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Décisions

Cass. 2e civ., 25 mars 2021, n° 18-20.726

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Pireyre

Rapporteur :

M. Cardini

Avocat général :

M. Girard

Avocats :

SCP Le Bret-Desaché, SCP Richard

Rennes, du 13 févr. 2018

13 février 2018

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Rennes, 13 février 2018), dans un litige opposant MM. P... et G... W... , d'une part, à Mme H... W... et M. P... F..., d'autre part, ces derniers ont été condamnés sous astreinte provisoire, par une ordonnance de référé du 16 février 2016, confirmée par un arrêt du 18 octobre 2016, à démolir un mur qu'ils avaient édifié.

2. Par ordonnance de référé du 14 juin 2016, un juge des référés a liquidé l'astreinte provisoire prononcée par l'ordonnance du 16 février 2016 à une certaine somme, condamné in solidum M. et Mme F... à en payer le montant et fixé une astreinte définitive.

3. Par ordonnance de référé du 8 novembre 2016, un juge des référés a liquidé l'astreinte définitive prononcée par l'ordonnance du 14 juin 2016 une certaine somme, condamné in solidum M. et Mme F... à en payer le montant et fixé une astreinte définitive.

4. Les ordonnances des 14 juin 2016 et 8 novembre 2016 ont été confirmées par un arrêt du 24 octobre 2017.

5. Par ordonnance de référé du 12 avril 2017, un juge des référés a liquidé l'astreinte définitive prononcée par l'ordonnance du 8 novembre 2016 à une certaine somme, condamné in solidum M. et Mme F... à en payer le montant et fixé une astreinte définitive.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, pris en ses première et deuxième branches, ci-après annexé

6. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le second moyen

Enoncé du moyen

7. M. et Mme F... font grief à l'arrêt de les condamner in solidum à payer à MM. P... et G... W... les sommes de 2 500 euros et 2 500 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive, alors « que l'exercice d'une action en justice ne peut engager la responsabilité de son auteur, sauf à caractériser une faute faisant dégénérer en abus le droit d'agir ou de se défendre en justice ; qu'en se bornant néanmoins, pour décider que M. et Mme F... avaient abusé de leur droit d'ester en justice, à affirmer qu'ils n'ignoraient pas les dispositions légales relatives à l'indivision et persistaient dans l'attitude consistant à refuser les décisions définitives qui n'allaient pas dans leur sens, multipliant ainsi les procédures générant des frais pour les intimés, la cour d'appel, qui n'a pas caractérisé à leur encontre une faute de nature à faire dégénérer en abus leur droit d'agir en justice, a violé l'article 1382 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016. »

Réponse de la Cour

8. Selon l'article 1382, devenu 1240, du code civil, tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

9. Ayant retenu que M. et Mme F... n'ignoraient pas les dispositions légales relatives à l'indivision et persistaient dans l'attitude de refuser les décisions définitives qui n'allaient pas dans le sens qui leur convenait, multipliant ainsi les procédures générant des frais pour les intimés, ce comportement révélant une intention de nuire manifeste, la cour d'appel, qui a ainsi caractérisé une attitude fautive de leur part, a pu en déduire le caractère abusif de la procédure.

10. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.

Mais sur le premier moyen, pris en sa troisième branche

Enoncé du moyen

11. M. et Mme F... font grief à l'arrêt de les condamner in solidum à payer la somme de 18 000 euros à MM. P... et G... W... , au titre de la liquidation de l'astreinte définitive prononcée par l'ordonnance du juge des référés du tribunal de grande instance de Lorient du 8 novembre 2016, pour la période correspondant aux soixante jours ayant couru à compter du trentième jour suivant la notification de ladite ordonnance alors « que l'astreinte étant une mesure de contrainte à caractère personnel, distincte des dommages-intérêts, deux débiteurs condamnés sous astreinte à une même obligation de faire ne peuvent être tenus in solidum au paiement du montant de l'astreinte liquidée ; qu'en condamnant néanmoins M. et Mme F... in solidum à payer la somme de 18 000 euros à MM. P... et G... W... , au titre de la liquidation de l'astreinte, la cour d'appel a violé l'article L. 131-1 du code des procédures civiles d'exécution, ensemble les articles 1200 et 1214 du code civil, dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016. »

Réponse de la Cour

Recevabilité du moyen

12. Les consorts W... contestent la recevabilité de ce moyen au motif qu'il est nouveau et incompatible avec la thèse adoptée devant la cour d'appel.

13. Cependant, le moyen, qui est de pur droit, n'est pas incompatible avec l'argumentation développée en cause d'appel.

14. Il est donc recevable.

Bien-fondé des moyens

Vu les articles L. 131-1, alinéa 1er, et L. 131-4, alinéa 1er, du code des procédures civiles d'exécution :

15. Aux termes du premier de ces textes, tout juge peut, même d'office, ordonner une astreinte pour assurer l'exécution de sa décision. Selon le second, le montant de l'astreinte provisoire est liquidé en tenant compte du comportement de celui à qui l'injonction a été adressée et des difficultés qu'il a rencontrées pour l'exécuter.

16. Il résulte de ces dispositions que deux débiteurs condamnés sous astreinte à une même obligation de faire ne peuvent être tenus in solidum au paiement du montant de l'astreinte liquidée.

17. Pour confirmer les ordonnances entreprises, l'arrêt relève que M. et Mme F... ne faisaient état d'aucune difficulté pour exécuter la décision du 18 octobre 2016.

18. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
Portée et conséquences de la cassation

19. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.

20. L'intérêt d'une bonne administration de la justice justifie, en effet, que la Cour de cassation statue au fond.

21. Il résulte de ce qui est dit aux paragraphes 15 et 16 qu'il y a lieu d'infirmer l'ordonnance du 12 avril 2017 en ce qu'elle a condamné in solidum Mme H... W... et M. P... F... à payer à MM. P... et G... W... la somme de 18 000 euros au titre de la liquidation de l'astreinte définitive prononcée suivant ordonnance de référé en date du 8 novembre 2016 et, statuant à nouveau de ce chef, de condamner Mme H... W... et M. P... F... à payer à MM. P... et G... W... la somme de 18 000 euros au titre de la liquidation de l'astreinte définitive prononcée suivant ordonnance de référé en date du 8 novembre 2016.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a confirmé l'ordonnance du 12 avril 2017 ayant condamné in solidum Mme H... W... et M. P... F... à payer à MM. P... et G... W... la somme de 18 000 euros au titre de la liquidation de l'astreinte définitive prononcée suivant ordonnance de référé en date du 8 novembre 2016, l'arrêt rendu le 13 février 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi.