CA Douai, 8e ch. sect. 1, 30 mai 2024, n° 22/02366
DOUAI
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
France Solar (SAS)
Défendeur :
Époux K, Cofidis (SA)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Benhamou
Vice-président :
M. Vitse
Conseiller :
Mme Ménegaire
Avocats :
Me Franchi, Me Hunault-Chedru, Me Boulaire, Me Hélain
EXPOSE DU LITIGE
Le 5 décembre 2018, M. [P] [K] et Mme [M] [V] épouse [K] ont contracté auprès de la société France Solar une prestation relative à la fourniture et l'installation d'un système photovoltaïque pour un montant de 32'400 euros TTC, dans le cadre d'un démarchage à domicile, suivant bon de commande n°10368.
Le même jour, ils ont accepté une offre préalable de crédit affecté auprès de la société Cofidis exerçant sous la marque 'Projexio'd'un montant de 32'400 euros, au taux nominal annuel de 3,7 % et remboursables en 180 mensualités, précédées d'un différé de paiement de six mois.
Par actes d'huissier de justice des 13 et 15 juillet 2021, M. [K] et Mme [V] ont fait assigner les sociétés France Solar et Cofidis en justice aux fins de voir notamment prononcer la nullité des contrats de vente et de crédit affecté.
Par jugement réputé contradictoire en date du 21 mars 2022, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Lille a :
- prononcé la nullité du contrat de vente conclu le 5 novembre 2018 entre M. [K] et Mme [V] d'une part, et la société France Solar d'autre part sous le bon de commande n° 10368,
- constaté la nullité du contrat de crédit affecté conclu entre M. [K] et Mme [V] d'une part, et la société 'France Solar' d'autre part le 5 décembre 2018,
- condamné la société France Solar à procéder à la désinstallation du matériel posé suivant bon de commande n° 10368 du 5 novembre 2018 et à la remise en état de la toiture dans son état initial à ses frais,
- condamné solidairement M. [K] et Mme [V] à payer à la société Cofidis la somme de 18'311,93 euros selon décompte arrêté à la date du 12 juillet 2021euros, avec intérêts au taux légal à compter la signification de la présente décision,
- condamné la société France Solar à garantir M. [K] et Mme [V] du remboursement du prêt souscrit auprès de la société Cofidis le 5 décembre 2018,
- rejeté les demandes pour le surplus,
- condamné la société France Solar aux entiers dépens de l'instance,
- condamné la société France Solar à payer à M. [K] et Mme [V] la somme de 850 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- écarté l'exécution provisoire de la présente décision.
Par déclaration en date du 13 mai 2022, la société France Solar a relevé appel de l'ensemble des chefs de ce jugement.
Aux termes de ses conclusions notifiées le 5 février 2024, l'appelante demande à la cour de :
Vu les articles L.111-1 et suivants du code de la consommation et L.221-5 du code de la consommation et suivants du même code,
vu les articles 1103 et suivants du code civil,
vu les articles 1182 et suivants du code civil,
vu les articles 1240' et 1315 du code civil,
vu les articles 564 suivants du code de procédure civile,
- recevoir la société France Solar en son appel et la déclarer bien fondée,
en conséquence,
- infirmer le jugement du tribunal judiciaire de Lille du 21 mars 2022 en ce qu'il a :
- prononcé la nullité du contrat de vente conclu le 5 novembre 2018 entre M. [K] et Mme [V] d'une part, et la société France Solar d'autre part sous le bon de commande n° 10368,
- constaté la nullité du contrat de crédit affecté conclu entre M. [K] et Mme [V] d'une part, et la société 'France Solar' d'autre part le 5 décembre 2018,
- condamné la société France Solar à procéder à la désinstallation du matériel posé suivant bon de commande n°10368 du 5 novembre 2018 et à la remise en état de la toiture dans son état initial à ses frais,
- condamné solidairement M. [K] et Mme [V] à payer à la société Cofidis la somme de 18'311,93 euros selon décompte arrêté à la date du 12 juillet 2021euros, avec intérêts au taux légal à compter la signification de la présente décision,
- condamné la société France Solar à garantir M. [K] et Mme [V] du remboursement du prêt souscrit auprès de la société Cofidis le 5 décembre 2018,
- rejeté les demandes pour le surplus,
- condamné la société France Solar aux entiers dépens de l'instance,
- condamné la société France Solar à payer à M. [K] et Mme [V] la somme de 850 eurosau titre de l'article 700 du code de procédure civile,
statuant de nouveau,
- débouter les époux [K] de leurs demandes tendant à l'annulation du contrat numéro 10368 signé le 5 décembre 2018 avec la société France Solar,
- déclarer nouvelle et par suite irrecevable sur le fondement de l'article 564 du code de procédure civile la demande des époux [K] tendant à faire condamner la société France Solar au paiement d'une somme de 4 392,12 euros,
- débouter les époux [K] de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions formulées à l'égard de la société France Solar,
- en conséquence, débouter la société Cofidis de ses demandes formulées à l'encontre de la société France Solar,
- condamner les époux [K] au paiement d'une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel dont distraction au profit de Me Bernard Franchi, avocat au barreau de Douai.
Aux termes de leurs conclusions notifiées le 2 février 2023, les époux [K] demandent à la cour de :
Vu l'article liminaire du code de la consommation,
vu les anciens articles 1109 et 1116 du code civil, devenu 1130 et 1137 du même code,
vu l'article 16 de la loi n°2012-354 du 14 mars 2012 de finance rectificative pour 2012,
vu les articles L.121-17 du code de la consommation dans leur rédaction issue de la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014, désormais codifié à l'article 221-5 du même code,
vu l'article L.221-5 du code de la consommation,
vu l'article L.111-1 du code de la consommation dans sa rédaction issue de la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014,
vu l'article R.111-1 du même code, issu du Décret n° 2014-1061 du 17 septembre 2014,
Vu l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016,
Vu le décret d'application n° 2016-884 du 29 juin 2016, entré en vigueur au 1er juillet 2016,
- confirmer le jugement ce qu'il a,
- prononcé la nullité du contrat de vente conclu le 5 novembre 2018 entre M. [K] et Mme [V] d'une part, et la société France Solar d'autre part sous le bon de commande n° 10368,
- constaté la nullité du contrat de crédit affecté conclu entre M. [K] et Mme [V] d'une part, et la société 'France Solar' d'autre part le 5 décembre 2018,
- condamné la société France Solar à procéder à la désinstallation du matériel posé suivant bon de commande n°10368 du 5 novembre 2018 et à la remise en état de la toiture dans son état initial à ses frais,
- condamné la société France Solar à garantir M. [K] et Mme [V] du remboursement du prêt souscrit auprès de la société Cofidis le 5 décembre 2018,
- condamné la société France Solar aux entiers dépens de l'instance,
- infirmer le jugement rendu pour le surplus,
statuant à nouveau et y ajoutant,
- déclarer les demandes de M. [K] et Mme [V] recevables et bien fondées,
- condamner la société France Solar à prendre en charge la réparation des désordres subis dans l'immeuble et Mme [V] en raison des infiltrations survenues et trouvant leur cause dans l'installation posée par elle et la réfection des embellissements à hauteur de 4 382,12 euros,
- constater que la société Cofidis a commis une faute dans le déblocage des fonds et doit être privée de sa créance de restitution du capital emprunté et la condamner à procéder au remboursement de l'ensemble des sommes versées par M. [K] et Mme [V] au titre de l'exécution normale du contrat de prêt litigieux,
- condamner solidairement la société France Solar la société Cofidis à verser à M. [K] et Mme [V] l'intégralité des sommes suivantes :
- 32'400 euros correspondant à l'intégralité du prix de vente de l'installation,
- 11'267,10 euros correspondant aux intérêts conventionnels et frais payés par M. [K] et Mme [V] à la société Cofidis en exécution du prêt souscrit,
- 5 000 euros au titre du préjudice moral,
- 6 000 euros titre de l'article 700 du code de procédure civile,
en tout état de cause,
- condamner la société France Solar à garantir les emprunteurs de toutes sommes de quelque nature qu'elles soient auxquelles ils seraient tenus à l'égard du prêteur,
- rejeter toutes demandes, moyens et prétentions plus amples ou contraires aux présentes,
- condamner les sociétés France Solar et Cofidis à supporter les dépens et les condamner à verser aux époux [K] la somme de 6 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- ordonner l'exécution provisoire.
Aux termes de ses conclusions notifiées le 26 janvier 2023, la société Cofidis demande à la cour de :
- infirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions,
statuant à nouveau,
- déclarer M. [K] et Mme [V] mal fondés en leurs demandes, fins et conclusions et les en débouter,
- déclarer la société Cofidis recevable et bien fondée en ses demandes, fins et conclusions,
y faisant droit,
- condamner solidairement M. [K] et Mme [V] à poursuivre l'exécution du contrat de crédit conformément aux stipulations contractuelles telles que retracées dans le tableau d'amortissement,
à titre subsidiaire, si la cour venait à confirmer le jugement sur la nullité des conventions,
- infirmer le jugement sur les fautes de la société Cofidis,
- confirmer le jugement ce qu'il a condamné solidairement M. [K] et Mme [V] au remboursement du capital pour un montant de 18'311,93 euros au taux légal à compter de la signification du jugement, en l'absence de faute de la société Cofidis et en toute hypothèse en l'absence de préjudice et de lien de causalité,
à titre plus subsidiaire, si la cour venait à confirmer la nullité des conventions et à dispenser M. [K] et Mme [V] à rembourser la société Cofidis,
- condamner la société France Solar à payer à la société Cofidis la somme de 33'667,10 euros au taux légal à compter l'arrêt à intervenir,
à titre infiniment subsidiaire,
- condamner la société France Solar à payer à la société Cofidis la somme de 32'400 euros au taux légal à compter l'arrêt à intervenir,
en tout état de cause,
- condamner la société France Solar à relever et garantir la société Cofidis de toute condamnation qui pourrait être mise à sa charge au profit de M. [K] et Mme [V],
- condamner tout succombant à payer à la société Cofidis une indemnité d'un montant de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner tout succombant aux entiers dépens.
En application de l'article 455 du code de procédure civile, il convient de se reporter aux écritures des parties pour l'exposé de leurs moyens.
La clôture de l'affaire a été rendue le 4 mars 2024 et l'affaire plaidée à l'audience de la cour du 13 mars 2024.
MOTIFS
Sur la nullité du bon de commande
En vertu des articles L.221-9 et L.221-29 du code de la consommation, les contrats hors établissement doivent faire l'objet d'un contrat écrit daté dont un exemplaire doit être remis au client au moment de la conclusion de ce contrat. Il comprend toutes les informations prévues par l'article L.221-5. Le contrat doit être accompagné du formulaire type de rétractation mentionné au 2° de l'article L.221-5.
Selon l'article L.221-5 du code de la consommation 'Préalablement à la conclusion d'un contrat de vente ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes :
1° Les informations prévues aux articles L. 111-1 et L. 111-2 ;
2° Lorsque le droit de rétractation existe, les conditions, le délai et les modalités d'exercice de ce droit ainsi que le formulaire type de rétractation, dont les conditions de présentation et les mentions qu'il contient sont fixées par décret en Conseil d'Etat ;
3° Le cas échéant, le fait que le consommateur supporte les frais de renvoi du bien en cas de rétractation et, pour les contrats à distance, le coût de renvoi du bien lorsque celui-ci, en raison de sa nature, ne peut normalement être renvoyé par la poste ;
4° L'information sur l'obligation du consommateur de payer des frais lorsque celui-ci exerce son droit de rétractation d'un contrat de prestation de services, de distribution d'eau, de fourniture de gaz ou d'électricité et d'abonnement à un réseau de chauffage urbain dont il a demandé expressément l'exécution avant la fin du délai de rétractation ; ces frais sont calculés selon les modalités fixées à l'article L. 221-25 ;
5° Lorsque le droit de rétractation ne peut être exercé en application de l'article L. 221-28, l'information selon laquelle le consommateur ne bénéficie pas de ce droit ou, le cas échéant, les circonstances dans lesquelles le consommateur perd son droit de
rétractation ;
6° Les informations relatives aux coordonnées du professionnel, le cas échéant aux coûts de l'utilisation de la technique de communication à distance, à l'existence de codes de bonne conduite, le cas échéant aux cautions et garanties, aux modalités de résiliation, aux modes de règlement des litiges et aux autres conditions contractuelles, dont la liste et le contenu sont fixés par décret en Conseil d'Etat. (...)'
Selon l'article L.111-1 du code de la consommation, avant que le consommateur ne soit lié par un contrat de vente de biens ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes :
1° les caractéristiques essentielles du bien ou du service compte tenu du support de communication utilisé et du bien ou service concerné,
2° le prix du bien ou du service en application de l'article L.112-1 à L.112-4,
3° en l'absence d'exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s'engage à livrer le bien ou à exécuter le service,
4° les informations relatives à son identité, à ses coordonnées postales, téléphoniques et électroniques et à ses activités pour autant qu'elles ne ressortent pas du contexte ;
5° s'il y a lieu, les informations relatives aux garanties légales, aux fonctionnalités du contenu numérique, et le cas échéant, à son interopérabilité, à l'existence et aux modalités de mise en oeuvre des garanties et autres conditions contractuelles ;
6° la possibilité de recourir à un médiateur de la consommation dans les conditions prévues au titre 1er du livre VI. (...)'
En vertu de l'article L.242-1du code de la consommation, les dispositions de l'article L.221-9 sont prévues à peine de nullité du contrat conclu hors établissement.
En l'espèce, le contrat de vente litigieux porte sur la fourniture et la pose d'un système photovoltaïque pour l'autoconsommation composé de 10 modules de marque Francillienne d'une puissance unitaire de 300 Wc d'une puissance totale de 3 000 Wc, le pack contenant l'option chauffage solaire aérovoltaïque 'pack' system'et 4 bouches de ventilation et l'option 'micro-onduleur' de marque Empahse IQ7, outre un pack Led, pour un montant total de 32 400 euros TTC. Il mentionne également 'démarches administratives incluses', ainsi que les conditions de financement auprès de 'Projexio'.
La société Solar France fait grief au premier juge d'avoir annulé le bon de commande litigieux aux motifs erronés qu'il ne fait pas mention des différentes démarches administratives à accomplir nécessaires à la finalisation de l'installation, ni ne précise sur qui en pèse la charge, que le délai de livraison n'est pas mentionné, seul un délai de livraison de huit mois maximum étant prévu, que le prix de la main d'oeuvre et celui du matériel n'est pas mentionné, et qu'eu égard à l'ampleur des travaux à accomplir, l'absence de toute précision quant aux modalités de ceux-ci et à leur durée ne permet pas au consommateur d'être suffisamment informé.
L'appelante fait essentiellement valoir que seule la mention d'un prix global est exigée par les dispositions du code de la consommation, que les démarches administratives et les travaux de raccordement sont mentionnés à l'article 7 des conditions générales qui détaille ces prestations et prévoit qu'elles sont comprises dans le prix global, que le bon de commande prévoit également au recto 'pack comprenant 'démarches administratives incluses', les époux M. [K] ayant au surplus signé un mandat à la société France solar d'effectuer en leurs noms et pour leur compte toutes démarches administratives. S'agissant du délai de livraison, elle rappelle que le texte de l'article L.111-1 du code de la consommation exige une date ou un délai de livraison, sans imposer de forme précise, un délai clair ayant été indiqué en l'espèce, et n'impose pas de faire figurer au bon de commande les modalités des travaux. Elle ajoute que les caractéristiques essentielles des biens offerts à la vente sont précisées, ainsi que la possibilité de recourir à un médiateur de la consommation.
D'une part, l'article 111-1 2° du code de la consommation dispose que le bon de commande doit mentionner 'le prix du bien ou du service'. Il n'y a pas lieu d'ajouter à la loi des conditions qu'elle ne prévoit pas, en sorte que la distinction entre le prix des biens et le prix de la main d'oeuvre n'est pas une mention devant obligatoirement figurer au contrat de vente. Le bon de commande litigieux qui comporte le prix global de 32 400 euros TTC est par conséquent conforme aux dispositions précitées.
D'autre part, dans le paragraphe concernant la désignation des biens vendus, il est indiqué 'pack comprenant : démarches administratives incluses'. L'article 7 des conditions générales prévoit que les prix de l'offre photovoltaïque comprend la réalisation de l'ensemble des démarches administratives et d'autorisation de travaux ainsi que de raccordement.
C'est donc à tort que le premier juge a retenu que le bon de commande ne prévoyait pas les démarches administratives à accomplir, ni sur qui en pesait la charge, étant observé que l'ensemble des démarches administratives et de raccordement sont détaillées dans le mandat spécial que les époux [K] ont donné le même jour que le contrat de vente à la société France solar, aux fins de les effectuer en leur nom (auprès de la Mairie, de la Direction régionale de l'industrie de la recherche de l'environnement (DRIRE), de la Direction de la demande et des marchés énergétiques (DIDEME), de ERDF, du Conseil général régional pour l'obtention de l'aide départementale et/ou locale relative à ce titre installation, d'EDF ou l'entreprise locale de distribution pour l'établissement d'un contrat d'achat d'électricité produite par l'équipement).
Toutefois, l'article 111-1 3° du code de la consommation dispose que le bon de commande doit mentionner 3° 'en l'absence d'exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s'engage à livrer le bien ou à exécuter le service'.
En l'espèce, il est stipulé que 'le délai de livraison maximum est de 8 mois. Délai de raccordement et de mise en service (offre photovoltaïque) : France solar s'engage à adresser la demande de raccordement auprès ERDF et/ou des régies d'électricité dès réception du récépissé de la déclaration préalable de travaux et à procéder au règlement du devis. Une fois les travaux de raccordement de l'installation réalisée, la mise en service pourra intervenir dans le délai fixé par ERDF et/ou les régies d'électricité. '
Or, alors que le contrat conclu implique des opérations à la fois matérielles de livraison et d'installation du matériel commandé, mais également des démarches administratives, cette mention 'dans un délai maximum de 8 mois' est insuffisante pour répondre aux exigences de l'article L. 111-1, 3°du code de la consommation, dès lors qu'il n'est pas distingué entre le délai de pose des modules, et autres matériels et celui de réalisation des prestations à caractère administratif et qu'un tel délai global ne permet pas aux acquéreurs de déterminer de manière suffisamment précise quand le vendeur aurait exécuté ses différentes obligations.
Le contrat encourt donc l'annulation de ce chef, sans qu'il soit nécessaire d'examiner les autres griefs formés par les époux [K].
Il est admis que la nullité formelle résultant du texte précité est une nullité relative à laquelle la partie qui en est bénéficiaire peut renoncer par des actes volontaires explicites dès lors qu'elle avait connaissance des causes de nullité.
Pour les contrats conclus postérieurement à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, l'article 1182, alinéa 3 du code civil dispose que l'exécution volontaire du contrat, en connaissance de la cause de nullité, vaut confirmation.
Or, si le bon de commande reproduit l'article 111-1 du code de la consommation, (et mentionne en outre que le client reconnaît avoir eu communication des informations prévues aux articles L.111-1 à L.111-7 et L.121-17 du code de la consommation, prescrivant le formalisme applicable à un contrat de vente conclu hors établissement), cette reconnaissance et la reproduction même lisible de ces dispositions ne permet pas au consommateur d'avoir une connaissance effective du vice résultant de l'inobservation de ces dispositions et de caractériser la confirmation tacite du contrat, en l'absence d'autres circonstances. ( Voir notamment Civ 1ère 24 janvier 2024, pourvois n° 22-15.199, n° 22-16.115, n° 22-16.116)
Or, il ne ressort d'aucun des éléments aux débats que M. [K] et Mme [V] aient eu conscience du vice au moment de la souscription du contrat ou de son exécution.
Il en résulte qu'aucun de leurs agissements postérieurs à la signature du contrat ne saurait être interprété comme une confirmation tacite de l'obligation entâchée de nullité.
En conséquence, aucune confirmation de la nullité ne saurait être caractérisée et le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a prononcé l'annulation du contrat principal de vente pour irrégularités formelles au regard des dispositions du code de la consommation.
Le contrat ayant été annulé pour irrégularité formelles, il n'y a pas lieu d'examiner la demande de nullité fondée sur le dol.
Le jugement est confirmé en ce que, consécutivement à la nullité du contrat comprenant également de plein droit la restitution du prix par le vendeur, la société France solar est condamnée à retirer l'ensemble de l'installation et matériel posé suivant bon de commande n° 10368 du 5 décembre 2018 et à remettre la toiture dans l'état antérieur, à ses frais.
Sur l'annulation du contrat de crédit accessoire
En application de l'article L. 312-55 du code de la consommation, qui dispose que le contrat de crédit affecté est résolu ou annulé de plein droit lorsque le contrat en vue duquel il a été conclu est lui-même judiciairement résolu ou annulé, il convient de constater l'annulation du contrat de crédit affecté conclu entre les époux [K] d'une part, et la société Cofidis d'autre part.
Sur les conséquences de l'annulation du contrat de crédit
Il est rappelé que les annulations prononcées entraînent en principe la remise des parties en l'état antérieur à la conclusion des contrats.
Il résulte des articles 1147 du code civil devenu 1231-1, L.311-31 et L.311-32 devenus L.312-48 et L.312-55 du code de la consommation que l'annulation du contrat de vente ou de prestation de services emporte celle du contrat et que l'emprunteur est alors tenu de restituer le capital emprunté, sauf si l'emprunteur établit l'existence d'une faute du prêteur et d'un préjudice consécutif à cette faute.
L'annulation du contrat de crédit emporte également pour le prêteur l'obligation de restituer les sommes déjà versées par l'emprunteur.
Il est constant que le prêteur qui a versé les fonds sans s'être assuré, comme il y était tenu, de la régularité formelle du contrat principal ou de sa complète exécution, peut être privé en tout ou partie de sa créance de restitution, dès lors que l'emprunteur prouve avoir subi un préjudice en lien avec cette faute.
Les époux [K] font essentiellement valoir que la banque doit être privée de sa créance de restitution au motif qu'elle a commis des fautes dans le déblocage des fonds en ne s'assurant pas de la régularité formelle du contrat de vente et de son exécution complète. Ils font également valoir que la banque s'est rendue complice du dol commis par la société venderesse, ce que démontrerait le report échéance d'une durée de 6 mois confortant la présentation selon laquelle l'installation s'autofinancerait, les échéances de remboursement étant alors censées commencer après la réalisation de premiers gain. Ils soutiennent qu'ils subissent un préjudice lié aux vices affectant le contrat et au défaut de rendement de l'installation.
La société Cofidis répond notamment qu'elle n'a pas commis de faute dans le déblocage des fonds, qu'elle n'avait pas à vérifier la mise en service de l'installation et son raccordement alors qu'il s'agissait en l'espèce d'une installation uniquement destinée à l'autoconsommation ne nécessitant pas de raccordement au réseau ENDIS, et que l'attestation de mise en service était suffisamment précise pour la convaincre de la complète exécution du contrat de vente ; qu'elle ne peut, par ailleurs, anticiper toutes les causes de nullité pouvant être retenues judiciairement, en sorte qu'il ne peut lui être reproché d'avoir financer un bon de commande nul. Elle ajoute qu'elle ne peut être tenue responsable du dol commis par un tiers, dont elle n'est pas le mandataire, dol au surplus non établi en l'espèce, et qu'elle n'a pas à s'immiscer dans les affaires de son client pour apprécier l'opportunité des opérations auxquelles il procède, et que les emprunteurs n'ont en tout état de cause subi aucun préjudice en lien avec ses prétendues fautes, l'installation fonctionnant parfaitement.
En l'espèce, la banque a débloqué les fonds au vu d'une attestation de livraison et d'installation en date du 24 avril 2019 par laquelle M. [K] a confirmé avoir obtenu et accepté sans réserve la livraison des marchandises, et constaté expressément que 'tous les travaux et prestations qui devaient être effectués à ce titre ont été pleinement réalisés.'
Au regard de ce document, établi quatre mois après la signature du contrat de vente, la société Cofidis pouvait se convaincre de l'exécution complète du bon de commande. Il n'est d'ailleurs pas allégué, ni démontré que les travaux d'installation et de mise en service de l'installation, uniquement destinée à l'autoconsommation et non à la revente d'énergie, n'avaient pas été réalisés à cette date. La faute de la société Cofidis n'est donc pas démontrée.
Par ailleurs, les époux [K] ne démontrent pas que la rentabilité économique de l'installation photovoltaïque était entrée dans le champs contractuel. Il ne résulte en effet d'aucune pièce du dossier, le rapport amiable produit par eux étant inopérant à ce titre, que la société France Solar s'était engagée sur la rentabilité et l'autofinancement de l'installation photovoltaïque. Ils ne peuvent donc faire grief à la société Cofidis de s'être rendue complice d'un dol qu'ils n'établissent pas, ni davantage d'un préjudice à ce titre.
En revanche, la société Cofidis qui a versé les fonds au vendeur sans avoir vérifié au préalable la régularité du contrat principal, alors que l'irrégularité du bon de commande quant au délai de livraison était manifeste et que les vérifications qui lui incombent lui auraient permis de constater que le contrat principal était affecté de nullité, a commis une faute.
Toutefois, il n'est pas contesté que l'installation en cause a été dûment et effectivement mise en service et produit de l'énergie. Les époux [K] sur lesquels repose le fardeau de la preuve en application de l'article 9 du code de procédure civile, ne prouvent nullement que l'installation de panneaux photovoltaïques connaîtrait des dysfonctionnements (notamment en produisant un procès-verbal de constat d'huissier). De plus, s'ils affirment que l'installation ne produit pas les résultats escomptés, il ne résulte pas du contrat de vente, ni d'aucun élément du dossier que le vendeur ait pris un quelconque engagement sur la rentabilité de l'installation.
Enfin, de par l'effet de plein droit de l'annulation du contrat de vente prononcée, la société France solar qui ne fait l'objet d'aucune procédure collective et est in bonis, doit restituer le prix de vente aux époux [K], lequel correspond au capital emprunté. L'entreprise est en mesure d'exécuter son obligation de reprise du matériel et de procéder à la remise en état des lieux.
Par suite, il ne résulte d'aucun élément objectif du dossier que M. [K] et Mme [V] aient subi un préjudice corrélé à la faute imputable à la société Cofidis de telle manière que celle-ci ne peut être privée de sa créance de restitution.
Dès lors, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a condamné les emprunteurs à lui rembourser le capital emprunté de 32 400 euros, dont à déduire les sommes déjà remboursées ( soit 14 088,07 euros selon l'historique de compte arrêté au 12 juillet 2021), soit la somme de 18 311,93 euros à la date du 12 juillet 2021, et ce avec intérêts légal à compter de la signification du jugement, les époux [K] étant déboutés du surplus de leurs demandes en paiement.
Y ajoutant, il convient également de condamner la société Cofidis à restituer aux emprunteurs l'ensemble des sommes éventuellement versées par eux en exécution du contrat de crédit postérieurement au 12 juillet 2021.
Par ailleurs, l'article L 312-56 du code de la consommation prévoit que : « Si la résolution judiciaire de l'annulation du contrat principal survient du fait du vendeur, celui-ci peut à la demande du prêteur être condamné à garantir l'emprunteur du remboursement du prêt, sans préjudice de dommages et intérêts vis-à-vis du prêteur et de l'emprunteur ». Ainsi sur le fondement de cette disposition c'est l'organisme de crédit qui peut seul demander au vendeur de garantir le remboursement par les emprunteurs du prêt.
Le jugement sera donc infirmé en ce qu'il a condamné la société France solar à garantir M. [K] et Mme [V] du remboursement du capital auprès de la société Cofidis.
Sur la demande en paiement de la somme de 4 392,12 euros
Les époux [K] demandent la condamnation de la société France Solar à leur payer la somme de 4 392,12 euros correspondant à 'la réfection de l'isolation et d'un chéneau sous panneaux solaires', soutenant avoir subi des désordres causés par l'installation postérieurement au jugement rendu le 21 mars 2022, et produisent un devis daté du 21 juillet 2022.
Au visa des articles 564 du code de procédure civile et 1240 du code civil, la société France solar soulève une fin de non-recevoir tirée du caractère nouveau de cette demande en appel, ajoutant subsidiairement qu'aucune pièce ne vient confirmer la réalité des désordres et des infiltrations allégués, ni qu'elles seraient en lien avec l'installation photovoltaïque de nature à engager sa responsabilité.
Selon l'article 564 du code de procédure civile 'A peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait'.
En l'espèce, le devis établi le 21 juillet 2022, postérieurement au jugement, n'établit nullement l'existence de prétendues infiltrations à l'endroit des panneaux solaires, ni à les supposer établies, que celles-ci auraient été révélées postérieurement au jugement.
Dès lors, la demande formée à ce titre est nouvelle en appel, et donc irrecevable.
Sur la demande de dommages et intérêts pour préjudice moral
Suivant l'article 9 du code de procédure civile, il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi le faits nécessares au succès de sa prétention.
Les époux [K] ne justifiant par aucune pièce versées au débat de l'existence d'un préjudice moral, ils seront déboutés de leur demande à ce titre.
Sur les demandes de la société Cofidis à l'encontre de la société France solar
L'emprunteur n'ayant pas été dispensé de rembourser le capital prêté à la société Cofidis, la demande en paiement de la banque à l'encontre de la société France solar est sans objet.
La banque sollicite, en tout état de cause, à être garantie par la société France solar de toutes condamnations qui seraient éventuellement mise en à sa charge. Cependant, l'organisme de crédit à lui-même commis des fautes à l'origine de son préjudice dans le déblocage des fonds et l'annulation de son contrat, en sorte qu'il n'est pas fondé à obtenir la garantie de la société France solar.
Sur les demandes accessoires
Le jugement est confirmé en ses dispositions relatives aux dépens et à l'article 700 du code de procédure civile.
La société France solar, qui succombe principalement est condamnée aux d'appel en application des dispositions de l'article 696 du code de procédure civile.
Chaque partie conservera la charge de ses frais irrépétibles non compris dans les dépens.
PAR CES MOTIFS
La cour statuant par arrêt contradictoire ;
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions, sauf en celle ayant condamné la société France solar à garantir M. [P] [K] et Mme [M] [V] du remboursement du prêt souscrit auprès de la société Cofidis le 5 décembre 2018;
Statuant à nouveau du chef infirmé ;
Déboute M. [P] [K] et Mme [M] [V] de leur demande de garantie à l'encontre de la société France solar ;
Y ajoutant ;
Déboute M. [P] [K] et Mme [M] [V] de leur demande en paiement de la somme de 4 392,12 euros ;
Déboute M. [P] [K] et Mme [M] [V] de leur demande de dommages et intérêts pour préjudice moral ;
Rejette toute demandes des parties plus amples ou contraires ;
Laisse à chaque partie la charge de ses frais irrépétibles ;
Condamne la société France solar aux dépens de l'instance d'appel.