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Décisions

CA Versailles, ch. com. 3-1, 2 mai 2024, n° 22/01474

VERSAILLES

Arrêt

Autre

CA Versailles n° 22/01474

2 mai 2024

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 59C

Chambre commerciale 3-1

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 02 MAI 2024

N° RG 22/01474 - N° Portalis DBV3-V-B7G-VBYO

AFFAIRE :

[K] [M]

C/

S.A. MMA IARD

...

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 17 Novembre 2021 par le Tribunal de Commerce de NANTERRE

N° Chambre : 1

N° RG : 2017F01080

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Mélina PEDROLETTI

Me Isabelle DELORME-MUNIGLIA

TC NANTERRE

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE DEUX MAI DEUX MILLE VINGT QUATRE,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Madame [K] [M]

née le 27 Octobre 1961 à [Localité 3]

de nationalité Française

[Adresse 4]

[Localité 3]

Représentée par Me Mélina PEDROLETTI, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 626 et Me Rémi BAROUSSE de la SELASU TISIAS, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C2156

APPELANTE

****************

S.A. MMA IARD

RCS Le Mans n° 440 048 882

[Adresse 1]

[Localité 2]

Société MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES

RCS Le Mans n° 775 652 126

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentées par Me Isabelle DELORME-MUNIGLIA de la SCP COURTAIGNE AVOCATS, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 52 et Me Guillaume REGNAULT de la SCP RAFFIN & ASSOCIES, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

INTIMEES

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 05 Mars 2024 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Bérangère MEURANT, Conseiller faisant fonction de président chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Bérangère MEURANT, Conseiller faisant fonction de président,

Madame Nathalie GAUTRON-AUDIC, Conseiller,

Monsieur Patrice DUSAUSOY, Magistrat honoraire,

Greffier, lors des débats : M. Hugo BELLANCOURT,

EXPOSE DU LITIGE

En 2011 et 2012, Mme [K] [M], sur le conseil de la société Acimptot Patrimoine, a souscrit à un produit de défiscalisation monté par la société Gesdom portant sur des investissements en outre-mer, en application des dispositions de l'article 199 undecies B du code général des impôts issues de la loi de programme pour l'outre-mer n°2003-660 du 21 juillet 2003, dite " Girardin industriel ".

La société Gesdom est assurée auprès de la société Covea Risks, aux droits de laquelle viennent les sociétés MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles, ci-après dénommées les MMA, au titre d'une police à laquelle elle a souscrit à titre personnel, mais également au titre d'une police à laquelle la Chambre nationale des conseillers en investissement financier (CNCIF) a souscrit pour ses membres, dont font partie la sociétés Gesdom.

Ces investissements consistaient, par le biais de sociétés en nom collectif ou de sociétés en participation, à procéder à l'acquisition de centrales photovoltaïques en vue de leur location aux entreprises exploitantes locales dans les Dom-Tom, et permettaient une réduction d'impôt proportionnelle au montant des souscriptions et imputable sur l'impôt dû au titre de l'année de réalisation de l'investissement, ou pouvant être reportée sur cinq ans. L'investisseur était tenu de conserver ses parts pendant cinq ans, à l'issue desquels l'exploitant des matériels s'engageait à les racheter à un prix déterminé, tenant compte d'une rétrocession partielle de l'avantage fiscal obtenu.

En vue de procéder à de tels investissements et de bénéficier de réduction d'impôt au titre des revenus des années 2011 et 2012, Mme [M] a signé deux bulletins de souscription aux montages, ainsi que deux contrats de prestations administratives et fiscales dénommés contrat PAF les 6 décembre 2011 et 24 février 2012, puis a versé en 2011, la somme de 8.520 €, outre 340 € au titre des frais, et en 2012, celle de 11.952 €, outre 375 € au titre des frais.

Le 7 mai 2012, la société Gesdom a informé Mme [M] de ce que l'administration fiscale avait, à la fin de l'année 2011, remis en cause la réduction d'impôt en considérant que l'année de rattachement de cette réduction devait s'entendre de la date de mise en service effective des matériels et non de celle de livraison. La société Gesdom indiquait alors à Mme [M] qu'elle ne lui délivrerait pas l'attestation fiscale en vue de bénéficier de la réduction d'impôt escomptée pour les revenus de l'année 2011 et qu'elle reportait cette réduction sur les revenus de l'année 2012.

La loi de finances du 29 décembre 2010 pour l'année 2011 ayant modifié l'article 199 undecies B du code générale des impôts précité, en excluant de la défiscalisation les investissements portant sur des installations de production d'électricité utilisant l'énergie radiative du soleil, jusqu'alors proposés aux investisseurs, Mme [M] n'a jamais pu bénéficier de la réduction d'impôt escomptée.

Par jugement du 22 mai 2014, la société Acimptot Patrimoine a fait l'objet d'une procédure de liquidation judiciaire, qui a été clôturée pour insuffisance d'actif le 22 octobre 2014.

Par jugement du 26 avril 2017, le tribunal de commerce de Saint-Denis de la Réunion a ouvert à l'égard de la société Gesdom une procédure de redressement judiciaire, qui a été convertie en liquidation judiciaire par jugement du 26 septembre 2019.

Considérant que la société Gesdom aurait dû s'assurer de l'efficacité de son produit de défiscalisation, Mme [M], par actes d'huissier des 27 et 28 avril 2017, a fait assigner les sociétés Acimptot Patrimoine, Zurich Insurance Public Limited Company en qualité d'assureur de la société Acimptot Patrimoine, MMA lard, MMA Assurances Mutuelles et Gesdom devant le tribunal de grande instance de Nanterre, afin d'obtenir l'indemnisation de son préjudice.

Mme [M] s'est désistée de l'instance et de son action à l'égard de la société Zurich et par acte d'huissier du 5 mai 2017, elle a fait assigner en intervention forcée la société CNA Insurance Company Ltd en qualité d'assureur de la société Acimptot Patrimoine.

Par actes d'huissier du 13 septembre 2017, Mme [M] a fait assigner en intervention forcée la Selarl Hirou, ès qualités de mandataire judiciaire de la société Gesdom et la Selarl Baronnie-Langlet et la SCP Caviglioli-Baron-Fourquie en leur qualité d'administrateur judiciaire de la société Gesdom.

Par acte d'huissier du 9 mars 2020, Mme [M] a fait assigner en intervention forcée la Selarl Hirou, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Gesdom.

Les instances ont été jointes.

Par jugement du 17 novembre 2021, le tribunal de commerce de Nanterre a :

- Donné acte à Mme [K] [M] de son désistement d'instance et d'action à l'encontre de la société Zurich Insurance Public Limited Company ;

- Donné acte à la société Zurich Insurance Public Limited Company de son acceptation du désistement d'instance et d'action de Mme [K] [M] ;

- Constaté l'extinction de l'action entre Mme [K] [M] et la société Zurich Insurance Public Limited Company et de l'instance enrôlée sous le RG n°17 F 1081, mais seulement à l'encontre de cette dernière, ladite instance s'étant poursuivie à l'encontre des autres défendeurs;

- Condamné Mme [K] [M] à verser à la société Zurich Insurance Public Limited Company la somme de 1.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Donné acte à la société CNA Insurance Company (Europe) de son intervention volontaire et a mis hors de cause la société CNA Insurance Company Limited ;

- Débouté Mme [K] [M] de ses demandes dirigées à l'encontre de la SAS Acimptot Patrimoine et de son assureur CNA Insurance Company (Europe) ;

- Fixé au passif de la liquidation judiciaire de la SARL Gesdom, à titre de dommages et intérêts, une créance d'un montant de 25.424,40 € en faveur de Mme [K] [M] ;

- Débouté Mme [K] [M] de sa demande visant à voir la SA MMA Iard et la société MMA Iard Assurances Mutuelles, venant aux droits de la SA Covea Risks, condamnées à garantir leur assuré, la SARL Gesdom, de la condamnation mise à sa charge ;

- Fixé au passif de la liquidation judiciaire de la SARL Gesdom, au titre de l'article 700 du code de procédure civile, une créance d'un montant de 5.000 € en faveur de Mme [K] [M] ;

- Débouté la SA MMA Iard et la société MMA Iard Assurances Mutuelles, venant aux droits de la SA Covea Risks, ainsi que la société CNA Insurance Company (Europe) de leurs demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamné Mme [K] [M] aux entiers dépens de l'instance ;

- Ordonné l'exécution provisoire du jugement.

Par déclaration du 14 mars 2022, Mme [M] a interjeté appel du jugement à l'égard des seules sociétés MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles.

Par ordonnance du 11 mai 2023, le conseiller de la mise en état a :

- rejeté la demande d'irrecevabilité de l'appel présentée par les sociétés MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles ;

- déclaré recevable l'appel interjeté le 14 mars 2022 par Mme [K] [M] à l'encontre du jugement rendu par le tribunal de commerce de Nanterre le 17 novembre 2021 ;

- s'est déclaré incompétent au profit de la cour pour statuer sur la demande d'irrecevabilité des prétentions relatives à l'application de la police d'assurance n°122.788.909 et à la résistance abusive ;

- s'est déclaré compétent pour statuer sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action tendant à l'application de la police n°122.788.909 ;

La rejeté ;

- Condamné in solidum les sociétés MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles aux dépens de l'incident ;

- Condamné in solidum les sociétés MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles à verser à Mme [K] [M] la somme de 2.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Par dernières conclusions notifiées par RPVA le 22 février 2024, Mme [K] [M] demande à la cour de :

- Confirmer le jugement du tribunal de commerce de Nanterre du 17 novembre 2021 en ce qu'il a retenu la responsabilité de la société Gesdom ;

- Fixer les préjudices subis par Mme [K] [M] à la somme totale de 25.764 € ;

- Le réformer en ce qu'il n'a pas retenu l'application de la police n°114.247.742 ;

Y Ajouter la garantie de la police n°112.788.909 ;

Et, statuant à nouveau,

- Condamner in solidum les sociétés MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles à payer à Mme [M] la somme de 25.764 € en application de la police n°114.247.742 avec un plafond de 4 millions d'€ et de la police n°112.788.909 sans que le plafond de cette dernière lui soit opposable ;

- Ordonner que les indemnités allouées portent intérêts au taux légal à compter de l'assignation, soit le 28 avril 2017, avec capitalisation des intérêts par année entière, sans que les intérêts ne soient soumis aux plafonds de garantie ;

- Ordonner la globalisation des sinistres résultant des réclamations des souscripteurs au montage Gesdom 2011/2012 ;

- Dire n'y avoir lieu à séquestre ;

- Condamner in solidum les sociétés MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles à payer à Mme [M] la somme de 5.000 € à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive ;

- Condamner in solidum les sociétés MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles à payer à Mme [M] la somme de 6.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamner in solidum les sociétés MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Par dernières conclusions notifiées par RPVA le 21 février 2024, les MMA demandent à la cour de :

- Confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions favorables aux sociétés MMA ;

In limine litis, sur l'irrecevabilite des demandes de Mme [M],

A titre principal,

- Juger la demande d'application de la police n°112.788.909 irrecevable comme étant nouvelle en cause d'appel ;

- Juger la demande de condamnation au titre d'une prétendue résistance abusive irrecevable comme étant nouvelle en cause d'appel ;

En conséquence :

- Déclarer irrecevable l'action de Mme [M] tendant à la mise en 'uvre de la police n°112.788.909 ;

- Déclarer irrecevable l'action de Mme [M] tendant à la condamnation des sociétés MMA au titre d'une résistance abusive ;

Sur le fond,

A titre principal,

- Juger que le contrat souscrit par la CNCIF auprès de Covea Risks (police n°112.788.909) ne peut s'appliquer dans le cas présent ;

- Juger que l'assureur de responsabilité civile ne garantit pas les sommes dues en vertu d'un contrat et que sont exclues les conséquences de l'absence d'exécution de la prestation ;

- Juger que le litige résulte des conséquences de l'absence d'exécution de la prestation de la SARL Gesdom qui sont exclues de la garantie (des contrats souscrits par la société Gesdom et par la CNCIF) ;

- Juger que la faute intentionnelle ou dolosive n'est pas assurable ;

A titre subsidiaire,

- Juger que le litige résulte des conséquences de l'absence d'exécution de la prestation de la SARL Gesdom qui sont exclues de la garantie ;

- Dire et juger que le litige résulte du non-respect d'une obligation de performance fiscale par laquelle la SARL Gesdom s'est engagée, qui est exclu de la garantie ;

- Juger que la société Gesdom a commis une faute intentionnelle ou dolosive ce qui exclut la garantie Responsabilité Civile professionnelle (des contrats souscrits par la société Gesdom et par la CNCIF) ;

- Juger que le refus de la société Gesdom de rembourser les sommes investies a ôté au sinistre tout caractère aléatoire (des contrats souscrits par la société Gesdom et par la CNCIF) ;

- Juger que les litiges afférents aux frais, honoraires et facturation de l'assuré sont encore exclus de cette garantie (des contrats souscrits par la société Gesdom et par la CNCIF) ;

A titre plus subsidiaire,

- Infirmer le jugement en ce qu'il a retenu une perte de chance à hauteur de 100 % des sommes investies ;

- Juger que les préjudices allégués par Mme [M] s'analysent en demande de restitution des sommes versées et que le préjudice moral allégué n'est pas justifié ;

En conséquence,

- Confirmer le jugement du 17 novembre 2021 en ce qu'il a débouté Mme [M] de toutes ses demandes à l'encontre des sociétés MMA ;

- Débouter Mme [M] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions dirigées à l'encontre des compagnies MMA Iard SA et MMA Iard Assurances Mutuelles, venant aux droits de la société Covea Risks ;

- Infirmer le jugement en ce qu'il a débouté les sociétés MMA de leurs demandes au titre des frais irrépétibles et statuant à nouveau sur ce point ;

- Condamner Mme [M] à payer aux sociétés MMA Iard SA et MMA Iard Assurances Mutuelles, venant aux droits de la société Covea Risks, la somme de 5.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile concernant l'instance devant le tribunal de commerce de Nanterre ;

Y ajoutant,

- Condamner Mme [M] à payer aux sociétés MMA Iard SA et MMA Iard Assurances Mutuelles, venant aux droits de la société Covea Risks, la somme de 5.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile concernant la présente l'instance ;

- Condamner Mme [M] aux entiers dépens de l'instance devant le tribunal de commerce de Nanterre et de la présente instance d'appel ;

A titre infiniment subsidiaire,

- Juger que ce litige s'inscrit dans le cadre d'un sinistre sériel ;

- Tenir compte du plafond de garantie de 2.000.000 € (et subsidiairement de 1.000.000 €) ;

- Désigner tel séquestre qu'il plaira à la cour avec pour mission de conserver les fonds dans l'attente des décisions définitives tranchant les différentes réclamations formées à l'encontre de la SARL Gesdom concernant le même sinistre et pour, le cas échéant, procéder à une répartition au marc le franc des fonds séquestrés ;

- Juger que la franchise de 20.000 € doit être déduite du montant de la condamnation éventuellement prononcée à l'encontre des sociétés MMA si le tribunal ne retenait pas une globalisation des sinistres ;

A titre très infiniment subsidiaire,

- Juger qu'en tout état de cause un plafond de garantie unique s'applique pour toutes les réclamations, dont celle de Mme [M], formées pendant la période de garantie subséquente ;

- Juger que la franchise de 20.000 € sera déduite de la condamnation prononcée au profit de Mme [M] si la cour ne retient pas une globalisation des sinistres ;

- Juger que ce même montant serait déduit de chacune des condamnations prononcées au profit de chacun des investisseurs si la cour ne retenait pas une globalisation des sinistres dans le cas présent ;

- Faire application dans les mêmes conditions, des limitations de garantie concernant le contrat souscrit par la CNCIF (plafond de 3.000.000 € et franchise de 15.000 €) si par impossible la cour retenait cette garantie ;

- Juger qu'en tout état de cause un plafond de garantie unique s'applique pour toutes les réclamations, dont celles des requérants, formées pendant la période de garantie subséquent ;

En tout état de cause,

- Condamner Mme [M] à payer aux sociétés MMA Iard SA et MMA Iard Assurances Mutuelles la somme de 5.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamner Mme [M] aux entiers dépens de la présente instance qui seront recouvrés par Me Delorme, avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 22 février 2024.

Pour un exposé complet des faits et de la procédure, la cour renvoie expressément au jugement déféré et aux écritures des parties ainsi que cela est prescrit à l'article 455 du code de procédure civile.

SUR CE, LA COUR,

Sur les fins de non-recevoir tirées de l'irrecevabilité des demandes nouvelles

Les MMA soulèvent l'irrecevabilité de la demande de Mme [M] au titre de la police n°112.788.909 souscrite auprès de la CNCIF qui n'a pas été invoquée en première instance. Les intimées considèrent que la question de l'application de la police n°112.788.909 nécessitait impérativement un débat devant les premiers juges, dans le respect du principe du double degré de juridiction.

Les MMA font également valoir que la demande indemnitaire au titre de la résistance abusive est, elle aussi, irrecevable à défaut d'avoir été présentée en première instance.

Mme [M] répond que le dossier de souscription mentionnait la seule police n°114.247.742 et qu'elle n'a découvert l'existence de la police n°112.788.909 qu'après le jugement de première instance. Elle ajoute que les arrêts rendus par la Cour de cassation et les cours d'appel depuis fin 2021 constituent des faits nouveaux au sens de l'article 564 du code de procédure civile.

*****

L'article 564 du code de procédure civile dispose que : "Les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait".

L'article 565 du même code précise que : "Les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, même si leur fondement juridique est différent".

Il ressort des éléments de la procédure que les demandes initiales formulées par Mme [M] à l'égard des MMA visaient à obtenir, sur le fondement de l'action directe de l'article L.124-3 du code des assurances, la mise en 'uvre à son profit des garanties souscrites par la société Gesdom auprès de cet assureur. Or, la demande formée en appel par Mme [M] a le même but, à savoir obtenir la mobilisation des garanties accordées par les MMA à la société Gesdom, soit par contrat directement conclu avec cette dernière, comme dans le cadre de la police n°114.247.742, soit par contrat dont la société Gesdom bénéficie indirectement, comme dans le cadre de la police n°112.788.909 souscrite par la CNCIF au profit des conseillers en investissement financier dits CIF. Les MMA ne peuvent invoquer l'absence de dévolution à la cour de la police n°112.788.909, dès lors que le bénéfice de cette police ne constitue pas une demande, mais un moyen invoqué au soutien de la demande d'indemnisation.

Au surplus, comme le soutient Mme [M], la police n°112.788.909 n'est pas mentionnée dans les documents contractuels qui lui ont été remis à l'occasion des deux investissements auxquels elle a procédé et les MMA ne démontrent pas qu'elle en a eu connaissance préalablement au jugement de première instance.

En conséquence, la fin de non-recevoir doit être rejetée.

En revanche, il est constant que Mme [M] n'a formulé aucune demande indemnitaire au titre de la résistance abusive en première instance et les décisions qui ont été rendues par la Cour de cassation et les cours d'appel depuis la fin de l'année 2021 ne sauraient caractériser un fait nouveau au sens de l'article 564 précité. La demande doit donc être déclarée irrecevable.

Sur l'action directe exercée par Mme [M] sur le fondement de l'article L.124-3 du code des assurances

Sur la responsabilité de la société Gesdom

Mme [M] conclut à la confirmation du jugement en ce qu'il a retenu que la société Gesdom avait manqué à ses obligations contractuelles, puisqu'il s'est avéré que l'opération n'était pas éligible au dispositif fiscal, que l'attestation fiscale n'avait pu donc être délivrée aux souscripteurs et qu'aucun autre investissement ou le remboursement des sommes versées ne lui avait été proposé.

Les MMA ne contestent pas l'inexécution contractuelle reprochée à la société Gesdom. Elles considèrent que la société Gesdom a manqué tant à son obligation principale en ne délivrant pas un investissement défiscalisant, qu'à son obligation subsidiaire en ne procédant pas au remboursement des sommes investies et en s'abstenant de proposer un autre investissement. Les intimées rappellent que la loi de finances 2011 avait été publiée dès le 30 décembre 2010 et excluait très clairement de la défiscalisation les investissements portant sur les installations de production d'électricité utilisant l'énergie radiative du soleil et que dans ses courriers adressés aux investisseurs, la société Gesdom invoquait précisément l'évolution de la position de l'administration fiscale de la loi de finance 2011 qu'elle connaissait.

*****

L'article 1147 du code civil, dans sa version antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, dispose que que le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de sa part.

Il est constant que par bulletins des 6 décembre 2011 et 24 février 2012, Mme [M] a souscrit au montage GIR Réunion en versant les sommes de 8.520 € et 11.952 €, sur un compte ouvert au nom de la SNC GIR Réunion auprès de la banque Delubac par la société Gesdom et qu'elle a conclu, parallèlement, pour chaque investissement, un contrat de prestations administratives et fiscales (PAF) stipulant à l'article 2 que : " Le prestataire s'engage à réaliser au profit du bénéficiaire et à la suite de sa souscription aux SNC désignée(s) ci-dessus, les seules prestations administratives et fiscales suivantes à l'exclusion de toutes autres qui resteront à la charge exclusive du bénéficiaire :

- Traitement des appels de cotisation émanant des organismes sociaux ('), à charge pour l'investisseur de procéder aux règlements afférents. La mission du prestataire dans le cadre de ce contrat ne pourra être étendue au contentieux qui pourra résulter du non-règlement par le bénéficiaire de ses cotisations.

- Assistance en cas de contrôle fiscal portant sur la réduction d'impôt conférée par le présent investissement (') ".

Sur le dossier de souscription, la société Gesdom est identifiée comme étant " conseiller en investissements financiers ". La société Gesdom a organisé et commercialisé le montage GIR Réunion 2011 en métropole par l'intermédiaire de conseillers en gestion de patrimoine indépendants, comme la société Acimptot Patrimoine.

La notice d'information jointe au bulletin de souscription précise que " Dans les 30 jours ouvrés précédant la déclaration de revenu pour l'année concernée, l'attestation d'éligibilité indiquant le montant de la déduction à pratiquer ainsi que tous les documents à adresser au centre des impôts compétent seront adressés au souscripteur par le gérant des SNC ". Les conditions générales de souscription désignent au chapitre VII la société Gesdom comme gérante des SNC.

La règlementation exige effectivement que le contribuable déclarant un avantage fiscal au titre de l'article 199 undecies du code général des impôts annexe à sa déclaration de revenus une attestation établie par le monteur certifiant la réalisation de l'investissement.

Or, le 7 mai 2012, la société Gesdom a écrit aux souscripteurs pour les informer de ce que, l'administration ayant remis en cause les réductions d'impôt des montages des années précédentes faute de mise en service du matériel avant le 31 décembre de l'année concernée " compte tenu des délais minimum nécessaires pour l'installation effective des matériels au sein des différentes sociétés exploitantes ", elle avait pris la décision " de ne pas délivrer d'attestation fiscale en vue de [vous] faire bénéficier de la réduction d'impôt au titre de l'année 2011 mais de reporter par prudence, le bénéfice de cette réduction d'impôt sur l'année 2012 " car si les SNC avaient bien acquis les SAE, " il n'a malheureusement pas été possible aux différents intervenants sur l'île de la Réunion de [les] mettre en service avant le 31 décembre 2011 ".

Par une nouvelle lettre envoyée aux investisseurs le 20 juin 2012, la société Gesdom a rappelé le report de l'avantage fiscal sur 2012 et y a joint quatre notes techniques : " Le montage juridique et les principes généraux ", " la gérance des SNC ", " les avantages de la loi Girardin " et " considération de la perte en capital ". Elle a expliqué que la sortie des SNC était impossible avant 5 ans et que la restitution intégrale du montant investi était également impossible.

Le 8 novembre 2012, la société Gesdom a informé ses clients que " malgré les efforts déployés par la société SFER, notre partenaire à la Réunion, la mise en service des matériels ne pourra pas aboutir avant le 31 décembre 2012 " et les a avertis d'un report de défiscalisation de l'investissement 2011 en 2013.

Par un courriel du 16 mai 2013, la société Gesdom a fait part de nouvelles difficultés rencontrées, consistant d'une part, en l'ouverture en novembre 2012 d'une procédure de sauvegarde de la société SFER, fournisseur et installateur des SAE et d'autre part, en la possible remise en cause du caractère éligible des SAE au dispositif fiscal évoquée par l'administration fiscale lors d'une réunion informelle avec les administrateurs judiciaires et les conseils de la société SFER. La société Gesdom expliquait qu'elle s'était pourtant assurée de l'éligibilité des SAE à l'avantage fiscal par une consultation du cabinet Landwell, datée du 2 septembre 2011, jointe à son message et que pour lever tout doute, le conseil de la société SFER avait adressé le 29 avril 2013 un rescrit à l'administration fiscale, également joint au courriel. Elle a conclu préférer ne pas délivrer les attestations fiscales avant d'avoir obtenu la position de l'administration fiscale.

Or, le Bulletin Officiel des Finances Publiques-Impôts publié le 8 juillet 2015 précise en son point 330 :

« En application de l'article 36 de la loi n° 2010-1657 du 29 décembre 2010 de finances pour 2011, la réduction d'impôt ne s'applique plus, à compter du 29 septembre 2010, aux investissements portant sur des installations de production d'électricité utilisant l'énergie radiative du soleil.

Il est précisé que cette exclusion vise toutes les installations générant de l'électricité à partir du rayonnement solaire. Il est ainsi indifférent que l'électricité soit produite en vue de la revente ou en vue de l'auto-consommation de la personne (particulier ou entreprise) productrice, que l'électricité soit obtenue par conversion photovoltaïque ou par concentration de la chaleur solaire. Est également sans incidence l'usage fait de l'électricité produite (production de chaleur, climatisation, éclairage etc.).

En revanche, l'exclusion ne concerne pas les installations utilisant directement la chaleur solaire pour produire seulement de l'énergie thermique telles que, par exemple, les installations de chauffe-eau solaire utilisant des fluides caloporteurs.

Par ailleurs, la réduction d'impôt est maintenue selon les modalités prévues par les dispositions antérieures à la loi de finances pour 2011 précitée, pour certains investissements ».

La société Gesdom n'a donc pas délivré l'attestation fiscale aux investisseurs, dont Mme [M], pour les deux investissements qu'elle avait réalisés en 2011 et 2012.

En sa qualité de monteur de l'opération et débiteur de la remise des attestations fiscales nécessaires au bénéfice de la réduction d'impôt, la société Gesdom avait pour obligation principale de s'assurer de la sécurité juridique de l'opération de défiscalisation. Le rapport d'information du Sénat sur la défiscalisation dans les départements et les territoires d'outre-mer, établi lors de la session 2002-2003 explique ainsi le rôle des cabinets d'ingénierie financière en page 63 : « Le métier de ceux qui sont généralement appelés « monteurs » est de mettre en relation des entreprises qui cherchent à investir et des épargnants qui souhaitent procéder à des placements défiscalisés dans le but d'abaisser leur taux de pression fiscale.(...) Le premier risque supporté porte sur la solidité du montage juridique, afin d'écarter le risque d'un retrait de l'avantage fiscal. Ce risque existe en raison du caractère de plus en plus complexe du droit fiscal et des opérations d'investissement elles-mêmes (...). Le risque le plus important supporté par les monteurs est celui de la défaillance de l'exploitant local (...) » (pièce 15 de l'intimé). La société Gesdom devait donc vérifier que le matériel financé était bien éligible à la défiscalisation et que ce matériel soit le 31 décembre de l'année en cause mis à la disposition de l'exploitant ultramarin « dans des conditions permettant son exploitation effective ».

En outre, le bulletin de souscription stipulait une obligation subsidiaire à la charge de la société Gesdom : « Dans l'hypothèse où l'investissement sélectionné ne pourrait être réalisé à la date du 31 décembre 2011, la présente réservation deviendra caduque et les montants versés en exécution de la présente seront intégralement remboursés par différents bénéficiaires des versements. Dans ce cas comme dans le cas où le montant de l'investissement viendrait à varier, Gesdom pourra présenter, en réponse au mandat de recherche que j'ai conféré à mon conseil en gestion de patrimoine, M. [D] [N], un autre investissement que je serai libre d'accepter ou de refuser et les montants versés au titre de la présente réservation seront ajustés en conséquence en respectant le taux d'apport en compte courant rapporté à la réduction d'impôt. ». Ainsi, la société Gesdom se devait soit de rembourser la somme investie, soit de proposer un autre investissement permettant d'obtenir l'avantage fiscal escompté.

En ne s'assurant pas de l'éligibilité des stations autonomes d'éclairage au dispositif fiscal et en ne délivrant pas les attestations nécessaires à l'obtention de l'avantage fiscal, la société Gesdom a manqué à son obligation principale. Elle a également failli à son obligation subsidiaire en ne remboursant pas à Mme [M] les montants investis et en ne proposant aucun nouvel investissement malgré l'absence de remboursement. La faute de la société Gesdom est donc établie. Elle engage sa responsabilité contractuelle à l'égard de Mme [M] en application de l'article 1147 précité.

Sur les préjudices et le lien de causalité

Mme [M] fait valoir que l'indemnisation doit lui permettre de se retrouver dans la situation qui aurait été la sienne si la société Gesdom n'avait pas commis d'erreur. Elle soutient que, conformément à l'article 1149 ancien du code civil, son préjudice est constitué par les pertes subies, en ce compris les frais de dossier, et le manque à gagner, soit la somme totale de 10.117 € au titre de l'investissement réalisé en 2011 et celle de 14.647 € au titre de l'investissement réalisé en 2012. Elle demande en outre 1.000 € au titre du préjudice moral constitué par les soucis et tracas provoqués par cette situation.

Elle soutient que son préjudice est direct et certain car il n'existe aucune persective que la liquidation des SNC fasse apparaître un boni ou que les déclarations de créance des SNC au passif de la société SFER puissent être fructueuses.

Les MMA demandent à la cour de débouter Mme [M] de ses demandes en considérant que les sommes demandées ne sont pas des dommages et intérêts mais un remboursement consécutif à une inexécution contractuelle. Les intimées font valoir que seul le conseiller en gestion de patrimoine peut être responsable des préjudices consécutifs au manquement au devoir de conseil, alors que la société Gesdom n'est intervenue qu'en tant que monteur de l'opération de défiscalisation. Les MMA considèrent que le remboursement de l'investissement ne peut être obtenu au titre d'une perte de chance, dès lors que Mme [M] reconnaît que le produit vendu était inéligible à la réduction fiscale prévue par la loi Giradin. Les intimées ajoutent que la demande au titre du manque à gagner est incompatible avec celle au titre du remboursement des sommes investies, l'avantage ne pouvant être obtenu qu'en contrepartie des sommes investies. Elles rappellent qu'en tout état de cause, Mme [M] n'a subi aucun manque à gagner puisque la loi Girardin n'était pas applicable. Les MMA soutiennent, s'agissant de la perte de chance, que l'appelante ne démontre pas qu'elle aurait pu bénéficier de la réduction d'impôt revendiquée si elle avait investi auprès d'un autre investisseur et qu'en tout état de cause, une telle indemnisation n'est que partielle. Enfin, les intimées concluent au rejet de la demande indemnitaire relative au préjudice moral qu'elles estiment injustifié.

*****

A titre liminaire, la cour constate qu'il ne ressort pas des écritures de l'appelante qu'elle sollicite l'indemnisation de son préjudice au titre d'une perte de chance.

L'article 1149 ancien, devenu article 1231-2, du code civil dispose que les dommages et intérêts dus au créancier sont, en général, de la perte qu'il a faite et du gain dont il a été privé, sauf les exceptions et modifications ci-après.

En premier lieu, s'agissant de l'existence du préjudice matériel, la réalité des paiements effectués par Mme [M] (8.520 € outre 340 € de frais de dossier en 2011 et 11.952 € outre 375 € de frais de dossier en 2012) et le montant de l'avantage fiscal escompté (10.117 € en 2011 et 14.647 € en 2012), tels qu'il résulte des bulletins de souscription, ne sont pas contestés.

Par ailleurs, il résulte des bulletins de souscription que les sommes de 8.520 € et 11.952 € ont été versées par Mme [M] au profit de cinq SNC composant le portefeuille SNC GIR Réunion et les frais de dossier directement au profit de la société Gesdom. Les associés de chaque SNC, rassemblés en assemblées générales extraordinaires, ont voté les augmentations du capital social et agréé en qualité de nouveaux associés les investisseurs ayant acquis des parts, dont Mme [M], les fonds investis étant déposés sur un compte séquestre, puis libérés au profit de la société SFER « en sa qualité de vendeur de matériel » et à la société Gesdom « en sa qualité de monteur de l'opération, de diffuseur commercial et pour sa mission de suivi et de gestion de la société pendant cinq années à venir » (pièce n°2 de l'appelante).

Il est constant qu'au terme d'un délai de 5 ans, l'exploitant local de la SAE (locataire) devait racheter pour un montant symbolique le matériel à la société de portage, laquelle était dissoute. L'investisseur initial devait donc bénéficier d'une réduction d'impôt supérieure à son investissement initial, qu'il ne récupérait pas. Les parts de SNC étaient par conséquent dépourvues de toute valeur puisqu'il était expressément stipulé qu'elles n'auraient aucune rentabilité.

Or, en ne s'assurant pas au préalable de l'éligibilité du matériel au dispositif fiscal de la loi Girardin, la société Gesdom a commis une faute directement à l'origine de la perte par Mme [M] de l'avantage fiscal escompté.

Il est donc établi que cette dernière a investi des sommes à fonds perdus dont elle ne peut poursuivre le recouvrement, sans avoir bénéficié de la contrepartie promise, à savoir une réduction de son impôt sur le revenu.

Elle a donc bien subi un préjudice actuel et certain.

En application de l'article 1149 ancien précité, ce préjudice correspond au montant de l'avantage fiscal escompté et finalement perdu soit 10.117 € pour l'investissement réalisé en 2011 et 14.647 € pour l'investissement réalisé en 2012.

L'incertitude entretenue par la société Gesdom qui a repoussé par des lettres successives la délivrance de l'attestation fiscale ouvrant droit à la réduction d'impôt escomptée pour ne finalement jamais la fournir, et l'échec de son investissement ont causé à Mme [M] un préjudice moral que la cour estime à 1.000 €.

En conséquence, le préjudice de Mme [M] doit être évalué à la somme de 24.764 € (10.117 € + 14.647 €) au titre du préjudice matériel, outre celle de 1.000 € au titre du préjudice moral.

Sur la garantie des MMA et les causes d'exclusion invoquées

Mme [M] revendique l'application de la police n°112.788.909 souscrite par la CNCIF dès lors que la société Gesdom en est membre. Elle affirme que le montage d'un produit de défiscalisation est une activité d'ingénierie financière qui figure parmi les activités garanties. L'appelante souligne que nombre d'activités énumérées par la police n'ont aucun lien avec l'activité stricto sensu de CIF mais n'en sont pas moins couvertes, alors que l'activité de CIF est compatible avec celle de monteur. Au visa de l'article L.113-1 du code des assurances, Mme [M] conteste l'exclusion de garantie opposée par les MMA, expliquant qu'elle était dans l'incapacité de connaître les limites de cette exclusion, qui est de nature à réduire à néant la garantie. Elle précise qu'elle ne réclame pas la réparation de l'absence d'exécution de la prestation, mais des conséquences dommageables de l'erreur commise sur le caractère éligible, la prestation ne se résumant pas à la délivrance d'une attestation fiscale car un montage comprend plusieurs étapes que la société Gesdom a réalisées, l'inexécution portant sur une obligation juridique, celle de s'assurer que le matériel soit éligible. Elle ajoute que la responsabilité de Gesdom découle non du défaut de respect d'une obligation de performance, mais d'un manquement dans l'interprétation de la loi fiscale et qu'en tout état de cause, cette exclusion doit être écartée faute d'être suffisamment formelle et limitée car elle implique une interprétation de la notion vague de " performance fiscale ". Mme [M] conteste l'existence d'une faute dolosive, qui s'entend d'un acte délibéré de l'assuré commis avec la conscience du caractère inéluctable de ses conséquences dommageables et ne se confond pas avec la conscience du risque d'occasionner le dommage. Elle soutient qu'il n'est nullement démontré que Gesdom avait connaissance et conscience du caractère inéluctable du dommage. Elle explique que les SAE ne paraissaient pas concernées par la loi de finances pour 2011 étant donné qu'au vu de la loi de finances 2011 excluant les "installations de production d'électricité utilisant l'énergie radiative du soleil", de son rapport de présentation et de la consultation du cabinet Landwell, la société Gesdom pouvait raisonnablement penser que l'exclusion ne les visait pas puisqu'elles ne produisent que de l'éclairage et non de l'électricité achetée par EDF et injectée sur le réseau. Elle estime que la faute dolosive ne peut être tirée du défaut de remboursement de l'investissement puisque quand le caractère non éligible des SAE a été établi en 2015, la société Gesdom était dans l'incapacité de récupérer les fonds auprès de la société SFER en raison de la sauvegarde de cette dernière ou de financer sur ses fonds propres leur restitution, ce défaut étant au surplus intervenu postérieurement à l'erreur commise sur le caractère éligible des SAE. Elle considère que la non-délivrance de l'attestation fiscale ne démontre pas une faute dolosive mais au contraire la prudence de la société Gesdom qui en a retenu la délivrance d'abord dans l'attente de l'installation des SAE puis de l'interprétation de la loi fiscale par l'administration, l'erreur commise étant antérieure à la non-délivrance de l'attestation fiscale.

S'agissant de la police n°114.247.742 souscrite par la société Gesdom, Mme [M] conteste les exclusions de garantie pour les motifs précités. Elle soutient que la résiliation du contrat d'assurance le 27 juillet 2012 ne peut avoir aucun impact puisque la loi impose aux contrats base réclamation la garantie des réclamations formées pendant le délai subséquent et même au-delà.

Les MMA demandent à la cour de ne pas retenir leur garantie :

- au motif principal que :

le contrat d'assurance souscrit par la CNCIF n'aurait pas vocation à s'appliquer ;

l'assureur de responsabilité civile ne garantit pas les sommes dues en vertu d'un contrat ;

- au motif subsidiaire qu'au fondement de l'article L. 111-3 du code des assurances :

la société Gesdom n'a pas exécuté la prestation à laquelle elle était contractuellement tenue ;

la société Gesdom a commis une faute dolosive et une faute intentionnelle de nature à exclure la garantie des assureurs, cette faute ayant pour effet d'ôter tout aléa dans l'exécution du contrat.

Elles demandent en outre à exclure de la garantie les frais de dossiers (330 €), ces frais étant expressément exclus de la garantie.

En premier lieu, les MMA soutiennent que le contrat souscrit par la CNCIF, pour le compte de ses membres, n'a vocation à s'appliquer que lorsque la société Gesdom intervient en qualité de conseiller en investissements financiers, ce qui n'aurait pas été le cas puisque, selon elle, la société Gesdom a agi, dans ses relations avec Mme [M], non pas comme conseiller - Mme [M] ayant été assistée de son propre conseiller en gestion de patrimoine - mais en tant que monteur d'un produit de défiscalisation qu'elle aurait commercialisé. Selon elle, ce n'est pas l'ingénierie financière qui est assurée, mais le conseil en ingénierie financière. Elle estime donc que l'activité de conseil est garantie, mais que l'activité de monteur d'un investissement n'est pas couverte par la police souscrite par la CNCIF. Elle précise que la société Gesdom n'a jamais sollicité la mise en 'uvre de cette police au titre de l'investissement litigieux.

En second lieu, elles font valoir que la police n°114.247.742 n'a pas à s'appliquer au motif que Mme [M] sollicite en réalité le remboursement des sommes qu'elle a investies et non des dommages et intérêts. Selon elles, il s'agit d'une dette contractuelle et non d'une dette de responsabilité civile. Elles considèrent que la société Gesdom n'a pas exécuté la prestation prévue au contrat en contrepartie de laquelle elle a perçu des fonds, puisqu'elle a commercialisé un produit dont elle savait qu'il n'était pas éligible au dispositif Girardin industriel, qu'elle n'a jamais délivré à Mme [M] l'attestation fiscale convenue et qu'elle n'a pas procédé au remboursement des sommes. Selon elles, l'assureur n'a pas à se substituer à l'assuré qui n'aurait pas exécuté ses obligations contractuelles et une telle inexécution contractuelle ne peut donner lieu qu'à restitution des sommes versées, non garantie par l'assureur.

Subsidiairement, sur le fondement de l'article L.112-6 du code des assurances, elles indiquent que le contrat d'assurance de responsabilité civile souscrit par la société Gesdom (police n°114.247.742) exclut de la garantie « les conséquences de l'absence d'exécution de la prestation », lesquelles relèvent du risque d'entreprise. Elles contestent le moyen soulevé par la partie adverse selon lequel la société Gesdom aurait partiellement exécuté la prestation et aurait commis une erreur, arguant que le produit défiscalisant était inéligible dès l'origine, n'a pas été fourni et qu'aucun remboursement ni proposition d'un autre investissement ne sont intervenus.

Par ailleurs, elles considèrent, au fondement de l'article L.113-1 du code des assurances, que la société Gesdom a commis une faute dolosive et une faute intentionnelle excluant la garantie de l'assureur. Elles indiquent tout d'abord que la société Gesdom a indiqué à ses clients, par lettre du 16 mai 2013, que le cabinet Landwell - qu'elle avait consulté le 2 septembre 2011 - avait confirmé l'éligibilité des SAE à la défiscalisation. Les MMA précisent que la modification législative (excluant les SAE du dispositif) est entrée en vigueur le 30 décembre 2010, de sorte que la société Gesdom a consulté le cabinet Landwell tardivement, et elles ajoutent que le produit a été vendu à Mme [M] en mai 2011, avant même que le montage soit « validé » par le cabinet Landwell dans le cadre d'une consultation non signée et que les MMA considèrent comme antidatée. Elles en déduisent que la société Gesdom a délibérément commercialisé en 2011 un produit exclu du champ d'application de la loi Girardin depuis décembre 2010, sans avoir vérifié que le montage était éligible, exposant ainsi ses clients à des conséquences dommageables inéluctables.

Elles contestent enfin qu'il puisse s'agir d'une erreur et concluent donc à la faute dolosive de la société Gesdom. Les MMA ajoutent qu'en refusant de rembourser l'investisseur ou de lui proposer un investissement similaire, la société Gesdom a nécessairement eu conscience que Mme [M] subirait un préjudice. Selon elles, la faute commise par la société Gesdom était nécessairement de nature à priver d'aléa l'opération, au sens de l'ancien article 1964 du code civil, et par conséquent, à exclure la garantie de l'assureur.

*****

L'application des deux contrats d'assurances litigieux sera examinée en premier lieu et les clauses d'exclusion invoquées, communes aux deux contrats, en deuxième lieu, puis, en troisième lieu, les plafonds de garantie invoqués.

- Sur l'application du contrat n°112.788.909

La société Gesdom a adhéré à la Chambre nationale des conseillers en investissements financiers (CNCIF), laquelle avait souscrit en 2008, pour ses membres, un contrat d'assurance responsabilité civile n°112.788.909 auprès de la société Covea Risks, aux droits de laquelle viennent les sociétés MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles, à effet au 1er janvier 2008 jusqu'au 31 décembre 2010, renouvelable ultérieurement par tacite reconduction (pièce 20 intimé).

La première page de la police mentionne notamment les primes annuelles par membre et précise « En ce qui concerne les Opérations Industrielles et Immobilières de Défiscalisation dans les DOM-TOM : le Taux de révision est fixé à 0,08 % TTC du Montant des Opérations réalisées de l'Année N-1 ».

Parmi les nombreuses « activités assurées » listées au chapitre I article 1er de la police figure expressément la catégorie « Conseil financier, Ingénierie financière ».

Ainsi le fait que le contrat ait été souscrit par la CNCIF ne signifie pas que seule l'activité de CIF serait couverte puisque le champ des activités assurées est plus large, comme indiqué supra, comprenant non seulement l'ingénierie financière mais également le conseil en ressources humaines, l'enseignement et la formation ou encore « administrateur auprès des tribunaux dans le cadre de successions ou des indivisions contentieuses ou concernant la gérance de tutelle / curatelle d'incapables mineurs ou majeurs », soit toutes sortes d'activités étrangères à celle spécifique de CIF. Ainsi, si l'activité de CIF est bien entendue visée avec une référence aux articles L.541-1 et suivants du code monétaire et financier, d'autres activités sont également assurées.

