Cass. 2e civ., 24 mars 2022, n° 20-12.241
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Pireyre
Rapporteur :
M. Cardini
Avocat général :
Mme Trassoudaine-Verger
Avocats :
SARL Ortscheidt, SCP Gaschignard
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 5 décembre 2019), la Société générale industrielle commerciale (la société) a fait pratiquer une saisie-attribution des comptes bancaires ouverts au nom de la société Vicalex auprès de la société Banque Delubac et Cie (la banque) puis a assigné cette dernière, devant un juge de l'exécution, en paiement des causes de la saisie.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
2. La banque fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à la société la somme de 14 354 euros, alors « que le virement ordonné au débit du compte bancaire du débiteur saisi antérieurement à la saisie-attribution constitue une opération de débit susceptible d'affecter le solde du compte au préjudice du saisissant ; qu'en condamnant la Banque Delubac à verser à la société GIC la somme de 14.354 euros à titre de dommages et intérêts, motif pris que « les virements au débit ne sont pas prévus dans la liste de l'article L. 162-1 du Code des procédures civiles d'exécution et qu'ils ne peuvent affecter le solde du compte saisi », cependant que les quatre ordres de virement transmis par courriel du 29 janvier 2016, d'un montant total de 14.354 euros, au débit du compte de la société Avas Transport, débiteur saisi, avaient été validés par la Banque Delubac entre 11h21 et 11h31, antérieurement à la saisie-attribution régularisée à 15h48, et constituaient ainsi, au même titre que des retraits, une opération de débit ayant pu affecter le solde du compte bancaire du débiteur saisi, la cour d'appel a violé l'article L. 162-1 du code des procédures civiles d'exécution ».
Réponse de la Cour
3. Aux termes de l'article L. 162-1 du code des procédures civiles d'exécution, lorsque la saisie est pratiquée entre les mains d'un établissement habilité par la loi à tenir des comptes de dépôt, celui-ci est tenu de déclarer le solde du ou des comptes du débiteur au jour de la saisie. Dans le délai de quinze jours ouvrables qui suit la saisie et pendant lequel les sommes laissées au compte sont indisponibles, ce solde peut être affecté à l'avantage ou au préjudice du saisissant par les opérations suivantes dès lors qu'il est prouvé que leur date est antérieure à la saisie :
1° Au crédit : les remises faites antérieurement, en vue de leur encaissement, de chèques ou d'effets de commerce, non encore portées au compte ;
2° Au débit :
a) L'imputation des chèques remis à l'encaissement ou portés au crédit du compte antérieurement à la saisie et revenus impayés ;
b) Les retraits par billetterie effectués antérieurement à la saisie et les paiements par carte, dès lors que leurs bénéficiaires ont été effectivement crédités antérieurement à la saisie.
Par dérogation aux dispositions prévues au deuxième alinéa, les effets de commerce remis à l'escompte et non payés à leur présentation ou à leur échéance lorsqu'elle est postérieure à la saisie peuvent être contrepassés dans le délai d'un mois qui suit la saisie.
Le solde saisi attribué n'est diminué par ces éventuelles opérations de débit et de crédit que dans la mesure où leur résultat cumulé est négatif et supérieur aux sommes non frappées par la saisie au jour de leur règlement.
4. Il résulte de ces dispositions que les virements ordonnés par le débiteur titulaire du compte avant la saisie, qui ne sont pas au nombre des opérations limitativement énumérées à l'article L. 162-1, 2°, précité, ne peuvent affecter le solde saisi attribué au préjudice du saisissant.
5. Ayant, d'une part, relevé, par motifs propres et adoptés, que lors de la signification du procès-verbal de saisie-attribution, le 29 janvier 2016 à 15h48, la banque avait répondu sur-le-champ que le compte présentait un solde de 23 485,16 euros, que le 2 février 2016, la banque avait informé l'huissier de justice qu'à la suite de la comptabilisation d'opérations en cours de traitement au moment de la saisie, dont quatre virements ordonnés le jour même, entre 9h38 et 9h59, le solde du compte était désormais nul et, d'autre part, exactement retenu que les virements ne sont pas prévus dans la liste de l'article L. 162-1 précité et qu'ils ne peuvent, en conséquence, affecter le solde du compte saisi, c'est sans encourir les griefs du moyen que la cour d'appel en a déduit que la banque avait fait une déclaration inexacte en indiquant un solde de compte courant à zéro euro et l'a condamnée, après avoir retenu que la société était en droit de saisir les montants correspondant aux quatre virements, ce qui constituait son préjudice certain, à lui verser des dommages-intérêts à hauteur de cette somme.
6. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi.