Décisions
CA Paris, Pôle 6 - ch. 13, 31 mai 2024, n° 20/04810
PARIS
Arrêt
Autre
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 13
ARRÊT DU 31 Mai 2024
(n° , 20 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 20/04810 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CCEXN
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 16 Juin 2020 par le Pole social du TJ de PARIS RG n° 19/10544
APPELANTE
URSSAF CENTRE VAL DE LOIRE
[Adresse 1]
[Localité 2]
représentée par Mme [B] [I] en vertu d'un pouvoir spécial
INTIMEE
Madame [G] [K]-[C]
[Adresse 3]
[Localité 4]
représentée par Me Lucien FLAMENT, avocat au barreau de PARIS
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 28 Mars 2024, en audience publique et double rapporteur, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Carine TASMADJIAN, présidente de chambre chargée du rapport et Monsieur Gilles REVELLES, conseiller.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de:
Mme Carine TASMADJIAN, présidente de chambre
M. Gilles REVELLES, Conseiller
M. Philippe BLONDEAU, conseiller
qui en ont délibéré
Greffier : Mme Fatma DEVECI, lors des débats
ARRÊT :
- CONTRADICTOIRE
- prononcé
par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Mme CarineTASMADJIAN, présidente de chambre et Mme Fatma DEVECI, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La cour statue sur l'appel interjeté par l'Urssaf Centre Val-de-Loire d'un jugement rendu le 16 juin 2020 par le pôle social du tribunal judiciaire de Paris dans un litige l'opposant à Mme [K]-[C].
FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :
Les circonstances de la cause ayant été rapportées par le tribunal dans son jugement au contenu duquel la cour entend se référer pour un plus ample exposé, il convient de préciser que par courrier du 26 novembre 2018, l'union pour le recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales du Centre (ci-après désignée 'l'Urssaf' ou 'l'organisme') a adressé à Mme [K]-[C] un appel de cotisation au titre de la cotisation subsidiaire maladie (CSM) de l'année 2017 d'un montant de 14 222 euros que celle-ci a contesté par courrier du 3 décembre 2018 puis du 29 mars 2019 devant la commission de recours amiable.
A défaut de décision explicite, Mme [K] a porté sa contestation devant le tribunal de grande instance de Paris.
Entre temps, l'Urssaf a, par courrier du 25 octobre 2019, adressé à Mme [K]-[C] une mise en demeure d'avoir à payer la somme de 14 222 euros.
Finalement, la CRA rendait sa décision le 26 septembre 2019, déboutant Mme [K] de son recours et confirmant la décision de l'Urssaf tant sur le principe de la créance que sur son montant.
Par jugement du 16 juin 2020, le tribunal judiciaire a :
- déclaré inopposable à Mme [G] [K] l'appel de cotisations du 26 novembre 2018,
- annulé la mise en demeure du 25 octobre 2019 ordonnant à Mme [K] de payer la somme de 14 222 euros,
- débouté l'Urssaf de l'intégralité de ses prétentions,
- dit n'y avoir lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- ordonné l'exécution provisoire de la décision,
- condamné l'Urssaf à supporter les éventuels dépens de l'instance.
Pour statuer ainsi le tribunal, après avoir rappelé les dispositions de l'article R.380-4 du code de la sécurité sociale, a retenu que le courrier du 26 novembre 2018 ordonnant à Mme [K]-[C] de payer la somme de 14 222 euros ne valait appel à cotisation que s'il avait été émis, daté puis régulièrement notifié avant la date fixée par l'article susvisé. Or, il relevait que si le courrier litigieux portait la date du 26 novembre 2018, l'Urssaf ne rapportait pas la preuve qu'elle l'avait rédigé à cette date, ni qu'elle l'avait expédié avant le 1er décembre 2018 de sorte que l'appel de cotisation devait être annulé.
L'Urssaf a le 10 juillet 2020 interjeté appel de ce jugement qui lui avait été notifié le 26 juin 2020.
Par ses conclusions écrites n° 2, soutenues oralement par son représentant, l'Urssaf demande à la cour de :
- infirmer le jugement déféré,
- à titre reconventionnel, condamner Mme [K]-[C] au paiement de la cotisation subsidiaire maladie pour un montant de 14 222 euros,
- valider la mise en demeure du 25 octobre 2019 d'un montant de 14 222 euros au titre de la CSM 2017,
- valider l'appel de cotisation subsidiaire maladie du 26 novembre 2018 pour son montant dû de 14 222 euros,
- confirmer la décision de la commission de recours amiable du 26 septembre 2019 notifiée le 4 octobre 2019,
- rejeter toutes les demandes de Mme [K]-[C].
Par ses conclusions écrites d'intimé soutenues oralement et déposées à l'audience par son conseil, Mme [K]-[C] demande à la cour, de :
- confirmer la décision déférée en toutes ses dispositions et notamment en ce qu'elle a annulé l'appel de cotisation du 26 novembre 2018 et la mise en demeure du 25 octobre 2019,
- rejeter l'intégralité des demandes adverses,
- condamner l'Urssaf au paiement de la somme de 3 300 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Pour un exposé complet des prétentions et moyens des parties, la cour renvoie à leurs conclusions écrites visées par le greffe à l'audience du 13 avril 2023 qu'elles ont respectivement soutenues oralement.
Par arrêt du 22 septembre 2023, la cour, autrement composée, a :
- ordonné la réouverture des débats aux fins d'inviter l'Urssaf à conclure sur le moyen tiré de la nullité de la mise en demeure, de communiquer et produire toute pièce utile au soutien de ses prétentions et de recueillir les explications des parties,
- réservé les demandes.
A l'audience du 28 mars 2024, l'Urssaf, au visa de ses conclusions n°3, demande à la cour, s'agissant de la mise en demeure de la valider pour son montant de 14 222 euros et de rejeter le moyen tiré de sa nullité. Le reste des conclusions demeurent inchangées.
Mme [K]-[C], reprenant le bénéfice de ses précédentes conclusions, demande à la cour de constater que l'Urssaf ne produit pas de justificatif d'envoi et de réception de la mise en demeure. Elle précise ne rien modifier à ses écritures précédentes.
Pour un exposé complet des prétentions et moyens des parties, et en application du deuxième alinéa de l'article 446-2 et de l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie à leurs conclusions écrites visées par le greffe à l'audience du 28 mars 2024 qu'elles ont respectivement soutenues oralement.
Après s'être assurée de l'effectivité d'un échange préalable des pièces et écritures, la cour a retenu l'affaire et mis son arrêt en délibéré au 31 mai 2024.
MOTIVATION DE LA COUR
Sur la portée de la réserve d'interprétation formulée par le Conseil constitutionnel dans sa décision du 27 septembre 2018
Moyen des parties
Mme [K] fait plaider le caractère inconstitutionnel de la CSM au motif que le Conseil Constitutionnel a émis une réserve de constitutionnalité invitant le pouvoir réglementaire à fixer le taux et les modalités de cette contribution de façon à éviter une rupture caractérisée de l'égalité devant les charges publiques. Or, le décret n°2016-976 instituant un taux de 8 % pour la cotisation maladie subsidiaire ne prévoit pas de plafond ce qui contrevient aux exigences du Conseil Constitutionnel. Elle entend préciser que la réserve s'incorpore à la loi et que les juridictions ont l'obligation de l'appliquer dès lors qu'il n'était pas prévu une application reportée dans le temps. Elle estime que cette réserve s'applique aux cotisations dues au titre des années 2016, 2017 et 2018 et que le décret est donc inconstitutionnel.
L'Urssaf conteste la pertinence de cette analyse et fait valoir que la réserve d'interprétation du Conseil constitutionnel ne peut pas conduire à écarter purement et simplement l'application des articles D. 380-1 et D. 380-2 code de la sécurité sociale qui régissent les modalités de calcul de la contribution au présent litige. Elle expose que la seule réserve posée par le Conseil constitutionnel est que le pouvoir réglementaire fixe les taux et modalités de détermination de l'assiette de la cotisation de façon à ce que celle-ci n'entraîne pas de rupture caractérisée de l'égalité devant les charges publiques. Il s'agit d'une réserve d'interprétation dite « directive » c'est-à-dire que le Conseil donne l'interprétation à retenir et s'adresse exclusivement au pouvoir réglementaire chargé de l'application de la loi et non aux justiciables qui ne peuvent l'invoquer à l'appui de leur contestation de la PUMa. En outre, la décision ayant été rendue le 27 septembre 2018, elle ne vaut que pour l'avenir, aucune disposition ne permettant de considérer que le Conseil a entendu déclarer rétroactivement non conformes à la Constitution les dispositions réglementaires portées dans le décret n°2016-979 du 19 juillet 2016.
A l'inverse, l'Urssaf relève que le Conseil constitutionnel a déclaré les dispositions relatives à la CSM conformes à la Constitution, en utilisant la technique de la réserve d'interprétation pour l'avenir afin de concourir à une meilleure sécurité juridique des situations passées. Celle-ci ne saurait donc être remise en cause par Mme [K] pour bénéficier d'une décharge de la cotisation.
L'Urssaf relève encore qu'il est inexact de considérer que les modifications de l'article L. 380-2 introduites par la loi de financement de la sécurité (dite 'LFSS') pour 2019 auraient été prises uniquement en application de la réserve d'interprétation du Conseil constitutionnel puisqu'elles avaient pour unique effet d'atténuer les effets de seuil et de mettre un terme aux difficultés ou incohérences relevées par ailleurs. D'ailleurs, l'article 12 de la loi n°2018-1203 du 22 décembre 2018 de financement de la sécurité sociale pour 2019 a modifié les dispositions de l'article L. 380-2 code de la sécurité sociale.
Réponse de la cour
Aux termes des dispositions de l'article L. 160-1 du code de la sécurité sociale dans sa version en vigueur du 01 janvier au 25 décembre 2016
Toute personne travaillant ou, lorsqu'elle n'exerce pas d'activité professionnelle, résidant en France de manière stable et régulière bénéficie, en cas de maladie ou de maternité, de la prise en charge de ses frais de santé dans les conditions fixées au présent livre.
L'exercice d'une activité professionnelle et les conditions de résidence en France sont appréciées selon les règles prévues, respectivement, aux articles L. 111-2-2 et L. 111-2-3.
l'article L. 380-2 du code de la sécurité sociale, précisant
Les personnes mentionnées à l'article L. 160-1 sont redevables d'une cotisation annuelle lorsqu'elles remplissent les conditions suivantes :
1° Leurs revenus tirés, au cours de l'année considérée, d'activités professionnelles exercées en France sont inférieurs à un seuil fixé par décret. En outre, lorsqu'elles sont mariées ou liées à un partenaire par un pacte civil de solidarité, les revenus tirés d'activités professionnelles exercées en France de l'autre membre du couple sont également inférieurs à ce seuil ;
2° Elles n'ont perçu ni pension de retraite, ni rente, ni aucun montant d'allocation de chômage au cours de l'année considérée. Il en est de même, lorsqu'elles sont mariées ou liées à un partenaire par un pacte civil de solidarité, pour l'autre membre du couple.
Cette cotisation est fixée en pourcentage du montant des revenus fonciers, de capitaux mobiliers, des plus-values de cession à titre onéreux de biens ou de droits de toute nature, des bénéfices industriels et commerciaux non professionnels et des bénéfices des professions non commerciales non professionnels, définis selon les modalités fixées au IV de l'article 1417 du code général des impôts, qui dépasse un plafond fixé par décret. Servent également au calcul de l'assiette de la cotisation , lorsqu'ils ne sont pas pris en compte en application du IV de l'article 1417 du code général des impôts, l'ensemble des moyens d'existence et des éléments de train de vie, notamment les avantages en nature et les revenus procurés par des biens mobiliers et immobiliers, dont le bénéficiaire de la couverture maladie universelle a disposé, en quelque lieu que ce soit, en France ou à l'étranger, et à quelque titre que ce soit. Ces éléments de train de vie font l'objet d'une évaluation dont les modalités sont fixées par décret en Conseil d'Etat. Un décret détermine le taux et les modalités de calcul de cette cotisation ainsi que les obligations déclaratives incombant aux assujettis.
Lorsque les revenus d'activité mentionnés au 1° sont inférieurs au seuil défini au même 1° mais supérieurs à la moitié de ce seuil, l'assiette de la cotisation fait l'objet d'un abattement dans des conditions fixées par décret. Cet abattement croît à proportion des revenus d'activité, pour atteindre 100 % à hauteur du seuil défini audit 1°.
La cotisation est recouvrée l'année qui suit l'année considérée, mentionnée aux 1° et 2° du présent article, selon les dispositions des sections 2 à 4 du chapitre III et du chapitre IV du titre IV du livre II du présent code, sous réserve des adaptations prévues par décret du Conseil d'Etat.
Les agents des administrations fiscales communiquent aux organismes mentionnés aux articles L. 213-1 et L. 752-2 les informations nominatives déclarées pour l'établissement de l'impôt sur le revenu par les personnes remplissant les conditions mentionnées au premier alinéa de l'article L. 380-2, conformément à l'article L. 152 du livre des procédures fiscales.
Le Conseil constitutionnel, dans sa décision QPC du 27 septembre 2018, a déclaré ce texte conforme à la Constitution, sous la réserve d' interprétation énoncée au paragraphe 19, aux termes duquel la seule absence de plafonnement d'une cotisation dont les modalités de détermination de l'assiette ainsi que le taux sont fixés par voie réglementaire n'est pas, en elle-même, constitutive d'une rupture caractérisée de l'égalité devant les charges publiques. Toutefois, il appartient au pouvoir réglementaire de fixer ce taux et ces modalités de façon à ce que la cotisation n'entraîne pas de rupture caractérisée de l'égalité devant les charges publiques.
Le Conseil constitutionnel a donc validé l'article L. 380-2 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable à l'espèce.
Les réserves d'interprétation dont une décision du Conseil constitutionnel assortit la déclaration de conformité à la Constitution d'une disposition législative sont revêtues de l'autorité absolue de la chose jugée et lient tant les autorités administratives que le juge pour l'application et l'interprétation de cette disposition.
Or, les articles D. 380-1 et D. 380-2 du code de la sécurité sociale, modifiés par le décret 2016 -979 du 19 juillet 2016, fixent bien le taux de la cotisation et ses modalités.
Ainsi, aux termes de l'article D. 380-1, dans sa rédaction issue du décret n°2016-979 du 19 juillet 2016 :
I.-Le montant de la cotisation mentionné à l'article L. 380-2 due par les assurés dont les revenus tirés d'activités professionnelles sont inférieurs à un seuil fixé à 10 % du plafond annuel de la sécurité sociale est déterminé selon les formules suivantes :
1° Si les revenus tirés d'activités professionnelles sont inférieurs à 5 % du plafond annuel de la sécurité sociale : Montant de la cotisation = 8 % × (A-D)
où :
A est l'assiette des revenus définie au quatrième alinéa de l'article L. 380-2 ;
D, qui correspond au plafond mentionné au quatrième alinéa du même article, est égal à 25 % du plafond annuel de la sécurité sociale ;
2° Si les revenus tirés d'activités professionnelles sont compris entre 5 % et 10 % du plafond annuel de la sécurité sociale :
Montant de la cotisation = 8 % × (A-D) × 2 × (1-R/ S)
où :
R est le montant des revenus tirés d'activités professionnelles ;
S, qui correspond au seuil des revenus tirés d'activités professionnelles mentionné au deuxième alinéa de l'article L. 380-2, est égal à 10 % du plafond annuel de la sécurité sociale.
