Cass. crim., 7 mai 2024, n° 23-82.303
COUR DE CASSATION
Autre
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Bonnal
Rapporteur :
Mme Jaillon
Avocat général :
M. Bougy
Avocats :
Me Marlange et de La Burgade, Me Waquet, Farge et Hazan
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.
2. L'association [1] ([1]) a porté plainte et s'est constituée partie civile devant le juge d'instruction à la suite de la découverte d'irrégularités commises entre le 1er janvier 2008 et le 31 décembre 2012 par M. [G] [X], ayant assuré la présidence de l'association entre le 1er janvier 2009 et le 31 décembre 2012.
3. Par ordonnance du juge d'instruction du 27 août 2019, M. [X] a été renvoyé devant le tribunal correctionnel des chefs d'abus de confiance et d'abus de biens sociaux.
4. Les juges du premier degré l'ont, par jugement du 9 juillet 2021, déclaré coupable des faits reprochés et condamné à trois ans d'emprisonnement avec sursis, 50 000 euros d'amende et 10 ans d'interdiction de gérer.
5. M. [X] a relevé appel de cette décision.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa première branche
6. Le grief n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.
Mais sur le moyen, pris en sa seconde branche
Enoncé du moyen
7. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a confirmé le jugement ayant déclaré M. [X] coupable d'abus de confiance en s'octroyant indûment une rémunération au titre du salaire fixe, des intéressements, et d'indemnité de départ en [3] alors qu'il était président de l'association [1] ([1]) et en faisant supporter par l'[1] des frais de déplacements réglés à la société [4] dont il était gérant, ayant déclaré M. [X] coupable d'abus de confiance en faisant supporter par l'[1] [3] des frais de déplacements réglés à la société [4] dont il était gérant et ayant déclaré M. [X] coupable d'abus de biens sociaux au préjudice de la société [1] [2] en s'octroyant une rémunération excessive en qualité de gérant salarié et en faisant supporter par la société [1] [2] des frais de déplacement réglés à la société [4] dont il était le gérant, a condamné M. [X] à la peine de dix-huit mois d'emprisonnement avec sursis et au paiement d'une amende de 50 000 euros, a prononcé, à titre de peine complémentaire, à l'encontre de M. [X] l'interdiction d'exercer une profession commerciale ou industrielle, de diriger, administrer, gérer ou contrôler une entreprise ou une société pour une durée de cinq ans, et a, sur l'action civile, reçu l'association [1] ([1]), l'association [1] [3], et la société [1] [2] en leurs constitutions de parties civile, déclaré M. [X] responsable du préjudice subi par les parties civiles et renvoyé l'affaire sur intérêts civils, alors :
« 2°/ que nul ne peut être puni d'une peine qui n'est pas prévue par la loi ; qu'en l'espèce, après avoir déclaré M. [X] coupable d'abus de confiance et d'abus de biens sociaux, la cour d'appel a prononcé à son encontre l'interdiction d'exercer une profession commerciale ou industrielle, de diriger, administrer, gérer ou contrôler une entreprise ou une société pour une durée de cinq ans à titre de peine complémentaire ; qu'en prononçant ainsi une interdiction de gérer toute entreprise ou toute société, cependant que les articles 314-10 du code pénal et L 249-1 du code de commerce, limitent une telle interdiction aux entreprises commerciales ou industrielles et aux sociétés commerciales, la cour d'appel a méconnu l'article 111-3 du code pénal. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 111-3 du code pénal :
8. Selon ce texte, nul ne peut être puni d'une peine qui n'est pas prévue par la loi.
9. Après avoir déclaré M. [X] coupable d'abus de confiance et d'abus de biens sociaux, l'arrêt attaqué le condamne notamment à l'interdiction de diriger, administrer, gérer ou contrôler une entreprise ou une société pour une durée de cinq ans.
10. En prononçant ainsi une interdiction de gérer toute entreprise ou toute société, alors que les articles L. 249-1 du code de commerce, 314-10 et 131-27 du code pénal, applicables aux délits reprochés, limitent une telle interdiction aux entreprises commerciales ou industrielles et aux sociétés commerciales, la cour d'appel a méconnu le texte susvisé et le principe ci-dessus rappelé.
11. La cassation est par conséquent encourue.
Portée et conséquences de la cassation
12. La cassation, qui sera limitée aux dispositions relatives à la peine complémentaire d'interdiction de gérer prononcée, aura lieu sans renvoi, la Cour de cassation étant en mesure d'appliquer directement la règle de droit et de mettre fin au litige, ainsi que le permet l'article L. 411-3 du code de l'organisation judiciaire.
13. Les dispositions de l'article 618-1 du code de procédure pénale sont applicables en cas de rejet du pourvoi, qu'il soit total ou partiel. La déclaration de culpabilité de M. [X] étant devenue définitive par suite de la non-admission de la première branche, il y a lieu de faire partiellement droit à la demande.
PAR CES MOTIFS,
CASSE et ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Paris, en date du 11 avril 2023, mais en ses seules dispositions relatives à la peine complémentaire d'interdiction de gérer prononcée, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;
DIT que l'interdiction de gérer prononcée à titre de peine complémentaire contre M. [X] est limitée à la direction, à l'administration, au contrôle ou à la gestion, directes ou indirectes, d'une entreprise commerciale ou industrielle ou d'une société commerciale ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
FIXE à 2 500 euros la somme que M. [X] devra payer à la société [1] [2] et aux association [1] et [1] [3] en application de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Paris et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du sept mai deux mille vingt-quatre.