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Décisions

CA Reims, ch. soc., 22 mai 2024, n° 23/00056

REIMS

Arrêt

Autre

CA Reims n° 23/00056

22 mai 2024

Arrêt n°

du 22/05/2024

N° RG 23/00056

FM/FJ

Formule exécutoire le :

à :

COUR D'APPEL DE REIMS

CHAMBRE SOCIALE

Arrêt du 22 mai 2024

APPELANT ET INTIME :

d'un jugement rendu le 14 décembre 2022 par le Conseil de Prud'hommes de REIMS, section Encadrement (n° F 22/00115)

Monsieur [H] [S]

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représenté par la SELARL CABINET ROLLAND AVOCATS, avocats au barreau de REIMS

INTIMÉE ET APPELANTE :

de deux jugements rendus les 15 juin 2022 et 14 décembre 2022 par le Conseil de Prud'hommes de REIMS, section Encadrement (n° F 22/00115)

SAS RICO

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée par Me Ghislain LEBEAU, avocat au barreau de STRASBOURG

DÉBATS :

En audience publique, en application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 25 mars 2024, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur François MÉLIN, président de chambre, et Madame Marie-Laure BERTHELOT, conseiller, chargés du rapport, qui en ont rendu compte à la cour dans son délibéré ; elle a été mise en délibéré au 22 mai 2024.

COMPOSITION DE LA COUR lors du délibéré :

Monsieur François MÉLIN, président

Madame Marie-Laure BERTHELOT, conseiller

Madame Isabelle FALEUR, conseiller

GREFFIER lors des débats :

Monsieur Francis JOLLY, greffier

ARRÊT :

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, et signé par Monsieur François MÉLIN, président, et Monsieur Francis JOLLY, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

* * * * *

M. [H] [S] a été embauché par la société Rico par un contrat de travail du 14 mars 2017, en qualité de directeur de site.

Le salarié a été licencié par un courrier du 1er avril 2021 pour motif réel et sérieux.

M. [H] [S] a saisi le conseil de prud'hommes de Reims en demandant notamment que le licenciement soit jugé nul ou subsidiairement dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Par un jugement avant-dire droit du 15 juin 2022, le conseil a :

- débouté la société Rico de sa requête in limine litis de nullité de procédure ;

- fixé un calendrier de procédure entre les parties (délais de communication des pièces et conclusions du défendeur au 30 juillet 2022 ; réplique du demandeur au 15 septembre 2022 ; réplique du défendeur au 12 octobre 2022)

- renvoyé l'affaire au bureau de jugement 9 novembre 2022 à 14h30 pour plaider ferme.

Par un jugement du 14 décembre 2022, le conseil a :

- dit et jugé que M. [H] [S] n'a pas produit de bordereau de pièces conformément aux exigences de l'article R 1452 du code du travail ;

En conséquence,

- déclaré M. [H] [S] irrecevable en ses demandes ;

- condamné M. [H] [S] aux entiers dépens de l'instance.

M. [H] [S] a formé appel le 13 janvier 2023 du jugement du 14 décembre 2022. L'affaire a été enregistrée sous le numéro 23/00056. Par une ordonnance du 20 septembre 2023, le conseiller de la mise en état s'est dit incompétent pour connaître de la demande de M. [H] [S] tendant à l'organisation du préalable de conciliation au profit de la cour à laquelle le dossier transmis, a débouté la société Rico de sa demande d'indemnité de procédure et a condamné M. [H] [S] aux dépens de l'incident.

La société Rico a par ailleurs formé appel des jugements le 11 juillet 2023. L'affaire a été enregistrée sous le numéro 23/01155. Par une ordonnance du 17 janvier 2024, le conseiller de la mise en état a déclaré la société Rico recevable en son appel des jugements du 15 juin 2022 et 14 décembre 2022 et dit que le sort des dépens de l'incident suivra celui des dépens de l'instance principale.

Dans le dossier 23/00056, par des conclusions remises au greffe le 12 avril 2024, M. [H] [S] demande à la cour de :

- infirmer en toutes ses dispositions le jugement prononcé le 14 décembre 2022.

Statuant à nouveau,

- dire le licenciement nul,

- ordonner sa réintégration et le paiement de sa rémunération à hauteur de 7.680 € brut par mois pour la période comprise entre sa date de fin de préavis au 2 juillet 2021 jusqu'à la date de sa réintégration effective,

A titre subsidiaire, pour le cas où la nullité et la réintégration ne seraient pas ordonnées,

- dire le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et condamner la société Rico à payer :

' 184.320 euros (24 mois de salaire) à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- condamner la société Rico à payer les indemnités suivantes :

' 3.002,09 euros brut à titre de rappel sur l'indemnité légale de licenciement

' 9.076,15 euros brut de commissions pour les mois d'avril, mai et juin 2021

' 907,61 euros bruts à titre de congés payés sur rappel de commissions

' 1.446,16 euros brut au titre du remboursement d'une partie de précompte salarial

' 7.878,66 euros brut au titre du rappel sur indemnité de congés payés

' 14.813,18 euros brut à titre de dommages et intérêts pour les congés payés non pris

' 3.872,44 euros brut au titre de l'avantage en nature pour le véhicule de fonction non perçu durant 22 mois

' 15.360 euros au titre du préjudice distinct résultant de l'absence de remise des documents de fin de contrat

' 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- autoriser l'enlèvement du bungalow d'atelier appartenant à M. [H] [S] et situé sur le site de l'entreprise,

- ordonner la remise des documents de fin de contrat, le certificat de travail, l'attestation Pôle Emploi sous astreinte journalière de 150 euros par jour et par document,

- condamner la société Rico aux entiers dépens.

Par des conclusions remises au greffe le 11 juillet 2023, la société Rico demande à la cour de :

Sur l'appel principal et l'appel incident

- déclarer les appels recevables et bien-fondés ;

- annuler, subsidiairement infirmer les jugements avant-dire droit du 15 juin 2022 et sur le fond du 15 décembre 2022, au motif du défaut de respect du préalable de conciliation ;

- annuler la procédure au motif du défaut de respect du préalable de conciliation et corrélativement annuler le jugement avant-dire droit du 15 juin 2022 et sur le fond du 14 décembre 2022 ;

A défaut d'annulation sur appel principal et appel incident de la société Rico, subsidiairement en cas d'évocation,

- confirmer par substitution de motifs le jugement sur le fond du 14 décembre 2022 ;

- dire et juger que le licenciement de M. [H] [S] est régulier dans la forme légitime sur le fond, comme reposant sur un motif réel et sérieux ;

- débouter M. [H] [S] de toutes ses réclamations relatives aux licenciements ;

- débouter M. [H] [S] de toutes ses réclamations actuelles ou le cas échéant à venir autres que celles liées au licenciement ;

- débouter M. [H] [S] de l'intégralité de ses demandes ;

En tout état de cause,

- condamner M. [H] [S] à payer deux fois une indemnité d'un montant de 3000 € par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, l'une au titre de la procédure de première instance et l'autre au titre de la procédure d'appel ;

- laisser à la charge de M. [H] [S] les entiers dépens de la procédure

Par un courrier du 25 mars 2024 adressé au président de la chambre sociale de la cour, le conseil de M. [H] [S] a indiqué que l'ordonnance du conseiller de la mise en état du 20 septembre 2023 ayant retenu que le dossier était transmis à la cour, la cour est donc saisie de sa demande de régularisation du préalable de conciliation.

Dans le dossier 23/01155, la société Rico a remis au greffe le 11 juillet 2023 les mêmes conclusions que dans le dossier 23/00056.

Par des conclusions remises au greffe le 11 octobre 2023, M. [H] [S] demande à la cour d'ordonner la jonction des deux procédures. M. [H] [S] n'a pas conclu sur le fond.

Les deux affaires ont été plaidées le 25 mars 2024.

Par un courrier du 25 mars 2024 transmis par la voie électronique suite à l'audience et adressé au président de la chambre sociale, le conseil de M. [H] [S] a indiqué que compte tenu des termes de l'ordonnance du 15 novembre 2023 selon lesquelles le conseiller de la mise en état est incompétent mais le dossier sera transmis à la cour, il y a lieu de considérer que la cour est saisie de la demande de régularisation du préalable de conciliation.

Motifs :

Sur la jonction

Les dossiers 23/00056 et 23/01155 sont joints sous le numéro 23/00056.

Sur la demande d'annulation des jugements

En première instance, M. [H] [S] a saisi directement le bureau de jugement et non pas le bureau de conciliation.

La société Rico a alors soulevé, devant le conseil, une exception de nullité, en raison de l'irrégularité de la procédure.

Le jugement avant-dire droit du 15 juin 2022 a rejeté cette exception, aux motifs que M. [H] [S] a saisi le conseil d'une « prise d'acte de la rupture en licenciement » et que le greffe n'est pas juge de la recevabilité des demandes.

Dans ce cadre, la cour relève que M. [H] [S] a saisi le conseil de prud'hommes après avoir été licencié et qu'en cas de licenciement, le bureau de conciliation est compétent.

Or, le non-respect de l'exigence de conciliation constitue un cas de nullité d'ordre public, qui vicie l'ensemble de la procédure de la juridiction prud'homale.

Certes, il y a lieu de relever, de manière générale, que l'irrégularité de fond affectant la saisine des premiers juges est susceptible d'être couverte en cause d'appel lorsqu'elle n'est pas imputable aux parties (Soc., 12 décembre 2000, n° 98-46.100 ; Soc., 26 avril 2007, n° 05-45.096).

Toutefois, en l'espèce, l'irrégularité est imputable à M. [H] [S], qui a saisi à tort le bureau de jugement, en indiquant d'une part dans le formulaire Cerfa de saisine du conseil qu'il souhaitait être convoqué devant le bureau de jugement et qui a, d'autre part, indiqué dans ses conclusions jointes à ce formulaire qu'il souhaitait une convocation devant le bureau de jugement en application de l'article L 1451-1 du code du travail.

Devant la cour, la société Rico demande l'annulation des jugements du 15 juin 2022 et du 14 décembre 2022 pour défaut de respect du préalable de conciliation.

Dans ses conclusions remises le 12 avril 2024, M. [H] [S] ne conclut pas en réponse à cette exception de nullité dans les motifs de ces conclusions et ne demande pas le rejet de l'exception de nullité dans le dispositif.

La cour relève par ailleurs que la société Rico ne demande pas devant la cour la mise en 'uvre en 'uvre d'une conciliation et qu'elle n'est pas régulièrement saisie de la demande formulée par le courrier du 25 mars 2024, postérieur à l'audience, de M. [H] [S].

En conséquence, il est fait droit à la demande d'annulation des jugements.

Sur l'effet dévolutif

L'article 562, alinéa 2, du code de procédure civile dispose, en substance, que la dévolution s'opère pour le tout lorsque l'appel tend à l'annulation du jugement.

La cour est donc saisie du fond du litige, la nullité prononcée ne concernant pas l'acte introductif d'instance (Soc., 5 novembre 1980, n° 78-41.713).

Sur le licenciement

Le courrier de licenciement

Par un courrier du 1er avril 2021, la société Rico a licencié M. [H] [S] pour motif réel et sérieux.

« (')

Ceci remémoré, il s'avère que, au lieu de vous concentrer sur le c'ur de votre fonction, savoir le développement de l'activité commerciale de la Société, en lien direct et étroit avec la Direction, au travers d'une concertation et de comptes-rendus récurrents, vous vous êtes égaré dans des errements et travers incompréhensibles, faisant que vous ne vous êtes jamais élevé au niveau requis de votre poste.

Bien évidemment, avec une mauvaise foi caractérisée, rajoutée à la haute estime de vous dans laquelle vous vous tenez manifestement, vous contestez cette réalité pourtant flagrante.

Vous la contestez en invoquant toute une série de prétextes futiles et insignifiants, qui vous empêcheraient selon vous de vous déployer dans votre statut de Directeur (multiplicité des tâches et responsabilités qui pèseraient sur vos épaules, nécessité de gérer des contraintes matérielles liées prétendument à une organisation déficiente de la Société et à des installations vétustes, impossibilité de déléguer à des collaborateurs dont vous mettez en cause le niveau de compétence et d'implication,

Plus encore, dans un total manque de discernement et de respect du sens de la hiérarchie, vous avez entrepris de dénigrer l'entreprise et de vous opposer frontalement et radicalement à la Direction, critiquant et contestant les choix non seulement commerciaux mais, plus largement, stratégiques, en de multiples domaines (ventes, marketing, techniques, ...).

Nous avions déjà été surpris et choqués par certaines de vos prises de position formelles à l'encontre de l'entreprise et de ses Dirigeants, notamment, pour ne pas remonter trop loin en arrière, sur le second semestre de l'année 2020.

Nous avions renoncé à les sanctionner dans les délais prescrits en droit du travail, ce qui s'avère désormais avoir été certainement une grossière erreur.

Pour autant, quelques épisodes doivent être rappelés dans les présentes, en ce sens qu'ils sont annonciateurs de l'attitude qui aura ensuite été la vôtre, plus particulièrement depuis le début de l'année 2021.

Ainsi, par un courriel du 21 juillet 2020 (10h51) adressé à M. [H] [S] [V] [Y], Directeur Général de la Société, vous n'avez pas hésité à écrire, en parlant de M. [H] [S] [T] [Y], Président de la Société et père de M. [H] [S] [V] [Y], au demeurant figure historique et patriarcale de l'entreprise familiale, que, s'il ne trouvait pas le temps de lire vos mails, en trouvait cependant pour rouler sur une distance de 1 000 km et venir depuis l'Allemagne jusqu'à [Localité 4], non pas pour s'occuper des intérêts de l'entreprise, mais pour manger des fruits-de-mer dans le centre-ville.

Dans un autre mail du 16 novembre 2020 [10h13], adressé à M. [H] [S] [T] [Y], ainsi qu'à d'autres destinataires et personnes en copie, dont M. [H] [S] [V] [Y], vous avez cru pouvoir exiger de M. [H] [S] [T] [Y] de faire preuve de sérieux et de professionnalisme, lui indiquant que sa méthode ne serait pas digne d'un fabricant de renommée nationale et que sa méthode s'apparenterait à une plaisanterie.

Toujours par courriel, le 19 novembre 2020 [11h41], adressé à Messieurs [T] et [V] [Y], vous avez estimé pouvoir écrire que les méthodes des Dirigeants les discréditeraient auprès des Collaborateurs français, vous vantant d'oser affirmer des réalités, à l'inverse de vos prédécesseurs, qui auraient déclaré aux Dirigeants ce que ces derniers aimaient entendre ou qui n'auraient eu qu'une méthode vouée à l'échec, toutefois pour une rémunération d'un montant de 90 000 € par an, rajoutant que l'entreprise aurait encore été prête à consentir une rémunération plus élevée si cela avait été demandé.

Dans ce même courriel, vous pensez pouvoir nous indiquer ce qui ne conviendrait pas avec les méthodes et produits de l'entreprise, allant jusqu'à nous interroger si nous n'avions pas, en Allemagne, des vaches, des commerciaux, des techniciens, des ingénieurs bureau, pour tester et corriger les produits.

Peut-être parce que nous n'avions pas sanctionné ces comportements déjà inacceptables, vous êtes-vous cru autorisé à aller toujours plus loin, pariant certainement sur le fait que nous serions naïfs et crédules quant à vos réelles compétences et que vous parviendriez à continuer d'entretenir l'illusion, le tout en définitive pour nous imposer un chantage à la démission et à une augmentation de salaire, la référence à la rémunération de 90 000 € par an de votre prédécesseur, dans le courriel précité du 19 novembre 2020, étant tout sauf anecdotique.

Cette tentative de chantage a débuté dans votre courriel du 02 février 2021 [20h22], dans lequel vous prétendez que le chiffre d'affaires de la Société Rico repose sur deux seules personnes, bien évidemment vous-même et Madame [K], qui ne compterait pas ses heures et sans laquelle rien ne fonctionnerait dans l'entreprise.

Vous évoquez les autres collaborateurs, pour les dénigrer, leur reprochant de ne pas s'investir et de ne prendre aucune initiative.

Vous mentionnez aussi votre niveau de rémunération et, de manière assez incompréhensible, votre exposition à un risque récurrent d'amende, au motif d'un défaut de respect du couvre-feu à 18 heures, alors qu'il est avéré que l'activité professionnelle autorise des dérogations.

Quoi qu'il en soit, toujours dans ce courriel, vous indiquez que vous allez vous orienter vers d'autres horizons et que votre lettre de démission serait quasiment prête, celle-ci devant nous parvenir au mois de février, au plus tard au début du mois de mars.

Dans un autre courriel du 03 février 2021 (09h56), vous avez réitéré cette annonce de démission, rajoutant que Madame [K] serait également prête à démissionner, tout en vous déchargeant, dans le même courriel, de vos obligations professionnelles, indiquant qu'il nous incombait de prendre en charge les inscriptions et modalités de tenue des foires en France.

Et dans une véritable frénésie, par nouveau mail en même date du 03 février 2021 (12h18), vous réaffirmez encore une fois expressément prendre vos dispositions pour quitter vos fonctions RICO et que vous seriez même en contact avec d'autres entreprises franco-allemandes à [Localité 4], qui seraient en recherche de vos compétences.

Nullement dupes de votre man'uvre, ni de vos intentions, nous avons réagi par lettre de réponse qui vous a été adressée par courriel le 03 février 2021, dans laquelle nous vous indiquions contester formellement et intégralement l'ensemble de vos allégations et vous invitant à nous faire parvenir une démission en bonne et due forme, vous rappelant qu'il vous appartenait jusque-là de vous conformer strictement au respect des obligations attachées à vos fonctions et concluant que nous comptions sur votre sens des responsabilités.

Mais notre réponse ne vous a en rien freiné dans votre surenchère, qui s'est encore manifestée à plusieurs reprises, en l'occurrence au travers des courriels suivants :

courriel du 03/02/2021 112h44) à [V] [Y] et [T] [Y] (Objet : SODIAAL) : « À partir de maintenant, je vous adresse toutes les demandes qui arrivent quotidiennement pour traitement par vous-mêmes. Avec l'organisation de mon départ de l'entreprise, je vous laisse régler vous-mêmes les problèmes ».

courriel du 03/022021 (12h44) à [V] [Y] et [T] [Y] (Objet : Contrat 2020-COFAQ) : « À partir de maintenant, je vous adresse toutes les demandes qui arrivent quotidiennement pour traitement vous-mêmes. Avec l'organisation de mon départ de l'entreprise, je vous laisse régler vous-mêmes les problèmes. »

courriel du 04/03/2021 [12h34] à [T] [Y] et [V] [Y] en copie (Objet : Nouveau catalogue 2021) : « J'en ai maintenant plus que marre d'être pris pour un incompétent. Je ne peux plus supporter toutes vos remarques. Que dois-je encore justifier ' Je n'ai pas le temps de me justifier de tout quotidiennement. J'ai demandé à Madame [K] et à Madame [A] de mettre les dossiers en suspens. Je vous renvoie toutes les palettes avec les catalogues. À partir de maintenant nous ne conduirons plus d'activité commerciale de notre initiative en France. Nous vous laissons le soin de les anticiper et de les préparer. »

courriel du 04/03/2021 (17h07) à [V] [Y] et [T] [Y] (Objet : AREAL RICO) : « Et oui, vous savez toujours tout mieux que moi en toute situation ! Vous êtes les grands spécialistes en gestion des problèmes par e-mail et par WhatsApp. »

Ensuite, en date du 05 mars 2021, en quelque sorte pour boucler la boucle de votre stratégie, vous vous êtes porté malade.

Vous avez informé de votre arrêt de travail le personnel, par un courriel du 08 mars 2021, de même que vous avez informé les collaborateurs de la prolongation de cet arrêt de travail à compter du 12 mars 2021 par un courriel du 14 mars 2021, tout en n'omettant pas dans lesdits courriels de vous délivrer des autosatisfecit dont vous êtes coutumier, ni à l'inverse de dénigrer l'entreprise et sa Direction.

Cette façon particulièrement regrettable d'impliquer les collaborateurs est également très choquante et traduit le fait que vous ne reculez devant aucune extrémité pour servir vos desseins.

Ces dérives inacceptables et votre comportement fautif, ci-avant décrits et objectivement prouvés, s'avèreraient déjà amplement suffisantes pour justifier la rupture de notre relation contractuelle de travail.

Vos allégations selon lesquelles les conditions de travail seraient intolérables et que vous seriez victime de pressions et de harcèlement sont totalement fantaisistes et ne sont que l'illustration de la stratégie que vous avez échafaudée, visant soit à obtenir une augmentation significative de votre rémunération et de vos avantages, soit à nous imposer une rupture avec une indemnisation avantageuse à votre profit.

Tant la multiplication que le contenu de vos écrits ne laissent nullement présumer d'un véritable état de stress ou de burn-out, liés au travail.

Vous avez d'ailleurs repris le travail ce 29 mars 2021, parfaitement reposé et, pour reprendre les termes de votre lettre précitée du 19 mars 2021, dans la douceur et la sérénité retrouvée.

Mais au surplus du comportement fautif précédemment évoqué, malgré votre savoir-faire pour vous auto-attribuer des mérites que vous n'avez pas, une autre série de griefs est encore à mettre sur votre passif, en l'occurrence en rapport direct avec les obligations professionnelles qui vous incombent au titre du contrat de travail, obligations précisément rappelées pour cette raison au début des présentes.

Ainsi, vous n'avez jamais véritablement assumé vos fonctions commerciales, rechignant à vous rendre sur le terrain et auprès des prospects et clients.

Or, l'existence d'une équipe commerciale ne vous dispensait aucunement de vous mobiliser en la matière, vos attributions premières et essentielles étant le développement du marché et la multiplication des débouchés.

Ce n'est certainement pas en prétendant faire la leçon à vos Dirigeants que vous pouviez faire progresser l'entreprise, pas davantage avec des préconisations totalement farfelues de réduction des prix à un niveau irréaliste, comme vous l'avez proposé dans une lettre du 28 octobre 2020 et encore dans des demandes postérieures.

Vous n'avez jarnais non plus accepté que soit mise en 'uvre une synergie entre les Société RICO et SUEVIA Allemagne par exemple en matière de marketing, qui pouvait pourtant permettre de développer ce que l'on appelle une « Corporate Identity », favorable aux intérêts de deux entreprises.

Les difficultés dans l'élaboration des catalogues et autres supports commerciaux traduisent vos réticences à ce propos, certainement aussi par crainte et refus que nous puissions contrôler la réalité de vos activités.

Les comptes-rendus dont vous auriez dû rendre destinataire la Direction, toujours en vertu des dispositions du paragraphe 4 de votre contrat de travail, n'étaient pas non plus livrés, ou alors sous des formes incohérentes et inexploitables.

Votre gestion du personnel soulève tout autant de multiples critiques.

Nous avons ainsi pu être informés de certains de vos agissements à l'occasion de notre présence à l'entreprise les 10 et 11 mars 2021, alors que vous-même étiez en arrêt-maladie.

Certains collaborateurs, libérés de votre joug, ont pu se confier, pour révéler vos méthodes à la fois autoritaires et humiliantes.

Les informations que nous avons pu recueillir sont au demeurant corroborées par vos propres en l'occurrence dans votre courriel du 02 février 2021 (20h22) déjà précédemment évoqué, dans lequel vous affirmez que la Société repose exclusivement sur vous et sur Madame [K]. les autres collaborateurs n'ayant. selon vous, aucun sens de l'initiative et ne faisant que le minimum.

Cette manière d'évoquer le Personnel est discriminatoire, ce que nous ne pouvons accepter en qualité d'employeur.

En cas de difficulté réelle, il vous aurait appartenu d'en informer préalablement, sous d'autres formes que le dénigrement de vos subordonnés

Au surplus, la façon dont vous décrivez l'activité de Madame [K] ne peut davantage nous satisfaire, toujours dans le cadre de nos responsabilités en qualité d'employeur.

En effet, il n'est pas acceptable que Madame [K] puisse avoir la lourde charge de travail que vous évoquez et nous sommes abasourdis de lire dans votre lettre du 19 mars 2021, quand vous parlez de Madame [K], que : « ma nature compulsive et addictive vis-à-vis du travail n'a pas été non plus de tout repos pour elle. Dans cette pugnacité qui naturellement m'anime, j'ai pu compter sur elle, et même abuser de sa présence tardive en soirée en raison des objectifs surdimensionnés que j'ai voulu atteindre en seulement quatre années malgré le contexte socid désastreux dans lequel j'ai débuté le 1er avril 2017. »

Vous ne pouvez ainsi vous décharger sur Madame [K] de tâches qui vous incombent à vous, notamment dans le domaine commercial.

Force est ici de constater que c'est vous qui imposez aux collaborateurs les conditions de travail que vous reprochez à vos Dirigeants de vous infliger prétendument à vous-même.

Des collaborateurs nous ont rapporté le stress qu'ils ressentaient à venir au travail, directement en raison de votre comportement et des contraintes disproportionnées que vous leur imposez.

Enfin, toujours dans le registre des manquements fautifs à vos obligations contractuelles, nous avons remarqué que vous outrepassez également la limite de vos attributions financières, telles que définies à l'article 11 du contrat de travail

Ainsi. lors de notre présence sur site précédemment évoquée des 10 et 11 mars 2021, nous avons constaté la présence d'un charriot-élévateur Toyota neuf, dont nous avons appris, à l'examen de la facture que nous avons dès lors demandée qu'il avait coûté 40 800 €.

Or, votre limite de compétence décisionnelle se situe à 10 000 € et nous n'avons jamais été requis préalablement ni informés postérieurement de cette acquisition.

En conclusion de l'ensemble des éléments qui précèdent. il est manifestement établi, vous concernant. une insubordination caractérisée, tant au travers de votre dénigrement de l'entreprise, qu'au travers des critiques et allégations injurieuses et vexatoires envers les Dirigeants, le tout avec une forme d'arrogance et sur un ton particulièrement déplacé.

Ces circonstances justifieraient que le licenciement soit prononcé en retenant la qualification de la faute grave.

À tout le moins, le fort degré de confiance et de loyauté que les Dirigeants sont en droit d'attendre de la part d'un Collaborateur Cadre, qui est placé au sommet de la hiérarchie des Collaborateurs de l'entreprise, est totalement et définitivement rompu.

Après mûre réflexion, c'est cette deuxième alternative que nous avons décidé de retenir.

Dès lors, la rupture de votre contrat de travail prendra effet par le licenciement pour motif réel et sérieux (').

(') ».

Les moyens des parties

Au regard des termes de ce courrier de licenciement, la société Rico soutient devant la cour que M. [H] [S] a fait preuve d'insubordination et d'opposition récurrente aux décisions de l'employeur, qu'il a provoqué une situation de blocage en annonçant sa démission imminente dans des courriels alors qu'il n'a pas en définitive démissionné, qu'il se dédouanait de ses tâches et obligations, qu'il n'a pas hésité à informer les autres salariés de son arrêt de travail pour maladie en se présentant comme victime d'une surcharge de travail et en dénigrant la direction, que le courrier de licenciement énonce d'autres griefs, que M. [H] [S] n'a jamais encadré ni accompagné les équipes commerciales sur le terrain, qu'il n'a jamais envoyé à la direction des comptes-rendus hebdomadaires pourtant exigés par l'article 4 du contrat de travail, qu'il a géré de manière calamiteuse la situation de ses collaborateurs en privilégiant Mme [K] au détriment de Mmes [A] et [R], qu'il faisait peser sur Mme [K] une lourde charge de travail au-delà de la normale, que M. [H] [S] avait des méthodes autoritaires et humiliantes à l'égard des salariés, et qu'il a outrepassé sa faculté d'engagement en faisant acquérir un chariot élévateur pour un prix de 40 800 €.

Le salarié répond que certains éléments invoqués par le courrier de licenciement sont prescrits en ce qu'ils datent du 21 juillet 2020, du 16 novembre 2020 et du 19 novembre 2020, qu'il a été licencié en raison de son état de santé et en raison du fait qu'il a dénoncé une situation de harcèlement moral, que le courrier de licenciement lui reproche une perte de confiance qui ne constitue pourtant pas un motif de licenciement, que le courrier de licenciement fait état de motifs qui ne sont pas suffisamment précis et qui ne peuvent pas être vérifiés, de sorte que le licenciement doit être jugé nul, avec l'obligation de l'employeur de le réintégrer, ou à titre subsidiaire sans cause réelle et sérieuse.

Les règles applicables

L'article L 1235'1 du code du travail dispose notamment qu'il appartient au juge d'apprécier le caractère réel et sérieux des motifs invoqué par l'employeur, qu'il forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties et que si un doute subsiste, il profite au salarié

Réponse de la cour

Au soutien de sa position, l'employeur produit les pièces suivantes :

un mail du 2 février 2021 adressé par M. [H] [S] à M. [V] [Y], par lequel il indique notamment que la société Rico repose essentiellement sur son action et celle de Mme [K], que les autres salariés ne font que leur travail et rien d'autre, que si Mme [K] respectait ses horaires, rien ne fonctionnerait, qu'en « ce qui concerne les prix et le nouveau catalogue, vous dépassez de loin toutes les bornes admissibles » car les prix ont été envoyés jeudi dernier alors qu'ils ont été demandés en décembre, qu'il va tout simplement rechercher de nouveaux horizons, que sa lettre de démission est quasiment prête et que la pression qu'il supporte depuis quatre ans n'est plus possible surtout compte tenu de sa rémunération ;

un mail du 3 février 2021 adressé par M. [H] [S] à M. [V] [Y] par lequel il indique qu'il prend ses dispositions pour démissionner car les conditions ne sont plus acceptables ;

un mail du 3 février 2021 adressé par M. [H] [S] à M. [V] [Y] par lequel il indique qu'il prend ses dispositions pour quitter l'entreprise ;

un mail du 3 février 2021 adressé par M. [H] [S] à MM. [V], [T] et [X] [Y] par lequel il indique qu'il renverra toutes les demandes quotidiennes et qu'il les laisse gérer tous ces problèmes, compte-tenu de l'organisation de son départ de l'entreprise ;

un mail du 4 mars 2021 adressé par M. [H] [S] à MM. [V], [T] et [X] [Y] par lequel il indique en avoir assez d'être pris en permanence pour un incompétent, qu'il ne peut plus supporter leurs remarques ni les corrections qu'ils apportent en permanence à ses écrits, que l'entreprise paie cette année 150 000 € de taxe professionnelle en France mais qu'ils n'y comprennent rien, que cela devient de pire en pire, qu'il se demande s'il faut désormais tout demander en Allemagne avant de bouger le petit doigt, que « STOP ' je ne le supporte plus », qu'il se demande s'il devra bientôt se justifier heure par heure, qu'il devient fou, qu'ils le rendent plus fou, que « STOP ! Cette fois c'est simplement STOP », qu'il leur renvoie toutes les palettes et qu'il leur laisse le soin de les expédier comme bon leur semble vers la France, qu'il ne peut plus supporter d'être pris pour un enfant, qu'il n'est pas possible de devoir toujours tout demander, et qu'à partir de maintenant « il ne sera plus diligentée d'activité commerciale en France de notre propre initiative » car « nous vous laissons faire, anticiper et préparer » ;

un mail du 4 mars 2021 adressé par M. [H] [S] à MM. [V] et [T] [Y] par lequel il indique « Vous avez raison ! », « Continuer comme ça à votre manière », « vous n'avez pas progressé d'un millimètre sur le problème » des capacités de stockage, « mais bon, vous savez toujours tout mieux que moi dans toutes les situations ! », « Vous êtes le grand spécialiste dans le management des problèmes par e-mail et WhatsApp », « mais bon, je suis trop bête pour comprendre vos grandes stratégies », « vous n'êtes pas au bout de vos peines », « le sujet est réglé pour moi, ça ne me concerne plus ! », et « je peux vous souhaiter bonne chance ».

La cour retient que ces différents mails, qui ne sont pas concernés par la prescription opposée par le salarié, démontrent l'existence d'une insubordination de M. [H] [S] à l'égard de son employeur, le salarié ayant, de manière répétée, contesté les décisions de celui-ci dans des termes souvent irrespectueux et montré sa défiance à son égard, en refusant d'accomplir son travail. La société Rico démontre ainsi l'existence d'une cause réelle et sérieuse de licenciement.

M. [H] [S] soutient certes que le licenciement serait nul car il aurait été prononcé en raison de son état de santé et alors qu'il avait dénoncé des faits de harcèlement moral. Toutefois, d'une part, s'il est vrai que le courrier de licenciement se réfère à un arrêt de travail pour maladie, il est en est ainsi pour relater l'évolution de la relation de travail, sans que les termes du courrier ni un quelconque élément du dossier ne conduisent à retenir que le licenciement serait intervenu en considération de l'état de santé du salarié, ce que l'article L 1132-1 du code du travail interdit. D'autre part, le salarié n'établit pas avoir dénoncé des faits de harcèlement moral, ne précise pas à quelle date il l'aurait fait, ne fournit aucune indication sur la teneur de sa dénonciation alléguée et ne fournit aucune précision dans ses conclusions sur des éléments qui laisseraient, au sens de l'article L 1154-1, présumer l'existence d'un harcèlement moral. En conséquence, ses demandes tendant à ce que soient prononcées la nullité du licenciement et sa réintégration ou à défaut le caractère sans cause réelle et sérieuse du licenciement sont rejetées, de même que ses demandes de paiement de sa rémunération à hauteur de 7.680 € brut par mois pour la période comprise entre sa date de fin de préavis au 2 juillet 2021 jusqu'à la date de sa réintégration effective, et de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Le jugement du 14 décembre 2022 est infirmé en ce qu'il a dit que le salarié n'a pas produit de bordereau de pièces conformément aux exigences de l'article R 1452 du code du travail et l'a déclaré irrecevable en ses demandes.

En revanche il est fait droit à la demande de rappel d'indemnité légale de licenciement pour un montant de 3002,09 euros brut, l'indemnité versée par l'employeur n'ayant pas été calculée, au sens de l'article R 1234-4 du code du travail, sur le salaire de référence le plus avantageux pour M. [H] [S], à savoir la moyenne des 12 derniers mois de salaire.

Sur la demande de commissions

L'article 5 du contrat de travail prévoit un salaire fixe ainsi qu'une participation au chiffre d'affaires de 0,5 % payable mensuellement avec un mois de décalage ainsi qu'une participation annuelle au bénéfice sur le résultat courant avant impôt de 3 % versée au moment de la connaissance du résultat.

M. [H] [S] demande à ce titre le paiement d'une somme de 9.076,15 euros brut de commissions pour les mois d'avril, mai et juin 2021 ainsi que d'une somme de 907,61 euros bruts à titre de congés payés sur rappel de commissions. Il indique que l'employeur n'a pas réglé les commissions dues pour la période du préavis, à savoir au cours des mois d'avril, mai et juin 2021.

Toutefois, d'une part, l'employeur, sur qui pèse la charge de la preuve du paiement des éléments de salaire, indique, sans être contesté, avoir payé un rappel de commissions de 10 786, 04 euros et de 4 286, 69 euros, ainsi que cela résulte du bulletin de salaire du mois de juillet 2021. D'autre part, la cour relève qu'au soutien de sa demande M. [H] [S] n'indique pas la nature de la commission dont il demande le rappel et ne fournit aucune précision sur le calcul de la somme qu'il demande.

En conséquence, sa demande est rejetée.

Sur la demande au titre du précompte salarial

M. [H] [S] indique qu'avant sa prise de poste, l'employeur avait décidé qu'il prenait en charge à hauteur de 80 % le régime collectif de santé et de prévoyance des cadres, ainsi que cela résulte de deux décisions unilatérales de l'employeur des 7 novembre 2016 et 20 octobre 2016. Or, selon lui, l'employeur n'a procédé à une prise en charge qu'à hauteur de 60 %, ce qui justifie la condamnation de l'employeur à payer la somme de 1.446,16 euros brut au titre du remboursement d'une partie de précompte salarial pour les années 2020 et 2021.

La société Rico n'a pas conclu sur cette demande du salarié et ne conteste donc pas sa prise en charge à hauteur de 80 % du régime de santé de prévoyance des cadres, de sorte qu'il est fait droit à la demande de M. [H] [S].

Sur la demande de rappel d'indemnité de congés payés

M. [H] [S] demande la condamnation de l'employeur à lui payer la somme de 7.878,66 euros brut au titre du rappel sur indemnité de congés payés en faisant valoir que l'employeur a calculé l'indemnité de congés payés en tenant compte des commissions versées mais pas de la partie fixe de la rémunération, ce qui justifie la demande de rappel pour 56 jours de congés payés.