II.-Lorsque le redevable de cette cotisation ne remplit les conditions mentionnées à l'article L. 160-1 que pour une partie de l'année civile, le montant de la cotisation due est calculé au prorata de cette partie de l'année.
III.-Si, au titre d'une période donnée, l'assuré est redevable de la cotisation prévue à l'article L. 380-3-1, il ne peut être redevable de la cotisation prévue à l'article L. 380-2 pour la même période. Le montant de celle-ci est alors calculé dans les conditions prévues au II.
l'article D. 380-2 poursuivant
I.-La cotisation due par les personnes mentionnées à l'article L. 380-3-1 au titre d'une année civile est calculée selon la formule définie au 1° du I de l'article D. 380-1, la valeur A correspondant alors à l'assiette des revenus définis au deuxième alinéa du IV de l'article L. 380-3-1 perçus au cours de la dernière année civile pour laquelle ces revenus sont connus.
II.-Cette cotisation est due à compter de la date à laquelle la personne remplit les conditions énoncées au premier alinéa de l'article L. 380-3-1 et cesse d'être due à compter du lendemain de la date à laquelle elles ne sont plus remplies. Lorsque la période entre ces deux dates est inférieure à une année, le montant de la cotisation est calculé au prorata de la durée de cette période.
III.-Les caisses primaires d'assurance maladie communiquent aux organismes chargés du recouvrement la liste des personnes redevables de la cotisation prévue à l'article L. 380-3-1.
C'est d'ailleurs ce qu'a rappelé le Conseil d'Etat, saisi d'un recours en excès de pouvoir concernant une circulaire du 15 novembre 2017, dans un arrêt du 10 juillet 2019, n°417919. Il a ainsi jugé « qu'en fixant, dans le cadre déterminé par les dispositions de l'article L. 380-2 précité, le seuil de revenus professionnels prévu au deuxième alinéa de cet article, en-deçà duquel la cotisation est due, à 10 % du plafond annuel de la sécurité sociale, soit 3 861,60 euros en 2016, le montant des revenus du patrimoine mentionné au quatrième alinéa du même article, au-delà duquel s'applique le prélèvement, à 25 % de ce même plafond, soit 9 654 euros en 2016, et le taux de la cotisation en cause à 8 %, le pouvoir réglementaire a défini les modalités de calcul de cette cotisation dans des conditions qui n'entraînent pas de rupture caractérisée de l'égalité devant les charges publiques ». Les requérants ne sont donc pas fondés à soutenir que l'article D. 380-1 du code de la sécurité sociale aurait méconnu le principe d'égalité devant les charges publiques garanti par l'article 13 de la Déclaration des droits de l'homme et des citoyens de 1789, non plus que les dispositions de l'article L. 380-2 du code de la sécurité sociale telles qu'interprétées par le Conseil Constitutionnel.
Par suite, l'article D. 380-1 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue du décret du 19 juillet 2016 précité, ne méconnaît pas le principe d'égalité devant les charges publiques ni celui d'égalité devant la loi garantis par les dispositions de l'article L. 380-2 du code de la sécurité sociale telles qu'interprétées par le Conseil constitutionnel dans sa décision QPC du 27 septembre 2018, qui, contrairement à ce qui est soutenu, n'impliquait pas l'adoption de mesures réglementaires pour le passé.
Mme [K]-[C] ne donne aucun élément pour remettre en cause cette appréciation ni ne justifie concrètement en quoi, au regard de sa situation personnelle, l'absence de plafond dans la fixation de la cotisation subsidiaire maladie pour l'année 2017 serait susceptible de porter atteinte au principe d'égalité devant les charges publiques.
Le moyen tiré de l'inconstitutionnalité du décret sera en conséquence rejeté.
Sur le calcul de la CSM
Moyens des parties
L'Urssaf rappelle qu'à la suite des éléments transmis par la Direction générale des finances publiques et au regard des conditions d'assujettissement à la CSM prévues par l'article D. 380-1 du code de la sécurité sociale, Mme [K] a été informée qu'elle était redevable de la somme de 14 222 euros au titre de la CSM 2017. Ainsi que le prévoit la circulaire interministérielle n°DSS/5B/2017/322 du 15 novembre 2017 relative à la CSM prévue à l'article L.380-2 du code de la sécurité sociale, les bases de calcul de la CSM 2017 pour Mme [K] sont composées de ses revenus du capital c'est-à-dire les revenus des valeurs et capitaux immobiliers. La cotisante ayant effectué une seule déclaration de revenus avec M. [C] pour l'année 2017 et ne démontrant pas que les revenus des époux étaient individualisés, la part de revenus de chacun est égale à la moitié des revenus du couple. Ainsi, pour l'année 2017, la base de calcul de la CSM pour Mme [K] s'élève à 187 580 euros après déduction de la CSG. Pour sa part, son époux a déclaré un revenu de 5 500 euros au titre des revenus d'activités professionnelles duquel un abattement de 34 % a été opéré conformément aux dispositions régissant le régime micro-BNC, ce qui donne la somme de 3 630 euros. Les revenus d'activités professionnelles de l'époux étant inférieurs à 10 % du PASS (3 923 euros) ils ne pouvaient pas être pris en compte pour le calcul de la CSM de Mme [K]. Cette dernière dispose donc de revenus d'activités inférieurs à 5 % du plafond annuel de la sécurité sociale et des revenus du capital supérieurs à 25 % du PASS. Pour la détermination de l'assiette, ces revenus sont abattus d'un montant égal à 25 % du PASS soit 9 807 euros au titre de 2017. Le montant de la cotisation de la cotisante est donc de 8 % x (187 580 - 9 807) = 14 222 euros.
Mme [K]-[C] estime qu'elle n'est pas redevable de la CSM puisque seules en sont redevables les personnes disposant de revenus tirés d'activités professionnelles supérieurs à 3 923 euros, soit 10 % du PASS en 2017. Or, en 2017, son époux a déclaré 5 500 euros de revenus d'activités professionnelles et l'intégralité de ce montant a été soumis à cotisations sociales sans aucun abattement. Elle soutient que l'Urssaf applique un abattement de 34 % à ces revenus uniquement pour réduire le montant des revenus d'activité à la somme de 3 630 euros et le soumettre indûment à la CSM. Elle estime que l'application par l'Urssaf de cet abattement de 34 % réservé au calcul de l'assiette imposable au barème progressif de l'impôt sur le revenu des travailleurs indépendants est contraire aux textes susvisés et que seul le montant de 5 500 euros ayant donné lieu à cotisations sociales doit être pris en compte, ce qui doit conduire à l'exclure du champ des personnes redevables de la CSM.