Le chapitre II A définit ainsi les garanties de la responsabilité civile professionnelle :

« Le présent contrat garantit les conséquences pécuniaires de la Responsabilité Civile que l'Assuré peut encourir en raison notamment des négligences, inexactitudes, erreurs de fait, de droit, omissions, commis par lui, ses membres, ses agents, les préposés salariés ou non dans l'exercice de leurs activités normales et plus généralement par tous actes dommageables. »

L'article B de ce même chapitre prévoit que :

« Sont seuls exclus de la garantie : (')

les dommages provenant d'une faute intentionnelle ou dolosive de l'assuré ;

les litiges afférents aux frais honoraires et facturations de l'assuré ; (')

les réclamations et dommages découlant d'une obligation de performance financière, fiscale ou commerciale, des produits ou services rendus, sur laquelle l'assuré se serait engagé expressément ; (')

les conséquences de l'absence d'exécution de la prestation (...) ».

Or l'application du contrat est ici recherchée au titre de l'activité d'ingénierie financière. La société Gesdom est en effet intervenue en qualité de monteur d'une opération industrielle et immobilière de défiscalisation outre-mer. N'ayant pas eu de relation directe avec le souscripteur, Mme [M], cette dernière étant en lien avec son conseil en gestion de patrimoine, M. [D] [N] de la société Acimptot Patrimoine, mentionné dans le bulletin de souscription, elle n'a pas délivré de prestation de conseil.

Les activités assurées décrites supra visent expressément l'ingénierie financière qui correspond exactement au rôle joué par la société Gesdom dans le montage complexe ayant donné lieu à la signature des bulletins de souscription par Mme [M] les 6 décembre 2011 et 24 février 2012. Le rapport d'information du Sénat sur la défiscalisation dans les départements et les territoires d'outre-mer, qui décrit le « rôle des cabinets d'ingénierie financière », ne fait que confirmer l'adéquation entre cette qualification et l'activité de monteur exercée par la société Gesdom dans l'opération de Mme [M] (pièce n°15 de l'appelante).

Les développements des MMA relatifs à l'activité de CIF sont donc inopérants. La production d'une attestation d'assurance datée du 17 janvier 2011 pour la période du 1er janvier au 31 décembre 2011 restreignant les activités assurées au titre de la responsabilité civile professionnelle de la société Gesdom (pièce n°21 des intimées) ne saurait prévaloir sur la liste des activités assurées figurant dans les conditions particulières du contrat CNCIF incluant précisément l'ingénierie financière. De la même façon, le fait que le tableau sur les franchises applicables au titre de la responsabilité civile professionnelle ne mentionne pas l'ingénierie financière ne peut signifier que cette activité est exclue de la garantie puisqu'elle fait partie de la liste des activités assurées au titre des conditions particulières.

Enfin, le fait que la société Gesdom ait souscrit individuellement une police spécifique auprès du même assureur n'empêche pas la mobilisation de la garantie souscrite par la CNCIF.

D'ailleurs, comme indiqué à juste titre par l'intimé, la Cour de cassation a considéré dans une affaire similaire concernant le même investissement et la même police d'assurance, que c'est à tort que la cour d'appel n'avait pas retenu l'application de la police litigieuse, qu' « en statuant ainsi, alors que le contrat d'assurance litigieux prévoit que sont assurées, outre l'activité de conseil en investissements financiers, celle d'ingénierie financière, la cour d'appel, qui en a dénaturé les termes clairs et précis, a violé le principe susvisé » (2e civ. 10 novembre 2021, 19-12.659).

Le jugement sera donc infirmé en ce qu'il n'a pas retenu l'application du contrat n°112.788.909.

- Sur l'application du contrat n°114.247.742

La société Gesdom a souscrit en 2008 un contrat d'assurance responsabilité civile n°114.247.742 auprès de la société Covea Risks, à effet au 1er avril 2008.

En première page est apportée la précision suivante :

« Prime annuelle

Prime provisionnelle minimum : 6.000 € TTC

Prime de révision : 0,03 % TTC du montant des investissements réalisés dans les DOM TOM ».

Au chapitre I « Définitions », figurent les activités assurées ainsi décrites :

« Commercialisation de produits de défiscalisation dans les DOM TOM (Loi Girardin Industrie) montés par le Cabinet Diane, conformément aux lois en vigueur ».

Dans ce contrat, les activités assurées sont donc définies de manière beaucoup plus circonscrite que dans celui souscrit par la CNCIF au profit de ses membres.

Le chapitre II A définit les garanties de la responsabilité civile professionnelle ainsi :

« Le présent contrat garantit les conséquences pécuniaires de la Responsabilité Civile que l'Assuré peut encourir en raison notamment des négligences, inexactitudes, erreurs de fait, de droit, omissions, commis par lui, ses membres, ses agents, les préposés salariés ou non dans l'exercice de leurs activités normales et plus généralement par tous actes dommageables. ».

L'article B de ce même chapitre prévoit que :

« Sont seuls exclus de la garantie : (')

les dommages provenant d'une faute intentionnelle ou dolosive de l'assuré ;

les litiges afférents aux frais honoraires et facturations de l'assuré ; (')

les réclamations et dommages découlant d'une obligation de performance financière, fiscale ou commerciale, des produits ou services rendus, sur laquelle l'assuré se serait engagé expressément ; (')

les conséquences de l'absence d'exécution de la prestation ; (...) ».

Ce contrat est donc applicable sous réserve des moyens développés par les MMA relatifs aux exclusions et qui seront examinés ci-après.

Sur les exclusions de garantie

Selon l'article L.112-6 du code des assurances, l'assureur peut opposer au porteur de la police ou au tiers qui en invoque le bénéfice les exceptions opposables au souscripteur originaire.

L'article L.113-1 du même code dispose que « Les pertes et les dommages occasionnés par des cas fortuits ou causés par la faute de l'assuré sont à la charge de l'assureur, sauf exclusion formelle et limitée contenue dans la police.

Toutefois, l'assureur ne répond pas des pertes et dommages provenant d'une faute intentionnelle ou dolosive de l'assuré. »

Selon l'article 1964 ancien du code civil, le contrat aléatoire est une convention réciproque dont les effets, quant aux avantages et aux pertes, soit pour toutes les parties, soit pour l'une ou plusieurs d'entre elles, dépendent d'un événement incertain. Tel est, notamment, le contrat d'assurance.

Plusieurs exclusions de garantie sont visées par les MMA.

Elles invoquent en premier lieu la clause d'exclusion de garantie visant « les conséquences de l'absence d'exécution de la prestation ».

Or la prestation de la société Gesdom ne se limitait pas à la délivrance de l'attestation fiscale au souscripteur, permettant à ce dernier d'obtenir une défiscalisation. La société Gesdom a 'uvré en tant que monteur d'une opération complexe dont la fourniture de l'attestation était l'aboutissement. Elle a créé elle-même un produit fiscal. Si elle a failli à certaines de ses obligations, il ne peut être considéré qu'elle n'a exécuté aucune de ses obligations contractuelles. La société Gesdom a exécuté certaines de ses prestations contractuelles. Comme le décrit justement Mme [M], la société Gesdom a conçu le montage, levé les fonds auprès d'investisseurs, constitué les SNC, sélectionné le matériel mais a fait une erreur dans le choix du matériel financé qui est en réalité inéligible au dispositif de défiscalisation.

La clause d'exclusion de garantie visant « les conséquences de l'absence d'exécution de la prestation » ne vide pas la garantie de sa substance dans la mesure où elle laisse subsister la garantie pour la prestation mal exécutée ou partiellement exécutée. En revanche il est acquis que l'assureur n'a pas à se substituer à l'assuré qui n'a pas exécuté ses obligations contractuelles. En cas d'inexécution totale des prestations, ce qui n'est pas le cas en l'espèce, la clause aurait vocation à jouer. Cette clause répond donc aux conditions de l'article L.113-1 du code des assurances en ce qu'elle est formelle et limitée et ne vide pas la garantie de sa substance.

En second lieu, les MMA invoquent la clause d'exclusion de garantie visant « les dommages provenant d'une faute intentionnelle ou dolosive de l'assuré ». Cette clause n'est qu'une reprise de l'exclusion légale issue de l'article L.113-1 précité.

La faute intentionnelle et la faute dolosive sont distinctes.

La faute intentionnelle est caractérisée lorsque l'assuré a recherché, par son comportement, les conséquences dommageables telles qu'elles en sont résultées.

La faute dolosive suppose un manquement délibéré de l'assuré dont il ne pouvait ignorer qu'elle conduirait inéluctablement à la réalisation du sinistre.

Tant la faute intentionnelle que la faute dolosive font perdre à l'opération d'assurance son caractère aléatoire.

Pour établir ces fautes, il faut démontrer que la société Gesdom avait la volonté de causer le dommage tel qu'il s'est réalisé et pas seulement d'en créer le risque.

Or, si la société Gesdom a commis une erreur sur l'éligibilité du produit commercialisé auprès de Mme [M], il n'est pas prouvé qu'elle avait pleinement conscience, à la date de la souscription, qu'elle ne pourrait pas délivrer l'attestation fiscale et surtout, il n'est pas démontré sa volonté de causer le dommage tel qu'il s'est réalisé.

Dans la mesure où la loi de finances du 29 décembre 2010 pour 2011 a exclu de la défiscalisation les « installations de production d'électricité utilisant l'énergie radiative du soleil », la société Gesdom a, dès l'année 2012, informé les investisseurs de sa décision de reporter le bénéfice de la réduction d'impôt en invoquant l'évolution de la position de l'administration fiscale. Les courriers successifs adressés aux souscripteurs démontrent le doute subsistant dans son esprit sur l'éligibilité des stations autonomes d'éclairage au dispositif fiscal (lettres du 7 mai 2012, 20 juin 2012 et 8 novembre 2012 et courriel du 16 mai 2013, pièces n° 3, 4, 5 et 6 de l'appelante).

En effet, le fonctionnement même des SAE ne les a pas exclues de facto du bénéfice de la défiscalisation dans l'esprit de la société Gesdom. Les SAE, installations d'éclairage utilisées sur des parkings de supermarchés, le long de voies privées ou publiques, et sur des terrains et installations de sport, même si elles sont alimentées par l'énergie solaire, ne produisent pas d'électricité destinée à être injectée sur un réseau pour l'auto-consommation ou dans le but d'être achetée par EDF.

Compte tenu de l'incertitude entourant l'éligibilité des SAE au dispositif, si la société Gesdom a manqué à son obligation de prudence et de sécurité juridique de l'opération et aurait dû s'assurer que le montage proposé à Mme [M] lui permettrait de bénéficier de la réduction d'impôt envisagée, elle n'a cependant pas manqué délibérément à ses obligations envers l'investisseur et n'avait pas conscience de la réalisation inéluctable du dommage en raison de l'inéligibilité à la défiscalisation des SAE. Elle n'a par conséquent commis ni faute intentionnelle ni faute dolosive excluant la garantie de l'assureur.

Ces exclusions de garantie ne trouvent donc pas application et le jugement sera confirmé sur ce point.

En troisième lieu, les MMA citent l'article 1964 ancien du code civil pour en déduire que l'aléa caractérisant le contrat d'assurance souscrit par la société Gesdom a disparu en cours de contrat. La nature aléatoire étant l'essence même du contrat d'assurance, les appelantes en déduisent que sa garantie n'est pas mobilisable.

Il est acquis que le contrat était aléatoire lors de sa formation mais que les appelantes excipent de la disparition de ce caractère aléatoire en cours d'exécution du contrat. Les sociétés MMA soutiennent que le dommage n'est pas le fruit du hasard mais uniquement la conséquence du comportement déloyal de la société Gesdom ayant commercialisé un produit « défectueux » et dont il était prévisible que les acquéreurs subissent des conséquences dommageables, de sorte qu'il n'existait plus d'aléa.

Cette exclusion légale de la garantie, sur le fondement de l'article 1964 du code civil, en raison de l'absence d'aléa, dont se prévalent les MMA, étend le domaine de la non-garantie en dehors des cas de fautes intentionnelle ou dolosive.

Comme indiqué précédemment, il est établi que l'assurée croyait en l'existence d'un aléa, croyance attestée par les lettres d'information adressées aux investisseurs indiquant reporter prudemment le bénéfice de la réduction d'impôt et donc la délivrance de l'attestation fiscale requise. Ce doute subsistant dans l'esprit de la société Gesdom, d'autant plus qu'elle avait sollicité en 2011 une consultation spécialisée - certes non signée mais à en-tête d'un cabinet d'avocats dont il n'a pas été démontré qu'elle serait un faux (pièce n°6 de l'appelante) - concluant à l'éligibilité du produit commercialisé. En outre, la publication le 8 juillet 2015 de la position de l'administration fiscale sur ce point démontre qu'un doute subsistait antérieurement et que seule cette prise de position ferme et officielle a pu lever celui-ci (pièce n°19 de l'appelante).

L'exclusion légale issue de l'article 1964 ancien du code civil ne trouve pas ici application.

S'agissant enfin de la clause excluant de la garantie « les litiges afférents aux frais honoraires et facturations de l'assuré », force est de constater que le litige ne porte pas sur des frais honoraires et facturations de la société Gesdom envers le souscripteur. Mme [M] recherche la responsabilité contractuelle de la société Gesdom qui n'a pas réalisé toutes les prestations auxquelles elle s'était engagée. Les frais facturés, notamment les frais de dossier, s'ils font partie intégrante du préjudice subi, ne sont pas à l'origine du litige.

Cette exclusion de garantie n'a donc pas vocation à s'appliquer.

Il résulte de l'ensemble de ces éléments que par infirmation du jugement, les deux polices sont applicables et les MMA doivent être condamnées in solidum à payer à Mme [M] la somme de 24.764 € au titre du préjudice matériel, outre celle de 1.000 € en réparation du préjudice moral.

Sur la globalisation des sinistres et l'application des plafonds de garantie

Mme [M] fait valoir que la police n°112.788.909 ne prévoit pas de plafond de garantie pour l'activité d'ingénierie financière, de sorte qu'aucun plafond ne peut lui être opposé, y compris pendant la période de garantie subséquente. Concernant la police n°114.247.742, Mme [M] conclut à la globalisation des sinistres. Elle explique que le sinistre qu'elle a subi doit être rattaché aux autres réclamations portant sur les montages Gesdom, soulignant que les premières sont intervenues avant l'expiration du délai subséquent de 5 ans suivant la résiliation. L'appelante s'oppose à l'application de franchises, dès lors que les sinistres doivent être globalisés et donc assimilés à un seul sinistre, ainsi qu'à la mise en oeuvre d'un séquestre, en pratique irréalisable en cas de réclamations échelonnées.

Les MMA répondent, sur le fondement de l'article L.124-1-1 du code des assurances relatif au sinistre sériel, de considérer que leur garantie est limitée aux motifs d'une part, que le contrat d'assurance de la CNCIF n'a pas, selon elles, à s'appliquer et d'autre part, que le sinistre est sériel de sorte que le préjudice doit être globalisé.

Elles rappellent que le plafond de garantie stipulé au contrat d'assurance de responsabilité civile (police n°114.247.742) souscrit par la société Gesdom était fixé à 1.000.000 € « par sinistre et par année d'assurance » lors du premier événement, puis a été porté à 2.000.000 € et que la société Gesdom est mise en cause dans le cadre de différentes procédures dont les enjeux sont largement supérieurs à ce montant.

Elles considèrent que puisque le sinistre résulte de la mise en cause de la responsabilité de la société Gesdom dans le cadre de la souscription des produits Loi Girardin, le plafond s'applique de manière globale aux conséquences de la responsabilité de cette société pour l'ensemble des réclamants.

Elles soutiennent par ailleurs que la cause technique à l'origine de l'ensemble de ces réclamations est toujours la même ' absence de vérification des conditions d'éligibilité du produit par la société Gesdom ' de sorte qu'une globalisation des préjudices est justifiée, que le plafond de garantie de 1.000.000 € puis 2.000.000 € de la police n°114.247.742 et de 3.000.000 € pour la police n°112.788.909 si son application était retenue, s'applique de manière globale aux conséquences de la responsabilité de la société Gesdom pour l'ensemble des réclamants.

Elles demandent que les franchises de 20.000 € (police n°114.247.742) et de 15 000 € (police n°112.788.909) s'appliquent à Mme [M] si la cour ne prononçait pas la globalisation des sinistres.

*****

L'article L.124-1-1 du code des assurances dispose que constitue un sinistre tout dommage ou ensemble de dommages causés à des tiers, engageant la responsabilité de l'assuré, résultant d'un fait dommageable et ayant donné lieu à une ou plusieurs réclamations. Le fait dommageable est celui qui constitue la cause génératrice du dommage. Un ensemble de faits dommageables ayant la même cause technique est assimilé à un fait dommageable unique.

Le sinistre sériel est ainsi défini dans les deux contrats n°112.788.909 et n°114.247.742 au chapitre I 7 : « Constitue un seul et même sinistre (un sinistre sériel) l'ensemble des réclamations résultant :

Soit d'un même événement,

Soit de plusieurs événements, même successifs, trouvant leur origine dans une même cause. En ce cas, la date du sinistre est celle de la première de la réclamation ou du Premier événement de la série. Les conditions de garanties, les montants de garanties et des franchises sont ceux en vigueur à cette date. »

En l'espèce, il n'est pas contesté que le dommage subi par Mme [M] a également été subi par de très nombreux autres souscripteurs. Force est de constater que ce dommage provient d'une cause unique : la faute contractuelle de la société Gesdom en ce qu'elle a manqué à son obligation de s'assurer au préalable de l'éligibilité du montage au dispositif fiscal. Il y a donc lieu de constater la globalisation des sinistres.

La police n°112.788.909 souscrite par la CNCIF prévoit en 2007 un plafond de 1.600.000 €, porté ultérieurement à 3.000.000 €, avec une franchise de 6.000 € pour les activités suivantes : conseil en gestion de patrimoine, intermédiaire financier, démarchage bancaire et financier, sans encaissements de fonds de tiers, intermédiaire en opérations de banque, agent immobilier, sans maniement de fonds de tiers, conseiller en investissements financiers.

La police souscrite par la CNCIF ne prévoit donc aucun plafond pour l'activité d'ingénierie financière qui, si elle figure bien dans les activités assurées, n'est pas mentionnée dans le tableau sur les capitaux assurés et franchises. L'activité d'ingénierie financière étant bien distincte de celle de conseiller en investissements financiers n'est pas incluse dans la liste des activités soumises à un plafond.

La police a été résiliée le 27 juin 2012 et la réclamation de Mme [M] est intervenue pendant la période de garantie subséquente de cinq ans.

En vertu de l'article L.124-5, alinéa 5, du code des assurances, le délai subséquent des garanties déclenchées par la réclamation ne peut être inférieur à cinq ans. Le plafond de la garantie déclenchée pendant le délai subséquent ne peut être inférieur à celui de la garantie déclenchée pendant l'année précédant la date de la résiliation du contrat. Un délai plus long et un niveau plus élevé de garantie subséquente peuvent être fixés dans les conditions définies par décret.

Dans la mesure où aucun plafond de garantie n'était prévu pour l'activité d'ingénierie financière pendant la durée du contrat n°112.788.909, aucun plafond ni franchise ne peut donc être opposé à Mme [M] pendant la période de garantie subséquente. La police n°112.788.909 est mobilisable au profit de Mme [M] sans plafond ni franchise.

La police n°114.247.742 souscrite par la société Gesdom prévoit un plafond de 1.000.000 € en 2008. Il n'est pas contesté que le plafond de garantie a été porté à 3.000.000 € puis 4.000.000 € à partir de 2009 (l'attestation d'assurance établie le 2 janvier 2012 mentionne un plafond à 4.000.000 €).

La date du sinistre sériel est l'événement ayant donné lieu à la réclamation, soit l'erreur commise par la société Gesdom sur l'éligibilité des SAE à l'avantage fiscal prévu par la loi Girardin, soit 2011. Les sinistres subis par Mme [M] ont la même cause, le plafond applicable est donc celui en vigueur en 2011, soit 4.000.000 €, peu important qu'un avenant ait ultérieurement en 2012 abaissé le plafond à 2.000.000 €.

La police n°114.247.742 est mobilisable au profit de Mme [M] avec un plafond de 4.000.000 €. S'agissant de la franchise, les sinistres ayant été globalisés, aucune franchise ne peut être opposée individuellement à Mme [M].

Par infirmation du jugement, la cour condamnera les MMA à indemniser Mme [M] au titre de son préjudice matériel (24.764 €) en application de la police n°114.247.742, sans franchise et avec un plafond de 4.000.000 €, et de la police n°112.788.909, sans franchise et sans plafond de garantie.

Sur les intérêts de retard et la capitalisation

Il résulte des dispositions de l'article 1153 ancien, devenu 1231-6, du code civil que la prestation due par l'assureur de responsabilité en vertu des engagements qu'il a contractuellement consentis produit des intérêts au taux légal à compter du jour de la sommation de payer ou d'un autre acte équivalent (1ère Civ., 14 novembre 2001, 98-19.205).

Selon l'article 1153-1 ancien, devenu 1231-7, du code civil, en toute matière, la condamnation à une indemnité emporte intérêts au taux légal même en l'absence de demande ou de disposition spéciale du jugement. Sauf disposition contraire de la loi, ces intérêts courent à compter du prononcé du jugement à moins que le juge n'en décide autrement.

En cas de confirmation pure et simple par le juge d'appel d'une décision allouant une indemnité en réparation d'un dommage, celle-ci porte de plein droit intérêt au taux légal à compter du jugement de première instance. Dans les autres cas, l'indemnité allouée en appel porte intérêt à compter de la décision d'appel. Le juge d'appel peut toujours déroger aux dispositions du présent alinéa.

Les intérêts courront sur l'indemnité allouée au titre du préjudice matériel à compter de la date de l'assignation, soit le 28 avril 2017, et seront capitalisés par année entière, conformément à la demande qui en est faite, en application de l'article 1343-2 nouveau du code civil.

Par ailleurs, en application de l'article 1231-7 (ancien article 1153-1) du code civil, l'indemnité allouée au titre du préjudice moral sera assortie des intérêts au taux légal à compter du présent arrêt. La capitalisation des intérêts sera ordonnée dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil.

Sur la demande de séquestre

Mme [M] soutient que les victimes doivent être indemnisées dans l'ordre dans lequel elles se présentent et demande par conséquent la confirmation du jugement en ce qu'il n'a pas ordonné un séquestre, arguant que :

- Le séquestre ne peut être ordonné que si la propriété d'une chose est litigieuse (art. 1961 du code civil). Par hypothèse, l'indemnité fixée par une juridiction n'est plus litigieuse ;

- Un séquestre ne peut être ordonné que s'il est démontré un risque d'atteindre les plafonds de garantie qui n'est pas démontré par l'assureur ;

- Les souscripteurs au montage Gesdom ayant formé leur réclamation dans le cadre de procédures distinctes devant des juges différents, il n'y a aucune garantie que toutes les juridictions ordonnent le séquestre de sorte qu'aucune répartition proportionnelle n'est possible ;

- le séquestre violerait le droit à un procès dans un délai raisonnable (article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme) ;

- un séquestre serait inéquitable puisqu'il profiterait à l'assureur car l'indemnité ne porterait plus intérêts à son profit en raison de l'effet libératoire du séquestre.

Les MMA demandent à la cour que la Caisse des dépôts et consignations soit désignée comme séquestre des sommes allouées, afin de conserver les fonds dans l'attente des décisions définitives, via une répartition proportionnelle au marc l'euro du montant plafonné pour assurer l'égalité des réclamants. Elles suggèrent que la mesure de séquestre n'excède pas 5 ans.

****

S'agissant de la police n°114.247.742, si un plafond de 4.000.000 € est opposable à Mme [M] en présence d'un sinistre sériel, l'opportunité d'un séquestre n'est cependant pas caractérisée. En effet, l'épuisement du plafond n'est pas justifié par l'assureur qui ne donne pas davantage d'éléments sur les sommes acquittées à ce jour au profit des investisseurs, même si de nombreuses instances sont actuellement en cours impliquant de très nombreux requérants et des sommes élevées.

Les MMA produisent un tableau des réclamations Gesdom qu'elles ont elles-mêmes constitué (pièce n°10) ainsi qu'un document intitulé « Compte-rendu de l'association AGIR 10 décembre 2018 » (pièce 44) qui correspond à une lettre d'un avocat indiquant que « la société AGIR représente plus de 2.600 personnes ». Ces éléments ne sont pas de nature à démontrer l'épuisement du plafond.

D'autre part, rien ne s'oppose à ce que les condamnations prononcées à l'encontre des MMA soient réglées au fur et à mesure de leur prononcé, jusqu'à épuisement dudit plafond, du moins en ce qui concerne la police n°114.247.742.

En effet, la désignation d'un séquestre s'impose d'autant moins que la police souscrite auprès de la CNCIF ne comprend pas de plafond et que Mme [M] peut solliciter l'application de la police n°112.788.909.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de constitution d'un séquestre.

Sur les frais irrépétibles et les dépens

Au regard de la décision, le jugement déféré sera confirmé du chef des frais irrépétibles et infirmé du chef des dépens.

Les MMA, parties perdantes, seront condamnées in solidum aux dépens de première instance et d'appel. Leur demande fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile sera de ce fait rejetée.

Il apparaît en outre équitable d'allouer à Mme [M] la somme de 5.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile. Les intimées seront dès lors condamnées in solidum au paiement de cette somme.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant dans les limites de sa saisine par arrêt contradictoire,

REJETTE la fin de non-recevoir tirée de l'irrecevabilité de la demande de mobilisation de la police n°112.788.909 ;

DÉCLARE irrecevable la demande indemnitaire formulée par Mme [K] [M] au titre de la résistance abusive ;

CONFIRME le jugement en ce qu'il a débouté les sociétés MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles de leur demande au titre des frais irrépétibles ;

L'INFIRME pour le surplus ;

Statuant à nouveau ,

CONDAMNE in solidum les sociétés MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles à verser à Mme [K] [M] la somme de 24.764 € en réparation de son préjudice matériel en application de la police n°114.247.742 avec un plafond de 4.000.000 € et de la police n°112.788.909 sans plafond de garantie ;

DIT que cette somme produira intérêts au taux légal à compter du 28 avril 2017 ;

CONDAMNE in solidum les sociétés MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles à verser à Mme [K] [M] la somme de 1.000 € en réparation de son préjudice moral, avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt ;

ORDONNE la capitalisation de l'ensemble des intérêts alloués dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil ;

DÉBOUTE les sociétés MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles de leur demande de désignation d'un séquestre ;

CONDAMNE in solidum les sociétés MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles aux dépens de première instance et d'appel ;

CONDAMNE in solidum les sociétés MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles à payer à Mme [K] [M] la somme de 5.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

REJETTE toutes autres demandes.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Bérangère MEURANT, Conseiller faisant fonction de président, et par M. BELLANCOURT, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le conseiller,