Livv
Décisions

CA Paris, Pôle 4 - ch. 10, 30 mai 2024, n° 21/08425

PARIS

Arrêt

Autre

CA Paris n° 21/08425

30 mai 2024

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 10

ARRET DU 30 MAI 2024

(n° , 8 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/08425 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CDS5A

Décision déférée à la Cour : Jugement du 08 Février 2021 -Tribunal Judiciaire d'EVRY RG n° 18/05325

APPELANTE

Madame [D] [S] épouse [P]

née le 26 octobre 1961 à [Localité 8] (ALGERIE)

[Adresse 4]

[Localité 6]

Représentée et assistée par Me Julie PITOT de la SELARL MFP AVOCATS, avocat au barreau de MELUN

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 751010022021039634 du 04/10/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PARIS)

INTIMÉES

Madame [B] [G] épouse [M]

née le 25 Mai 1978 à [Localité 11]

[Adresse 2]

[Localité 5]

Représentée par Me Vasco JERONIMO, avocat au barreau de MELUN

Assistée de Me Simon COUVREUR de la SCP MARTIN COUVREUR, avocat au barerau de CHALONS-EN-CHAMPAGNE

S.A.R.L. SAFETY AUTO MOTO

[Adresse 1]

[Localité 7]

Caducité de la déclaration d'appel à son égard prononcée le 29 juin 2022

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été appelée le 19 mars 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Anne ZYSMAN, Conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Madame Florence PAPIN, Présidente

Madame Valérie MORLET, Conseillère

Madame Anne ZYSMAN, Conseillère

Greffier, lors des débats : Madame Catherine SILVAN

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Florence PAPIN, Présidente et par Catherine SILVAN, greffier, présent lors de la mise à disposition.

***

EXPOSE DU LITIGE

Le 23 février 2017, Mme [B] [G] épouse [M] a acquis auprès de Mme [D] [S] épouse [P] un véhicule d'occasion de type camion Renault Master, équipé « food-truck », mis en circulation en 1998 et affichant 185.000 kilomètres au compteur, immatriculé [Immatriculation 9], à la suite d'une annonce parue sur le site internet « Le bon coin » mentionnant notamment « contrôle technique ok ». Les parties sont en désaccord sur le prix de vente, qui serait de 7.000 euros selon Mme [S] et de 14.000 euros selon Mme [M].

Lors de la vente, Mme [S] a remis à Mme [M] deux procès-verbaux de contrôle technique datés des 12 novembre 2016 et 22 février 2017 réalisés par la société Safety Auto Moto, lesquels mentionnaient l'absence de défauts à corriger avec contre-visite et l'existence de deux défauts à corriger sans contre-visite, à savoir :

« 1°- Commande de frein de stationnement : course importante

2° Moteur : défaut d'étanchéité ».

Le 21 mars 2017, Mme [M] a fait réaliser un contrôle technique volontaire du véhicule par la société Dekra, laquelle a constaté sept défauts ne permettant pas la validation d'un contrôle technique réglementaire et vingt autres défauts, dont les deux précédemment identifiés par la société Safety Auto Moto.

Un rapport d'expertise amiable a été déposé le 31 octobre 2017 par la société Nettelet expertises, saisie à l'initiative de l'assureur de Mme [M].

Le 14 décembre 2017, Mme [M], par l'intermédiaire de son conseil, a adressé un courrier recommandé avec accusé de réception à Mme [S] et à la société Safety Auto Moto, demandant à la première l'annulation de la vente du véhicule litigieux et la restitution du prix de vente de 14.000 euros et informant le contrôleur technique de cette demande et de son intention d'engager une éventuelle action en justice à leur encontre.

C'est dans ce contexte que, par actes d'huissier des 26 juillet et 1er août 2018, Mme [M] a fait assigner Mme [S] et la société Safety Auto Moto devant le tribunal de grande instance devenu tribunal judiciaire d'Evry en résolution de la vente et indemnisation de ses préjudices.

La société Safety Auto Moto n'a pas constitué avocat devant le tribunal.

