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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 8, 23 avril 2024, n° 23/16277

PARIS

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Demandeur :

Cyber Production (SARL)

Défendeur :

Selarl Asteren (ès qual.)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Hébert-Pageot

Conseillers :

Mme Dubois-Stevant, Mme Lacheze

Avocats :

Me Ohana, Me Belin, Me Genevet

T. com. Paris, du 21 sept. 2023, n° 2023…

21 septembre 2023

FAITS ET PROCÉDURE :

La société Cyber production exerce une activité d'édition et de production d'oeuvres musicales.

En 1997, elle est devenue associée de la société civile des producteurs phonographiques (" la SCPP ") qui a pour activité le recouvrement des droits des producteurs de phonogrammes et la répartition des rémunérations qui leur reviennent. La SCPP concentre la totalité des droits qui reviennent à la société Cyber production qui a obtenu d'elle une subvention et une avance de trésorerie. Un litige est né entre les parties et, par arrêt de la cour d'appel de Paris du 8 septembre 2015, la société Cyber Production a été condamnée à payer à la SCPP une somme de 136.943,63 euros.

Sur assignation de la SCPP et par jugement du 19 juillet 2019, le tribunal de commerce de Paris a ouvert une procédure liquidation judiciaire à l'égard de Cyber Production. La cour d'appel de Paris a, par arrêt du 19 décembre 2019, réformé le jugement et ouvert une procédure de redressement judiciaire.

Par jugement du 23 juillet 2021 le tribunal a arrêté le plan de redressement par voie de continuation de la société Cyber production, la SELARL Asteren, prise en la personne de Maître [H] [U], étant désignée commissaire à l'exécution du plan en remplacement de la SELAFA MJA.

Ce plan d'apurement d'un passif de 130.397,43 euros prévoyait le paiement de sept annuités progressives, les quatre premières à hauteur de 10 % du passif et les trois suivantes à hauteur de 20 %.

Sur requête du 22 août 2023 du commissaire à l'exécution du plan, qui invoquait un règlement partiel de la deuxième annuité du 23 juillet 2022 et l'absence de règlement de la troisième annuité, et par jugement réputé contradictoire du 21 septembre 2023, le tribunal a prononcé la résolution du plan de continuation, mis fin à la mission du commissaire à l'exécution du plan, ouvert une procédure de la liquidation judiciaire, fixé la date de cessation des paiements au 23 juillet 2022 et désigné la SELARL Asteren en qualité de liquidateur judiciaire.

Par déclaration d'appel du 4 octobre 2023, la société Cyber production a fait appel et, par dernières conclusions n°2 remises au greffe et notifiées par RPVA le 22 février 2024, elle demande à la cour d'infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, de juger qu'elle n'est pas en état de cessation des paiements et que son plan de continuation doit être poursuivi, à titre subsidiaire d'infirmer le jugement entrepris en ses dispositions qui l'ont déclarée en liquidation judiciaire et d'ouvrir à son encontre une procédure de redressement judiciaire.

Elle soutient être à jour de son plan de continuation, la première annuité ayant été réglée le 23 juillet 2021, le commissaire à l'exécution du plan ayant ensuite disposé de 17.000 euros, après un virement de 12.000 euros le 23 juillet 2022, pour couvrir la deuxième annuité, et elle-même ayant consigné la somme de 16.000 euros le 21 février 2024 pour s'acquitter da la troisième annuité et ce, dans l'attente de percevoir des droits.

Elle ajoute que compte tenu de son actif disponible, elle n'était pas en état de cessation des paiements le 23 juillet 2022 comme l'a retenu le tribunal.

Par dernières conclusions remises au greffe et notifiées par RPVA le 22 décembre 2023, la SELARL Asteren ès qualités demande à la cour de prendre acte qu'elle s'en rapporte à la décision de la cour à intervenir.

Elle expose qu'elle n'a pas eu d'autres choix que de saisir le tribunal en résolution du plan, ses relances n'ayant pas abouti et fait observer que la société Cyber production ne produit pas de pièce, telle qu'un prévisionnel d'exploitation ou de trésorerie, justifiant qu'elle serait en mesure d'honorer les paiements du plan. Elle indique qu'au 26 octobre 2023 les comptes de la liquidation judiciaire faisaient état d'un crédit de 12.247,86 euros et prend acte de ce que la somme de 16.000 euros a été consignée sur le compte Carpa du conseil de la société.

Le ministère public est d'avis que la cour infirme le jugement entrepris. Cet avis a été communiqué par RPVA le 20 décembre 2023.

La clôture de l'instruction a été prononcée le 12 mars 2024.

SUR CE,

Aux termes de l'article L. 631-20-1 ancien du code de commerce, repris par l'article L. 631-20 du même code, lorsque la cessation des paiements du débiteur est constatée au cours de l'exécution du plan de redressement, le tribunal décide après avis du ministère public, sa résolution et ouvre une procédure de liquidation judiciaire.

La société Cyber production doit s'acquitter des annuités du plan de redressement arrêté par le tribunal le 23 juillet de chaque année.

Au jour où la cour statue, il n'est pas contesté qu'elle a réglé la première annuité puis la deuxième annuité échue le 23 juillet 2022 mais payée en plusieurs fois et intégralement après la requête du commissaire à l'exécution du plan.

La troisième annuité, d'un montant de 12.780,34 euros comprenant un acompte sur émoluments et frais, est échue depuis le 23 juillet 2023. La société Cyber production justifie de la consignation d'une somme de 16.000 euros sur le compte Carpa de son conseil. Il s'ensuit qu'elle est en mesure de faire face à cette échéance avec cet actif disponible.

Il n'est pas fait état d'un autre passif exigible que cette annuité du plan de redressement.

Il s'ensuit qu'au jour où la cour statue, l'état de cessation des paiements n'est pas établi.

Le jugement sera donc infirmé en toutes ses dispositions et les demandes de la SELARL Asteren ès qualités rejetées. La société Cyber production ne s'étant acquittée de la totalité de la deuxième échéance qu'après la saisine du tribunal en résolution du plan et ayant consigné pendant l'instance d'appel une somme permettant de couvrir la troisième échéance, les dépens seront mis à sa charge.

PAR CES MOTIFS,

La Cour statuant contradictoirement,

Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Déboute la SELARL Asteren ès qualités de toutes ses demandes ;

Condamne la société Cyber production aux dépens de première instance et d'appel.