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Décisions

Cass. 2e civ., 2 mars 2023, n° 21-17.561

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Pireyre

Rapporteur :

Mme Bonnet

Avocat général :

Mme Trassoudaine-Verger

Avocat :

SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés

Aix-en-Provence, du 12 mai 2021

12 mai 2021

Faits et procédure

1. Selon l'ordonnance attaquée, rendue par le premier président d'une cour d'appel (Aix-en-Provence, 12 mai 2021), le 14 avril 2021, la société Gaia (la société) et Mme [R] ont déposé une requête en récusation à l'encontre de la présidente d'une chambre d'un tribunal judiciaire, pour l'affaire les concernant.

Recevabilité du pourvoi examinée d'office

2. Conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, avis a été donné aux parties.

3. Selon l'article 344, alinéa 1, du code de procédure civile, dans sa rédaction issue du décret n° 2017-892 du 6 mai 2017, la demande de récusation ou de renvoi pour cause de suspicion légitime est portée devant le premier président de la cour d'appel. Elle est formée par acte remis au greffe de la cour d'appel. Selon l'article 345, alinéas 1 et 2, du même code, dans sa rédaction issue du même décret, le président de la juridiction faisant l'objet d'une demande de renvoi pour cause de suspicion légitime ou à laquelle appartient le magistrat dont la récusation est demandée, ainsi que le magistrat concerné, sont avisés par tout moyen par le premier président de la requête dont il est saisi. Selon le cas, le président de la juridiction ou le magistrat concerné est invité à présenter ses observations. Lorsque le magistrat concerné s'abstient, le président de la juridiction en informe sans délai le premier président. Selon l'article 346 du même code, dans sa rédaction issue du même décret, le premier président statue sans débat dans le délai d'un mois à compter de sa saisine après avis du procureur général.

4. Il résulte de la combinaison de ces textes que seul le requérant étant partie à la procédure de récusation, le pourvoi ne peut être dirigé contre le magistrat visé par la requête en récusation, qui n'est pas partie à cette procédure, ni contre le procureur général près la cour d'appel, qui est partie jointe. Toutefois, ce pourvoi, qui concerne une procédure dans laquelle seul le requérant est partie, est recevable, même en l'absence de défendeur.

5. Dès lors, le pourvoi de la société et de Mme [R], irrecevable en ce qu'il est dirigé contre Mme [D], magistrat visé par la requête en récusation, est recevable même en l'absence de défendeur.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, pris en sa seconde branche, et sur le second moyen, pris en sa seconde branche, ci-après annexés

6. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le premier moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

7. La société et Mme [R] font grief à l'ordonnance de rejeter la requête en récusation dirigée contre la présidente d'une chambre d'un tribunal judiciaire pour toutes les affaires les concernant pendantes devant cette chambre, alors « que le premier président doit recueillir les observations du magistrat concerné par la récusation et en faire mention dans sa décision ; qu'il ne résulte d'aucune des mentions de l'ordonnance attaquée que les observations du magistrat concerné par la récusation aient été recueillies ou sollicitées, en violation de l'article 345 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

8. Le requérant à la procédure de récusation ne saurait utilement invoquer devant la Cour de cassation l'absence de recueil, par le premier président de la cour d'appel, des observations du magistrat visé par la récusation, l'irrégularité invoquée n'étant pas susceptible de lui faire grief.

9. Le moyen ne peut, dès lors, être accueilli.

Sur le second moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

10. La société et Mme [R] font grief à l'ordonnance de rejeter la requête en récusation dirigée contre une présidente d'une chambre d'un tribunal judiciaire pour toutes les affaires les concernant pendantes devant cette chambre, alors « que l'impartialité d'un magistrat doit s'apprécier d'une façon objective et subjective, ce principe s'appliquant à toute procédure quelle qu'elle soit ; que pour refuser en l'espèce d'examiner le bien-fondé de la requête en récusation sous l'angle de l'impartialité tant objective que subjective au sens de l'article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, le premier président a retenu que la procédure de récusation ne portait pas sur le bien-fondé d'une accusation en matière pénale et ne concernait pas une contestation sur un droit ou une obligation de caractère civile ; qu'en statuant ainsi, il a privé sa décision de base légale au regard de l'article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. »

Réponse de la Cour

11. L'ordonnance qui a relevé que la société et Mme [R] n'invoquaient aucune des causes visées à l'article L. 111-6 du code de l'organisation judiciaire, et a fait ressortir que la requête ne faisait valoir aucune autre cause de nature à faire naître un doute légitime sur l'impartialité du juge visé dans sa demande, n'encourt pas le grief du moyen.

12. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

DÉCLARE irrecevable le pourvoi en ce qu'il est dirigé contre Mme [D].

REJETTE le pourvoi.