Par jugement réputé contradictoire du 8 février 2021, le tribunal a :

- Prononcé la résolution du contrat de vente en date du 23 février 2017 portant sur le véhicule d'occasion de marque Renault master, équipé « food-truck », immatriculé [Immatriculation 9] ;

- Condamné Mme [D] [S] à payer à Mme [B] [M] la somme de 14.000 euros en restitution du prix de vente,

- Ordonné la restitution du véhicule aux frais de Mme [D] [S],

- Condamné Mme [D] [S] à récupérer à ses frais le véhicule se trouvant actuellement [Adresse 3], en prenant à sa charge les éventuels frais de remorquage,

- Débouté Mme [B] [M] du surplus de sa demande d'indemnisation,

- Débouté Mme [D] [S] de son appel en garantie,

- Condamné Mme [D] [S] à verser la somme de 1.500 euros à Mme [B] [M] sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- Débouté Mme [B] [M] du surplus de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamné Mme [D] [S] aux dépens comprenant le coût des frais d'expertise,

- Ordonné l'exécution provisoire de la présente décision.

Le tribunal a retenu l'existence d'un vice antérieur à la vente, non décelable, affectant le véhicule et le rendant impropre à son usage normal et a, en conséquence, prononcé la résolution de la vente en application des articles 1641 et suivants du code civil et condamné Mme [S] à la restitution du prix de vente soit 14.000 euros.

Il a débouté Mme [M] de ses demandes indemnitaires formées à l'encontre de Mme [S] en application des articles 1645 et 1646 du code civil, estimant qu'aucun élément ne permettait de retenir qu'elle avait connaissance des défauts affectant le véhicule litigieux et ce, d'autant que les deux contrôles techniques réalisés préalablement à la vente faisaient uniquement état de deux défauts non soumis à contre-visite.

Il a également débouté Mme [M] de ses demandes indemnitaires formées à l'encontre de la société Safety Auto Moto, relevant que cette dernière n'étant pas partie au contrat de vente et n'ayant pas perçu le prix, elle ne pouvait être condamnée solidairement avec le vendeur à le restituer et qu'en outre, seul le vendeur était débiteur de la garantie des vices cachés et pouvait être condamné, en cas d'action rédhibitoire, à verser des dommages et intérêts s'il est vendeur de mauvaise foi, l'acquéreur d'un véhicule d'occasion, dont l'usure importante des éléments mécaniques n'avait pas été signalée à son vendeur par le professionnel du contrôle technique ne pouvant exiger de la part de ce professionnel, sous couvert de la mise enjeu de sa responsabilité délictuelle, la réparation de son entier préjudice découlant des vices cachés affectant le véhicule alors qu'il ne rapportait pas la preuve qu'il n'aurait pas acheté si le centre technique avait rempli convenablement son obligation d'information.

En l'absence de condamnation indemnitaire mise à la charge de Mme [S], celle-ci a été déboutée de son appel en garantie formée à l'encontre de la société Safety Auto Moto, celle-ci ne pouvant être condamnée à restituer le prix de vente.

Par déclaration du 30 avril 2021, Mme [D] [S] a interjeté appel de ce jugement, intimant Mme [B] [M] et la société Safety Auto Moto devant la cour.

Par ordonnance sur incident rendue le 19 janvier 2022, le conseiller de la mise en état a rejeté la demande de radiation formulée par Mme [M] sur le fondement de l'article 524 du code de procédure civile aux motifs que Mme [S] ne disposant d'aucun revenu imposable, elle était dans l'impossibilité d'exécuter la décision.

Puis, par ordonnance rendue le 29 juin 2022, le magistrat en charge de la mise en état a prononcé la caducité partielle de la déclaration d'appel de Mme [D] [S] épouse [P] à l'égard de la SARL Safety Auto Moto, partie non constituée, sur le fondement

de l'article 911 du code de procédure civile, l'appelante ne lui ayant pas signifié ses conclusions dans le délai de quatre mois à compter de sa déclaration d'appel.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 15 juillet 2021, Mme [D] [S] épouse [P] demande à la cour, au visa des articles 1641, 1644 et suivants du code civil, de :

- Infirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire d'Evry le 8 février 2021,

En conséquence,

A titre principal,

- Dire et juger que les conditions pour que soit accueillie l'action en garantie des vices cachés ne sont pas réunies,

En conséquence,

- Débouter Mme [M] de l'ensemble ses demandes,

A titre subsidiaire,

- Constater que Mme [S] n'avait aucune connaissance de l'existence des vices cachés affectant le véhicule au moment de la vente,

- Constater que le prix de vente du véhicule s'élève à 7.000 euros,

En conséquence,

- Ordonner à Mme [M] de restituer le véhicule immatriculé [Immatriculation 9] à Mme [S] sur la commune de [Localité 12], lieu de livraison initial,

- Débouter Mme [M] de sa demande en paiement des frais d'expertise amiable et des frais annexes,

- Débouter Mme [M] de ses demandes de dommages et intérêts,

En tout état de cause,

- Dire et juger que la SARL Safety Auto Moto devra garantir Mme [S] de toutes les condamnations, y compris les frais et dépens, mises à sa charge,

- Condamner la SARL Safety Auto Moto au paiement de 1.500 euros au titre de l'article 33 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, outre les entiers dépens.

