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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 4, 22 mai 2024, n° 22/08672

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Défendeur :

Ludendo (SAS), Ludendo Commerce France (SAS), SCP BTSG, MJA (Selafa)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Bodard-Hermant

Conseillers :

Mme Depelley, Mme Dallery

Avocats :

Me Diouf, Me Bouhenic

T. com. Paris, 19e ch., du 13 oct. 2021,…

13 octobre 2021

EXPOSÉ DU LITIGE

La société Ludendo Commerce France, qui a pour activité le commerce de détail de jeux et jouets en magasin spécialisé, avait proposé à M. [V], salarié, de créer avec lui la société Valany Jouets, afin de continuer à exploiter le magasin de jouets intégré sous l'enseigne La Grande Récré de [Localité 11]. Le capital de la société était réparti entre M. [V], à hauteur de 55%, et Ludendo Commerce France, à hauteur de 45%.

Le 22 septembre 2014, un contrat de négociation exclusive a été signé entre les parties, fixant une période de négociations jusqu'au 31 mars 2015.

Le 23 décembre 2014, un contrat de concession a été conclu entre la SAS Ludendo, holding du groupe Ludendo et concédante de la marque La Grande Récrée, et Valany Jouets pour une durée de 7 ans à compter du 14 janvier 2015, ainsi qu'un contrat d'adhésion à la centrale d'achat et de référencement Ludendo, liant Valany Jouets et Ludendo Commerce France, pour une durée de 7 ans à compter du 14 janvier 2015, les deux contrats étant indissociables.

Le 14 janvier 2015, Ludendo Commerce France a cédé son fonds de commerce de [Localité 11] à Valany Jouets.

Par jugement du 13 mars 2018, les sociétés Ludendo et Ludendo Commerce France ont été placées en redressement judiciaire et la SCP BTSG et la SELAFA MJA ont été désignés mandataires judiciaires.

A cette occasion, Valany Jouets a déclaré deux créances de 252 000 euros chacune auprès de ces deux sociétés correspondant, selon elle, au dédommagement du préjudice subi en raison des agissements des sociétés Ludendo et Ludendo Commerce France préalablement à la conclusion des contrats de concession et d'adhésion à la centrale d'achat.

Le mandataire judiciaire des sociétés a refusé l'admission de ces créances au motif que "la société ne reconnaît pas ce montant dans ses livres".

Par ordonnance du 3 octobre 2019, le juge commissaire a constaté que le litige dépassait son office et a renvoyé les parties à mieux se pourvoir.

Par jugement du 18 septembre 2018, Valany Jouets a été placée en liquidation judiciaire.

Par actes des 7 et 8 novembre 2019, Maître [T], ès qualités de liquidateur judiciaire de Valany Jouets, a assigné les sociétés Ludendo et Ludendo Commerce France, la SCP BTSG et la SELAFA MJA devant le tribunal de commerce de Paris pour faire constater que les sociétés Ludendo et Ludendo Commerce France ont manqué à leur obligation précontractuelle d'information au sens des articles L. 330-3 et R. 330-1 du code de commerce et pour que soient fixées au passif des sociétés les créances déclarées à ce titre par Valany Jouets.

Par jugement du 13 octobre 2021, le tribunal de commerce de Paris a statué en ces termes :

- Déboute la SAS LUDENDO et la SAS LUDENDO COMMERCE FRANCE de leur demande de mise hors de cause de la SCP BTSG, en la personne de Maître [Z] [L] et de la SELAFA MJA, en la personne de Maître [X] [N], ès qualités de mandataire judiciaire des sociétés LUDENDO et LUDENDO COMMERCE France ;

- Déboute Maître [E] [T], mandataire judiciaire, ès qualités de liquidateur judiciaire de la SARL VALANY JOUETS de sa demande de dommages et intérêts ;

- Déboute Maître [E] [T], mandataire judiciaire, ès qualités de liquidateur judiciaire de la SARL VALANY JOUETS de sa demande de fixation de la créance déclarée par la société VALANY JOUETS au passif de la société LUDENDO SAS à la somme de 252.000 euros et de sa demande de fixation de la créance déclarée par la société VALANY JOUETS au passif de la société LUDENDO COMMERCE France ;

- Laisse à la charge de chacune des parties les frais non compris dans les dépens que celles-ci ont engagés dans cette instance. Il n'y aura donc pas lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

- Rejette les demandes des parties, autres, plus amples ou contraires ;

- Ordonne l'exécution provisoire du jugement à intervenir ;

- Condamne Maître [E] [T], mandataire judiciaire, ès qualités de liquidateur judiciaire de la SARL VALANY JOUETS, aux dépens, dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 163,21 € dont 26,99 € de TVA.

Par déclaration reçue au greffe de la Cour le 28 avril 2022, Me [T] ès qualités a interjeté appel de ce jugement.

Il a également fait assigner en intervention forcée devant la Cour, par acte 13 novembre 2023, la SCP BTSG, Me [Z] [L], ès qualités de liquidateur judiciaire des sociétés Ludendo et Ludendo Commerce France ainsi que la SELAFA MJA, Me [X] [N], ès qualités de liquidateur judiciaire des sociétés Ludendo et Ludendo Commerce France.

Aux termes de ses dernières conclusions, déposées et notifiées par RPVA le 27 juillet 2022, Me [T] ès qualités demande à la Cour de :

- DECLARER Maître [E] [T], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société VALANY JOUETS recevable et bien fondé en son appel

- INFIRMER le jugement rendu le 13 octobre 2021, en ce qu'il a statué comme suit :

* Déboute Maître [E] [T], mandataire judiciaire, ès qualités de liquidateur judiciaire de la SARL VALANY JOUETS de sa demande de dommages et intérêts,

* Déboute Maître [E] [T], mandataire judiciaire, ès qualités de liquidateur judiciaire de la SARL VALANY JOUETS de sa demande de fixation de la créance déclarée par la société VALANY JOUETS au passif de la société LUDENDO SAS à la somme de 252.000 euros et de sa demande de fixation de la créance déclarée par la société VALANY JOUETS au passif de la société LUDENDO COMMERCE FRANCE,

* Laisse à la charge de chacune des parties les frais non compris dans les dépens que celles-ci ont engagés dans cette instance. Il n'y aura donc pas lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

* Rejette les demandes des parties, autres, plus amples ou contraires, à savoir :

° Constater que les sociétés LUDENDO SAS et LUDENDO COMMERCE FRANCE ont gravement manqué à leur obligation précontractuelle d'information mentionnée aux articles L.330-3 et R. 330-1 du Code de commerce,

° Fixer les créances déclarées par la société VALANY JOUETS au passif de la société LUDENDO SAS à la somme de 252.000 euros,

° Fixer les créances déclarées par la société VALANY JOUETS au passif de la société LUDENDO COMMERCE FRANCE à la somme de 252.000 euros,

° Condamner in solidum les sociétés LUDENDO SAS et LUDENDO COMMERCE FRANCE à payer à la société VALANY JOUETS représentée par Maître [E] [T], ès qualités, une somme de 12.500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens

* Condamne Maître [E] [T], mandataire judiciaire, ès qualités de liquidateur judiciaire de la SARL VALANY JOUETS, aux dépens, dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 163,21 € dont 26,99 € de TVA.

- Le CONFIRMER pour le surplus

ET Statuant à nouveau sur les chefs d'infirmation du jugement entrepris,

Vu les articles L.330-3 et R. 330-1 du Code de commerce

- CONSTATER que les sociétés LUDENDO SAS et LUDENDO COMMERCE FRANCE ont gravement manqué à leur obligation précontractuelle d'information mentionnée aux articles L.330-3 et R. 330-1 du Code de commerce

- FIXER les créances déclarées par la société VALANY JOUETS au passif de la société LUDENDO SAS à la somme de 252.000 euros

- FIXER les créances déclarées par la société VALANY JOUETS au passif de la société LUDENDO COMMERCE FRANCE à la somme de 252.000 euros

- CONDAMNER in solidum les sociétés LUDENDO SAS et LUDENDO COMMERCE FRANCE à payer à la société VALANY JOUETS représentée par Maître [E] [T], ès qualités, une somme de 18.500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel,

- ACCORDER à la SELARL PIEUCHOT ET ASSOCIES représentée par Maître Sophie BOURDIN le bénéfice du droit de recouvrement direct instauré par l'article 699 du Code de Procédure Civile.

Aux termes de leurs dernières conclusions, transmises par RPVA le 22 janvier 2024, Ludendo, Ludendo Commerce France, la SCP BTSG et la SELAFA MJA demandent à la Cour de :

Vu les articles L.330-3 et R. 330-1 du Code de Commerce,

Vu le jugement du tribunal de Commerce de Paris en date du 13 octobre 2021,

Vu les pièces versées aux débats,

- CONFIRMER en tous ses points le jugement rendu par le Tribunal de Commerce de Paris en date du 13 octobre 2021

En toutes hypothèses :

- CONDAMNER Maître [E] [T], ès qualités, à payer à chacune des intimées la somme de 5.000 € au titre de l'article 700 du CPC ainsi qu'aux entiers dépens.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 23 janvier 2024.

MOTIVATION

Sur la mise hors de cause de la SCP BTSG et de la SELAFA MJA

Si les parties développent ce point dans leurs écritures, la Cour constate qu'elle n'est saisie d'aucune demande de mise hors de cause de la SCP BTSG et de la SELAFA MJA au vu du dispositif des conclusions qui lui sont soumises.

Sur le manquement des sociétés Ludendo à leur obligation d'information précontractuelle

Valany Jouets soutient que les dispositions de l'article L.330-3 du code de commerce s'appliquent à un contrat de concession, observant à cet égard que les sociétés Ludendo ont fourni un document d'information précontractuelle.

Elle fait valoir d'abord, qu'en raison de l'indissociabilité des contrats de concession et d'adhésion à la centrale d'achat, les deux sociétés, Ludendo et Ludendo Commerce France, devaient lui fournir des documents d'information précontractuelle sincères.

Ensuite, elle dit n'avoir reçu qu'un prévisionnel simpliste et qu'ainsi, à défaut de communication du reste des documents et informations tels qu'exigés par le code de commerce, les sociétés engagent leur responsabilité de ce chef, que le seul document d'information précontractuelle fourni comporte 6 pages, essentiellement composées de cartes et plan du magasin, de la zone commerciale, zone de chalandise, du profil socio-économique de la zone et d'un tableau prévisionnel.

Selon elle, ce document ne répond pas aux exigences de l'article L.330-3 du code de commerce, en ce qu'il ne fait pas état de l'ancienneté et de l'expérience de l'entreprise, de l'état et des perspectives de développement du marché concerné, de l'importance du réseau d'exploitants, de la durée, des conditions de renouvellement, de résiliation et cession du contrat et du champ des exclusivités. De même, elle considère qu'aucunes des exigences posées par l'article R.330-1 du code de commerce n'est respectée.

Elle poursuit en soutenant que le prévisionnel transmis n'était pas réaliste, prévoyant en effet, un chiffre d'affaires de 797 000 euros la première année, 825 000 euros la deuxième année et 853 000 euros la troisième année alors qu'elle n'a réalisé que 766 000 euros la première année, 707 000 euros la deuxième année et 645 000 euros la troisième année et qu'elle a fait l'objet, trois ans après la reprise du fonds de commerce, d'un redressement judiciaire, converti en liquidation judiciaire.

Elle ajoute que la baisse du chiffre d'affaires a entraîné une baisse de marge importante et qu'au regard de la durée de 7 ans prévue pour les contrats, la perte de marge subie sur cette durée s'évalue à la somme de 534 000€, à laquelle est appliquée un pourcentage de 95% de perte de chance de ne pas avoir contracté avec les sociétés Ludendo, soit 500 000€et qu'ainsi une somme de 252 000€ est à déclarer au passif de chacune des sociétés.

Elle reproche aussi aux sociétés Ludendo de ne pas avoir pris en compte le développement de la vente de jouets en ligne dans leur prévisionnel et de ne pas l'avoir informée des difficultés financières que le groupe connaissait depuis plusieurs années.

Enfin, elle soutient que, contrairement à ce qu'affirment les sociétés Ludendo, l'indépendance du concessionnaire ne les dispense pas de leur obligation d'information précontractuelle, de même que l'ancien poste de directeur régional détenu par M. [V] ne remet pas en cause cette obligation, celui-ci détenant une position à vocation commerciale et non comptable, et n'ayant pas accès aux chiffres réalisés par l'enseigne, outre que le passage d'un magasin intégré à une exploitation indépendante aurait mérité une information plus complète et qu'en toute hypothèse, la jurisprudence a eu l'occasion de confirmer le caractère d'ordre public du texte en cause.

Les sociétés Ludendo rétorquent que Valany Jouets est irrecevable en ses demandes fondées sur des dispositions propres au contrat de franchise.

En tout état de cause, elles soutiennent avoir parfaitement observé les obligations d'information précontractuelle de l'article L. 330-3 du code de commerce, toutes les informations pertinentes ayant été communiquées à l'appelante au gré des documents transmis (DIP, contrats de concession et d'adhésion, acte de cession de fonds de commerce).

Elles ajoutent que, conformément à la jurisprudence de la Cour de cassation, le caractère imparfait de l'information donnée n'est sanctionné que s'il est démontré que le candidat à la franchise a été empêché de s'engager en connaissance de cause et ignorait légitimement l'information. Or, selon elles, M. [V] ayant été successivement directeur de magasin, directeur de pôle de développement, directeur régional Bretagne et directeur de pôle, entre 2006 et 2014, n'a pu s'engager qu'en connaissance de cause, ce d'autant qu'entre le contrat de négociation et la reprise effective du magasin de [Localité 11], 6 mois se sont écoulés, lui laissant un temps de réflexion suffisant.

Elles ajoutent que le concessionnaire a pu prendre connaissance des livres de comptabilité des trois derniers exercices comptables précédant celui de la vente, ainsi que d'un document présentant les chiffres d'affaires mensuels réalisés entre la clôture du dernier exercice et le mois précédant celui de la vente, outre qu'en tant que professionnel autonome, il devait également effectuer ses propres recherches sur la pertinence et la rentabilité économique de son projet, ce d'autant que M. [V] est un professionnel averti du secteur.

Enfin, les sociétés Ludendo expliquent que la différence entre le prévisionnel transmis à Valany Jouets et les chiffres effectivement réalisés est due à divers facteurs, tels qu'une baisse globale du marché du jouet à compter de la fin de l'année 2015 provoquée par la concurrence des jeux vidéo et la progression des ventes en ligne ou encore les fautes de gestion du concessionnaire, que celui-ci reconnaît lui-même. En tout état de cause, elles estiment que la différence avec le prévisionnel ne dépasse pas la marge d'erreur inhérente à toute donnée de nature prévisionnelle, observant que la jurisprudence en la matière retient la responsabilité du franchiseur, le plus souvent, lorsque la différence avoisine les 50% ce qui n'est pas le cas en l'espèce.

Réponse de la Cour

Si, ainsi que le font valoir les sociétés Ludendo, un contrat de concession diffère d'un contrat de franchise en ce que notamment un concessionnaire ne transmet pas de savoir- faire contrairement au franchiseur, il n'en demeure pas moins que les dispositions de l'article L 330-3 du code de commerce s'agissant de l'obligation d'information précontractuelle sont applicables au contrat de concession ainsi que le tribunal l'a exactement retenu.

En effet, cet article dispose en son premier alinéa :

"Toute personne qui met à la disposition d'une autre personne un nom commercial, une marque, ou une enseigne, en exigeant d'elle un engagement d'exclusivité ou de quasi-exclusivité pour l'exercice de son activité, est tenue, préalablement à la signature de tout contrat conclu dans l'intérêt commun des deux parties, de fournir à l'autre partie, un document donnant des informations sincères, qui lui permette de s'engager en connaissance de cause.

(')"

En l'espèce, le 23 décembre 2014, la SAS Ludendo, holding du groupe Ludendo et concédante de la marque La Grande Récrée, et Valany Jouets ont conclu un contrat de concession pour une durée de 7 ans à compter du 14 janvier 2015, et Valany Jouets, et Ludendo Commerce France ont conclu un contrat d'adhésion à la centrale d'achat et de référencement Ludendo pour une durée de 7 ans à compter du 14 janvier 2015, les deux contrats étant indissociables.

Par conséquent, les sociétés Ludendo étaient redevables d'une obligation d'information précontractuelle à l'égard de Valany Jouets.

Selon l'article L 330-3 précité, le DIP précise notamment l'ancienneté et l'expérience de l'entreprise, l'état et les perspectives de développement du marché.

En l'espèce le DIP fourni à Valany Jouets comporte 6 pages ( pièce 6 des intimées) comprenant une carte localisant la ville de [Localité 11] qui précise sa population et l'évolution de celle-ci entre 1999 et 2008, une carte portant sur la zone de chalandise , la population de celle-ci et son évolution entre 1999 et 2008, le profil socio-économique de la zone précisant notamment le taux de chômage du département au 1er trimestre 2014 et la moyenne des revenus par ménage de la zone de chalandise par rapport à la moyenne de la France, une carte des zones commerciales de [Localité 11], une carte situant le magasin de [Localité 11] La Grande Récré et un document intitulé "Focus marché" comportant une estimation du marché et du chiffre d'affaires prévisionnel mentionnant un chiffre d' "affaires réel 2013 du magasin de 930 611€ TTC et une "Tendance 2014 : +0,30% à début novembre 2014".

Par ailleurs, ainsi que le font valoir les intimées, le contrat de concession, le contrat d'adhésion à la centrale d'achat et le contrat de fonds de commerce de [Localité 11] signés par la société Valany Jouets contiennent des éléments sur l'ancienneté et l'expérience des sociétés, précisant notamment que le groupe Ludendo est propriétaire du fonds cédé depuis le 2 août 2012.

Valany Jouets par son liquidateur, dont il convient de rappeler que 45% des parts appartiennent à la société Ludendo Commerce France, ne démontre pas, ainsi qu'il lui incombe, que les informations qui lui ont été fournies ne lui ont pas permis de s'engager en connaissance de cause et ainsi ne démontre pas l'existence d'une perte de chance de ne pas contracter invoquée.

A cet égard, il sera relevé ainsi qu'il résulte notamment de l'acte de cession de fonds de commerce de [Localité 11] signé le 14 janvier 2015 (pièce 5 des intimées) que le gérant de la société Valany Jouets, M. [P] [J], était au moment de la cession, salarié de la société Ludendo Commerce France et exerçait la fonction de "Directeur Régional".

Selon le descriptif de poste produit (pièce 12 des intimées), le directeur régional a notamment pour mission de participer à l'élaboration des objectifs à long terme et de suivre et analyser les résultats commerciaux régionaux, de définir les actions correctrices et les plans d'action afin d'améliorer la performance magasins et région, et de réaliser le "reporting" auprès de sa hiérarchie. Il s'en déduit que le gérant de la société Valany Jouets était particulièrement bien informé sur la situation du magasin, objet de la reprise.

S'il est soutenu qu'il s'agissait à l époque de magasins intégrés dont les données sont différentes de celles d'un magasin indépendant, il sera observé qu'il incombait à la société Valany Jouets d'effectuer ses propres recherches sur la pertinence et la rentabilité économique de son projet,

S'agissant de l'absence de production des comptes annuels des deux derniers exercices prévus par l'article R 330-1 du code précité, il sera relevé que le contrat de cession de fonds de commerce signé le 14 janvier 2015 comporte en son article 4 les chiffres d'affaires et résultats d'exploitation réalisés dans le fonds de commerce au cours des deux exercices comptables de 2012 et 2013 et qu'il mentionne qu'avant la signature, conformément à l'article L 141-2 du code de commerce, le cédant et le cessionnaire ont notamment visé les livres de comptabilité se référant aux trois dernières années d'exploitation.

Par ailleurs, si lorsqu'un tableau prévisionnel de l'activité est fourni, il se doit d'être sérieux et ne peut faire état de prévisions exagérément optimistes. En l'espèce, la différence de chiffre d'affaires entre le prévisionnel (pièce 13 de l'appelante) et la réalité s'élève à 31 000 € la première année (797 000 - 766 000), à 118 000 € la deuxième année (825 000 - 707 000) et 208 000 € la troisième année (853 000 - 645 000). De même, la différence de marge nette entre le prévisionnel et la réalité s'élève à 86 000 € la première année (367 000 - 281 000), 69 000€ la deuxième année (392 000 - 323 000) et 74 000 € la troisième année (405 000 - 331 000).

Ce différentiel de moins de 20% en moyenne ne dépasse par la marge d'erreur inhérente à toute prévision.

Il sera ajouté que la société Valany Jouets par son liquidateur ne peut faire grief à la société Ludendo Commerce France ni de ne pas l'avoir informée de la procédure de sauvegarde financière accélérée qu'elle a connu alors que celle-ci a été prononcée en décembre 2015, ni davantage de ne pas publier ses comptes alors qu'elle vise les années 2016,2017, 2018 et 2019, comme pour la société Ludendo SAS (ses pièces 20 et 21) années postérieures à la cession et au contrat de concession.

Dès lors, le jugement est confirmé en ce qu'il a débouté la société Valany Jouets par son liquidateur de ses demandes de dommages-intérêts, et ainsi de sa demande de fixation de créance au passif des sociétés Ludendo.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

Me [E] [T] ès qualités de liquidateur de la société Valany Jouets qui succombe en son appel, doit être condamné aux dépens.

Il convient de faire droit à la demande présentée par les intimées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile dans les termes du dispositif ci-après et de débouter Me [T] ès qualités de sa demande à ce titre. La somme allouée par le tribunal de ce chef est confirmée.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant dans les limites de l'appel,

Confirme le jugement ;

Y ajoutant,

Déboute Me [E] [T] ès qualités de liquidateur de la société Valany Jouets de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne Me [E] [T] ès qualités de liquidateur de la société Valany Jouets aux dépens d'appel et à payer aux sociétés Ludendo SAS et Ludendo Commerce France, la SELAFA MJA prise en la personne de Me [X] [N], ès qualités de mandataire liquidateur de Ludendo Commerce France et Ludendo et la SCP BTSG prise en la personne de Me [Z] [L], ès qualités de mandataire liquidateur des sociétés Ludendo Commerce France et Ludendo à payer la somme globale de 5 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.