Décisions
Cass. crim., 7 mai 2024, n° 24-81.063
COUR DE CASSATION
Autre
Rejet
N° G 24-81.063 F-D
N° 00730
MAS2
7 MAI 2024
REJET
M. BONNAL président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 7 MAI 2024
M. [G] [X] [P] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Rennes, en date du 1er février 2024, qui, dans la procédure suivie contre lui des chefs d'infractions à la législation sur les stupéfiants en récidive, association de malfaiteurs, violences et extorsion aggravées, a infirmé l'ordonnance du juge des libertés et de la détention refusant son placement en détention provisoire et a ordonné cette mesure.
Un mémoire et des observations complémentaires ont été produits.
Sur le rapport de M. Pauthe, conseiller, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de M. [G] [X] [P], et les conclusions de Mme Viriot-Barrial, avocat général, après débats en l'audience publique du 7 mai 2024 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Pauthe, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre, et Mme Sommier, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit.
2. Le 10 janvier 2022, au terme d'une information ouverte le 30 avril 2019 des chefs d'infractions à la législation sur les stupéfiants, association de malfaiteurs, violences aggravées et extorsion avec arme, le juge d'instruction a ordonné la mise en accusation et le renvoi de M. [G] [X] [P] de ces chefs devant la cour d'assises.
3. M. [P] a été interpellé le 14 janvier 2024. A cette occasion, lui ont été notifiés l'ordonnance de mise en accusation, dont il a interjeté appel, et le mandat d'arrêt délivré à son encontre le 9 mai 2019 par le juge d'instruction.
4. Il a comparu devant le juge des libertés et de la détention qui, saisi de réquisitions du procureur de la République aux fins de placement en détention provisoire, a, par ordonnance du 16 janvier 2024, prononcé la nullité du mandat d'arrêt et dit n'y avoir lieu à placement en détention provisoire.
5. Le 19 janvier 2024, le procureur de la République a relevé appel de cette décision.
Examen des moyens
Sur le premier moyen
Enoncé du moyen
6. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a rejeté les moyens présentés par l'avocat de M. [P], infirmé l'ordonnance du 16 janvier 2024 par laquelle le juge des libertés et de la détention a refusé son placement en détention provisoire et ordonné son placement en détention provisoire, alors « que la Chambre de l'instruction, saisie de l'appel d'une ordonnance du juge des libertés et de la détention statuant sur le placement en détention provisoire, doit se prononcer dans les dix jours de cet appel, à peine de mise en liberté d'office, peu importe que l'appel ait été interjeté par la personne concernée contre une ordonnance de placement en détention provisoire ou par le ministère public contre une ordonnance de refus de placement en détention provisoire ; qu'au cas d'espèce, il résulte de la procédure que le parquet a interjeté appel le 19 janvier 2024 de l'ordonnance par laquelle le juge des libertés et de la détention, saisi sur le fondement de l'article 135-2 du placement en détention provisoire de Monsieur [P], a refusé d'ordonner une mesure de sûreté à l'encontre de l'exposant ; que la Chambre de l'instruction disposait dès lors d'un délai de dix jours, qui expirait le 29 janvier suivant à 24 heures, pour statuer sur cet appel ; qu'en statuant néanmoins sur cet appel le 1er février 2024, et en ordonnant à cette occasion le placement en détention provisoire de Monsieur [P], la Chambre de l'instruction a violé les articles 5 de la Convention européenne des droits de l'Homme, 194, 591 et 593 du Code de procédure pénale. »
Réponse de la Cour
7. Pour écarter le moyen de nullité pris de l'expiration du délai de dix jours prévu à l'article 194, alinéa 4, du code de procédure pénale, l'arrêt attaqué énonce que la chambre de l'instruction, bien que saisie du contentieux de la détention, est tenue de statuer sur l'appel du ministère public, formé contre une ordonnance du juge des libertés et de la détention ne contenant aucune mesure de sûreté à l'encontre de l'intéressé, dans le délai de quinze jours prévu par ce texte et non celui de dix jours qui concerne le seul appel formé à l'encontre d'une ordonnance de placement en détention provisoire.
8. Les juges en déduisent que, le procureur de la République ayant interjeté appel le 19 janvier 2014, le délai précité de quinze jours n'était pas expiré à la date où ils ont statué, soit le 1er février suivant.
9. En statuant ainsi, la chambre de l'instruction n'a méconnu aucun des textes visés au moyen.
10. En effet, la chambre de l'instruction, statuant sur l'appel interjeté par le procureur de la République à l'encontre de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention qui, saisi de réquisitions aux fins de placement en détention provisoire, refuse d'y faire droit, si elle se prononce en matière de détention provisoire, n'est pas saisie de l'appel d'une décision de placement en détention et, en conséquence, est tenue de statuer dans le délai de quinze jours prévu par le quatrième alinéa de l'article 194 du code de procédure pénale.
11. Dès lors, le moyen ne peut être accueilli.
Sur le second moyen
Enoncé du moyen
12. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a rejeté les moyens présentés par l'avocat de M. [P], infirmé l'ordonnance du 16 janvier 2024 par laquelle le juge des libertés et de la détention a refusé son placement en détention provisoire et ordonné son placement en détention provisoire, alors :
« 1°/ que le juge d'instruction ne peut décerner mandat d'arrêt contre un mis en cause qu'après avoir recueilli l'avis du ministère public sur cet acte spécifique ; que méconnaît cette formalité le juge d'instruction qui se borne à recueillir l'avis et les réquisitions du ministère public sur l'émission d'un mandat d'arrêt européen, répondant à un régime et à des principes distincts du mandat d'arrêt de droit français ; qu'au cas d'espèce, il résulte de la procédure que le juge d'instruction a décerné un mandat d'arrêt à l'encontre de Monsieur [P], sans recueillir au préalable l'avis du ministère public qui s'est borné à requérir, sur soit-communiqué du magistrat instructeur, la délivrance d'un « mandat d'arrêt européen » à l'encontre de l'exposant ; qu'il s'ensuit que la défense était fondée à faire valoir que, faute d'avis préalable, le mandat d'arrêt décerné à l'encontre de Monsieur [P] était irrégulier, de sorte que ce dernier ne pouvait être placé en détention provisoire après avoir été appréhendé sur la base d'un tel mandat d'arrêt ; qu'en affirmant à l'inverse que la mention, dans l'ordonnance de soit-communiqué du juge d'instruction et dans les réquisitions du parquet, d'un avis favorable à la délivrance d'un mandat d'arrêt européen supposait nécessairement un avis identique à la délivrance d'un mandat d'arrêt de droit commun, la Chambre de l'instruction, qui a dénaturé les éléments de la procédure et a statué par des motifs impropres à justifier la régularité du mandat sur lequel reposait sa saisine, n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles 122, 131, 695-11, 591 et 593 du Code de procédure pénale ;
2°/ que le juge des libertés et la Chambre de l'instruction ne peuvent se prononcer sur le placement en détention provisoire d'une personne renvoyée devant la juridiction de jugement et appréhendée sur le fondement d'un mandat d'arrêt délivré au cours de l'instruction qu'à la condition que la personne concernée ait fait l'objet d'une mise en examen par établissement d'un procès-verbal de perquisition et de recherches infructueuses ; que ne constitue pas un tel acte le simple procès-verbal de transport aux termes duquel, sans procéder à la moindre mesure coercitive au domicile du mis en cause, ont affirmé n'avoir pas retrouvé sa trace ; qu'au cas d'espèce, aucun procès-verbal de perquisition et de recherches infructueuses, ni aucun autre acte qui ferait état, en substance, d'une telle mesure assortie d'un tel résultat, ne figure en procédure ; que les "recherches" des enquêteurs se sont limitées à un transport aux abords de l'immeuble occupé par la mère de Monsieur [P] et chez laquelle ce dernier résidait, et ont constaté que le nom de l'exposant ne figurait sur aucune boîte aux lettres ni sur l'interphone, sans procéder à aucune autre vérification ni pénétrer dans l'appartement familial ; qu'il s'ensuit que la défense était fondée à faire valoir que, faute d'avoir respecté cette formalité, Monsieur [P] n'avait pas été régulièrement mis en examen ni mis en accusation, de sorte que les juges ne pouvaient légalement ordonner son placement en détention provisoire en vue de sa comparution devant la Cour d'assises ; qu'en affirmant à l'inverse que le procès-verbal de transport susvisé suffisait à caractériser le procès-verbal de « perquisition » et de recherches infructueuses justifiant lui permettant d'être saisie du placement en détention provisoire de Monsieur [P], la Chambre de l'instruction, qui a dénaturé les éléments de la procédure en sa possession et a statué par des motifs impropres à établir la légalité de ce placement en détention provisoire, n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles 131, 134, 176, 181, 135-2, 591 et 593 du Code de procédure pénale. »
Réponse de la Cour
Sur le moyen, pris en sa première branche
13. Pour écarter le moyen de nullité pris de l'irrégularité du mandat d'arrêt délivré par le juge d'instruction à la suite de l'avis du procureur de la République portant sur la délivrance d'un mandat d'arrêt européen, l'arrêt attaqué énonce qu'il résulte des pièces de la procédure que, par ordonnance de soit communiqué en date du 9 mai 2019, le magistrat instructeur a transmis le dossier d'instruction au procureur de la République pour réquisitions aux fins de délivrance d'un mandat d'arrêt européen à l'égard de M. [P], que le juge d'instruction a précisé que ce dernier a pris la fuite en empruntant un vol de [Localité 1] à [Localité 2] (Maroc) le 22 avril 2019 et qu'il est susceptible de se trouver au Maroc où demeure son père ou en Algérie où demeure sa mère, et que, par mention manuscrite apposée au bas de cette ordonnance, le procureur de la République a requis délivrance d'un tel mandat.
14. Les juges constatent que si ces réquisitions tendent à la délivrance d'un mandat d'arrêt européen, cet acte est nécessairement fondé sur une décision prise par une autorité judiciaire, jugement exécutoire, mandat ou toute autre décision judiciaire ayant la même force.
15. Ils ajoutent que les éléments du dossier font apparaître qu'à la date de l'émission du mandat d'arrêt, M. [P] était sans domicile connu et susceptible d'avoir quitté le territoire national.
16. Ils en déduisent que le magistrat instructeur a bien sollicité le 9 mai 2019 l'avis du ministère public sur la délivrance d'un mandat d'arrêt national, étant rappelé que l'ordonnance de soit communiqué ne vise que l'article 131 du code de procédure pénale relatif aux conditions de délivrance d'un tel mandat.
17. Ils soulignent enfin que le mandat d'arrêt a fait l'objet d'une diffusion par le ministère public sous la forme d'un mandat d'arrêt européen, conformément à l'article 695-16 du code de procédure pénale.
18. En l'état de ces énonciations, dont il résulte que le mandat d'arrêt a été émis sur l'avis conforme du procureur de la République à une date où M. [P] était en fuite, la chambre de l'instruction n'a pas méconnu les textes visés au moyen.
19. Le grief ne saurait être accueilli.
Sur le moyen, pris en sa seconde branche
20. Pour rejeter le moyen de nullité pris de l'irrégularité du procès-verbal de recherches infructueuses rédigé par les enquêteurs en exécution du mandat d'arrêt délivré à l'encontre de M. [P], l'arrêt attaqué énonce qu'il se déduit des éléments du dossier qu'un procès-verbal de recherches infructueuses a été dressé au dernier domicile de l'intéressé à [Localité 3], le 4 août 2020, et que le juge d'instruction a effectué d'autres recherches afin de localiser l'intéressé, lesquelles ont été vaines.
21. En l'état de ces énonciations, dont il résulte qu'il a été procédé aux formalités prescrites par le troisième alinéa de l'article 134 du code de procédure pénale conférant à la personne recherchée la qualité de personne mise en examen, et dès lors que, par l'effet de l'ordonnance de mise en accusation et de renvoi devant la juridiction de jugement et en application de l'article 181 du code de procédure pénale, le mandat d'arrêt délivré à son encontre avait conservé sa force exécutoire, la chambre de l'instruction a fait une juste application des textes visés au moyen.
22. Ainsi, le grief ne peut être accueilli.
23. Par ailleurs, l'arrêt est régulier tant en la forme en la forme qu'au regard des dispositions des articles 143-1 et suivants du code de procédure pénale.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du sept mai deux mille vingt-quatre.
N° 00730
MAS2
7 MAI 2024
REJET
M. BONNAL président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 7 MAI 2024
M. [G] [X] [P] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Rennes, en date du 1er février 2024, qui, dans la procédure suivie contre lui des chefs d'infractions à la législation sur les stupéfiants en récidive, association de malfaiteurs, violences et extorsion aggravées, a infirmé l'ordonnance du juge des libertés et de la détention refusant son placement en détention provisoire et a ordonné cette mesure.
Un mémoire et des observations complémentaires ont été produits.
Sur le rapport de M. Pauthe, conseiller, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de M. [G] [X] [P], et les conclusions de Mme Viriot-Barrial, avocat général, après débats en l'audience publique du 7 mai 2024 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Pauthe, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre, et Mme Sommier, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit.
2. Le 10 janvier 2022, au terme d'une information ouverte le 30 avril 2019 des chefs d'infractions à la législation sur les stupéfiants, association de malfaiteurs, violences aggravées et extorsion avec arme, le juge d'instruction a ordonné la mise en accusation et le renvoi de M. [G] [X] [P] de ces chefs devant la cour d'assises.
3. M. [P] a été interpellé le 14 janvier 2024. A cette occasion, lui ont été notifiés l'ordonnance de mise en accusation, dont il a interjeté appel, et le mandat d'arrêt délivré à son encontre le 9 mai 2019 par le juge d'instruction.
4. Il a comparu devant le juge des libertés et de la détention qui, saisi de réquisitions du procureur de la République aux fins de placement en détention provisoire, a, par ordonnance du 16 janvier 2024, prononcé la nullité du mandat d'arrêt et dit n'y avoir lieu à placement en détention provisoire.
5. Le 19 janvier 2024, le procureur de la République a relevé appel de cette décision.
Examen des moyens
Sur le premier moyen
Enoncé du moyen
6. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a rejeté les moyens présentés par l'avocat de M. [P], infirmé l'ordonnance du 16 janvier 2024 par laquelle le juge des libertés et de la détention a refusé son placement en détention provisoire et ordonné son placement en détention provisoire, alors « que la Chambre de l'instruction, saisie de l'appel d'une ordonnance du juge des libertés et de la détention statuant sur le placement en détention provisoire, doit se prononcer dans les dix jours de cet appel, à peine de mise en liberté d'office, peu importe que l'appel ait été interjeté par la personne concernée contre une ordonnance de placement en détention provisoire ou par le ministère public contre une ordonnance de refus de placement en détention provisoire ; qu'au cas d'espèce, il résulte de la procédure que le parquet a interjeté appel le 19 janvier 2024 de l'ordonnance par laquelle le juge des libertés et de la détention, saisi sur le fondement de l'article 135-2 du placement en détention provisoire de Monsieur [P], a refusé d'ordonner une mesure de sûreté à l'encontre de l'exposant ; que la Chambre de l'instruction disposait dès lors d'un délai de dix jours, qui expirait le 29 janvier suivant à 24 heures, pour statuer sur cet appel ; qu'en statuant néanmoins sur cet appel le 1er février 2024, et en ordonnant à cette occasion le placement en détention provisoire de Monsieur [P], la Chambre de l'instruction a violé les articles 5 de la Convention européenne des droits de l'Homme, 194, 591 et 593 du Code de procédure pénale. »
Réponse de la Cour
7. Pour écarter le moyen de nullité pris de l'expiration du délai de dix jours prévu à l'article 194, alinéa 4, du code de procédure pénale, l'arrêt attaqué énonce que la chambre de l'instruction, bien que saisie du contentieux de la détention, est tenue de statuer sur l'appel du ministère public, formé contre une ordonnance du juge des libertés et de la détention ne contenant aucune mesure de sûreté à l'encontre de l'intéressé, dans le délai de quinze jours prévu par ce texte et non celui de dix jours qui concerne le seul appel formé à l'encontre d'une ordonnance de placement en détention provisoire.
8. Les juges en déduisent que, le procureur de la République ayant interjeté appel le 19 janvier 2014, le délai précité de quinze jours n'était pas expiré à la date où ils ont statué, soit le 1er février suivant.
9. En statuant ainsi, la chambre de l'instruction n'a méconnu aucun des textes visés au moyen.
10. En effet, la chambre de l'instruction, statuant sur l'appel interjeté par le procureur de la République à l'encontre de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention qui, saisi de réquisitions aux fins de placement en détention provisoire, refuse d'y faire droit, si elle se prononce en matière de détention provisoire, n'est pas saisie de l'appel d'une décision de placement en détention et, en conséquence, est tenue de statuer dans le délai de quinze jours prévu par le quatrième alinéa de l'article 194 du code de procédure pénale.
11. Dès lors, le moyen ne peut être accueilli.
Sur le second moyen
Enoncé du moyen
12. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a rejeté les moyens présentés par l'avocat de M. [P], infirmé l'ordonnance du 16 janvier 2024 par laquelle le juge des libertés et de la détention a refusé son placement en détention provisoire et ordonné son placement en détention provisoire, alors :
« 1°/ que le juge d'instruction ne peut décerner mandat d'arrêt contre un mis en cause qu'après avoir recueilli l'avis du ministère public sur cet acte spécifique ; que méconnaît cette formalité le juge d'instruction qui se borne à recueillir l'avis et les réquisitions du ministère public sur l'émission d'un mandat d'arrêt européen, répondant à un régime et à des principes distincts du mandat d'arrêt de droit français ; qu'au cas d'espèce, il résulte de la procédure que le juge d'instruction a décerné un mandat d'arrêt à l'encontre de Monsieur [P], sans recueillir au préalable l'avis du ministère public qui s'est borné à requérir, sur soit-communiqué du magistrat instructeur, la délivrance d'un « mandat d'arrêt européen » à l'encontre de l'exposant ; qu'il s'ensuit que la défense était fondée à faire valoir que, faute d'avis préalable, le mandat d'arrêt décerné à l'encontre de Monsieur [P] était irrégulier, de sorte que ce dernier ne pouvait être placé en détention provisoire après avoir été appréhendé sur la base d'un tel mandat d'arrêt ; qu'en affirmant à l'inverse que la mention, dans l'ordonnance de soit-communiqué du juge d'instruction et dans les réquisitions du parquet, d'un avis favorable à la délivrance d'un mandat d'arrêt européen supposait nécessairement un avis identique à la délivrance d'un mandat d'arrêt de droit commun, la Chambre de l'instruction, qui a dénaturé les éléments de la procédure et a statué par des motifs impropres à justifier la régularité du mandat sur lequel reposait sa saisine, n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles 122, 131, 695-11, 591 et 593 du Code de procédure pénale ;
2°/ que le juge des libertés et la Chambre de l'instruction ne peuvent se prononcer sur le placement en détention provisoire d'une personne renvoyée devant la juridiction de jugement et appréhendée sur le fondement d'un mandat d'arrêt délivré au cours de l'instruction qu'à la condition que la personne concernée ait fait l'objet d'une mise en examen par établissement d'un procès-verbal de perquisition et de recherches infructueuses ; que ne constitue pas un tel acte le simple procès-verbal de transport aux termes duquel, sans procéder à la moindre mesure coercitive au domicile du mis en cause, ont affirmé n'avoir pas retrouvé sa trace ; qu'au cas d'espèce, aucun procès-verbal de perquisition et de recherches infructueuses, ni aucun autre acte qui ferait état, en substance, d'une telle mesure assortie d'un tel résultat, ne figure en procédure ; que les "recherches" des enquêteurs se sont limitées à un transport aux abords de l'immeuble occupé par la mère de Monsieur [P] et chez laquelle ce dernier résidait, et ont constaté que le nom de l'exposant ne figurait sur aucune boîte aux lettres ni sur l'interphone, sans procéder à aucune autre vérification ni pénétrer dans l'appartement familial ; qu'il s'ensuit que la défense était fondée à faire valoir que, faute d'avoir respecté cette formalité, Monsieur [P] n'avait pas été régulièrement mis en examen ni mis en accusation, de sorte que les juges ne pouvaient légalement ordonner son placement en détention provisoire en vue de sa comparution devant la Cour d'assises ; qu'en affirmant à l'inverse que le procès-verbal de transport susvisé suffisait à caractériser le procès-verbal de « perquisition » et de recherches infructueuses justifiant lui permettant d'être saisie du placement en détention provisoire de Monsieur [P], la Chambre de l'instruction, qui a dénaturé les éléments de la procédure en sa possession et a statué par des motifs impropres à établir la légalité de ce placement en détention provisoire, n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles 131, 134, 176, 181, 135-2, 591 et 593 du Code de procédure pénale. »
Réponse de la Cour
Sur le moyen, pris en sa première branche
13. Pour écarter le moyen de nullité pris de l'irrégularité du mandat d'arrêt délivré par le juge d'instruction à la suite de l'avis du procureur de la République portant sur la délivrance d'un mandat d'arrêt européen, l'arrêt attaqué énonce qu'il résulte des pièces de la procédure que, par ordonnance de soit communiqué en date du 9 mai 2019, le magistrat instructeur a transmis le dossier d'instruction au procureur de la République pour réquisitions aux fins de délivrance d'un mandat d'arrêt européen à l'égard de M. [P], que le juge d'instruction a précisé que ce dernier a pris la fuite en empruntant un vol de [Localité 1] à [Localité 2] (Maroc) le 22 avril 2019 et qu'il est susceptible de se trouver au Maroc où demeure son père ou en Algérie où demeure sa mère, et que, par mention manuscrite apposée au bas de cette ordonnance, le procureur de la République a requis délivrance d'un tel mandat.
14. Les juges constatent que si ces réquisitions tendent à la délivrance d'un mandat d'arrêt européen, cet acte est nécessairement fondé sur une décision prise par une autorité judiciaire, jugement exécutoire, mandat ou toute autre décision judiciaire ayant la même force.
15. Ils ajoutent que les éléments du dossier font apparaître qu'à la date de l'émission du mandat d'arrêt, M. [P] était sans domicile connu et susceptible d'avoir quitté le territoire national.
16. Ils en déduisent que le magistrat instructeur a bien sollicité le 9 mai 2019 l'avis du ministère public sur la délivrance d'un mandat d'arrêt national, étant rappelé que l'ordonnance de soit communiqué ne vise que l'article 131 du code de procédure pénale relatif aux conditions de délivrance d'un tel mandat.
17. Ils soulignent enfin que le mandat d'arrêt a fait l'objet d'une diffusion par le ministère public sous la forme d'un mandat d'arrêt européen, conformément à l'article 695-16 du code de procédure pénale.
18. En l'état de ces énonciations, dont il résulte que le mandat d'arrêt a été émis sur l'avis conforme du procureur de la République à une date où M. [P] était en fuite, la chambre de l'instruction n'a pas méconnu les textes visés au moyen.
19. Le grief ne saurait être accueilli.
Sur le moyen, pris en sa seconde branche
20. Pour rejeter le moyen de nullité pris de l'irrégularité du procès-verbal de recherches infructueuses rédigé par les enquêteurs en exécution du mandat d'arrêt délivré à l'encontre de M. [P], l'arrêt attaqué énonce qu'il se déduit des éléments du dossier qu'un procès-verbal de recherches infructueuses a été dressé au dernier domicile de l'intéressé à [Localité 3], le 4 août 2020, et que le juge d'instruction a effectué d'autres recherches afin de localiser l'intéressé, lesquelles ont été vaines.
21. En l'état de ces énonciations, dont il résulte qu'il a été procédé aux formalités prescrites par le troisième alinéa de l'article 134 du code de procédure pénale conférant à la personne recherchée la qualité de personne mise en examen, et dès lors que, par l'effet de l'ordonnance de mise en accusation et de renvoi devant la juridiction de jugement et en application de l'article 181 du code de procédure pénale, le mandat d'arrêt délivré à son encontre avait conservé sa force exécutoire, la chambre de l'instruction a fait une juste application des textes visés au moyen.
22. Ainsi, le grief ne peut être accueilli.
23. Par ailleurs, l'arrêt est régulier tant en la forme en la forme qu'au regard des dispositions des articles 143-1 et suivants du code de procédure pénale.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du sept mai deux mille vingt-quatre.