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Décisions

Cass. 2e civ., 8 février 2024, n° 21-25.928

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

UGECAM Auvergne Limousin Poitou Charentes

Défendeur :

URSSAF du Limousin

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme MARTINEL

Rapporteur :

Mme Caillard

Avocat général :

M. Adida-Canac

Avocats :

SCP Lyon-Caen et Thiriez, SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol

Poitiers, ch. soc., du 28 octobre 2021

28 octobre 2021

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Poitiers, 28 octobre 2021), saisi le 13 juillet 2017 par l'UGECAM Auvergne, Limousin, Poitou Charentes (l'UGECAM) d'un recours contre la décision d'une commission de recours amiable ayant refusé d'annuler un contrôle réalisé par l'URSSAF du Limousin (l'URSSAF), le président d'un tribunal de grande instance, pôle social, a prononcé, le 14 mai 2019, la radiation de l'instance du rôle, l'UGECAM n'ayant pas comparu à l'audience de mise en état.

2. A la suite de la réinscription au rôle de l'affaire à la demande de l'UGECAM, le président du tribunal a prononcé, le 18 juillet 2019, la caducité du recours en raison de son défaut de comparution à l'audience de mise en état du même jour.

3. L'UGECAM a ensuite été déboutée de sa demande tendant à la réinscription au rôle de l'affaire et à voir rapporter la caducité, par ordonnance du 26 mai 2020, dont elle a relevé appel.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa quatrième branche 

4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le moyen, pris en sa première branche 

Enoncé du moyen

5. L'UGECAM fait grief à l'arrêt de confirmer dans toutes ses dispositions l'ordonnance prononcée le 18 juillet 2019 par le pôle social du tribunal judiciaire de Limoges qui a déclaré caduc le recours du 13 juillet 2017 formé et réinscrit le 21 mai 2019 par l'UGECAM, alors « que lorsque le juge déclare caduque une citation en justice, la voie de l'appel n'est ouverte qu'à l'égard de la décision par laquelle le juge refuse de rétracter sa première décision (Civ.2 17 juin 1998 n° 95-12.810 B n° 193) ; qu'il s'ensuit que la cour d'appel ne peut confirmer ou infirmer que la décision par laquelle le juge a refusé de rétracter sa décision déclarant la caducité, mais non la décision sur la caducité elle-même ; que la déclaration d'appel n° 20/01080 a été formée « à l'encontre de l'ordonnance rendue par le tribunal judiciaire pôle social de Limoges le 26 mai 2020 RG n° 19/00622 » par laquelle la demande de rapport de caducité a été rejetée ; que la cour d'appel a « confirmé dans toutes ses dispositions l'ordonnance prononcée le 18 juillet 2019 par le Pôle social du tribunal judiciaire de Limoges » par laquelle la caducité du recours a été prononcée ; que la cour d'appel a ainsi violé l'article 468 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

6. La cour d'appel ayant mentionné que l'appel était interjeté contre l'ordonnance du 26 mai 2020 et décidé dans ses motifs qu'il convenait de confirmer l'ordonnance attaquée, le fait qu'elle ait confirmé dans le dispositif de l'arrêt, l'ordonnance prononcée le 18 juillet 2019 et non celle prononcée le 26 mai 2020, procède d'une erreur purement matérielle qui ne saurait donner ouverture à cassation.

7. Le moyen est, dès lors, irrecevable.

Sur le moyen, pris en ses deuxième et troisième branches

Enoncé du moyen

8. L'UGECAM fait le même grief à l'arrêt, alors :

« 2°/ que, selon l'article R. 142-10-5 du code de la sécurité sociale, dans sa version applicable issue du décret n° 2018-928 du 29 octobre 2018, pour l'instruction de l'affaire, le président de la formation de jugement exerce les missions et dispose des pouvoirs reconnus au juge de la mise en état par les articles 763 à 781 du code de procédure civile ; que, selon l'article 764 du code de procédure civile, dans sa version applicable issue du décret n° 2017-892 du 6 mai 2017, le juge de la mise en état peut, après avoir recueilli l'avis des avocats, fixer un calendrier de la mise en état ; qu'il s'ensuit que l'absence de comparution du demandeur à l'audience de la mise en l'état pour la mise en place d'un calendrier de procédure n'est pas sanctionnée par la caducité du recours mais par le fait que le calendrier de procédure est établi sans tenir compte de l'avis de ce justiciable ; qu'en effet, l'audience de la mise en l'état pour l'établissement d'un calendrier de procédure a pour seul objet la détermination de ce calendrier ; que, même dans l'hypothèse, où le conseiller de la mise en l'état estimerait l'affaire en état d'être jugée, il ne pourrait que renvoyer à une audience ultérieure pour les plaidoiries ; qu'en aucun cas, sauf un excès de pouvoir, une audience de la mise en l'état pour la détermination d'un calendrier de procédure ne pourrait donner lieu à une audience de plaidoiries au fond ; que, pour déclarer le recours caduc, la cour d'appel a confirmé l'ordonnance du 18 juillet 2019 de laquelle il ressort que l'affaire a été appelée à l'audience de mise en l'état du 18 juillet 2019 pour mise en place d'un calendrier de procédure ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé l'article R. 142-10-5 du code de la sécurité sociale, dans sa version applicable issue du décret n° 2018-928 du 29 octobre 2018, et l'article 468 du code de procédure civile et l'article 764 du même code, dans sa version applicable issue du décret n° 2017-892 du 6 mai 2017 ;

