CJUE, gr. ch., 8 décembre 2022, n° C-694/20
COUR DE JUSTICE DE L’UNION EUROPEENNE
Arrêt
Rejet
PARTIES
Demandeur :
Orde van Vlaamse Balies, IG, Belgian Association of Tax Lawyers, CD, JU
Défendeur :
Vlaamse Regering
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Lenaerts
Juges :
M. Biltgen, M. Piçarra, M. Jarukaitis, M. Jääskinen, M. Wahl, Mme Ziemele, M. Passer
Avocat général :
M. Rantos
Avocats :
Me Eskenazi, Me Wouters, Me Malherbe, Me Verhaeghe, Me Delanote
LA COUR (grande chambre),
vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 25 janvier 2022,
considérant les observations présentées :
– pour Orde van Vlaamse Balies et IG, par Mes S. Eskenazi et P. Wouters, advocaten,
– pour Belgian Association of Tax Lawyers, CD et JU, par Me P. Malherbe, avocat, et Me P. Verhaeghe, advocaat,
– pour le gouvernement belge, par MM. S. Baeyens, J.-C. Halleux et Mme C. Pochet, en qualité d’agents, assistés de Me M. Delanote, advocaat,
– pour le gouvernement tchèque, par Mme J. Očková, MM. M. Smolek et J. Vláčil, en qualité d’agents,
– pour le gouvernement français, par M. R. Bénard, Mmes A.‑L. Desjonquères, E. de Moustier et M. É. Toutain, en qualité d’agents,
– pour le gouvernement letton, par Mmes J. Davidoviča, I. Hūna et K. Pommere, en qualité d’agents,
– pour le Conseil de l’Union européenne, par Mme E. Chatziioakeimidou, M. I. Gurov et Mme S. Van Overmeire, en qualité d’agents,
– pour la Commission européenne, par MM. W. Roels et P. Van Nuffel, en qualité d’agents,
ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 5 avril 2022,
rend le présent
1 La demande de décision préjudicielle porte sur la validité de l’article 8 bis ter, paragraphe 5, de la directive 2011/16/UE du Conseil, du 15 février 2011, relative à la coopération administrative dans le domaine fiscal et abrogeant la directive 77/799/CEE (JO 2011, L 64, p. 1), telle que modifiée par la directive (UE) 2018/822 du Conseil, du 25 mai 2018 (JO 2018, L 139, p. 1) (ci-après la « directive 2011/16 modifiée »), au regard des articles 7 et 47 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte »).
2 Cette demande a été présentée dans le cadre de litiges opposant l’Orde van Vlaamse Balies (ordre des barreaux flamands), la Belgian Association of Tax Lawyers, une association professionnelle d’avocats, ainsi que IG, CD et JU, trois avocats, au Vlaamse Regering (gouvernement flamand, Belgique) au sujet de la validité de certaines dispositions de la réglementation flamande relative à la coopération administrative dans le domaine fiscal.
Le cadre juridique
Le droit de l’Union
La directive 2011/16
3 La directive 2011/16 a instauré un système de coopération entre les autorités fiscales nationales des États membres et établit les règles ainsi que les procédures à appliquer lors de l’échange d’informations à des fins fiscales.
La directive 2018/822
4 La directive 2011/16 a été modifiée à plusieurs reprises et, notamment, par la directive 2018/822. Cette directive a introduit une obligation de déclaration concernant les dispositifs fiscaux transfrontières de planification fiscale à caractère potentiellement agressif auprès des autorités compétentes. À cet égard, les considérants 2, 4, 6, 8, 9 et 18 de la directive 2018/822 énoncent ce qui suit :
« (2) Les États membres éprouvent de plus en plus de difficultés à protéger leur base d’imposition nationale de l’érosion car les structures de planification fiscale sont devenues particulièrement sophistiquées et tirent souvent parti de la mobilité accrue tant des capitaux que des personnes au sein du marché intérieur. [...] Il est par conséquent essentiel que les autorités fiscales des États membres obtiennent des informations complètes et pertinentes sur les dispositifs fiscaux à caractère potentiellement agressif. De telles informations leur permettraient de réagir rapidement contre les pratiques fiscales dommageables et de remédier aux lacunes par voie législative ou par la réalisation d’analyses des risques appropriées et de contrôles fiscaux. [...]
[...]
(4) Reconnaissant qu’un cadre transparent pour le développement de l’activité économique pourrait contribuer à lutter contre l’évasion et la fraude fiscales dans le marché intérieur, la Commission [européenne] a été amenée à engager des initiatives relatives à la communication obligatoire d’informations sur les dispositifs de planification fiscale à caractère potentiellement agressif, qui s’inspirent de l’action 12 du projet de l’[Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE)] concernant l’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices (BEPS). Dans ce contexte, le Parlement européen a plaidé en faveur de mesures plus strictes contre les intermédiaires qui participent à des dispositifs pouvant conduire à l’évasion et la fraude fiscales. Il importe également de noter que, dans la déclaration du G7 de Bari du 13 mai 2017 sur la lutte contre les infractions fiscales et les flux financiers illicites, il a été demandé à l’OCDE d’entamer une réflexion sur les moyens envisageables pour contrer les dispositifs conçus pour contourner les obligations de déclaration au titre de la [norme commune de déclaration (NCD)] ou visant à fournir aux bénéficiaires effectifs la protection de structures opaques, et à examiner également un modèle de règles de communication obligatoire s’inspirant de l’approche retenue en matière de dispositifs d’évasion fiscale dans le rapport sur l’action 12 du projet BEPS.
[...]
(6) La déclaration d’informations sur des dispositifs transfrontières de planification fiscale à caractère potentiellement agressif peut contribuer efficacement aux efforts déployés pour créer un environnement fiscal équitable dans le marché intérieur. À cet égard, faire obligation aux intermédiaires d’informer les autorités fiscales [...] constituerait un pas dans la bonne direction. [...]
[...]
(8) Afin de garantir le bon fonctionnement du marché intérieur et de prévenir les lacunes dans le cadre réglementaire proposé, l’obligation de déclaration devrait incomber à tous les acteurs qui participent généralement à la conception, la commercialisation, l’organisation ou la gestion de la mise en œuvre d’une opération transfrontière devant faire l’objet d’une déclaration ou d’une série de telles opérations, ainsi qu’à ceux qui apportent assistance ou conseil. Il convient de noter que, dans certains cas, l’obligation de déclaration ne serait pas applicable à un intermédiaire en raison du secret professionnel applicable en vertu du droit ou lorsqu’il n’existe pas d’intermédiaire, par exemple parce que le contribuable conçoit et met en œuvre un schéma en interne. Il serait donc essentiel que, dans ces circonstances, les autorités fiscales ne soient pas privées de la possibilité de recevoir des informations sur les dispositifs fiscaux potentiellement liés à la planification fiscale agressive. Il serait donc nécessaire que l’obligation de déclaration incombe alors au contribuable qui bénéficie du dispositif dans ces cas particuliers.
(9) Les dispositifs de planification fiscale à caractère agressif ont évolué au fil des ans pour devenir toujours plus complexes et font en permanence l’objet de modifications et d’ajustements pour répondre aux contre-mesures défensives prises par les autorités fiscales. Compte tenu de ce qui précède, il serait plus efficace de chercher à cerner les dispositifs de planification fiscale à caractère potentiellement agressif en constituant une liste des caractéristiques et éléments des opérations présentant des signes manifestes d’évasion fiscale ou de pratiques fiscales abusives plutôt que de définir la notion de planification fiscale agressive. Ces indications sont appelées des “marqueurs”.
[...]
(18) La présente directive respecte les droits fondamentaux et observe les principes reconnus, en particulier, par la Charte [...] »
La directive 2011/16 modifiée
5 L’article 3 de la directive 2011/16 modifiée, intitulé « Définitions », dispose :
« Aux fins de la présente directive, on entend par :
1) “autorité compétente” d’un État membre : l’autorité désignée en tant que telle par cet État membre. Lorsqu’ils agissent en vertu de la présente directive, le bureau central de liaison, un service de liaison ou un fonctionnaire compétent sont également considérés comme une autorité compétente par délégation, conformément à l’article 4 ;
[...]
18) “dispositif transfrontière” : un dispositif concernant plusieurs États membres ou un État membre et un pays tiers si l’une au moins des conditions suivantes est remplie :
a) tous les participants au dispositif ne sont pas résidents à des fins fiscales dans la même juridiction ;
b) un ou plusieurs des participants au dispositif sont résidents à des fins fiscales dans plusieurs juridictions simultanément ;
c) un ou plusieurs des participants au dispositif exercent une activité dans une autre juridiction par l’intermédiaire d’un établissement stable situé dans cette juridiction, le dispositif constituant une partie ou la totalité de l’activité de cet établissement stable ;
d) un ou plusieurs des participants au dispositif exercent une activité dans une autre juridiction sans être résidents à des fins fiscales ni créer d’établissement stable dans cette juridiction ;
e) un tel dispositif peut avoir des conséquences sur l’échange automatique d’informations ou sur l’identification des bénéficiaires effectifs.
[...]
19) “dispositif transfrontière devant faire l’objet d’une déclaration” : tout dispositif transfrontière comportant au moins l’un des marqueurs figurant à l’annexe IV ;
20) “marqueur” : une caractéristique ou particularité d’un dispositif transfrontière qui indique un risque potentiel d’évasion fiscale, comme recensée à l’annexe IV ;
21) “intermédiaire” : toute personne qui conçoit, commercialise ou organise un dispositif transfrontière devant faire l’objet d’une déclaration, le met à disposition aux fins de sa mise en œuvre ou en gère la mise en œuvre.
On entend également par ce terme toute personne qui, compte tenu des faits et circonstances pertinents et sur la base des informations disponibles ainsi que de l’expertise en la matière et de la compréhension qui sont nécessaires pour fournir de tels services, sait ou pourrait raisonnablement être censée savoir qu’elle s’est engagée à fournir, directement ou par l’intermédiaire d’autres personnes, une aide, une assistance ou des conseils concernant la conception, la commercialisation ou l’organisation d’un dispositif transfrontière devant faire l’objet d’une déclaration, ou concernant sa mise à disposition aux fins de mise en œuvre ou la gestion de sa mise en œuvre. Toute personne a le droit de fournir des éléments prouvant qu’elle ne savait pas et ne pouvait pas raisonnablement être censée savoir qu’elle participait à un dispositif transfrontière devant faire l’objet d’une déclaration. À cette fin, cette personne peut invoquer tous les faits et circonstances pertinents ainsi que les informations disponibles et son expertise et sa compréhension en la matière.
Pour être un intermédiaire, une personne répond à l’une au moins des conditions supplémentaires suivantes :
a) être résidente dans un État membre à des fins fiscales ;
b) posséder dans un État membre un établissement stable par le biais duquel sont fournis les services concernant le dispositif ;
c) être constituée dans un État membre ou régie par le droit d’un État membre ;
d) être enregistrée auprès d’une association professionnelle en rapport avec des services juridiques, fiscaux ou de conseil dans un État membre ;
22) “contribuable concerné”: toute personne à qui un dispositif transfrontière devant faire l’objet d’une déclaration est mis à disposition aux fins de sa mise en œuvre, ou qui est disposée à mettre en œuvre un dispositif transfrontière devant faire l’objet d’une déclaration, ou qui a mis en œuvre la première étape d’un tel dispositif ;
[...]
24) “dispositif commercialisable” : un dispositif transfrontière qui est conçu, commercialisé, prêt à être mis en œuvre, ou mis à disposition aux fins de sa mise en œuvre, sans avoir besoin d’être adapté de façon importante ;
25) “dispositif sur mesure” : tout dispositif transfrontière qui n’est pas un dispositif commercialisable. »
6 L’article 8 bis ter de la directive 2011/16 modifiée, intitulé « Champ d’application et conditions de l’échange automatique et obligatoire d’informations relatives aux dispositifs transfrontières devant faire l’objet d’une déclaration », a été inséré par l’article 1er, paragraphe 2, de la directive 2018/822 et énonce :
« 1. Chaque État membre prend les mesures nécessaires pour que les intermédiaires soient tenus de transmettre aux autorités compétentes les informations dont ils ont connaissance, qu’ils possèdent ou qu’ils contrôlent concernant les dispositifs transfrontières devant faire l’objet d’une déclaration dans un délai de trente jours, commençant :
a) le lendemain de la mise à disposition aux fins de mise en œuvre du dispositif transfrontière devant faire l’objet d’une déclaration ; ou
b) le lendemain du jour où le dispositif transfrontière devant faire l’objet d’une déclaration est prêt à être mis en œuvre ; ou
c) lorsque la première étape de la mise en œuvre du dispositif transfrontière devant faire l’objet d’une déclaration a été accomplie,
la date intervenant le plus tôt étant retenue.
Nonobstant le premier alinéa, les intermédiaires visés à l’article 3, point 21), deuxième alinéa, sont également tenus de transmettre des informations dans un délai de trente jours commençant le lendemain du jour où ils ont fourni, directement ou par l’intermédiaire d’autres personnes, une aide, une assistance ou des conseils.
2. Dans le cas de dispositifs commercialisables, les États membres prennent les mesures nécessaires pour que les intermédiaires soient tenus d’établir tous les trois mois un rapport fournissant une mise à jour contenant les nouvelles informations devant faire l’objet d’une déclaration visées au paragraphe 14, points a), d), g) et h), qui sont devenues disponibles depuis la transmission du dernier rapport.
[...]
5. Chaque État membre peut prendre les mesures nécessaires pour accorder aux intermédiaires le droit d’être dispensés de l’obligation de fournir des informations concernant un dispositif transfrontière devant faire l’objet d’une déclaration lorsque l’obligation de déclaration serait contraire au secret professionnel applicable en vertu du droit national dudit État membre. En pareil cas, chaque État membre prend les mesures nécessaires pour que les intermédiaires soient tenus de notifier sans retard à tout autre intermédiaire, ou, en l’absence d’un tel intermédiaire, au contribuable concerné, les obligations de déclaration qui leur incombent en vertu du paragraphe 6.
Les intermédiaires ne peuvent avoir droit à une dispense en vertu du premier alinéa que dans la mesure où ils agissent dans les limites de la législation nationale pertinente qui définit leurs professions.
6. Chaque État membre prend les mesures nécessaires pour faire en sorte que, lorsqu’il n’existe pas d’intermédiaire ou que l’intermédiaire notifie l’application d’une dispense en vertu du paragraphe 5 au contribuable concerné ou à un autre intermédiaire, l’obligation de transmettre des informations sur un dispositif transfrontière devant faire l’objet d’une déclaration relève de la responsabilité de l’autre intermédiaire qui a été notifié, ou, en l’absence d’un tel intermédiaire, du contribuable concerné.
[...]
9. Chaque État membre prend les mesures nécessaires pour exiger que, lorsqu’il existe plus d’un intermédiaire, l’obligation de transmettre des informations sur le dispositif transfrontière devant faire l’objet d’une déclaration incombe à l’ensemble des intermédiaires participant à un même dispositif transfrontière devant faire l’objet d’une déclaration.
Un intermédiaire n’est dispensé de l’obligation de transmettre des informations que dans la mesure où il peut prouver, conformément au droit national, que ces mêmes informations, visées au paragraphe 14, ont déjà été transmises par un autre intermédiaire.
[...]
13. L’autorité compétente d’un État membre dans lequel les informations ont été transmises conformément aux paragraphes 1 à 12 [...], communique [...] les informations visées au paragraphe 14 [...] aux autorités compétentes de tous les autres États membres [...]
14. Les informations qui doivent être communiquées par l’autorité compétente d’un État membre conformément au paragraphe 13, comprennent les éléments suivants, le cas échéant :
a) l’identification des intermédiaires et des contribuables concernés, y compris leur nom, leur date et lieu de naissance (pour les personnes physiques), leur résidence fiscale, leur NIF et, le cas échéant, les personnes qui sont des entreprises associées au contribuable concerné ;
b) des informations détaillées sur les marqueurs recensés à l’annexe IV selon lesquels le dispositif transfrontière doit faire l’objet d’une déclaration ;
c) un résumé du contenu du dispositif transfrontière devant faire l’objet d’une déclaration, y compris une référence à la dénomination par laquelle il est communément connu, le cas échéant, et une description des activités commerciales ou dispositifs pertinents, présentée de manière abstraite, sans donner lieu à la divulgation d’un secret commercial, industriel ou professionnel, d’un procédé commercial ou d’informations dont la divulgation serait contraire à l’ordre public ;
d) la date à laquelle la première étape de la mise en œuvre du dispositif transfrontière devant faire l’objet d’une déclaration a été accomplie ou sera accomplie ;
e) des informations détaillées sur les dispositions nationales sur lesquelles se fonde le dispositif transfrontière devant faire l’objet d’une déclaration ;
f) la valeur du dispositif transfrontière devant faire l’objet d’une déclaration ;
g) l’identification de l’État membre du ou des contribuable(s) concerné(s) ainsi que de tout autre État membre susceptible d’être concerné par le dispositif transfrontière devant faire l’objet d’une déclaration ;
h) l’identification, dans les États membres, de toute autre personne susceptible d’être concernée par le dispositif transfrontière devant faire l’objet d’une déclaration en indiquant à quels États membres cette personne est liée.
[...] »
Le droit belge
7 Le decreet betreffende de administratieve samenwerking op het gebied van belastingen (décret relatif à la coopération administrative dans le domaine fiscal), du 21 juin 2013 (Belgisch Staatsblad, 26 juin 2013, p. 40587, ci-après le « décret du 21 juin 2013 »), transpose la directive 2011/16 en Région flamande (Belgique).
8 Ce décret a été modifié par le decreet tot wijziging van het decreet van 21 juni 2013, wat betreft de verplichte automatische uitwisseling van inlichtingen op belastinggebied met betrekking tot meldingsplichtige grensoverschrijdende constructies (décret modifiant le décret du 21 juin 2013, en ce qui concerne l’échange automatique et obligatoire d’informations dans le domaine fiscal en rapport avec les dispositifs transfrontières devant faire l’objet d’une déclaration), du 26 juin 2020 (Belgisch Staatsblad, 3 juillet 2020, p. 49170, ci-après le « décret du 26 juin 2020 »), qui transpose la directive 2018/822.
9 La sous-section 2 de la section 2 du chapitre 2 du décret du 21 juin 2013 régit la transmission obligatoire, par les intermédiaires ou par les contribuables concernés, d’informations relatives aux dispositifs fiscaux transfrontières devant faire l’objet d’une déclaration.
10 L’article 11/6 de cette sous-section, tel qu’il a été inséré dans le décret du 21 juin 2013 par l’article 14 du décret du 26 juin 2020, définit le rapport entre l’obligation de déclaration et le secret professionnel auquel certains intermédiaires sont tenus. Il transpose l’article 8 bis ter, paragraphes 5 et 6, de la directive 2011/16 modifiée. Le paragraphe 1 de cet article 11/6 dispose :
« Lorsqu’un intermédiaire est tenu par un secret professionnel, il est tenu :
1° d’informer l’autre intermédiaire ou les autres intermédiaires par écrit et de façon motivée qu’il ne peut satisfaire à l’obligation de déclaration, transférant cette obligation de déclaration automatiquement à l’autre intermédiaire ou aux autres intermédiaires ;
2° en l’absence d’un autre intermédiaire, d’informer le contribuable ou les contribuables concernés de son ou de leur obligation de déclaration par écrit et de façon motivée.
La dispense de l’obligation de déclaration ne prend effet qu’au moment où un intermédiaire a satisfait à l’obligation visée [au premier alinéa]. »
11 L’article 11/7 du décret du 21 juin 2013, tel qu’inséré dans ce décret par l’article 15 du décret du 26 juin 2020, énonce :
« [...] si l’intermédiaire informe le contribuable concerné ou un autre intermédiaire de l’application d’une dispense en vertu de l’article 11/6, [paragraphe 1], l’obligation de fournir des informations relatives à un dispositif transfrontière qui fait l’objet d’une déclaration incombe à l’autre intermédiaire qui a été informé, ou en l’absence de celui-ci, au contribuable concerné. »
Le litige au principal et la question préjudicielle
12 Par requêtes des 31 août et 1er octobre 2020, les requérants au principal ont saisi le Grondwettelijk Hof (Cour constitutionnelle, Belgique), qui est la juridiction de renvoi, de recours tendant à la suspension du décret du 26 juin 2020 ainsi qu’à son annulation totale ou partielle.
13 Il ressort de la décision de renvoi que les requérants au principal contestent, notamment, l’obligation, prévue à l’article 11/6, paragraphe 1, premier alinéa, 1°, du décret du 21 juin 2013, qui a été inséré dans ce décret par l’article 14 du décret du 26 juin 2020, qui s’impose à l’avocat agissant en tant qu’intermédiaire, lorsqu’il est tenu au secret professionnel, d’informer les autres intermédiaires concernés par écrit et de façon motivée qu’il ne peut satisfaire à son obligation de déclaration. Selon les requérants au principal, il est impossible de satisfaire à cette obligation d’information sans violer le secret professionnel auquel sont tenus les avocats. En outre, ladite obligation d’information ne serait pas nécessaire aux fins de garantir que les dispositifs transfrontières soient déclarés, dès lors que le client, assisté ou non par l’avocat, peut lui-même informer les autres intermédiaires et leur demander de satisfaire à leur obligation de déclaration.
14 La juridiction de renvoi relève que les informations que les avocats doivent transmettre à l’autorité compétente en ce qui concerne leurs clients sont protégées par le secret professionnel, si ces informations portent sur des activités qui relèvent de leurs missions spécifiques de défense ou de représentation en justice et de conseil juridique. Elle observe que le simple fait de recourir à un avocat est couvert par le secret professionnel et qu’il en va, a fortiori, de même s’agissant de l’identité du client d’un avocat. Les informations protégées par le secret professionnel à l’égard des autorités publiques le seraient également à l’égard d’autres acteurs, tels que d’autres intermédiaires.
15 La juridiction de renvoi indique que, selon les travaux préparatoires du décret du 26 juin 2020, l’obligation pour un intermédiaire d’informer les autres intermédiaires de façon motivée qu’il est soumis au secret professionnel et qu’il ne satisfera dès lors pas à l’obligation de déclaration serait requise pour répondre aux exigences de la directive 2018/822 et pour assurer que le secret professionnel n’empêche pas les déclarations nécessaires.
16 Cette juridiction constate que les recours au principal soulèvent ainsi la question de la validité de la directive 2018/822, en ce qu’elle a introduit une telle obligation. Partant, avant de pouvoir statuer définitivement sur ces recours, il serait nécessaire de trancher préalablement cette question.
17 Dans ces conditions, le Grondwettelijk Hof (Cour constitutionnelle) a, d’une part, prononcé la suspension, notamment, de l’article 11/6, paragraphe 1, premier alinéa, 1°, du décret du 21 juin 2013, tel qu’inséré par l’article 14 du décret du 26 juin 2020, pour autant que cette disposition impose à l’avocat agissant en tant qu’intermédiaire une obligation d’information à l’égard d’un autre intermédiaire qui n’est pas son client, et ce jusqu’à la date de publication de l’arrêt statuant sur lesdits recours. D’autre part, cette juridiction a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante :
« L’article 1er, point [2], de la directive [2018/822] viole-t-il le droit à un procès équitable garanti par l’article 47 de la [Charte] et le droit au respect de la vie privée garanti par l’article 7 de la [Charte], en ce que le nouvel article 8 bis ter, paragraphe 5, qu’il a inséré dans la directive [2011/16], prévoit que, si un État membre prend les mesures nécessaires pour accorder aux intermédiaires le droit d’être dispensés de l’obligation de fournir des informations concernant un dispositif transfrontière devant faire l’objet d’une déclaration lorsque l’obligation de déclaration serait contraire au secret professionnel applicable en vertu du droit national dudit État membre, cet État membre est tenu d’obliger lesdits intermédiaires à notifier sans retard à tout autre intermédiaire ou, en l’absence d’un tel intermédiaire, au contribuable concerné, ses obligations de déclaration, en ce que cette obligation a pour effet qu’un avocat qui agit en tant qu’intermédiaire est tenu de partager avec un autre intermédiaire qui n’est pas son client les informations qui lui sont connues à l’occasion de l’exercice des activités essentielles de sa profession, à savoir la défense ou la représentation en justice du client et le conseil juridique, même en dehors de toute procédure judiciaire ? »
Sur la question préjudicielle
18 À titre liminaire, il convient de relever que, si la question posée fait référence à l’obligation de notification, prévue à l’article 8 bis ter, paragraphe 5, de la directive 2011/16 modifiée, tant à l’égard des intermédiaires que, en l’absence d’intermédiaire, à l’égard du contribuable concerné, il résulte néanmoins de la lecture d’ensemble de la demande de décision préjudicielle que la juridiction de renvoi s’interroge, en réalité, uniquement sur la validité de cette obligation pour autant que la notification doive être faite, par un avocat agissant en tant qu’intermédiaire, au sens de l’article 3, point 21, de cette directive (ci-après l’« avocat intermédiaire »), à un autre intermédiaire qui n’est pas son client.
19 En effet, lorsque la notification prévue à l’article 8 bis ter, paragraphe 5, de la directive 2011/16 modifiée est effectuée par l’avocat intermédiaire à son client, que ce dernier soit un autre intermédiaire ou le contribuable concerné, cette notification n’est pas susceptible de mettre en cause le respect des droits et des libertés garantis par les articles 7 et 47 de la Charte en raison, d’une part, de l’absence de toute obligation de secret professionnel de l’avocat intermédiaire vis-à-vis de son client et, d’autre part, du fait que, au stade de l’exécution par ce client de ses obligations déclaratives au titre de cette directive, la confidentialité de la relation entre l’avocat intermédiaire et ledit client s’oppose à ce qu’il puisse être exigé de ce dernier qu’il révèle à des tiers et, notamment, à l’administration fiscale l’existence de sa consultation d’un avocat.
20 Il ressort ainsi de la décision de renvoi que, par sa question, la juridiction de renvoi demande, en substance, à la Cour, d’examiner la validité, au regard des articles 7 et 47 de la Charte, de l’article 8 bis ter, paragraphe 5, de la directive 2011/16 modifiée, en ce que son application par les États membres a pour effet d’imposer à l’avocat agissant en tant qu’intermédiaire, au sens de l’article 3, point 21, de cette directive, lorsque celui-ci est dispensé de l’obligation de déclaration, prévue au paragraphe 1 de l’article 8 bis ter de ladite directive, en raison du secret professionnel auquel il est tenu, de notifier sans retard à tout autre intermédiaire qui n’est pas son client les obligations de déclaration qui lui incombent en vertu du paragraphe 6 dudit article 8 bis ter.
21 À cet égard, il importe de rappeler que, conformément à l’article 8 bis ter, paragraphe 1, de la directive 2011/16 modifiée, chaque État membre prend les mesures nécessaires pour que les intermédiaires soient tenus de transmettre aux autorités compétentes les informations dont ils ont connaissance, qu’ils possèdent ou qu’ils contrôlent concernant les dispositifs transfrontières devant faire l’objet d’une déclaration dans un délai de trente jours. L’obligation de déclaration prévue à cette disposition s’applique à tous les dispositifs transfrontières devant faire l’objet d’une déclaration et, donc, tant aux dispositifs sur mesure, définis au point 25 de l’article 3 de la directive 2011/16 modifiée, qu’aux dispositifs commercialisables, définis au point 24 de cet article 3.
22 Il y a lieu de constater que les avocats peuvent, dans l’exercice de leurs activités, être des « intermédiaires », au sens de l’article 3, point 21, de la directive 2011/16 modifiée, en raison du fait qu’ils peuvent pratiquer eux-mêmes des activités de conception, de commercialisation, d’organisation, de mise à disposition aux fins de mise en œuvre ou de gestion de mise en œuvre de dispositifs transfrontières devant faire l’objet d’une déclaration ou, à défaut, en raison du fait qu’ils peuvent prêter assistance, aide ou conseil à de telles activités. Les avocats exerçant de telles activités sont ainsi, en principe, soumis à l’obligation de déclaration prévue à l’article 8 bis ter, paragraphe 1, de cette directive.
23 Cependant, aux termes du premier alinéa du paragraphe 5 de l’article 8 bis ter de la directive 2011/16 modifiée, chaque État membre peut prendre les mesures nécessaires pour accorder aux intermédiaires, et notamment aux avocats intermédiaires, une dispense de l’obligation de fournir des informations concernant un dispositif transfrontière devant faire l’objet d’une déclaration lorsque l’obligation de déclaration serait contraire au secret professionnel applicable en vertu du droit dudit État membre. En pareil cas, chaque État membre prend les mesures nécessaires pour que les intermédiaires soient tenus de notifier sans retard à tout autre intermédiaire, ou, en l’absence d’un tel intermédiaire, au contribuable concerné, les obligations de déclaration qui leur incombent en vertu du paragraphe 6 de cet article. Ce paragraphe prévoit que, dans une telle hypothèse, l’obligation de déclaration relève de la responsabilité de l’autre intermédiaire qui a été notifié, ou, en l’absence d’un tel intermédiaire, du contribuable concerné.
24 Il importe néanmoins de souligner que, en vertu du second alinéa du paragraphe 5 de l’article 8 bis ter de la directive 2011/16 modifiée, les intermédiaires ne peuvent bénéficier d’une dispense en vertu du premier alinéa de ce paragraphe 5 que dans la mesure où ils agissent dans les limites de la législation nationale pertinente qui définit leur profession, ce qu’il incombe, le cas échéant, aux juridictions nationales de vérifier dans le cadre de l’application de cette législation. Partant, ce n’est que par rapport aux avocats intermédiaires qui agissent effectivement dans de telles limites qu’il convient d’examiner la validité de l’article 8 bis ter, paragraphe 5, de cette directive au regard des articles 7 et 47 de la Charte.
25 À cet égard, il y a lieu de relever que l’article 7 de la Charte, qui reconnaît à toute personne le droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de ses communications, correspond à l’article 8, paragraphe 1, de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950 (ci-après la « CEDH »), tandis que l’article 47, qui garantit le droit à un recours effectif et à accéder à un tribunal impartial, correspond à l’article 6, paragraphe 1, de la CEDH.
26 Conformément à l’article 52, paragraphe 3, de la Charte, qui vise à assurer la cohérence nécessaire entre les droits contenus dans celle-ci et les droits correspondants garantis par la CEDH sans porter atteinte à l’autonomie du droit de l’Union, la Cour doit donc tenir compte, dans l’interprétation qu’elle effectue à propos des droits garantis par les articles 7 et 47 de la Charte, des droits correspondants garantis par l’article 8, paragraphe 1, et par l’article 6, paragraphe 1, de la CEDH, tels qu’interprétés par la Cour européenne des droits de l’homme (ci-après la « Cour EDH »), en tant que seuil de protection minimale (voir, en ce sens, arrêt du 2 février 2021, Consob, C‑481/19, EU:C:2021:84, points 36 et 37).
27 S’agissant de la validité de l’article 8 bis ter, paragraphe 5, de la directive 2011/16 modifiée au regard de l’article 7 de la Charte, il ressort de la jurisprudence de la Cour EDH que l’article 8, paragraphe 1, de la CEDH protège la confidentialité de toute correspondance entre individus et accorde une protection renforcée aux échanges entre les avocats et leurs clients (voir, en ce sens, Cour EDH, arrêt du 6 décembre 2012, Michaud c. France, CE:ECHR:2012:1206JUD001232311, §§ 117 et 118). À l’instar de cette disposition, dont la protection recouvre non seulement l’activité de défense, mais également la consultation juridique, l’article 7 de la Charte garantit nécessairement le secret de cette consultation juridique, et ce tant à l’égard de son contenu que de son existence. En effet, ainsi que l’a relevé la Cour EDH, les personnes qui consultent un avocat peuvent raisonnablement s’attendre à ce que leurs communications demeurent privées et confidentielles [Cour EDH, arrêt du 9 avril 2019, Altay c. Turquie (No 2), CE:ECHR:2019:0409JUD001123609, § 49]. Partant, hormis des situations exceptionnelles, ces personnes doivent pouvoir légitimement avoir confiance dans le fait que leur avocat ne divulguera à personne, sans leur accord, qu’elles le consultent.
28 La protection spécifique que l’article 7 de la Charte et l’article 8, paragraphe 1, de la CEDH accordent au secret professionnel des avocats, qui se traduit avant tout par des obligations à leur charge, se justifie par le fait que les avocats se voient confier une mission fondamentale dans une société démocratique, à savoir la défense des justiciables (Cour EDH, arrêt du 6 décembre 2012, Michaud c. France, CE:ECHR:2012:1206JUD001232311, §§ 118 et 119). Cette mission fondamentale comporte, d’une part, l’exigence, dont l’importance est reconnue dans tous les États membres, que tout justiciable doit avoir la possibilité de s’adresser en toute liberté à son avocat, dont la profession même englobe, par essence, la tâche de donner, de façon indépendante, des avis juridiques à tous ceux qui en ont besoin et, d’autre part, celle, corrélative, de loyauté de l’avocat envers son client (voir, en ce sens, arrêt du 18 mai 1982, AM & S Europe/Commission, 155/79, EU:C:1982:157, point 18).
29 Or, l’obligation que prévoit l’article 8 bis ter, paragraphe 5, de la directive 2011/16 modifiée pour l’avocat intermédiaire lorsque celui-ci est, en raison du secret professionnel auquel il est tenu par le droit national, dispensé de l’obligation de déclaration, prévue au paragraphe 1 de cet article 8 bis ter, de notifier sans retard aux autres intermédiaires qui ne sont pas ses clients les obligations de déclaration qui leur incombent en vertu du paragraphe 6 dudit article 8 bis ter comporte nécessairement la conséquence que ces autres intermédiaires acquièrent connaissance de l’identité de l’avocat intermédiaire notifiant, de son appréciation selon laquelle le dispositif en cause doit faire l’objet d’une déclaration ainsi que du fait qu’il est consulté à son sujet.
30 Dans ces conditions et dans la mesure où ces autres intermédiaires n’ont pas forcément connaissance de l’identité de l’avocat intermédiaire et du fait qu’il a été consulté au sujet du dispositif transfrontière devant faire l’objet d’une déclaration, l’obligation de notification, prévue à l’article 8 bis ter, paragraphe 5, de la directive 2011/16 modifiée, entraîne une ingérence dans le droit au respect des communications entre les avocats et leurs clients, garanti à l’article 7 de la Charte.
31 En outre, il convient d’observer que cette obligation de notification induit, indirectement, une autre ingérence dans ce même droit, résultant de la divulgation, par les tiers intermédiaires ainsi notifiés, à l’administration fiscale de l’identité et de la consultation de l’avocat intermédiaire.
32 En effet, il ressort de l’article 8 bis ter, paragraphes 1, 9, 13 et 14, de la directive 2011/16 modifiée que l’identification des intermédiaires figure au nombre des informations à fournir en exécution de l’obligation de déclaration, cette identification faisant l’objet d’un échange d’informations entre les autorités compétentes des États membres. Par conséquent, en cas de notification au titre de l’article 8 bis ter, paragraphe 5, de cette directive, les tiers intermédiaires notifiés, ainsi informés de l’identité de l’avocat intermédiaire et de sa consultation au sujet du dispositif transfrontière devant faire l’objet d’une déclaration et eux-mêmes non tenus au secret professionnel, devront informer les autorités compétentes visées à l’article 3, paragraphe 1, de ladite directive non seulement de l’existence de ce dispositif et de l’identité du ou des contribuables concernés, mais encore de l’identité et de la consultation de l’avocat intermédiaire.
33 Partant, il convient d’examiner si ces ingérences dans le droit au respect des communications entre les avocats et leurs clients, garanti à l’article 7 de la Charte, sont susceptibles d’être justifiées.
34 Dans ce contexte, il importe de rappeler que les droits consacrés à l’article 7 de la Charte n’apparaissent pas comme étant des prérogatives absolues, mais doivent être pris en considération par rapport à leur fonction dans la société. En effet, ainsi qu’il ressort de l’article 52, paragraphe 1, de la Charte, celle-ci admet des limitations à l’exercice de ces droits, pour autant que ces limitations soient prévues par la loi, qu’elles respectent le contenu essentiel desdits droits et que, dans le respect du principe de proportionnalité, elles soient nécessaires et répondent effectivement à des objectifs d’intérêt général reconnus par l’Union européenne ou au besoin de protection des droits et des libertés d’autrui (voir, en ce sens, arrêt du 6 octobre 2020, Privacy International, C‑623/17, EU:C:2020:790, points 63 et 64).
35 En premier lieu, en ce qui concerne l’exigence selon laquelle toute limitation de l’exercice des droits fondamentaux doit être prévue par la loi, celle-ci implique que l’acte qui permet l’ingérence dans ces droits doit définir lui‑même la portée de la limitation de l’exercice du droit concerné, étant précisé, d’une part, que cette exigence n’exclut pas que la limitation en cause soit formulée dans des termes suffisamment ouverts pour pouvoir s’adapter à des cas de figure différents ainsi qu’aux changements de situations. D’autre part, la Cour peut, le cas échéant, préciser, par voie d’interprétation, la portée concrète de la limitation au regard tant des termes mêmes de la réglementation de l’Union en cause que de son économie générale et des objectifs qu’elle poursuit, tels qu’interprétés à la lumière des droits fondamentaux garantis par la Charte (arrêt du 21 juin 2022, Ligue des droits humains, C-817/19, EU:C:2022:491, point 114 et jurisprudence citée).
36 À cet égard, il y a lieu de relever que, d’une part, le paragraphe 5 de l’article 8 bis ter de la directive 2011/16 modifiée prévoit expressément l’obligation, pour l’avocat intermédiaire dispensé de l’obligation de déclaration en raison du secret professionnel auquel il est tenu, de notifier aux autres intermédiaires les obligations de déclaration qui leur incombent en vertu du paragraphe 6 de cet article. D’autre part, ainsi qu’il a été constaté aux points 29 et 30 du présent arrêt, l’ingérence dans le droit au respect des communications entre les avocats et leurs clients, consacré à l’article 7 de la Charte, est la conséquence directe d’une telle notification par l’avocat à un autre intermédiaire qui n’est pas son client, notamment lorsque celui-ci n’avait, jusqu’au moment de cette notification, pas connaissance de l’identité de cet avocat et de sa consultation au sujet du dispositif transfrontière devant faire l’objet d’une déclaration.
37 En outre, s’agissant de l’ingérence résultant indirectement de ladite obligation de notification en raison de la divulgation, par les tiers intermédiaires notifiés, de l’identité et de la consultation de l’avocat intermédiaire à l’administration fiscale, celle-ci est due, ainsi qu’il a été constaté aux points 31 et 32 du présent arrêt, à l’étendue des obligations d’information découlant de l’article 8 bis ter, paragraphes 1, 9, 13 et 14, de la directive 2011/16 modifiée.
38 Dans ces conditions, il convient de considérer qu’il est satisfait au principe de légalité.
39 En deuxième lieu, en ce qui concerne le respect du contenu essentiel du droit au respect des communications entre les avocats et leurs clients, garanti à l’article 7 de la Charte, il convient de relever que l’obligation de notification, instaurée par l’article 8 bis ter, paragraphe 5, de la directive 2011/16 modifiée, n’induit que de manière limitée la levée, à l’égard d’un tiers intermédiaire et de l’administration fiscale, de la confidentialité des communications entre l’avocat intermédiaire et son client. En particulier, cette disposition ne prévoit pas l’obligation, ni même l’autorisation, pour l’avocat intermédiaire de partager, sans le consentement de son client, des informations relatives à la teneur de ces communications avec d’autres intermédiaires et ces derniers ne seront donc pas en mesure de transmettre de telles informations à l’administration fiscale.
40 Dans ces conditions, il ne saurait être considéré que l’obligation de notification, prévue à l’article 8 bis ter, paragraphe 5, de la directive 2011/16 modifiée, porte atteinte au contenu essentiel du droit au respect des communications entre les avocats et leurs clients, consacré à l’article 7 de la Charte.
41 En troisième lieu, s’agissant du respect du principe de proportionnalité, celui-ci exige que les limitations qui peuvent notamment être apportées par des actes du droit de l’Union à des droits et libertés consacrés dans la Charte ne dépassent pas les limites de ce qui est approprié et nécessaire à la satisfaction des objectifs légitimes poursuivis ou du besoin de protection des droits et libertés d’autrui, étant entendu que, lorsqu’un choix s’offre entre plusieurs mesures appropriées, il convient de recourir à la moins contraignante. En outre, un objectif d’intérêt général ne saurait être poursuivi sans tenir compte du fait qu’il doit être concilié avec les droits fondamentaux concernés par la mesure, ce en effectuant une pondération équilibrée entre, d’une part, l’objectif d’intérêt général et, d’autre part, les droits en cause, afin d’assurer que les inconvénients causés par cette mesure ne soient pas démesurés par rapport aux buts visés. Ainsi, la possibilité de justifier une limitation aux droits garantis à l’article 7 de la Charte doit être appréciée en mesurant la gravité de l’ingérence que comporte une telle limitation et en vérifiant que l’importance de l’objectif d’intérêt général poursuivi par cette limitation est en relation avec cette gravité (arrêts du 26 avril 2022, Pologne/Parlement et Conseil, C-401/19, EU:C:2022:297, point 65, ainsi que du 22 novembre 2022, Luxembourg Business Registers et Sovim, C-37/20 et C-601/20, EU:C:2022:912, point 64).
42 Partant, il y a lieu de vérifier, tout d’abord, que l’obligation de notification, prévue à l’article 8 bis ter, paragraphe 5, de la directive 2011/16 modifiée, répond à un objectif d’intérêt général reconnu par l’Union. Dans l’affirmative, il convient ensuite de s’assurer, premièrement, qu’elle est apte à réaliser cet objectif, deuxièmement, que l’ingérence dans le droit fondamental au respect des communications entre les avocats et leurs clients qui est susceptible de résulter de cette obligation de notification est limitée au strict nécessaire, en ce sens que l’objectif poursuivi ne pourrait raisonnablement être atteint de manière aussi efficace par d’autres moyens moins attentatoires à ce droit, et, troisièmement, pour autant que tel soit effectivement le cas, que cette ingérence n’est pas disproportionnée par rapport audit objectif, ce qui implique notamment une pondération de l’importance de celui-ci et de la gravité de ladite ingérence (voir, en ce sens, arrêt du 22 novembre 2022, Luxembourg Business Registers et Sovim, C-37/20 et C-601/20, EU:C:2022:912, point 66).
43 Ainsi que l’a relevé M. l’avocat général au point 88 de ses conclusions, la modification apportée à la directive 2011/16 par la directive 2018/822 s’inscrit dans le cadre d’une coopération fiscale internationale de lutte contre la planification fiscale agressive qui se concrétise par un échange d’informations entre États membres. À cet égard, il ressort notamment des considérants 2, 4, 8 et 9 de la directive 2018/822 que les obligations de déclaration et de notification, mises en place par l’article 8 bis ter de la directive 2011/16 modifiée, ont pour objectif de contribuer à la prévention du risque d’évasion et de fraude fiscales.
44 Or, la lutte contre la planification fiscale agressive et la prévention du risque d’évasion et de fraude fiscales constituent des objectifs d’intérêt général reconnus par l’Union, au sens de l’article 52, paragraphe 1, de la Charte, susceptibles de permettre qu’une limitation soit apportée à l’exercice des droits garantis par l’article 7 de celle-ci [voir, en ce sens, arrêt du 6 octobre 2020, État luxembourgeois (Droit de recours contre une demande d’information en matière fiscale), C-245/19 et C-246/19, EU:C:2020:795, point 87].
45 En ce qui concerne le point de savoir si l’obligation de notification, prévue à l’article 8 bis ter, paragraphe 5, de la directive 2011/16 modifiée, est apte et nécessaire à la réalisation desdits objectifs, les gouvernements français et letton soutiennent, en substance, qu’une telle notification permettrait notamment de sensibiliser les autres intermédiaires à leur devoir de se conformer à l’obligation de déclaration et ainsi d’éviter que ces autres intermédiaires ne soient pas informés du fait que l’obligation de déclaration du dispositif transfrontière leur est transférée en application de l’article 8 bis ter, paragraphe 6, de la directive 2011/16 modifiée. Ainsi, selon ces gouvernements, à défaut d’une obligation de notification dans le chef de l’avocat intermédiaire, le dispositif transfrontière risquerait de n’être aucunement déclaré, et cela en méconnaissance des objectifs poursuivis par cette directive.
46 Or, à supposer même que l’obligation de notification, instaurée par l’article 8 bis ter, paragraphe 5, de la directive 2011/16 modifiée, soit effectivement apte à contribuer à la lutte contre la planification fiscale agressive et à la prévention du risque d’évasion et de fraude fiscales, force est de constater qu’elle ne saurait, toutefois, être considérée comme étant strictement nécessaire pour réaliser ces objectifs et, notamment, pour assurer que les informations concernant les dispositifs transfrontières devant faire l’objet d’une déclaration soient transmises aux autorités compétentes.
47 En effet, premièrement, les obligations de déclaration incombant aux intermédiaires sont clairement énoncées dans la directive 2011/16 modifiée, en particulier à son article 8 bis ter, paragraphe 1. En vertu de cette disposition, tous les intermédiaires sont, en principe, tenus de transmettre aux autorités compétentes les informations dont ils ont connaissance, qu’ils possèdent ou qu’ils contrôlent, concernant les dispositifs transfrontières devant faire l’objet d’une déclaration. En outre, conformément à l’article 8 bis ter, paragraphe 9, premier alinéa, de cette directive, chaque État membre prend les mesures nécessaires pour exiger que, lorsqu’il existe plus d’un intermédiaire, l’obligation de transmettre des informations incombe à l’ensemble des intermédiaires participant à un même dispositif transfrontière devant faire l’objet d’une déclaration. Aucun intermédiaire ne saurait donc utilement faire valoir qu’il ignorait les obligations de déclaration auxquelles il est directement et individuellement soumis, du seul fait de sa qualité d’intermédiaire.
48 Deuxièmement, quant à l’argument du gouvernement letton selon lequel l’obligation de notification réduirait le risque que les autres intermédiaires se fient au fait que l’avocat intermédiaire déclarera les informations requises aux autorités compétentes et qu’ils s’abstiennent pour ce motif d’effectuer eux-mêmes une déclaration, il convient de constater, d’une part, que, dans la mesure où la consultation d’un avocat est soumise au secret professionnel, les autres intermédiaires n’auront, ainsi qu’il a été relevé au point 30 du présent arrêt, pas forcément connaissance de l’identité de l’avocat intermédiaire et de sa consultation au sujet du dispositif transfrontière devant faire l’objet d’une déclaration, ce qui, en pareil cas, exclut d’emblée un tel risque.
49 D’autre part, même dans l’hypothèse contraire où les autres intermédiaires ont une telle connaissance, il n’y a pas lieu de craindre que ceux-ci se fient, sans vérification, à ce que l’avocat intermédiaire effectue la déclaration requise, dès lors que l’article 8 bis ter, paragraphe 9, deuxième alinéa, de la directive 2011/16 modifiée précise qu’un intermédiaire n’est dispensé de l’obligation de transmettre des informations qu’à la condition qu’il puisse prouver que ces mêmes informations ont déjà été transmises par un autre intermédiaire. Par ailleurs, en prévoyant expressément, à son article 8 bis ter, paragraphe 5, que le secret professionnel peut conduire à une dispense de l’obligation de déclaration, la directive 2011/16 modifiée fait de l’avocat intermédiaire une personne dont les autres intermédiaires ne peuvent, a priori, attendre aucune initiative de nature à les décharger de leurs propres obligations de déclaration.
50 Troisièmement, il convient de rappeler que tout intermédiaire qui, en raison du secret professionnel auquel il est tenu par le droit national, est dispensé de l’obligation de déclaration prévue au paragraphe 1 de l’article 8 bis ter de la directive 2011/16 modifiée, reste néanmoins tenu de notifier sans retard à son client les obligations de déclaration qui lui incombent en vertu du paragraphe 6 de cet article.
51 Quatrièmement, s’agissant de la divulgation, par les tiers intermédiaires notifiés, de l’identité et de la consultation de l’avocat intermédiaire à l’administration fiscale, cette divulgation n’apparaît pas non plus strictement nécessaire à la poursuite des objectifs de la directive 2011/16 modifiée de lutte contre la planification fiscale agressive et de prévention du risque d’évasion et de fraude fiscales.
52 En effet, d’une part, l’obligation de déclaration incombant aux autres intermédiaires non soumis au secret professionnel et, à défaut de tels intermédiaires, celle incombant au contribuable concerné garantissent, en principe, que l’administration fiscale soit informée des dispositifs transfrontières devant faire l’objet d’une déclaration. En outre, l’administration fiscale peut, après avoir reçu une telle information, demander au besoin des informations supplémentaires relatives au dispositif en question directement au contribuable concerné, lequel pourra alors s’adresser à son avocat pour qu’il l’assiste, ou effectuer un contrôle de la situation fiscale dudit contribuable.
53 D’autre part, compte tenu de la dispense de déclaration prévue à l’article 8 bis ter, paragraphe 5, de la directive 2011/16 modifiée, la divulgation à l’administration fiscale de l’identité et de la consultation de l’avocat intermédiaire ne permettra, en tout état de cause, pas à cette administration d’exiger de celui-ci des informations sans le consentement de son client.
54 Lors de l’audience devant la Cour, la Commission a toutefois soutenu, en substance, que cette divulgation de l’identité et de la consultation de l’avocat intermédiaire serait nécessaire pour permettre à l’administration fiscale de vérifier que celui-ci invoque de manière justifiée le secret professionnel.
55 Cet argument ne saurait être retenu.
56 Certes, ainsi qu’il a été relevé au point 24 du présent arrêt, le second alinéa du paragraphe 5 de l’article 8 bis ter de la directive 2011/16 modifiée précise que les avocats intermédiaires ne peuvent avoir droit à une dispense en vertu du premier alinéa de ce paragraphe que dans la mesure où ils agissent dans les limites de la législation nationale pertinente qui définit leur profession. Toutefois, l’objectif des obligations de déclaration et de notification, prévues à l’article 8 bis ter de cette directive, est non pas de contrôler que les avocats intermédiaires agissent dans ces limites, mais de lutter contre les pratiques fiscales potentiellement agressives et de prévenir le risque d’évasion et de fraude fiscales, en assurant que les informations concernant les dispositifs transfrontières devant faire l’objet d’une déclaration soient transmises aux autorités compétentes.
57 Or, ainsi qu’il résulte des points 47 à 53 du présent arrêt, ladite directive assure une telle information de l’administration fiscale, sans que la divulgation à celle-ci de l’identité et de la consultation de l’avocat intermédiaire soit nécessaire à cet effet.
58 Dans ces conditions, l’éventualité que des avocats intermédiaires puissent invoquer à tort le secret professionnel pour se soustraire à leur obligation de déclaration ne saurait permettre de considérer comme étant strictement nécessaire l’obligation de notification, prévue à l’article 8 bis ter, paragraphe 5, de cette directive, et la divulgation à l’administration fiscale de l’identité et de la consultation de l’avocat intermédiaire notifiant qui en est la conséquence.
59 Il résulte des considérations qui précèdent que l’article 8 bis ter, paragraphe 5, de la directive 2011/16 modifiée viole le droit au respect des communications entre l’avocat et son client, garanti à l’article 7 de la Charte, en ce qu’il prévoit, en substance, que l’avocat intermédiaire, soumis au secret professionnel, est tenu de notifier à tout autre intermédiaire qui n’est pas son client les obligations de déclaration qui lui incombent.
60 En ce qui concerne la validité de l’article 8 bis ter, paragraphe 5, de la directive 2011/16 modifiée au regard de l’article 47 de la Charte, il y a lieu de rappeler que le droit à un procès équitable, garanti à cette dernière disposition, est constitué de divers éléments. Il comprend, notamment, les droits de la défense, le principe de l’égalité des armes, le droit d’accès aux tribunaux et le droit d’accès à un avocat, tant en matière civile qu’en matière pénale. L’avocat ne serait pas en mesure d’assurer sa mission de conseil, de défense et de représentation de son client de manière adéquate, et celui-ci serait par conséquent privé des droits qui lui sont conférés par l’article 47 de la Charte, si l’avocat, dans le cadre d’une procédure judiciaire ou de sa préparation, était obligé de coopérer avec les pouvoirs publics en leur transmettant des informations obtenues lors des consultations juridiques ayant eu lieu dans le cadre d’une telle procédure (voir, en ce sens, arrêt du 26 juin 2007, Ordre des barreaux francophones et germanophone e.a., C‑305/05, EU:C:2007:383, points 31 et 32).
61 Il ressort de ces considérations que les exigences découlant du droit à un procès équitable impliquent, par définition, un lien avec une procédure judiciaire (voir, en ce sens, arrêt du 26 juin 2007, Ordre des barreaux francophones et germanophone e.a., C-305/05, EU:C:2007:383, point 35).
62 Or, force est de constater qu’un tel lien n’est pas établi en l’occurrence.
63 En effet, il résulte des dispositions de l’article 8 bis ter, paragraphes 1 et 5, de la directive 2011/16 modifiée et, notamment, des délais prévus à ces dispositions que l’obligation de notification naît à un stade précoce, au plus tard lorsque le dispositif transfrontière devant faire l’objet d’une déclaration vient d’être finalisé et est prêt à être mis en œuvre, donc en dehors du cadre d’une procédure judiciaire ou de sa préparation.
64 Ainsi que l’a relevé, en substance, M. l’avocat général au point 41 de ses conclusions, à ce stade précoce, l’avocat intermédiaire n’agit pas en tant que défenseur de son client dans un litige et la seule circonstance que les conseils de l’avocat ou le dispositif transfrontière objet de sa consultation puissent donner lieu à un contentieux à un stade ultérieur ne signifie pas que l’intervention de l’avocat s’est opérée dans le cadre ou aux fins du droit de la défense de son client.
65 Dans ces conditions, il convient de considérer que l’obligation de notification se substituant, pour l’avocat intermédiaire tenu au secret professionnel, à l’obligation de déclaration prévue à l’article 8 bis ter, paragraphe 1, de la directive 2011/16 modifiée ne comporte pas d’ingérence dans le droit à un procès équitable, garanti à l’article 47 de la Charte.
66 Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent qu’il convient de répondre à la question posée que l’article 8 bis ter, paragraphe 5, de la directive 2011/16 modifiée est invalide au regard de l’article 7 de la Charte, en ce que son application par les États membres a pour effet d’imposer à l’avocat agissant en tant qu’intermédiaire, au sens de l’article 3, point 21, de cette directive, lorsque celui-ci est dispensé de l’obligation de déclaration, prévue au paragraphe 1 de l’article 8 bis ter de ladite directive, en raison du secret professionnel auquel il est tenu, de notifier sans retard à tout autre intermédiaire qui n’est pas son client les obligations de déclaration qui lui incombent en vertu du paragraphe 6 dudit article 8 bis ter.
Sur les dépens
67 La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.
Par ces motifs, la Cour (grande chambre) dit pour droit :
L’article 8 bis ter, paragraphe 5, de la directive 2011/16/UE du Conseil, du 15 février 2011, relative à la coopération administrative dans le domaine fiscal et abrogeant la directive 77/799/CEE, telle que modifiée par la directive (UE) 2018/822 du Conseil, du 25 mai 2018, est invalide au regard de l’article 7 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, en ce que son application par les États membres a pour effet d’imposer à l’avocat agissant en tant qu’intermédiaire, au sens de l’article 3, point 21, de cette directive, telle que modifiée, lorsque celui-ci est dispensé de l’obligation de déclaration, prévue au paragraphe 1 de l’article 8 bis ter de ladite directive, telle que modifiée, en raison du secret professionnel auquel il est tenu, de notifier sans retard à tout autre intermédiaire qui n’est pas son client les obligations de déclaration qui lui incombent en vertu du paragraphe 6 dudit article 8 bis ter.