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Décisions

CA Montpellier, 5e ch. civ., 14 mai 2024, n° 21/05112

MONTPELLIER

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Allianz Iard (SA)

Défendeur :

CPAM de l'Herault (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Fillioux

Conseillers :

M. Garcia, Mme Strunk

Avocats :

Me Lambert, Me Szwarc, Me Barral

TJ Montpellier, du 29 juin 2021, n° 19/0…

29 juin 2021

Exposé du litige

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Faits, Procédure et Prétentions

Le 15 mai 2014, Mme [O] [U] âgée de 62 ans, a déjeuné au restaurant ' [17] 'situé [Adresse 3] à [Localité 18] exploité par la SA La Corbeille, assurée auprès de la SA Allianz IARD.

Souffrant de diarrhées et de vomissements, elle a consulté le 19 mai 2014 son médecin traitant qui diagnostiquait une gastro-entérite. Le 22 mai 2014, elle a été hospitalisée à la clinique des trois vallées à [Localité 15], puis elle a été transférée le 23 mai 2014 au service néphrologie du centre hospitalier de [Localité 16] où elle est décédée le [Date décès 5] 2014.

Par acte du 6 juillet 2015, Messieurs [C] et [R] [E], fils de la défunte et M. [V] [W], son concubin, ont saisi le juge des référés du Tribunal de grande instance de Montpellier afin d'obtenir une expertise médicale.

Par ordonnance de référé du 28 juillet 2016, puis du 6 octobre 2016, le docteur [M] a été désigné à cette fin et a déposé son rapport le 13 février 2017 aux termes duquel il a identifié la cause du décès comme provenant d'une acidose lactique, causée par une insuffisance rénale et un surdosage médicamenteux de METFORMINE.

Par jugement du 21 novembre 2014, la SA La Corbeille a été placée en liquidation judiciaire, Maître [N] [Z] étant désigné en qualité de liquidateur.

Par acte du 22 novembre 2018, Messieurs [C] et [R] [E], fils de la défunte et M. [V] [W], son concubin ont fait assigner la SA Allianz, assureur de la SA Corbeille et le liquidateur de la SA Corbeille, Maître [Z] afin d'être indemnisés du préjudice résultant du décès de Mme [O], acte étant dénoncé à la CPAM de l'Herault.

Par assignation du 7 juin 2019, la SA Allianz Iard a assigné la SAS Polyclinique des Trois vallées afin de la voir condamnée à la relever de toute condamnation prononcée à son encontre.

Par jugement du 29 juin 2021, le tribunal judiciaire de Montpellier a dit que l'intoxication alimentaire présentée par Mme [O] est imputable au repas pris dans le restaurant [17] le 15 mai 2014 et que la SA Allianz doit indemniser les préjudices en résultant et par jugement avant dire droit a ordonné une expertise confiée au docteur [X] et un sursis à statuer sur le surplus.

La juridiction a retenu qu'en application des dispositions de l'article L 421-3 du code de la consommation, un restaurateur est tenu d'une obligation de sécurité s'agissant des produits proposés à la clientèle, que les demandeurs à l'action doivent démontrer que l'intoxication alimentaire de Mme [O] est liée à la consommation des produits servis le 15 mai 2014 dans le restaurant '[17]', que l'enquête diligentée par la direction départementale de la protection des populations menée le 4 juillet 2014 a relevé diverses infractions au sein des cuisines du restaurant dont en autre la rupture de la chaîne du froid et du chaud, une absence de fonctionnement de la hotte aspirante d'où une élévation anormale de la température et la présence de denrées congelées en interne dans des conditions non conformes, que ces manquements démontrent des violations aux règles d'hygiène alimentaire susceptibles de provoquer des intoxications, que Mme [Y], qui a déjeuné en compagnie de Mme [O], a également présenté une gastro-entérite, que la concomitance des symptômes permet d'incriminer les produits consommés.

Elle rappelle que le docteur [M] a retenu comme scénario le plus probable, une intoxication alimentaire, même si le germe précis n'a pu être identifié, faute de prélèvement adéquat, que Mme [O] était atteinte d'un diabète sucrée au moment des faits, d'une hypertension artérielle et d'une hypercholestérolémie, que plusieurs facteurs sont intervenus pour conduire au décès dont principalement l'antécédent de diabète et le traitement par Melformine en ajoutant qu'en l'absence d'état antérieur, les faits du 15 mai 2014 n'aurait pas abouti au décès, qu'il résulte des éléments médicaux qu'il existe une incertitude sur les causes du décès de Mme [O], même si l'intoxication alimentaire en est à l'origine d'où la nécessité d'une expertise pour déterminer les causes du décès de Mme [O].

Le 6 août 2021, la SA Allianz a interjeté appel de cette décision.

Par conclusions déposées le 1er septembre 2023, la SA Allianz demande à la Cour de :

INFIRMER en toutes ses dispositions le jugement mixte rendu le 29 juin 2021 par le Tribunal judiciaire de [Localité 18],

ET, STATUANT A NOUVEAU :

- DIRE ET JUGER que Monsieur [V] [W], Messieurs [C] et [R] [E] ne rapportent pas la preuve d'un lien de causalité direct et certain entre le repas pris par Madame [O] au sein du restaurant « [17] » le 14 mai 2014 et ce qui sera vraisemblablement une intoxication alimentaire.

Ce faisant,

- DÉBOUTER Monsieur [V] [W], Messieurs [C] et [R] [E] de l'intégralité de leurs demandes, fins et conclusions dirigées contre la SA ALLIANZ IARD, en sa qualité d'assureur de la SAS LA CORBEILLE ;

- CONDAMNER Monsieur [V] [W], Messieurs [C] et [R] [E] à payer à la SA ALLIANZ IARD la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Elle fait valoir que le jugement de première instance, qui écarte les conclusions du professeur [M], statue en ayant recours à la preuve par présomption judiciaire alors qu'il ne s'agit pas de présomptions graves, précises et concordantes, que les premiers juges ont déduit de la fermeture administrative du restaurant que l'établissement pouvait présenter un danger pour les clients, que toutefois, l'arrêté de fermeture n'est pas versé aux débats de sorte que sa motivation est inconnue, que la procédure a été classée par le Procureur de la République le 2 février 2015 démontrant que les manquements relevés ne présentaient pas de danger, que de surcroît, le contrôle est intervenu juillet 2014 soit plusieurs mois après le repas litigieux, sans que l'on sache si des changements ne sont pas intervenus au sein des cuisines du restaurant pendant ce laps de temps, qu'une faute postérieure ne peut avoir un lien causal avec un événement antérieur alors que les conditions d'exploitation se sont dégradées pour la mener à la liquidation en novembre 2014, que le personnel est saisonnier d'où des changements dans le fonctionnement du restaurant.

Elle soutient que le témoignage de Mme [Y] n'établit pas le lien de causalité car ne vient prouver le repas en commun, le plat consommé et les symptômes de la gastro-entérite alléguée faute d'élément probant.

Enfin, elle fait valoir que le professeur [M] a dénier au lien de causalité toute certitude, puisqu'il observe que de telles infections s'illustrent par des symptômes plus prolongés dans le temps, de l'ordre de 24 à 72 heures, de telle sorte qu'il est possible que l'infection soit liée à un repas pris antérieurement, que compte tenu du délai d'incubation relevé par l'expert judiciaire, ce sont bien des repas antérieurs à celui pris le midi du 15 mai 2014 qui sont susceptibles d'être à l'origine de l'intoxication, que le professeur [M] indique au contraire de ce qu'a retenu le premier juge que « la cause de cet épisode prolongé de diarrhées et vomissements est difficile à établir. Il n'y a pas de preuve formelle d'une origine infectieuse puisque les deux seuls prélèvements bactériologiques réalisés, deux hémocultures avant mise sous antibiotiques, le 22 mai 2014 à la clinique des Trois Vallées à [Localité 15], sont restés stériles » que l'expert [M] de conclure que « la cause de l'intoxication alimentaire ne peut pas être établie avec certitude ».

Elle soutient également que le Docteur [G] dans le rapport de sa consultation déposée le 3 juin 2022 va, en réponse de son chef de mission n°6 « Faire toute observation médicale utile » conclure que : « En l'absence d'autopsie de la patiente, il sera difficile de mettre en évidence de façon certaine et directe une relation entre le repas « contaminant » et le décès de la patiente. (')» le repas « contaminant » représente le départ du déroulement morbide des faits mais l'expert ne peut conclure, au vu des documents transmis qu'il soit à l'origine, de façon directe et certaine, du décès de la patiente, que de même, l'expert judiciaire, dans sa réponse au dire des intimés, indique : « Nous ne pouvons donc pas affirmer sur les données du dossier que le lien entre le repas et le décès soit direct et certain » que les conclusions du rapport de consultation du Docteur [G], corroborent parfaitement celles du professeur [M].

Par conclusions déposées le 12 décembre 2022, Messieurs [C] et [R] [E] t et M. [V] [W] demandent à la cour de :

Débouter la SA ALLIANZ de ses entières demandes

Confirmer le jugement dont appel

- Condamner la SA ALLIANZ à verser à monsieur [W] et à messieurs [R] et [C] [E], ès qualités d'héritiers de madame [O], la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du CPC.

- Les condamner aux entiers dépens.

Ils font valoir que le professeur [M] a conclu à l'existence d'une 'intoxication alimentaire dans les suites d'un repas au restaurant le 15 mai 2014 entraînant diarrhées, vomissements, déshydratation ; apparition progressive d'une insuffisance rénale ; cette insuffisance rénale est responsable d'un surdosage en METFORMINE qui sera lui-même responsable d'une acidose lactique qui est la cause directe de l'arrêt cardio-respiratoire responsable de lésions neurologiques graves et irréversibles du 23 mai 2014 et donc du décès survenu le [Date décès 5] 2014", que le docteur [G] a rendu le 3 juin 2022 un rapport aux

termes duquel il conclut ' le repas « contaminant » représente le départ du déroulement morbide des faits mais l'expert ne peut conclure, au vu des documents transmis, qu'il soit à l'origine, de façon certaine et directe, du décès de la patiente', que le professeur [M] retient pourtant que 'les troubles digestifs présentés par madame [O] le 15 mai 2014 au soir sont donc la cause initiale du décès de Mme [O]' le docteur Pierre [G] retient en conclusion que 'le repas «contaminant » représente le départ du déroulement morbide des faits' que cette conclusion est suffisante pour retenir le lien de causalité entre le repas et le décès de Mme [O], que le lien causal est établi non seulement par le rapport d'expertise, mais également par l'intoxication subie par madame [Y] qui a partager le repas de la victime et le rapport des services d'hygiène qui démontre que le non-respect des normes d'hygiène était récurant au sein du restaurant, notamment en raison du non-respect des règles de conservation et de cuisson des aliments, que les pièces produites démontrent que l'état sanitaire était le même en mai 2014 que lors du contrôle de juillet 2014 , que le contrôle ne pouvait qu'être réalisé a posteriori, faute de suspicion, que l'assureur ne produit aucun élément en contradiction avec les constatations que l'expert, qui a étudié l'enchaînement des faits, a retenu que le repas au restaurant était à l'origine l'intoxication alimentaire, cause du décès, que le résultat négatif des hémocultures est lié à la réalisation tardive de ce prélèvement, les bactéries ayant été éliminées durant ce laps de temps, que le rapport d'expertise indique que : « s'il y a une relation entre le repas incriminé du 15 mai 2014 et la diarrhée et les vomissements survenus le soir même, donc après une incubation courte, le mécanisme le plus probable est un mécanisme toxinique, soit lié à la consommation d'aliments avariés, ce qui serait le plus compatible avec les constatations faites le 10 juillet 2014, dans le restaurant « [17] », soit par la présence de toxines staphylococciques dont la présence pourrait être, elle aussi, en rapport avec le non-respect de la chaîne du froid'.

La CPAM de l'Hérault a été assignée le 9 octobre 2023 à peronne habilitée.

Maître [Z] pris en qualité de liquidateur de la SA La Corbeille a été assigné le 9 octobre 2023 par dépôt de l'acte à l'étude d'huissier.

L'arrêt sera rendu par défaut.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 28 février 2024.

Motivation

Motifs :

1) Sur les dommages causés par les produits défectueux :

Les dispositions de l'article L 221-1 dans sa version applicable au présent litige du code de la consommation 'Les produits et les services doivent présenter, dans des conditions normales d'utilisation ou dans d'autres conditions raisonnablement prévisibles par le professionnel, la sécurité à laquelle on peut légitimement s'attendre et ne pas porter atteinte à la santé des personnes'.

Cet article consacre le principe d'une obligation générale de sécurité des produits et d'une responsabilité de plein droit et sans faute au profit du consommateur pour les dommages causés par un défaut du produit. Un produit défectueux s'entend d'un produit qui n'offre pas la sécurité auquel on peut légitimement s'attendre. La participation du produit à la survenance du dommage est un préalable implicite et nécessaire à la recherche de la défectuosité du produit et du rôle causal de cette défectuosité.

Il incombe donc à la victime de prouver le dommage, le défaut et le lien de causalité entre eux pour obtenir réparation intégrale du dommage subi. La preuve de l'imputabilité du dommage au moins pour partie au défaut du produit incriminé peut être rapportée par tous moyens. Si le lien causal doit être direct et certain, il peut néanmoins établi par des présomptions graves, précises et concordantes, notamment en établissant que le produit défectueux a contribué à la survenue ou la gravité du dommage sans qu'il puisse être exigé que les pathologies aient été exclusivement causées par cette exposition.

Si la participation du produit à la survenance du dommage peut être établie au moyen de présomptions de fait, il incombe au juge de veiller à ce que les indices produits soient suffisamment graves, précis et concordants pour autoriser la conclusion selon laquelle l'administration du produit apparaît comme étant l'explication la plus plausible de la survenance du dommage, sans cependant qu'on puisse lui opposer l'absence de certitude scientifique. Le juge se prononce « selon sa propre liberté d'appréciation », et pas seulement sur la preuve certaine issue de la recherche médicale.

Il n'est nullement contesté que Mme [O] s'est rendue le 15 mai 2014 en compagnie de Mme [Y] pour déjeuner au restaurant [17] et qu'elle a présenté à l'issu de ce repas des diarrhées et des vomissements qui se sont accentués et ont entraîné son hospitalisation le 19 mai 2014.

Le professeur [N] [M], expert judiciaire désigné par le tribunal de grande instance de Montpellier retient comme cause du décès 'une insuffisance rénale aiguë compliquée par une acidose lactique dans la suite d'un épisode prolongé de diarrhées et de vomissement. La cause de cet épisode prolongé de diarrhées et de vomissements est difficile à établir. Il n'y a pas de preuve formelle d'une origine infectieuse puisque les deux seuls prélèvements bactériologiques réalisés, deux hémocultures le 22 mai 2014 sont restés stériles et qu'il n'y a pas eu de prélèvement de selles réalisé.' . Toutefois il conclut son rapport en affirmant que 'le scénario le plus probable est le suivant, intoxication alimentaire dans les suites d'un repas pris au restaurant le 15 mai 2014 entraînant diarrhées et vomissements et déshydratation, apparition progressive d'une insuffisance rénale. Cette insuffisance rénale est responsable du surdosage de Metformine qui sera responsable d'une acidose rénale qui est la cause directe de l'arrêt cardio-respiratoire responsable des lésions neurologiques graves et irréversibles du 23 mai 2014 et donc du décès survenu le [Date décès 5] 2014 du fait des dites lésions. Les troubles digestifs présentés par Mme [O] sont donc la cause initiale du décès'.

Les conclusions du rapport du professeur [M] permettent de retenir avec certitude un lien de causalité direct et certain entre l'intoxication alimentaire subie le 19 mai 2014 et le décès de Mme [O].

Toutefois le professeur [M] précise que la cause de l'intoxication alimentaire ne peut être établie avec certitude, même si le mécanisme le plus probable selon lui est un mécanisme toxinique lié à la consommation d'aliments avariés par la présence de toxines staphylococciques qui peuvent être en rapport avec une rupture de la chaîne du froid.

Il modère ses conclusions présentant également l'hypothèse d'une intoxication en rapport avec un repas pris antérieurement, l'incubation des maladies bactériennes est selon lui en général plus longue de l'ordre de 24 à 72 heures, en précisant néanmoins que la relation entre le repas du 15 mai et le décès est plausible, c'est même, selon ses dires, la cause la plus probable, même si elle n'est pas certaine.

En l'absence de certitude scientifique sur l'existence la cause de l'intoxication alimentaire subie, il convient de recourir aux présomptions du fait de l'homme, graves, précises et concordantes par l'utilisation d'un faisceau d'indices permettant de considérer comme établie l'existence d'un lien entre le fait litigieux et l'intoxication.

Or en l'espèce il existe une coïncidence chronologique puisque les diarrhées et vomissements sont intervenus à la suite de la prise du déjeuner le 15 mai 2014 et une concomitance puisque Mme [Y], qui a déjeuné le 15 mai en sa compagnie, a également souffert à l'issu de ce repas d'une gastro-entérite alors que M. [W], concubin de Mme [O] qui ne participait au repas litigieux mais aux repas pris antérieurement par Mme [O], affirme ne pas avoir été malade enfin que le délai d'incubation d'une gastro-entérite fixé à 24 à 72 heures par le professeur [M] n'est qu'une indication, le délai pouvant être réduit à quelques heures en cas d'ingestion d'aliments contaminés.

De surcroît, une enquête administrative diligentée le 4 juillet 2014 dans les cuisines du restaurant'[17]' par les services départementaux a permis de relever dix infractions concernant l'absence de surveillance de température des préparations culinaires réalisées à l'avance maintenues à température ambiante pendant plusieurs heures, une chaîne du froid et du chaud non maîtrisée et une infraction relative à la formation du personnel à l'hygiène alimentaire avec une méconnaissance des températures liées au respect de la chaîne du froid et de méthodes de nettoyage et désinfection.

Il est constant que le contrôle a été établi deux mois après la venue de Mme [O] dans le restaurant, il n'en résulte pas moins que les infractions reprochées corroborent l'hypothèse de l'ingestion d'un aliment contaminé lors du déjeuner le 15 mai 2014 en raison d'une violation des règles d'hygiène applicables en la matière.

Le docteur [G], commis par jugement du 29 juin 2021, a établi le 3 juin 2022 un rapport qui ne contredit nullement le faisceau d'indices graves et concordant attribuant le décès de Mme [O] au repas litigieux du 15 mai 2014 puisqu'il affirme en conclusions que le 'repas contaminant représente le départ du déroulement morbide des faits' en précisant toutefois qu'il ne peut conclure qu'il est à l'origine certaine et directe du décès de la patience.

L'ensemble de ces éléments rend rendre plausible un rapport de causalité direct entre le repas litigieux et l'intoxication alimentaire dénoncée. Les circonstances particulières retenues constituent des présomptions graves, précises et concordantes de nature à établir le caractère défectueux des aliments ingérés. Il existe un faisceau d'indices sérieux et concordants en faveur d'un lien d'imputabilité du décès de Mme [O] au repas pris le 15 mai 2014 ;

Si le lien entre le défaut et le dommage doit être direct et certain, il n'a pas à être exclusif et il ne peut être retenu, pour exclure le droit à indemnisation de Mme [O], que l'insuffisance diabétique, l'hypertension artérielle et l'hypercholestérolémie, dont elle souffrait, sont prédominantes dans la survenue de son décès. Il résulte des constatations médicales du professeur [M] que le décès est imputable, pour partie au moins, à une acidose lactique associée à la prise de Metformine, médicament préconisé pour soulager Mme [O] des suites de la gastro-entérite, cause initiale du décès. Ainsi que le précise le docteur [G] en réponse aux dires du conseil des intimés, si la cause du décès de Mme [O] est multi-factorielle, le repas constitue le départ du déroulement morbide des faits avec une succession de facteurs autres dont certains ont été aggravants.

Or, ouvre droit à réparation le dommage en lien causal avec le produit défectueux, même si celui ci n'en est pas la seule cause. En l'espèce, il est établi par des présomptions graves précises et concordantes l'imputabilité du dommage à l'ingestion due au repas du 15 mai 2014 sans qu'il soit exigé que le décès ait été exclusivement causé par cette intoxication alimentaire.

Le lien de causalité est direct et certain puisqu'en l'absence de l'intoxication alimentaire due au repas litigieux, le dommage ne se serait pas produit. Si l'ingestion de différents médicaments a pu avoir un rôle causal, cette pluralité de causes n'est de nature à faire obstacle à l'indemnisation du dommage par l'auteur initial, l'aliment contaminé ayant eu un effet déclenchant.

L'équité commande d'allouer la somme de 1 000euros à chacun des intimés sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Dispositif

Par ces motifs la cour statuant par arrêt contradictoire :

Confirme le jugement rendu le 29 juin 2021 par le tribunal judiciaire de [Localité 18] ;

Y ajoutant :

Condamne la SA Allianz à payer à Messieurs [C] et [R] [E] et Monsieur [W] la somme de 1 000euros chacun sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la SA Allianz aux entiers dépens.