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Décisions

CA Montpellier, ch. com., 7 mai 2024, n° 23/05709

MONTPELLIER

Arrêt

Autre

CA Montpellier n° 23/05709

7 mai 2024

ARRÊT n°

Grosse + copie

délivrées le

à

Chambre commerciale

ARRÊT DU 07 Mai 2024

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 23/05709 - N° Portalis DBVK-V-B7H-QAZH

Décision déférée à la Cour :

Arrêt du 26 NOVEMBRE 2019 - COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

N° RG 18/01058

DEMANDEUR A LA REQUETE :

Monsieur [S] [Y] [P]

[Adresse 3]

[Localité 2]

Comparant

DEFENDEUR A LA REQUETE :

MINISTERE PUBLIC

Représenté à l'audience par M. CAVAILLEZ, substitut général

En application de l'article 937 du code de procédure civile, les parties ont été convoquées à l'audience.

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 21 MARS 2024, en chambre du conseil, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l'article 804 du même code, devant la Cour composée de :

Mme Danielle DEMONT, présidente de chambre

Mme Anne-Claire BOURDON, conseillère

M. Thibault GRAFFIN, conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mme Audrey VALERO

Ministère public : M. Serge CAVAILLEZ a été entendu en ses réquisitions

ARRÊT :

- Contradictoire;

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par Mme Danielle DEMONT, présidente de chambre, et par Mme Audrey VALERO, greffière.

EXPOSÉ DU LITIGE

Le 16 novembre 2023, M. [S] [P], né le [Date naissance 1] 1972 à [Localité 4] (92), a saisi la cour d'appel de Montpellier d'une requête en réhabilitation, tendant à le relever de l'interdiction de gérer, administrer ou contrôler, directement ou indirectement, soit toute entreprise commerciale ou artisanale et toute personne morale, prononcée par un arrêt de la cour de ce siège en date du 26 novembre 2019 ayant confirmé le jugement du tribunal de commerce de Béziers en date du 29 janvier 2018, mais réduit toutefois la durée de l'interdiction à huit années de l'interdiction, prenant fin ainsi le 29 janvier 2026.

Par un arrêt en date du 3 janvier 2023, la cour d'appel de Montpellier a rejeté une précédente et deuxième requête en relèvement déposée le 8 juin 2022 par M. [P].

Par déclaration du 16 novembre 2023, M. [P] a présenté une nouvelle et troisième requête.

Par un avis écrit daté du 18 décembre 2023, (dont M. [P] a pris connaissance le 13 mars 2024), repris oralement à l'audience des plaidoiries du 21 mars 2024, le ministère public sollicite le rejet de la requête en réhabilitation présentée par M. [P].

Le ministère public retient en substance les motifs suivants':

«'M. [P] a fait l'objet de l' interdiction de gérer pour des manquements graves à ses obligations (absence de comptabilité, non déclaration de l'état de cessation de paiements dans les délais requis).

Il a aussi fait l'objet de condamnations pénales (1 mois et 4 mois d'emprisonnement avec sursis pour des délits (falsification de chèques et abus de confiance).

Il ne justifie pas avoir apporté une contribution suffisante au paiement du passif.

Cette requête "en réhabilitation" semble avoir pour but de contourner l'arrêt du 14 décembre 2021 qui rejetait une requête en relèvement qui avait été présentée devant la cour.

Le requérant ne justifie d'aucun élément nouveau depuis le rejet de sa précédente requête.

M. [P] peut assurer sa réinsertion en étant salarié.

Compte tenu des sanctions commerciales dont il a fait l'objet, et compte tenu également des 2 condamnations pénales figurant sur son casier judiciaire pour des faits d'abus de confiance et de falsification de chèques, il importe de maintenir l'interdiction de gérer pour éviter la réitération des faits.'»

À l'audience des plaidoiries du 21 mars 2024, M. [P], qui a eu la parole en dernier, a exposé :

- qu'il a fait une nouvelle demande car sa condamnation d'interdiction de gérer a pris fin en novembre 2023 ;

- qu'il a effectué plus des trois quarts de la sanction dont il demande le relèvement ;

- qu'il va devoir saisir la commission de surendettement ayant une saisie sur salaires pour les intérêts civils sur sa condamnation pénale et des frais d'huissier ;

- qu'il travaille comme employé polyvalent au service d'accueil d'un agent d'assurances (GAN patrimoine), mais souhaite retrouver un emploi lui permettant de subvenir plus correctement aux besoins de sa famille, ayant deux enfants à charge et sa femme gagnant 9 000 € par an comme aide-ménagère ;

- qu'il a suivi une formation sur ses propres deniers en gestion des entreprises et obtenu un diplôme ;

- qu'il souhaite non pas créer une société, mais exercer une profession qui le passionne, à savoir exercer auprès de GAN patrimoine en tant que mandataire d'intermédiaire en assurance (conseiller clientèle) ; que ce mandat exclurait qu'il développe une clientèle personnelle et que cette activité ne contreviendrait pas à l'interdiction de diriger en elle-même, qu'il serait assimilé salarié mais avec un n° Siret, étant observé que les règlements des clients ne seraient pas effectués entre ses mains ;

- qu'il lui a été promis par le GAN d'être embauché en cette qualité s'il pouvait s'inscrire à l'ORIAS, l'organisme tenant le registre unique des intermédiaires en assurance, banque et finance, ce qu'empêche la mention de l'interdiction de diriger qui figure au bulletin n° 2 de son casier judiciaire ;

- et qu'il a compris les erreurs qu'il avait commises et le sens de sa peine ; et qu'il a fait un travail sur lui-même qu'il convient de prendre en compte.

SUR CE,

En application de l'article L653-11 alinéa 4 du code de commerce, M. [S] [P], qui a fait l'objet de l'interdiction prévue l'article L. 653-8 du code de commerce, ne peut en être relevé que s'il présente toutes garanties démontrant sa capacité à diriger ou contrôler une ou plusieurs entreprises.

Or M. [P] s'abstient de cette démonstration, en se bornant à invoquer une perspective d'emploi comme mandataire en assurances, et des difficultés financières.

La cour relève que M. [P], qui a été condamné en septembre 2016 pour contrefaçon et usage de chèque falsifié, en 2018 pour abus de confiance, et le 12 novembre 2018 pour omission de mentions par revendeur sur le registre d'objets mobiliers, pour fraudes fiscales, et escroquerie, ne remplit pas les conditions d'honorabilité permettant une inscription à l'ORIAS, la satisfaction exprimée par son employeur actuel étant insuffisante à cet égard.

L'interdiction de gérer a été prononcée sur le fondement d'une omission de déclaration de l'état de cessation des paiements dans le délai requis, une absence de comptabilité dans un contexte de poursuite d'une activité de vente de véhicules automobiles (en qualité de gérant de fait compte tenu d'une précédente liquidation judiciaire), et en tenant compte de condamnations pénales dans le cadre de ces activités professionnelles.

La circonstance que la sanction d'interdiction de gérer prononcée sur le fondement de l'article 131-27 du code pénal pendant cinq ans par un arrêt de la chambre correctionnelle de la cour de ce siège en date du 12 novembre 2018 soit achevée, ne justifie pas davantage qu'il n'exécute pas la totalité de la sanction commerciale d'interdiction prononcée pour huit années par l'arrêt du 26 novembre 2019.

La requête entre de nouveau en voie de rejet.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant publiquement et par arrêt contradictoire,

Rejette la requête en relèvement déposée le 16 novembre 2023 par M. [S] [P],

Laisse les dépens à sa charge.

le greffier, le président,