L'employeur s'oppose à sa demande en faisant valoir qu'il a bien calculé l'indemnité de congés payés sur une base de 56 jours, comme le demande le salarié. Toutefois, il ne fournit aucune précision sur la base de calcul de la somme considérée et ne conteste pas l'allégation du salarié selon laquelle le calcul a été opéré sans prendre en considération la partie fixe du salaire.

En conséquence, il est fait droit à la demande.

Sur la demande de dommages et intérêts pour congés payés non pris

M. [H] [S] demande la condamnation de l'employeur à lui payer la somme de 14.813,18 euros brut à titre de dommages et intérêts pour les congés payés non pris, en faisant valoir qu'il n'a pas pu prendre ses congés payés et qu'il disposait d'un solde de congés payés non pris de 54,08 jours lorsqu'il est sorti des effectifs de juillet 2021.

Toutefois, M. [H] [S] ne justifie ni du fondement juridique de sa demande, ni de la nature du préjudice allégué ni de son montant, alors qu'il a été fait droit à sa demande d'indemnité de congés payés pour 56 jours.

Sa demande est donc rejetée.

Sur la demande au titre du véhicule de fonction

M. [H] [S] demande la condamnation de l'employeur à lui payer la somme de 3.872,44 euros brut au titre de l'avantage en nature pour le véhicule de fonction Peugeot 5008 non perçu durant 22 mois, en faisant valoir que le véhicule de fonction dont il bénéficiait initialement n'a plus été mis à sa disposition à compter du mois d'août 2019.

L'employeur répond qu'en réalité, le salarié a refusé de prendre possession du véhicule de catégorie « normale » qui a été ensuite mis à sa disposition.

La cour relève que l'article 8 du contrat de travail énonce qu'un véhicule de fonction est mis à disposition de M. [H] [S] à des fins professionnelles et que l'usage de ce véhicule constitue un avantage en nature.

La cour relève également que M. [H] [S] justifie que l'avantage en nature à ce titre apparaissait sur le bulletin de paie pour 176, 02 euros, ce que l'employeur ne conteste pas, et que si ce dernier allègue que M. [H] [S] a refusé de prendre possession d'un autre véhicule que le véhicule Peugeot 5008, il procède par une simple affirmation, qui n'est corroborée par aucune preuve.

Il est donc fait droit à la demande.

Sur la demande d'enlèvement d'un bungalow

M. [H] [S] demande à la cour d'autoriser l'enlèvement du bungalow d'atelier lui appartenant et situé sur le site de l'entreprise.

Toutefois, il ne justifie ni de la propriété ni de la présence d'un bungalow localisé sur le site de l'entreprise.

Sa demande est donc rejetée.

Sur la demande de dommages et intérêts pour défaut de remise des documents de fin de contrat

M. [H] [S] demande la condamnation de l'employeur à lui payer la somme de 15.360 euros au titre du préjudice distinct résultant de l'absence de remise des documents de fin de contrat, qui ne lui a pas permis de s'inscrire auprès des services de Pôle Emploi devenu France Travail et de bénéficier de l'assurance chômage.

L'employeur répond qu'il a bien remis au salarié le solde de tout compte et les documents de fin de contrat.

Toutefois, l'employeur ne prouve pas la réalité de son allégation.

Il est dès lors alloué au salarié une somme de 1 000 euros à titre de dommages et intérêts.

Sur la demande de documents de fin de contrat

M. [H] [S] demande à la cour d'ordonner la remise des documents de fin de contrat, le certificat de travail, l'attestation Pôle Emploi devant France Travail sous astreinte journalière de 150 euros par jour et par document.

Il est fait droit à cette demande, sous réserve de l'astreinte qui n'est pas ordonnée.

Sur les demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile

Le jugement a déclaré M. [H] [S] irrecevable mais n'a pas statué sur la demande formée par l'employeur sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Devant la cour, M. [H] [S] ne formule pas de demande au titre de la première instance, contrairement à l'employeur. Ce dernier succombant, sa demande est toutefois rejetée.

A hauteur d'appel, l'employeur est condamné à payer la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Sur les dépens

Le jugement est infirmé en ce qu'il a condamné le salarié aux dépens.

L'employeur est condamné aux dépens de première instance et d'appel.

Par ces motifs :

La cour, statuant publiquement et contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi,

Ordonne la jonction des dossiers 23/00056 et 23/01155 sous le numéro 23/00056 ;

Annule les jugements du conseil de prud'hommes de Reims du 15 juin 2022 et du 14 décembre 2022 dans l'affaire RG n° 22/00115 ;

Juge que la cour est saisie du fond du litige ;

Juge que le licenciement de M. [H] [S] est fondé sur une cause réelle et sérieuse ;

Condamne la société Rico à payer les sommes suivantes :

3.002,09 euros brut de rappel d'indemnité légale de licenciement pour un montant ;

1.446,16 euros brut au titre du remboursement d'une partie de précompte salarial pour les années 2020 et 2021 ;

7.878,66 euros brut au titre du rappel sur indemnité de congés payés ;

3.872,44 euros brut au titre de l'avantage en nature pour le véhicule ;

1 000 euros de dommages et intérêts pour défaut de remise des documents de fin de contrat

Condamne la société Rico à remettre à M. [H] [S] le solde de tous comptes, le certificat de travail, et l'attestation Pôle Emploi devenu France Travail, dans les trente jours de la signification de l'arrêt ;

Condamne la société Rico à payer à M. [H] [S] la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Déboute les parties du surplus de leurs demandes ;

Condamne la société Rico aux dépens de première instance et d'appel.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT