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Décisions

CA Rennes, 1re ch., 7 mai 2024, n° 21/05185

RENNES

Arrêt

Infirmation partielle

PARTIES

Défendeur :

Société du Parc du Futuroscope (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Veillard

Vice-président :

M. Bricogne

Conseiller :

Mme Brissiaud

Avocats :

Me Coatanéa, Me Khaled Tamani, Me Le Berre Boivin, Me Sardain

CA Rennes n° 21/05185

6 mai 2024

EXPOSÉ DU LITIGE

1. Entre avril et septembre 2015, M. [L] [G] et M. [E] [Y], étudiants en Master spécialisé 'jeux vidéo et trans média', ont été accueillis en stage par la société Bosa, exerçant sous l'enseigne 'agence ByVolta'.

2. Leur maître de stage était M. [OR] [O], gérant de la société Bosa.

3. Respectivement designer et développeur intégrateur, M. [G] et M. [Y] ont, pendant leur stage, contribué à l'élaboration de la commande passée à l'agence ByVolta par la société du parc du Futuroscope de [Localité 8], consistant dans la maîtrise d''uvre de la conception et du suivi de réalisation de la scénographie et de l'aménagement pour les visiteurs d'un espace brut de 800 m² en parcours interactif dénommé 'Futur l'Expo'.

4. Leur contribution a consisté à créer des expériences ludiques, sensorielles et interactives, destinées à être exposées au sein de l'espace 'Futur l'Expo'.

5. À l'issue de leur stage, ils ont fondé le 22 décembre 2015 la société '2 Makesense' qui a sous-traité pour le compte de la société Bosa des travaux de conception et développement de numériques destinés à être utilisés au sein de 'Futur l'Expo'.

6. Le 22 février 2017, M. [G] et M. [Y], se présentant comme coauteurs de plusieurs 'uvres exposées exploitées au sein du parc du Futuroscope, par l'intermédiaire de leur conseil, ont mis celle-ci en demeure de cesser d'exploiter toutes leurs créations, tout en demandant l'apposition de leurs noms sur celles-ci, y compris les trois sur lesquelles une cession de droit était selon eux intervenue.

7. Le 17 mars 2017, la société du parc du Futuroscope a exprimé en réponse son incompréhension d'être ainsi mise en cause, estimant que les griefs d'absence de contrat de cession ne la concernaient pas et s'adressaient à la société Bosa, avec laquelle ils avaient contracté.

8. La société du parc du Futuroscope faisait toutes réserves sur leurs prétendus droits d'auteurs.

9. Reprochant à la société du parc du Futuroscope d'avoir commis des actes de contrefaçon sur 8 de leurs créations, M. [G] et M. [Y] l'ont, par acte d'huissier du 12 mars 2018, fait assigner devant le tribunal de grande instance de Rennes en paiement des sommes de :

- 199.997 €, soit 99.998,50 € chacun à titre de dommages et intérêts pour exploitation sans autorisation de leurs 'uvres, avec intérêts au taux légal,

- 160.000 €, soit 80.000 € chacun au titre de l'indemnisation de leur préjudice moral,

- 10.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

ainsi qu'en injonction de la société du parc du Futuroscope afin qu'elle les cite en qualité d'auteurs et de contributeurs à l'exposition 'Futur l'Expo', M. [Y] en qualité de designer et M. [G] en qualité de développeur intégrateur sur leur site Internet et dans toutes les communications liées à l'exposition, et notamment le dossier de presse, au besoin sous astreinte de 100 € par jour de retard, à partir d'un délai de huit jours suivant la signification du jugement.

10. Par jugement du 29 juin 2021, le tribunal a :

- déclaré irrecevables, pour défaut de qualité à agir, l'intégralité des demandes de M. [G] et M. [Y],

- débouté les parties de leurs demandes de frais irrépétibles,

- dit que chaque partie supportera les entiers dépens,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire du présent jugement.

11. Pour statuer ainsi, le tribunal a considéré que, si M. [G] et M. [Y] ont incontestablement concouru, soit en qualité de stagiaires de la société Bosa, soit en qualité d'associés de la société '2Makesense', elle-même sous-traitante de celle-ci, à la conception intellectuelle d''expériences' qui ont été intégrées dans l''uvre scénographique et ludique 'Futur l'Expo', comprenant 12 expériences, à laquelle les visiteurs du parc d'attraction du Futuroscope de Poitiers ont eu accès pendant deux ans et demi, il est établi l'existence d'une pluralité de contributeurs ayant participé à l'élaboration et la mise en 'uvre de sept des expériences revendiquées et que la société du parc du Futuroscope, donneur d'ordre, a conservé la maîtrise artistique de l''uvre qu'elle a commandée à la société Bosa, ce qui permet de qualifier les travaux entrepris d'oeuvre collective au sens des dispositions de l'article L. 112-2 du code de la propriété intellectuelle.

12. Par déclaration au greffe de la cour d'appel de Rennes du 5 août 2021 réitérée le 9 août 2021, M. [G] et M. [Y] ont interjeté appel de cette décision, le conseiller de la mise en état ayant joint les procédures sous le n° 21/5185 suivant ordonnance du 2 novembre 2021.

* * * * *

13. Dans leurs dernières conclusions régulièrement notifiées déposées au greffe via RPVA le 8 décembre 2023, M. [G] et M. [Y] demandent à la cour de :

- infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

- statuant à nouveau,

- débouter la société du parc du Futuroscope de l'ensemble de ses demandes fins et conclusions,

- juger que la société du parc du Futuroscope a violé leurs droits d'auteur,

- condamner la société du parc du Futuroscope à leur payer la somme de 512.460 €, soit 256.230 € chacun au titre des dommages et intérêts pour l'exploitation sans autorisation de leurs 'uvres avec intérêts au taux légal,

- condamner la société du parc du Futuroscope à leur payer la somme de 450.000 €, soit 225.000 € chacun au titre de l'indemnisation de leur préjudice moral,

- enjoindre à la société du parc du Futuroscope de les citer en qualité d'auteurs et de contributeurs de 'Futur l'Expo' ([E] [Y] : DA UX/UI Designer et [L] [G] : Développeur intégrateur UI/UX) sur leur site Internet et dans le cadre d'un communiqué public, au besoin sous astreinte de 100 € par jour de retard, à partir d'un délai de huit jours suivant la signification du jugement à intervenir,

- condamner la société du parc du Futuroscope à leur payer la somme de 30.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société du parc du Futuroscope aux entiers dépens.

14. À l'appui de leurs prétentions, M. [G] et M. [Y] font en effet valoir :

- qu'ils ne s'approprient pas la paternité de l'ensemble de l'attraction 'Futur l'Expo', qui est une juxtaposition de 12 'jeux' distincts qui peuvent être qualifiés d''uvres multimédia, indépendantes et exploitables séparément,

- qu'ils ont la qualité d'agir au titre de la présente procédure, aussi bien en ce qui concerne l'atteinte à leurs droits patrimoniaux, qu'au titre de leur droit moral,

- qu'il n'est pas contestable que leurs oeuvres ont été exposées par la société du parc du Futuroscope pendant plus de 4 ans, l'intimée citant des personnes qui n'ont jamais contribué à la réalisation des 'uvres litigieuses,

- que leurs créations constituent bien des oeuvres de l'esprit au sens du code de la propriété intellectuelle,

- qu'ils démontrent la similitude incontestable entre l''uvre réalisée et celle exploitée, l'originalité de l''uvre, l'encadrement de la prestation par un contrat, voire la transmission d'un devis ou d'une facture,

- que l'exposition litigieuse n'est qu'un moyen de diffusion de l''uvre, un lieu permettant sa communication au public,

- que la société du parc du Futuroscope tente sciemment de créer la confusion entre le rôle d'auteurs des appelants et les contributions 'techniques' des autres intervenants, leur droits d'auteur ne faisant pas obstacle à l'existence du droit d'auteur sur les 'uvres associées (par exemple la mise en scène, la musique de scène, les meubles designés),

- qu'il s'agit d''uvres collaboratives (et non collectives) dans lesquelles le rôle de chaque co-auteur peut être dissocié,

- que la liste des contributeurs faite par la société du parc du Futuroscope est purement déclarative et n'est corroborée par aucune reconnaissance de la qualité d'auteurs des personnes citées,

- qu'ils sont bien à l'initiative de toutes les 'uvres réalisées par eux, en partant du concept même, jusqu'à leur réalisation effective, la société du parc du Futuroscope ne produisant aucune pièce qui confirmerait son rôle de direction et de contrôle des 'uvres revendiquées,

- qu'en vertu du contrat entre la société Bosa et la société du parc du Futuroscope, la mission de la société Bosa s'achevait en juillet 2015, à l'ouverture de l'exposition au public, alors que leurs prestations se sont poursuivies au-delà de cette période et se sont matérialisées par des contrats de prestations (n'incluant pas de cession de droits d'auteurs) entre la société Bosa et la société 2Makesense qui sont deux sociétés indépendantes,

- que le stagiaire de l'entreprise est titulaire des droits d'auteur sur sa création pendant le stage, dès lors que ce dernier réalise une création jugée originale et matérialisée, la formation reçue durant son stage ne pouvant être considérée comme une contrepartie permettant dès lors une exploitation licite de sa création,

- que le tribunal aurait dû retenir la notion d''uvre composite, à défaut de celle d''uvre de collaboration, la finalité nouvelle qu'a conféré la société du parc du Futuroscope à son parcours 'Futur l'Expo' étant incompatible avec la qualification d'oeuvre collective, sans considération de la spécificité des 'uvres multimédia, considérées par la jurisprudence comme une 'uvre collaborative, tenant compte du concours de plusieurs périmètres d'art protégé du droit et non constituant un tout commun et confondu d'intervenants auxquels il serait impossible de dissocier l'intervention respective de chacun tant elle est similaire et préfigurant l'absence d'empreinte possible d'originalité en tout point,

- que le préjudice doit être estimé en fonction du chiffre d'affaires dégagé par chaque attraction, la société du parc du Futuroscope n'ayant produit aucun document à cet égard,

- que le fait de ne pas pouvoir se prévaloir de leurs 'uvres a causé un préjudice spécifique aux auteurs, qui n'ont pu se servir de cette référence dans une logique de prospection et de développement commercial.

* * * * *

15. Dans ses dernières conclusions régulièrement notifiées déposées au greffe via RPVA le 31 janvier 2022, la société du parc du Futuroscope demande à la cour de :

- infirmer le jugement en ce qu'il l'a déboutée de ses demandes au titre des frais irrépétibles et dit que chaque partie supportera les entiers dépens,

- statuant de nouveau sur les frais irrépétibles et les dépens,

- condamner in solidum M. [G] et M. [Y] à lui payer la somme de 50.000 € au titre des frais irrépétibles sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner in solidum M. [G] et M. [Y] aux entiers dépens de première instance ainsi qu'aux entiers dépens d'appel lesquels seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,

- confirmer le jugement dans toutes ses autres dispositions,

- à titre subsidiaire, si par extraordinaire la cour infirmait le jugement, statuant de nouveau,

- dire et juger que l'action en contrefaçon intentée par M. [G] et M. [Y] est mal fondée,

- rejeter toutes les demandes de M. [G] et M. [Y],

- infirmer le jugement sur les frais irrépétibles et les dépens de première instance,

- statuant de nouveau sur les frais irrépétibles et les dépens,

- condamner in solidum M. [G] et M. [Y] à lui payer la somme de 50.000 € au titre des frais irrépétibles sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner in solidum M. [G] et M. [Y] aux entiers dépens de première instance ainsi qu'aux entiers dépens d'appel, lesquels seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,

- rejeter toutes demandes, fins et conclusions autres ou contraires aux présentes.

16. À l'appui de ses prétentions, la société du parc du Futuroscope fait en effet valoir :

- qu'elle est une victime indirecte du conflit existant entre les appelants et la société Bosa et spécialement M. [O],

- que leur participation à l'installation de l'exposition signe nécessairement leur consentement à l'exploitation des attractions,

- que l'exposition et les expériences sont sans conteste des 'uvres collectives au sens de l'article L. 113-2 du code de la propriété intellectuelle puisqu'elles ont été créées et divulguées à son initiative, sous sa direction et sous son nom par la fusion des contributions d'une pluralité d'intervenants qui se fondent dans l'ensemble en vue duquel elles ont été conçues, en témoigne le contrat passé avec la société Bosa,

- que les conventions de stages précisent bien que les activités de M. [G] et M. [Y] répondent à ses besoins dans le cadre de l'exposition, suivant la mission qu'elle a confiée à la société Bosa,

- que la contribution de M. [G] et M. [Y] n'a été que marginale, peu important qu'elle soit identifiable, ce qui n'est pas de nature à exclure la qualification d'oeuvre collective,

- qu'à défaut, il s'agirait d'une oeuvre collaborative impliquant la mise en cause de l'ensemble des co-auteurs, même pour faire juger la défense d'un simple droit moral,

- que les appelants plaident vainement la notion d'oeuvre composite qui suppose l'intégration d'une oeuvre préexistante, alors que les éléments revendiqués ont été créés pour les besoins de l'exposition,

- qu'en toute hypothèse, M. [G] et M. [Y] se contentent d'utiliser des termes généraux et vagues, sans apporter un quelconque élément matériel, objectif et vérifiable, permettant de caractériser l'originalité des éléments revendiqués, les appelants ayant intégré le projet en phase d'exécution,

- que les appelants ne produisent aucune pièce qui attesterait de l'exploitation illicite des éléments sur lesquels ils revendiquent des droits, faute de l'avoir fait constater au moment de l'exposition,

- que le nom de M. [G] et M. [Y] avait été mentionné parmi ceux d'autres contributeurs à l''uvre collective que constituait l'exposition et ses expériences,

- que les appelants font état d'un préjudice exorbitant fondé sur un calcul fantaisiste.

* * * * *

17. L'ordonnance de clôture a été rendue le 9 janvier 2024.

18. Pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il convient de se reporter à leurs écritures ci-dessus visées figurant au dossier de la procédure.

* * * * *

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur l'originalité de l'oeuvre

19. Aux termes de son article L. 112-1, le code de la propriété intellectuelle protège 'les droits des auteurs sur toutes les oeuvres de l'esprit, quels qu'en soient le genre, la forme d'expression, le mérite ou la destination'.

20. L'article L. 112-2 considère comme 'oeuvres de l'esprit' notamment 'les oeuvres consistant dans des séquences animées d'images, sonorisées ou non, dénommées ensemble oeuvres audiovisuelles', 'les oeuvres graphiques et typographiques' et 'les logiciels, y compris le matériel de conception préparatoire'.

21. D'une façon générale, une oeuvre peut bénéficier de la protection conférée par le livre 1er quels que soient le genre auquel elle appartient, sa forme d'expression ou sa destination, dès lors qu'elle présente des caractéristiques originales, autrement dit qu'elle a une physionomie propre traduisant un parti pris esthétique et reflétant l'empreinte de la personnalité de son auteur.

22. Il faut que l''uvre soit identifiable avec une précision suffisante pour permettre sa communication, afin d'être éligible à la protection au titre du droit d'auteur. Il revient à celui qui s'en prévaut de démontrer l'originalité des 'uvres qu'il revendique. En d'autres termes, pour être protégée au titre du droit d'auteur, une 'uvre intellectuelle doit être créative et originale.

23. En l'espèce, si M. [G] et M. [Y] considéraient, aux termes de leur première mise en demeure du 27 février 2017, avoir conçu et déployé 14 'uvres utilisées dans l'attraction 'Futur l'Expo' exploitée par la société du parc du Futuroscope, à savoir :

- Arène virtuelle en réalité augmentée (Futuroscope)

- Quiz sur table d'accueil interactive (Futuroscope)

- Tryptique découverte de l'application mobile Futur l'Expo (Futuroscope)

- Tangram

- Chambre V2

- Table d'orientation sensorielle

- Socibot

- Majordome et Beams

- Dressing RA

- Chambre Mapping

- Circuit Spheros

- Dressing Enfant

- Réfrigérateur

- Régie

les oeuvres revendiquées ne sont plus qu'au nombre de 8 au stade la procédure d'appel, à savoir :

- La table d'accueil sensorielle

- La chambre à la déco personnalisable

- La régie

- Le Socibot

- L'arène virtuelle en réalité augmentée

- Le Tangram

- Une refonte de la première version de la table d'accueil interactive incluant un quizz

- Une publication digitale afin de présenter la future application mobile du Futuroscope

1 - la table d'accueil sensorielle :

24. Il s'agit d'une table, installée à l'entrée du pavillon, qui permet aux visiteurs de se repérer dans le parcours en pressant des numéros et des images tactiles sur un grand tableau de bord interactif, chaque manipulation déclenchant une animation projetée sur le mur.

25. Selon les appelants, 'elle peut être qualifiée de création originale sans conteste', sans dire en quoi.

26. M. [G] et M. [Y] précisent qu'ils auraient réalisé eux-mêmes la structure, le scénario de la table, l''uvre numérique et l'agencement des écrans.

27. M. [Y] se prétend à l'origine de la création de la structure et du scénario de la table d'accueil, qu'il a envoyée pour la première fois par e-mail à M. [O] le 28 avril 2015, ainsi qu'en atteste un procès-verbal de constat d'huissier établi les 24 et 25 novembre 2020. Il doit être observé que les constatations faites par l'huissier ont pu l'être à partir de 'divers fichiers adressés par courriel du 16 novembre 2020" et non à partir des ordinateurs des intéressés directement, ce qui constitue un premier point de fragilité dans l'offre de preuve d'une création originale.

28. Quoi qu'il en soit, le scénario n'étant pas développé plus avant dans la démonstration faite par les appelants, il ne peut receler aucune originalité. Si l'on retrouve, en partie, au sein de l'exposition exploitée par la société du parc du Futuroscope, l'une des trois propositions de disposition murale des 10 écrans faite par M. [Y] (telles qu'elles figurent dans son rapport de stage, dans lequel il reconnaît qu' '[OR] apporte un dernier regard, équilibre le positionnement et l'écartement'), ce seul agencement ne dote pas la 'création' revendiquée d'une quelconque originalité. Quant à l'interface graphique, elle ne fait que reconstituer le plan des lieux de l'attraction en trois dimensions, l'élément numérique n'apportant rien de particulier sur ce point et l'utilisation d'un code couleur pour identifier chaque pièce n'étant pas une nouveauté.

29. C'est donc vainement que M. [Y] et M. [G] affirment que 'cette 'uvre intègre des créations visuelles nouvelles, des animations déterminées qui lui confèrent une identité propre, ainsi qu'un fil conducteur'.

2 - la chambre à la déco personnalisable :

30. À partir d'une simple tablette, l'utilisateur peut changer à volonté la décoration de la chambre, murs, tableaux, en choisissant parmi une sélection de décors et prend ainsi le contrôle du dispositif avec une tablette fixée à un socle au centre de la pièce.

31. Pour cette attraction, M. [Y] affirme avoir réalisé les missions suivantes :

- étude fonctionnelle et visuelle

- ergonomie

- recherches et modélisation 3D de l'espace

- cahier des charges de l'implémentation spatiale + cotation du mobilier à partir des concepts 3D

- adaptation de mon modèle 3D pour le projet interactif

- création graphique de l'expérience projetée

- création graphique de l'interface tablette

- conception et déploiement de l''uvre numérique (création des assets et intégration).

32. M. [Y] justifie avoir adressé à M. [O] au moins quelques visuels par mail du 24 avril 2015.

33. Selon les appelants, l''uvre comporterait 'des environnements décoratifs originaux pour la projection sous forme de mapping et une interface de contrôle travaillée pour l'écran de la tablette'.

34. Or, la spécificité de l'interface graphique, qui se caractérise par un bandeau en haut composé d'un titre et d'une mascotte à gauche, un titre ferré à gauche à droite de la mascotte, un carrousel de sélection, dont l'image centrale est agrandie et les deux latérales sont entrecoupées, la présence d'une ombre portée sur les éléments du carrousel, une aide à la navigation en bas de l'écran, la présence d'un bouton pour passer d'un mode à l'autre en bas à droite, la présence d'un plan vu de dessus de la chambre, la présence de points interactifs sur le plan ou encore les éléments illustrés et titrés en colonage sur la droite pour sélectionner une ambiance prédéfinie n'a, en réalité, rien d'original.

35. Par ailleurs, la mascotte et la charte graphique, qui sont les éléments les plus originaux de l'attraction, ont été réalisées par M. [K] qui a facturé sa prestation à l'agence ByVolta le 19 juin 2015. M. [Y] le reconnaît lui-même dans son rapport de stage : 'la première version de la charte graphique proposée par [UM] [K] comportait une mascotte issue d'une banque d'image (...). [UM] a rééquilibré le code couleur et proposé de nouvelles formes. Cette nouvelle proposition est validée'.

36. De son côté, l'apport de M. [G] aurait été le suivant :

- spécifications techniques

- recherches technologiques / ingénierie

- mise en 'uvre et paramétrages des dispositif informatique

- conception et déploiement de l''uvre numérique (intégrations / mise en 'uvre des interactions / développements).

37. Ce seul listing permet de limiter la contribution de M. [G] à des tâches d'exécution dépourvues de toute créativité propre.

3 - la régie :

38. Cette interface, accessible depuis tout smartphone, tablette ou poste informatique connecté au réseau de l'attraction 'Futur l'Expo', permet au personnel, en tout lieu de l'exposition, de consulter et agir sur les expériences (savoir si les dispositifs sont connectés au réseau, ordonner le redémarrage d'un poste informatique ou de tout un dispositif), ce qui facilite l'exploitation technique du parc, le personnel restant ainsi en lien avec les visiteurs tout en pouvant effectuer des opérations en restant à proximité des expériences.

39. Voici ce qu'en dit M. [Y] dans son rapport de stage : 'j'ai conçu une interface Intranet pour monitorer la mise en réseau des installations et forcer le redémarrage en cas d'anomalie. [L] s'est ensuite occupé de la liaison avec des routines en .bat pour l'exécution des commandes, le paramétrage des comptes utilisateurs et intervention sur le registre Windows. L'outil permet de rapidement relancer les installations. Cet outil web offre l'avantage de fonctionner aussi bien en régie que depuis n'importe quel ordinateur ou mobile connecté au réseau interne. Les équipes du Futuroscope n'ont donc pas à se déplacer en régie s'ils constatent une anomalie'.

39. M. [G] en parle, dans son propre rapport de stage, de la façon suivante : '[E] a pensé à une interface Intranet simple à prendre en main afin de répondre (aux problématiques de pannes), présentée sous forme de logiciel de gestion des installations. L'objectif de cette application est de permettre aux équipes sur place d'avoir une vision globale de l'état de chaque expérience et de pouvoir les redémarrer. Nous avons analysé les demandes exprimées. Afin d'y répondre rapidement et de façon accessible, une solution HTML via le réseau local paraissait être la solution la plus adaptée. (...) Développer pour le Web plutôt que de mettre en place un programme Unity nous permet d'avoir une maintenance plus simple. Le projet est plus flexible et facilite l'ajout de nouvelles fonctionnalités ou la correction de bugs. De plus, les mises à jour sont immédiates. (...) L'objectif a rapidement été défini et nous avons souhaité produire une solution au plus vite. Le service Web a pu être réalisé en 3 jours puis a été optimisé sur place. (...) La solution trouvée (non sans mal) a été d'ajouter une clef de registre et de spécifier au script un compte administrateur présent sur chacun des ordinateurs, dans le but de valider la connexion à l'ordinateur et l'ordre de redémarrage. Au cours de la phase de recette effectuée sur place, [E] me suggère qu'il serait intéressant de proposer aux équipes d'accéder à cette interface directement au travers de leurs smartphones ou ordinateurs. Cela leur permet donc d'être encore plus réactives et de rester auprès du public en cas de redémarrage d'une expérience. Cette solution a donc été mise en place et sécurisée afin de pouvoir y accéder uniquement via le réseau Wifi local de Futur l'Expo'.

40. Les appelants considèrent avoir conçu l'identité visuelle de l'interface, développé les programmes informatiques et mis en place une interface graphique dans l'espace de régie en conférant à cette interface graphique une identité propre reconnaissable pour les exploitants, mais aussi pour le contexte ergonomique imaginé. Ils estiment avoir institué une codification graphique, pour signifier l'état des installations, avec une hiérarchisation visuelle des informations prédéfinie, ainsi que des formes graphiques évocatrices car coordonnées pour la thématique du lieu et des formes visuelles propres au lieu d'exploitation.

41. La seule originalité de la 'codification graphique' alléguée réside dans le logo 'Futur l'Expo' dont il a été vu plus haut qu'il n'est pas l'oeuvre des appelants. Pour le reste, 'l'idée' d'externaliser la maintenance pour être opérationnelle avec plus de souplesse et de rapidité, notamment en ajoutant une clef de registre ou en spécifiant un compte administrateur sur chaque ordinateur dédié, n'est pas protégée par les droits d'auteur.

4 - le Socibot :

42. Dans cette attraction, le robot, fourni par un prestataire, est mis en avant sur un piédestal. L'utilisateur peut, sur le groupe de 3 écrans, 'voir ce que voit' le robot et peut être pris en photo lorsqu'il s'adonne à un concours de grimace avec l'androïde.

43. M. [Y] affirme avoir, seul, conçu et modélisé cette installation. Il considère notamment être à l'origine du design graphique original qu'il réalise et transmet par mail du 24 juin 2015 à M. [O] et Illegal Factory, ainsi qu'il en justifie.

44. Il l'évoque ainsi dans son rapport de stage : 'plusieurs questionnements m'interpellent, notamment savoir s'il faut ou non laisser le public entrer en contact avec lui. Comment donner un retour technologique sans qu'il soit possible de tourner autour du robot et comment pourrions-nous jouer avec les visiteurs. Se dessinent de premières idées pour théâtraliser l'installation. Je commence à monter le scénario : le public jouerait avec le robot répliquant nos expériences et grimaces. Le visiteur se verrait en retour à travers de grands écrans qui diffuseraient aussi des informations technologiques et historiques. L'installation prend forme, s'orientant vers une configuration triple écran incurvés (plus adaptée aux retours de caméras et accentuant la courbure de l'ensemble). Je dispose aussi les interfaces pour qu'elles apportent une lecture logique des contenus. La mascotte se joint à l'interface comme conseiller, un détail qui se déclinera au fil des installations dès lors qu'il sera utile de contextualiser des informations. Début juin, Hanson Robotics nous annonce que son robot n'est plus disponible. Le profil (proposé à la place) est moins attrayant et la scénarisation pensée pour Einstein ne tient plus. [OR] recherche un autre robot dans le cadre du scénario écrit auparavant, un androïde pouvant répliquer des expressions et des grimaces qui pourrait éventuellement être personnalisé. Il découvre ainsi Socibot, un robot programmable et muni d'un pico-projecteur permettant de mapper des visages sur sa face. (...) On part sur cette solution, de concert, je repense la structure permettant de théâtraliser le robot'.

45. Concernant la présentation sur des écrans incurvés, il ressort d'un mail du 17 avril 2015 à destination de Illegal Factory que le projet d'expérience qui est alors appelé 'Robot Einstein' prévoit déjà l'intégration d'un 'écran curve', ainsi qu'un scénario très proche de celui que M. [Y] dit avoir imaginé (pièce jointe appelée 'Storyboard Einstein Ecran'). Il convient de rappeler que M. [Y] a commencé son stage le 20 avril 2015, l'attraction en cause ayant été pensée avant même la signature de sa convention de stage.

46. Bien que M. [G] n'évoque pas spécialement l'expérience 'Socibot' dans son rapport de stage, les appelants affirment être également 'les auteurs de l'oeuvre numérique diffusée sur les écrans'.

47. La création serait ici originale en ce qu'elle souligne les caractéristiques de mise en scène et de forme suivantes :

- le projet est pensé en temps réel et joué sur les trois écrans simultanément, pour produire pleinement la circulation continue entre les écrans,

- un fond blanc vient faire écho à la structure pour confondre l'affichage en unité,

- l'animation en circulation lente, joué en temps réel, des formes géométriques colorées et atténués accentue la légèreté perçue et développe la perception de la profondeur en l'expérience et ferme la boucle dans le sens de lecture,

- chaque écran est dédié à l'affichage d'un contenu : à gauche une vidéo fournisseur descriptive du robot qui se joue en boucle, au centre le retour caméra et une diapositive stylisée, à droite un résumé textuel traité sous forme d'image (ces contenus sont composés pour apparaître flottant dans leur région écran en situation),

- chaque constituante est animée pour produire un lent effet de bascule vers chaque angle de l'objet, accentuant encore la notion de flottaison, sans nuire à la lisibilité (le polaroïd stylisé pour l'occasion a aussi une animation propre pour produire l'effet de surprise et de surgissement, dont la composition jouant avec le hors cadre et la disposition d'arrivé par l'angle inférieur droit marque son intention de présenter les échanges avec le tangible).

48. Toutefois, si le procès-verbal de constat d'huissier établi les 24 et 25 novembre 2020 permet, à partir des fichiers transmis par les appelants, de retrouver des captures d'écran datées du 13 août 2015, les pièces produites ne suffisent pas à établir la temporalité qui ferait l'originalité de l'oeuvre numérique.

5 - l'arène virtuelle en réalité augmentée :

49. Cette expérience se présente sous la forme d'un jeu de voiture interactif comprenant un game play unique, dans lequel les petites voitures virtuelles sont pilotées depuis une tablette, la détection des obstacles sur le circuit se faisant en temps réel, par une caméra sophistiquée qui repère la position des objets sur la table et interprète immédiatement ces objets physiques en obstacles virtuels sur la piste. Ce système de projection vidéo intègre la technologie de la réalité augmentée et permet de modifier le parcours des voitures au fur et à mesure de la partie.

50. Pour cette création, un contrat de prestation a été signé (devis de 9.660 €), postérieurement au stage effectué par M. [Y] et M. [G], entre la société '2 Makesense' (créée par les appelants) et l'agence ByVolta (M. [O]). Elle précise les réalisations effectuées, à savoir :

- étude de projet

- développement d'un système de réalité augmentée permettant de détecter la présence d'objets par contrastes

- création originale et développement d'un jeu vidéo de type arène dans lequel peuvent s'engager jusqu'à 3 véhicules. Les objets réels posés sur la surface de jeu constituent des obstacles. Règles du jeu : conserver son véhicule en bon état et récolter un maximum de bonus durant le temps de la session de jeu

- création originale et développement des interfaces de contrôle pour 3 tablettes Microsoft Surface. Celles-ci permettront de choisir et piloter les véhicules (3 au choix), connaître leur état (dommages) et d'être informé des temps d'attente entre les sessions de jeu

- développement des échanges réseaux entre les périphériques de contrôle et le jeu

- développement de la centralisation sonore vers un unique point de diffusion (échanges d'événements via le réseau) et intégration de compositions audio

- mise en service du projet au parc du Futuroscope : mise en place du hardware, configuration système, déploiement des applications, calages logiciels.

51. Le devis précise qu'il 'ne comprend pas la cession de droits d'auteur, cette dernière sera établie à finalisation du projet et selon vos besoins'. Toutefois, cette réalisation a fait l'objet d'un contrat de cession de droit non exclusif au profit de l'agence ByVolta signé le 28 décembre 2015, lequel :

- évoque une oeuvre de collaboration

- décrit le projet comme s'inscrivant dans le projet mis en place par la société du parc du Futuroscope

- permet la cession de l'oeuvre au profit de l'agence ByVolta

- rappelle l'engagement de la société '2 Makesense' de réaliser une oeuvre originale et inédite

- indique l'obligation de citer tous les participants en déterminant le plus précisément possible le rôle de chaque participant

- prévoit que les co-auteurs sont chargés de la réalisation de l'oeuvre, de sa préparation à la finition de la version définitive

- répute l'oeuvre achevée lorsque, d'un commun accord entre les co-auteurs, la version définitive aura été remise au parc du Futuroscope.

52. M. [Y] et M. [G] considèrent ce contrat comme étant nul pour ne pas préciser le prix de cession des droits d'auteur, sur lequel les parties ne seraient pas parvenues à un accord. Ils estiment donc que la société du parc du Futuroscope a exploité leur oeuvre sans autorisation (infra n° 95).

53. La société du parc du Futuroscope dénie toute originalité à la prestation prévue dans ce contrat comme étant 'trop floue pour permettre d'identifier véritablement le contenu de cette création et en apprécier l'originalité '.

54. En toute hypothèse, le procès-verbal de constat d'huissier établi les 24 et 25 novembre 2020, qui se contente de captures d'écran, ne permet pas de rendre compte du contenu de l'oeuvre alléguée, ni de l'utilisation d'interfaces graphiques.

6 - le Tangram :

55. Il s'agit d'une expérience interactive qui invite les participants à reproduire des figures de Tangram à partir de pièces réelles, à grande échelle. La figure est projetée sur la table, et les pièces s'habillent de couleur lorsqu'elles sont correctement placées.

56. Là encore, pour cette création, un contrat de prestation a été signé (devis de 6.300 €), à une date non précisée mais qui pourrait précéder le début du stage de M. [Y] et M. [G] ('offre valable du 1er février 2015 au 1er mars 2016"), entre la société '2 Makesense' et l'agence ByVolta. Elle précise les réalisations effectuées, à savoir :

- recherches, étude, gameplay, prototypage

- création visuelle des scènes de jeu, préparation des assets, intégration : 11 figures (agencement de pièces du Tangram)

- développement

- détection de la profondeur à partir du support de jeu

- activation de zones de jeu par remplissage

- les sessions de jeu sont organisées comme suit :

* début de partie : apparition de la silhouette d'un Tangram assemblée

* en cours de jeu : chaque zone de la solution remplie s'illumine par une mise en couleur

* solution apparaissant sous forme de lueur au bout d'un temps de non résolution sans mettre fin à la partie

* Tangram résolu : la surface complète du Tangram est complétée (sic), décompte temporel et génération d'un nouvel agencement de pièces choisi aléatoirement parmi les modèles inclus

- matériel non fourni.

57. Le devis précise qu'il 'ne comprend pas la cession de droits d'auteur, cette dernière sera établie à finalisation du projet et selon vos besoins'.

58. M. [Y] et M. [G] affirment avoir conçu 'une suggestion formelle initiale, envoyée par mail en date du 10 février 2016 détaillant la forme graphique du Tangram'. Un mail intitulé 'Tangram Géant' a effectivement été constaté par l'huissier de justice dans son procès-verbal des 24 et 25 novembre 2020 relativement à un échange à ce sujet entre M. [Y] et un responsable de la société du parc du Futuroscope.

59. Le Tangram est une dissection du carré en sept pièces qui permet de composer des figures simples sous forme de puzzle. Il est connu, dans sa forme moderne, depuis le XVIIème siècle. Les appelants n'ont en cette occasion élaboré aucune forme puisqu'ils se sont contentés de reproduire les figures les plus couramment utilisées, comme le cheval et le chat notamment.

60. Dépourvue d'originalité, la 'suggestion formelle initiale' dont se prévalent M. [Y] et M. [G] ne se présente pas comme une oeuvre protégée au titre du droit d'auteur. À supposer que l'idée de l'utilisation du Tangram provienne des appelants, une idée ne bénéficie pas, en soi, de la protection du droit d'auteur et elle n'a d'ailleurs pas été déclinée comme proposée par les intéressés, c'est-à-dire sous forme d'interface graphique, mais sous celle de pièces mobiles.

7 - la refonte de la première version de la table d'accueil interactive incluant un quizz :

61. Cette attraction recrée la table d'accueil en l'imaginant comme un quizz qui permet à 5 joueurs d'y participer simultanément.

62. M. [Y] affirme avoir été sollicité à cette fin et avoir fourni 'un nouveau travail de création' qui a consisté en :

- la création des scènes de jeu : introduction, questions, résultat, temporisation de l'ensemble

- l'animation des contenus : apparition des textes, transitions des assets entre des étapes de projets

- la création d'une animation pour introduire des questions.

63. Il prétend avoir réalisé seul une identité visuelle à cette destination, différents environnements habillant les questions et les réponses, dans un univers interfacé et intentionnellement composé. Il aurait adressé à M. [O] l'ensemble des visuels et la charte graphique correspondant au quizz, M. [G] procédant de son côté à l'ensemble des mises en interaction et animations.

64. Toutefois, l'interface graphique et les visuels couleurs utilisés par M. [Y] et M. [G] sont dictés par la charte graphique essentiellement développée par M. [K] (supra n° 35). Pour le surplus, notamment le contenu de l'animation, le procès-verbal de constat d'huissier ne fait aucune description utile permettant d'en relever la singularité.

8 - la publication digitale afin de présenter la future application mobile du Futuroscope :

65. Cette publication permet la découverte de l'application depuis un stand et un totem de trois grands écrans curves : le contenu affiché est dynamique et permet dès la sortie de l'application de découvrir de nouveaux contenus, dont les possibilités de téléchargement de l'application.

66. M. [Y] prétend avoir réalisé en cette occasion une identité graphique pour une potentielle application mobile de quizz se déroulant dans le bâtiment et utilisant des beacons en détection de proximité des points de découvertes. Le procès-verbal de constat d'huissier des 24 et 25 novembre 2020 permet de confirmer qu'il a travaillé sur le sujet (mail 'présentation de l'application').

67. Un devis (non daté mais établi postérieurement à son stage) a d'ailleurs été signé pour un montant de 840 € entre la société '2 Makesense' et l'agence ByVolta portant sur la 'publication digitale, présentation d'application mobile sous forme de triptyque (Futur l'Expo au parc du Futuroscope)'. Il est ainsi libellé :

- création graphique, réalisation des visuels et des objets 3D

- composition d'une scène à trois caméras via Unity pour présenter l'application

- montage vidéo tenant compte de la présence des trois écrans disposés les uns sur les autres, le dispositif assurant la synchronisation des contenus entre chaque écran

- mise en service du poste informatique dédié au parc du Futuroscope : configuration, déploiement du projet et automatisation du lancement de l'application.

68. Là encore, le devis précise qu'il 'ne comprend pas la cession de droits d'auteur, cette dernière sera établie à finalisation du projet et selon vos besoins'. Cette réalisation a fait l'objet d'un contrat de cession de droit non exclusif au profit de l'agence ByVolta signé le 28 décembre 2015.

69. Les seules captures d'écran effectuées par l'huissier dans son procès-verbal des 24 et 25 novembre 2020 montrent qu'un échange a eu lieu par mail relatif à la 'Présentation de l'application' mais il est impossible d'en lire la date et l'expéditeur. Par ailleurs, la société du parc du Futuroscope produit une facture relative à cette prestation de la société 4D adressée à l'agence ByVolta le 11 novembre 2016.

70. Même si les appelants s'interrogent sur cette facture éditée 11 mois plus tard, celle-ci concerne notamment la 'création d'une séquence animée destinée à être diffusée sur un mur d'images composé de 3 écrans plats courbes' et elle a été émise antérieurement à leur première réclamation (22 février 2017).

71. Indépendamment du fait que les appelants échouent à démontrer l'originalité des oeuvres alléguées, la titularité des droits y attachés doit être questionnée.

Sur la titularité des droits

72. Selon l'article L. 113-1 du code de la propriété intellectuelle, 'la qualité d'auteur appartient, sauf preuve contraire, à celui ou à ceux sous le nom de qui l'oeuvre est divulguée'.

32. Aux termes de l'article L. 113-2 :

'Est dite de collaboration l'oeuvre à la création de laquelle ont concouru plusieurs personnes physiques.

Est dite composite l'oeuvre nouvelle à laquelle est incorporée une oeuvre préexistante sans la collaboration de l'auteur de cette dernière.

Est dite collective l'oeuvre créée sur l'initiative d'une personne physique ou morale qui l'édite, la publie et la divulgue sous sa direction et son nom et dans laquelle la contribution personnelle des divers auteurs participant à son élaboration se fond dans l'ensemble en vue duquel elle est conçue, sans qu'il soit possible d'attribuer à chacun d'eux un droit distinct sur l'ensemble réalisé'.

74. L'article L. 113-3 définit 'l'oeuvre de collaboration (comme) la propriété commune des coauteurs.

Les coauteurs doivent exercer leurs droits d'un commun accord.

En cas de désaccord, il appartient à la juridiction civile de statuer.

Lorsque la participation de chacun des coauteurs relève de genres différents, chacun peut, sauf convention contraire, exploiter séparément sa contribution personnelle, sans toutefois porter préjudice à l'exploitation de l'oeuvre commune'.

75. L'article L. 113-4 dispose que 'l'oeuvre composite est la propriété de l'auteur qui l'a réalisée, sous réserve des droits de l'auteur de l'oeuvre préexistante'.

76. L'article L. 113-5 prévoit que 'l'oeuvre collective est, sauf preuve contraire, la propriété de la personne physique ou morale sous le nom de laquelle elle est divulguée.

Cette personne est investie des droits de l'auteur'.

77. En l'espèce, la société du parc du Futuroscope produit un 'contrat de maîtrise d'oeuvre' passé en 2015 (sans autre précision) avec la société Bosa, exerçant sous l'enseigne ByVolta. Ce contrat expose :

- que la société du parc du Futuroscope 'souhaite créer, à l'intérieur du pavillon existant 'Star du Futur' situé sur la parc du Futuroscope, une exposition intitulée 'Futur l'Expo' afin de proposer à ses visiteurs un parcours participatif et ludique au fil duquel les visiteurs vont pouvoir se projeter dans un futur proche grâce à des expériences et à la présentation d'objets connectés',

- que l'agence ByVolta 'a l'expérience des missions de maîtrise d'oeuvre telles que la mission objet du présent contrat, et étant donné l'ampleur du projet et la nécessité de réaliser ce concept original d'exposition interactive, le Futuroscope a décidé de confier à ByVolta la maîtrise d'oeuvre de l'ensemble des prestations relatives aux aménagements scénographiques permettant l'installation de l'exposition à l'intérieur du pavillon existant 'Star du Futur'.

78. Le contrat prévoit que l'agence ByVolta 'est l'unique interlocuteur' de la société du parc du Futuroscope dans le cadre de son exécution. Pour cela, l'agence ByVolta est autorisée, 'à tout moment, (à) sous-traiter l'exécution de certaines parties du présent contrat, sous réserve d'avoir obtenu l'accord préalable du Futuroscope à ce titre. Le Futuroscope pourra refuser la présence des entreprises qu'il n'aura pas agréées sur le chantier'.

79. Dans son article 2.4 intitulé 'contenu global de la mission', le contrat précise que 'la mission de maîtrise d'oeuvre scénographique comprend notamment :

- la conception, la réalisation et l'intégration de :

* contenus

* graphisme et identité

* médias

* mobiliers supports (mobilier, gros mobilier et mobilier intégré aux cloisons)

* animatiques interactives (10 expériences principales interactives fournies 'clef en main'), les matériels audiovisuels sont inclus

- la conception et la réalisation d'une application mobile chargeable par les visiteurs et produisant des éléments de médiation et de contacts d'information in situ, dont un quizz qui en sera extrait

- l'achat de deux robots Beam Pro auprès de la société Awabot et leur intégration

- l'achat d'un robot Socibot auprès de la société Engenireed Arts Ltd et son intégration

- un accompagnement des partenaires de l'exposition, à savoir la présence aux réunions organisées par le Futuroscope et l'intégration des objets connectés mis à disposition par les partenaires à la date de signature du présent contrat'.

80. Dans son article 8, le contrat mentionne que l'agence ByVolta 'cède à titre exclusif au Futuroscope les droits d'exploitation afférents à l'exposition', lesquels concernent 'les droits de propriété intellectuelle (dont les droits de propriété littéraire et artistique), les droits voisins et les droits à l'image utilisés dans le cadre des prestations. Ils s'attachent à tous éléments composant l'exposition (notamment animatiques) et plus précisément tous les éléments audiovisuels y intégrés et susceptibles de protection au titre de la propriété intellectuelle'.

81. Dans ce cadre, l'agence ByVolta 'garantit être le détenteur de l'ensemble des droits afférents aux éléments qu'il a construits ou produits dans le cadre de l'exposition (mobilier et logiciels). De même, il garantit avoir dûment acquis l'ensemble des droits et/ou autorisations nécessaires à l'exploitation par le Futuroscope des éléments de l'exposition autres que ceux construits ou produits par l'agence ByVolta (notamment les 10 expériences interactives, l'application mobile), pour les besoins de l'exposition et de sa promotion et publicité'.

82. Aux termes de l'article 8.5, l'agence ByVolta garantissait ainsi la société du parc du Futuroscope 'contre toute action ou réclamation d'un tiers portant sur les éléments de propriété intellectuelle utilisés et mis en oeuvre dans le cadre de l'exécution de la commande susvisée' et l'article 11 indique qu'elle 'conclura en son nom personnel et sous sa responsabilité à l'égard des tiers tous les contrats relatifs à la réalisation de ses prestations'.

83. L'article 14 institue l'agence ByVolta comme interlocuteur unique de la société du parc du Futuroscope en précisant qu'elle 'assure, sous sa responsabilité, la coordination de tous les sous-traitants en assumant les tâches d'ordonnancement et de pilotage des prestations'.

84. L'article 5 institue 'un comité de pilotage qui aura vocation à assurer la coordination générale et le suivi de l'avancement du projet' mais précise que 'la mission de maîtrise d'oeuvre assurée par ByVolta est contrôlée par le Futuroscope', des réunions hebdomadaires étant prévues en alternance dans les locaux de l'agence ByVolta et de la société du parc du Futuroscope. Un ou plusieurs membres de l'agence ByVolta et de la société du parc du Futuroscope composent ce comité de pilotage, M. [PB], de la société intimée, étant 'l'interlocuteur principal de ByVolta'.

85. Enfin, dix expériences sont listées dans une annexe 2 avec un planning d'exécution et une annexe 3 propose des vues des expériences.

86. M. [O], gérant de la société Bosa (agence ByVolta), a attesté des contributions suivantes à l'exposition 'Futur l'Expo' :

- pour la table d'accueil sensorielle : [OR] [O] (scénario, direction, création), [V] [D] et [C], designer du Futuroscope (design), NILS (dessin préparatoire), [OR] [A], directeur de la création au Futuroscope, et [OR] [O] (concept original), [H] [Z] (IT superviseurs), [I] [R] (plan de l'exposition), NILS et Illegal Factory (logos animés), Illegal Factory et Studio NTTRB (films animés), [UM] [K] et [OR] [O] (charte graphique),

- pour la chambre à la décoration personnalisable : [OR] [A] et [OR] [O] (concept original), [OR] [O] (scénographie), [V] [D] (design espace), Illegal Factory et Image Bank (directeur de production et images), [H] lab (codeur superviseur), NILS (logos), [UM] [K] (charte graphique, interface), Akasha europe (intégrateur technologique et étude de faisabilité), [TH] [W] et [H] [Z] (connexion IT des composants),

- pour la régie : [H] [Z] et direction informatique du Futuroscope (IT), [UM] [K] (interface selon image Bosa, charte graphique),

- pour le Socibot : [OR] [A] et [OR] [O] (concept), [OR] [O] et NILS (scénographie, expérience utilisateur, storyboard, dialogue), Illegal Factory et NILS (dessin, storyboard des interactions), [V] [D] avec le partenariat Samsung (concept design 3 écrans triptyque), Illegal Factory (directeur de publication), [H] [Z] (codeur superviseur et codeur des interactions), [UM] [K] (graphisme), NILS (logos mascotte animée), Akasha Europe (intégrateur technologique), Engineered Arts Limited (logiciel utilisé, BIOS, propriétaire), Engineered Arts Limited pour le robt, le logiciel de contrôle et le triptyque (matériel utilisé), société du parc du Futuroscope, la société Bosa et Akasha Europe (connexion IT des composants),

- pour le Tangram : [OR] [A] (idée et concept), [C] (concept et dessin support), la société Bosa (expérience utilisateur), Akasha Europe (intégrateur technologique), [TH] [W] (connexion IT des composants),

- pour la refonte de la première table d'accueil : [UC] [LA], rédaction du Futuroscope, et [OR] [O] (rédaction du quizz), [C] (design espace), [OR] [A], [OR] [O] et [UC] [LA] (concept et expérience utilisateur), [H] [Z] et [TH] [W] (IT superviseurs et interaction), NILS et NTTRB (logos animés), Illegal Factory (films animés), [UM] [K] (charte graphique),

- pour la publication digitale/quizz : [UC] [LA] et [OR] [O] (rédaction et mise en place), la société Bosa (design), [TH] [W] (IT superviseurs), société 4D et [UM] [K] (animation, graphisme et logo selon la charte).

87. Dans son rapport de stage auprès de la société Bosa, M. [Y] évoque lui-même, à plusieurs reprises, le caractère collectif de l'oeuvre commandée par la société du parc du Futuroscope :

- 'à mon arrivée à l'agence, une place m'est réservée avec [GO] (rougthman autodidacte en stage de trois mois) et [OR] (responsable d'agence). Me sont donnés les accès à l'imprimante laser couleur A4 ainsi qu'au wifi. En pratique, aucune restriction n'est passée et il est possible de prendre place où bon nous semble. [OR] m'a aussi mis à disposition une unité centrale (...) qui deviendra notre espace d'expérimentation'

- décrivant 'une mission principale de 5 mois', M. [Y] rappelle que 'l'agence ByVolta est sélectionnée pour diriger toute la réhabilitation, la scénographie et l'orientation expérientielle du lieu. Nous disposons donc d'une surface de 1000 m² pour faire naître une nouvelle attraction. Le challenge, penser les expériences qui la composeront et les réaliser dans les 5 mois que constituent le stage ! Le 1er juin, j'ai eu l'occasion de faire un déplacement sur place pour rencontrer nos interlocuteurs au Futuroscope pour traiter d'un partenariat avec la MAIF'

- 'nous souhaitons introduire des technologies nouvelles et méconnues du public'

- 'la première ébauche nous conduit au parcours suivant (...)'

- au sujet de la refonte de la mascotte proposée par [UM] [K] : '[GO] et moi reprenons la mascotte (...), la nouvelle mascotte est plus épurée'

- 'par la suite, j'apporterai aussi quelques modifications en accompagnant [F] [U] (...) lors de l'insertion des contenus'

- 'nous souhaitons que la table donne l'impression de flotter au-dessus du sol'

- 'nous avons notre première approche'

- 'une semaine avant de partir à [Localité 8], nous en savons plus sur nos expériences'

- 'la table est là, mais nous faisons face à des retards de livraison et les écrans ne sont pas encore arrivés. Nous ne savons pas non plus comment ces derniers seront disposés. (...) Pour nous avancer, j'exploitons (sic) à nouveau les simulations réalisées sous Unity'

- 'nous devrons à présent faire face à plusieurs problématiques : réaliser un projet qui prendra vie dessus, sur le mur, ainsi que sur les dix écrans, le tout de manière synchronisée, fluide et stable'

- 'nous avons fait le choix d'accéder à des players vidéo pilotables à distance'

- 'nous projetions une installation théâtralisant le robot d'Hanson Robotics. (...) Pour notre scénographie, un piédestal maintiendrait le buste robotisé'

- 'nous arrivons le 20 août sur les lieux (...). la réception de Socibot a pris du retard. Nous réceptionnons le carton le 23 août. (...) Notre production ne nous permettra pas de proposer un développement photo ni de repartir avec ce souvenir sous sa forme numérique'

- 'on part sur cette solution, de concert, je repense la structure permettant de théâtraliser le robot'

- 'nous souhaitons faire découvrir les Beam aux visiteurs du Futuroscope'

- 'nous avons tenté d'échanger avec la société Awabot pour savoir s'il était réalisable de décliner l'interface sous une forme plus proche de celle communément rencontrée sur des drones'

- 'nous conseillons au parc de se rapprocher aussi de Beam pour faire poids. Dans l'attente, pour un accès grand public, nous préconisons l'installation d'une interface d'arcade équipée de contrôleurs de jeu Xbox'

- 'le Futuroscope souhaiterait un assistant en décalage avec le lieu, ancré dans l'imaginaire de l'assistant en lui-même. Nous repartons donc sur un axe explicite: le majordome. (...) C'est finalement cet axe qui donnera matière à la production d'Illegal Factory pour les contenus'

- 'nous avons aussi réceptionné les sièges [J]'

- 'nous montons à ByVolta une configuration de test (en fait nous modifions l'ordinateur de la mezzanine)'

- 'nous avons trouvé un fournisseur proposant un réfrigérateur doté d'une vitre translucide. [M] et [OR] écriront les scénarios des différentes vidéos qui prendront place dans le frigo'

- 'nos tests au bureau sont probants, les Beacon ont même une très large portée (...). Nous réservons deux jours de déplacement sur [Localité 8] le 19 et 20 août pour procéder à un test en situation réelle'

- 'nous avons installé TeamViewer sur chaque poste pour une prise en main distante. Nous pouvons aussi accéder aux configurations en VNC depuis la régie. Nous avons déployé quelques outils sur ce serveur, comme l'outil Barco pour piloter la mise en veille et configurer les vidéo-projecteurs'

- 'en finalité, les équipes (du Futuroscope) nous exposent être satisfaites des retours du public ainsi que du suivi technique : nous les accompagnons, prenons à distance les Beam pour veiller au fonctionnement de l'ensemble'.

88. En guise de remerciements, à la fin de son rapport de stage, M. [Y] ajoute une photographie le représentant en compagnie de M. [G], de [T] [KP], de [ZT] [PW], de [B] [X], d'[OR] [S], de [N] [P] et d'[OR] [O] qui constituent la collectivité qu'il considère comme étant 'en charge du projet', en y ajoutant [F] [U], [GZ], [UM] [K] et [V] [D], qu'il remercie 'pour leurs interventions créatives'.

