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Décisions

CA Pau, 2e ch. sect. 1, 28 mai 2024, n° 22/02332

PAU

Arrêt

Infirmation partielle

PARTIES

Demandeur :

Human Immobilier (Sasu)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Pellefigues

Conseillers :

M. Darracq, Mme Guiroy

Avocats :

Me Pargala, Me Petit, Me Le Gouvello

T. com. Bayonne, du 18 juill. 2022, n° 2…

18 juillet 2022

FAITS - PROCEDURE - PRETENTIONS et MOYENS DES PARTIES

La société Human immobilier (sas) (anciennement dénommée La Bourse de l'immobilier) réalise toutes opérations se rapportant à la profession d'agent telles que définies par la loi du 2 janvier 1970.

A ce titre, elle fait régulièrement appel à des agents commerciaux qu'elle mandate pour la représenter, prospecter, négocier, s'entremettre à son nom ou pour son compte.

Le 5 juin 2020, la société Bourse de l'immobilier (le mandant) et M. [F] [E] ont signé un contrat d'agence commerciale sur le secteur géographique de l'agence de [Localité 8], d'une durée d'un an, renouvelable par tacite reconduction,

Le 27 janvier 2021, dans les locaux de l'agence de [Localité 8], une altercation verbale a opposé M. [O], responsable de l'agence, et M. [E].

Par mail du 27 janvier 2021 adressé à M. [O], M. [E] a relaté l'incident et expliqué avoir dû, à la demande de celui-ci, quitter l'agence, restituer l'ordinateur, les clés du casier et de l'agence, à la demande de son directeur, restant dans l'attente des « suites à donner à cette situation ».

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 16 mars 2021, le mandant a mis en demeure son agent commercial de l'informer sur ses intentions compte tenu de la cessation de toute activité depuis son départ de l'agence du 27 janvier.

Par lettre du 22 mars 2021, M. [E] lui a notifié son intention de mettre fin au contrat d'agent commercial à effet immédiat et réclamé le paiement de sa rémunération au titre de son droit de suite.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 6 avril 2021, le mandant a pris acte de la résiliation anticipée du contrat d'agent commercial et a fait grief à son agent commercial d'avoir violé la clause de non-concurrence lui ouvrant droit au versement d'une indemnité forfaitaire de 20.000 euros venant en compensation avec toutes sommes dues à l'agent commercial.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 19 avril 2021, M. [E], par l'intermédiaire de son avocat, a contesté la position du mandant en faisant valoir que le contrat d'agent commercial avait été rompu brutalement et abusivement le 27 janvier 2021 à l'initiative du mandant, et que la clause de non-concurrence était nulle.

Suivant exploit du 25 juin 2021, M. [E] a fait assigner la société La Bourse de l'immobilier, devenue Human immobilier, par devant le tribunal de commerce de Bayonne en réparation de son préjudice et paiement de diverses sommes.

Par jugement du 18 juillet 2022, auquel il convient expressément de se référer pour un plus ample exposé des faits et des prétentions et moyens initiaux des parties, le tribunal a :

- dit que la rupture du mandat d'agent commercial de M. [E] a été initiée par le mandant

- condamné la société Human immobilier à payer à M. [E] les sommes de :

- 5.100 euros au titre de l'indemnité de rupture, et débouté M. [E] du surplus de sa demande

- 1.000 euros à titre de dommages et intérêts au titre des circonstances discriminatoires de la rupture, et débouté M. [E] du surplus de sa demande

- 13.629,16 euros au titre de son droit de suite

- débouté M. [E] de sa demande au titre du non-respect d'un mois de préavis

- dit que la clause de non-concurrence de l'article 12 du mandat d'agent commercial est nulle et non avenue

- débouté la société Human immobilier de sa demande de paiement de la clause pénale sanctionnant la violation de la clause de non-concurrence

- débouté M. [E] de sa demande de dommages et intérêts relative à la clause de non-concurrence

- condamné M. [E] à payer à la société Human immobilier la somme de 459,87 euros au titre des services dus, et débouté la société Human immobilier du surplus de ses demandes

- ordonné la compensation entre les sommes dues respectivement par les parties

- débouté les parties de leurs autres demandes

- condamné la société Human immobilier à payer à M. [E] la somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

- débouté M. [E] du solde de sa demande.

Par déclaration faite au greffe de la cour le 11 août 2022, la société Human immobilier a relevé appel de ce jugement.

La procédure a été clôturée par ordonnance du 13 décembre 2023.

***

Vu les dernières conclusions notifiées le 24 mars 2023 par la société Human immobilier qui a demandé à la cour d'infirmer le jugement entrepris, sauf en ce qu'il a débouté M. [E] de sa demande au titre du préavis, et, statuant à nouveau de :

- débouter M. [E] de l'ensemble de ses demandes

- constater la compensation entre les dettes respectives des parties

- condamner M. [E] à lui payer la somme de 7.049,15 euros en application de la clause de non-concurrence

- condamner M. [E] à lui payer la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

* Vu les dernières conclusions notifiées le 5 juin 2023 par M. [E] qui a demandé à la cour de confirmer le jugement sauf sur le montant des indemnités et sommes qui lui ont été allouées et sur la condamnation prononcée au profit de la société Human immobilier, et l'infirmant et statuant à nouveau de ces chefs de :

- condamner la société Human immobilier à lui payer les sommes de :

- 40.000 euros au titre de l'indemnité de rupture du contrat d'agent commercial

- 20.000 euros à titre de dommages et intérêts en raison du préjudice subi du fait du caractère brutal, injurieux et discriminatoire de la rupture du contrat d'agent commercial intervenue le 27 janvier 2021

- 3.000 euros à titre de dommages et intérêts en raison du préjudice subi par l'insertion dans le contrat d'une clause de non-concurrence nulle

- débouter la société Human immobilier de sa demande de remboursement de la facture de 678,31 euros

- à titre subsidiaire, sur la clause de non-concurrence :

- juger excessif le montant de la clause pénale et le réduire à l'euro symbolique en l'absence de préjudice subi par le mandant

- juger que la clause de non-concurrence doit être levée à compter du 27 janvier et jusqu'à son terme de telle sorte qu'elle ne produise aucun effet pour l'avenir ou, à défaut, et à titre infiniment subsidiaire, fixer le montant de la contrepartie financière qui ne saurait être inférieure à 3.000 euros par mois jusqu'au terme de la restriction

- en tout état de cause, débouter la société Human immobilier de ses demandes et la condamner au paiement d'une somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

MOTIFS

sur la rupture du contrat d'agent commercial

L'appelante fait grief au jugement d'avoir retenu que le 27 janvier 2021 elle avait fautivement rompu le contrat d'agent commercial liant les parties alors que les allégations de M. [E] ne sont étayées par aucune preuve, que ce jour là, celui-ci a seulement été prié de sortir de l'agence en raison de son agressivité, qu'il a cessé toute activité de son propre chef, projetant de rejoindre un concurrent, sans qu'il lui soit demandé de restituer son matériel professionnel, conservant même le téléphone professionnel, et alors que M. [O] n'avait aucun pouvoir pour mettre fin au contrat auquel M. [E] a librement décidé de mettre un terme au 22 mars 2021.

L'intimé fait valoir que, brutalement évincé de l'agence locale pour un motif discriminatoire tenant à sa tenue vestimentaire et contraint de restituer le matériel professionnel, il a été placé dans l'impossibilité matérielle de poursuivre la prospection et la conclusion de ventes du fait exclusif du mandant lequel n'a jamais contesté les termes de son mail du 27 janvier 2021, profitant ensuite de sa situation de faiblesse économique pour lui faire rédiger la lettre de résiliation anticipée du contrat d'agent commercial.

Cela posé, l'incident du 27 janvier 2021 est survenu à l'occasion de l'exécution de la clause « plages clients » du mandat d'agent commercial qui prévoit que l'agent commercial bénéficie d'une demi-journée par semaine de présence physique à l'agence pour y exploiter la clientèle de celle-ci.

Le recoupement du mail du 27 janvier 2021 adressé par M. [E] à M. [O], responsable de l'agence, avec l'attestation de M. [O] versé aux débats établit que ce jour là une vive altercation a opposé les deux hommes sur des sujets professionnels ponctués par une observation péjorative du responsable de l'agence sur la tenue vestimentaire de M.[E].

Aucun témoin n'a assisté à l'altercation, l'attestation de Mme [P], salariée d'une autre agence du réseau, fondée sur la rumeur, étant dénuée de valeur probante.

Dans son mail du 27 janvier 2021, M. [E] insiste sur la crispation des relations à la suite de l'observation sur sa tenue vestimentaire jugée inappropriée à l'image de l'agence par M. [O] qui lui a signifié les termes suivants : « aujourd'hui, je vous sors de l'agence car vous êtes en jean et baskets », M. [E] estimant que cette mesure était discriminatoire car d'autres personnes de l'agence portaient la même tenue.

M. [E] ajoute dans son mail : « vous m'avez également demandé de laisser mon ordinateur de service ainsi que les clés de mon casier. Je me suis exécuté et vous ai laissé ce jour, mon ordinateur, les clés de mon casier ainsi que les clés de l'agence. Je me tiens à votre disposition pour la suite à donner à cette situation et à la bonne tenue de mes dossiers de vente. »

Le même jour, M. [E] a transféré le mail à M. [K], directeur du réseau, signataire du contrat d'agent commercial pour le compte du mandant, en précisant : « vous serez mon seul interlocuteur à la Bourse de l'immobilier. Vous pourrez également constater que ma tenue de ce jour n'avait rien d'incompatible avec le métier d'agent immobilier. M. [O] s'étant présenté plusieurs fois à l'agence avec des tenues bien plus décontractées. Je vous remercie par avance pour l'intérêt que vous porterez au traitement de cette situation ».

Dans son attestation, M. [O] confirme avoir fait une observation sur la tenue vestimentaire de M. [E] qui s'est senti offensé et précise lui avoir demandé de sortir de l'agence pour se calmer.

Il conteste lui avoir demandé de restituer son matériel professionnel.

Il est constant que M. [K], seul investi des pouvoirs de représentation du mandant, n'a pas répondu au mail de M. [E].

Il suit des constatations qui précèdent que le 27 janvier 2021 aucune des parties au mandat d'agent commercial n'a pris l'initiative de rompre les relations contractuelles, demeurant en l'état le conflit personnel opposant le préposé du mandant à son agent commercial qui était en droit de s'interroger sur les conditions de son retour en agence dans l'attente d'une intervention du mandant.

A cet égard, l'article 3 du contrat liant les parties stipule que le mandat est conclu dans l'intérêt commun des parties, les rapports entre l'agent commercial et le mandant étant régis par une obligation de loyauté et un devoir réciproque d'information.

Dès lors, le mandant, saisi d'un incident grave survenu entre son responsable d'agence et son agent commercial ne pouvait, sans méconnaître son obligation d'exécuter de bonne foi les conventions et mettre l'agent commercial en mesure d'exécuter au mieux son mandat, ignorer la légitime demande de M. [E] sur la sortie de crise laquelle compromettait objectivement la poursuite du mandat rattaché à l'agence de [Localité 8], lieu d'exercice du droit de l'agent d'exploiter les « plages clients », et nécessitait en conséquence une intervention du mandant sur l'évaluation des faits dénoncés et les modalités du retour en agence de son agent commercial.

En jouant le pourrissement de la crise, le mandant a placé son agent commercial dans une situation intenable qui a légitimé sa décision de suspendre, et non de cesser, son activité dans l'attente d'une décision du mandant qui ne pouvait, sans mauvaise foi de sa part, se borner à délivrer une mise en demeure de faire connaître ses intentions

Si, à la suite de cette mise en demeure, M. [E] a pris l'initiative de résilier le contrat suivant lettre recommandée avec accusé de réception du 22 mars 2021, il résulte des constatations qui précèdent que cette rupture est exclusivement imputable au mandant qui a gravement failli à ses obligations contractuelles en ne mettant pas son agent commercial en mesure de poursuivre le contrat dans l'intérêt commun des parties.

Dans sa lettre de prise d'acte du 6 avril 2021, la société Human immobilier a accepté que la résiliation prenne effet au 22 mars 2021 à minuit.

Il y a lieu donc de retenir cette date comme date de cessation du contrat, la résiliation ne pouvant être antérieure à la lettre de notification de celle-ci.

Par conséquent, le jugement sera infirmé en ce qu'il a dit que le mandant a pris l'initiative de mettre fin au contrat d'agent commercial à compter du 27 janvier 2021 et il sera dit que M. [E] a pris l'initiative de mettre fin au contrat à effet au 22 mars 2021 à minuit, cette initiative étant justifiée par des circonstances imputables au mandant.

sur l'indemnité de rupture

Aux termes de l'article L. 134-13 du code de commerce, lorsque la cessation du contrat d'agence commerciale résulte de l'initiative de l'agent et qu'elle est justifiée par des circonstances imputables au mandant, la réparation prévue à l'article L. 134-12 de ce code demeure due à l'agent, quand bien même celui-ci aurait commis une faute grave dans l'exécution du contrat.

En l'espèce, il résulte des circonstances de la rupture ci-avant analysées que la société Human immobilier est tenue de verser à M. [E] une indemnité compensatrice en réparation du préjudice consistant dans la perte pour l'avenir des revenus tirés de l'exploitation développée dans l'intérêt commun des parties.

M. [E] fait grief au jugement d'avoir limité l'indemnité à la somme de 5.100 euros alors qu'il a perçu, entre juillet 2020 et le 27 janvier 2021, un montant de commissions brutes de 6.547,73 euros TTC auquel doit s'ajouter le montant de son droit de suite de 13.629,16 euros TTC, soit 20.086,29 euros sur six mois justifiant une indemnité compensatrice de 40.000 euros à la mesure d'une année de mandat.

Mais, compte tenu de la brièveté de l'exécution du mandat et des différends professionnels de fond sur l'exploitation du réseau hypothéquant la durabilité de la relation contractuelle, l'indemnité compensatrice allouée répare justement le préjudice subi.

sur le droit de suite

Il est acquis aux débats que M. [E] est créancier d'un droit de suite de 13.629,16 euros.

Le jugement sera confirmé de ce chef.

sur la demande de dommages et intérêts au titre des circonstances de la rupture du contrat

M. [E] a formé également un appel incident sur l'indemnité allouée pour un montant de 1.000 euros considérant que le caractère brutal, injurieux et discriminatoire des circonstances de la rupture lui ont causé un important préjudice moral.

Cependant, il ressort des faits de la cause que le conflit ouvert avec le responsable de l'agence puise ses racines dans un différend professionnel qui a présidé aux tensions survenues le 21 janvier 2021 au cours desquelles a été formulée la remarque sur la tenue vestimentaire de M. [E], relevant certes d'une appréciation purement subjective, non étayée et vexatoire, mais marginale au regard des relations conflictuelles entretenues par les deux protagonistes.

Le jugement sera confirmé sur l'indemnité allouée.

sur la nullité de la clause de non-concurrence

L'appelante fait grief au jugement d'avoir annulé la clause de non-concurrence insérée dans le contrat liant les parties au motif qu'elle était imprécise quant à son secteur géographique d'application alors que celui-ci est déterminé dans le mandat. Selon l'appelante, les autres moyens de nullité de la clause de non-concurrence sont infondés en droit et en fait et M. [E], en proposant, pour le compte d'un autre réseau concurrent, à compter du 22 mars 2021, un bien immobilier à [Localité 5] est justiciable de la violation de ladite clause.

Selon l'intimé, la clause de non-concurrence insérée dans le contrat liant les parties est nulle car elle ne détaille pas le secteur géographique de son application et n'est pas proportionnelle aux intérêts du mandant alors qu'elle a pour effet de l'empêcher d'exercer une activité professionnelle dans sa branche durant deux ans quand la société Human immobilier revendique être le premier réseau intégré d'agences immobilières en France.

Cela posé, il résulte de l'article 12 du contrat liant les parties que, en cours d'exécution du mandant, l'agent commercial s'interdit de tout acte de concurrence ou par l'intermédiaire d'un tiers.

Et, le même article stipule que, après la cessation du contrat, compte tenu de l'activité très concurrentielle exercée, de la confiance accordée et de l'accès privilégié à un certain nombre d'informations commerciales sensibles durant la relation contractuelle, les parties au présent contrat conviennent expressément de protéger les intérêts légitimes du mandant. Ainsi, en cas de cessation du présent contrat pour quelque cause que ce soit, l'agent commercial s'interdit d'exercer des activités similaires de son mandant qui sont visées à l'article 1 de la loi n°70-9 du 2 janvier 1970, soit directement, soit indirectement, pendant une durée de deux ans, sur le secteur géographique qui lui a été confié (y compris les précédents secteurs si un changement a été opéré en cours de relation contractuelle).

Dans un délai de quinze jours à compter de la notification de la rupture du contrat, le mandant peut néanmoins renoncer à l'application de cette clause de non-concurrence ou en réduire la portée, en informant l'agent commercial par tout moyen.

En l'espèce, le contrat liant les parties a été résilié à l'initiative de M. [E] à effet au 22 mars 2021 à minuit.

Dans sa lettre de prise d'acte du 6 avril 2021, la société Human immobilier a précisé que la clause de non-concurrence s'appliquait pour une durée limitée à un an.

Les faits de concurrence illicite dénoncés par la société Human immobilier se situent entre le 22 et le 24 mars 2021, soit le dernier jour d'exécution du mandat et après la cessation de celui-ci.

La contestation de la validité de la clause de non-concurrence présente un intérêt pour les seuls faits postérieurs à la cessation du contrat.

Concernant la limitation géographique de la clause, la précision selon laquelle elle s'applique « sur le secteur géographique qui a été confié à l'agent commercial » est suffisamment claire et précise dès lors que, d'une part, il résulte de l'article 4 du contrat, que M. [E] a reconnu expressément que préalablement à la signature du présent contrat, il a été pleinement informé par le mandant des contours de son secteur de prospection, que c'est en toute connaissance de cause qu'il a conclu le présent acte et qu'une carte dématérialisée de ce secteur est consultable sur son espace personnel informatique, et, d'autre part, que M. [E] ne conteste pas que son secteur de prospection comportait les communes de [Localité 8], [Localité 7], [Localité 9], [Localité 5] et [Localité 10], rappelées par le mandant dans sa lettre du 6 avril 2021 mentionnant le bénéfice de la clause de non-concurrence.

La société Human immobilier rapporte donc la preuve du périmètre géographique contractuellement convenu applicable à la clause de non-concurrence liant les parties.

Concernant sa durée contractuelle de deux années, la société Human immobilier, conformément aux conditions contractuelles, en a réduit la durée à une année, de sorte que le moyen de nullité tirée du caractère excessif de la durée conventionnelle de deux ans est inopérant.

Concernant le caractère indispensable et la proportionnalité de la clause à la défense des intérêts légitimes du mandant, il est certain que, malgré son indépendance juridique, l'agent commercial est fortement intégré dans le fonctionnement du réseau de son mandant, bénéficiant d'informations privilégiées sur les biens de son secteur ainsi qu'un accès aux locaux de l'agence pour exploiter la clientèle du mandant, de sorte que la négociation d'une clause de non-concurrence limitée au seul secteur confié à l'agent, secteur lui-même restreint à un périmètre géographique laissant hors de son champ une importante partie de la côte basque et du Pays Basque intérieur, pendant une durée d'une année est proportionnée à la défense de ses intérêts sans porter une atteinte excessive à la liberté du commerce et de l'industrie de l'agent commercial.

Par conséquent, infirmant le jugement de ce chef, M. [E] sera débouté de sa demande de nullité de la clause de non-concurrence.

Partant, et par substitution de motifs, le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté M. [E] de sa demande de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait de l'application de la clause nulle à la demande du mandant.

sur la concurrence illicite

la société Human immobilier fait valoir que M. [E] a proposé à la vente un bien immobilier situé à [Localité 5] pour le compte d'un concurrent, la société Biarritz dream home, comme en attestent les deux pages internet de la plateforme numérique de diffusion des annonces en date des 22 et 24 mars 2021.

Mais, aux termes d'une attestation précise et circonstanciée, la directrice de l'agence Biarritz dream home a expliqué les circonstances dans lesquelles, après avoir rencontré M. [E] dans la perspective de son recrutement dans les suites du conflit avec La bourse de l'immobilier, elle a commis une erreur de saisie informatique en liant les données professionnelles de M. [E] avec le mandat de vente du bien d'[Localité 5], soulignant qu'elle était la seule signataire de ce mandat alors que M. [E] ne faisait pas partie de son agence.

M. [E] rapporte ainsi la preuve qu'il n'a pas commis les actes de concurrence illicite qui lui sont reprochés, au-delà même de leur caractère ponctuel et contemporain aux circonstances de la rupture du mandat imputables au mandant.

La société Human immobilier sera donc déboutée de sa demande fondée sur la violation de la clause de non-concurrence.

sur la facture du 22 mars 2021

M. [E] fait grief au jugement de l'avoir condamné à payer la facture PR21 du 22 mars 2021, réceptionnée le 16 avril 2021, d'un montant de 678,31 euros TTC au titre des prestations du mandant alors qu'il a été contraint de remettre les clés de l'agence à son directeur le 27 janvier et n'a plus eu accès à l'agence ni à la permanence hebdomadaire qui en découle.

Selon la société Human immobilier, la facture correspond aux prestations du mandant pour la période du 1er janvier au 22 mars 2021 ainsi que le prélèvement rejeté pour les prestations du 4ème trimestre.

Le non-paiement de la redevance de 356,40 euros au titre du 4 ème trimestre est justifié par un avis bancaire de rejet de prélèvement.

Concernant la période du 1er janvier au 22 mars, si le contrat d'agent commercial n'a pas été rompu le 27 janvier 2021, il reste que, pour les motifs ci-avant exposés, le mandant a manqué à ses obligations contractuelles en n'apportant aucune réponse à la situation de crise grave dénoncée par M. [E] qui n'a pu poursuivre normalement l'exécution du mandat, de sorte que celui-ci doit être déchargé du paiement de la redevance due sans contrepartie réelle et effective entre le 27 janvier et le 22 mars 2021.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a condamné M. [E] à payer la somme de 459,87 euros au titre de la redevance du 4ème trimestre et la fraction de la redevance du 1er au 27 janvier 2021.

sur les dispositions accessoires

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a condamné la société Human immobilier, qui succombe pour l'essentiel, aux dépens et au paiement d'une indemnité de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

La société Human immobilier sera condamnée aux dépens d'appel et à payer une indemnité complémentaire de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

la cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

INFIRME le jugement en ce qu'il a dit que la rupture du contrat d'agent commercial était intervenue le 27 janvier 2021 à l'initiative de la société Human immobilier et en ce qu'il a annulé la clause de non-concurrence insérée dans le contrat d'agent commercial,

et, statuant à nouveau de ces chefs,

DIT que la rupture du contrat d'agent commercial liant les parties est intervenue à l'initiative de M. [E], à effet au 22 mars 2021 à minuit, en raison de circonstances imputables à la société La Bourse immobilier, devenue Human immobilier,

DEBOUTE M. [E] de sa demande de nullité de la clause de non-concurrence insérée dans le contrat d'agent commercial liant les parties,

DEBOUTE la société Human immobilier de sa demande indemnitaire fondée sur la violation de la clause de non-concurrence,

CONFIRME le jugement pour le surplus de ses dispositions,

y ajoutant,

CONDAMNE la société Human immobilier aux dépens d'appel,

CONDAMNE la société Human immobilier à payer à M. [E] une indemnité complémentaire de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.