CA Paris, Pôle 4 ch. 13, 14 mai 2024, n° 21/02905
PARIS
Arrêt
Confirmation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Valay-Brière
Vice-président :
Mme d'Ardailhon Miramon
Conseiller :
Mme Moreau
Avocats :
Me Regnier, Me Vaconsin, Me Missistrano, Me Fontaine
***
La Sci du [Adresse 2] (ci-après, la Sci) immatriculée le 3 octobre 1979 a pour associés M. [J] [R], gérant, ainsi que Mme [X] [R] épouse [W], sa fille, à la suite de l'acquisition des parts sociales de la Sa Technoba conseil, en liquidation judiciaire, dans la Sci par acte du 2 mai 2012, chacun des associés détenant respectivement depuis lors 730 et 270 parts.
L'assemblée générale ordinaire du 10 décembre 2017 a voté la vente d'un local commercial appartenant à la Sci au prix de 380 000 euros.
Par lettre du 9 octobre 2018, Mme [W] a informé M. [R] qu'elle souhaitait céder les parts sociales qu'elle détenait au sein de la Sci.
Le conseil de Mme [W] a indiqué par lettre du 26 novembre 2018 que cette dernière sollicitait son retrait de la Sci puis, par lettre du 11 avril 2019, a transmis à M. [R] une proposition amiable de rachat de ses parts pour un montant global et forfaitaire de 150 000 euros.
C'est dans ces circonstances que Mme [W] a, par acte du 10 octobre 2019, fait assigner M. [R], en sa qualité de gérant, ainsi que la Sci devant le tribunal judiciaire de Paris, lequel, par jugement du 26 janvier 2021 a :
- débouté Mme [W] de sa demande d'annulation des résolutions prises à l'assemblée générale ordinaire du 10 décembre 2017,
- autorisé le retrait de Mme [W] de la Sci,
- dit que la demande d'expertise aux fins de déterminer la valeur de rachat des droits de Mme [W] est irrecevable,
- condamné la Sci à régler à Mme [W] la somme de 7 486,68 euros au titre de sa créance en compte courant, augmentée des intérêts légaux à compter du 31 janvier 2020,
- condamné la Sci à régler à Mme [W] la somme de 4 637 euros au titre des revenus fonciers de 2018, augmentée des intérêts légaux à compter du 10 octobre 2019,
- condamné la Sci à régler à Mme [W] la somme de 5 337 euros au titre des revenus fonciers de 2019,
- débouté les défendeurs de leurs demandes de dommages et intérêts formées en application de l'article 32-1 du code de procédure civile,
- dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- ordonné l'exécution provisoire de la présente décision,
- condamné in solidum M. [R] et la Sci aux entiers dépens de l'instance,
- rejeté le surplus des demandes.
Par déclaration du 12 février 2021, M. [R] et la Sci ont interjeté appel de cette décision.
Dans leurs conclusions déposées et notifiées le 19 février 2024, M. [J] [R] et la Sci du [Adresse 2] (la Sci), appelants, demandent à la cour de :
- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté Mme [W] de ses demandes :
- en annulation d'assemblées générales,
- en dissolution de la Sci,
- en nomination d'un administrateur judiciaire,
- en nomination d'expert,
- constater que le compte courant dont disposait Mme [W] dans la Sci a été saisi à sa requête,
- dire Mme [W] mal fondée en son appel incident et l'en débouter,
pour le surplus,
- réformer le jugement entrepris en ce qu'il a fait droit à la demande de retrait et condamné la Sci à payer à Mme [W] des sommes au titre des revenus fonciers 2018 et 2019,
et statuant à nouveau :
- juger que Mme [W] est dépourvue d'un juste motif l'autorisant à se retirer de la Sci,
- la débouter de sa demande de retrait et de toutes ses prétentions financières portant sur les exercices 2018 et 2019,
- la condamner au paiement d'une somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et en tous les dépens,
subsidiairement,
- leur donner acte de ce qu'ils s'en rapportent à la justice sur la demande de vérification d'écritures formulée par Mme [W],
- tous droits et moyens des parties réservés et avant dire droit, désigner tel expert que la cour voudra bien nommer avec mission :
- d'auditer la comptabilité de la Sci depuis 2016,
- de vérifier la régularité des opérations de liquidation de la Sa Tecnoba conseil et la réalité du compte courant dont cette société disposait dans la Sci,
- d'apprécier la pertinence des décisions prises par les assemblées générales ordinaires pour les années 2018, 2019, 2020, 2021, 2022, 2023,
- d'apprécier plus généralement la pertinence des griefs formulés par Mme [W] à l'appui de sa demande de retrait et de nomination d'un administrateur provisoire,
- de déposer son rapport dans un délai de six mois à compter de la nomination à intervenir.
Dans ses conclusions déposées et notifiées le 13 février 2024, Mme [X] [R] épouse [W], intimée et appelante incidente, demande à la cour de :
- dire et juger la Sci et M. [R] mal fondés en leur appel,
- débouter la Sci et M. [R] de l'ensemble de leurs demandes, fins et prétentions,
- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :
- autorisé son retrait de la Sci,
- condamné la Sci à lui régler la somme de 7 486, 68 euros au titre de sa créance en compte courant, augmentée des intérêts légaux à compter du 31 janvier 2020,
- condamné la Sci à lui régler la somme de 4 637 euros au titre des revenus fonciers 2018, augmentée des intérêts légaux à compter du 10 octobre 2019,
- condamné la Sci à lui régler la somme de 5 337 euros au titre des revenus fonciers 2019,
- débouté la Sci et M. [R] de leur demande de dommages et intérêts sur le fondement de l'article 32-1 du code de procédure civile, ainsi qu'au titre des frais irrépétibles sur le fondement de l'article 700 du même code,
- condamné in solidum M. [R] et la Sci aux dépens,
- infirmer partiellement le jugement entrepris statuant à nouveau,
- annuler les résolutions prises lors de l'assemblée générale ordinaire du 10 décembre 2017,
- subsidiairement, procéder à la vérification de l'authenticité de la signature de Mme [W] apposée sur le procès-verbal de l'assemblée générale ordinaire du 10 décembre 2017, le cas échéant en faisant injonction à M. [R], en sa qualité de gérant de la Sci de produire le document original,
- statuer subséquemment ce que de droit sur l'annulation des résolutions prises lors de l'assemblée générale ordinaire du 10 décembre 2017,
- prononcer la révocation pour motif légitime du gérant de la Sci,
- désigner tel mandataire judiciaire ad hoc qu'il plaira, aux fins d'administrer la Sci,
y ajoutant,
- condamner la Sci à lui régler la somme de 906 euros au titre de ses revenus fonciers pour l'exercice 2020, augmentés des intérêts légaux à compter du 25 janvier 2022, date de signification des premières conclusions formant ladite demande,
- condamner M. [R], en sa qualité de gérant de la Sci, à lui communiquer les déclarations de revenus fonciers n°2072 pour les exercices 2021 et 2022, sous astreinte de 500 euros par jour de retard à compter du prononcé de l'arrêt à intervenir,
- condamner in solidum la Sci et M. [R] à lui régler une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner in solidum la Sci et M. [R] aux entiers dépens d'appel.
L'ordonnance de clôture a été prononcée le 20 février 2024.
SUR CE,
Sur l'annulation des résolutions prises par l'assemblée générale ordinaire du 10 décembre 2017:
Le tribunal a jugé que Mme [W] ne peut valablement solliciter l'annulation des résolutions prises à l'assemblée générale ordinaire du 10 décembre 2017 en soutenant que sa signature a été imitée sur le procès-verbal, sans le démontrer, alors qu'elle admet avoir dès le 11 décembre 2017 adressé un courriel au notaire pour confirmer son accord à ladite assemblée générale pour la vente du bien, courriel qu'elle verse elle-même aux débats.
Mme [W] fait valoir que :
- en vertu des articles 17 et 21 des statuts de la Sci, la gérance ne peut, sans l'autorisation préalable de l'assemblée générale extraordinaire des associés, vendre des immeubles et les assemblées générales sont convoquées par la gérance par lettre recommandée adressée à chaque associé au moins quinze jours avant la réunion,
- elle n'a pas été convoquée à l'assemblée générale du 10 décembre 2017 ni par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, ni verbalement, et n'a donc pas été consultée dans les conditions statutairement prévues sur la vente du local commercial, propriété de la Sci, peu important que son père lui ait intimé le lendemain de confirmer son accord pour ladite vente en adressant un courriel au notaire,
- il ne peut être considéré que, dans un tel contexte de pression et de précipitation, son consentement à la réalisation de la vente ait été donné de façon libre et éclairée,
- le procès-verbal d'assemblée générale du 10 décembre 2017, versé aux débats, n'est pas revêtu de sa signature qui a été grossièrement imitée de façon à permettre à M. [R] de procéder à la vente, la copie de cet acte certifiée conforme à l'original annexée à l'acte de vente du bien immobilier ne comporte d'ailleurs pas sa signature et M. [R] n'a pas déféré à la sommation de produire l'original de cet acte,
- le défaut d'authenticité de cet acte pourra le cas échéant être prouvé par une expertise,
- l'imitation de sa signature lui cause incontestablement un grief puisqu'elle a permis la vente d'une partie de la Sci aux mépris de ses droits d'information, de consultation préalable et de vote et justifie l'annulation des délibérations de l'assemblée générale.
M. [R] et la Sci concluent au rejet de la demande en ce que :
- la signature litigieuse est à première vue exactement la même que celle figurant sur un des courriers de Mme [W] rédigé en 2018,
- dans le courriel qu'elle a adressé au notaire, Mme [W] a expressément acquiescé au projet de vente décidé par l'assemblée générale extraordinaire dont le procès-verbal est revêtu de la signature contestée,
- la trop faible participation de Mme [W] dans la Sci ne lui aurait pas permis de s'opposer au projet.
Selon l'article 1844-10 du code civil, la nullité des actes ou délibérations des organes de la société ne peut résulter que de la violation d'une disposition impérative du présent titre ou de l'une des causes de nullité du contrat.
L'article 21 des statuts prévoit que les assemblées générales sont convoquées par la gérance, par lettre recommandée adressée à chaque associé quinze jours au moins avant la réunion, la lettre de convocation indiquant l'ordre du jour, les modifications aux statuts, s'il en est proposé, et que la convocation peut être verbale et l'assemblée réunie sans convocation écrite si tous les associés sont présents ou représentés. Il est également précisé au point 6 que les délibérations de l'assemblée générale sont constatées par des procès-verbaux signés par le gérant et le cas échéant, par le président de séance et que s'il n'est pas établi de feuille de présence, les procès verbaux sont en outre signés pas tous les associés présents et par leurs mandataires.
L'assemblée générale du 10 décembre 2017 ayant comme ordre du jour la vente d'un local commercial de la Sci au prix de 380 000 euros, s'est tenue sans que soit justifié l'envoi d'une convocation à Mme [W] par lettre recommandée conformément aux dispositions statutaires.
Aucune feuille de présence à cette assemblée n'est versée aux débats.
M. [R] n'a pas déféré à l'injonction de communiquer l'original du procès-verbal de cette assemblée qui lui a été adressée en première instance. La copie du procès verbal de cette assemblée certifiée conforme à l'original par le gérant, qu'il produit devant la cour pour établir la présence de Mme [W], contient deux signatures soit celle du gérant et une que Mme [W] indique être une imitation grossière de la sienne. La copie de ce procès-verbal certifiée conforme à l'original par le gérant, remise par ce dernier au notaire et annexée à l'acte de vente du local commercial ne contient que la signature de M. [R], en sorte que la copie du procès verbal d'assemblée versée par M. [R] est dénuée de toute force probante et qu'il n'est aucunement établi que Mme [W] ait effectivement signé ce procès-verbal, sans qu'il soit besoin d'ordonner une vérification de l'authenticité de la signature de Mme [W].
Il n'est dès lors justifié d'aucune convocation régulière de Mme [W] à l'assemblée générale du 10 décembre 2017.
En revanche, dès le lendemain, Mme [W] a adressé un courriel au notaire lui confirmant, en sa qualité d'associée de la Sci, son 'accord à l'assemblée générale du 10/12/2017 pour la vente de la boutique pour un montant de 380 000 euros'. Elle n'établit pas que cet accord n'aurait pas été donné de façon libre et éclairée, l'allégation d'avoir rédigé ce courriel dans un contexte de pression et de précipitation, sans plus de précision, ne suffisant pas à démontrer que son consentement aurait été vicié.
Ce faisant, Mme [W] ne justifie pas d'un grief causé par le défaut de convocation à cette assemblée générale ayant adopté la résolution pour laquelle elle a, dès le lendemain, confirmé son accord auprès du notaire chargé de recevoir le jour même la vente par acte authentique, étant au surplus observé que sa participation au capital social de la société ne lui aurait pas permis de s'opposer au vote de cette résolution par l'associé majoritaire.
La demande d'annulation de l'assemblée générale du 10 décembre 2017 n'est donc pas fondée.
Sur la demande de retrait :
Le tribunal, relevant que Mme [W] et M. [R] ne sont jamais parvenus à gérer de façon satisfaisante la Sci, Mme [W] étant tenue dans un premier temps totalement à l'écart de la gestion et ne parvenant pas dans un second temps à participer à la vie sociale, a jugé que la demande de retrait pour juste motifs de Mme [W] était justifiée en raison de la mésentente existant entre les associés et de l'absence d'affectio societatis.
Les appelants font valoir l'absence de justes motifs pouvant fonder la demande de retrait Mme [W] dès lors que :
- la perte d'affectio societatis alléguée est fondée sur des accusations mensongères, alors que Mme [W] a perçu chaque année et jusqu'au 8 octobre 2018 un extrait de compte justifiant le montant du chèque qui lui était adressé, entérinant ainsi les décisions prises en assemblée générale, que rien ne justifie que M. [R] ait imité sa signature sur le procès-verbal du 10 décembre 2017 alors qu'il s'est toujours refusé de signer pour elle lors de chaque assemblée générale de 2012 à 2018, préférant la mentionner comme étant absente, Mme [W] souhaitant en réalité ne plus dépendre de son père et percevoir une somme en liquide représentant la valeur d'une participation qu'elle a reçue à titre gratuit,
- Mme [W] s'est volontairement tenue à l'écart de la vie sociale puis a refusé d'y participer,
- les motifs de retrait retenus par les premiers juges ne sont pas de nature à empêcher la Sci de fonctionner de manière satisfaisante,
- Mme [W] ne formule aucune critique quant à la stratégie de gouvernance et les griefs qu'elle forme à l'encontre du gérant sont dénués de caractère sérieux,
- la seule qualité d'associée minoritaire de Mme [W] ne constitue pas un juste motif de retrait.
Mme [W] sollicite la confirmation de la décision de ce chef, au vu de l'imitation de sa signature sur le procès verbal d'assemblée générale et en l'absence totale d'affectatio societatis, M. [R] n'ayant souhaité son association que pour gérer la Sci à sa convenance, l'ayant écartée des décisions ayant trait à la vie sociale, ne lui communiquant aucun compte et ne la convoquant à aucune assemblée générale, et ayant méprisé ses droits d'associée en abusant de sa qualité d'associé majoritaire, faisant d'elle une 'associée fantoche' aux seules fins de servir ses intérêts personnels et l'état actuel de leurs relations rendant impossible la concertation minimale requise entre les associés.
Selon l'article 1869 du code civil, 'Sans préjudice du droit des tiers, un associé peut se retirer totalement ou partiellement de la société, dans les conditions prévues par les statuts ou, à défaut, après autorisation donnée par une décision unanime des associés. Ce retrait peut également être autorisé pour justes motifs par une décision de justice.
A moins qu'il ne soit fait application de l'article 1844-9 (3e alinéa), l'associé qui se retire a droit au remboursement de la valeur de ses droits sociaux, fixée, à défaut d'accord amiable, conformément à l'article 1843-4'.
Le défaut de convocation de Mme [W] aux assemblées générales pendant plus de sept ans et notamment à celle du 10 décembre 2017, le non respect de ses droits d'information, la prise de décisions sociales par M. [R] seul et à son insu à défaut d'être convoquée, ainsi qu'il le reconnaît, établissent que Mme [W] a été tenue à l'écard de la gestion de la Sci au mépris de ses droits d'associée et sans que M. [R] puisse utilement faire valoir le désintérêt de Mme [W]. L'ensemble de ces éléments, outre la teneur des griefs respectivement formulés entre les associés, rendant la communication entre eux difficile, et la production de la copie du procès-verbal d'assemblée générale du 7 décembre 2017 contenant la signature prétendue de Mme [W] au titre de laquelle cette dernière a déposé une plainte pénale, établissent l'absence d'affectio societatis et constituent des justes motifs de retrait de Mme [W].
La décision est donc confirmée de ce chef.
Sur les demandes de remboursement du compte courant d'associée et de paiement des revenus fonciers :
Le tribunal a jugé que Mme [W] était fondée en ses demandes de remboursement de son compte courant d'associé, d'un montant de 7 486, 68 euros selon le bilan du 31 décembre 2018, mais également de paiement des revenus fonciers imposables pour un montant de 4 637 eursos, ceux-ci s'élevant à la somme de 5 337 euros au titre des années 2018 puis 2019, dont Mme [W] soutient n'avoir perçu que 700 euros en 2018.
Les appelants reconnaissent que la Sci est tenue de rembourser à Mme [W] son compte courant d'associée, mais pour les seuls bénéfices votés mais non distribués, soit pour le montant de 7 486,68 euros retenu par les premiers juges et à l'exclusion des bénéfices réalisés au cours des exercices 2018 à 2022 et mis dans la réserve par décisions d'assemblée générale régulières prises à la majorité requise et auxquelles Mme [W], convoquée, ne s'est pas présentée. Ils ajoutent que les bénéfices au titre de l'année 2019, qui ne constituent pas des revenus fonciers, sont en réalité de 537 euros et non pas 5 337 euros comme retenu par le tribunal.
En cause d'appel, Mme [W] sollicite, outre les condamnations prononcées par le tribunal, la condamnation de la Sci à lui payer la somme de 906 euros au titre de ses revenus fonciers pour l'exercice 2020 telle que mentionnée dans la déclaration 2044 fournie par la Sci et qu'elle a déclarée dans sa déclaration de revenus, augmentée des intérêts légaux à compter du 25 janvier 2022, date de signification des premières conclusions formant ladite demande, ainsi que la condamnation de la Sci sous astreinte à lui communiquer les déclarations de revenus fonciers pour les exercices 2021 et 2022. Elle soutient que :
- elle ne perçoit plus aucun revenu foncier depuis 2018, ni aucun dividende en dépit des ventes intervenues rendant les exercices bénéficiaires, M. [R] abusant de sa qualité d'associé majoritaire pour affecter les produits des ventes au remboursement prioritaire de son prétendu compte courant d'associé à son détriment,
- M. [R] s'est abstenu fautivement de lui régler les revenus fonciers lui revenant et de lui communiquer les déclarations de revenus n°2072 au titre des exercices 2021 et 2022,
- elle n'a pas été régulièrement convoquée aux assemblées générales depuis 2020, M. [R] utilisant l'adresse électronique de son époux et non pas la sienne dont il avait connaissance.
Les comptes courants d'associés sont, sauf clause statutaire ou convention contraire, remboursables à tout moment, la société ne pouvant limiter le remboursement à la somme que peut supporter sa trésorerie en l'absence de clause autorisant cette limitation.
Aux termes du bilan de la Sci au 31 décembre 2018, le compte courant de Mme [W] est créditeur de 7 486, 68 euros et la condamnation de la Sci à rembourser cette somme n'est pas discutée.
S'agissant des revenus fonciers, la Sci a transmis à Mme [W] des déclarations de revenus fonciers n°2044 dont le montant est à reporter dans ses déclaration n°2042 de revenus fonciers imposables, soit 5 337 euros en 2018, montant dont Mme [W] ne discute pas avoir perçu les sommes de 700 euros, 537 euros en 2019 et 906 euros en 2020.
En revanche, les assemblées générales afférantes à ces exercices auxquelles Mme [W] a été convoquée et dont en tout état de cause la validité n'est pas discutée, ont voté le report à nouveau des bénéfices réalisés afin de renforcer la trésorerie de la Sci et il n'est pas justifié que ces décisions prises par M. [R], associé majoritaire, constituent un abus de majorité au préjudice de Mme [W] alors qu'elles sont au contraire conformes à l'intérêt social.
La demande de paiement des revenus fonciers de la Sci est donc mal fondée et doit être rejetée en infirmation de la décision, de même que les demandes supplémentaires formées en cause d'appel.
Sur la demande de révocation du gérant et de désignation d'un mandataire ad hoc :
Mme [W] formule devant la cour une demande de révocation du gérant sur laquelle elle indique que les premiers juges ont omis de statuer, aux motifs de nombreuses fautes de gestion commises telles que l'absence de convocation aux assemblées générales, l'usage d'un faux procès-verbal d'assemblée générale, le défaut de paiement de ses revenus fonciers et l'abus de majorité.
M. [R] considère cette demande infondée en l'absence de toute faute de gestion de sa part.
L'absence de convocation de Mme [W] aux assemblées générales jusqu'en 2019 et la production d'un procès-verbal d'assemblée du 10 décembre 2017 contenant une signature qu'elle estime être une grossière imitation de la sienne ne justifient pas la révocation de M. [R] en qualité de gérant ainsi que la désignation d'un mandat ad hoc alors que la comptabilité est tenue, que Mme [W], convoquée aux assemblées générales depuis 2019 ne s'y présente pas et qu'elle est fondée en l'exercice de son droit de retrait.
Cette demande est donc rejetée et ce sans qu'il soit besoin de faire droit à la demande d'expertise formée par les appelants.
Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile :
M. [R] et la Sci sont condamnés aux dépens d'appel sans qu'aucune considération tirée de l'équité ne justifie leur condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS :
La cour
Confirme le jugement en ses dispositions, sauf en ce qu'il a condamné la Sci à régler à Mme [X] [R] épouse [W] la somme de 4 637 euros au titre des revenus fonciers 2018, augmentée des intérêts légaux à compter du 10 octobre 2019 et la somme de 5 337 euros au titre des revenus fonciers 2019,
Statuant de nouveau,
Déboute Mme [X] [R] épouse [W] de sa demande au titre des revenus fonciers 2018 et 2019,
y ajoutant,
Déboute Mme [X] [R] épouse [W] au titre des revenus fonciers 2020,
Déboute Mme [X] [R] épouse [W] de sa demande de communication des déclarations de revenus fonciers n°2072 pour les exercices 2021 et 2022,
Déboute Mme [X] [R] épouse [W], d'une part, et M. [J] [R] et la Sci du [Adresse 2], d'autre part, de leurs demandes d'expertises,
Déboute Mme [X] [R] épouse [W] de sa demande de révocation du gérant de la Sci et de sa demande de désignation d'un mandataire ad hoc,
Déboute Mme [X] [R] épouse [W] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne M. [J] [R] et la Sci du [Adresse 2] aux dépens d'appel.