Au soutien de son appel, Mme [S] invoque, à titre principal, l'absence de vice caché affectant le véhicule. Elle fait valoir que le véhicule était affecté au moment de la vente d'un vice apparent, le contrôle technique daté de la veille de la vente, remis à l'acquéreur, mentionnant expressément deux défauts à corriger sans contre visite.

Elle ajoute que la carte grise porte bien la mention « vendu en l'état » et que Mme [M] ne pouvait attendre d'un véhicule de cette ancienneté la même fiabilité technique qu'un véhicule récent, ce qui réclamait de sa part une attention particulière et rendait quasiment nécessaire la présence d'un professionnel avec des instruments de mesure pour s'assurer de l'état indiqué sur l'annonce de la vente. Elle rappelle l'obligation pour l'acheteur d'un véhicule d'occasion de faire preuve de vigilance, et reproche à Mme [M] d'avoir manqué de prudence en concluant la vente malgré plusieurs défauts mentionnés au procès-verbal de contrôle technique et sans s'assurer des conditions dans lesquelles le véhicule avait été entretenu.

Elle soutient également qu'il n'est pas établi que ces vices rendent le véhicule impropre à son usage, aucune panne ni aucun incident n'ayant été déclaré.

A titre subsidiaire, elle invoque sa qualité de profane en matière d'automobile et son ignorance des vices cachés affectant le véhicule, de sorte qu'elle ne peut être condamnée au paiement des frais annexes, frais d'expertise et préjudice moral.

Elle indique enfin que le prix de vente était fixé à la somme de 7.000 euros et que Mme [M] ne rapporte pas la preuve d'un prix supérieur.

Elle sollicite enfin la garantie de la société Safety Auto Moto pour toutes les condamnations qui pourraient être mises à sa charge en relevant que les anomalies ayant été constatées lors d'un nouveau contrôle technique le 21 mars 2017, puis par l'expert, elles ne pouvaient échapper à la société Safety Auto Moto lors des deux contrôles techniques effectués par cette dernière.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 22 septembre 2021, Mme [B] [G] épouse [M] demande à la cour, au visa des articles 1240 et suivants et 1641 et suivants du code civil, de :

- La déclarer recevable et bien fondée en ses demandes,

En conséquence,

- Confirmer le jugement du 8 février 2021 en ce qu'il a :

' prononcé la résolution du contrat de vente en date du 23 février 2017 portant sur le véhicule d'occasion de marque Renault de type master équipé « food-truck » immatriculé [Immatriculation 9],

' condamné Mme [D] [S] à payer à Mme [M] la somme de 14.000 euros en restitution du prix de vente,

' ordonné la restitution du véhicule aux frais de Mme [S],

' condamné Mme [S] à récupérer à ses frais le véhicule se trouvant actuellement [Adresse 3], en prenant à sa charge les éventuels frais de remorquage,

' condamné Mme [S] à verser la somme de 1.500 euros à Mme [M] sur le fondement de I'article 700 du code de procédure civile,

' condamné Mme [S] aux dépens, comprenant le coût des frais d'expertise,

' ordonné l'exécution provisoire de la décision.

- Débouter Mme [S]-[P] de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions,

- Infirmer le jugement du 8 février 2021 pour le surplus,

Statuant à nouveau, pour le surplus,

- Dire que la Sarl Safety Auto Moto a commis une faute source de responsabilité civile délictuelle,

- Condamner la Sarl Safety Auto Moto à payer à Mme [B] [M] la somme de 6.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral,

En tout état de cause,

- Condamner solidairement Mme [D] [S]-[P] et la SARL Safety Auto Moto à payer à Mme [B] [M] la somme de 3.000 euros, en application de l'article 700 du code de procédure civile, s'agissant des frais irrépétibles d'appel,

- Condamner solidairement Mme [D] [S]-[P] et La SARL Safety Auto Moto aux entiers dépens de l'instance d'appel.

Mme [M] demande la confirmation du jugement en ce qu'il a prononcé la résolution de la vente pour vices cachés et condamné Mme [S] à lui restituer la somme de 14.000 euros correspond au prix de vente et à procéder, à ses frais, au retrait du véhicule se trouvant à [Localité 10] (51). Elle relève que les procès-verbaux de contrôle technique remis lors de la vente ne mentionnaient que deux défauts mineurs et ne nécessitant pas de contre visite alors que le rapport du contrôle technique effectué par la société Dekra le 21 mars 2017 ainsi que le rapport d'expertise du 31 octobre 2017 ont mis en évidence de manière indiscutable l'existence de graves défauts d'ordre technique, qui préexistaient à la vente, qui n'étaient pas visibles par un acheteur non-professionnel et qui rendaient le véhicule impropre à son usage.

Elle reproche au tribunal de l'avoir déboutée de sa demande des dommages et intérêts formée à l'encontre de la société Safety Auto Moto et, sollicitant l'infirmation du jugement de ce chef, soutient que cette dernière, en ne relevant pas les désordres affectant le véhicule, a commis une faute engageant sa responsabilité délictuelle sur le fondement de l'article 1240 du code civil.

La société Safety Auto Moto n'a pas constitué avocat.

La clôture a été prononcée le 17 janvier 2024.

En cours de délibéré, la cour a mis dans les débats la question de la recevabilité des demandes formées par voie d'appel incident par Mme [M] à l'encontre de la société Safety Auto Moto du fait de la caducité de l'appel principal de Mme [S] à l'encontre de cette société, prononcée par ordonnance du conseiller de la mise en état du 29 juin 2022, et en l'absence de signification à la société Safety Auto Moto, partie défaillante, des conclusions d'intimée et d'appel incident de Mme [M] en date du 22 septembre 2021 et a sollicité les observations éventuelles des parties sur ce point.

Les parties n'ont pas fait part à la cour, par note en délibéré autorisée jusqu'au 17 mai 2024, de leurs observations.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la recevabilité des demandes formées contre la société Safety Auto Moto

Le conseiller de la mise en état a prononcé la caducité partielle de la déclaration d'appel de Mme [S] à l'égard de la Sarl Safety Auto Moto par ordonnance du 29 juin 2022. Cette ordonnance est définitive, en l'absence de déféré dans les quinze jours de son prononcé.

En outre, Mme [M] ne justifie pas avoir fait signifier par voie d'huissier à la société Safety Auto Moto, partie défaillante, ses conclusions d'intimée et d'appel incident notifiées au greffe par voie électronique le 22 septembre 2021.

Il en résulte que les demandes des parties formulées à l'encontre de la société Safety Auto Moto sont irrecevables.

Sur la garantie des vices cachés

L'article 1641 du code civil énonce que le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage, que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus.

Il incombe à l'acquéreur de rapporter la preuve du vice caché et de ses différents caractères. Il doit ainsi établir que la chose vendue est atteinte d'un vice :

- inhérent à la chose et constituant la cause technique des défectuosités,

- présentant un caractère de gravité de nature à porter atteinte à l'usage attendu de la chose,

- existant antérieurement à la vente, au moins en l'état de germe,

- n'étant, au moment de la vente, ni apparent ni connu de lui, le vendeur n'étant pas tenu « des vices apparents et dont l'acheteur a pu se convaincre lui-même » conformément à l'article 1642 du code civil.

Selon l'article 1644 du même code, dans le cas des articles 1641 et 1643, l'acheteur a le choix de rendre la chose et de se faire restituer le prix, ou de garder la chose et de se faire rendre une partie du prix.

En l'espèce, le véhicule, mis en circulation le 2 novembre 1998, a été acquis par Mme [M] le 23 février 2017.

L'annonce publiée sur le site internet « Le bon coin » mentionnait que le contrôle technique était « OK ». Le jour de la vente, Mme [S] a remis à Mme [M] deux procès-verbaux de contrôle technique datés des 12 novembre 2016 et 22 février 2017, réalisés par la société Safety Auto Moto, lesquels ne faisaient état que de deux défauts à corriger sans contre-visite. Le dernier procès-verbal de contrôle technique mentionne un kilométrage de 192.033.

Une expertise amiable a été effectuée par la société Nettelet expertises à la demande de la société Allianz, assureur de Mme [M], en présence de cette dernière et en l'absence de Mme [D] [S] et de la société Safety Auto Moto, régulièrement convoquées.

Si le juge ne peut se fonder exclusivement sur une expertise non judiciaire réalisée à la demande de l'une des parties, ce dernier doit rechercher si l'expertise est corroborée par d'autres éléments de preuve.

Dans son rapport daté du 31 octobre 2017, l'expert constate notamment une corrosion perforante du soubassement/châssis en particulier au niveau des longerons et des bas de caisse en partie centrale, une déformation du passage de roue longeron avant droit au niveau de la butée de suspension avant droit, des soudures non d'origine sur le pot catalytique qui a vraisemblablement été vidé de son filtre/catalyseur, de plus mal fixé sur le pot de détente ce qui génère des fuites, un défaut de protection et jeu anormal des rotules de bras de suspension avant, un défaut de protection des soufflets de crémaillère de direction, un jeu important au niveau de la crémaillère de direction, un soufflet de transmission gauche coté roue déchiré, une corrosion importante des canalisations de freinage.

Il note que le véhicule est non réparable économiquement puisque sa remise en état, supposant a minima la remise en état du châssis et des bas de caisse, la remise en conformité du train avant, de la direction et du circuit de freinage ainsi que le remplacement des pneumatiques, s'élève à 15.000 euros TTC.

Il conclut en indiquant que « le véhicule présente donc de nombreux défauts non décelables par l'acquéreur, y compris lors d'un examen minutieux et d'un essai sur la route, défauts qui sont suffisamment graves pour rendre le véhicule impropre à l'usage auquel il est destiné : corrosion perforante de la caisse et du châssis entre autres ».

Il relève en outre que ces défauts auraient dû faire I'objet d'annotations sur le procès-verbal de contrôle technique de la société Safety Auto Moto.

Les défauts constatés par l'expert correspondent à ceux mentionnés dans le procès-verbal de contrôle technique volontaire réalisé à la demande de Mme [M] par la société Dekra le 31 mars 2017, soit un mois seulement après la vente. En raison du court délai d'utilisation du véhicule par Mme [M], de la nature et de l'importance des désordres, il y a lieu de retenir qu'ils sont antérieurs à la vente.

Il résulte de ces éléments que la preuve est suffisamment rapportée que le véhicule vendu à Mme [M] était atteint, lors de la vente, de vices non décelables par l'acquéreur mais suffisamment graves pour porter atteinte à l'usage attendu de la chose, et d'une ampleur telle que si l'acquéreur les avait connus, il n'aurait pas fait l'acquisition du véhicule, quelle que soit l'ancienneté de celui-ci.

L'existence de ces vices justifient, par confirmation du jugement entrepris, la résolution de la vente et la restitution du véhicule et du prix, selon les modalités prévues par le jugement. Il doit également être confirmé en ce qu'il a retenu que la vente avait été conclue moyennant le prix de 14.000 euros en se fondant sur la reproduction de l'annonce publiée sur le site « le bon coin » faisant état d'un prix de 14.900 euros et sur la preuve d'un retrait en espèces par Mme [M] d'un montant de 14.000 euros la veille de la vente.

Les attestations produites par Mme [S], dont trois émanent de proches qui attestent avoir été présents lors de la vente et affirment que celle-ci a été conclue pour la somme de 7.000 euros, ne sont corroborées par aucun élément et ne peuvent dès lors être retenues.

Il y a lieu par ailleurs de constater que si Mme [M] ne demande pas la confirmation du jugement en ce qu'il l'a déboutée de ses demandes indemnitaires formées à l'encontre de Mme [S] sur le fondement de l'article 1645 du code civil, elle ne formule devant la cour aucune demande de ce chef. Il en sera pris acte.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Le jugement doit être confirmé en ce qu'il a mis les dépens à la charge de Mme [S] et l'a condamnée à payer à Mme [M] une indemnité de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile. Il sera en revanche infirmé en ce qu'il a inclus dans les dépens « le coût des frais d'expertise », l'expert n'ayant pas été désigné par une décision de justice.

Mme [S], qui succombe en son recours, supportera la charge des dépens d'appel.

Elle se trouve dès lors redevable d'une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile qui sera fixée à la somme de 1.500 euros et ne peut elle-même prétendre à l'application de ce texte à son profit.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Déclare irrecevables les demandes des parties formulées à l'encontre de la société Safety Auto Moto,

Confirme le jugement déféré sauf en ce qu'il a condamné Mme [D] [S] à payer au titre des dépens le coût des frais d'expertise,

Statuant à nouveau du chef infirmé et y ajoutant,

Condamne Mme [D] [S] épouse [P] aux dépens de première instance,

Condamne Mme [D] [S] épouse [P] à payer à Mme [B] [G] épouse [M] la somme de 1.500 euros au titre de ses frais irrépétibles d'appel sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne Mme [D] [S] épouse [P] aux dépens d'appel,

Déboute les parties de leurs demandes plus amples et contraires.

LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE