CA Paris, Pôle 5 ch. 4, 29 mai 2024, n° 21/18048
PARIS
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
NPS (SARL)
Défendeur :
Achats Marchandises Casino (SAS), Distribution Casino France (SAS)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Bodard-Hermant
Conseillers :
Mme Depelley, M. Richaud
Avocats :
Me Guerre, Me Cussac
EXPOSE DU LITIGE
La société NPS a pour activité la fourniture d'installations de système de sécurité.
La société AMC est une centrale d'achats du groupe Casino.
La société Distribution Casino France exploite les magasins aux enseignes " Géant Casino ", " Casino " et " Spar ".
La société AMC négocie pour le compte des filiales du groupe Casino, dont la société Distribution Casino France, les conditions tarifaires d'achat de produits ou de services auprès de fournisseurs.
Au cours de l'année 2015, la société NPS s'est rapprochée de la société AMC pour fournir au groupe Casino des installations de systèmes de vidéosurveillance de ses magasins.
La société AMC agissant également " d'ordre et pour le compte des sociétés du périmètre du groupe Casino " a signé le 1er juin 2015 avec la société NPS " un contrat cadre de référencement -direction achat frais généraux -groupe Casino " pour une période initiale d'un an.
A compter du 3 août 2015 et jusqu'au 27 juin 2016, la société Distribution Casino France a passé à la société NPS plusieurs commandes de systèmes de vidéo protection et de produits annexes que cette dernière a installés sur près de 200 sites du groupe Casino. Les commandes ont cessé en septembre 2016.
Des ristournes de fin d'année ont été versées à la société Distribution Casino France à hauteur de 199 148,75 euros TTC au titre de l'année 2015 et de 108 505,84 euros au titre de l'année 2016.
Le 22 octobre 2016, la société NPS a adressé au groupe Casino une lettre recommandée sollicitant le paiement de diverses factures en souffrance et le maintien de leur relation commerciale.
C'est dans ce contexte que par actes des 17 et 20 février 2020, la société NPS a assigné les sociétés AMC et Distribution Casino France devant le tribunal de commerce de Paris pour obtenir des dommages et intérêts pour rupture brutale de la relation commerciale et obtention d'avantages sans contrepartie.
Par jugement du 27 septembre 2021, le tribunal de commerce de Paris a :
- Condamné la société Distribution Casino France à payer à la société NPS la somme de 1 149,60 euros TTC au titre des factures impayées et non prescrites, somme majorée des intérêts de retard au taux de trois fois l'intérêt légal sur ce montant calculés à compter du 1er mai 2018 ;
- Condamné la société Distribution Casino France à payer à la société NPS la somme de 120 euros d'indemnité forfaitaire de recouvrement ;
- Condamné solidairement la société Distribution Casino France et la société AMC (anciennement EMC Distribution) à payer à la société NPS la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Débouté les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires au présent dispositif ;
- Condamné solidairement la société Distribution Casino France et la société Achats Marchandises Casino (anciennement EMC Distribution) qui succombent aux dépens, dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 95,13 euros dont 14,64 euros de TVA.
Par déclaration reçue au greffe de la Cour le 15 octobre 2021 la société NPS a interjeté appel de ce jugement.
La société NPS aux termes de ses dernières conclusions, déposées et notifiées le 8 janvier 2024, demande à la Cour de :
Vu les articles Art. L.441-6, et L.442-6 anciens du code de commerce, et les articles 1302-1 et 1342 du code civil,
Vu l'article 2254 du Code civil,
- Réformer le Jugement entrepris, sauf :
- En ce qu'il a ordonné le paiement par Distribution Casino France des 3 factures de la société NPS émises après le 17 février 2018 pour un montant total de 1 149,60 euros TTC, somme majorée des intérêts de retard au taux de 3 fois l'intérêt légal sur l'ensemble calculés à compter du 1er mai 2018, et
- En ce qu'il a condamné Distribution Casino France à payer à NPS la somme de 120 euros correspondant à l'indemnité forfaitaire de recouvrement de 40 euros des trois factures impayées, et
- En ce qu'il condamné solidairement la SAS Distribution Casino France et la SAS Achats Marchandises Casino à payer à la NPS la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du CPC et aux entiers dépens et
- En ce qu'il déclaré non prescrites et recevables les demandes de NPS formulées au titre de la brusque rupture et de la répétition de la RFA versée à Casino.
Pour le reste, Statuant de nouveau :
- Juger que la demande de paiement de la société NPS de ses 4 factures émises avant le 17 février 2018 pour un montant total de 2 743,20 euros est recevable comme non prescrite ;
- Juger que l'avantage tarifaire causé par la remise de fin d'année acquittée entre juin 2015 et septembre 2016 par NPS n'a aucune justification légale ;
- Condamner en conséquence solidairement Achats Marchandises Casino et Distribution Casino France à restituer à NPS la somme de 256 379 euros hors taxes (deux cent cinquante-six mille trois cent soixante-dix-neuf euros), soit 307 655 euros (trois cent sept mille six cent cinquante-cinq euros) TTC ;
- Condamner solidairement Achats Marchandises Casino et Distribution Casino France à payer à NPS les intérêts au taux légal sur la somme correspondante de 307 655 euros ;
- Ordonner la capitalisation desdits intérêts à compter du 20 février 2020, date de l'assignation ayant demandé cette capitalisation ;
- Condamner de surcroît solidairement Achats Marchandises Casino et Distribution Casino France à payer à NPS la somme de 453 075 euros (quatre cent cinquante-trois mille soixante-quinze euros) hors taxes, soit 543 690 euros (cinq cent quarante-trois mille six cent quatre-vingt-dix euros) TTC au titre d'indemnité de brusque rupture ;
- Condamner Distribution Casino France à payer à NPS la somme totale de 2.743,20 euros (deux mille sept-cent quarante-trois euros et vingt centimes) TTC au titre de ses 4 factures impayées émises avant le 17 février 2018, majorée des intérêts de retard au taux de trois fois l'intérêt légal ;
- Ordonner la capitalisation desdits intérêts à compter du 20 février 2020, date de l'assignation ayant demandé cette capitalisation ;
- Condamner Distribution Casino France à payer à NPS la somme de 160 euros (cent soixante euros), correspondant à l'indemnité forfaitaire de recouvrement de 40 euros au titre de ses 4 factures impayées ;
En tout état de cause :
- Débouter Distribution Casino France et Achats Marchandises Casino de leur appel incident et de l'ensemble de leurs demandes ;
- Condamner solidairement Distribution Casino France et Achats Marchandises Casino à payer la somme de 10 000 euros (dix mille euros) euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
- Condamner solidairement Distribution Casino France et Achats Marchandises Casino aux entiers dépens de l'instance d'appel.
Les sociétés AMC et Distribution Casino France aux termes de leurs dernières conclusions, déposées et notifiées le 16 janvier 2024, demandent à la Cour de :
Sur le paiement des factures :
- Confirmer le jugement entrepris en ce que le Tribunal a jugé que les factures de 2017 étaient prescrites.
- L'infirmer en ce qu'il a condamné la société Distribution Casino France à payer une somme de 1 149,60 euros TTC au titre des factures de 2018, les intérêts sur cette somme et une somme de 120 euros à titre d'indemnité forfaitaire de recouvrement ; statuant à nouveau, débouter la société NPS de toutes ses demandes, fins et conclusions afférentes aux factures de 2018.
Sur la " répétition " de la RFA :
- A titre principal, confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la société NPS de sa demande de voir condamner les sociétés AMC et Distribution Casino France à lui restituer la somme de 256 379 euros hors taxes (deux cent cinquante-six mille trois cent soixante-dix-neuf euros), soit 307 655 euros (trois cent sept mille six cent cinquante-cinq euros) TTC.
A titre subsidiaire, si la Cour estimait devoir entrer en voie de réformation, vu l'article 4.4 du contrat de référencement, juger la demande prescrite et débouter de plus fort la société NPS de toutes ses demandes, fins et conclusions ; juger la société AMC hors de cause,
Sur la brusque rupture :
- A titre principal, confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la société NPS de sa demande de voir condamner solidairement les sociétés Achats Marchandises Casino et Distribution Casino France à payer à NPS la somme de 453 075 euros (quatre cent cinquante-trois mille soixante-quinze euros) hors taxes, soit 543 690 euros (cinq cent quarante-trois mille six cent quatre-vingt-dix euros) TTC au titre d'indemnité de brusque rupture.
- A titre subsidiaire, si la Cour estimait devoir entrer en voie de réformation, vu l'article 4.4 du contrat de référencement, juger la demande prescrite et débouter de plus fort la société NPS de toutes ses demandes, fins et conclusions ;
- Juger la société AMC hors de cause.
Sur l'article 700 CPC et les dépens :
- Infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné les sociétés AMC et Distribution Casino France à payer à NPS une somme de 1.000 € au titre de l'article 700 CPC et aux dépens ; Statuant à nouveau, condamner la société NPS à verser à chacune des sociétés AMC et Distribution Casino France, au titre de la procédure de première instance, une somme de 1 000 euros ainsi qu'aux entiers dépens.
- Condamner la société NPS, au titre de la procédure d'appel, à payer à chacune des sociétés AMC et Distribution Casino France une somme de 15 000 euros au titre de l'article 700 CPC ainsi qu'en tous les dépens.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 23 janvier 2024.
MOTIVATION
I- Sur la demande en paiement des factures
Moyens des parties
La société NPS réclame à la société Distribution Casino France le paiement de sept factures émises entre le 22 novembre 2017 et le 23 mars 2018 pour une somme totale de 3892,80 euros et correspondant à des prestations d'intervention technique lors de panne des systèmes de vidéosurveillance installés dans le cadre du contrat de référencement. Elle précise que ces prestations de maintenance faites à la demande de Casino, en dehors de la garantie des vices cachés, devaient faire l'objet d'une facturation distincte, et se trouvent justifiées par les bons d'interventions. La société NPS expose qu'elle a réclamé le paiement de ces factures par courriels des 8 février et 2 juillet 2018 ainsi que par lettre recommandée avec accusé réception de son conseil du 22 octobre 2018. Aussi, la société NPS entend obtenir la réformation du jugement en ce qu'il n'a accordé que le paiement de la somme de 1149,60 euros, considérant que pour les factures émises avant le 17 février 2018 d'un montant de 2743,20 euros la créance était prescrite en application de l'article 4.4 du contrat de référencement. La société NPS fait valoir que cet article qui prévoit que toute créance non revendiquée dans un délai de deux ans à compter de son exigibilité sera prescrite, n'exige pas la délivrance d'une assignation pour interrompre la prescription mais seulement que la créance soit " revendiquée ". Elle analyse cette clause comme dérogeant, en application de l'article 2254 du code civil, tant à la durée de la prescription qu'à la cause d'interruption de celle-ci prévue à l'article 2241 du code civil. Aussi, elle estime que ces courriels et le courrier recommandé sont la revendication formelle de sa créance dans le délai de deux années de leur exigibilité, en sorte que sa demande en paiement n'est pas prescrite.
La société Distribution Casino France répond que la demande en paiement de la somme de de 2743,20 euros est prescrite en application de l'article 4.4 du contrat conclu entre les parties et réduisant le délai de prescription de 5 à 2 ans. Elle fait valoir que seule l'assignation était susceptible d'interrompre le délai de prescription conventionnellement réduit à deux ans comme le permet l'article 2245 du code civil. Elle relève que la clause d'aménagement conventionnelle de la prescription, en ce qu'elle vise à déroger seulement à l'article L.110-4 du code de commerce (durée de la prescription), n'avait pas pour objet de déroger aux causes d'interruption de la prescription prévues par la loi et notamment l'article 2241 du code civil. Elle en déduit que les courriels et le courrier recommandé invoqués par la société NPS n'étaient pas susceptibles d'interrompre le délai de prescription.
Pour la demande en paiement des factures du 21 mars 2018, la société Distribution France soutient que les prestations ne sont pas dues, dès lors qu'elles ne sont pas justifiées pour certains magasins ou concernent le remplacement de pièces sous garantie. Elle relève en outre l'absence d'accord des parties sur le prix. Elle demande la réformation du jugement sur ce point.
Réponse de la Cour
.Sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription
L'article 110-4 du code de commerce dispose que :
I. -Les obligations nées à l'occasion de leur commerce entre commerçants ou entre commerçants et non-commerçants se prescrivent par cinq ans si elles ne sont pas soumises à des prescriptions spéciales plus courtes.
II.-Sont prescrites toutes actions en paiement :
1° Pour nourriture fournie aux matelots par l'ordre du capitaine, un an après la livraison ;
2° Pour fourniture de matériaux et autres choses nécessaires aux constructions, équipements et avitaillements du navire, un an après ces fournitures faites ;
3° Pour ouvrages faits, un an après la réception des ouvrages.
Selon l'article 2241 du code civil, la demande en justice, même en référé, interrompt le délai de prescription ainsi que le délai de forclusion.
L'article 2245 du code civil prévoit que :
" La durée de la prescription peut être abrégée ou allongée par accord des parties. Elle ne peut toutefois être réduite à moins d'un an ni étendue à plus de dix ans.
Les parties peuvent également, d'un commun accord, ajouter aux causes de suspension ou d'interruption de la prescription prévues par la loi.
Les dispositions des deux alinéas précédents ne sont pas applicables aux actions en paiement ou en répétition des salaires, arrérages de rente, pensions alimentaires, loyers, fermages, charges locatives, intérêts des sommes prêtées et, généralement, aux actions en paiement de tout ce qui est payable par années ou à des termes périodiques plus courts. "
L'article 4.4 du contrat de référencement intitulé " Paiement " sous le Titre " Article 4 Conditions tarifaires-facturation-paiement " stipule que :
" Casino règlera le Prestataire et/ou Fournisseur selon les modalités de paiement définies à l'Annexe 4.
Les délais de règlement sont fixés à 45 jours fin de mois, date de facture (hors délais réglementés et exceptions prévues par les textes applicables), par LCR.
En application des dispositions de l'article L.441-6 du code de commerce, tout retard de paiement pourra conduire à l'application d'une pénalité égale à trois fois le taux d'intérêt légal sur toutes les sommes dues dès le premier jour de retard et jusqu'à complet paiement ainsi que d'une indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement de 40 euros par facture payée en retard.
En cas de difficultés liées au paiement, la procédure de réclamation auprès de Casino devra être respectée.
Casino se réserve le droit de suspendre ou, le cas échéant, refuser le paiement des factures en cas de non-exécution ou de mauvaise exécution par le Prestataire et /ou Fournisseur de ses obligations, après avoir mis le Prestataire et/ou Fournisseur en mesure de contrôler la réalité des griefs qui lui sont opposés et de proposer une solution acceptable.
Une compensation conventionnelle s'opérera de plein droit entre les créances réciproques des parties, à quelque titre que ce soit, dans le cadre de l'exécution du Contrat.
L'acceptation de la commande par le Prestataire et /ou Fournisseur donne à CASINO le pouvoir irrévocable de déléguer à tout moment sa dette à toute filiale ou société apparentée.
Les parties conviennent que, par dérogation aux dispositions de l'Article L.110-4 du Code de Commerce, toute créance non revendiquée dans un délai de deux ans à compter de son exigibilité sera prescrite ". (reproduit en gras par la Cour)
L'action de la société NPS a pour objet une demande en paiement de factures émises entre le 22 novembre 2017 et le 21 mars 2018 relatives à des prestations d'interventions techniques sur les systèmes de vidéosurveillances installés dans les magasins Casino dans le cadre du contrat de référencement signé entre les parties.
La clause de l'article 4.4 dernier alinéa de ce contrat de référencement est bien applicable à cette action en paiement des prestations fournies par la société NPS à la société Distribution Casino France dans le cadre du contrat de référencement.
Il n'est pas contesté que cette clause, en application de l'article 2254 alinéa 1 du code civil, déroge à la prescription quinquennale prévue par l'article L110-4 du commerce pour les obligations nées entre commerçants pour leur commerce.
Cette clause, comme le soutient la société NPS en application de l'article 2254 alinéa 2, ajoute également à la cause d'interruption de la prescription prévue à l'article 2241 du code civil, en employant les termes d'exigibilité de " toute créance non revendiquée " pour déterminer le point de départ du délai de prescription réduit à 2 ans. En effet, cette clause en faisant référence à la revendication de la créance, vise une notion plus large que l'acte introductif d'instance, et peut dès lors recouvrir une demande formelle telle que celle formulée par le conseil de la société NPS par lettre recommandée du 22 octobre 2018 avec accusé de réception de Casino Service du 25 octobre 2018 (pièces NPS n° 7 et 12) en ces termes :
" (') vous avez, une fois les installations faites, demandé des prestations d'intervention en urgence, sur certains des systèmes de sécurité installés. Des factures ont été établies à la suite de ces interventions (contrairement à la procédure habituelle, Casino n'avait pas sollicité la conclusion de contrats de maintenance), pour un montant total de 4500 euros. Ces factures sont restées impayées. Votre service achat, en charge des paiements, exige en effet la production de bons de commande en la forme. Or ces interventions ont été faites à chaque dois, étant donné l'urgence, à la suite d'un échange d'emails, sans donc établissement d'un bon de commande (') Au vu des éléments qui précèdent et afin d'éviter toute difficulté, nous vous remercions de nous annoncer le paiement des factures en souffrance ('). "
Aussi, cette lettre reçue le 25 octobre 2018 par la société Distribution Casino France doit être analysée comme une " revendication de créance " de la société NPS au sens de la clause litigieuse et constitue dès lors une cause interruptive de la prescription pour être intervenue dans le délai de deux ans de la date d'exigibilité (45 jours, fin de mois, date facture) des factures émises entre le 22 novembre 2017 et le 21 mars 2018. Il s'en suit que l'action en paiement de ces factures pour un montant total de 3892,80 euros TTC, introduite devant le tribunal de commerce par acte d'huissier délivré les 17 et 20 février 2020, n'est pas prescrite en application de l'article 4.4 du contrat de référencement.
En conséquence, le jugement sera infirmé en ce qu'il a limité le montant de la condamnation en paiement de la société Distribution Casino France à la somme de 1149,60 euros TTC au titre de 3 factures impayées non prescrites outre 120 euros d'indemnité forfaitaire de recouvrement.
.Sur le fond de la demande en paiement
A l'appui de sa demande de la somme complémentaire de 2743,20 euros TTC en paiement des prestations techniques réalisées sur les sites des magasins du groupe casino pour des pannes sur les systèmes de vidéosurveillances installées par la société NPS, cette dernière verse aux débats :
- des courriels de demandes d'intervention des responsables de supermarchés Casino ( pièce NPS n°4) entre avril et octobre 2017
- Des bons d'interventions dans des supermarchés casino (pièce NPS n° 8)
- Des factures portant la mention de la date, nature et lieu de l'intervention, demande de par mail et nom du signataire (pièces NPS n°5) et pour un montant total de 3892,80 euros TTC
Il ressort de l'examen croisé de ces pièces que chacune des interventions facturées sont justifiées par une demande de mail et/ou un bon d'intervention.
La société Distribution Casino France ne conteste pas sérieusement la réalité de ces prestations, mais la prise en charge du coût des prestations d'intervention, sans démontrer que ces interventions relevaient de clause de garantie ou d'un contrat de maintenance.
Dès lors la société Distribution Casino France sera condamnée à payer à la société NPS la somme de 3 892,80 euros TTC en principal, majorée des intérêts de retard au taux de trois fois l'intérêt légal à compter du 1er mai 2018, outre 280 euros (40 €x 7) au titre des frais de recouvrement, visés sur les factures.
La capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil sera ordonnée.
II- Sur la demande fondée sur la rupture brutale de la relation commerciale
Exposé des moyens
La société NPS demande la condamnation solidaire des sociétés AMC et Distribution Casino France à lui payer la somme de 543 690 euros au titre d'une indemnité de brusque rupture. Elle fait valoir que le fondement de son action n'est pas le contrat mais la mise en 'uvre de la responsabilité délictuelle prévue à l'article L.442-6, I, 5° du code de commerce, en sorte que la clause contractuelle de prescription n'est pas applicable. Elle fait en outre valoir qu'une clause abrégeant trop le délai de prescription crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties et qu'en l'espèce, la réduction à deux années du délai de prescription constitue à l'évidence un indice d'abus de la puissance économique de Casino dans la relation d'affaires.
Sur le fond, la société NPS fait valoir qu'elle a noué une relation commerciale tant avec la société AMC qui a signé le contrat de référencement en son nom propre et en sa qualité de mandataire, qu'avec la société Distribution Casino France. Selon elle cette relation commerciale est établie au sens des dispositions de l'article précité, en ce qu'elle a généré un important chiffre d'affaires (2,5 M€) sur la période juin 2015 -septembre 2016, que l'ensemble des sites Casino ne sont pas équipés, que la relation s'est inscrite dans un contrat-cadre devenu à durée indéterminée en juin 2016 et qu'à aucun moment les sociétés Casino n'ont résilié ce contrat ni informé NPS de la fin de toute commande. Dans ces circonstances, cette dernière estime qu'elle était fondée à raisonnablement anticiper une certaine continuité du flux d'affaires avec le groupe Casino, peu important l'absence d'obligation d'approvisionnement. Elle relève ensuite que Casino a cessé toute commande en septembre 2016 sans aucun préavis. Elle soutient qu'au regard de l'importance du chiffre d'affaires réalisé avec Casino (un quart de son chiffre d'affaires global) et du contrat prévoyant un délai minimum de préavis de trois mois pour sa résiliation, elle devait pouvoir bénéficier d'un préavis de quatre mois pour la rupture de la relation commerciale établie. Elle estime son préjudice à la somme de 543 690 euros TTC en se basant sur un chiffre d'affaires mensuel moyen de 172 666 euros et une marge brute de 65,60% attestée par son expert-comptable.
Les sociétés AMC et Distribution Casino France prétendent que cette action en indemnité de brusque rupture est prescrite en application de l'article 4.4 du contrat de référencement. Elle prétend d'une part que la jurisprudence européenne et interne admet une incidence du contrat sur l'appréciation de la rupture de la relation commerciale et d'autre part que la clause a une portée très large en visant " toute créance " et englobe ainsi la créance d'indemnisation de la rupture prétendue brutale de la relation commerciale. Elle relève que la société NPS situe le fait générateur de la rupture à l'arrêt brusque des commandes en 2016 et n'a assigné qu'en février 2020, soit bien après le délai de deux ans de la clause d'aménagement conventionnel de la prescription. Elle fait valoir en outre que la société NPS ne démontre pas que cette clause crée un déséquilibre significatif au sens des dispositions de l'article L.442-6, I 2° du code de commerce. Elle relève notamment qu'aucune soumission n'est démontrée, la société NPS ayant librement souscrit au contrat de référencement.no France et n'a jamais passé de contrat d'application avec la société NPS. Elle demande sa mise hors de cause en ce qu'elle n'a pas noué de relation commerciale avec la société NPS.
La société Distribution Casino France soutient que la relation commerciale nouée avec la société NPS n'est pas établie au sens de l'article précité. Elle relève que le contrat-cadre ne contient ni obligation d'approvisionnement, ni engagement d'exclusivité, ni engagement de volume et que ce contrat-cadre ne peut constituer un indice d'une relation commerciale établie dès lors que celle-ci n'existe que par l'exécution de contrat d'application ou de commande. Elle ajoute que la nature des prestations, à savoir, l'installation complète d'un système de vidéosurveillance ou la fourniture de perche pour extension de hauteur, conduit nécessairement à une prestation limitée dans le temps dès lors qu'elle ne va pas équiper les sites déjà équipés ou nouvellement équipés. En toute hypothèse, elle estime que compte tenu de la durée de la relation se limitant à quelques mois et à l'absence de démonstration de la part du flux d'affaires dans le chiffre d'affaires global de la société NPS, le délai de préavis ne devait pas dépasser quinze jours. Enfin, elle critique le calcul du préjudice sur la base de la marge brute et non sur la marge sur coûts variables.
Réponse de la Cour,
.Sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription
La clause d'aménagement conventionnel de la prescription figure au dernier alinéa de l'article 4.4 intitulé " Paiement " sous le titre " Article 4 Conditions tarifaires-facturation-paiement ".
L'article 4.4 reproduit ci-dessus a pour objet d'organiser les modalités et délais de règlement des prestations du fournisseur et de régler toute difficulté liée au retard de paiement ou de paiement en cas de mauvaise exécution de la prestation fournie par NPS. Aussi " toute créance " visée au dernier alinéa de cet article recouvre uniquement les créances relatives au paiement des prestations exécutées, en sorte que l'action en paiement d'une indemnité pour rupture brutale de la relation commerciale établie n'est pas visée par cet article. En toute hypothèse, le point de départ du délai de prescription visé à l'article 4.4 est l'exigibilité de la créance, or la créance indemnitaire " revendiquée " par la société NPS n'est en l'état ni certaine ni liquidée.
Selon l'article 2224 du code civil, la prescription d'une action en responsabilité court à compter de la réalisation du dommage ou de la date à laquelle il est révélé à la victime, si celle-ci établit qu'elle n'en avait pas eu précédemment connaissance. Le point de départ de la prescription d'une action fondée sur la rupture brutale d'une relation commerciale établie est constitué par la notification de la rupture à celui qui s'en prétend victime, dès lors que celui-ci a connaissance, à cette date, de l'absence de préavis et du préjudice en découlant, et sans qu'il y ait lieu de tenir compte de l'éventualité d'une faute de sa part ayant pu justifier que l'auteur de la rupture ait mis un terme à la relation sans préavis ( en ce sens Com., 8 juillet 2020, pourvoi n° 18-24.441publié).
La rupture de la relation commerciale étant intervenue selon la société NPS lors de la cessation des commandes en septembre 2016, l'action indemnitaire introduite par actes d'huissier délivrés les 17 et 20 février 2020 moins de cinq années à compter de cette rupture, n'est pas prescrite.
Le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté les sociétés intimées de leur fin de non-recevoir tirée de la prescription.
Sur le fond
L'article L. 442-6, I, 5° du code de commerce dans sa version antérieure à l'ordonnance n°2019-359 du 24 avril 2019 applicable au litige, dispose qu'engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers, de rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, sans préavis écrit tenant compte de la durée de la relation commerciale et respectant la durée minimale de préavis déterminée, en référence aux usages du commerce, par des accords interprofessionnels.
Les parties s'opposent quant au caractère établi de leur relation.
La relation commerciale, pour être établie au sens des dispositions susvisées, doit présenter un caractère suivi, stable et habituel. Le critère de la stabilité s'entend de la stabilité prévisible, de sorte que la victime de la rupture devait pouvoir raisonnablement anticiper pour l'avenir une certaine continuité du flux d'affaires avec son partenaire commercial.
Certes la relation commerciale a généré sur la période de juin 2015 à septembre 2016 un flux d'affaires significatif représentant pour la société NPS près de 2,5 millions d'euros de chiffre d'affaires (pièce NPS n°10). Mais comme l'ont justement relevé les premiers juges, les prestations de la société NPS d'installation de matériels de surveillance représentaient pour les supermarchés Casino un investissement ponctuel et non une charge d'exploitation récurrente, et la société NPS ne prouve pas davantage en appel le nombre d'installations possiblement réalisables après avoir équipé environ 200 sites Casino. Aussi, cette dernière ne démontre pas qu'elle pouvait raisonnablement anticiper la poursuite des commandes, étant observé qu'aucun engagement de volume ou d'exclusivité n'a été pris par les sociétés Casino à l'égard de son prestataire NPS. Le contrat-cadre conclu entre les parties, en ce qu'il se limite aux caractéristiques générales de la relation de Casino avec son prestataire NPS, ne constitue pas davantage un indice du caractère établi de la relation commerciale, et ce quand bien même le service contrôle de gestion de Casino service a envoyé deux courriels circulaires en 2020 à la société NPS en sa qualité de " prestataire ou fournisseur référencé ".
Dès lors le caractère établi de la relation commerciale au sens de l'article précité n'étant pas démontré, le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté la société NPS de sa demande de condamnation solidaire des sociétés intimées au paiement d'une indemnité de brusque rupture.
III- Sur la demande en restitution des ristournes de fin d'année (RFA)
Exposé des moyens
La société NPS fait d'abord valoir que sa demande en restitution des RFA n'est pas fondée sur le contrat, mais les dispositions de l'article L.442-6, I, 1° ancien du code de commerce prévoyant un régime de responsabilité délictuelle, en sorte que la clause conventionnelle de prescription n'est pas applicable à cette demande. Elle ajoute que la RFA étant payable par année, l'aménagement conventionnel de la prescription n'est pas possible en application de l'article 2254 alinéa 3 du code civil.
Ensuite sur le fond, la société NPS relève que l'annexe 4 " conditions tarifaires " du contrat de référencement prévoit que le taux de RFA est calculé en fonction, non du chiffre d'affaires réalisé, mais du nombre de sites installées. Elle soutient qu'il ne s'agit pas d'une remise quantitative car aucun seuil de chiffre d'affaires n'est mentionné et en déduit qu'il s'agit d'une simple prime de référencement prohibée par les articles L.442-6, I 3° et L.442-6 II b du code de commerce dans leur version applicable au litige. Elle ajoute que cette RFA était sans contrepartie, aucun service spécifique légitime n'a été rendu à NPS qui justifiait le paiement d'une remise de 10% du chiffre d'affaires annuel et qui de surcroît est disproportionnée. Elle précise avoir été dans l'obligation d'accepter cette clause du contrat d'adhésion. En conséquence, elle sollicite le remboursement des RFA indues qu'elle a payé à hauteur de 307655 euros TTC et demande la condamnation solidaire de la société Distribution Casino France et de la société AMC, ayant agit pour ordre et pour le compte de la première en signant le contrat de référencement prévoyant ladite RFA.
Les sociétés AMC et Distribution Casino France relèvent d'abord que la société NPS n'articule pas de raisonnement sur le fondement de la responsabilité civile, mais par le raisonnement de l'annulation de la clause de RFA, étant observé que les restitutions consécutives à une annulation ne relèvent pas de la répétition de l'indu mais des règles de la nullité. Elles soutiennent que conformément à la jurisprudence ( en ce sens Civ 1ère 21 octobre 2015 n°14-25.080 ; Com. 20 mars 2012 n°11-11.570 et Com.24 juin 2020 n°18-15.673 ), la clause de l'article 4.4 est rédigée dans des termes suffisamment larges "toute créance " et s'insère dans un contrat organisant tous les aspects de la relation entre les parties, pour englober toute action en responsabilité contractuelle ou délictuelle ou encore d'une restitution découlant d'une demande d'annulation de clause. Elle ajoute que les RFA ne sont pas des créances payables " par année ou à des termes périodiques plus courts " visées par l'article 2254 alinéa 3, dès lors que si les RFA sont exigibles en fin de période, elles ne sont pas déterminables en début de période, leur montant n'étant connu qu'en fonction du chiffre d'affaires de la période considérée. Elles en déduisent que les RFA ne sont pas des créances périodiques mais uniques en fonction de la période de rattachement, en sorte que la clause conventionnelle de prescription leur est applicable. Elles prétendent ainsi que dès lors que les RFA ont été versées en 2016 et 2017, l'assignation a été délivrée le 17 février 2020, soit dans un délai supérieur à deux ans, la demande est prescrite.
Sur le fond à titre subsidiaire, la société AMC soutient qu'elle n'a encaissé aucune ristourne et n'a passé aucune commande auprès de NPS, en sorte qu'une demande en répétition de l'indu à son égard est irrecevable et en tous les cas mal-fondée. La société AMC ajoute qu'elle a seulement passé avec la société NPS un contrat cadre de référencement agissant " d'ordre et pour le compte des sociétés du périmètres du groupe Casino ", à savoir comme mandataire et qu'elle n'est donc pas partie au contrat. Elle en déduit que l'annulation éventuelle de la clause de RFA ne peut emporter sa condamnation solidaire à restitution de la somme.
La société Distribution France relève d'abord que les parties ont librement négocié la RFA. Ensuite elle soutient que la RFA litigieuse n'est pas une prime de référencement au sens des dispositions des articles L.442-6, I 3° et L. 442-6 II b dans leur rédaction applicable au litige, dès lors que la ristourne n'est pas préalable à la commande mais versée seulement à partir de l'installation de 10 sites. Elle soutient encore que la RFA était octroyée en contrepartie du volume de chantiers réalisés par NPS et avait vocation à inciter les sociétés du groupe Casino à faire appel à NPS pour leur installation de sécurité. Elle ajoute que le caractère disproportionné de la ristourne n'est pas démontré par la société NPS et relève qu'en pratique NPS a réalisé avec Casino un chiffre d'affaires de près de 2M€ en 2015 et de 1,115M€ en 2016 avec une marge brute de l'ordre de 65,60%.
Réponse de la Cour,
. Sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription
L'article 4.4 reproduit ci-dessus a pour objet d'organiser les modalités et délais de règlement des prestations du fournisseur et de régler toute difficulté liée au retard de paiement ou de paiement en cas de mauvaise exécution de la prestation fournie par NPS. Aussi " toute créance " visée au dernier alinéa de cet article recouvre uniquement les créances relatives au paiement des prestations exécutées.
La société NPS fonde sa demande de " remboursement " tant sur l'article L.442-6 du code de commerce que sur les articles 1169 et 1302-1 du code civil. L'action qu'elle soit indemnitaire ou sur le fondement de la répétition de l'indu, n'est pas visée par l'article 4.4 reproduit ci-dessus. En toute hypothèse, le point de départ du délai de prescription visé à l'article 4.4 est l'exigibilité de la créance, or la demande de remboursement " revendiquée " par la société NPS n'est en l'état ni certaine ni liquidée.
En application de l'article 2224 du code civil, l'action introduite par actes d'huissier délivrés les 17 et 20 février 2020 moins de cinq années à compter des paiements litigieux en 2016 et 2017 n'est pas prescrite.
Le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté les sociétés intimées de leur fin de non-recevoir tirée de la prescription.
.Sur le fond
Le contrat signé entre les parties stipule en son annexe 4 " conditions tarifaires-Port/Transport " que le taux de RFA sera le suivant :
Pour un seuil de nombre d'installations supérieure à
Taux de RFA applicable
10 sites
5% de la totalité du chiffre d'affaires réalisé
De 10 à 20 sites
7% de la totalité du chiffre d'affaires réalisé
Plus de 20 sites
10% de la totalité du chiffre d'affaires réalisé
Selon l'article L.442-6 dans sa version antérieure à l'ordonnance n°2019-359 du 24 avril 2019 applicable au litige :
I. - Engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers :
1° D'obtenir ou de tenter d'obtenir d'un partenaire commercial un avantage quelconque ne correspondant à aucun service commercial effectivement rendu ou manifestement disproportionné au regard de la valeur du service rendu. Un tel avantage peut notamment consister en la participation, non justifiée par un intérêt commun et sans contrepartie proportionnée, au financement d'une opération d'animation ou de promotion commerciale, d'une acquisition ou d'un investissement, en particulier dans le cadre de la rénovation de magasins, du rapprochement d'enseignes ou de centrales de référencement ou d'achat ou de la rémunération de services rendus par une centrale internationale regroupant des distributeurs. Un tel avantage peut également consister en une globalisation artificielle des chiffres d'affaires, en une demande d'alignement sur les conditions commerciales obtenues par d'autres clients ou en une demande supplémentaire, en cours d'exécution du contrat, visant à maintenir ou accroître abusivement ses marges ou sa rentabilité ;
(')
3° D'obtenir ou de tenter d'obtenir un avantage, condition préalable à la passation de commandes, sans l'assortir d'un engagement écrit sur un volume d'achat proportionné et, le cas échéant, d'un service demandé par le fournisseur et ayant fait l'objet d'un accord écrit ;
(')
II. - Sont nuls les clauses ou contrats prévoyant pour un producteur, un commerçant, un industriel ou une personne immatriculée au répertoire des métiers, la possibilité :
(')
b) D'obtenir le paiement d'un droit d'accès au référencement préalablement à la passation de toute commande ;
La Cour observe que les ristournes de fin d'année telles que définies dans le contrat de référencement n'étaient pas exigées préalablement à la passation de toute commande, mais conditionnées à des volumes d'installation de système de vidéosurveillances et assises sur le chiffre d'affaires généré par ces installations. Il s'en déduit que les primes litigieuses ne sont pas des avantages avant toute commande ou une prime de référencement prohibés par l'article L.442-6 I, 3° et II b).
Ensuite, l'application de l'article L 442-6 I 1° du code de commerce exige seulement que soit constatée l'obtention d'un avantage quelconque ou la tentative d'obtention d'un tel avantage ne correspondant à aucun service commercial effectivement rendu ou manifestement disproportionné au regard de la valeur du service rendu, quelle que soit la nature de cet avantage (en ce sens Com., 11 janvier 2023, n° 21-11.163). La notion de service commercial est entendue largement et ne correspond pas seulement à celle de coopération commerciale, et l'avantage peut être tarifaire, tel, les ristournes objet du litige.
Les ristournes convenues entre les parties sont des réductions de prix conditionnées à des paliers de volume d'affaires, à savoir un certain nombre d'installations de système de surveillance sur les sites Casino et assises sur le chiffre d'affaires réel réalisé en fin d'année. Ces ristournes ne sont donc pas dépourvues de contrepartie et constitue une incitation pour les sites Casino à s'équiper auprès de la société NPS, étant observé que cette dernière a réalisé avec le groupe Casino un chiffre d'affaires de 2, 59 M€ HT entre juin 2015 et août 2016. La société NPS ne démontre pas en quoi les différents paliers de ristournes et le montant effectivement versé à ce titre pour un montant total de 256 379 euros HT constituent un avantage manifestement disproportionné au bénéfice des sociétés du groupe Casino.
Dès lors le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté la société NPS de sa demande de restitution de la somme de 307 655 euros TTC au titre des RFA.
IV- Sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile
Le jugement sera confirmé en ce qu'il a condamné solidairement les sociétés Distribution Casino France et AMC aux dépens de première instance et à payer à la société NPS la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
La société Distribution Casino France succombant partiellement en appel sera condamnée aux dépens d'appel.
En application de l'article 700 du code de procédure civile, la société Distribution Casino France sera déboutée de sa demande et condamnée à verser à la société NPS la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile. La société AMC sera déboutée de sa demande à ce titre.
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Confirme le jugement sauf en ce qu'il a
- Condamné la société Distribution Casino France à payer à la société NPS la somme de 1149,60 euros TTC au titre des factures impayées et non prescrites, somme majorée des intérêts de retard au taux de trois fois l'intérêt légal sur ce montant calculés à compter du 1er mai 2018, outre 120 euros d'indemnité forfaitaire de recouvrement,
Statuant de nouveau du chef infirmé,
Déboute les sociétés Distribution Casino France et Achats Marchandise Casino de leur fin de non-recevoir tirée de la prescription ;
Condamne la société Distribution Casino France à payer à la société NPS la somme de 3 892,80 euros TTC en principal au titre des factures impayées émises entre le 22 novembre 2017 et le 21 mars 2018, majorée des intérêts de retard au taux de trois fois l'intérêt légal à compter du 1er mai 2018, avec capitalisation des intérêts, outre la somme de 280 euros au titre des frais de recouvrement ;
Condamne la société Distribution Casino France aux dépens ;
Condamne la société Distribution Casino France à payer à la société NPS la somme de 5000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Rejette toute autre demande.