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Décisions

CA Paris, Pôle 1 ch. 3, 21 mai 2024, n° 24/04147

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Délice et Création Distribution (SAS)

Défendeur :

Bourgogne Produits Frais (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Chazalette

Conseillers :

Mme Blanc, Mme Georget

Avocats :

Me Martin, Me Vignet

TC Auxerre, du 7 févr. 2024, n° 20230017…

7 février 2024

La société Délice et création distribution, qui est une filiale du groupe Pomona, exerce une activité de distribution de produits à destination des artisans boulangers pâtissiers.

Sa filiale, Délice et création Bourgogne (dite aussi Délice & Création, D&C, DGF ou DGF Bourgogne), située à [Localité 10], intervient dans les départements de [Localité 6], du [Localité 9], de [Localité 11], de [Localité 15] et de [Localité 7].

La société Bourgogne produits frais, affiliée au réseau 'France frais', exerce une activité de grossiste en produits alimentaires. Son siège social est également situé à [Localité 10].

Courant juin 2023, M. [D], précédemment directeur commercial au sein de la société Délice et création distribution a quitté cette dernière pour rejoindre en juillet suivant la société France frais en qualité de directeur du développement commercial en charge de la branche boulangerie pâtisserie.

MM. [K], [J] ,[W] et [Z] et Mme [O], qui exerçaient des fonctions commerciales au sein de la société Délice et création Bourgogne ont démissionné respectivement les 10 mars 11 mai, 20, 23 juin et 10 juillet 2023. Ils ont rejoint la société Bourgogne produits frais en tant que commerciaux.

Une clause de non-concurrence était insérée dans les contrats de travail de MM. [Z], [J] et [W].

Le 21 novembre 2023, la société Délice et création distribution a fait délivrer une sommation à la société Bourgogne produits frais afin qu'elle justifie des conditions d'embauche des cinq salariés précités et qu'elle cesse de participer à la violation des engagements de non-concurrence de certains d'eux.

Par acte extrajudiciaire du 29 novembre 2023, elle a fait assigner la société Bourgogne produits frais devant le juge des référés du tribunal de commerce d'Auxerre aux fins d'obtenir la désignation d'un commissaire de justice pour qu'il soit procédé à une mesure d'instruction au siège de la société Bourgogne produits frais et qu'il soit enjoint à cette dernière, sous astreinte, de cesser d'employer MM. [Z], [W] et [J] dans le périmètre d'activité de la succursale Délice et création de Monéteau et de cesser ses agissements de concurrence et notamment d'utiliser et d'exploiter les informations commerciales, les fichiers clients, les dossiers techniques des produits de Délice et création distribution et qui ont été détournés par les salariés débauchés par elle.

Par ordonnance contradictoire du 7 février 2024, le juge des référés du tribunal de commerce d'Auxerre a :

débouté la société Délice et création distribution de sa demande de désignation d'un huissier au vu de l'article 145 du code de procédure civile ;

débouté la société Délice et création distribution de sa demande d'interdire à MM [Z], [J], [W], de se déplacer dans certains départements ;

débouté la société Délice et création distribution de se demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile ;

condamné la société Délice et création distribution aux entiers dépens.

Par déclaration du 4 mars 2024, la société Délice et création distribution a relevé appel de cette décision en critiquant l'ensemble des chefs de son dispositif.

Par ordonnance du 7 mars 2024, la société Délice et création distribution a été autorisée à assigner à jour fixe pour l'audience du 2 avril, l'assignation devant être délivrée avant le 14 mars suivant.

Par assignation du 12 mars 2024, dont l'appelant a remis copie au greffe de la cour le 15 suivant, la société Délice & création distribution a fait citer la société Bourgogne produits frais en demandant de :

la déclarer recevable et bien fondée en son appel ;

en conséquence,

infirmer l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions, et statuant à nouveau,

la déclarer bien fondée en sa demande de mesure d'instruction en application de l'article 145 du code de procédure civile ;

designer tel huissier compétent dans le ressort du tribunal avec pour mission de :

se rendre dans les locaux de la société Bourgogne produits frais, situés [Adresse 13] et au Parc d'activités Les Terres, [Adresse 14] ou en tout autre lieu où serait assuré sa gestion administrative et/ou son activité commerciale, et

1) sur les conditions d'embauche de MM. [Z], [J], [W], [K] et Mme [O]

rechercher et prendre immédiatement copie du registre de son personnel de la société Bourgogne produits frais,

rechercher et prendre immédiatement copie de la liste des véhicules de sociétés dont la société Bourgogne produits frais est locataire ou propriétaire avec l'immatriculation des véhicules,

rechercher et prendre immédiatement copie de tous documents physiques comme informatique, sous quelque forme que ce soit, et en particulier tous fichiers / dossiers du personnel, tous fichiers/dossiers de recrutement sur les dates d'entrée, conditions d'emploi et d'embauche des personnes suivantes :

M. [Z],

M. [J],

M. [W],

M. [K],

Mme [O]

en ce compris les échanges et correspondances, promesses d'embauche, projets de contrat, contrats et avenants, contrat de travail, et tout autre contrat formalisant une relation professionnelle ou commerciale avec les personnes précitées ;

2) sur le détournement de clientèle

rechercher et prendre immédiatement copie de tous documents, physiques comme informatiques, sous quelque forme que ce soit, concernant :

le listing des appels entrants et sortants reçus par M. [Z] sur la ligne téléphonique (06.60.72.33.57) mise à sa disposition par la société Bourgogne produits frais, entre le 1er août 2023 et le 21 novembre 2023,

le listing des appels entrants et sortants reçus par M. [K] sur la ligne téléphonique (06.59.67.12.31) mise à sa disposition par la société Bourgogne produits frais, entre le 1er juin 2023 et le 21 novembre 2023,

le listing des appels entrants et sortants reçus par M. [J] sur la ligne téléphonique mise à sa disposition par la société Bourgogne produits frais, entre le 1er août 2023 et le 21 novembre 2023,

le listing des appels entrants et sortants reçus par M. [W] sur la ligne téléphonique mise à sa disposition par la société Bourgogne produits frais, entre le 1er août 2023 et le 21 novembre 2023,

le listing des appels entrants et sortants reçus par Mme [O] sur la ligne téléphonique mise à sa disposition par la société Bourgogne produits frais, entre le 1er août 2023 et le 21 novembre 2023,

se faire remettre par la société Délice et création distribution, préalablement à l'exécution de sa mission, la liste des clients de sa succursale de [Localité 10] situés dans les départements de [Localité 6], du [Localité 9], de [Localité 11], de [Localité 15], et de [Localité 7] ;

rechercher et prendre immédiatement copie de tous documents, physiques comme informatiques, sous quelque forme que ce soit, permettant de dresser la liste des clients de la société Bourgogne produits frais situés dans les départements de [Localité 6], du [Localité 9], de [Localité 11], de [Localité 15], et de [Localité 7] et ce, pour rechercher et identifier les noms et adresses des clients communs avec ceux figurant sur la liste de la succursale Délice et création distribution de [Localité 10] ;

rechercher et prendre immédiatement copie sur tous documents, physiques comme informatiques, sous quelque forme que ce soit les extraits de comptes clients de la société Bourgogne produits frais implantés les départements de [Localité 6], du [Localité 9], de [Localité 11], de [Localité 15], et de [Localité 7] et ce depuis le mois de juin 2023, et ce, pour rechercher et identifier les noms et adresses des clients communs avec ceux figurant sur la liste de la succursale Délice et création distribution de [Localité 10] ;

consigner et retranscrire dans son procès-verbal les noms et adresses des clients communs avec ceux figurant sur la liste des clients de la succursale de [Localité 10] situés dans les départements de [Localité 6], du [Localité 9], de [Localité 11], de [Localité 15], et de [Localité 7] ;

rechercher et prendre immédiatement copie de tous documents, physiques comme informatiques, sous quelque forme que ce soit, tous courriers, devis, bons de commande, factures, correspondances, courriels, documents contractuels échangés ou conclus entre la société Bourgogne produits frais et chacun des clients communs, entre le 1er juin 2023 et le 21 novembre 2023 ;

rechercher et prendre immédiatement copie sur tous les serveurs et ordinateurs, tous documents physiques comme informatiques et en particulier tous courriers, tous échanges de mails, correspondances, et documents contractuels, entre le 1er juin 2023 et le 21 novembre 2023, avec :

M. [Z],

M. [J],

M. [W],

M. [K],

Mme [O],

en relation avec la 'liste des clients' de la succursale Délice et création distribution de [Localité 10] (ou anciennement dénommée 'DGF Bourgogne') ;

rechercher et prendre immédiatement copie sur les messageries professionnelles de :

M.[Z](notamment depuis ou vers l'adresse [Courriel 3])

M. [J] (notamment depuis ou vers l'adresse [Courriel 12])

M. [W] ([Courriel 8] )

M. [K] ([Courriel 5] )

Mme [O] ([Courriel 4]) ;

tous échanges en relation avec les noms figurant sur la liste des clients de la succursale Délice et création distribution de [Localité 10] dans les départements de [Localité 6], du [Localité 9], de [Localité 11], de [Localité 15], et de [Localité 7] ;

pour l'exécution de la mesure d'instruction, il est demandé au président du tribunal d'autoriser l'huissier à :

accéder, dans les locaux de la société Bourgogne produits frais, situés [Adresse 13] et au Parc d'activités Les Terres, [Adresse 14] ou en tout autre lieu où seraient assurées sa gestion administrative et/ou son activité commerciale, à tous postes informatiques et logiciel local ou distant, et aux serveurs distants y compris ceux hébergés par un tiers, et à tous autres supports (externes et internes) de données informatiques, aux fins d'y rechercher les éléments nécessaires au bon accomplissement de la mission, à 1'exclusion de toute correspondance échangée avec un avocat, et,

réaliser les recherches sur le ou les disques durs des ordinateurs de bureau ou ordinateurs portables mis à la disposition des salariés de la société Bourgogne produits frais, tout logiciel local ou distant, et tout serveur distant y compris ceux hébergés par un tiers, et tout autre support (externes et internes) de données informatiques, et de façon plus générale, sur tous les supports où sont stockés les éléments nécessaires au bon accomplissement de la mission, et notamment, les correspondances, messageries, fichiers électroniques (clé USB, cartes SD et MS, CD-Rom, tablette, téléphone, Smartphone, etc), auprès de tous les services de Stockages externes en ligne ou en Cloud tels que notamment : Dropbox, Mozy, Sugarsync, Box.com, SkyDrive, GoogleDrive, Carbonite, SpiderOak, iCloud, BlackBlaze, AmazoneCloud Drive,

y compris, sur les messageries professionnelles de MM. [Z], [J], [W], [K] et Mme [O] ;

y compris, le cas échéant, sur les correspondances, messageries et fichiers qui auraient été supprimés ;

à partir des mots clés suivants, au pluriel ou au singulier, avec ou sans accent, en mots éventuellement combinés :

- [T] [Z]

- [P] [J]

- [L] [W]

- [X] [K]

- [H] [O]

- [A] [D]

- « Délice et Création » , « Délice & Création » , « D&C »

- « DGF » , « DGF Bourgogne »

- Les saveurs d'écrevolles

- Boulangerie de la Moline

- L'épicerie Ludivine

- [G]

- Le fournil de Jacques et Nadine

- Le fournil de Manon et [E]

- Colruyt Retail France SAS

- [V] [N]

- [C] [S]

et des noms des clients figurant sur la « liste des clients » remises par la société Délice et création distribution ;

prendre copie des documents sur papier objet de la mission ;

prendre des photos et/ou des copies sur supports papier, et/ou informatique, des éléments trouvés, ainsi que sur tout matériel jugé nécessaire par lui, à défaut, utiliser ses propres moyens de copies ;

et:

autoriser le ou les huissier(s) instrumentaires désignés à se faire assister de tout huissier territorialement compétent ;

autoriser le ou les huissier(s) instrumentaires désignés à se faire assister, pour l'aider dans sa mission par tout technicien de son choix, notamment en matière informatique et à se faire assister par un serrurier (en cas de nécessité d'accéder à une pièce fermée, à un coffre ou une armoire fermée) et de la force publique en cas de nécessité ;

autoriser le ou les huissier(s) instrumentaires, avec l'aide du ou des experts informatiques, à installer tout logiciel ou brancher tous périphériques pour les besoins des opérations ;

autoriser le ou les huissier(s) instrumentaires, avec l'aide du ou des experts informatiques, plus généralement, à effectuer toutes observations d'activités informatiques (déplacements de fichiers, connexions, déconnexions, mises hors tension, manipulations de supports, ... ) susceptibles d'être en lien avec sa mission ;

autoriser le ou les huissier(s) instrumentaires à se faire communiquer par toute(s) personne(s) dont le/les ordinateurs et messageries sera/seront soumis à expertise les adresses mails, codes d'accès, notamment informatiques nécessaires à l'exécution de sa mission et à accéder à l'ensemble des documents présents, identifiés ou non comme personnels ;

autoriser le ou les huissier(s) instrumentaires, avec l'aide du ou des experts informatiques, à prendre des photos et/ou copies sur support papier et ou informatique des éléments trouvés, ainsi que sur tout matériel jugé nécessaire par lui ;

autoriser le ou les huissier(s) instrumentaires, avec l'aide du ou des experts informatiques, si nécessaire, à procéder à l'extraction des disques durs des unités centrales des ordinateurs concernés, à leur examen à l'aide des outils d'investigation de son choix, puis à la remise en place de ces disques durs dans leur unité centrale respective après en avoir fait copie ;

autoriser l'huissier, en cas de difficultés sur place notamment dans la sélection et le tri des éléments recherchés, notamment au regard de leur volume à effectuer la copie intégrale des données auxquelles il aura eu accès en rapport avec la mission confiée, sur tout support de son choix, afin que les mesures soient effectuées au sein de son étude, la copie intégrale des données étant détruite après l'accomplissement de la mission ;

autoriser le ou les huissier(s) instrumentaires à consigner toutes déclarations faites au cours des opérations en relation avec la mission, mais en s'abstenant de toute interpellation autre que celles nécessaires à l'accomplissement de celle-ci ;

dire que les représentants de la société Bourgogne produits frais devront s'abstenir d'entraver de quelque manière que ce soit les opérations, notamment en verrouillant l'accès physique ou logique aux ordinateurs, dossiers et messageries ;

dans l'hypothèse où la bonne fin de la mission pourrait être compromise du fait d'une obstruction, d'un obstacle technique tenant à la volumétrie des informations, ou de l'impossibilité d'utiliser sur place les outils nécessaires ;

autoriser le ou les huissier(s) instrumentaires, avec l'aide du ou des experts informatiques, le requis présent ou appelé, à procéder à une copie complète en deux exemplaires des fichiers, des disques durs et autres supports de données qui lui paraîtront en rapport avec la mission confiée ;

une copie sera placée sous séquestre et servira de référentiel et ne sera pas transmise à aucune des parties ;

l'autre copie servira à l'huissier(s) instrumentaires, avec l'aide du ou des experts informatiques, à procéder de manière différée à l'ensemble des recherches et analyses relevant de la présente mission ;

dire que l'expert en informatique assistant 1'huissier devra au préalable établir une note technique établissant la traçabilité de ces opérations ;

dire que l'huissier annexera à son constat le compte rendu détaillé des opérations techniques réalisées par l'expert en informatique ;

dire qu'il sera dressé un procès-verbal des opérations effectuées lors de cette expertise ;

autoriser ou les huissier(s) instrumentaires à prendre une copie en deux exemplaires, 1'une étant destinée à la société Délice et création distribution, afin d'utilisation dans le cadre d'une éventuelle expertise judiciaire ou procédure au fond, et l'autre qui restera annexée au procès-verbal, des fichiers et courriers électroniques identifiés en rapport avec la mission sous forme numérique ou sur tout autre support (clefs « USB » , CD, DVD et autres disques durs externes, ou support papier) ;

dire que l'huissier(s) instrumentaires et le(s) experts informatiques, devra s'interdire de collecter des informations manifestement personnelles et sans rapport avec la présente mission ;

fixer la provision de l'huissier ;

dire que l'huissier procèdera à sa mission dans un délai de deux mois à compter du versement de la provision ;

dire que les résultats de cette expertise leurs seront remis ;

pour apporter la preuve des agissements de concurrence déloyale commis par la société Bourgogne produits frais à son préjudice et leur étendue ;

la déclarer bien fondée en sa demande de cessation du trouble manifestement illicite résultant de la participation de la société Bourgogne produits frais à la violation d'engagements de non concurrence par MM. [Z], [W], [J] et ce en application de l'article 873 du code de procédure civile ;

faire interdiction à la société Bourgogne produits frais d'employer M. [Z] dans le périmètre d'activité de la succursale Délice & Création de [Localité 10], à savoir, dans les départements suivants : [Localité 6], [Localité 9], [Localité 11], [Localité 15] et [Localité 7], et ce jusqu'au 22 juillet 2024, sous astreinte comminatoire de 2 000 euros par jour de retard à compter du prononcé de l'ordonnance ;

faire interdiction à la société Bourgogne produits frais d'employer M. [W] dans le périmètre d'activité de la succursale Délice & Création de [Localité 10], à savoir, dans les départements suivants : [Localité 6], [Localité 9], [Localité 11], [Localité 15] et [Localité 7], et ce jusqu'au 19 juillet 2024, sous astreinte comminatoire de 2 000 euros par jour de retard à compter du prononcé de l'ordonnance ;

faire interdiction à la société Bourgogne produits frais d'employer M. [J] dans le périmètre d'activité de la succursale Délice & Création de [Localité 10], à savoir, dans les départements suivants : [Localité 6], [Localité 9], [Localité 11], [Localité 15] et [Localité 7] et ce jusqu'au 11 août 2024, sous astreinte comminatoire de 2 000 euros par jour de retard à compter du prononcé de l'ordonnance ;

enjoindre à la société Bourgogne produits frais de cesser ses agissements de concurrence déloyale, sous astreinte de 2 000 euros par infraction constatée et notamment d'utiliser et d'exploiter sous quelque forme que ce soit. et de quelque manière que ce soit les informations commerciales, les fichiers clients, les dossiers techniques des produits de Délice et création distribution et qui ont été détournés par les salariés débauchés par elle ;

dire et juger qu'il serait inéquitable de laisser à sa charge les frais irrépétibles de justice qu'elle a été contrainte d'exposer pour faire valoir ses droits ;

condamner la société Bourgogne produits frais à lui verser une somme de 10 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

condamner la société Bourgogne produits frais, en tous les dépens.

Dans ses dernières conclusions déposées et notifiées le 28 mars 2024, la société Bourgogne produits frais demande à la cour de :

débouter la société Délice et création distribution de sa demande de désignation d'huissier ;

débouter las société Délice et création distribution de ses demandes tendant à faire interdiction d'employer MM. [Z], [W] et [J], avec demande d'astreinte.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties susvisées pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.

Sur ce,

Sur la mesure d'instruction

En vertu de l'article 145 du code de procédure civile, s'il existe un motif légitime de conserver ou d'établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d'un litige, les mesures d'instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé sur requête ou en référé.

Sur l'existence d'un motif légitime

La société Délice et création fait valoir que, dans la perspective d'une action en concurrence déloyale, elle a intérêt à obtenir des éléments de preuve sur les agissements de la société intimée. Elle souligne notamment qu'elle souhaite voir préciser les conditions dans lesquelles les cinq salariés exerçant des fonctions commerciales en son sein ont été simultanément engagés par l'intimée qui venait également d'embaucher son ancien directeur commercial. Elle indique rechercher des preuves relatives aux manoeuvres déloyales employées dans ce cadre et, plus particulièrement, si des conditions d'embauche particulièrement favorables ont été appliquées aux salariés concernés. Elle ajoute souhaiter obtenir des éléments permettant d'établir que la société Bourgogne produits frais exploite son fichier-clientèle et d'autres données commerciales couvertes par le secret des affaires détournées par ses anciens salariés.

En réponse, la société intimée fait valoir que la société appelante n'apporte pas la preuve de ses affirmations sur l'existence de manoeuvres déloyales.

Cependant, le juge a, sur le fondement de l'article 145 susmentionné, le pouvoir de prendre, non seulement des mesures propres à assurer la conservation des preuves, mais aussi celles qui tendent à leur établissement. Il ne saurait dès lors être fait grief à la société Délice et création distribution de ne pas apporter la preuve formelle des agissements qu'elle impute à la société Bourgogne produits frais pour lui refuser le bénéfice de la mesure qu'elle demande et dont l'objet est précisément d'améliorer sa situation probatoire.

Au surplus, la société appelante présente d'ores et déjà des faits précis, objectifs et vérifiables rendant plausible l'existence d'agissements de concurrence déloyale imputables à la société intimée.

En effet, cinq de ses salariés exerçant des fonctions commerciales au sein de sa succursale de [Localité 10], soit une partie significative de ses effectifs, ont démissionné de manière concomitante sur une période de trois mois pour être engagés comme commerciaux par la société Bourgogne produits frais qui avait déjà précédemment embauché son ancien directeur commercial. Par ailleurs, malgré la sommation qui lui a été faite, cette dernière a refusé de justifier des conditions d'embauche des salariés concernés. En outre, sur la même période, la société Bourgogne produits frais, qui proposait précédemment ses produits essentiellement à des entreprises de restauration commerciale et collective, a développé une nouvelle ligne destinée aux professionnels de la boulangerie et de la pâtisserie, se positionnant ainsi comme concurrent direct de la société Délice et création sur ce segment de marché et dans le même secteur géographique que sa succursale de [Localité 10]. En outre, certains des salariés débauchés ont été vus par des enquêteurs privés contacter des clients de la société Délice et création de [Localité 10] qui faisaient préalablement partie de leur portefeuille. Surtout, l'un d'entre eux a démarché par courriel un client de la succursale Délice et création de [Localité 10] en se prévalant expressément de son expérience chez la société appelante et de sa connaissance du secteur pour proposer 'des prix très compétitifs'.

En outre, le courriel de transmission de ce message indique qu'il fait suite à une conversation téléphonique aux termes de laquelle M. [K] a tenté de 'démontrer qu'il était mieux placé au niveau prix que anciennement DGF'. Enfin, le chiffre d'affaires de l'appelante a chuté de près de 30% entre août et octobre 2023 alors qu'il avait augmenté de 0,4% entre janvier et juillet précédents.

Si la société intimée fait valoir que l'appelante dispose ainsi d'ores et déjà des éléments nécessaires à une éventuelle action au fond en concurrence déloyale, la société Délice et création distribution soutient à juste titre que, dans la perspective d'un procès potentiel, elle est bien fondée à obtenir des éléments supplémentaires sur la réalité et l'étendue des manoeuvres déloyales qu'elle pourrait imputer à son concurrent concernant plus particulièrement les circonstances de l'embauche de ses anciens salariés et l'éventuelle utilisation de ses données comerciales dont son fichier-clientèle, la mesure sollicitée étant effectivement de nature à améliorer sa situation probatoire sur ces deux points.

Il en ressort que l'appelante démontre suffisamment la possibilité d'un procès potentiel, non manifestement voué à l'échec, sur la base d'un fondement juridique suffisamment déterminé, à savoir l'engagement de la responsabilité de la société intimée pour des actes de concurrence déloyale, procès éventuel dont la solution peut dépendre de la mesure d'instruction sollicitée qui a pour objet, d'une part, de préciser les conditions dans lesquelles les salariés ont été engagés par son concurrent et, d'autre part, de dresser la liste des clients de la société Bourgogne produits frais communs avec ceux de la succursale Délice et création distribution de [Localité 10] dans les départements de [Localité 6], du [Localité 9], de [Localité 11], de [Localité 15], et de [Localité 7] ainsi que de la réalité et du contenu des contacts entre les salariés concernés et lesdits clients.

Sur le caractère légalement admissible de la mesure

Il résulte de l'article 145 du code de procédure civile que constituent des mesures légalement admissibles des mesures d'instruction circonscrites dans le temps et dans leur objet et proportionnées à l'objectif poursuivi. Il incombe au juge de vérifier si la mesure ordonnée était nécessaire à l'exercice du droit à la preuve du requérant et proportionnée aux intérêts antinomiques en présence.

La société intimée soutient, sans davantage de précision, que les mesures sollicitées constituent des mesures d'investigation générale qui excèdent les prévisions de l'article 145 du code de procédure civile en s'apparentant à une perquisition civile dans une entreprise commerciale.

Cependant, au cas présent, la mesure est strictement circonscrite dans le temps à savoir du 1er juin 2023 jusqu'au 21 novembre 2023 et dans l'espace puisque limitée aux départements de [Localité 6], du [Localité 9], de [Localité 11], de [Localité 15] et de [Localité 7].

Concernant l'embauche litigieuse, la mesure sollicitée est limitée aux cinq salariés concernés et tend à obtenir, outre la liste des véhicules utilisés par la société intimée, la remise de documents relatifs aux conditions de leur recrutement. Elle n'est pas de ce fait de nature à porter atteinte au droit de tiers et au secret des affaires et est proportionnée au but recherché.