Réponse de la cour
Aux termes de l'article D. 380-1 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable au litige,
I- Le montant de la cotisation mentionné à l'article L. 380-2 due par les assurés dont les revenus tirés d'activités professionnelles sont inférieurs à un seuil fixé à 10 % du plafond annuel de la sécurité sociale est déterminé selon les formules suivantes :
1°) Si les revenus tirés d'activités professionnelles sont inférieurs à 5 % du plafond annuel de la sécurité sociale : Montant de la cotisation = 8 % x (A-D) où A est l'assiette des revenus définie au quatrième alinéa de l'article L. 380-2 ; D, qui correspond au plafond mentionné au quatrième alinéa du même article, est égal à 25 % du plafond annuel de la sécurité sociale ;
2°) Si les revenus tirés d'activités professionnelles sont compris entre 5 % et 10 % du plafond annuel de la sécurité sociale : Montant de la cotisation = 8 % x (A-D) x 2 x (1-R/S) où : R est le montant des revenus tirés d'activités professionnelles ; S, qui correspond au seuil des revenus tirés d'activités professionnelles mentionné au deuxième alinéa de l'article L. 380-2, est égal à 10 % du plafond annuel de la sécurité sociale.
II- Lorsque le redevable de cette cotisation ne remplit les conditions mentionnées à l'article L 160-1 que pour une partie de l'année civile, le montant de [a cotisation due est calculé au prorata de cette partie de l'année.
III. Si, au titre d'une période donnée, l'assuré est redevable de la cotisation prévue à l'article L 380-3-1, il ne peut être redevable de la cotisation prévue à l'article L 380-2 pour la même période. Le montant de celle-ci est alors calculé dans les conditions prévues au Il. "
Par ailleurs, la circulaire interministérielle n°DSS/5B/2017/322 du 15 novembre 2017 relative à la cotisation subsidiaire maladie prévue à l'article L.380-2 du code de la sécurité sociale indique
La cotisation subsidiaire maladie est notamment assise sur les revenus fonciers, de capitaux mobiliers, des plus-values de cession à titre onéreux de biens ou de droits de toute nature, les bénéfices industriels et commerciaux non professionnels et les bénéfices des professions non commerciales non professionnels, retenus pour le calcul du revenu fiscal de référence selon les modalités fixées au IV de l'article 1417 du code général des impôts. Le tableau annexé en précise les composantes (annexe 2).
En cas de décaration commune au sein d'un même foyer fiscal, l'assiette retenue est la part de revenus qui peut être attribuée à chaque membre du couple. Lorsque les revenus des époux ou partenaires de pacte civil de solidarité ne sont pas individualisés dans l'avis d'imposition, la part de revenus de chaque redevable est égale à la moitié des revenus. Toutefois, si le redevable est titulaire d'une part supérieure ou inférieure à 50 % des revenus, il peut fournir aux organismes de recouvrement tout élément probant permettant de déterminer la part exacte des revenus qui lui revient (cf. III. 2).
Pour la détermination de l'assiette, ces revenus sont abattus d'un montant égal à 25% du PASS, soit 9 654 € au titre de 2016, conformément à l'article D. 380-1 du code de la sécurité sociale. Dans le cas d'un foyer composé de deux redevables de la cotisation, cet abattement est appliqué à chacune des parts de revenu attribué à chacun des membres du couple.
Il résulte des pièces produites par l'Urssaf et qui ne sont pas contestées, que Mme [K] a perçu des revenus d'actions et parts pour 121 819 euros, du produit d'un contrats assurance-vie pour 11 99 euros, des intérêts et autres produits de placement à revenu fixe pour 4 euros soit, après un abattement sur les plus-value imposable pour 113 242 euros et un abattement net durée détention appliquée sur des plus-values pour 138 896 euros.
Mme [K]-[C] ne conteste pas davantage avoir effectué une déclaration de revenus commune avec son conjoint M. [C] pour l'année 2017.
Elle ne verse aux débats aucun élément permettant de considérer que les revenus du couple étaient individualisés.
Pour sa part, Mme [K]-[C] a des revenus d'activités inférieurs à 5 % du plafond annuel de la sécurité sociale et des revenus du capital supérieurs à 25 % du PASS, soit 187 580 euros.
M. [C] a déclaré un revenu de 5 500 euros de revenus d'activités professionnelles duquel s'applique un abattement de 34 % au titre du régime micro-BNC, soit 3 630 euros. Ces revenus étant inférieurs à 10 % du PASS, ils ne pouvaient être pris en compte pour le calcul de la CSM de son conjoint.
Au regard de la règle de calcul rappelé ci-avant, c'est à juste titre que le montant de la cotisation a été fixée par l'Urssaf à la somme de 14 222 euros.
Sur l'application rétroactive du décret
Moyen des parties
Mme [K] fait valoir le principe de non-rétroactivité des actes administratifs prévu à l'article L. 221-4 du code des relations entre le public et l'administration qui dispose que « sauf s'il en est disposé autrement par la loi, une nouvelle réglementation ne s'applique pas aux situations juridiques définitivement constituées avant son entrée en vigueur ou aux contrats formés avant cette date ». Dès lors, un décret n'est rétroactif que si la loi le prévoit. Au cas de la PUMa, elle fait valoir que tous les textes qui la régissent sont parus postérieurement au début de l'année 2017 puisque :
- la possibilité pour la caisse de procéder à une affiliation d'office n'a été prévue que par l'article 6, 1° du décret no 2017-736 du 3 mai 2017 relatif aux règles d'identification, d'affiliation et de rattachement des bénéficiaires des prestations de sécurité sociale portant modifications de diverses dispositions relatives à l'assurance maladie,
- la définition de la condition de résidence en France n'a été formulée que par le décret n°2017-240 du 24 février 2017 relatif au contrôle des conditions permettant de bénéficier de la protection universelle maladie,
- la liste des titres de séjour ouvrant droit à la PUMa n'a été précisée que par un arrêté du 10 mai 2017,
- le formulaire de demande de PUMa a été publié le 1er novembre 2017.
Aucun de ces textes ne prévoyant une quelconque rétroactivité quant à leur application, Mme [K] indique qu'elle ne pouvait avoir connaissance de l'exigibilité de la cotisation et en déduit que l'appel de cotisation afférent à l'année 2017 doit être annulée.
L'Urssaf fait valoir que le décret n°2016-979 du 19 juillet 2016 relatif aux modalités de calcul de la CSM est entré en vigueur le 22 juillet 2016, soit bien avant le premier appel de cotisation et la première exigibilité. Dès cette date, Mme [K]-[C] connaissait les conditions d'assujettissement ou non à la cotisation subsidiaire maladie par article L. 380-2 alinéas 2 et 3, les revenus constitutifs de l'assiette de la cotisation et les modalités de prise en compte de ces revenus par son alinéa 2, les formules de calcul retenues, l'abattement d'assiette appliqué et le taux de la cotisation grâce au décret du 19 juillet 2016, les principales modalités de recouvrement par l'article L. 380-2 alinéa 6 et les modalités retenues pour la déclaration des éléments d'assiette par son derniers alinéa.
De même, les articles 7 et 8 du décret n°2017-736 du 3 mai 2017 qui, au demeurant, ont uniquement précisé les modalités d'appel de paiement, de recouvrement et de contrôle de la cotisation, sont entrés en vigueur le 6 mai 2017, là encore avant le premier appel de la cotisation subsidiaire maladie et la première exigibilité de la cotisation. Mme [K]-[C] est mal fondée à invoquer une prétendue rétroactivité des dispositions réglementaires susvisées pour solliciter l'annulation de l'appel de cotisation.
Réponse de la cour
Il n'est pas contestable, comme le plaide Mme [K]-[C], que les lois entrent en vigueur à compter de leur publication au Journal Officiel ou de la date qu'elles fixent et que seule l'entrée en vigueur du décret d'application d'une loi est susceptible de différer l'entrée en vigueur de celle-ci.
Mais il est tout aussi constant, comme le rappelle la Cour de cassation, qu'une disposition légale se suffisant à elle-même est applicable sans attendre la publication d'un décret, à la date d'entrée en vigueur de cette loi.
Au cas présent, le sixième alinéa de l'article L. 380-2 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue de la loi du 21 décembre 2015, dispose que : « La cotisation est recouvrée l'année qui suit l'année considérée, mentionnée aux 1 et 2 du présent article, selon les dispositions des sections 2 à 4 du chapitre III et du chapitre IV du titre IV du livre II du présent code, sous réserve des adaptations prévues par décret du Conseil d'Etat ».
Il sera relevé que cette disposition ne dépendait pas, pour la mise en oeuvre immédiate de ses principes, de son décret d'application du 19 juillet 2016 .
Ensuite, il est constant que le décret n°2016-979 du 19 juillet 2016 relatif aux modalités de calcul de la CSM est entré en vigueur le 22 juillet 2016, soit bien avant l'appel de cotisation de l'Urssaf et son exigibilité. Ses dispositions, qui au demeurant prévoient simplement les deux formules de calcul applicables pour les assurés redevables de la cotisation en fonction du montant des revenus d'activités professionnelles perçus, s'appliquent donc à des situations juridiques non définitivement constituées avant leur entrée en vigueur.
Enfin, le décret du 3 mai 2017 relatif aux règles d'identification, d'affiliation et de rattachement des bénéficiaires des prestations de sécurité sociale et portant modification de diverses dispositions relatives à l'assurance maladie, publié au Journal Officiel de la République française du 5 mai 2017, a modifié les articles R. 380-3 à R. 380-7 du code de la sécurité sociale, en prévoyant, notamment, que la cotisation mentionnée à l'article L. 380-2 est appelée au plus tard le dernier jour ouvré du mois de novembre de l'année suivant celle au titre de laquelle elle est due et qu'elle est exigible dans les trente jours suivant la date à laquelle elle est appelée.
Ces dispositions réglementaires se limitent à préciser les modalités de recouvrement intervenant, pour l'année 2016, première année d'assujettissement à cette cotisation, à la fin de l'année 2017, et force est de constater qu'elles ne modifient pas le principe, les conditions d'assujettissement, ni l'assiette dans son étendue de la cotisation subsidiaire maladie, qui sont exclusivement prévues par les dispositions issues de la loi du 21 décembre 2015 et du décret n° 2016 -976 du 19 juillet 2016.
Ainsi, dès 2016, l'article L. 380-2 du code de la sécurité sociale, complété par l'article D. 380-1, comportait les précisions nécessaires à la détermination de l'assiette, du taux et du mode de calcul de la cotisation subsidiaire maladie dont il était indiqué, dès le 1er janvier 2016, qu'elle serait recouvrée l'année suivante, soit courant 2017, de sorte que les dispositions du décret 2017-736 du 3 mai 2017, qui ne portent que sur les modalités de recouvrement de la cotisation, n'étaient pas nécessaires à l'entrée en vigueur de la cotisation.
En conséquence, le moyen tiré de ce que les dispositions de la circulaire prescrivant l'application des dispositions de l'article L. 380-2 et des articles R. 380-3 à R. 380-7 du code de la sécurité sociale pour le recouvrement de la cotisation due au titre de l'année 2017 méconnaîtraient le principe de non-rétroactivité des actes réglementaires doit être écarté.
Sur l'information concernant le transfert de données et leur traitement par l'Urssaf
Mme [K]-[C] fait valoir que la loi informatique et liberté pose le principe de l'information de la personne soumise à un recueil de données à caractère personnel et que la CNIL, dans son avis n°2017-279 du 26 octobre 2017, a spécifiquement insisté sur l'obligation d'information de la DGFIP et de l'Acoss s'agissant de la PUMa. L'Acoss comme la DGFIP, en application de la loi informatique et liberté, issue de la directive européenne 95/46/CE, avaient l'obligation d'informer les personnes concernées par le traitement de données ainsi que l'a rappelé la CJUE dans sa décision du 1er octobre 2015. Or, la concernant, ni les lettres circulaires adressées en 2017 par les Urssaf, ni les appels de cotisations ne mentionnaient d'information concernant ce traitement pas plus qu'ils ne faisaient mention du droit à la modification et à la consultation de ces données.L'obligation d'information des personnes concernées n'a donc été respectée ni par l'Acoss ni par la DGFIP. Elle conclut qu'une violation de la loi informatique et liberté a été commise par l'Urssaf et par la DGFIP ce qui rend le traitement des données illégal et l'appel de cotisation contraire aux exigences de la CNIL.
L'Urssaf soutient que contrairement à l'argumentation de Mme [K]-[C], les dispositions de l'article 27 de la loi Informatique et Libertés ont bien été respectées. Ainsi, le traitement de données à caractère personnel destiné au calcul de la CSM a été autorisé par décret n°2017-1530 du 3 novembre 2017 pris après avis motivé et publié de la CNIL du 26 octobre 2017. Il ressort de cet avis et des décrets du 3 novembre 2017 et du 24 mai 2018 que pour la cotisation 2016 appelée en 2017, sont autorisés un traitement de données entre la DGFIP et l'Acoss et un traitement de ces données par l'Acoss et les Urssaf pour le calcul de la CSM. L'Urssaf a respecté son obligation d'information générale des assurés sociaux concernant la CSM, conformément à l'article R. 112-2 du code de la sécurité sociale, une campagne d'information ayant été menée auprès des personnes concernées au mois de novembre 2018. Elle indique que Mme [K]-[C] ne peut soutenir ne pas avoir été informée des transferts de données entre l'administration fiscale et l'Urssaf pour solliciter l'annulation de l'appel de cotisation. En tout état de cause, si une atteinte à la loi Informatique et Libertés était avérée, seule la CNIL pourrait en faire le constat et prononcer une éventuelle sanction, qui ne saurait consister en une annulation de l'appel de cotisation litigieux.
Réponse de la cour
L'article 11 de la directive 95/46CE du Parlement européen et du Conseil, du 24 octobre 1995, relative à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données, intitulé « Informations lorsque les données n'ont pas été collectées auprès de la personne concernée », est ainsi libellé :
1. Lorsque les données n'ont pas été collectées auprès de la personne concernée, les États membres prévoient que le responsable du traitement ou son représentant doit, dès l'enregistrement des données ou, si une communication de données à un tiers est envisagée, au plus tard lors de la première communication de données, fournir à la personne concernée au moins les informations énumérées ci-dessous, sauf si la personne en est déjà informée:
a) l'identité du responsable du traitement et, le cas échéant, de son représentant;
b) les finalités du traitement;
c) toute information supplémentaire telle que:
- les catégories de données concernées,
- les destinataires ou les catégories de destinataires des données,
- l'existence d'un droit d'accès aux données la concernant et de rectification de ces données,
dans la mesure où, compte tenu des circonstances particulières dans lesquelles les données sont collectées, ces informations supplémentaires sont nécessaires pour assurer à l'égard de la personne concernée un traitement loyal des données.
De même, l'article 32 III de la loi informatique et libertés, dans sa version en vigueur avant le 1er juin 2019, prévoit que « lorsque les données à caractère personnel n'ont pas été recueillies auprès de la personne concernée, le responsable du traitement ou son représentant doit fournir à cette dernière les informations énumérées au I dès l'enregistrement des données ou, si une communication des données à des tiers est envisagée, au plus tard lors de la première communication des données ».
Dans l'arrêt C-201/14 du 1er octobre 2015, qu'invoque Ainsi, le transfert des données entre la DGFIP et l'Acoss puis entre l'Acoss et les Urssaf a bien été autorisé pour le recouvrement des cotisations subsidiaires maladie., la Cour de justice de l'Union européenne a jugé « que les articles 10, 11 et 13 de la directive 95/46 doivent être interprétés en ce sens qu'ils s'opposent à des mesures nationales, telles que celles en cause au principal, qui permettent à une administration publique d'un État membre de transmettre des données personnelles à une autre administration publique et leur traitement subséquent, sans que les personnes concernées n'aient été informées de cette transmission ou de ce traitement ».
Au cas de la présente cotisation, la Commission nationale informatique et liberté a été saisie pour avis sur un projet de décret autorisant la mise en oeuvre d'un traitement de données à caractère personnel destiné au calcul de la cotisation prévue par l'article L. 380-2 du code de la sécurité sociale (demande d'avis n°17012620).
Dans sa délibération 2017-279 du 26 octobre 2017, la CNIL a, notamment, autorisé cette mise en 'uvre. Elle constatait que « Les catégories de données à caractère personnel qui seront traitées sont listées à l'article 1er Il du projet qui distingue les données relatives à l'état civil, l'identité ou l'identification des personnes, des données d'ordre économique et financier. En pratique, l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS) recevra les données en provenance de la direction générale des finances publiques (DGFIP). En effet, les personnes étant assujetties à la cotisation subsidiaire maladie sous conditions de ressources spécifiques, seule l'ACOSS est en mesure de connaître la population des résidents fiscaux et peut vérifier les conditions d'assujettissement afin d'en soustraire la population assujettie. La commission prend acte que seules les données à caractère personnel relatives à des personnes identifiées, par la DGFIP, comme redevables de cette cotisation seront transmises à l'ACOSS ».
Elle a observé que l'article 1er-IV du projet de décret prévoyait que seront destinataires des données à caractère personnel, à raison de leurs attributions et du besoin d'en connaître :
« - les agents habilités de l'ACOSS ;
- les agents habilités des organismes mentionnés aux articles L. 213-1 et L. 752-2 du code de la sécurité sociale en charge du calcul, du recouvrement et du contrôle de la cotisation. S'agissant de ces organismes, la commission prend acte de ce qu'ils ne seront destinataires que des données concernant les cotisants pour lesquels ils sont territorialement compétents » et en conclut que « Un tel accès aux données apparaît justifié au regard des finalités du traitement ».
La CNIL a enfin observé, sur « l'information et les droits des personnes », que « le projet demeure silencieux sur les modalités d'information des personnes concernées. La commission observe dans le dossier joint à la saisine que le ministère renvoie au décret visant à autoriser le traitement mis en oeuvre par la DGFIP relatif au transfert de données fiscales concernant les redevables de la cotisation annuelle subsidiaire. Elle rappelle toutefois que, si la DGFIP a pour obligation d'informer les personnes en ce qui concerne le traitement automatisé de transfert de données fiscales dont elle est responsable de traitement, l'ACOSS devra également assurer l'information des personnes concernées pour le traitement qu'elle met en oeuvre ».
Aussi, le décret n°2017-1530 du 3 novembre 2017 est venu autoriser le traitement par l'Acoss et les Urssaf des informations nominatives déclarées pour l'établissement de l'impôt sur le revenu par les personnes remplissant les conditions pour verser la CSM et a mis à la charge de l'Acoss l'obligation d'informer les personnes concernées du traitement mis en oeuvre.
Ensuite, suivant l'article L. 380-2 du code de la sécurité sociale, « les agents des administrations fiscales communiquent aux organismes mentionnés aux articles L. 213-1 et L. 752-2 les informations nominatives déclarées pour l'établissement de l'impôt sur le revenu par les personnes remplissant les conditions mentionnées au premier alinéa de l'article L. 380-2, conformément à l'article L. 152 du livre des procédures fiscales ».
L'article R. 380-3 du code de la sécurité sociale dispose, notamment, que la CSM est « calculée, appelée et recouvrée par les organismes chargés du recouvrement des cotisations du régime général au vu des éléments transmis par l'administration fiscale ou par les personnes redevables de ces cotisations ».
L'article D. 380-5 I du code de la sécurité sociale prévoit que « les éléments nécessaires à la détermination des revenus mentionnés aux articles D. 380-1 et D. 380-2 sont communiqués par l'administration fiscale aux organismes chargés du calcul et du recouvrement des cotisations mentionnées à l'article L. 380-2 et au deuxième alinéa du IV de l'article L. 380-3-1 ».
Ainsi, le transfert des données entre la DGFIP et l'Acoss puis entre l'Acoss et les Urssaf a bien été autorisé pour le recouvrement des cotisations subsidiaires maladie.
Dès lors, Mme [K] ne peut se prévaloir de l'arrêt du 1er octobre 2015 de la CJUE puisqu'à la différence de la situation ayant donné lieu à cet arrêt, le principe et les modalités de transmission des données de revenus par l'administration fiscale vers les organismes de sécurité sociale concernés procèdent de la loi et de textes réglementaires, régulièrement publiés au journal officiel qui, par les indications portées notamment par le décret du 4 novembre 2017, prévoient des mesures appropriées visant à protéger les intérêts légitimes de la personne concernée. En effet au regard de la règle d'assiette de cette contribution, la transmission des informations en cause apparaît nécessaire, limitée dans le temps et circonscrite aux données strictement nécessaires pour ce faire.
En tout état de cause, et à supposer même l'existence d'un manquement de l'Urssaf, Mme [K]-[C], qui se borne à invoquer un traitement illégal, n'explique pas en quoi il aurait pu, au regard de la question en litige portant sur l'obligation à la dette de cotisation, influer sur le sens de la décision prise ou l'aurait privée d'une garantie particulière d'autant qu'il résulte des pièces produites que Mme [K] a eu la possibilité d'obtenir les informations fiscales afin d'obtenir la réduction des sommes en cause.
S'agissant de l'obligation d'informer les personnes concernées par le traitement automatisé de transfert de leurs données fiscales résultant de l'article 32 de la loi du 6 janvier 1978 et de l'avis de la CNIL du 26 octobre 2017, il y a lieu de relever, qu'outre le fait que la transmission des données a été portée à la connaissance de l'intéressée par la publication de la loi ayant institué la cotisation subsidiaire maladie au Journal officiel, que nul n'est censé ignorer, elle a fait l'objet d'une communication sur le site internet Urssaf.fr qui indiquait que les redevables de la contribution étaient identifiés à partir des données transmises par l'administration fiscale sur la base des éléments de revenus pris en compte pour l'impôt sur le revenu.
Au demeurant, l'obligation d'information a été mise à la charge de l'Acoss, qui n'est pas partie à la présente instance, par la CNIL.
Néanmoins, l'appel à cotisation du 26 novembre 2018 reçu par Mme [K] l'informe que les revenus financiers ayant servis de base au calcul de la CSM ont été transmis par la direction générale des finances publiques et prévoit une procédure contradictoire en cas de contestation de la prise en compte des revenus par le cotisant.
Il ressort ainsi des termes du courrier que l'intéressée a été informée préalablement à l'appel de cotisation de l'utilisation et du transfert de ses données fiscales personnelles auprès de l'Urssaf, de sorte que la violation de la loi Informatique et Libertés n'est pas établie.
En tout état de cause, en application des dispositions de l'article R.112-2 du code de la sécurité sociale, à défaut de toute demande de Mme [K] sur ses droits et ses obligations, l'Urssaf n'était tenue à aucune obligation d'information individuelle à son égard dès lors que l'obligation générale d'information pesant sur elle à l'égard des assurés ne lui impose, en l'absence de demandes précises de ces derniers, ni de prendre l'initiative de les renseigner sur leurs droits éventuels, ni de porter à leur connaissance les textes publiés au Journal Officiel. C'est ce que juge de manière constante la Cour de cassation qui rappelle que « l'obligation générale d'information dont les organismes de sécurité sociale sont débiteurs envers leurs assurés ne leur impose, en l'absence de demande de ceux-ci, ni de prendre l'initiative de les renseigner sur leurs droits éventuels, ni de porter à leur connaissance des textes officiels publiés au Journal Officiel ».
Enfin, l'éventuelle absence d'information ne saurait être sanctionnée par la nullité de l'appel à cotisation régulièrement notifié, Mme [K]-[C] ayant eu la possibilité de le contester et de se voir communiquer l'ensemble des pièces.
Le moyen titré d'une violation des dispositions de la loi informatique et liberté sera en conséquence rejeté.
Sur la compétence de l'union pour le recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales Centre Val de Loire
Moyens des parties
Mme [K]-[C] fait valoir que les Urssaf ont pour ressort territorial la région administrative dont elles portent le nom de sorte qu'elles ne peuvent recouvrer les cotisations que des redevables résidant dans leurs ressorts territoriaux respectifs. L'Urssaf du Centre n'avait donc aucune compétence pour émettre un appel à cotisation pour une cotisante demeurant à [Localité 5]. Si une délégation de compétence entre unions est autorisée, elle doit prendre la forme d'une convention qui prend effet après approbation par le directeur de l'organisme national de chaque branche concernée, cette convention devant être antérieure au contrôle effectué ou au recouvrement diligenté par la délégataire, sous peine de nullité.
Mme [K]-[C] rappelle que par une délibération publique n°2017-279, la CNIL n'a autorisé le transfert de données et leurs exploitations qu'aux Urssaf territorialement compétentes. La concernant, dépendant de l'Urssaf Île-de-France, l'Urssaf Centre ne pouvait valablement traiter un fichier contenant des données personnelles sans en avoir eu l'autorisation, celle-ci ne pouvant être donnée que par décret pris en Conseil d'Etat après avis de la CNIL.
Mme [K] excipe d'une décision de la chambre criminelle de la Cour de cassation qui a jugé, le 27 novembre 2013, qu'un organisme chargé de la gestion d'un service public ne peut pas participer directement ou indirectement à l'appréhension illicite de données informatique. Il ne peut donc a fortiori être l'auteur lui-même d'une telle infraction. Dès lors, n'étant compétente ni pour traiter des données informatiques ni pour émettre un appel à cotisation à destination de cotisant ne résidant pas dans son ressort, celui-ci doit être annulé.
L'Urssaf fait valoir qu'elle était compétente territorialement pour adresser l'appel de cotisation litigieux puisqu'une convention relative à la centralisation du recouvrement de la cotisation d'assurance maladie visée à l'article L. 380-2 du code de la sécurité sociale avait été conclue le 1er décembre 2017 entre l'Urssaf d'Ile de France et l'Urssaf du Centre qui autorisait cette dernière, par délégation, à appeler la cotisation litigieuse auprès d'une personne résidant en Île-de-France. Elle précise que la convention de mutualisation du 1er décembre 2017, approuvée par décision du directeur de l'Acoss du 11 décembre 2017, qui confie à l'Urssaf Centre Val de Loire 'l'ensemble des droits et obligations afférents à l'exercice des missions de recouvrement résultant des articles R.380-3 et suivants du code de la sécurité sociale sur le champ de la cotisation d'assurance maladie visée à l'article L.380-2 du code de la sécurité sociale' est régulière et applicable à l'appel de cotisation daté du 26 novembre 2018. Si l''avis de la CNIL du 26 octobre 2017 a pour vocation de protéger les redevables de la CSM d'une utilisation abusive de leurs données à caractère personnel elle n'a en revanche pas vocation à décider des règles de compétence territoriale des Urssaf.
Réponse de la cour
Aux termes de l'alinéa 1 de l'article L. 122-7 du code de la sécurité sociale, dans sa version modifiée par la loi n° 2016 -1827 du 23 décembre 2016 prévoit
Le directeur d'un organisme local ou régional peut déléguer à un organisme local ou régional la réalisation des missions ou activités liées à la gestion des organismes, au service des prestations, au recouvrement et à la gestion des activités de trésorerie, par une convention qui prend effet après approbation par le directeur de l'organisme national de chaque branche concernée.
Lorsque la mutualisation inclut des activités comptables, financières ou de contrôle relevant de l'agent comptable, la convention est également signée par les agents comptables des organismes concernés.'
En l'espèce, la convention relative à la centralisation du recouvrement de la cotisation d'assurance maladie visée à l'article L. 380-2 du code de la sécurité sociale, communiquée par l'Urssaf , a été signée le 1er décembre 2017 entre, notamment, les directeurs de l'Urssaf d'Ile-de-France et celle du Centre Val-de-Loire ainsi que par les agents comptables de ces Urssaf.
Elle stipule que « la présente convention est applicable à compter de la décision d'approbation du Directeur de l'Acoss et conclue pour une durée indéterminée », que « les URSSAF délégantes transfèrent à l'URSSAF délégataire l'ensemble des droits et obligations afférents à l'exercice des missions de recouvrement résultant des articles R. 380-3 et suivants du code de la sécurité sociale sur le champ de la cotisation d'assurance maladie visée à l'article L. 380-2 du code de la sécurité sociale » et enfin que « l'Urssaf délégataire assure l'encaissement centralisé et la gestion du recouvrement de la cotisation visée à l'article L. 380-2 du code de la sécurité sociale, dont le contrôle et les suites amiables et judiciaires des contestations soulevées par les cotisants ».
En outre, par décision du 11 décembre 2017 prise par le directeur de l'Acoss en application de l'article L. 122-7 du code de la sécurité sociale et relative au recouvrement des cotisations dues en application de l'article L. 380-2 du code de la sécurité sociale, « sont approuvées les conventions de mutualisation interrégionales, prises en application de l'article L. 122-7 du code de la sécurité sociale et conclues entre les unions pour le recouvrement des cotisations de sécurité sociale aux fins de délégation de calcul, de l'appel et du recouvrement des cotisations dues en application de l'article L. 380-2 du code de la sécurité sociale, à des Urssaf délégataires conformément à la répartition figurant sur le tableau annexé à la présente décision ».
Figure parmi ces conventions une convention relative à la centralisation du recouvrement de la cotisation d'assurance maladie visée à l'article L. 380-2 du code de la sécurité sociale datée du 1er décembre 2017 entre l'Urssaf Ile Île-de-France et l'Urssaf Centre Val-de-Loire.
La cour constate en effet que le tableau annexé aux pièces de l'Urssaf précise que l'Urssaf Ile-de-France est « l'Urssaf délégante » et que l'Urssaf Centre, devenue en cours de procédure l'Urssaf Centre Val-de-Loire, est « l'Urssaf délégataire » de la première.
Par ailleurs, aux termes de l'article 1 du code civil,
Les lois et, lorsqu'ils sont publiés au Journal officiel de la République française, les actes administratifs entrent en vigueur à la date qu'ils fixent ou, à défaut, le lendemain de leur publication. Toutefois, l'entrée en vigueur de celles de leurs dispositions dont l'exécution nécessite des mesures d'application est reportée à la date d'entrée en vigueur de ces mesures.
