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Décisions

CA Paris, Pôle 6 - ch. 9, 24 avril 2024, n° 21/08451

PARIS

Arrêt

Autre

CA Paris n° 21/08451

24 avril 2024

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 9

ARRET DU 24 AVRIL 2024

(n° 2024/ , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/08451 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CEPMA

Décision déférée à la Cour : Jugement du 11 Juin 2021 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - RG n° F19/10596

APPELANT

Monsieur [N] [O]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représenté par Me Blandine SIBENALER, avocat au barreau de PARIS, toque : R286

INTIMEE

S.A.S. EMGE

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Renaud ROCHE, avocat au barreau de LYON, toque : 713

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 05 Mars 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. Stéphane MEYER, président de chambre, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Stéphane MEYER, président

Fabrice MORILLO, conseiller

Nelly CHRETIENNOT, conseiller

Greffier, lors des débats : Monsieur Jadot TAMBUE

ARRET :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Stéphane MEYER, président de chambre et par Monsieur Jadot TAMBUE, greffier à qui la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

RAPPEL DES FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES

Monsieur [N] [O] a été engagé par la société EMGE, pour une durée indéterminée à compter du 18 septembre 2000, en qualité de chef comptable, avec le statut de cadre. Il a été promu responsable administratif et financier le 1er février 2013.

Il a fait l'objet d'arrêts de travail pour maladie à compter d'avril 2019 et a été licencié pour inaptitude le 28 octobre 2021.

La relation de travail est régie par la convention collective des ingénieurs et cadres de la Métallurgie.

Estimant que sa classification ne correspondait pas aux dispositions de la convention collective applicable, Monsieur [O] a saisi le conseil de prud'hommes de Paris le 29 novembre 2019 et formé des demandes afférentes à l'exécution de son contrat de travail.

Par jugement du 11 juin 2021, le conseil de prud'hommes de Paris a débouté Monsieur [O] de ses demandes et l'a condamné aux dépens.

Monsieur [O] a régulièrement interjeté appel de ce jugement par déclaration du 7 octobre 2021, en visant expressément les dispositions critiquées.

Aux termes de ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 5 janvier 2022, Monsieur [O] demande l'infirmation du jugement et la condamnation de la société EMGE à lui payer les sommes suivantes :

- rappel de salaires de décembre 2016 à décembre 2020 : 81 263 € ;

- indemnité de congés payés afférente : 8 126,30 € ;

- indemnité pour frais de procédure : 5 000 €.

Au soutien de ses demandes, Monsieur [O] expose qu'il doit être classé en position III C - coefficient 240 de la convention collective applicable, son affectation à la position III A - coefficient 135, ne correspondant, ni aux dispositions de son contrat de travail, ni aux fonctions qu'il occupait dans l'entreprise.

Aux termes de ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 4 avril 2022,

la société EMGE demande la confirmation du jugement, le rejet des demandes de Monsieur [O] et sa condamnation à lui verser une indemnité pour frais de procédure de 3 000 €.

Elle fait valoir que la classification qu'il revendique ne correspond pas aux fonctions qu'il exerçait .

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 30 janvier 2024.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions des parties, la cour se réfère à leurs dernières conclusions.

MOTIFS DE LA DECISION

La classification d'un salarié en fonction des normes fixées par la convention collective applicable dépend des fonctions exercées de façon effective par lui, sauf meilleur accord des parties et sous réserve de dispositions de cette convention collective exigeant la possession de diplômes ; il appartient au salarié qui se prévaut d'une classification conventionnelle différente de celle dont il bénéficie au titre de son contrat de travail de démontrer qu'il assure de façon permanente, dans le cadre de ses fonctions, des tâches et responsabilités relevant de la classification qu'il revendique.

En l'espèce, la société EMGE intervient, pour le compte de copropriétés, d'entreprises ou de particuliers dans les domaines de l'électricité, du contrôle d'accès et de la vidéosurveillance, de la menuiserie métal et de la serrurerie.

Aux termes du contrat de travail du 1er février 2013, se substituant au précédent, Monsieur [O] a été embauché en qualité de responsable administratif et financier (cadre) - position III A, coefficient 135 et ses bulletins de paie mentionnent cette fonction et cette classification. Il revendique la classification III C coefficient 240

L'annexe I de la convention collective des ingénieurs et cadres de la Métallurgie définit comme suit les classifications en cause :

" Position III

La Position III est composée de 3 positions repères : III A (indice 135), III B (indice 180) et III C (indice 240). Les positions correspondent à des fonctions différentes et sont indépendantes les unes des autres. Elles ne se trouvent pas nécessairement dans toutes les entreprises. Le classement dans l'une de ces 3 positions repères s'effectue exclusivement au regard de la fonction exercée au regard notamment de la nature de l'entreprise, de son importance de sa structure et de la nature des responsabilités assumées dans les postes sans que ces critères ne soient à proprement parler des critères déterminants.

- Position III A : Ingénieur ou cadre exerçant des fonctions dans lesquelles il met en 'uvre non seulement des connaissances équivalentes à celles sanctionnées par un diplôme, mais aussi des connaissances fondamentales et une expérience étendue dans une spécialité. Ses activités sont généralement définies par son chef qui, dans certaines entreprises, peut être le chef d'entreprise lui-même. Sa place dans la hiérarchie le situe au-dessus des agents de maîtrise et ingénieurs et cadres placés éventuellement sous son autorité ou bien comporte dans les domaines scientifique, technique, administratif, commercial ou de gestion des responsabilités exigeant une large autonomie de jugement et d'initiative dans le cadre de ses attributions.

- Position III B : Ingénieur ou cadre exerçant des fonctions dans lesquelles il met en 'uvre des connaissances théoriques et une expérience étendue dépassant le cadre de la spécialisation ou conduisant à une haute spécialisation. Sa place dans la hiérarchie lui donne le commandement sur un ou plusieurs ingénieurs ou cadres des positions précédentes dont il oriente et contrôle les activités, ou bien comporte, dans les domaines scientifique, technique, commercial, administratif ou de gestion, des responsabilités exigeant une très large autonomie de jugement et d'initiative.

- Position III C : L'existence d'un tel poste ne se justifie que par la valeur technique exigée par la nature de l'entreprise, par l'importance de l'établissement ou par la nécessité d'une coordination entre plusieurs services ou activités.

La place hiérarchique d'un ingénieur ou cadre de cette position lui donne le commandement sur un ou plusieurs ingénieurs ou cadres des positions précédentes.

L'occupation de ce poste exige la plus large autonomie de jugement et d'initiative.

Une telle classification résulte aussi de l'importance particulière des responsabilités scientifique, technique, commerciale, administrative ou de gestion confiées à l'intéressé en raison du niveau de son expérience et de ses connaissances sans que sa position dans la hiérarchie réponde à la définition ci-dessus ni même à celles prévues aux repères III A et III B. "

Monsieur [O] fait valoir qu'il était responsable administratif et financier non seulement de la société EMGE, mais également de la société s'ur EMGE sud-ouest et de toutes les autres sociétés s'urs ou filiales existantes ou futures, que ses fonctions, telles que définies par son contrat de travail, correspondaient à la position III C, puisqu'il se voyait confier " les attributions les plus larges inhérentes à ses fonctions sous l'autorité de la Direction ", en matières comptable et financière, organisationnelle et administrative, que la convention de " forfait tous horaires ", stipulée par son contrat de travail, correspond à la qualification de cadre dirigeant, telle que définie par l'article L.3111-2 du code du travail et qu'il bénéficiait d'une délégation de pouvoirs au titre de la réglementation en matière de droit du travail, de l'hygiène et la sécurité du personnel de son service et des tiers, ainsi que de la réglementation comptable et fiscale.

Il ajoute que les fonctions qu'il exerçait de façon effective correspondaient également à la position III C, puisqu'il était rattaché directement au directeur général de la société, qui a quitté l'entreprise en octobre 2017 sans être remplacé, qu'il a ensuite été rattaché à la directrice financière groupe, qu'il avait un collaborateur direct placé sous son autorité hiérarchique, et que d'autres collaborateurs de l'entreprise rattachés à d'autres services lui étaient aussi fonctionnellement rattachés, tels des responsables administration des ventes, ayant un statut de cadre et il produit en ce sens les attestations de Messieurs [H] et [Y], qui déclarent avoir travaillé sous sa subordination. Il fait également valoir qu'il a été membre du comité de direction jusqu'à qu'il en soit écarté brutalement à partir de septembre 2018, qu'il disposait de procurations et de délégations pour effectuer des dépenses de montants importants, signer divers contrats, notamment en matière de gestion du personnel et qu'il cosignait les convocations des réunions des délégués du personnel et a présidé certaines de ces réunions .

Cependant, la classification revendiquée par Monsieur [O] est la plus élevée de toutes, alors que la société EMGE soutient à juste titre que le poste de Monsieur [O] n'exigeait aucune connaissance technique, financière, comptable ou administrative particulière, l'entreprise évoluant dans un secteur d'activité banal ne nécessitant aucune formation spécifique.

Elle déclare, sans être contredite sur ce point, n'employer que 31 salariés et Monsieur [O] ne fournit aucune précision sur l'étendue du groupe au sein duquel il prétend avoir exercé ses fonctions.

Elle produit un organigramme mentionnant que Monsieur [O] n'avait qu'un assistant sous sa subordination et il convient de relever que les deux témoins précités mentionnent qu'ils travaillaient également sous la subordination du directeur général de la société.

Il résulte de ces éléments que Monsieur [O] ne prouve pas que ses fonctions répondaient à une exigence de valeur technique au regard de la nature, de l'importance de la structure de l'entreprise ou de la nécessité d'une coordination entre plusieurs services ou activités, telle que définie par la convention collective, l'autonomie dont il disposait et les responsabilités qu'il assumait correspondant de façon effective à la position III A qui était la sienne sur le plan contractuel.

Le jugement doit donc être confirmé en ce qu'il a rejeté ses demandes.

L'équité ne commande pas qu'il soit fait application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe,

CONFIRME le jugement déféré ;

DÉBOUTE Monsieur [N] [O] de ses demandes ;

DÉBOUTE la société EMGE de sa demande d'indemnité pour frais de procédure formée en cause d'appel ;

CONDAMNE Monsieur [N] [O] aux dépens d'appel.

LE GREFFIER LE PRESIDENT