Par ailleurs, compte tenu de la recherche de la preuve d'un éventuel détournement de clientèle, l'obtention de la liste des clients de la société Bourgogne produits frais aux fins de la croiser avec celle de la société Délice et création distribution pour obtenir un état des clients communs apparaît comme proportionnée au regard du droit à la preuve de la société appelante.

En outre, la nature des mots clés utilisés pour les recherches, à savoir les noms des salariés concernés, les différentes appellations de la société appelante et le nom des clients de celle-ci est de nature à restreindre le champ des investigations au seul but poursuivi.

Il en ressort que la mesure demandée, circonscrite dans le temps et dans son objet, nécessaire à l'exercice du droit à la preuve du requérant et proportionnée aux intérêts antinomiques en présence, doit être ordonnée.

La décision entreprise qui a rejeté la demande à ce titre devra être infirmée de ce chef.

Sur l'application des dispositions de l'article L.153-1 du code de commerce

L'article L.151-1 du code du commerce dispose qu'est protégée au titre du secret des affaires toute information répondant aux critères suivants :

1° Elle n'est pas, en elle-même ou dans la configuration et l'assemblage exacts de ses éléments, généralement connue ou aisément accessible pour les personnes familières de ce type d'informations en raison de leur secteur d'activité ;

2° Elle revêt une valeur commerciale, effective ou potentielle, du fait de son caractère secret ;

3° Elle fait l'objet de la part de son détenteur légitime de mesures de protection raisonnables, compte tenu des circonstances, pour en conserver le caractère secret

L'article L.153-1 du code de commerce dispose que lorsqu' à l'occasion d'une instance civile ou commerciale ayant pour objet une mesure d'instruction sollicitée avant tout procès au fond ou à l'occasion d'une instance au fond, il est fait état ou est demandée la communication ou la production d'une pièce dont il est allégué par une partie ou un tiers ou dont il a été jugé qu'elle est de nature à porter atteinte à un secret des affaires, le juge peut, d'office ou à la demande d'une partie ou d'un tiers, si la protection de ce secret ne peut être assurée autrement et sans préjudice de l'exercice des droits de la défense :

1° Prendre connaissance seul de cette pièce et, s'il l'estime nécessaire, ordonner une expertise et solliciter l'avis, pour chacune des parties, d'une personne habilitée à l'assister ou la représenter, afin de décider s'il y a lieu d'appliquer des mesures de protection prévues au présent article ;

2° Décider de limiter la communication ou la production de cette pièce à certains de ses éléments, en ordonner la communication ou la production sous une forme de résumé ou en restreindre l'accès, pour chacune des parties, au plus à une personne physique et une personne habilitée à l'assister ou la représenter ;

3° Décider que les débats auront lieu et que la décision sera prononcée en chambre du conseil ;

4° Adapter la motivation de sa décision et les modalités de publicité de celle-ci aux nécessités de la protection du secret des affaires

Au cas présent, au regard de l'étendue de la mission confiée au commissaire de justice, les pièces qui seront saisies sont susceptibles de porter atteinte au secret des affaires selon les critères susmentionnés.

Il convient dès lors de décider que la cour prendra d'abord connaissance seule des pièces saisies afin de décider s'il y a lieu d'appliquer d'autres mesures de protection prévues à l'article L.153-1 susmentionné. Pour l'effectivité de cette mesure les pièces saisies seront, à l'issue des opérations du commissaire de justice, placées sous séquestre par ce dernier.

Pour permettre l'examen des pièces, les débats seront réouverts à une audience qui se tiendra en chambre du conseil selon les modalités prévues au dispositif.

Sur le trouble manifestement illicite

En application de l'article 873 du code de procédure civile, le président peut même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

Le trouble manifestement illicite procède de toute perturbation résultant d'un fait qui directement ou indirectement constitue une violation évidente de la règle de droit. La charge de la preuve de l'illicéité du trouble et de son caractère manifeste incombe à celui qui s'en prévaut.

Sur l'interdiction d'employer les salariés tenus d'une clause de non-concurrence

Le seul fait pour une entreprise d'employer sciemment un salarié en violation d'une clause de non-concurrence le liant à son ancien employeur est constitutif de concurrence déloyale, sans qu'il soit nécessaire d'établir à son encontre l'existence des manoeuvres déloyales.

Ainsi, la juridiction des référés, lorsqu'elle se trouve en présence de la violation flagrante d'une clause de non-concurrence dont la validité ne paraît pas pouvoir être remise en cause peut ordonner sous astreinte à un nouvel employeur qui avait embauché un salarié obligé par une clause de non-concurrence de ne pas continuer à employer celui-ci pendant la durée de l'interdiction.

Le constat du trouble manifestement illicite résultant de la violation d'une clause de non-concurrence suppose cependant que la licéité de cette clause soit préalablement établie avec évidence.

Pour être valable, la clause de non-concurrence doit d'abord être indispensable à la protection des intérêts légitimes de l'employeur, compte tenu non seulement de la nature de l'emploi du salarié, de sa qualification professionnelle et de ses fonctions, elle doit ensuite être limitée non seulement dans le temps, mais aussi dans l'espace, pour que le salarié concerné puisse conserver, en dehors de ces restrictions temporelle et géographique, la possibilité d'exercer une activité correspondant à sa qualification et à son expérience professionnelle et, enfin, en contrepartie de l'interdiction imposée au salarié d'exercer son activité professionnelle, l'employeur doit, réciproquement, s'engager à lui verser une indemnité compensatrice réelle et suffisante.

Pour obtenir l'infirmation de la décision qui a rejeté sa demande de voir enjoint au nouvel employeur de cesser d'employer MM. [J], [W] et [Z], l'appelante fait valoir que la société intimée participe à la violation de la clause de non-concurrence à laquelle ces trois salariés sont contractuellement tenus.

En réponse, la société Bourgogne produits frais fait valoir que le conseil de prud'hommes serait seul compétent pour trancher le litige concernant la contestation d'une clause figurant dans un contrat de travail. Elle ne présente cependant aucune demande à ce titre aux termes du dispositif de ses écritures qui seul saisit la cour. En tout état de cause, seul le tribunal de commerce est compétent pour trancher comme en l'espèce un litige entre commerçants et les contestations qui s'y rapportent de sorte que cette exception est infondée. Au surplus, la cour d'appel dispose d'une plénitude de juridiction.

Pour s'opposer aux mesures demandées, la société intimée ajoute que le trouble illicite n'est pas caractérisé dans la mesure où MM. [J] et [W] ont contesté la validité de leur clause de non-concurrence auprès de leur employeur que M. [Z] l'a parfaitement respectée.

Le contrat de M. [J] stipule en son article 11 que, après la rupture de celui-ci, pour quelque cause que ce soit, le salarié s'interdit pendant une durée d'un an à compter de la cessation effective de ses fonctions au sein de la société d'exercer sous quelque forme que ce soit, une activité concurrente à celle de l'entreprise. Cette interdiction est toutefois limitée au département bourguignons. En cas de violation de son obligation de non-concurrence, M. [J] versera à la société à titre de dommages et intérêts une somme égale au montant des salaires nets perçus au cours des douze derniers mois précédant la fin effective de son contrat.

Pour leur part, les contrats de travail de M. [Z] et de M. [W] prévoient que ces salariés s'engagent à ne pas entrer au service d'une entreprise concurrente ni à collaborer directement ou indirectement à toute fabrication, tout commerce ou toute autre activité pouvant concurrencer les articles ou produits commercialisés ou les activités de la société Délice et création distribution et des entreprises de Délice et création distribution. Cette clause de non-concurrence est limitée aux concurrents directs des entreprises de Délice et création distribution ainsi qu'aux industriels spécialisés intervenant auprès de la clientèle de la boulangerie, de la pâtisserie, de la chocolaterie, de la confiserie et de la restauration sur la zone géographique du périmètre d'intervention de l'établissement auquel le salarié est rattaché. Cette interdiction de concurrence s'applique pendant la durée d'un an à compter de la date de rupture effective du contrat. En contrepartie de cette obligation de non-concurrence, les salariés percevront, pendant toute la durée de l'interdiction, une indemnité mensuelle égale à 25% du salaire brut moyen de leurs douze derniers mois d'appartenance à la société.

Ainsi, la clause figurant dans le contrat de M. [J] ne prévoit pas de contrepartie financière à l'interdiction imposée au salarié. Par ailleurs, l'application de la clause de non-concurrence de MM [W] et [Z] est limitée au 'périmètre d'intervention de l'établissement auquel ces salariés sont rattachés', sans davantage de précision sur la zone géographique concernée.

Dès lors, au regard des critères susmentionnés, la licéité de ces clauses n'est pas établie avec évidence.

Par ailleurs et surtout, alors que la société Délice et création distribution sollicite une mesure d'instruction pour améliorer sa situation probatoire sur les agissements déloyaux des salariés concernés, la violation de l'interdiction posée par ces clauses, même à les supposer valables, ne saurait être considérée comme avérée.

Il en ressort que le trouble manifestement illicite n'est pas caractérisé de telle sorte qu'il n'y a pas lieu à référé sur la demande de faire injonction à l'intimée de cesser d'employer MM. [J], [Z] et [W].

La décision entreprise sera confirmée de ce chef.

Sur l'injonction à la société Bourgogne Produits Frais de cesser ses agissements de concurrence déloyale et notamment d'utiliser et d'exploiter les informations commerciales, les fichiers clients, les dossiers techniques des produits de Délice et création distribution et qui ont été détournés par les salariés débauchés par elle

Le démarchage de la clientèle d'un concurrent, même de la part d'un ancien salarié, est licite. Il constitue néanmoins un acte de concurrence déloyale, susceptible de constituer un trouble manifestement illicite s'il est accompagné d'un acte déloyal ou contraire aux usages du commerce, ces manoeuvres pouvant consister notamment en une utilisation des listes, fichiers ou autres renseignements sur l'entreprise concurrente frauduleusement soustraits ou encore en un démarchage dans des conditions de nature à créer ou entretenir une confusion entre les deux entreprises.

Au cas présent, la société Délice et création distribution fait valoir que les salariés engagés par la société intimée ont utilisé pour le compte de cette dernière des informations commerciales, des fichiers clients et des dossiers techniques des produits qu'ils ont détournés.

Cependant, alors qu'elle sollicite une mesure d'instruction pour améliorer sa situation probatoire sur ce point, elle ne saurait simultanément se prévaloir de l'existence d'un trouble manifestement illicite avéré de ce chef.

Dès lors, il n'y a pas lieu à référé sur la demande de faire injonction à l'intimée de cesser d'utiliser et d'exploiter les informations commerciales, les fichiers clients, les dossiers techniques des produits de Délice et création distribution.

La décision sera confirmée de ce chef.

Sur les demandes accessoires

Le défendeur à une mesure d'expertise n'est pas une partie perdante au sens de l'article 696 du code de procédure civile. La décision de première instance sera confirmée de ce chef.

Compte tenu de la réouverture partielle des débats, les demandes au titre des dépens et des frais irrépétibles seront réservées.

PAR CES MOTIFS

Confirme la décision entreprise en ses dispositions soumises à la cour sauf en ce qu'elle rejette la demande de mesure d'instruction ;

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant ;

Désigne la société Qualijuris 89, [Adresse 2] [XXXXXXXX01] www.scp-martin-total.fr, commissaires de justice, avec pour mission de :

se rendre dans les locaux de la société Bourgogne produits frais, situés [Adresse 13] et au Parc d'activités Les Terres, [Adresse 14] ou en tout autre lieu où serait assuré sa gestion administrative et/ou son activité commerciale, et :

1) Sur les conditions d'embauche de MM. [Z], [J], [W], [K] et Mme [O]

rechercher et prendre copie du registre de son personnel de la société Bourgogne produits frais,

rechercher et prendre copie de la liste des véhicules de sociétés dont la société Bourgogne produits frais est locataire ou propriétaire avec l'immatriculation des véhicules,

rechercher et prendre immédiatement copie de tous documents physiques comme informatique, sous quelque forme que ce soit, et en particulier tous fichiers / dossiers du personnel, tous fichiers/dossiers de recrutement sur les dates d'entrée, conditions d'emploi et d'embauche des personnes suivantes :

M. [Z],

M. [J],

M. [W],

M. [K],

Mme [O]

en ce compris les échanges et correspondances, promesses d'embauche, projets de contrat, contrats et avenants, contrat de travail, et tout autre contrat formalisant une relation professionnelle ou commerciale avec les personnes précitées ;

2) Sur le détournement de clientèle

rechercher et prendre immédiatement copie de tous documents, physiques comme informatiques, sous quelque forme que ce soit, concernant :

le listing des appels entrants et sortants reçus par M. [Z] sur la ligne téléphonique (06.60.72.33.57) mise à sa disposition par la société Bourgogne produits frais, entre le 1er août 2023 et le 21 novembre 2023,

le listing des appels entrants et sortants reçus par M. [K] sur la ligne téléphonique (06.59.67.12.31) mise à sa disposition par la société Bourgogne produits frais, entre le 1er juin 2023 et le 21 novembre 2023,

le listing des appels entrants et sortants reçus par M. [J] sur la ligne téléphonique mise à sa disposition par la société Bourgogne produits frais, entre le 1er août 2023 et le 21 novembre 2023,

le listing des appels entrants et sortants reçus par M. [W] sur la ligne téléphonique mise à sa disposition par la société Bourgogne produits frais, entre le 1er août 2023 et le 21 novembre 2023,

le listing des appels entrants et sortants reçus par Mme [O] sur la ligne téléphonique mise à sa disposition par la société Bourgogne produits frais, entre le 1er août 2023 et le 21 novembre 2023,

se faire remettre par la société Délice et création distribution, préalablement à l'exécution de sa mission, la liste des clients de sa succursale de [Localité 10] situés dans les départements de [Localité 6], du [Localité 9], de [Localité 11], de [Localité 15], et de [Localité 7] ;

rechercher et prendre immédiatement copie de tous documents, physiques comme informatiques, sous quelque forme que ce soit, permettant de dresser la liste des clients de la société Bourgogne produits frais situés dans les départements de [Localité 6], du [Localité 9], de [Localité 11], de [Localité 15], et de [Localité 7] et ce, pour rechercher et identifier les noms et adresses des clients communs avec ceux figurant sur la liste de la succursale Délice et création distribution de [Localité 10] ;

rechercher et prendre immédiatement copie sur tous documents, physiques comme informatiques, sous quelque forme que ce soit les extraits de comptes clients de la société Bourgogne produits frais implantés les départements de [Localité 6], du [Localité 9], de [Localité 11], de [Localité 15], et de [Localité 7] et ce depuis le mois de juin 2023, et ce, pour rechercher et identifier les noms et adresses des clients communs avec ceux figurant sur la liste de la succursale Délice et création distribution de [Localité 10] ;

consigner et retranscrire dans son procès-verbal les noms et adresses des clients communs avec ceux figurant sur la liste des clients de la succursale de [Localité 10] situés dans les départements de [Localité 6], du [Localité 9], de [Localité 11], de [Localité 15] et de [Localité 7] ;

rechercher et prendre immédiatement copie de tous documents, physiques comme informatiques, sous quelque forme que ce soit, tous courriers, devis, bons de commande, factures, correspondances, courriels, documents contractuels échangés ou conclus entre la société Bourgogne produits frais et chacun des clients communs, entre le 1er juin et le 21 novembre 2023 ;

rechercher et prendre immédiatement copie sur tous les serveurs et ordinateurs, tous documents physiques comme informatiques et en particulier tous courriers, tous échanges de mails, correspondances, et documents contractuels, entre le 1er juin et le 21 novembre 2023, avec :

M. [Z],

M. [J],

M. [W],

M. [K],

Mme [O],

en relation avec la 'liste des clients' de la succursale Délice et création distribution de [Localité 10] (ou anciennement dénommée 'DGF Bourgogne') ;

rechercher et prendre immédiatement copie sur les messageries professionnelles de :

M.[Z](notamment depuis ou vers l'adresse [Courriel 3])

M. [J] (notamment depuis ou vers l'adresse [Courriel 12])

M. [W] ([Courriel 8] )

M. [K] ([Courriel 5] )

Mme [O] ([Courriel 4]) ;

tous échanges en relation avec les noms figurant sur la liste des clients de la succursale Délice et création distribution de [Localité 10] dans les départements de [Localité 6], du [Localité 9], de [Localité 11], de [Localité 15], et de [Localité 7] ;

Pour l'exécution de la mesure d'instruction, le commissaire de justice est autorisé à :

accéder, dans les locaux de la société Bourgogne produits frais, situés [Adresse 13] et au Parc d'activités Les Terres, [Adresse 14] ou en tout autre lieu où seraient assurées sa gestion administrative et/ou son activité commerciale, à tous postes informatiques et logiciel local ou distant, et aux serveurs distants y compris ceux hébergés par un tiers, et à tous autres supports (externes et internes) de données informatiques, aux fins d'y rechercher les éléments nécessaires au bon accomplissement de la mission, à 1'exclusion de toute correspondance échangée avec un avocat ;

réaliser les recherches sur le ou les disques durs des ordinateurs de bureau ou ordinateurs portables mis à la disposition des salariés de la société Bourgogne produits frais, tout logiciel local ou distant, et tout serveur distant y compris ceux hébergés par un tiers, et tout autre support (externes et internes) de données informatiques, et de façon plus générale, sur tous les supports où sont stockés les éléments nécessaires au bon accomplissement de la mission, et notamment, les correspondances, messageries, fichiers électroniques (clé USB, cartes SD et MS, CD-Rom, tablette, téléphone, Smartphone, etc), auprès de tous les services de Stockages externes en ligne ou en Cloud tels que notamment : Dropbox, Mozy, Sugarsync, Box.com, SkyDrive, GoogleDrive, Carbonite, SpiderOak, iCloud, BlackBlaze, AmazoneCloud Drive,

y compris, sur les messageries professionnelles de MM. [Z], [J], [W], [K] et Mme [O] ;

y compris, le cas échéant, sur les correspondances, messageries et fichiers qui auraient été supprimés ;

à partir des mots clés suivants, au pluriel ou au singulier, avec ou sans accent, en mots éventuellement combinés :

- [T] [Z]

- [P] [J]

- [L] [W]

- [X] [K]

- [H] [O]

- [A] [D]

- « Délice et Création » , « Délice & Création » , « D&C »

- « DGF » , « DGF Bourgogne »

- Les saveurs d'écrevolles

- Boulangerie de la Moline

- L'épicerie Ludivine

- [G]

- Le fournil de Jacques et Nadine

- Le fournil de Manon et [E]

- Colruyt Retail France SAS

- [V] [N]

- [C] [S]

et des noms des clients figurant sur la liste des clients remises par la société Délice et création distribution ;

prendre copie des documents sur papier objet de la mission ;

prendre des photos et/ou des copies sur supports papier, et/ou informatique, des éléments trouvés, ainsi que sur tout matériel jugé nécessaire par lui, à défaut, utiliser ses propres moyens de copies ;

- se faire assister, pour l'aider dans sa mission par tout technicien de son choix, notamment en matière informatique et à se faire assister par un serrurier (en cas de nécessité d'accéder à une pièce fermée, à un coffre ou une armoire fermée) et de la force publique en cas de nécessité ;

installer tout logiciel ou brancher tous périphériques pour les besoins des opérations ;

effectuer toutes observations d'activités informatiques (déplacements de fichiers, connexions, déconnexions, mises hors tension, manipulations de supports, ... ) susceptibles d'être en lien avec sa mission ;

se faire communiquer par toute(s) personne(s) dont le/les ordinateurs et messageries sera/seront soumis à expertise les adresses mails, codes d'accès, notamment informatiques nécessaires à l'exécution de sa mission et à accéder à l'ensemble des documents présents, identifiés ou non comme personnels ;

prendre des photos et/ou copies sur support papier et ou informatique des éléments trouvés, ainsi que sur tout matériel jugé nécessaire par lui ;

procéder à l'extraction des disques durs des unités centrales des ordinateurs concernés, à leur examen à l'aide des outils d'investigation de son choix, puis à la remise en place de ces disques durs dans leur unité centrale respective après en avoir fait copie ;

effectuer, en cas de difficultés sur place notamment dans la sélection et le tri des éléments recherchés, notamment. au regard de leur volume la copie intégrale des données auxquelles il aura eu accès en rapport avec la mission confiée, sur tout support de son choix, afin que les mesures soient effectuées au sein de son étude, la copie intégrale des données étant détruite après l'accomplissement de la mission ;

consigner toutes déclarations faites au cours des opérations en relation avec la mission, mais en s'abstenant de toute interpellation autre que celles nécessaires à l'accomplissement de celle-ci ;

- procéder, dans l'hypothèse où la bonne fin de la mission pourrait être compromise du fait d'une obstruction, d'un obstacle technique tenant à la volumétrie des informations, ou de l'impossibilité d'utiliser sur place les outils nécessaires à une copie complète en deux exemplaires des fichiers, des disques durs et autres supports de données qui lui paraîtront en rapport avec la mission confiée une copie devant être placée sous séquestre et servira de référentiel et ne sera pas transmise à aucune des parties, l'autre copie servira à l'huissier(s) instrumentaires, avec l'aide du ou des experts informatiques, à procéder de manière différée à l'ensemb1e des recherches et analyses relevant de la présente mission ;

- dit que l'expert en informatique assistant l'huissier devra au préalable établir une note technique établissant la traçabilité de ces opérations ;

- dit que le commissaire de justice annexera à son constat le compte rendu détaillé des opérations techniques réalisées par l'expert en informatique ;

- autorise le ou les huissier(s) instrumentaires à prendre une copie des fichiers et courriers électroniques identifiés en rapport avec la mission sous forme numérique ou sur tout autre support (clefs « USB » , CD, DVD et autres disques durs externes, ou support papier) ;

- dire que l'huissier(s) instrumentaires et le(s) experts informatiques, devra s'interdire de collecter des informations manifestement personnelles et sans rapport avec la présente mission ;

- fixe la provision du commissaire de justice à la somme de 3 000 euros à la charge de la société Délice et création distribution ;

- dit que l'huissier procèdera à sa mission dans un délai de trois mois à compter du versement de la provision ;

- dit qu'à l'issue des opérations un fichier d'inventaire sera établi et que les pièces saisies seront placées sous séquestre ;

- enjoint à la société Qualijuris 89, en qualité de commissaire de justice instrumentaire et séquestre, de remettre alors sans délai à la société Bourgogne produits frais, sur une clé USB, une copie de l'ensemble des éléments collectés en exécution du présent arrêt ainsi que le fichier d'inventaire, et de dresser procès-verbal de cette diligence ;

- enjoint à la société Bourgogne produits frais de procéder à un tri des pièces séquestrées en trois catégories, devant chacune comporter un inventaire précis des pièces contenues :

. catégorie A : les pièces qui pourront être communiquées en l'état sans examen ;

. catégorie B : les pièces qui sont concernées par le secret des affaires et qu'elle refuse de communiquer ;

. catégorie C : les pièces qu'elle refuse de communiquer mais qui ne sont pas concernées par le secret des affaires ;

- enjoint à la société Bourgogne produits frais de communiquer ce tri, qui sera accompagné d'une numérotation distincte, à la société Qualiusris 89, en qualité de commissaires de justice instrumentaires et séquestres, au plus tard le 12 octobre 2024 pour un contrôle de cohérence avec les fichiers initiaux séquestrés ;

- ordonne la réouverture partielle des débats à l'audience en chambre du conseil du 22 octobre 2024 à 10h30 salle Tocqueville 4-Z-10 pour examen des pièces saisies ;

- enjoint à la société Bourgogne produits frais de remettre à cette audience :

1°) la communication du procès-verbal de remise de la copie des pièces séquestrées et du contrôle de cohérence effectué par les huissiers instrumentaires, sous forme de note ou de procès-verbal ;

2°) la version confidentielle intégrale des pièces de catégories B ;

3°) une version non confidentielle ou un résumé des mêmes pièces ;

4°) un mémoire précisant les motifs conférant aux pièces de catégorie B le caractère d'un secret des affaires ;

Indique aux parties qu'elles pourront être entendues ensemble ou séparément pour un propos liminaire, conformément au dernier alinéa de l'article R. 153-3 du code de commerce, avant que l'examen des pièces commence hors la présence de la partie requérante (appelante).

Limite la présence à l'audience en chambre du conseil à deux personnes physiques par partie, outre les avocats.

Révoque l'ordonnance de clôture ;

Dit que l'affaire sera clôturée à nouveau le 5 décembre 2024 à 10h00 salle de procédure E0-K-20 et renvoie les parties à l'audience publique du lundi 6 janvier 2025 à 9h30, salle Portalis 2-Z-60 pour que l'affaire soit plaidée au fond ;

Réserve les demandes de condamnation aux dépens et au titre des frais irrépétibles.