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Décisions

CA Orléans, ch. civ., 6 avril 2024, n° 21/01435

ORLÉANS

Arrêt

Infirmation partielle

PARTIES

Demandeur :

Société Officium (SARL)

Défendeur :

LDG Avocats (Selarl)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Collomp

Conseillers :

M. Sousa, Mme Grua

Avocats :

Me Pontruche, Me Olivier-Martin, Me Potier

TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP Mon…

16 avril 2021

FAITS ET PROCÉDURE

Suivant devis en date du 19 janvier 2015, la société LDG Avocats a conclu avec la société Officium un contrat potant sur l'entretien de ses locaux.

Alléguant de factures impayées, la société Officium a, par acte d'huissier de justice en date du 10 avril 2018, fait assigner la société LDG Avocats devant le tribunal judiciaire de Montargis aux fins de solliciter sa condamnation à lui payer diverses sommes au titre de ces factures impayées.

Par jugement en date du 16 avril 2021, le tribunal judiciaire de Montargis a :

- déclaré la société Officium recevable dans ses demandes, et ce pour les factures suivantes :

facture n°16110063 en date du 10 février 2017

facture n°16120041 en date du 15 mars 2017

facture n°17020049 en date du 22 mai 2017

- débouté la société Officium de ses demandes tendant à voir condamner la société LDG Avocats au paiement des factures afférentes aux prestations d'entretien ;

- condamné la société Officium à payer à la société LDG Avocats la somme de 1 200 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné la société Officium aux dépens ;

- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

Par déclaration en date du 21 mai 2021, la société Officium a interjeté appel de l'intégralité des chefs de ce jugement sauf en ce qu'il l'a déclarée recevable en ses demandes.

Suivant conclusions récapitulatives notifiées par voie électronique le 3 juillet 2023, la société Officium demande à la cour de :

- infirmer le jugement en toutes ses dispositions, à l'exception de la disposition du jugement qui l'a déclarée recevable en ses demandes pour la facture n°16110063 en date du 10 février 2017, la facture n°16120041 en date du 15 mars 2017, facture n°17020049 en date du 22 mai 2017 ;

Statuant à nouveau :

À titre principal,

- la déclarer recevable et bien fondée dans ses demandes ;

- condamner la société LDG Avocats à lui payer une somme de 11 261,45 euros au titre des factures impayées ;

- dire et juger que le montant des factures sera majoré des intérêts selon un taux égal au taux d'intérêt appliqué par la Banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente, majoré de 10 points de pourcentage ;

- dire et juger que les intérêts de retard commenceront à courir à compter de la date d'exigibilité figurant sur chacune des factures ;

- dire et juger que les intérêts échus et non payés depuis plus d'un an, seront eux-mêmes productifs d'intérêts au taux de 10,05 %,

- condamner la société LDG Avocats à lui payer une somme de 440 euros au titre des frais de recouvrement prévus à l'article L.441-6 du code de commerce ;

- condamner la société LDG Avocats à lui payer une somme de 3 152,46 euros au titre du préavis ;

À titre subsidiaire,

- condamner la société LDG Avocats à lui payer une somme de 6 304,92 euros au titre du préavis ;

En tout état de cause :

- débouter la société LDG Avocats de toutes ses demandes, fins et conclusions ;

- condamner la société LDG Avocats à lui payer une somme de 3 450 euros au titre du préjudice subi du fait de la durée anormalement longue de la présente procédure judiciaire ;

- condamner la société LDG Avocats à lui payer la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- la condamner aux entiers dépens.

Suivant conclusions récapitulatives notifiées par voie électronique le 21 novembre 2023, la société LDG Avocats demande à la cour de :

À titre principal, sur le caractère irrecevable des demandes de la société Officium :

- débouter la société Officium de l'intégralité de ses demandes compte tenu du caractère irrecevable de ses demandes, moyens, arguments et prétentions ;

À titre subsidiaire, sur l'absence de fondement des demandes de la société Officium :

- débouter la société Officium de l'intégralité de ses demandes compte tenu du caractère irrecevable de ses demandes, moyens, arguments et prétentions ;

En tout état de cause,

- confirmer en toutes ses dispositions le jugement en date du 16 avril 2021 ;

Y ajoutant en cause d'appel :

- condamner la société Officium à lui verser la somme de 5 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile en raison des frais irrépétibles ;

- condamner la société Officium aux entiers dépens d'instance.

Pour un plus ample exposé des faits et des moyens des parties, il convient de se reporter à leurs dernières conclusions.

Motivation

MOTIFS

Sur la recevabilité de la demande en paiement

Moyens des parties

La société LDG avocats soutient qu'en cas d'affacturage, ce n'est plus le client qui est propriétaire de ses factures mais le factor, qui les a acquises par subrogation ; qu'en cas de paiement desdites factures au client, le factor peut lui aussi en solliciter le paiement au visa de l'adage « qui paie mal paie deux fois », contenu à l'article 1239 du code civil alors applicable ; qu'en l'espèce, la société Officium a fait le choix de remettre ses factures à un factor, la société CIC Factor ; que de nombreux règlements qui lui sont adressés ont été réceptionnés par le factor mais parfois renvoyés au cabinet LDG Avocats, compte tenu des règlements déjà intervenus ; qu'ainsi, le 17 mai 2016, Mme [O] [W] de la société CM-CIC Factor, lui a adressé un courrier électronique afin d'indiquer que les factures ayant fait l'objet d'un règlement avaient déjà été réglées ; que pourtant, la société Officium ne craint pas de solliciter des factures antérieures ou contemporaines de cette

date ; que la société Officium a admis, dès le 29 mai 2017 et dans sa propre mise en demeure, ignorer si elle était propriétaire ou non des factures dont elle sollicite le règlement ; que la société Officium prétend avoir résilié le contrat d'affacturage, ce qui aurait pour effet de réattribuer la propriété de toutes les factures cédées ; que cette affirmation est en parfaite contradiction avec les stipulations contractuelles qui ne prévoient aucun transfert de propriété du fait d'une prétendue résiliation ; que la société Officium n'apporte toujours pas la preuve de la résiliation de ce contrat, et encore moins avoir récupéré la propriété des factures ; que seule l'inscription au débit du compte-courant des sommes correspondant aux factures sollicitées permet d'attester du transfert de propriété desdites factures ; que la société Officium ne fournit que des « mainlevées » pour trois factures n°16110063 du 19 novembre 2016, n°16120041 du 19 décembre 2016 et n°17020049 du 17 février 2017, sans verser aux débats les extraits de son compte, démontrant l'inscription au débit de son compte et donc la bonne et valable restitution de la créance dans son patrimoine ; que le propre comptable de la société Officium est incapable d'attester de la dette exacte en les comptes d'Officium du client LDG Avocats ; que la société Officium verse également au débat un courrier du factor « attestant qu'il n'a aucune facture cédée par LPP dans son encours » établissant qu'il n'existe plus aucune facture impayée ; que la société Officium est donc irrecevable en sa demande, pour défaut de qualité à agir, n'étant pas propriétaire des factures dont elle sollicite le règlement.

La société Officium réplique qu'elle a conclu un contrat d'affacturage avec la société CM ' CIC Factor dont la société LDG Avocats s'est servi pour prétendre, sans aucun élément probant, que toutes les factures impayées avaient été cédées à un factor et qu'elle n'aurait, dès lors, plus qualité pour en poursuivre le recouvrement ; que compte tenu de l'absence de règlement des factures qui avaient été cédées par Officium, le factor en avait donné mainlevée de sorte que leur propriété lui avait, de nouveau, été transférée ; qu'elle a versé aux débats les mainlevées adressées par le factor à LDG avec le motif « transfert de la propriété de la facture à la société Officium », ainsi que les mouvements du compte de la société Officium dans les livres de CM Factor et l'extrait du compte courant professionnel de la société Officium ; qu'en cause d'appel, elle a communiqué un courrier du factor attestant qu'elle n'a aucune facture cédée par LPP dans son encours ; que le contrat d'affacturage a été résilié, ce qui a eu pour effet de lui ré-attribuer la propriété de toutes les factures cédées ; que Mme [P], gestionnaire contentieux au sein du Crédit Mutuel Factoring a donc de nouveau attesté, par courriel du 20 juin 2023, lui avoir rendu la propriété des factures litigieuses et qu'elle n'avait plus aucun compte en ses livres ; que la cour ne pourra qu'infirmer la décision déférée et constater sa recevabilité et sa qualité à agir pour poursuivre le recouvrement de toute facture impayée par la société LDG Avocats.

Réponse de la cour

La société Officium a conclu un contrat d'affacturage le 26 octobre 2010 avec la société CM-CIC Laviolette Financement devenue la société CM-CIC Factoring.

Il est établi et non contesté, que dans le cadre de contrat d'affacturage, la société Officium a cédé au factor les factures impayées suivantes :

' Facture n°15120059 en date du 18 décembre 2015, pour un montant de 1021,20 € ;

' Facture n°16050036 en date du 19 mai 2016 pour un montant de 1021,20 € ;

' Facture n°16070030 en date du 19 juillet 2016 pour un montant de 856,94 € ;

' Facture n°16110063 en date du 19 novembre 2016 pour un montant de 1050,82 € ;

' Facture n°16120041 en date du 19 décembre 2016 pour un montant de 1006,37 € ;

' Facture n°17010052 en date du 19 janvier 2017 pour un montant de 1050,82 € ;

' Facture n°17020049 en date du 17 février 2017 pour un montant de 1050,82 € ;

' Facture n°17030057 en date du 20 mars 2017 pour un montant de 1050,82 € ;

' Facture n°17040079 en date du 19 avril 2017 pour un montant de 1050,82 € ;

' Facture n°17050048 en date du 19 mai 2017 pour un montant de 1050,82 € ;

' Facture n°17060036 en date du 19 juin 2017 pour un montant de 1050,82 €.

La société Officium produit aux débats un courrier électronique adressé le 20 juin 2023 par Mme [P], gestionnaire contentieux au sein de la société CM-CIC Factoring indiquant que le compte Officium étant clos dans leurs livres, la propriété de l'ensemble des factures précitées a été transférée à la société Officium.

Le contrat d'affacturage prévoit d'ailleurs que « toute créance non payée à son échéance par le débiteur cédé est immédiatement exigible vis-à-vis du cédant qui est garant de sa bonne fin ».

Ces éléments établissent la preuve que le factor n'est plus titulaire des factures litigieuse, sans qu'il soit nécessaire d'établir l'existence de contre-passation d'écritures en compte courant entre le factor et le client, qui n'intéresse que leurs rapports contractuels.

En conséquence, la société Officium a qualité à agir en paiement au titre des factures litigieuses à l'encontre de la société LDG Avocats, et ses demandes seront déclarées recevables. Il n'y a pas lieu d'infirmer le jugement sur ce point qui n'a prononcé aucune irrecevabilité en son dispositif.

Sur le bien-fondé de la demande en paiement

Moyens des parties

La société Officium soutient que la société LDG Avocats ne conteste pas devoir la somme de 11 261,45 euros ; que la société LDG Avocats n'a émis aucune critique à l'encontre des prestations dont il est réclamé le paiement ; qu'au mois de juillet 2015 et en septembre 2015, la société LDG Avocats a fait valoir que la salariée de la société Officium n'était pas venu réaliser les prestations d'entretien à l'horaire convenu ; qu'elle a alors procédé au licenciement du salarié en cause au mois de septembre 2015 et a affecté un nouveau salarié à l'entretien des locaux de la société LDG Avocats à compter du 8 septembre 2015 ; que du 8 septembre 2015 au 19 mai 2017, la société LDG Avocats n'a plus émis aucune remarque sur la qualité des prestations d'entretien, ou le décompte des horaires effectués par ses salariés ; que ce n'est qu'au mois de mai 2017, alors qu'elle était relancée pour le paiement des factures, que la société LDG Avocats s'est opposée au paiement des factures litigieuses au motif qu'elle n'aurait jamais été satisfaite des prestations de ménage ; qu'il n'est pas vraisemblable qu'un cabinet d'avocat, qui n'est pas satisfait d'un cocontractant pendant plus de 18 mois, se contente de simples remarques orales ; que la société LDG Avocats n'a d'ailleurs pas mis un terme au contrat ni changé de prestataire d'entretien pendant deux ans, ce qui prouve qu'elle était satisfaite de ses prestations ; que les prestations ont été réalisées conformément au contrat ; qu'en tout état de cause, les griefs de mauvaise exécution des prestations de ménage invoqués par la société LDG Avocats doivent être suffisamment graves pour justifier le refus de payer les factures, ce qui n'est pas démontré ; que la cour devra donc infirmer le jugement du 16 avril 2021 en ce qu'il l'a déboutée de ses demandes de factures impayées en condamnant la société LDG Avocats à lui payer la somme de 11 261,45 euros.

La société LDG Avocats réplique que le volume horaire n'étant jamais respecté, elle n'a eu d'autre choix que de cesser le règlement de factures, compte tenu de l'inexécution du contrat, et ce après diverses réclamations auprès des salariés, puis des managers, et enfin auprès de la société Officium elle-même ; qu'il appartient au prestataire de démontrer le bien-fondé des diligences entreprises et leur corrélation avec le montant réclamé dans ses factures ; que la première contestation relative à l'état de saleté des locaux remonte au 10 juillet 2015 ; qu'elle a demandé à plusieurs reprises le carnet d'entretien de la société Officium afin de s'assurer que les prestations qu'elle facture et qu'elle prétend avoir été réalisées ont bien fait

l'objet d'un récépissé ; que par courrier du 6 juin 2017, elle a dénoncé les nombreuses inexécutions du contrat connues depuis 2015 et rappelait que ses demandes, notamment celles en date du 19 mai 2017 étaient restées sans réponse ; qu'en conséquence, par courrier recommandé du 31 août 2017, elle n'avait d'autre choix que de résilier le contrat d'entretien compte tenu de l'absence complète de réponse et d'intervention à la suite des demandes réitérées et des mises en demeure délivrées ; que la société Officium ne démontre à aucun moment le caractère réel des prestations facturées et dès lors ne saurait solliciter judiciairement une condamnation au paiement de factures présentées, sans aucun justificatif ; que les pièces produites par la société Officium démontrent qu'à partir du 10 juillet 2015, les prestations n'étaient pas effectuées, faute de précautions de sa part, n'affectant pas de personnel à l'entretien de ses locaux ; qu'il conviendra de rejeter les demandes de la société Officium.

Réponse de la cour

Le contrat est régi par la loi existante au jour de sa date. En l'espèce, le contrat liant les parties ayant été signé 19 janvier 2015, seules les dispositions du code civil existantes à cette date sont applicables.

Les parties ne sont donc pas fondées à solliciter l'application des articles 1217 et 1219 et suivants du code civil dans leur rédaction résultant de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 et constituant une consécration légale de l'exception d'inexécution dans les contrats synallagmatiques instituée par la jurisprudence.

L'article 1315 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, dispose que celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver et celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.

Il appartient à celui qui invoque l' exception d'inexécution en alléguant que son contractant n'a rempli que partiellement son obligation d'établir cette inexécution, ainsi que l'a d'ailleurs jugé la Cour de cassation (1re Civ., 18 décembre 1990, pourvoi n° 89-14.975, Bull. 1990 I N° 296 ; 3e Civ., 7 décembre 1988, pourvoi n° 87-12.473, Bull. 1988 III N° 181).

En l'espèce, le contrat d'entretien conclu entre les parties stipulait notamment :

« Les prestations décrites dans ce devis seront réalisées comme suit :

Pour les mois de Janvier, Février, Mars, Avril, Mai, Juin, Septembre, Octobre, Novembre, Décembre

1 personne 2 fois/semaine (Le Mardi et Jeudi)

Soit : 2,00 heures / jour soit 4 heures / semaine ou 17, 32 heures / mois

(Hors Vitrerie) et 1 personne 2 fois par semaine pendant 3h soit 6h par semaine

SOIT UN TOTAL DE 43,30 H

Pour le mois de Juillet

1 personne 2 fois/semaine (Le Mardi et Jeudi jusqu'au 15)

et 1 personne 1 fois/semaine (le Jeudi du 15 au 31 Juillet)

Soit : soit 8 heures jusqu'au 15 Juillet

et 1 personne 2 fois par semaine pendant 3h soit 12h jusqu'au 15 Juillet

et 6 heures du 15 Juillet au 31 Juillet pour les bureaux

et 9 heures du 15 Juillet au 31 Juillet pour les extras

par mois SOIT UN TOTAL DE 35 h

Pour le mois d'Août

1 personne 1 fois/semaine (le Mardi)

Soit : 2.00 heures / semaine ou 8,66 heures / mois (Hors Vitrerie)

et 1 personne 1 fois par semaine soit 3h par semaine soit 12 heures par mois

SOIT UN TOTAL DE 20,66 h

Nos tarifs comprennent : le matériel, la main-d''uvre, les produits, le suivi des prestations.

Objet :

Le contrat a pour objet de définir les conditions suivant lesquelles le prestataire s'engage à exécuter, pour le compte du client, l'entretien ménager de la société d'Avocat LDG ».

Le contrat énumère ensuite les différentes de taches de nettoyage à assurer pour un entretien quotidien du lundi au vendredi, pour un entretien hebdomadaire, pour un entretien mensuel, et pour un entretien bimestriel.

Par courrier électronique du 10 juillet 2015, la société LDG Avocats a informé la société Officium de son mécontentement quant aux prestations de ménages réalisées « car la personne n'est jamais présente à l'heure et aux jours prévus dans la convention (elle est venue hier à 19 h au lieu de ce jour à 7 h du matin, à une heure où se trouve au cabinet des clients, les collaborateurs c'est à dire au plus mauvais moment pour faire le ménage) et réalise des prestations très médiocres, les bureaux sont sales, l'escalier n'est à l'évidence pas nettoyé, etc... »

Outre le fait que ce courrier est relatif à une période au cours de laquelle les factures ont été réglées par la société LDG Avocats qui n'a donc pas estimé exercer son exception d'inexécution, il résulte des échanges produits aux débats que la société Officium n'est pas restée passive et a adressé des avertissements à sa salariée, jusqu'à procéder à son licenciement comme elle l'a indiqué à la société LDG Avocats dans un courrier électronique du 3 septembre 2015.

La salariée défaillante a été remplacée par la société Officium et la société LDG Avocats ne s'est nullement plainte du défaut de réalisation des prestations ou du défaut de qualité de celles-ci jusqu'au 19 mai 2017, bien que plusieurs factures sont demeurées impayées à partir du mois de

décembre 2015. La société Officium justifie quant à elle des contrats de travail des salariés employés dans les locaux de la société LDG Avocats mentionnant un volume horaire correspondant au contrat d'entretien.

Le 19 mai 2017, alors que des factures impayées avaient été cédées au factor qui procédait aux démarches de recouvrement, la société LDG Avocats a écrit un courrier électronique à la société Officium rédigé en ces termes :

« J'ai indiqué à de nombreuses reprises à vos services que j'ai une difficulté majeure avec l'exécution du contrat, qui est que je n'arrive pas à avoir le détail des heures d'arrivées et de départ de vos salariés afin de m'assurer du respect du contrat.

Je leur ai par ailleurs demandé personnellement de bien vouloir m'indiquer leurs heures d'arrivée et de départ, sans réponse de leur part.

Le volume horaire des travaux n'est absolument pas respecté, le ménage étant fait à la hâte et sans soins.

Je ne vais tout de même pas instaurer une pointeuse à l'entrée de mon cabinet.

Par ailleurs, la facturation de la vitrerie impose un passage une fois par trimestre qui n'est pas réalisé, ou de façon aléatoire (nous avons eu deux passages en un an).

À défaut de réponse sur ces points, vous comprendrez aisément que je ne puis continuer de payer des factures qui ne correspondent pas aux prestations réalisées.

Par ailleurs, je vous rappelle qu'en ayant remis vos factures à un factor, vous n'êtes pas juridiquement en droit d'en poursuivre le recouvrement.

Merci de votre retour sur ces points afin de permettre de solution cette difficulté. »

Il convient de relever que le défaut de paiement des factures depuis décembre 2015 est antérieur de plusieurs mois aux réclamations de la société LDG Avocats dans son courrier électronique du 19 mai 2017. Si ce courrier fait état de nombreuses réclamations auprès de la société Officium, celles-ci ne sont pas justifiées aux débats. Il résulte également de ce courrier que la réalisation de prestations de ménage n'était pas contestée, seule était en cause le volume horaire effectué pour lequel la société LDG Avocats avait des interrogations, et la qualité des prestations réalisées.

Toutefois, il n'est pas justifié par des éléments probants et étayés que le volume horaire du contrat n'était pas respecté, ni même que le nettoyage trimestriel des vitres n'était pas effectué, aucune réclamation n'étant formée sur ce point chaque trimestre.

Si l'intimée verse aux débats des attestations de son personnel mentionnant que le ménage était mal fait, ces témoignages ont été établis en septembre 2017, soit postérieurement aux factures impayées, et à la résiliation du contrat prononcée par la société LDG Avocats au 31 août 2017.

Or, l'exception d'inexécution doit se justifier par l'inexécution totale ou partielle des obligations du co-contractant. Les témoignages postérieurs à la dernière facture impayée de juin 2017 ne permettent pas de démontrer la préexistence d'une inexécution partielle du contrat par la société Officium par rapport au défaut de paiement des factures.

En outre, l'intimée ne rapporte pas la preuve d'une exécution défectueuse du contrat par la société Officium présentant un niveau de gravité tel qu'il justifiait de ne plus exécuter l'obligation essentielle du contrat de la société LDG Avocats résidant dans le paiement des prestations effectuées.

Il résulte de ces éléments que la société LDG Avocats n'est pas fondée à invoquer l'exception d'inexécution pour faire obstacle à la demande en paiement de la société Officium.

La société LDG Avocats indique avoir réglé la facture de décembre 2015 par un chèque du 19 janvier 2016. Cependant, les factures étaient émises par la société Officium le 19 de chaque mois, et la facture du mois de janvier 2016 ne figure pas dans les factures impayées de sorte que le paiement allégué a été réalisé en règlement de la facture de janvier 2016.

La société LDG Avocats ne justifiant pas du paiement des factures émises par la société Officium au titre des prestations contractuelles réalisées, il convient de la condamner à payer à la société Officium la somme totale de 11 261,45 euros.

Le jugement sera donc infirmé en ce qu'il a débouté la société Officium de ses demandes tendant à voir condamner la société LDG Avocats au paiement des factures afférentes aux prestations d'entretien. La société LDG Avocats sera déboutée de l'ensemble de ses demandes.

Sur la demande au titre du préavis

Moyens des parties

La société Officium indique que le respect d'un préavis de trois mois est une durée normale compte tenu de la durée des relations d'affaires entre les parties ; que la société LDG Avocats devait donc respecter le préavis avant de mettre un terme au contrat ; que la cour devra donc infirmer le jugement en ce qu'il l'a déboutée de ses demandes et devra condamner la société LDG Avocats à lui payer une somme de 3 152,46 euros au titre du préavis de trois mois ; que si on retient l'argumentation de LDG Avocats, le contrat ne pouvait donc être résilié avant sa date de reconduction tacite le 19 janvier 2018 ; que les factures sont donc dues jusqu'au 19 janvier 2018 de sorte qu'elle est en droit de réclamer la somme de 6 304,92 euros au titre de la facturation due du mois de juillet 2017 au mois de janvier 2018.

La société LDG Avocats réplique que le contrat ne prévoit aucun préavis de sorte alors qu'aucune prestation n'a été réalisée depuis le mois de mai

2017 ; que ce préavis qui n'a jamais été exécuté, ne correspond à aucune prestation de sorte que la demande devra être rejetée.

Réponse de la cour

Le contrat ne comporte aucune stipulation relative à l'existence d'un préavis, mais seulement une faculté de dénonciation avant le terme du contrat, renouvelable tacitement chaque année.

Or, la société Officium demande le paiement de factures pendant un délai de préavis de trois ou six mois. En l'absence de stipulation contractuelle, la demande en paiement de factures pendant ce délai n'est pas fondée, étant précisé que la société Officium ne forme pas de demande indemnitaire pour réparer le préjudice que lui aurait causé la résiliation unilatérale prononcée par la société LDG Avocats le 31 août 2017.

La demande de paiement d'un préavis sera donc rejetée. Le jugement qui a omis de statuer sur cette prétention sera complété en ce sens.

Sur les frais et pénalités de retard

Moyens des parties

La société Officium soutient que l'article L.441-6 du code de commerce précise que les pénalités de retard sont exigibles sans qu'un rappel soit nécessaire ; que ce texte est d'ordre public ; que le taux applicable est aujourd'hui de 10 points puisque le taux de la Banque centrale européenne est nul ; que la société LDG Avocats sera condamnée à lui payer par provision, à compter de la date de chacune des factures, un intérêt de retard égal au taux d'intérêt appliqué par la Banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente majoré de 10 points ; que les intérêts seront capitalisés ; que l'indemnité forfaitaire de l'article L.441-6 du code de commerce, d'un montant de 40 euros, due pour chaque facture impayée s'ajoute aux intérêts de retard déjà facturés au débiteur et est exigible de plein droit sans qu'un rappel soit nécessaire ; qu'elle est fondée à solliciter la condamnation de la société LDG Avocats à lui payer une somme de 440 euros au titre des frais de recouvrement des 11 factures impayées.

La société LDG Avocats n'a pas formulé d'observations sur ces prétentions.

Réponse de la cour

L'article L.441-6 du code de commerce dispose :

« Les conditions de règlement doivent obligatoirement préciser les conditions d'application et le taux d'intérêt des pénalités de retard exigibles

le jour suivant la date de règlement figurant sur la facture ainsi que le montant de l'indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement due au créancier dans le cas où les sommes dues sont réglées après cette date. Sauf disposition contraire qui ne peut toutefois fixer un taux inférieur à trois fois le taux d'intérêt légal, ce taux est égal au taux d'intérêt appliqué par la Banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente majoré de 10 points de pourcentage. Dans ce cas, le taux applicable pendant le premier semestre de l'année concernée est le taux en vigueur au 1er janvier de l'année en question. Pour le second semestre de l'année concernée, il est le taux en vigueur au 1er juillet de l'année en question. Les pénalités de retard sont exigibles sans qu'un rappel soit nécessaire. Tout professionnel en situation de retard de paiement est de plein droit débiteur, à l'égard du créancier, d'une indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement, dont le montant est fixé par décret. Lorsque les frais de recouvrement exposés sont supérieurs au montant de cette indemnité forfaitaire, le créancier peut demander une indemnisation complémentaire, sur justification. Toutefois, le créancier ne peut invoquer le bénéfice de ces indemnités lorsque l'ouverture d'une procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire interdit le paiement à son échéance de la créance qui lui est due. »

En application de ce texte, les pénalités de retard pour non-paiement des factures sont dues de plein droit, sans rappel et sans avoir à être indiquées dans les conditions générales ou les contrats, ainsi que l'a d'ailleurs jugé la Cour de cassation (Com., 22 novembre 2017, pourvoi n° 16-19.739 ; Com., 20 décembre 2017, pourvoi n° 16-25.786 ; Com., 3 mars 2009, pourvoi n° 07-16.527, Bull. 2009, IV, n° 31).

La pénalité de retard prévue par l'article L.441-6 du code de commerce constituant un intérêt moratoire, elle peut être assortie de la capitalisation prévue par l'article 1154 du code civil (Com., 10 novembre 2015, pourvoi n° 14-15.968).

Il convient donc de condamner la société LDG Avocats aux pénalités de retard au taux égal au taux d'intérêt appliqué par la Banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente majoré de 10 points de pourcentage, à compter du jour suivant la date de règlement figurant sur la facture.

Les intérêts échus pour une année entière seront capitalisés en application de l'article 1154 du code civil devenu l'article 1343-2 du code civil.

La société LDG Avocats sera également condamnée au paiement d'une indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement de 40 euros, tel qu'il est d'ailleurs mentionné sur les factures, soit une somme totale de 440 euros.

Sur la demande de dommages et intérêts

Moyens des parties

La société Officium expose que le non-respect du délai raisonnable d'une procédure judiciaire peut entraîner la responsabilité de l'état lorsque la durée anormalement longue de la procédure est imputable à ses dysfonctionnements ; que la jurisprudence reconnaît que le justiciable souffre nécessairement d'un préjudice moral du fait de la durée anormalement longue de la procédure lié à l'inquiétude supplémentaire subie pendant l'attente prolongée non justifiée de l'issue de la procédure judiciaire ; que l'indemnisation est habituellement fixée à 150 € de préjudice moral par mois de retard ; que la chronologie du dossier démontre que la société LDG Avocats a tout fait pour nuire à la présente procédure afin de la faire perdurer le plus longtemps possible, n'hésitant pas à se montrer particulièrement peu confraternelle (communication de conclusions le jour de l'audience de mise en état) ; que le comportement anormal et dilatoire de la société LDG Avocats a été payant puisqu'un délai, à minima, de plus de trente mois se seront écoulés depuis la première audience de mise en état et la plaidoirie et la date à laquelle le dossier sera mis en délibéré, alors que le délai moyen pour obtenir une décision au fond devant le tribunal judiciaire est d'environ 7 mois ; que la cause de la lenteur excessive de la procédure n'est pas le fonctionnement de l'institution judiciaire ou de la présente juridiction mais est intégralement imputable aux man'uvres de la société LDG Avocats ; que le tribunal n'a pas statué sur sa demande au titre de la réparation de son préjudice moral causé par la durée anormalement longue de la procédure imputable au comportement dilatoire de la société LDG Avocats ; que la cour devra donc infirmer le jugement du 16 avril 2021 en ce qu'il l'a déboutée de ses demandes et condamner la société LDG Avocats à payer la somme de 3 450 euros (23 mois x 150 euros) de dommages et intérêts au titre de la réparation de son préjudice moral causé par la durée anormalement longue de la procédure imputable au comportement dilatoire de la société LDG Avocats.

L'intimée réplique que seule la société Officium a fait le choix d'assigner en matière de référé, alors même qu'elle connaissait les contestations qui lui étaient opposées ; que le délai imparti à la procédure s'analyse en fonction de la complexité du dossier, en tenant compte de l'attitude procédurale des parties, le délai s'appréciant dans la globalité de la procédure ; que devant le tribunal, la société Officium a communiqué des pièces dans le cadre d'un incident de communication de pièces, mais s'est refusée ensuite à les communiquer dans la procédure au fond ; qu'elle a reconclu puis sollicité la clôture de l'affaire, sans exécuter la communication à laquelle elle s'était pourtant engagée devant le juge de la mise en état ; qu'ainsi, la société Officium semble refuser le bénéfice du contradictoire et semble considérer que dès qu'elle a conclu, les parties doivent cesser d'échanger leurs pièces

et prétentions ; que si la société Officium ne s'ingéniait pas à reconclure systématiquement en refusant de verser les pièces essentielles aux débats, la durée de la procédure aurait été raisonnablement plus courte ; qu'une telle indemnisation ne peut être mise à la charge d'une partie, qui doit pouvoir agir à armes égales dans le cadre du respect du contradictoire, mais sur le fondement de la faute lourde commise dans le cadre du fonctionnement défectueux du service public de la justice, en application de l'article L.141-1 du code de l'organisation judiciaire ; que la cour constatera que la société Officium est elle-même à l'origine et responsable du préjudice qu'elle invoque, mais ne démontre nullement, et elle sera déboutée de sa demande.

Réponse de la cour

Il convient de constater que la société Officium entretient une confusion entre l'action en responsabilité contre l'État à raison d'un dommage causé par le fonctionnement défectueux du service public de la justice qui relève de l'article L.141-1 du code de l'organisation judiciaire, et la demande de dommages et intérêts à l'encontre de son co-contractant qui relève quant à elle de l'article 1153 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016.

L'article 1153 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, applicable au litige, dispose que dans les obligations qui se bornent au paiement d'une certaine somme, les dommages-intérêts résultant du retard dans l'exécution ne consistent jamais que dans la condamnation aux intérêts au taux légal, et le créancier auquel son débiteur en retard a causé, par sa mauvaise foi, un préjudice indépendant de ce retard, peut obtenir des dommages et intérêts distincts des intérêts moratoires de la créance.

Les moyens de défense exposés par la société LDG Avocats ne peuvent constituer en soi une faute dans l'exercice des droits de la défense. S'agissant des conclusions d'incident et des conclusions au fond déposées en première instance, il convient de rappeler que l'instruction de l'affaire était soumise à un juge de la mise en état qui a pu apprécier la pertinence des incidents formés et l'opportunité de clôturer l'instruction ou non, afin de faire respecter le principe du contradictoire et faire avancer la mise en état de l'affaire. La société Officium était en droit de solliciter le maintien de l'ordonnance de clôture initialement fixée, et solliciter le cas échéant, devant la juridiction de première instance, de voir écarter les conclusions de dernière heure. Le déroulement de l'instruction de l'affaire en première instance, qui ne dépend pas que des seules diligences d'une partie, soumis au contrôle d'un juge de la mise en état, ne peut donc établir la mauvaise foi de la société LDG Avocats.

En outre, la société Officium ne démontre pas l'existence d'un préjudice indépendant du retard qui ne serait déjà pas réparé par les pénalités de retard dues en application de l'article L.441-6 du code de commerce. La demande de dommages et intérêts de la société Officium sera rejetée, et le jugement sera complété en ce sens.

Sur les frais de procédure

Le jugement sera infirmé en ses chefs statuant sur les dépens et les frais irrépétibles.

La société LDG Avocats sera condamnée aux entiers dépens de première instance et d'appel, ainsi qu'à payer à la société Officium la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Dispositif

PAR CES MOTIFS,

Statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

INFIRME le jugement en ce qu'il a :

- débouté la société Officium de ses demandes tendant à voir condamner la société LDG Avocats au paiement des factures afférentes aux prestations d'entretien ;

- condamné la société Officium à payer à la société LDG Avocats la somme de 1 200 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné la société Officium aux dépens ;

CONFIRME le jugement en ses autres dispositions critiquées ;

STATUANT À NOUVEAU sur les chefs infirmés et Y AJOUTANT :

DÉCLARE les demandes en paiement de la société Officium recevables ;

CONDAMNE la société LDG Avocats à payer à la société Officium la somme de 11 261,45 euros ;

CONDAMNE la société LDG Avocats à payer à la société Officium les pénalités de retard au taux égal au taux d'intérêt appliqué par la Banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente majoré de 10 points de pourcentage, à compter du jour suivant la date de règlement figurant sur la facture ;

DIT que les intérêts échus, dus au moins pour une année entière, produisent intérêt ;

CONDAMNE la société LDG Avocats à payer à la société Officium la somme de 440 euros à titre d'indemnité forfaitaire de recouvrement ;

DÉBOUTE la société Officium de ses demandes formées au titre du préavis, et de la durée anormalement longue de la présente procédure judiciaire ;

DÉBOUTE la société LDG Avocats de l'ensemble de ses demandes ;

CONDAMNE la société LDG Avocats à payer à la société Officium la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la société LDG Avocats aux entiers dépens de première instance et d'appel.