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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 8, 23 avril 2024, n° 23/12925

PARIS

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Demandeur :

Bpifrance (SA)

Défendeur :

Jecks International (SAS), Asteren (Selarl) (ès qual.)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Hébert-Pageot

Conseillers :

Mme Dubois-Stevant, Mme Lacheze

Avocats :

Me Regnier, Me Teyssaire, Me Hiest Noblet

T. com. Bobigny, du 6 juin 2023, n° 2022…

6 juin 2023

FAITS ET PROCÉDURE :

Le 13 septembre 2016, la société BPI France a consenti à la société Jecks international un prêt d'un montant de 300.000 euros et d'une durée de six ans.

Par jugement du 7 juillet 2022, le tribunal de commerce de Bobigny a ouvert une procédure de redressement à l'égard de la société Jecks international, la SELARL Asteren étant désignée en dernier lieu mandataire judiciaire.

Par courrier du 2 août 2022, la société BPI France a déclaré une créance chirographaire d'un montant de 249.755,66 euros. Par courrier du 28 novembre 2022, le mandataire judiciaire a informé BPI France de ce que sa créance était contestée faute de justification par le signataire de la déclaration d'un pouvoir l'habilitant à déclarer sa créance. Par courrier du 2 décembre 2022, la société BPI France a maintenu les termes de sa déclaration et transmis des délégations de pouvoir.

Par ordonnance du 6 juin 2023, le juge-commissaire s'est déclaré incompétent pour statuer sur la créance déclarée et a invité la société BPI France à saisir la juridiction compétente.

Par déclaration du 19 juillet 2023, la société BPI France a fait appel de cette ordonnance et, par dernières conclusions remises au greffe et notifiées par RPVA le 22 septembre 2023 et signifiées à la société Jecks international le 5 octobre 2023, elle demande à la cour d'infirmer l'ordonnance entreprise et d'ordonner l'admission de sa créance au passif du redressement judiciaire de la société Jecks international, à titre chirographaire, à hauteur de la somme de 249.755,66 euros outre intérêts au taux contractuel de 3,07 % l'an et intérêts de retard au taux contractuel majoré de 3 % l'an, subsidiairement de surseoir à statuer dans l'attente de la décision rendue par le tribunal de commerce de Bobigny, et en tout état de cause de condamner la société Jecks international et la SELARL Asteren ès qualités à lui payer la somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens d'appel.

Par dernières conclusions remises au greffe et notifiées par RPVA le 20 décembre 2023, la SELARL Asteren ès qualités demande à la cour de lui donner acte de ce qu'elle s'en rapporte à justice sur le mérite de l'appel et de statuer ce que de droit sur les dépens.

La société Jecks international, à laquelle la déclaration d'appel a été signifiée le 5 octobre 2023 par acte remis à une personne habilitée à le recevoir, n'a pas constitué avocat.

La clôture de l'instruction a été prononcée le 27 février 2024.

SUR CE,

L'article L. 624-2 du code de commerce dispose qu'au vu des propositions du mandataire judiciaire, le juge-commissaire décide de l'admission ou du rejet des créances ou constate soit qu'une instance est en cours, soit que la contestation ne relève pas de sa compétence et qu'en l'absence de contestation sérieuse, le juge-commissaire a également compétence, dans les limites de la compétence matérielle de la juridiction qui l'a désigné, pour statuer sur tout moyen opposé à la demande d'admission.

L'appréciation de la régularité de la déclaration de créance relève de la compétence et des pouvoirs du juge commissaire.

C'est donc à tort que le juge-commissaire s'est en l'espèce déclaré incompétent pour statuer sur la créance déclarée alors que seule était soulevée une éventuelle irrégularité de la déclaration de la société BPI France tirée du défaut de pouvoir de la personne signataire de cette déclaration. L'ordonnance sera donc infirmée.

La société Jecks international, qui n'a pas constitué avocat, ne soutient pas sa contestation devant la cour et la SELARL Asteren ès qualités, qui s'en rapporte sur le mérite de l'appel, indique dans ses écritures que la société BPI France a, dans le délai de 30 jours du courrier de contestation, répondu à cette contestation en lui adressant les délégations de pouvoir habilitant le signataire de la déclaration de créance à la régulariser.

L'irrégularité de la déclaration de créance n'étant ni alléguée ni démontrée en cause d'appel et la créance n'étant contestée ni en son principe ni en son montant, il y a lieu d'admettre la créance de la société BPI France dans les termes de la déclaration.

La société Jecks international, qui a maintenu sa contestation devant le juge-commissaire alors que la société BPI France avait produit entre les mains du mandataire judiciaire les pouvoirs justifiant de la régularité de sa déclaration, sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel et à payer à la société BPI France une somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

La Cour statuant par arrêt réputé contradictoire,

Infirme l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau,

Admet au passif de la société Jecks international la créance chirographaire de la société BPI France pour un montant de 249.755,66 euros, les intérêts au taux contractuel de 3,07 % l'an et les intérêts de retard au taux contractuel majoré de 3 % l'an sur les sommes impayées jusqu'à parfait paiement ;

Y ajoutant,

Condamne la société Jecks international à payer à la société BPI France la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société Jecks international aux dépens de première instance et d'appel.