89. De son côté, M. [G] conclut ainsi son rapport de stage : 'Je tenais à remercier [OR] [O], [M] [P] et [E] [Y] avec qui j'ai partagé en commun le développement du projet 'Futur l'Expo' jusqu'à sa mise en production'.

90. Au-delà du stage, la collaboration s'est poursuivie entre la société du parc du Futuroscope, d'une part, via l'agence ByVolta, et M. [Y] et M. [G], d'autre part, via la société '2 Makesense'.

91. Ainsi, pour le Tangram, un contrat de prestation a été signé (devis de 6.300 €) à une date non précisée entre la société '2 Makesense' et l'agence ByVolta. Il a été vu (supra n° 55 et suivants) que cette prestation ne pouvait pas être protégée par les droits d'auteur. Elle n'a d'ailleurs donné lieu à aucun contrat de cession de droit.

92. Pour l'arène virtuelle, un contrat de prestation a été signé à une date non précisée (devis de 9.660 €), entre la société '2 Makesense' et l'agence ByVolta, lequel devis précisait qu'il 'ne comprend pas la cession de droits d'auteur, cette dernière sera établie à finalisation du projet et selon vos besoins'. Toutefois, cette réalisation a fait l'objet d'un contrat de cession de droit non exclusif par M. [Y] et M. [G] au profit de l'agence ByVolta signé le 28 décembre 2015. Le contrat prévoit que cette oeuvre est 'réalisée dans le cadre du déploiement de nouvelles expériences au parc du Futuroscope'.

93. Pour le quizz d'accueil, un devis (non daté) a été signé à hauteur de 5.460 € entre la société '2 Makesense' et l'agence ByVolta, lequel devis précisait qu'il 'ne comprend pas la cession de droits d'auteur, cette dernière sera établie à finalisation du projet et selon vos besoins'. Toutefois, cette réalisation a fait l'objet d'un contrat de cession de droit non exclusif par M. [Y] et M. [G] au profit de l'agence ByVolta signé le 28 décembre 2015. Le contrat prévoit que cette oeuvre est 'réalisée dans le cadre du déploiement de nouvelles expériences au parc du Futuroscope'.

94. Quant à la publication digitale, elle a fait l'objet d'un devis non daté et signé pour un montant de 840 € ainsi que d'un contrat de cession de droit non exclusif au profit de l'agence ByVolta signé le 28 décembre 2015 qui prévoit également que cette oeuvre est 'réalisée dans le cadre du déploiement de nouvelles expériences au parc du Futuroscope'.

95. Ces contrats, dont il n'a pas été sollicité la nullité aux termes du dispositif des conclusions des appelants, sont adossés à une prestation rémunérée de la part de la société '2 Makesense' dont ils sont les associés, ce qui correspond à une contrepartie financière, quoi qu'en disent M. [Y] et M. [G] dans le corps de leurs conclusions.

96. Surtout, elles sont clairement l'expression d'une autorisation d'exploitation, dans le cadre de 'Futur l'Expo', des travaux effectués.

97. M. [Y] et M. [G] ont concouru, d'abord en qualité de stagiaires de la société Bosa, puis en qualité d'associés de la société '2 Makesense', elle-même sous-traitante de celle-ci, à la conception intellectuelle d''expériences' qui ont été intégrées dans l''uvre scénographique et ludique 'Futur l'Expo', comprenant 12 expériences, à laquelle les visiteurs du parc d'attraction du Futuroscope de [Localité 8] ont eu accès pendant deux ans et demi, exposition commandée et dirigée par la société du parc du Futuroscope et fruit de la fusion des multiples contributions.

98. Ils ont, à cet égard, été cités au rang des principaux contributeurs sur 'un panneau implanté à hauteur d'homme' dans le cadre de cette exposition, ainsi qu'en témoigne un procès-verbal de constat d'huissier établi le 14 mars 2017. De ce point de vue, l'article 3 des différents contrats de cession, indiquant que 'tous les participants doivent être cités', a été respecté, même s'il n'a pas pu être déterminé 'le plus précisément possible le rôle de chaque participant'.

99. À supposer qu'ils s'agisse d''uvres collaboratives (et non collectives) dans lesquelles le rôle de chaque co-auteur peut être dissocié et pour lesquelles M. [Y] et M. [G] auraient eu toute initiative, seules seraient concernées l'appli mobile, l'arène virtuelle et le quizz, lesquelles prestations, relativement identifiées, ont fait l'objet de contrats de cession de droit qui évoquent d'ailleurs, en leur article 1er, 'une oeuvre de collaboration' et en leur article 5 'le résultat d'un travail d'équipe, (...)plusieurs personnes physiques (ayant) concouru à sa création'.

100. En toute hypothèse, M. [Y] et M. [G] ne peuvent se prévaloir d'une oeuvre composite, qui supposerait une 'oeuvre nouvelle à laquelle est incorporée une oeuvre préexistante sans la collaboration de l'auteur de cette dernière', puisque 'Futur l'Expo' est constitué de travaux concomitants et coordonnés.

101. Enfin, c'est vainement que M. [Y] et M. [G] plaident une atteinte à leur droit moral alors qu'ils n'ignoraient pas qu'ils travaillaient à la création d'une oeuvre commune commandée par la société du parc du Futuroscope aux fins d'exploitation publique.

102. Si le jugement doit être infirmé en ce qu'il a retenu une irrecevabilité de M. [Y] et de M. [G] faute de qualité à agir alors qu'il n'est pas contesté qu'ils ont participé à l'oeuvre litigieuse, il conviendra, de tout ce qui précède, de les débouter de l'ensemble de leurs demandes.

Sur les dépens

103. M. [Y] et M. [G], partie perdante, seront condamnés in solidum aux dépens d'appel, lesquels seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Sur l'article 700 du code de procédure civile

104. Il sera relevé que la présente action a pu naître d'abord d'une frustration, celle pour M. [Y] et M. [G] de ne pas avoir été intégrés au sein de la société Bosa à l'issue de leur stage (ce regret affleure dans leurs rapports respectifs), ensuite d'un manque de reconnaissance de la part de la société du parc du Futuroscope qui a sans doute tardé dans la citation des appelants en qualité de contributeurs à 'Futur l'Expo' (le procès-verbal de constat d'huissier établi le 14 mars 2017 est postérieur à la mise en demeure des appelants du 27 février 2017), enfin de la maladresse déployée par la société Bosa lorsqu'elle a fait constater par huissier de justice le 12 janvier 2017 'l'utilisation abusive et sans autorisation par la société '2 Makesense' d'une part et par M. [Y] à titre personnel d'autre part des images issues (des) scénographies (de 'Futur l'Expo') en s'attribuant abusivement, par omission ou ambiguïté, la paternité de l'ensemble de l'oeuvre' sur différents sites Internet, ce qui a conduit la société du parc du Futuroscope, en réponse à la mise en demeure du 27 février 2017, à exiger de M. [Y], de M. [G] et de la société '2 Makesense' de cesser tout acte contrefaisant et de l'indemniser d'ores et déjà.

105. Partant, aucune considération d'équité ne commande de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort, par mise à disposition au greffe conformément à l'article 451 alinéa 2 du code de procédure civile,

Infirme le jugement du tribunal judiciaire de Rennes du 29 juin 2021 en ce qu'il a déclaré M. [E] [Y] et M. [L] [G] irrecevables pour défaut de qualité à agir,

Statuant à nouveau,

Déclare M. [E] [Y] et M. [L] [G] recevables à agir,

Au fond,

Déboute M. [E] [Y] et M. [L] [G] de l'ensemble de leurs demandes,

Confirme le jugement pour le surplus,

Y ajoutant,

Condamne in solidum M. [E] [Y] et M. [L] [G] aux dépens d'appel, lesquels seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,

Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.