3°/ que le droit d'accès à un tribunal doit être concret et effectif ; que, s'il n'est pas absolu et peut faire l'objet de limitations, celles-ci ne doivent pas restreindre ou réduire l'accès laissé à l'individu de manière à ce que l'essence même du droit ne soit pas altérée; que le droit d'accès à un tribunal se trouve atteint dans sa substance lorsque sa réglementation cesse de servir les buts de la sécurité juridique et de la bonne administration de la justice et constitue un formalisme excessif et une barrière qui empêche le justiciable de voir son litige tranché au fond par la juridiction compétente ; que constitue une barrière procédurale et un formalisme excessif le prononcé de la caducité d'un recours en raison de l'absence de comparution du demandeur à une audience de la mise en l'état pour la mise en place d'un calendrier de procédure ; que la sanction justifiée et proportionnée – conforme au but de sécurité juridique et de bonne administration de la justice – consiste en ce que l'absence de comparution du demandeur à cette audience conduit à ce que le calendrier de procédure soit établi sans tenir compte de son avis ; qu'en effet, l'audience de la mise en l'état pour l'établissement d'un calendrier de procédure a pour seul objet la détermination de ce calendrier ; que, même dans l'hypothèse, où le conseiller de la mise en l'état estimerait l'affaire en état d'être jugée, il ne pourrait que renvoyer à une audience ultérieure pour les plaidoiries ; qu'en aucun cas, une audience de la mise en l'état pour la détermination d'un calendrier de procédure ne pourrait donner lieu à une audience de plaidoiries au fond ; que, pour déclarer le recours caduc, la cour d'appel a confirmé l'ordonnance du 18 juillet 2019 de laquelle il ressort que l'affaire a été appelée à l'audience de mise en l'état du 18 juillet 2019 pour mise en place d'un calendrier de procédure ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé l'article 6-1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. »

Réponse de la Cour

9. Selon l'article 468 du code de procédure civile, si, sans motif légitime, le demandeur ne comparaît pas, le défendeur peut requérir un jugement sur le fond qui sera contradictoire, sauf la faculté du juge de renvoyer l'affaire à une audience ultérieure. Le juge peut aussi, même d'office, déclarer la citation caduque. La déclaration de caducité peut être rapportée si le demandeur fait connaître au greffe dans un délai de quinze jours le motif légitime qu'il n'aurait pas été en mesure d'invoquer en temps utile. Dans ce cas, les parties sont convoquées à une audience ultérieure.

10. Cette règle de procédure, dont la portée est générale et concerne toutes les audiences, sauf texte contraire, poursuit un but légitime au sens de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, en l'occurrence la célérité et l'efficacité de la procédure. Elle ne constitue pas un excès de formalisme, la partie demanderesse non comparante pouvant demander le rapport de la déclaration de caducité en justifiant d'un motif légitime de n'avoir pu comparaître, et ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit d'accès au juge d'appel, un rapport raisonnable de proportionnalité existant entre les moyens employés et le but visé.

11. La cour d'appel relève, par motifs propres et adoptés, que l'UGECAM ne produisait aucun élément permettant d'établir qu'elle avait sollicité et obtenu l'autorisation de formuler ses prétentions et ses moyens par écrit sans se présenter à l'audience du 18 juillet 2019, conformément à l'article 446-1 du code de procédure civile auquel renvoie l'article R.142-10-4 du code de la sécurité sociale.

12. Elle rappelle que le caractère oral de la procédure obligeait le demandeur à être présent ou représenté sauf dispense de présentation et que le dossier avait déjà fait l'objet d'une radiation pour défaut de comparution sans motif du demandeur.

13. Elle ajoute que l'éloignement géographique du conseil du demandeur ne pouvait constituer un empêchement légitime de comparaître à l'audience.

14. De ses constatations et énonciations, la cour d'appel a déduit, sans encourir les griefs du moyen, que la décision entreprise devait être confirmée.

15. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ;

Condamne l'UGECAM Auvergne Limousin Poitou Charentes aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par l'UGECAM Auvergne Limousin Poitou Charentes et la condamne à payer à l'URSSAF du Limousin la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du huit février deux mille vingt-quatre et signé par Mme Isabelle Thomas, greffier de chambre qui a assisté au prononcé de l'arrêt.