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Décisions

CA Nîmes, 4e ch. com., 17 mai 2024, n° 22/01309

NÎMES

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Demandeur :

Expertise Comptable (SARL)

Défendeur :

Gestion Paye Social Audit et Conseil (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Codol

Conseillers :

Mme Ougier, Mme Vareilles

Avocats :

Me Brun, Me Baralo-Cazeneuve, Me Combe

T. com. Nimes, du 11 mars 2022, n° 2017J…

11 mars 2022

EXPOSÉ

Vu l'appel interjeté le 11 avril 2022, enregistré le 13 avril 2022, par la SARL Expertise Comptable [...] à l'encontre du jugement prononcé le 11 mars 2022 par le tribunal de commerce de Nîmes dans l'instance n° 2017J00378.

Vu les dernières conclusions remises par la voie électronique le 22 décembre 2022 par l'appelante et le bordereau de pièces qui y est annexé.

Vu les dernières conclusions remises par la voie électronique le 15 février 2023 par la société GPS Audit et Conseil, intimée, et le bordereau de pièces qui y est annexé.

Vu l'ordonnance du 22 août 2023 de clôture de la procédure à effet différé au 28 mars 2024.

* * *

La SARL Expertise Comptable [...] (ci-après dénommée SECORR) est une société d'expertise comptable. Elle a pour associés M. [N] et M. [U].

La société Gestion Paye Social, Audit et Conseil (ci-après dénommée GPS Audit et Conseil) dont Mme [Y], ancienne salariée de la société SECORR, est la gérante et l'associée majoritaire, a quant à elle pour activité la gestion sociale d'entreprises (notamment l'élaboration des payes et des déclarations sociales).

Le capital social était divisé en 314 parts sociales de 30 € chacune et réparties comme suit :

Mme [K] [Y] (gérante) 284 parts sociales, soit 90 % du capital social.

M. [X] [N] 15 parts sociales, soit 5 % du capital social.

M. [Z] [U] 15 parts sociales, soit 5 % du capital social.

A compter du 28 mars 2013, la société SECORR a sous-traité toutes les prestations sociales de ses clients, ainsi que la gestion du social de son propre cabinet à la société GPS Audit et Conseil.

Le 31 octobre 2016, les sociétés SECORR et GPS Audit Conseil ont signé un contrat de prestation de services à durée indéterminée, avec une période minimale incompressible de 3 ans, ayant pour objet la gestion sociale exclusive de tous les clients de la société SECORR ainsi que la gestion sociale des salariés du Cabinet SECORR par la société GPS Audit et Conseil .

Des désaccords entre la société SECORR et la société GPS Audit et Conseil sont apparus et les parties ont décidé de mettre un terme à ce contrat de prestation de services en signant, le 22 mars 2017, un protocole transactionnel.

Aux termes dudit protocole, la société GPS Audit et Conseil s'était notamment engagée à :

- Poursuivre sa mission, pour les dossiers de M. [N], jusqu'au 15 juillet 2017, et à restituer à la société SECORR, l'intégralité des dossiers clients (papier et informatique) gérés par M. [N] à la fin de sa mission,

- Poursuivre sa mission, pour les dossiers de M. [U], jusqu'au 15 janvier 2018, et à restituer à la société SECORR, l'intégralité des dossiers clients (papier et informatique) gérés par M. [U] à la fin de sa mission.

En contrepartie, la société SECORR s'était notamment engagée à :

- Régler la société GPS Audit et Conseil pour ses prestations, ainsi qu' une indemnité de fin de contrat de 30 000 €, payable pour moitié au plus tard le 24 mars 2017, ce qui a été fait, et pour l'autre moitié en janvier 2018.

Et les associés de la société SECORR se sont engagés à :

- Céder immédiatement les parts sociales qu'ils détenaient à leur valeur nominale, et non à la valeur vénale, dans la société GPS Audit et Conseil à Mme [Y] ce qui a été fait selon acte de cession de parts du 30 avril 2017.

La restitution des dossiers de M. [N] est intervenue le 18 juillet 2017 en présence d'un huissier de Justice.

Le mercredi 27 septembre 2017, Mme [Y] s'est présentée devant les locaux de la société SECORR, accompagnée d'un huissier de Justice et a déposé divers cartons comprenant les dossiers papiers des clients de la société SECORR .

Par courrier recommandé du 29 septembre 2017, la société SECORR a pris acte du refus d'exécution unilatéral de la part de la société GPS Audit et Conseil du protocole signé le 22 mars 2017.

Par exploit du 23 octobre 2017, la société SECORR a fait assigner la société GPS Audit et Conseil en résiliation fautive du protocole transactionnel devant le tribunal de commerce de Nîmes qui, par jugement du 11 mars 2022, a :

- Dit que la SECORR est à l'origine de la rupture du protocole transactionnel,

- condamné la SECORR à payer à la société GPS Audit et Conseil le solde de l'indemnité transactionnelle d'un montant de 15.000 €.

- Débouté la société GPS Audit et Conseil de sa demande reconventionnelle en dommages et intérêts,

- Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Code de Procédure Civile, -Rejeté toutes autres demandes, fins et conclusions contraires ;

- condamné la société SECORR aux dépens.

Le 11 avril 2022, la société SECORR a interjeté appel de cette décision.

Dans ses dernières conclusions reçues par la voie électronique, la société SECORR, appelante, demande à la cour de :

« VU l'article 1212 du Code civil,

VU l'article 1217 du code civil,

VU l'article 1231-1 du Code civil,

VU l'article L. 442-1 II du Code de commerce,

VU les pièces versées au débat et notamment l'article 13 de la convention du 22 mars 2017

JUGER l'appel diligenté par la société SECORR recevable et bien fondé.

INFIRMER le jugement rendu le 11 mars 2022, par le Tribunal de Commerce de NIMES dont appel, en ce qu'il a :

DIT que la SECORR est à l'origine de la rupture du protocole transactionnel ;

CONDAMNE la SECORR à payer à la société GESTION PAYE SOCIAL, AUDIT ET CONSEIL le solde de l'indemnité transactionnelle d'un montant de 15.000 € ;

DIT n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;

CONDAMNE la SOCIETE D'EXPERTISE COMPTABLE [...] (SECORR) aux dépens de l'instance que le Tribunal liquide et taxe à la somme de 74,18 euros en ce non compris le coût de la citation introductive d'instance, le coût de la signification de la présente décision, ainsi que tous autres frais et accessoires ;

REJETER les plus amples demandes de la société SECORR

Statuant à nouveau

PRENDRE ACTE de la résiliation brutale et anticipée, le 27 septembre 2017, du contrat du 22 mars 2017 aux torts exclusifs de la société GPS AUDIT ET CONSEIL.

En conséquence,

JUGER que le contrat du 22 mars 2017 a été résilié brutalement et par anticipation par la société GPS AUDIT ET CONSEIL le 27 septembre 2017.

JUGER que la rupture brutale et anticipée du contrat par la société GPS AUDIT ET CONSEIL rend caduc le versement de l'indemnité de 15.000 € par la société SECORR.

JUGER que la Société SECORR n'a pas à verser la deuxième partie de l'indemnité de l'indemnité transactionnelle de 15.000€ payable au terme dudit contrat en janvier 2018

Pour le surplus,

JUGER que la rupture brutale et anticipée du contrat par la société GPS AUDIT ET CONSEIL a causé divers préjudices à la société SECORR.

En conséquence,

CONDAMNER la société GPS AUDIT ET CONSEIL à payer et porter à la société SECORR la somme 10 000€ à titre de préjudice matériel, avec intérêt au taux légal à compter de la délivrance de l'assignation.

CONDAMNER la société GPS AUDIT ET CONSEIL à payer et porter à la société SECORR la somme 15 000€ à titre de préjudice moral, avec intérêt au taux légal à compter de la délivrance de l'assignation.

Sur l'appel incident formé par la société GPS AUDIT ET CONSEIL, CONFIRMER le jugement dont appel en ce qu'il a rejeté les demandes de la société GPS AUDIT ET CONSEIL tentant à voir condamner la société SECORR au paiement de dommages et intérêts pour rupture brutale des relations commerciales établies.

REJETER les demandes, fins et prétentions de la société GPS AUDIT ET CONSEIL à ce titre,

REJETER les demandes nouvelles de la société GPS AUDIT ET CONSEIL tendant à voir condamner la société SECORR au remboursement de la somme de 15.600 € au titre des factures de décembre 2015, prétendument infondées,

En tout état de cause,

REJETER l'intégralité des demandes, fins et prétentions de la société GPS AUDIT ET CONSEIL,

CONDAMNER la société GPS AUDIT ET CONSEIL à payer et porter à la société SECORR la somme de 5.000 € par application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile outre le remboursement des entiers dépens. »

Au soutien de ses prétentions, l'appelante expose que c'est la société GPS Audit et Conseil a pris l'initiative de rompre, unilatéralement, le contrat de transaction à durée déterminée du 22 mars 2017, qui la liait à la société SECORR en restituant, avant le terme du 15 janvier 2018, l'intégralité des dossiers clients de cette dernière. Elle indique n'avoir fait que prendre acte du refus d'exécution unilatéral de la société GPS Audit et Conseil par courrier recommandé du 29 septembre 2017, la société SECORR a pris acte du refus d'exécution unilatéral. L'appelante soutient que le protocole transactionnel a été librement signé par les parties. L'appelante conteste avoir provoqué des coupures informatiques, celle du 18 mars 2017 étant indépendante de sa volonté et ayant également paralysé son cabinet.

Elle relève que cette coupure est de toute façon antérieure à la signature du protocole et ne peut donc démontrer une volonté d'inexécution de celui-ci. Elle réfute toute panne informatique en juillet 2017 au motif que l'intimée n'avait simplement plus accès aux dossiers de [X] [N](sigle BR), puisque sa mission pour ce dernier s'était terminée le 30 juin 2017 mais qu'elle gardait l'accès aux dossiers de M. [Z] [U].

Elle soutient que la rupture brutale et anticipée du contrat par la société GPS AUDIT ET CONSEIL (et donc la non-exécution par elle du contrat jusqu'à son terme) rend caduc le versement de l'indemnité de 15.000 € par la société SECORR.

Elle estime qu'en résiliant le contrat à trois jours de la fin du mois de septembre 2017, elle a mis en difficulté 59 des clients de la société SECORR dans l'établissement des 220 payes de leurs salariés, et par voie de conséquence le cabinet d'expertise comptable SECORR lui-même. De plus, quelques jours après la rupture fautive de la transaction, la société SECORR a appris que la société GPS Audit et Conseil proposait, de manière totalement déloyale, aux clients de la société SECORR de réaliser directement les payes de leurs entreprises.

Le tout lui a causé un préjudice matériel important qu'elle évalue 10 000€. Elle invoque également un préjudice moral important évalué à 15 000 euros, notamment en termes d'images de marques auprès de ses clients, de désorganisation grave du fonctionnement de la société SECORR. Elle se plaint d'un véritable « harcèlement » de la part de la société GPS Audit et Conseil.

L'appelante prétend que la société GPS Audit et Conseil est mal fondée à invoquer les dispositions de l'article L. 442-1 II du Code de commerce à son encontre alors que la brutalité de la rupture résulte de l'attitude de la société GPS Audit et Conseil.

Elle conclut à l'irrecevabilité de la demande en remboursement de factures sous couvert de l'application des dispositions de l'article L. 442-1 II du Code de commerce, car il s'agit d'une demande nouvelle au sens de l'article 566 du code de procédure civile.

Elle dénie à la société GPS Audit et Conseil tout préjudice et ce d'autant plus que, seule l'éventuelle perte de marge brute à raison de l'insuffisance ou de l'absence de préavis, est indemnisable en matière de rupture brutale des relations commerciales établies et non la perte de chiffre d'affaires elle-même.

Dans ses dernières conclusions reçues par la voie électronique, la société GPS Conseil, intimée, demande à la cour de :

« Vu le protocole signé entre les parties

Vu l'article 1217 du code civil,

Vu l'article L. 442-1 II du Code de commerce,

Vu les pièces versées au débat,

Dire et juger que l'appel formé par la société SECORR est mal fondé

En conséquence

L'en débouté et la débouter de ses fins, moyens et conclusions

En conséquence,

Constater que la société SECORR est à l'origine de la rupture du protocole transactionnel compte tenu de son comportement déloyal empêchant la société GPS Audit et conseil de travailler ;

Constater que ce comportement a provoqué la résolution du protocole de la société GPS Audit et Conseil pour inexécution de la transaction sur le fondement de l'article 1217 du code civil ;

Constater que le solde de 15 000 euros HT n'a jamais été versé à la société GPS Audit et Conseil au motif que Madame [Y] a rompu brutalement le contrat à ses torts

En conséquence :

Réformer le jugement entrepris en ce qu'il n'a pas condamné la société SECORR à payer des dommages et intérêts

Condamner la société SECORR à verser à la société GPS Audit et Conseil le solde de l'indemnité transactionnelle d'un montant de 15 000 euros mais encore ; au remboursement des fausses factures (pièces 18 et 19) pour un montant total de 15 600 euros ; au paiement de la facture des prestations sociales réellement effectuées par la société GPS à la demande de la société Secorr pour un montant de 2 682 euros ; outre

100 000 euros correspondant au salaire que Madame [Y] aurait dû percevoir pour ces 3 ans de dommages et intérêts en réparation de la perte du chiffre d'affaires pour brusque rupture sur le fondement de l'article L. 442-1 I, du Code de commerce,

Condamner la société SECORR à verser à la société GPS Audit et Conseil la somme de 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamner la société SECORR aux entiers dépens de l'instance. »

Au soutien de ses prétentions, la société GPS Audit et Conseil expose que la société SECORR lui a coupé l'accès au serveur le 21 mars 2017 ce qui a notamment conduit à la signature d'un protocole transactionnel le lendemain ; qu'après avoir exécuté sa mission avec Monsieur [N], l'accès au portefeuille de ce dernier lui a été interdit le 17 juillet 2017 alors que certains dossiers de Monsieur [U] avaient été transférés vers ce portefeuille. Madame [Y] se voyait en outre refuser l'accès au cabinet.

Elle soutient que, dès lors, elle a adressé un courriel à l'appelante le 31 juillet 2017 pour indiquer la rupture à son tort, de sorte qu'elle n'effectuerait ses prestations que jusqu'au 1er septembre 2017.

Elle affirme n'avoir eu de cesse que de demander à Monsieur [U] en septembre 2017 une date pour la restitution des dossiers, qui a finalement eu lieu le 27 septembre 2017 par un huissier de justice compte tenu du fait que Monsieur [U] ne s'était pas présenté au rendez-vous.

Elle fait valoir que la réparation de l'inexécution du protocole doit être faite en lui allouant non seulement la somme de 15 000 euros mais aussi un remboursement de fausses factures pour un montant de 15 600 euros, le paiement de la facture de prestations sociales d'un montant de 2 682 euros et la somme de 100 000 euros correspondant au salaire qu'elle aurait dû percevoir pendant 3 ans si elle n'avait subi une perte de chiffre d'affaires dû à la rupture brutale de la convention de prestation.

Pour un plus ample exposé il convient de se référer à la décision déférée et aux conclusions visées supra.

DISCUSSION

Sur la rupture du protocole transactionnel :

En application de l'article 1217 du code civil, dans sa version applicable en l'espèce, « La partie envers laquelle l'engagement n'a pas été exécuté, ou l'a été imparfaitement, peut :

- refuser d'exécuter ou suspendre l'exécution de sa propre obligation ;

- poursuivre l'exécution forcée en nature de l'obligation ;

- solliciter une réduction du prix ;

- provoquer la résolution du contrat ;

- demander réparation des conséquences de l'inexécution.

Les sanctions qui ne sont pas incompatibles peuvent être cumulées ; des dommages et intérêts peuvent toujours s'y ajouter. »

Selon l'article 1226 du code civil, « le créancier peut, à ses risques et périls, résoudre le contrat par voie de notification. Sauf urgence, il doit préalablement mettre en demeure le débiteur défaillant de satisfaire à son engagement dans un délai raisonnable.

La mise en demeure mentionne expressément qu'à défaut pour le débiteur de satisfaire à son obligation, le créancier sera en droit de résoudre le contrat.

Lorsque l'inexécution persiste, le créancier notifie au débiteur la résolution du contrat et les raisons qui la motivent.

Le débiteur peut à tout moment saisir le juge pour contester la résolution. Le créancier doit alors prouver la gravité de l'inexécution. »

Malgré de longs développements de part et d'autre sur l'ancienneté de la profonde discorde opposant les parties, il y a lieu de relever qu'aucune d'entre elles ne remet en cause le protocole transactionnel signé le 22 mars 2017. Dès lors, la coupure informatique de la veille, non contestée dans sa matérialité par la société SECORR ne peut être retenue comme une cause d'inexécution de celui-ci.

Les causes de la rupture tiennent, selon la société GPS Audit et Conseil en la dissimulation de nouveaux dossiers de Monsieur [U] dans la partie du serveur dédié à Monsieur [N], dont elle a été privée d'accès en juillet 2017, après exécution de la première partie de la mission.

Ce détournement est établi par le constat d'huissier du 25 juillet 2017 pour deux dossiers « [D] [G] » et « [C] ».

Pourtant, la veille, les parties s'étaient engagées (pièce 37 de l'intimée) à s'échanger toutes informations utiles des portefeuilles clients liées à la mission sociale de la société GPS Audit et Conseil.

Le 28 juillet 2017, Mme [Y] informe le cabinet SECORR qu'elle passera le lundi 31 juillet pour établir sa mission de facturation des clients de son associé (Monsieur [N]) car son accès est coupé.

L'intimée expose qu'à cette occasion, elle a « pu vérifier que les dossiers de Monsieur [U] étaient dissimulés sous le portefeuille de Monsieur [N] » qui lui étaient inaccessible.

Elle ne précise pas de quels dossiers il s'agit, ni leur nombre.

Elle fait état de l'envoi d'un mail le 31 juillet 2017 qui « indiquait la rupture aux torts de la société SECORR » et son engagement d'assurer « la prestation jusqu'au retour des vacances de Monsieur [U], soit jusqu'au 1er septembre 2017. »

Ce courriel n'est pas produit, il n'est d'ailleurs pas mentionné dans le bordereau de communication de pièces.

Monsieur [U] et Mme [Y] se sont vus le 14 août 2017 (pièce 39 de l'intimée) sans que le contenu du courriel de Mme [Y] ne porte sur cette rupture du protocole transactionnel.

Il résulte de ce qui précède que Mme [Y] est à l'initiative de la rupture du protocole transactionnel et elle n'a eu de cesse ensuite de vouloir déposer les dossiers clients à la société SECORR, pour finalement les faire remettre par huissier de justice le 27 septembre 2017.

Contrairement à ce qu'elle indique, la société SECORR n'a pas donné son accord à cette remise et le constat d'huissier n'établit rien à ce sujet, mais bien au contraire le refus de Monsieur [U] d'avoir ces dossiers à son cabinet.

Elle n'a adressé aucune mise en demeure préalable à la société SECORR, laquelle affirmait dans un courriel du 26 septembre 2017 ne faisant l'objet d'aucun commentaire de sa part que le dossier [C] avait été récupéré par la société GPS Conseil et Audit le 9 septembre 2017, deux autres dossiers ayant été transférés courant août.

Il ressort en outre des différents courriels entre les parties que Madame [Y] a pu se déplacer au cabinet le 31 juillet, le 14 août 2017 et le 26 septembre 2017 alors même qu'elle travaille en principe à distance.

L'inexécution dont elle se prévaut, à savoir le détournement de deux dossiers, dont l'un aurait d'ailleurs été restitué début septembre 2017, n'est pas suffisamment grave pour entraîner la rupture d'un protocole qui aurait dû se terminer en fin d'année.

Dès lors, le jugement doit être infirmé car la résolution du contrat est intervenue aux torts de la société GPS Audit et Conseil.

En conséquence, la société GPS Audit et Conseil doit être déboutée de ses demandes en réparation de préjudices issus de l'inexécution du protocole, l'article L. 442-1 II du code de commerce étant inapplicable à son profit puisque la rupture brutale lui est totalement imputable. Pour les mêmes raisons, elle doit être déboutée de sa demande en paiement du solde de l'indemnité de fin de contrat d'un montant de 15 000 euros.

La société SECORR invoque un préjudice matériel dont elle ne justifie aucunement et un préjudice moral établi en matière d'image de marque, compte tenu de la proposition de la société GPS Audit et Conseil faite à certains clients de la société SECORR de traiter directement avec eux. Son préjudice sera justement réparé par le versement de dommages intérêts d'un montant de 3 000 euros avec intérêts au taux légal à compter du 23 octobre 2017, date de l'assignation.

Sur les frais de l'instance :

La société GPS Audit et Conseil, qui succombe, devra supporter les dépens de première instance, d'appel et payer à la société SECORR une somme équitablement arbitrée à 3 500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La Cour, statuant par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Infirme le jugement déféré sauf en ce qu'il a débouté la société GPS Audit et Conseil de sa demande reconventionnelle en dommages-intérêts,

Et statuant à nouveau,

Dit que la résiliation brutale et anticipée, le 27 septembre 2017, du contrat du 22 mars 2017 est intervenue aux torts exclusifs de la société GPS Audit et Conseil,

En conséquence,

Dit que cette résiliation unilatérale rend caduque le versement de l'indemnité de 15.000 € par la société SECORR.

Condamne la société GPS Audit et Conseil à payer à la société SECORR la somme 3 000 € en réparation de son préjudice moral, avec intérêt au taux légal à compter du 23 octobre 2017,

Condamne la société GPS Audit et Conseil à payer à la société SECORR la somme de 3 500 € par application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.

Condamne la société GPS Audit et Conseil aux dépens de première instance et d'appel.