Livv
Décisions

CA Aix-en-Provence, ch. 3-1, 25 avril 2024, n° 23/09736

AIX-EN-PROVENCE

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Demandeur :

Glaces Regain (SASU)

Défendeur :

Institut National de la Propriété Industrielle (INPI), ITM Entreprises (SASU)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Gerard

Conseillers :

Mme Combrie, Mme Vincent

Avocats :

Me Durand, Me Ayache Bourgoin, Me Cherfils, Me Dumont

TGI Toulon, du 22 juin 2023, n° OP 22-25…

22 juin 2023

EXPOSE DU LITIGE

Le 17 juin 2022 la société ITM Entreprises a formé opposition à l'enregistrement n° 224856404 effectué par la société Glaces Regain le 28 mars 2022 portant sur le signe verbal «Glaces Regain», distinguant les produits suivants : «pâtisseries ; confiseries ; glaces alimentaires ; glace à rafraîchir ; gâteaux ; sucreries» en classe 30.

La société ITM Entreprises a invoqué un risque de confusion avec sa propre marque verbale «Regain», déposée le 5 mars 1993 pour les produits suivants : «pâtisseries ; biscuits» également en classe 30.

Par décision en date du 22 juin 2023 le directeur de l'Institut national de la propriété industrielle a rejeté l'enregistrement de la marque Glaces Regain.

Par déclaration du 21 juillet 2023 la société Glaces Regain a formé un recours à l'encontre de cette décision.

--------

Par conclusions enregistrées par voie dématérialisée le 12 janvier 2024, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé de ses prétentions et moyens, la société Glaces Regain (SASU) demande à la cour de :

Vu le Règlement (UE) n° 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil du 14 juin 2017,

Vu les articles L.411-4 et suivants du code de la propriété intellectuelle,

Vu la jurisprudence,

Vu les pièces communiquées,

Infirmer (ce qui signifie «prononcer la nullité de») en toutes ses dispositions la décision n° OP22-2552/SHF du 23 juin 2023 de l'Institut [6] ;

Statuant à nouveau ;

A titre principal,

Dire et juger que la marque verbale n° 4856404 ne présente aucune similitude ni le moindre risque de confusion avec la marque n° 3571717 dans l'esprit d'un consommateur d'attention moyenne conformément à la jurisprudence de la Cour de Justice de l'Union Européenne ;

Dire et juger que le dépôt et l'enregistrement de la marque verbale n° 4856404 est autorisé dans la classe 30 ;

A titre subsidiaire,

Dire et juger que le dépôt et l'enregistrement de la marque verbale n° 4856404 est autorisé dans la classe 30 à l'exception de la catégorie «biscuit» ;

En tout état de cause,

Débouter la société ITM Entreprises de l'ensemble de ses conclusions fins et prétentions contraires ;

Condamner la société ITM Entreprises à verser la somme de 5.000 euros à la société Glaces Regain au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamner la société ITM Entreprises aux entiers dépens, distraits au profit de Maître Régis Durand, Avocat sur son affirmation de droit ;

A titre liminaire, la société Glaces Regain soutient que sa déclaration d'appel est valable en ce qu'elle a sollicité l'infirmation de la décision de l'Institut national de la propriété industrielle et elle ajoute que son mémoire a été déposé dans les délais.

La société Glaces Regain expose qu'elle a pour activité la fabrication artisanale de glaces alimentaires tandis que la société ITM Entreprises est une enseigne nationale de grande distribution, sous enseignes Intermarché et Netto, et elle fait valoir que, tant les produits commercialisés, que la nature artisanale d'un côté, et industrielle de l'autre, ou l'identité visuelle des deux marques sont radicalement distinctes.

La société Glaces Regain rappelle notamment qu'elle commercialise des glaces tandis que la société ITM Entreprises ne commercialise que des produits secs et que les canaux de distribution sont totalement différents.

Elle conteste par ailleurs l'usage sérieux de sa marque antérieure invoqué par la société ITM Entreprises et conteste, à la comparaison des deux signes, tout risque de confusion.

--------

Par conclusions enregistrées par voie dématérialisée le 26 janvier 2024, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé de ses prétentions et moyens, la société ITM Entreprises (SASU) demande à la cour de :

Vu notamment les articles L.711-3 du L.411-4, R.411-19 et R.411-29 du Code de la propriété intellectuelle

Juger que la Cour n'est saisie d'aucune demande d'annulation de la décision de l'INPI et donc d'aucune prétention

En conséquence,

Déclarer caduc l'appel signifié le 23 septembre 2023 par la société Glaces Regain à l'encontre de la décision de l'INPI du 23 juin [Immatriculation 3]-2552/SHF ;

Subsidiairement,

Rejeter le recours contre la décision de l'INPI du 23 juin [Immatriculation 3]-2552/SHF reconnaissant l'opposition justifiée et rejetant la demande d'enregistrement de la marque Glaces Regain n° 4 856 404 ;

La société ITM Entreprises soutient en réponse qu'au visa des articles L.411-4 et R.411-19 du code de la propriété intellectuelle les recours contre les décisions du directeur de l'Institut national de la propriété industrielle sont des recours en annulation de sorte que la cour aurait dû être saisie d'un appel-nullité et non d'une demande d'infirmation. Elle ajoute qu'aucun mémoire en régularisation n'a été déposé avant le 27 octobre 2023.

Subsidiairement, la société ITM Entreprises fait valoir qu'il existe un risque de confusion entre les marques et que ce risque doit être apprécié globalement, en tenant compte de nombreux facteurs qui incluent notamment la similitude des produits et services et la similitude des signes en cause.

Par ailleurs, la société ITM Entreprises fait observer que la marque Regain fait l'objet d'un usage sérieux sur la période pertinente et sur le territoire de la France, sous une forme modifiée qui n'en altère pas son caractère distinctif.

-------

Par observations datées du 12 décembre 2023 le directeur de l'Institut national de la propriété industrielle fait valoir en premier lieu que la société ITM Entreprises a apporté des preuves suffisantes d'un usage sérieux de sa marque en France entre le 28 mars 2017 et le 28 mars 2022 au regard des pièces communiquées, tant sur la période pertinente, que sur le territoire français, et qu'à cet égard, il convient également de prendre en compte l'usage de la marque sous une forme modifiée.

Il ajoute que les justificatifs produits attestent d'un usage qui ne saurait être qualifié de symbolique.

En second lieu le directeur de l'Institut national de la propriété industrielle fait observer qu'il existe un risque manifeste que le public croie que les produits couverts par les marques en cause proviennent de la même entreprise ou, le cas échéant, d'entreprises liées économiquement.

Il souligne que les produits sont similaires, et que la comparaison des signes conduit à considérer qu'il existe un risque manifeste de confusion pour le consommateur d'attention moyenne.

--------

Le ministère public a déposé son avis en date du 31 janvier 2024.

MOTIFS

Sur la recevabilité du recours :

En application des articles R.411-19 et L.411-4 alinéa 1er du code de la propriété intellectuelle les recours exercés à l'encontre des décisions du directeur de l'Institut national de la propriété industrielle qui statuent sur la délivrance, le rejet ou le maintien des titres de propriété industrielle sont des recours en annulation.

Par ailleurs, conformément à l'article R.411-29 du code de la propriété intellectuelle, l'appelant dispose, à peine de caducité du recours, relevée d'office, d'un délai de trois mois pour remettre ses conclusions au greffe.

Les conclusions visées par ce texte s'entendent de conclusions conformes à la nature du recours fixée à l'article R. 411-19, soit en l'espèce d'une demande d'annulation de la décision du directeur de l'Institut national de la propriété industrielle.

Les premières conclusions de la société Glaces Regain déposées dans le délai de trois mois à compter de l'acte de recours, sollicitent de la cour qu'elle infirme la décision et statue à nouveau, en fait et en droit, comme s'il s'agissait d'un recours en réformation.

Or, indépendamment de la discussion sur le terme « infirmer » employé dans lesdites conclusions, la cour ne saurait dans le cadre d'un recours en annulation statuer en fait et en droit comme le sollicite l'appelante, le recours en annulation ne produisant aucun effet dévolutif.

N'ayant pas déposé et notifié, dans le délai de trois mois du recours, de conclusions saisissant la cour d'un recours en annulation, seul possible en l'espèce, il y a lieu de déclarer le recours caduc faute de conclusions régulières dans le délai de l'article R. 411-29 du code de la propriété intellectuelle.

Sur les frais et dépens :

La société Glaces Regain, partie succombante, conservera la charge des dépens.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Dit irrecevables les conclusions déposées par la société Glaces regain tendant à voir infirmer la décision rendue le 22 juin 2023 par le directeur de l'Institut national de la propriété industrielle,

En conséquence,

Déclare caduc le recours formé par la société Glaces Regain à l'encontre de la décision rendue le 22 juin 2023 par le directeur de l'Institut national de la propriété industrielle,

Condamne la société Glaces Regain aux dépens de la procédure.