandra, Patricia, Juan Antonio et Verónica à Air Berlin Espagne et à Air Berlin PLC & Co. Luftverkehrs KG (ci après « Air Berlin ») au sujet de la contestation d’un acte par lequel il a été procédé au déplacement d’actifs hors de ce territoire (affaire C 772/22).
Le cadre juridique
Le droit de l’Union
3 Les considérants 3, 22, 23, 40, 46, 48, 66 à 68 et 72 du règlement 2015/848 sont libellés comme suit :
« (3) Le bon fonctionnement du marché intérieur exige que les procédures d’insolvabilité transfrontalières fonctionnent de manière efficace et effective. L’adoption du présent règlement est nécessaire pour atteindre cet objectif, qui relève du domaine de la coopération judiciaire civile au sens de l’article 81 du traité.
[...]
(22) Le présent règlement tient compte du fait qu’en raison des divergences considérables qui existent entre les droits matériels, il n’est pas pratique de mettre en place une procédure d’insolvabilité ayant une portée universelle pour toute l’Union [européenne]. Dans ce contexte, l’application sans exception du droit de l’État d’ouverture de la procédure susciterait fréquemment des difficultés. Cela vaut, par exemple, pour les lois nationales sur les sûretés qui présentent d’importantes divergences selon les États membres. Par ailleurs, les droits préférentiels dont jouissent certains créanciers dans les procédures d’insolvabilité sont, dans certains cas, conçus de manière très différente. Lors de la prochaine révision du présent règlement, il conviendra d’envisager de nouvelles mesures afin d’améliorer les droits préférentiels des travailleurs au niveau européen. Le présent règlement devrait tenir compte de telles divergences entre les législations nationales de deux manières distinctes. D’une part, il convient de prévoir des règles spéciales relatives à la loi applicable à certains droits et situations juridiques particulièrement importants (par exemple les droits réels et les contrats de travail). D’autre part, il y a également lieu d’autoriser, outre une procédure d’insolvabilité principale de portée universelle, des procédures nationales qui ne concernent que les actifs situés dans l’État d’ouverture de la procédure.
(23) Le présent règlement permet d’ouvrir la procédure d’insolvabilité principale dans l’État membre où se situe le centre des intérêts principaux du débiteur. Cette procédure a une portée universelle et vise à inclure tous les actifs du débiteur. En vue de protéger les différents intérêts, le présent règlement permet d’ouvrir des procédures d’insolvabilité secondaires parallèlement à la procédure d’insolvabilité principale. Des procédures d’insolvabilité secondaires peuvent être ouvertes dans l’État membre dans lequel le débiteur a un établissement. Les effets des procédures d’insolvabilité secondaires se limitent aux actifs situés dans cet État. Des règles impératives de coordination avec les procédures d’insolvabilité principales satisfont l’unité nécessaire au sein de l’Union.
[...]
(40) Hormis la protection des intérêts locaux, les procédures d’insolvabilité secondaires peuvent poursuivre d’autres objectifs. Ce pourrait être le cas lorsque la masse de l’insolvabilité du débiteur est trop complexe pour être administrée en bloc, ou lorsque les différences entre les systèmes juridiques concernés sont à ce point importantes que des difficultés peuvent résulter de l’extension des effets de la loi de l’État d’ouverture de la procédure aux autres États membres où se trouvent les actifs. C’est la raison pour laquelle le praticien de l’insolvabilité de la procédure d’insolvabilité principale peut demander l’ouverture d’une procédure d’insolvabilité secondaire dans l’intérêt d’une administration efficace de la masse de l’insolvabilité.
[...]
(46) Pour assurer une protection effective des intérêts locaux, le praticien de l’insolvabilité de la procédure d’insolvabilité principale ne devrait pas être en mesure de réaliser ou de déplacer, de manière abusive, les actifs se trouvant dans l’État membre où un établissement est situé, en particulier dans le but d’éluder la possibilité que ces intérêts puissent être effectivement satisfaits en cas d’ouverture ultérieure d’une procédure d’insolvabilité secondaire.
[...]
(48) [...] Pour garantir le rôle prédominant de la procédure d’insolvabilité principale, il convient d’accorder au praticien de l’insolvabilité de cette procédure plusieurs possibilités d’intervention dans les procédures d’insolvabilité secondaires en cours au même moment. [...]
[...]
(66) Le présent règlement devrait, dans les matières visées par celui-ci, établir des règles de conflit de lois uniformes qui remplacent, dans le cadre de leur champ d’application, les règles nationales du droit international privé. Sauf disposition contraire, la loi de l’État membre d’ouverture de la procédure devrait être applicable (lex concursus). Cette règle de conflit de lois devrait s’appliquer tant à la procédure d’insolvabilité principale qu’aux procédures locales. La lex concursus détermine tous les effets de la procédure d’insolvabilité, qu’ils soient procéduraux ou substantiels, sur les personnes et les rapports juridiques concernés. Elle régit toutes les conditions liées à l’ouverture, au déroulement et à la clôture de la procédure d’insolvabilité.
(67) La reconnaissance automatique d’une procédure d’insolvabilité à laquelle s’applique normalement la loi de l’État d’ouverture de la procédure peut interférer avec les règles en vertu desquelles les transactions sont réalisées dans d’autres États membres. Pour protéger la confiance légitime et la sécurité des transactions dans des États membres différents de celui de l’ouverture de la procédure, il convient de prévoir des dispositions visant un certain nombre d’exceptions à la règle générale.
(68) Il est particulièrement nécessaire de prévoir, pour les droits réels, un rattachement particulier qui déroge à la loi de l’État d’ouverture de la procédure, étant donné que ces droits revêtent une importance considérable pour l’octroi de crédits. Dès lors, la justification, la validité et la portée des droits réels devraient normalement être déterminés en vertu de la loi du lieu de situation et ne pas être affectés par l’ouverture d’une procédure d’insolvabilité. Le titulaire d’un droit réel devrait pouvoir ainsi continuer de faire valoir son droit de séparer la garantie de la masse. Si, en vertu de la loi du lieu de situation, les actifs sont soumis à des droits réels dans un État membre, mais la procédure d’insolvabilité principale est engagée dans un autre État membre, le praticien de l’insolvabilité de la procédure d’insolvabilité principale devrait pouvoir demander l’ouverture d’une procédure d’insolvabilité secondaire dans l’État membre où sont nés les droits réels dans la mesure où le débiteur a un établissement dans cet État. Si aucune procédure d’insolvabilité secondaire n’est ouverte, tout excédent du produit de la vente d’un actif soumis à des droits réels devrait être versé au praticien de l’insolvabilité de la procédure d’insolvabilité principale.
[...]
(72) Aux fins de la protection des travailleurs et des emplois, les effets de la procédure d’insolvabilité sur la poursuite ou la cessation des relations de travail et sur les droits et les obligations de chaque partie à ces relations devraient être déterminés par la loi applicable au contrat de travail concerné en vertu des règles générales de conflit de lois. En outre, lorsque la résiliation des contrats de travail requiert l’approbation d’une juridiction ou d’une autorité administrative, l’État membre dans lequel se situe un établissement du débiteur devrait demeurer compétent pour donner cette approbation, même si aucune procédure d’insolvabilité n’a été ouverte dans cet État membre. Toute autre question relative à l’insolvabilité, telle que, par exemple, celle de savoir si les créances des travailleurs sont garanties par un privilège et quel est le rang éventuel de ce privilège, devrait être déterminée par la loi de l’État membre dans lequel la procédure d’insolvabilité (principale ou secondaire) a été ouverte, sauf si un engagement a été pris afin d’éviter une procédure d’insolvabilité secondaire, conformément au présent règlement. »
4 L’article 2 de ce règlement, intitulé « Définitions », prévoit :
« Aux fins du présent règlement, on entend par :
[...]
5) “praticien de l’insolvabilité”, toute personne ou tout organe dont la fonction, y compris à titre intérimaire, consiste à :
i) vérifier et admettre les créances soumises dans le cadre d’une procédure d’insolvabilité ;
ii) représenter l’intérêt collectif des créanciers ;
iii) administrer, en tout ou en partie, les actifs dont le débiteur est dessaisi ;
iv) liquider les actifs visés au point iii) ; ou
v) surveiller la gestion des affaires du débiteur.
[...]
7) “décision d’ouverture de la procédure d’insolvabilité”, une décision qui comprend :
i) la décision de toute juridiction d’ouvrir une procédure d’insolvabilité ou de confirmer l’ouverture d’une telle procédure ; et
ii) la décision d’une juridiction de désigner un praticien de l’insolvabilité ;
8) “moment de l’ouverture de la procédure”, le moment auquel la décision d’ouverture de la procédure d’insolvabilité prend effet, que cette décision soit ou non définitive ;
[...]
11) “créancier local”, un créancier dont les créances sur un débiteur sont nées de l’exploitation d’un établissement situé dans un État membre autre que l’État membre où se situe le centre des intérêts principaux du débiteur, ou sont liées à cette exploitation ;
[...] »
5 L’article 3 dudit règlement, intitulé « Compétence internationale », dispose, à ses paragraphes 1 à 3 :
« 1. Les juridictions de l’État membre sur le territoire duquel est situé le centre des intérêts principaux du débiteur sont compétentes pour ouvrir la procédure d’insolvabilité (ci-après dénommée “procédure d’insolvabilité principale”). Le centre des intérêts principaux correspond au lieu où le débiteur gère habituellement ses intérêts et qui est vérifiable par des tiers.
[...]
2. Lorsque le centre des intérêts principaux du débiteur est situé sur le territoire d’un État membre, les juridictions d’un autre État membre ne sont compétentes pour ouvrir une procédure d’insolvabilité à l’égard de ce débiteur que si celui-ci possède un établissement sur le territoire de cet autre État membre. Les effets de cette procédure sont limités aux biens du débiteur se trouvant sur ce dernier territoire.
3. Lorsqu’une procédure d’insolvabilité a été ouverte en application du paragraphe 1, toute procédure ouverte ultérieurement en application du paragraphe 2 est une procédure d’insolvabilité secondaire. »
6 L’article 6 du même règlement, intitulé « Compétence juridictionnelle pour une action qui découle directement de la procédure d’insolvabilité et qui y est étroitement liée », énonce, à son paragraphe 1 :
« Les juridictions de l’État membre sur le territoire duquel la procédure d’insolvabilité a été ouverte en application de l’article 3 sont compétentes pour connaître de toute action qui découle directement de la procédure d’insolvabilité et y est étroitement liée, telles les actions révocatoires. »
7 Aux termes de l’article 7 du règlement 2015/848, intitulé « Loi applicable » :
« 1. Sauf disposition contraire du présent règlement, la loi applicable à la procédure d’insolvabilité et à ses effets est celle de l’État membre sur le territoire duquel cette procédure est ouverte (ci-après dénommé “État d’ouverture”).
2. La loi de l’État d’ouverture détermine les conditions liées à l’ouverture, au déroulement et à la clôture de la procédure d’insolvabilité. Elle détermine notamment les éléments suivants :
[...]
g) les créances à produire au passif du débiteur et le sort des créances nées après l’ouverture de la procédure d’insolvabilité ;
h) les règles régissant la production, la vérification et l’admission des créances ;
[...]
m) les règles relatives à la nullité, à l’annulation ou à l’inopposabilité des actes juridiques préjudiciables à la masse des créanciers. »
8 L’article 8 de ce règlement, intitulé « Droits réels des tiers », prévoit :
« 1. L’ouverture de la procédure d’insolvabilité n’affecte pas le droit réel d’un créancier ou d’un tiers sur des biens corporels ou incorporels, meubles ou immeubles, à la fois des biens déterminés et des ensembles de biens indéterminés dont la composition est sujette à modification, appartenant au débiteur et qui sont situés, au moment de l’ouverture de la procédure, sur le territoire d’un autre État membre.
[...]
4. Le paragraphe 1 ne fait pas obstacle aux actions en nullité, en annulation ou en inopposabilité visées à l’article 7, paragraphe 2, point m). »
9 L’article 10 dudit règlement, intitulé « Réserve de propriété », énonce :
« 1. L’ouverture d’une procédure d’insolvabilité à l’encontre de l’acheteur d’un bien n’affecte pas les droits des vendeurs qui sont fondés sur une réserve de propriété, lorsque ce bien est situé, au moment de l’ouverture de la procédure, sur le territoire d’un État membre autre que l’État d’ouverture.
2. L’ouverture d’une procédure d’insolvabilité contre le vendeur d’un bien, après la livraison de ce bien, ne constitue pas une cause de résolution ou de résiliation de la vente et ne fait pas obstacle à l’acquisition par l’acheteur de la propriété du bien vendu, lorsque ce bien est situé au moment de l’ouverture de la procédure sur le territoire d’un État membre autre que l’État d’ouverture.
3. Les paragraphes 1 et 2 ne font pas obstacle aux actions en nullité, en annulation ou en inopposabilité visées à l’article 7, paragraphe 2, point m). »
10 L’article 13 du même règlement, intitulé « Contrats de travail », dispose :
« 1. Les effets de la procédure d’insolvabilité sur les contrats de travail et sur les relations de travail sont régis exclusivement par la loi de l’État membre applicable au contrat de travail.
2. Les juridictions de l’État membre dans lequel une procédure d’insolvabilité secondaire peut être ouverte demeurent compétentes pour approuver la résiliation ou la modification des contrats visés au présent article, même si aucune procédure d’insolvabilité n’a été ouverte dans cet État membre.
Le premier alinéa s’applique également à une autorité compétente en vertu du droit national pour approuver la résiliation ou la modification des contrats visés au présent article. »
11 L’article 21 du règlement 2015/848, intitulé « Pouvoirs du praticien de l’insolvabilité », prévoit, à ses paragraphes 1 et 2 :
« 1. Le praticien de l’insolvabilité désigné par une juridiction compétente en vertu de l’article 3, paragraphe 1, peut exercer dans un autre État membre tous les pouvoirs qui lui sont conférés par la loi de l’État d’ouverture, aussi longtemps qu’aucune autre procédure d’insolvabilité n’a été ouverte dans cet autre État membre et qu’aucune mesure conservatoire contraire n’y a été prise à la suite d’une demande d’ouverture d’une procédure d’insolvabilité dans cet État. Sous réserve des articles 8 et 10, le praticien de l’insolvabilité peut notamment déplacer les actifs du débiteur hors du territoire de l’État membre dans lequel ils se trouvent.
2. Le praticien de l’insolvabilité désigné par une juridiction compétente en vertu de l’article 3, paragraphe 2, peut faire valoir dans tout autre État membre, par voie judiciaire ou extrajudiciaire, qu’un bien mobilier a été transféré du territoire de l’État d’ouverture sur le territoire de cet autre État membre après l’ouverture de la procédure d’insolvabilité. Le praticien de l’insolvabilité peut également exercer toute action révocatoire utile aux intérêts des créanciers. »
12 Le chapitre III de ce règlement, intitulé « Procédures d’insolvabilité secondaires », comprend notamment les articles 34 à 36 de celui-ci.
13 L’article 34 dudit règlement, intitulé « Ouverture de la procédure », dispose :
« Lorsqu’une procédure d’insolvabilité principale a été ouverte par une juridiction d’un État membre et reconnue dans un autre État membre, une juridiction de cet autre État membre qui est compétente en vertu de l’article 3, paragraphe 2, peut ouvrir une procédure d’insolvabilité secondaire conformément aux dispositions énoncées au présent chapitre. Lorsque la procédure d’insolvabilité principale exigeait que le débiteur soit insolvable, l’insolvabilité de ce dernier n’est pas réexaminée dans l’État membre dans lequel la procédure d’insolvabilité secondaire peut être ouverte. Les effets de la procédure d’insolvabilité secondaire sont limités aux actifs du débiteur se trouvant sur le territoire de l’État membre dans lequel ladite procédure a été ouverte. »
14 Aux termes de l’article 35 du même règlement, intitulé « Loi applicable » :
« Sauf disposition contraire du présent règlement, la loi applicable à la procédure d’insolvabilité secondaire est celle de l’État membre sur le territoire duquel la procédure d’insolvabilité secondaire est ouverte. »
15 L’article 36 du règlement 2015/848, intitulé « Droit de prendre un engagement afin d’éviter une procédure d’insolvabilité secondaire », énonce :
« 1. Afin d’éviter l’ouverture d’une procédure d’insolvabilité secondaire, le praticien de l’insolvabilité de la procédure d’insolvabilité principale peut prendre un engagement unilatéral (ci-après dénommé “engagement”) en ce qui concerne les actifs se trouvant dans l’État membre dans lequel une procédure d’insolvabilité secondaire pourrait être ouverte, selon lequel, lors de la répartition de ces actifs ou des produits provenant de leur réalisation, il respectera les droits de répartition et de priorité prévus par le droit national, qui auraient été conférés aux créanciers si une procédure d’insolvabilité secondaire avait été ouverte dans cet État membre. L’engagement précise les circonstances factuelles sur lesquelles il repose, notamment en ce qui concerne la valeur des actifs se trouvant dans l’État membre concerné et les différentes options disponibles pour réaliser ces actifs.
2. Si un engagement a été pris conformément au présent article, la loi applicable à la répartition des produits résultant de la réalisation des actifs visés au paragraphe 1, au rang des créances des créanciers et aux droits des créanciers pour les actifs visés au paragraphe 1 est la loi de l’État membre dans lequel la procédure d’insolvabilité secondaire aurait pu être ouverte. Le moment pertinent auquel les actifs visés au paragraphe 1 sont recensés correspond au moment où l’engagement est pris.
[...]
5. L’engagement est approuvé par les créanciers locaux connus. [...] Le praticien de l’insolvabilité informe les créanciers locaux connus de l’engagement, ainsi que des règles et des modalités pour l’approuver, et de son approbation ou de son refus de l’engagement.
6. Un engagement pris et approuvé conformément au présent article est contraignant en ce qui concerne le patrimoine. Si une procédure d’insolvabilité secondaire est ouverte conformément aux articles 37 et 38, le praticien de l’insolvabilité de la procédure d’insolvabilité principale transfère tous les actifs qu’il a déplacés hors du territoire de cet État membre après que l’engagement a été pris ou, si les actifs ont déjà été réalisés, les produits qui en résultent au praticien de l’insolvabilité de la procédure d’insolvabilité secondaire.
[...] »
16 L’article 45 de ce règlement, intitulé « Exercice des droits des créanciers » dispose, à son paragraphe 1, que « [t]out créancier peut produire sa créance à la procédure d’insolvabilité principale et à toute procédure d’insolvabilité secondaire ».
Le droit espagnol
17 Selon les articles 231, 232 et 238 de la Ley Concursal (loi sur l’insolvabilité), dans sa version issue du Real Decreto Legislativo 1/2020 por el que se aprueba el texto refundido de la Ley Concursal (décret royal législatif 1/2020 portant approbation du texte de refonte de la loi sur l’insolvabilité), du 5 mai 2020 (BOE no 127, du 7 mai 2020), la qualité pour agir est attribuée, à titre principal, au praticien de l’insolvabilité. Toutefois, cette qualité peut être attribuée, à titre subsidiaire, aux créanciers lorsque ceux-ci ont demandé par écrit au praticien de l’insolvabilité d’exercer l’action et que celui-ci ne l’a pas exercée dans un délai de deux mois suivant la mise en demeure d’agir.
18 L’article 242 de la loi sur l’insolvabilité est libellé en ces termes :
« Sont des créances sur la masse :
[...]
8.° les créances générées par l’exercice de l’activité professionnelle ou commerciale de l’entité faisant l’objet de la procédure d’insolvabilité après la déclaration de l’insolvabilité. Relèvent de la présente disposition les créances de travail relatives à cette période, y compris les indemnités de licenciement ou de cessation des contrats de travail qui seraient intervenues postérieurement à la déclaration d’insolvabilité [...]
[...] »
Les litiges au principal et les questions préjudicielles
19 Par décision du 1er novembre 2017, l’Amtsgericht Charlottenburg (tribunal de district de Charlottenbourg, Allemagne) a ouvert une procédure d’insolvabilité principale concernant Air Berlin. Cette société a cessé son activité après l’ouverture de cette procédure. Par la suite, en vertu d’une ordonnance du 6 novembre 2020, une procédure d’insolvabilité secondaire a été ouverte en Espagne concernant cette même société, celle-ci ayant un établissement commercial en Espagne par l’intermédiaire d’Air Berlin Espagne.
20 Les requérants au principal, qui étaient des salariés d’Air Berlin Espagne, ont été licenciés à la suite de la cessation de l’activité d’Air Berlin.
L’affaire C-765/22
21 Les requérants au principal ont saisi les juridictions espagnoles afin de contester la légalité de leurs licenciements.
22 Par un arrêt du 30 avril 2018, la Sala de lo Social de l’Audiencia Nacional (chambre sociale de la Cour centrale, Espagne) a annulé les licenciements avec effet au 24 novembre 2017, au motif qu’il n’apparaissait pas que le praticien de l’insolvabilité de la procédure d’insolvabilité principale avait ouvert une procédure d’insolvabilité en Espagne en vue d’obtenir l’autorisation judiciaire du juge de l’insolvabilité et qu’il n’avait pas fourni aux représentants légaux des travailleurs la documentation obligatoire.
23 Air Berlin étant dans l’impossibilité de réintégrer les requérants au principal dans leur poste de travail, elle a été condamnée à leur verser certaines sommes au titre d’indemnités et de salaires échus durant la procédure de contestation des licenciements.
24 Les requérants au principal, alors créanciers locaux au sens de l’article 2, point 11, du règlement 2015/848, ont produit leurs créances à la procédure d’insolvabilité principale ouverte en Allemagne et à la procédure d’insolvabilité secondaire ouverte en Espagne, sur le fondement de l’article 45, paragraphe 1, du règlement 2015/848.
25 Dans le cadre de la procédure d’insolvabilité principale, ces créances ont été reconnues comme prioritaires car considérées, en vertu de la législation allemande, comme des créances sur la masse. En revanche, dans le cadre de la procédure d’insolvabilité secondaire, le praticien de l’insolvabilité désigné a estimé que les créances des requérants au principal étaient des « créances d’insolvabilité » classées en conséquence au nombre des créances avec privilège général et ordinaire. En effet, selon lui, la référence, figurant à l’article 242, point 8, de la loi sur l’insolvabilité, aux créances de travail qui sont nées ou qui sont déclarées par décision de justice après l’ouverture de la procédure d’insolvabilité se rapporte à celles nées ou déclarées après l’ouverture de la procédure d’insolvabilité secondaire, et non à celles nées ou déclarées après l’ouverture de la procédure d’insolvabilité principale.
26 Les requérants au principal ont saisi le Juzgado de lo Mercantil no 1 de Palma de Mallorca (tribunal de commerce no 1 de Palma de Majorque, Espagne), qui est la juridiction de renvoi, d’une demande incidente afin de contester la liste des créanciers ainsi établie en ce qui concerne la reconnaissance et le rang de leurs créances. Ils ont fait valoir que la « déclaration d’insolvabilité » visée à l’article 242, point 8, de la loi sur l’insolvabilité renvoie nécessairement à la procédure d’insolvabilité principale, de sorte que, en application de cette disposition, leurs créances salariales, générées après l’ouverture de cette dernière procédure, devraient être qualifiées de créances sur la masse.
27 La juridiction de renvoi considère, tout d’abord, que la loi sur l’insolvabilité semble être, ainsi qu’il ressort des dispositions combinées de l’article 7, paragraphe 1, et paragraphe 2, sous g) et h), ainsi que de l’article 35 du règlement 2015/848, la loi applicable pour déterminer les créances à produire au passif du débiteur et le sort des créances nées après l’ouverture de la procédure d’insolvabilité.
28 En outre, elle nourrit des doutes quant à la date d’ouverture de la procédure d’insolvabilité à prendre en compte pour qualifier les créances au principal. Les décisions des juridictions du travail espagnoles ayant été rendues après la date d’ouverture de la procédure d’insolvabilité principale, mais avant la date d’ouverture de la procédure d’insolvabilité secondaire, les créances au principal seraient soit des « créances sur la masse » soit des « créances d’insolvabilité » selon la procédure d’insolvabilité qu’il convient de retenir au titre de l’article 242, point 8, de la loi sur l’insolvabilité.
29 La juridiction de renvoi constate que l’interprétation soutenue par le praticien de l’insolvabilité dans le cadre de la procédure d’insolvabilité secondaire est compatible avec une interprétation littérale de l’article 242, point 8, de la loi sur l’insolvabilité. Cette juridiction estime, toutefois, que cette interprétation pourrait entrer en contradiction avec une interprétation systématique de l’article 7, paragraphe 1, et paragraphe 2, sous g) et h), ainsi que de l’article 35 du règlement 2015/848, lus en combinaison avec le considérant 72 de ce règlement, dans le cadre de la procédure universelle mixte conçue par ledit règlement.
30 Tel pourrait être d’autant plus le cas que, selon les considérants 23 et 40 du même règlement, l’un des motifs qui justifient la possibilité d’ouvrir des procédures d’insolvabilité secondaires n’est autre que la protection des intérêts locaux. Dans ce contexte, il serait incohérent que le règlement 2015/848 prévoie que la priorité des créances ou le rang des créances des travailleurs soient déterminés, dans l’intérêt de la protection des intérêts locaux, conformément à la loi relative à la procédure d’insolvabilité de l’État d’ouverture, mais que l’application de ladite loi aboutisse à un résultat préjudiciable aux intérêts dont la protection est recherchée.
31 Dans ces conditions, le Juzgado de lo Mercantil no 1 de Palma de Mallorca (tribunal de commerce no 1 de Palma de Majorque) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante :
« Eu égard à l’élaboration d’une procédure principale universelle mixte mise en place par le règlement [2015/848], permettant d’ouvrir des procédures secondaires qui ne concernent que les actifs situés dans l’État d’ouverture de la procédure, l’article 35 et l’article 7, paragraphe 1, et paragraphe 2[,] sous g) et h)[, de ce règlement,] lus en combinaison avec le considérant 72 [dudit règlement], peuvent-ils être interprétés en ce sens que l’application de la loi de l’État d’ouverture de la procédure [d’insolvabilité] secondaire au “sort des créances nées après l’ouverture de la procédure d’insolvabilité” concerne les créances nées après l’ouverture de la procédure [d’insolvabilité] principale et non après l’ouverture de la procédure [d’insolvabilité] secondaire ? »
L’affaire C-772/22
32 Lors de l’ouverture, le 1er novembre 2017, de la procédure d’insolvabilité principale, Air Berlin disposait d’actifs et de droits sur le territoire espagnol. Au nombre de ceux-ci figurait une créance garantie par une sûreté réelle, constituée sur des parcelles cadastrales inscrites dans le registre foncier no 2 de Ciudad Real (Espagne), dont était propriétaire CR Aeropuertos SL. Une procédure d’insolvabilité a été ouverte à l’égard de cette dernière société par le Juzgado de Primera Instancia no 4 de Ciudad Real (tribunal de première instance no 4 de Ciudad Real, Espagne) et une créance avec privilège spécial a été reconnue à Air Berlin.
33 Le praticien de l’insolvabilité de la procédure d’insolvabilité principale ayant fait valoir les droits d’Air Berlin, le Juzgado de Primera Instancia no 4 de Ciudad Real (tribunal de première instance no 4 de Ciudad Real) a décidé, le 10 mai 2019, le transfert de la somme de 1 061 291,86 euros sur le compte fiduciaire du praticien de l’insolvabilité, à titre de paiement de la créance avec privilège spécial.
34 Avant de procéder à ce transfert, le juge du Juzgado de Primera Instancia no 4 de Ciudad Real (tribunal de première instance no 4 de Ciudad Real) avait exigé et obtenu une preuve d’autorisation de la part de la juridiction allemande saisie de la procédure d’insolvabilité principale. En revanche, ce juge n’avait pas été averti du fait que, afin de garantir le paiement d’une créance de travail d’un montant de 245 996,93 euros en faveur de l’un des requérants au principal, une saisie conservatoire sur les actifs et les droits liés à Air Berlin Espagne avait été prononcée le 24 janvier 2018 par le Juzgado de lo Social no 5 de Palma de Mallorca (tribunal du travail no 5 de Palma de Majorque, Espagne).
35 Les requérants au principal ont saisi le Juzgado de lo Mercantil no 1 de Palma de Mallorca (tribunal de commerce no 1 de Palma de Majorque), qui est la juridiction de renvoi, d’une action en annulation de l’acte par lequel des actifs avaient été déplacés hors du territoire espagnol. Dans le cadre de cette action, ils font grief au praticien de l’insolvabilité de la procédure d’insolvabilité principale d’avoir déplacé, de manière abusive, les actifs situés dans l’État membre où, en raison de la présence d’un établissement, une procédure d’insolvabilité secondaire pouvait être ouverte. Ils soutiennent qu’il y a eu, en conséquence, une violation des articles 34 et 36 du règlement 2015/848 ainsi que du considérant 46 dudit règlement. Les créanciers locaux seraient lésés puisque cet acte les empêcherait d’obtenir le remboursement de leur créance.
36 Les requérants au principal ajoutent qu’ils ont fait l’objet d’un traitement discriminatoire par rapport à celui qui a été accordé aux autres travailleurs dans la procédure d’insolvabilité principale relative à Air Berlin, au motif qu’aucune somme ne leur a été versée.
37 La juridiction de renvoi estime qu’il est nécessaire d’obtenir des éclaircissements sur l’interprétation de ce règlement.
38 En premier lieu, elle s’interroge sur la manière dont se compose la masse d’une procédure d’insolvabilité secondaire et, plus précisément, sur le paramètre temporel qui doit être pris en compte pour déterminer les actifs et les droits qui en font partie.
39 En deuxième lieu, la juridiction de renvoi s’interroge sur le caractère éventuellement illicite et abusif de l’acte de déplacement d’actifs hors du territoire sur lequel l’établissement est situé.
40 Cette juridiction relève que l’article 21, paragraphe 1, du règlement 2015/848 autorise le praticien de l’insolvabilité à déplacer les actifs du débiteur hors du territoire de l’État membre dans lequel ils se trouvent.
41 En l’occurrence, la question qui se pose est celle de savoir si, sur la base de ce pouvoir, le praticien de l’insolvabilité de la procédure d’insolvabilité principale peut déplacer des actifs du débiteur hors du territoire de l’État membre lorsqu’il sait que l’ouverture d’une procédure d’insolvabilité secondaire est probable et en dépit d’une décision judiciaire ayant prononcé la saisie conservatoire d’actifs.
42 En troisième lieu, cette juridiction s’interroge sur le droit des créanciers d’exercer des actions révocatoires contre les actes accomplis par le praticien de l’insolvabilité de la procédure d’insolvabilité principale.
43 Ladite juridiction relève, à ce propos, que l’article 6, paragraphe 1, du règlement 2015/848 énonce expressément que les juridictions de l’État membre sur le territoire duquel la procédure d’insolvabilité a été ouverte en application de l’article 3 sont compétentes pour connaître des actions révocatoires.
44 Toutefois, la même juridiction éprouve des doutes sur le point de savoir si l’action intentée par les requérants au principal est une action révocatoire au sens de l’article 21, paragraphe 2, de ce règlement en ce que leur action porte sur un acte accompli par le praticien de l’insolvabilité de la procédure d’insolvabilité principale, et non par le débiteur.
45 Or même si un tel praticien agit au nom et pour le compte du débiteur, cet acte est accompli non pas par le débiteur, mais par ledit praticien dans l’exercice du pouvoir que lui confère l’article 21, paragraphe 1, du règlement 2015/848 de déplacer les actifs du débiteur hors du territoire de l’État membre dans lequel ils se trouvent.
46 La juridiction de renvoi estime dès lors que l’interprétation de l’article 21, paragraphe 2, du règlement 2015/848 est nécessaire afin de déterminer si un tel acte, effectué par le praticien de l’insolvabilité de la procédure d’insolvabilité principale, peut faire l’objet d’une révocation à la demande du praticien de l’insolvabilité de la procédure d’insolvabilité secondaire.
47 En effet, la réponse à cette question lui permettra de déterminer si, conformément au régime de la qualité pour agir à titre subsidiaire des créanciers, prévu aux articles 232 et 238 de la loi sur l’insolvabilité, les créanciers locaux ont qualité pour exercer l’action au principal.
48 Dans ces conditions, le Juzgado de lo Mercantil no 1 de Palma de Mallorca (tribunal de commerce no 1 de Palma de Majorque) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :
« 1) L’article 3, paragraphe 2, et l’article 34 [du] règlement [2015/848] peu[vent]-ils être interprétés en ce sens que les actifs situés dans l’État d’ouverture de la procédure [d’insolvabilité] secondaire, et auxquels les effets de cette procédure sont limités, sont uniquement ceux qui existent au moment de l’ouverture de la procédure [d’insolvabilité] secondaire et non ceux qui existaient lorsque la procédure [d’insolvabilité] principale a été ouverte ?
2) L’article 21, paragraphe 1, [du] règlement [2015/848] peut-il être interprété en ce sens que relève du pouvoir de déplacer les actifs du débiteur hors du territoire de l’État membre dans lequel ils se trouvent la décision du praticien de l’insolvabilité de la procédure d’insolvabilité principale de déplacer des actifs sans demander l’ouverture d’une procédure [d’insolvabilité] secondaire ou éviter une telle procédure en prenant un engagement unilatéral au titre des articles 36 et 37 [de ce règlement], lorsque ledit praticien a connaissance de l’existence de créance[s] de travail détenues par des créanciers locaux et reconnues par [des] décisions de justice ainsi que d’une saisie conservatoire d’actifs décidée par une juridiction du travail de l’État membre susvisé ?
3) L’article 21, paragraphe 2, [du] règlement [2015/848] peut-il être interprété en ce sens que le pouvoir d’exercer des actions révocatoires utiles aux intérêts des créanciers qu’il confère au praticien de l’insolvabilité de la procédure d’insolvabilité secondaire s’applique à une situation telle que celle qui est décrite, dans laquelle la révocation d’un acte accompli par le praticien de l’insolvabilité désigné dans la procédure d’insolvabilité principale est demandée ? »
Sur les questions préjudicielles
49 À titre liminaire, il convient de préciser que, dans la mesure ou le règlement 2015/848 a abrogé et remplacé le règlement (CE) no 1346/2000 du Conseil, du 29 mai 2000, relatif aux procédures d’insolvabilité (JO 2000, L 160, p. 1), l’interprétation fournie par la Cour en ce qui concerne les dispositions de ce dernier règlement vaut également pour celles du premier, lorsque ces dispositions peuvent être qualifiées d’équivalentes.
Sur la question préjudicielle dans l’affaire C 765/22
50 Par son unique question dans l’affaire C 765/22, la juridiction de renvoi demande, en substance, si les articles 7 et 35 du règlement 2015/848, lus en combinaison avec le considérant 72 de ce règlement, doivent être interprétés en ce sens qu’ils imposent l’application de la loi de l’État d’ouverture de la procédure d’insolvabilité secondaire au sort des seules créances nées après l’ouverture de cette procédure, et non au sort des créances nées entre l’ouverture de la procédure d’insolvabilité principale et celle de la procédure d’insolvabilité secondaire.
51 À cet égard, s’agissant, en premier lieu, du libellé des dispositions pertinentes, il doit être observé, premièrement, que tant l’article 7, paragraphe 1, du règlement 2015/848, lequel s’applique aux procédures d’insolvabilité principale et secondaires, que l’article 35 de ce règlement, qui ne concerne que les procédures d’insolvabilité secondaires, renvoient à la loi de l’État membre dans lequel la procédure a été ouverte.
52 Or, conformément à l’article 2, point 8, dudit règlement, le moment de l’ouverture de la procédure est le moment auquel la décision d’ouverture de la procédure d’insolvabilité prend effet, que cette décision soit définitive ou non.
53 Deuxièmement, l’article 7, paragraphe 2, sous g), du même règlement précise que la loi de l’État membre sur le territoire duquel la procédure a été ouverte détermine, notamment, le sort des créances nées après l’ouverture de la procédure d’insolvabilité.
54 Il découle de ces observations que l’article 7, paragraphe 1, du règlement 2015/848 est une règle de conflit de lois, cette qualification étant d’ailleurs confirmée par le considérant 66 de ce règlement, qui indique que les règles de conflit uniformes prévues par ledit règlement remplacent les règles nationales du droit international privé (voir, par analogie, arrêt du 22 novembre 2012, Bank Handlowy et Adamiak, C 116/11, EU:C:2012:739, point 47).
55 Certes, il ressort du considérant 72 dudit règlement que les effets de la procédure d’insolvabilité sur la poursuite ou la cessation des relations de travail et sur les droits et les obligations de chaque partie à ces relations devraient être déterminés par la loi applicable au contrat de travail concerné et non par la loi de l’État d’ouverture de la procédure d’insolvabilité. Toutefois, ce considérant précise expressément que ladite dérogation ne s’applique pas à la question de savoir si les créances des travailleurs sont garanties par un privilège et quel est le rang éventuel de ce privilège.
56 Par ailleurs, dès lors qu’il convient d’interpréter de manière stricte les termes d’une disposition dérogeant à un principe (voir, en ce sens, arrêts du 18 janvier 2001, Commission/Espagne, C 83/99, EU:C:2001:31, point 19, et du 10 mars 2005, EasyCar, C 336/03, EU:C:2005:150, point 21), cette règle doit nécessairement valoir pour l’article 13 du règlement 2015/848 qui constitue une exception au principe de la lex concursus, précisé au considérant 66 de ce règlement.
57 Il s’ensuit que la question relative au sort de créances telles que celles en cause au principal, nées après l’ouverture de la procédure d’insolvabilité principale, et concernant la reconnaissance et le rang de celles-ci, entre dans le champ d’application de l’article 7, paragraphe 2, sous g), du règlement 2015/848, lequel contient un renvoi exprès à la loi de l’État d’ouverture. Cette question doit, par conséquent, être tranchée en application de la lex concursus désignée comme applicable sur cette base (voir, par analogie, arrêt du 22 novembre 2012, Bank Handlowy et Adamiak, C 116/11, EU:C:2012:739, point 50).
58 En deuxième lieu, cette interprétation des articles 7 et 35 du règlement 2015/848, en vertu de laquelle c’est la loi de l’État membre dans lequel la procédure d’insolvabilité a été ouverte qui détermine le sort des créances nées après l’ouverture de ladite procédure, est confortée par une lecture systématique de ce règlement.
59 En effet, premièrement, il découle de l’article 3, paragraphe 2, et de l’article 34 du règlement 2015/848 que les effets de la procédure d’insolvabilité secondaire sont limités aux actifs du débiteur qui se trouvent, à la date de l’ouverture de cette procédure, sur le territoire de l’État membre d’ouverture de ladite procédure (voir, par analogie, arrêts du 11 juin 2015, Comité d’entreprise de Nortel Networks e.a., C 649/13, EU:C:2015:384, point 48, ainsi que du 14 novembre 2018, Wiemer & Trachte, C 296/17, EU:C:2018:902, point 40).
60 Deuxièmement, l’applicabilité du principe de la lex concursus à la date d’ouverture de la procédure d’insolvabilité secondaire permet d’identifier aisément la loi applicable, tout en respectant l’opportunité que laisse l’article 45 du même règlement aux créanciers de produire leurs créances non seulement dans le cadre de la procédure d’insolvabilité principale, mais également dans celui de toute procédure d’insolvabilité secondaire.
61 En troisième lieu, eu égard au caractère de règle de conflit de lois de l’article 7 du règlement 2015/848, une telle interprétation est également conforme à l’objectif de ce règlement qui est non pas de mettre en place une procédure d’insolvabilité uniforme, mais, comme il ressort du considérant 3 de celui-ci, d’assurer que les procédures d’insolvabilité transfrontalières fonctionnent efficacement. À cet effet, comme la Cour a déjà eu l’occasion de le juger, ledit règlement fixe des règles de compétence et de reconnaissance ainsi que des règles relatives au droit applicable dans ce domaine [voir, par analogie, arrêt du 22 novembre 2012, Bank Handlowy et Adamiak, C 116/11, EU:C:2012:739, point 45]. Le sort des créances nées après l’ouverture de la procédure d’insolvabilité envisagé à cet article 7 doit dès lors être tranché en application de la lex concursus désignée comme applicable.
62 Il découle des considérations qui précèdent que les articles 7 et 35 du règlement 2015/848, lus en combinaison avec le considérant 72 de ce règlement, doivent être interprétés en ce sens que la loi de l’État d’ouverture de la procédure d’insolvabilité secondaire s’applique au sort des seules créances nées après l’ouverture de cette procédure, et non au sort des créances nées entre l’ouverture de la procédure d’insolvabilité principale et celle de la procédure d’insolvabilité secondaire.
Sur les questions préjudicielles dans l’affaire C 772/22
Sur la première question
63 Par la première question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 3, paragraphe 2, et l’article 34 du règlement 2015/848 doivent être interprétés en ce sens que la masse des actifs situés dans l’État d’ouverture de la procédure d’insolvabilité secondaire est uniquement constituée des actifs qui se trouvent sur le territoire de cet État membre au moment de l’ouverture de cette procédure ou si elle inclut également ceux qui se trouvaient sur le territoire dudit État membre lorsque la procédure d’insolvabilité principale a été ouverte et qui ont, dans l’intervalle, été déplacés par le praticien de l’insolvabilité de la procédure d’insolvabilité principale.
64 Tout d’abord, ainsi qu’il ressort de la jurisprudence citée au point 59 du présent arrêt, il découle du libellé de ces dispositions que les effets d’une procédure d’insolvabilité secondaire sont limités aux biens du débiteur qui se trouvaient, à la date de l’ouverture de cette procédure, sur le territoire de l’État membre d’ouverture de ladite procédure.
65 Cette interprétation est, ensuite, confortée par une lecture systématique du règlement 2015/848.
66 En effet, en premier lieu, s’il ressort des termes de l’article 21, paragraphe 2, de ce règlement que le praticien de l’insolvabilité de la procédure d’insolvabilité secondaire est autorisé à faire valoir qu’un bien mobilier a été transféré du territoire de l’État membre de cette procédure sur le territoire d’un autre État membre, cette possibilité est expressément circonscrite aux opérations de transfert réalisées après l’ouverture de ladite procédure.
67 En second lieu, l’article 36, paragraphe 1, dudit règlement prévoit également que le praticien de l’insolvabilité de la procédure d’insolvabilité principale peut prendre un engagement unilatéral en ce qui concerne les actifs qui se trouvent dans l’État membre dans lequel une procédure d’insolvabilité secondaire pourrait être ouverte, et cela afin d’éviter une telle procédure. Dans l’hypothèse où un tel engagement a été pris, l’article 36, paragraphe 6, du même règlement précise que, lorsqu’une procédure d’insolvabilité secondaire est ouverte malgré l’engagement du praticien de l’insolvabilité de la procédure d’insolvabilité principale, ce praticien doit transférer tous les actifs qu’il a déplacés hors du territoire de cet État membre après que l’engagement a été pris.
68 Cette disposition met en évidence la volonté du législateur de l’Union de circonscrire les conséquences de l’ouverture d’une procédure d’insolvabilité secondaire sur les actes pris par le praticien de l’insolvabilité de la procédure d’insolvabilité principale.
69 Enfin, une interprétation de l’article 3, paragraphe 2, et de l’article 34 du règlement 2015/848 qui limite la masse des actifs situés dans l’État d’ouverture de la procédure d’insolvabilité secondaire aux actifs qui se trouvent sur le territoire de cet État membre au moment de l’ouverture de cette procédure est susceptible de concilier les différents objectifs poursuivis par ce règlement, tels qu’ils sont mentionnés notamment à ses considérants 23 et 40.
70 En effet, si les procédures d’insolvabilité secondaires ont pour objectif principal la protection des intérêts locaux, la procédure d’insolvabilité principale produit des effets universels en ce qu’elle s’applique aux biens du débiteur situés dans tous les États membres (voir, par analogie, arrêt du 22 novembre 2012, Bank Handlowy et Adamiak, C 116/11, EU:C:2012:739, point 40). Ainsi, dans ce système, et comme le précise le considérant 48 dudit règlement, la procédure d’insolvabilité principale occupe, par rapport à la procédure d’insolvabilité secondaire, un rôle prédominant (voir, par analogie, arrêt du 22 novembre 2012, Bank Handlowy et Adamiak, C 116/11, EU:C:2012:739, point 60). En effet, le règlement 2015/848 met en œuvre l’objectif d’un fonctionnement efficace et effectif des procédures d’insolvabilité transfrontalières par la coordination des procédures d’insolvabilité principale et secondaire dans le respect de la primauté de la procédure d’insolvabilité principale (voir, par analogie, arrêt du 22 novembre 2012, Bank Handlowy et Adamiak, C 116/11, EU:C:2012:739, point 72).
71 Il découle des motifs qui précèdent que l’article 3, paragraphe 2, et l’article 34 du règlement 2015/848 doivent être interprétés en ce sens que la masse des actifs situés dans l’État d’ouverture de la procédure d’insolvabilité secondaire est uniquement constituée des actifs qui se trouvent sur le territoire de cet État membre au moment de l’ouverture de cette procédure.
Sur la deuxième question
72 Par la deuxième question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 21, paragraphe 1, du règlement 2015/848 doit être interprété en ce sens que le praticien de l’insolvabilité de la procédure d’insolvabilité principale peut déplacer les actifs du débiteur hors du territoire d’un État membre autre que celui de la procédure d’insolvabilité principale, alors qu’il a connaissance de l’existence, d’une part, de créances de travail détenues par des créanciers locaux sur le territoire de cet autre État membre, reconnues par des décisions de justice, et, d’autre part, d’une saisie conservatoire d’actifs décidée par une juridiction du travail de ce dernier État membre.
73 S’agissant du libellé de l’article 21, paragraphe 1, du règlement 2015/848, cette disposition énonce que le praticien de l’insolvabilité peut exercer dans un autre État membre « tous les pouvoirs qui lui sont conférés par la loi de l’État [membre] d’ouverture » de la procédure d’insolvabilité principale, cela « aussi longtemps qu’aucune autre procédure d’insolvabilité n’a été ouverte dans cet autre État membre et qu’aucune mesure conservatoire contraire n’y a été prise à la suite d’une demande d’ouverture d’une procédure d’insolvabilité dans cet État ». Or cette disposition précise expressément que ces pouvoirs incluent celui de déplacer des actifs hors du territoire de l’État membre dans lequel ils se trouvent, sous la seule réserve de l’applicabilité des articles 8 et 10 de ce règlement qui visent, respectivement, l’existence d’un droit réel d’un créancier ou d’un tiers et l’hypothèse d’une réserve de propriété.
74 Comme il est indiqué aux considérants 67 et 68 dudit règlement, ces exceptions, qui ont pour objectif de protéger la confiance légitime et la sécurité des transactions dans des États membres différents de celui de l’ouverture de la procédure d’insolvabilité principale, doivent être interprétées strictement et leur portée ne saurait aller au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre cet objectif (voir, par analogie, arrêts du 16 avril 2015, Lutz, C 557/13, EU:C:2015:227, point 34, et du 22 avril 2021, Oeltrans Befrachtungsgesellschaft, C 73/20, EU:C:2021:315, point 24).
75 Or, des créances de travail détenues par des créanciers locaux et une saisie conservatoire d’actifs, comme dans l’affaire au principal, ne sont pas de nature à empêcher le déplacement d’actifs du territoire de l’État membre de l’ouverture de la procédure d’insolvabilité secondaire par le praticien de l’insolvabilité de la procédure d’insolvabilité principale, à moins que ces créances ou cette saisie conservatoire portent, au regard du droit applicable en vertu de l’article 8 du même règlement, sur des droits réels.
76 Cette interprétation est confortée par le contexte dans lequel s’inscrit l’article 21, paragraphe 1, du règlement 2015/848.
77 En premier lieu, la première phrase de l’article 21, paragraphe 2, de ce règlement énonce que le praticien de l’insolvabilité de la procédure d’insolvabilité secondaire peut faire valoir qu’un bien mobilier a été transféré du territoire de l’État membre d’ouverture de cette procédure sur le territoire d’un autre État membre « après l’ouverture de la[dite] procédure d’insolvabilité ». La deuxième phrase de cette disposition ajoute qu’il est également loisible à ce praticien d’exercer toute action révocatoire utile aux intérêts des créanciers. Or cette dernière précision n’a d’effet utile que si elle vise d’autres biens que ceux visés par la première phrase de la disposition, de sorte que ces biens sont nécessairement ceux qui auraient été transférés hors du territoire de l’État membre de la procédure d’insolvabilité secondaire avant son ouverture.
78 L’article 21, paragraphes 1 et 2, du règlement 2015/848 garantit ainsi une articulation des pouvoirs du praticien de l’insolvabilité et des mécanismes de sauvegarde des intérêts de créanciers locaux conforme à la volonté du législateur de l’Union, telle qu’exprimée au considérant 46 de ce règlement. En effet, aux termes de celui-ci, le praticien de l’insolvabilité de la procédure d’insolvabilité principale ne devrait pas être en mesure de réaliser ou de déplacer, de manière abusive, les actifs se trouvant dans l’État membre où un établissement est situé, en particulier dans le but d’éluder la possibilité que ces intérêts puissent être effectivement satisfaits en cas d’ouverture ultérieure d’une procédure d’insolvabilité secondaire.
79 En second lieu, une telle interprétation de l’article 21, paragraphe 1, du règlement 2015/848, selon laquelle le praticien de l’insolvabilité de la procédure d’insolvabilité principale peut déplacer les actifs du débiteur hors du territoire d’un État membre autre que celui de la procédure d’insolvabilité principale, est confortée par l’article 36, paragraphe 6, de ce règlement.
80 En effet, lorsqu’une procédure d’insolvabilité secondaire est ouverte alors que le praticien de l’insolvabilité de la procédure d’insolvabilité principale a pris précédemment un engagement unilatéral au sens de l’article 36, paragraphe 1, du règlement 2015/848, l’article 36, paragraphe 6, de ce règlement impose uniquement à ce praticien de transférer les actifs qu’il a déplacés « après que l’engagement a été pris », ce qui implique que ledit praticien dispose du pouvoir de déplacer ces actifs. Or, l’engagement unilatéral du praticien de l’insolvabilité n’étant qu’une faculté, comme le démontre l’utilisation du verbe « pouvoir » à l’article 36, paragraphe 1, dudit règlement, l’étendue de ses pouvoirs, en particulier la possibilité de procéder à des déplacements d’actifs, ne saurait être à fortiori restreinte lorsqu’il n’a pris aucun engagement au sens de cette disposition.
81 Il découle des motifs qui précèdent que l’article 21, paragraphe 1, du règlement 2015/848 doit être interprété en ce sens que le praticien de l’insolvabilité de la procédure d’insolvabilité principale peut déplacer les actifs du débiteur hors du territoire d’un État membre autre que celui de la procédure d’insolvabilité principale alors qu’il a connaissance de l’existence, d’une part, de créances de travail détenues par des créanciers locaux sur le territoire de cet autre État membre, reconnues par des décisions de justice, et, d’autre part, d’une saisie conservatoire d’actifs décidée par une juridiction du travail de ce dernier État membre.
Sur la troisième question
82 Par la troisième question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 21, paragraphe 2, du règlement 2015/848 doit être interprété en ce sens que le praticien de l’insolvabilité de la procédure d’insolvabilité secondaire peut exercer une action révocatoire contre un acte qui a été accompli par le praticien de l’insolvabilité de la procédure d’insolvabilité principale.
83 Selon cette disposition, le praticien de l’insolvabilité secondaire peut exercer toute action révocatoire utile aux intérêts des créanciers. Comme l’ont souligné les requérants au principal et la Commission européenne dans leurs observations, le cercle des personnes contre lesquelles une telle action peut être exercée n’est ainsi aucunement limité.
84 Il s’ensuit que rien dans le libellé de ladite disposition ne permet de soutenir une interprétation de celle-ci qui empêcherait le praticien de l’insolvabilité de la procédure d’insolvabilité secondaire d’exercer une action révocatoire contre un acte du praticien de l’insolvabilité de la procédure d’insolvabilité principale s’il estime cette action utile aux intérêts des créanciers.
85 Cette interprétation est, par ailleurs, conforme à l’un des objectifs essentiels du règlement 2015/848 qui vise, grâce à la possibilité d’ouvrir une procédure d’insolvabilité secondaire, ainsi qu’il ressort des considérants 40 et 46 de ce règlement, la protection des intérêts locaux (voir, par analogie, arrêt du 4 septembre 2014, Burgo Group, C 327/13, EU:C:2014:2158, point 36).
86 Il découle des motifs qui précèdent que l’article 21, paragraphe 2, du règlement 2015/848 doit être interprété en ce sens que le praticien de l’insolvabilité de la procédure d’insolvabilité secondaire peut exercer une action révocatoire contre un acte qui a été accompli par le praticien de l’insolvabilité de la procédure d’insolvabilité principale.
Sur les dépens
87 La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.
Par ces motifs, la Cour (troisième chambre) dit pour droit :
1) Les articles 7 et 35 du règlement (UE) 2015/848 du Parlement européen et du Conseil, du 20 mai 2015, relatif aux procédures d’insolvabilité, lus en combinaison avec le considérant 72 de ce règlement,
doivent être interprétés en ce sens que :
la loi de l’État d’ouverture de la procédure d’insolvabilité secondaire s’applique au sort des seules créances nées après l’ouverture de cette procédure, et non au sort des créances nées entre l’ouverture de la procédure d’insolvabilité principale et celle de la procédure d’insolvabilité secondaire.
2) L’article 3, paragraphe 2, et l’article 34 du règlement 2015/848
doivent être interprétés en ce sens que :
la masse des actifs situés dans l’État d’ouverture de la procédure d’insolvabilité secondaire est uniquement constituée des actifs qui se trouvent sur le territoire de cet État membre au moment de l’ouverture de cette procédure.
3) L’article 21, paragraphe 1, du règlement 2015/848
doit être interprété en ce sens que :
le praticien de l’insolvabilité de la procédure d’insolvabilité principale peut déplacer les actifs du débiteur hors du territoire d’un État membre autre que celui de la procédure d’insolvabilité principale alors qu’il a connaissance de l’existence, d’une part, de créances de travail détenues par des créanciers locaux sur le territoire de cet autre État membre, reconnues par des décisions de justice, et, d’autre part, d’une saisie conservatoire d’actifs décidée par une juridiction du travail de ce dernier État membre.
4) L’article 21, paragraphe 2, du règlement 2015/848
doit être interprété en ce sens que :
le praticien de l’insolvabilité de la procédure d’insolvabilité secondaire peut exercer une action révocatoire contre un acte qui a été accompli par le praticien de l’insolvabilité de la procédure d’insolvabilité principale.