En cas d'urgence, entrent en vigueur dès leur publication les lois dont le décret de promulgation le prescrit et les actes administratifs pour lesquels le Gouvernement l'ordonne par une disposition spéciale.
Les dispositions du présent article ne sont pas applicables aux actes individuels.
La décision du 11 décembre 20217, qui n'est ni une loi ni un acte administratif publié au Journal officiel, a été publiée au bulletin officiel santé, protection sociale, solidarité le 15 janvier 2018.
Elle concerne les relations entre deux organismes publics, est destinée à la mise en oeuvre de leurs prérogatives de puissance publique et est donc d'application immédiate.
L'Urssaf du Centre Val-de-Loire était donc territorialement compétente et a été régulièrement désignée pour le recouvrement de la cotisation subsidiaire maladie .
L'appel de cotisation reçu par Mme [K] étant daté du 26 novembre 2018, c'est-à-dire postérieurement à la décision du 11 décembre 2017, l'Urssaf Centre Val-de-Loire avait bien reçue délégation pour calculer, appeler et recouvrer les cotisations subsidiaires maladie au jour de l'appel de cotisation.
Le fait que la décision du 11 décembre 2017 du directeur de l'Acoss ait été publiée au BO Santé - Protection sociale - Solidarité le 15 janvier 2018 n'a pas d'incidence sur la validité de l'appel de cotisations de Mme [K] puisque la convention précitée a, conformément aux dispositions de l'article L. 122-7 du code de la sécurité sociale, pris effet le 12 décembre 2017 après approbation par le directeur de l'Acoss, soit antérieurement à l'appel de cotisation litigieux
Dès lors, le moyen tiré de la violation des dispositions de l'article 27 de la loi Informatique et Liberté invoquée par Mme [K]-[C], ne saurait être retenu puisque, contrairement à l'interprétation qu'elle en fait, les organismes territorialement compétents évoqués dans l'avis de la CNIL du 26 octobre 2017 ne désignent pas uniquement l'Urssaf du lieu de résidence du cotisant, mais également les organismes territorialement compétents par voie de délégation, conformément à l'article L. 122-7 précité, soit en l'espèce l'Urssaf Centre Val-de-Loire s'agissant des cotisants résidents en Île-de-France.
Il convient en conséquence de rejeter la demande de Mme [K]-[C] tendant à l'annulation de l'appel à cotisation fondée de ces chefs, l'Urssaf du Centre Val-de-Loire étant bien compétente pour calculer, appeler et recouvrer les cotisations subsidiaires maladies dont elle était redevable au jour de l'appel de cotisation et, par voie de conséquence, de traiter les données informatiques légalement collectées.
Sur la tardiveté de l'appel de cotisations
Mme [K]-[C] fait valoir qu'en application de l'article L. 380-2 du code de la sécurité sociale, la cotisation PUMa a vocation à être recouvrée l'année qui suit l'année considérée à savoir, pour les personnes ne percevant pas de revenus salariés, l'année qui suit l'encaissement des revenus non professionnels. Le délai imparti à l'organisme de sécurité sociale pour exercer son action en recouvrement prévu à l'article R. 380-4 du code de la sécurité sociale est au plus tard le dernier jour ouvré du mois de novembre de l'année suivant celle au titre de laquelle elle est due. Elle en conclut que les cotisations dues au titre d'une année civile ne peuvent être réclamées que si l'Urssaf se manifeste avant le mois de décembre de l'année suivante. Dans le cas contraire, l'organisme est déchu de son droit à agir en recouvrement. L'Urssaf l avait donc jusqu'au 30 novembre 2018 pour lui adresser un appel de cotisation au titre de l'année 2017. Celui qu'elle a reçu étant daté du 26 novembre 2018, elle n'a pu le recevoir que courant du mois de décembre et l'Urssaf, qui doit apporter la preuve d'une réception du courrier au mois de novembre 2018, échoue à le faire.
L'Urssaf rétorque que, contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges, la Cour de cassation a eu à juger que le non-respect par l'organisme de recouvrement de la date limite mentionnée par ce texte a pour seul effet de reporter le délai au terme duquel la cotisation devient exigible. Elle relève que l'article R. 380-4 envisage un appel de la cotisation « au plus tard le dernier jour ouvré du mois de novembre de l'année suivant celle au titre de laquelle elle est due » mais que nulle sanction n'est prévue à cet égard. L'appel de cotisation ne constitue pas un acte administratif faisant grief à Mme [K] et ne peut donc être annulé. Le non-respect de la date d'appel de cotisation prévue par l'article R. 380-4 n'est sanctionné par aucune nullité, n'entraîne aucun préjudice pour Mme [K] tandis que l'Urssaf dispose d'un délai de trois ans pour recouvrer les cotisations à compter de la fin de l'année civile au titre de laquelle elles sont dues.
Elle considère que l'appel de cotisation n'encoure ni forclusion ni péremption de sorte qu'elle demeure en droit d'appeler et de recouvrer la cotisation solidaire maladie y compris lorsqu'elle procède à cet appel au-delà de la date ainsi mentionnée.
Réponse de la cour
L'alinéa 1er de l'article R.380-4 du code de la sécurité sociale dispose :
La cotisation mentionnée à l'article L. 380-2 est appelée au plus tard le dernier jour ouvré du mois de novembre de l'année suivant celle au titre de laquelle elle est due. Elle est exigible dans les trente jours suivant la date à laquelle elle est appelée.
Ce faisant, la Cour de cassation a eu l'occasion de rappeler que le non-respect par l'organisme de recouvrement de la date limite mentionnée par l'article R. 380-4 a pour seul effet de reporter le délai au terme duquel la cotisation devient exigible (Civ. 2 - 6 janvier 2022 n° 20-16.379) et il n'y a pas lieu, comme le demande Mme [K], de ne pas reprendre cette position : le texte cité ne prévoit aucune sanction au non-respect du délai en termes de nullité de l'appel à cotisation.
Par ailleurs, la prévision du délai de l'appel à cotisation est immédiatement suivie d'une disposition visant le caractère exigible de la cotisation dans les trente jours de l'appel, le dépassement du délai prévu entraînant donc le report de l'exigibilité et du point de départ de calcul des majorations de retard. Et, comme le relève l'Urssaf, aucun préjudice n'est démontré par Mme [K] du seul fait de l'appel tardif de cotisations auxquelles elle était tenue par la loi.
Il s'ensuit que la circonstance selon laquelle l'appel de la cotisation en cause soit intervenu le 26 noc 2018 ne saurait faire obstacle à son recouvrement selon les modalités prévues à l'article R. 380-4, y compris si l'Urssaf n'est pas en mesure de justifier de son envoi à cette date.
Cette solution porte nullement atteinte au principe d'effectivité ni aux principes constitutionnels de sécurité juridique et d'égalité dans l'application de la loi puisqu'aucune sanction de nullité n'est prévue au délai indicatif prévu par les textes qui, en outre, ne constitue pas une garantie des droits de l'assuré mais une simple indication pour l'organisme de recouvrement.
Par contre, les délais de prescription du recouvrement des cotisations à compter de la fin de l'année civile au titre de laquelle elles sont dues constituent cette garantie de sécurité juridique et d'égalité dans l'application de la loi. Au cas présent, ils ont bien été respectés.
Ce moyen sera en conséquence rejeté et le jugement réformé de ce chef.
Sur la mise en demeure
Mme [K] soulève tout d'abord la nullité de la mise en demeure en l'absence de justificatif de sa réception, étant rappelé que ce document doit être adressé par lettre recommandée ou par tout moyen donnant date certaine à sa réception. Elle soutient qu'elle n'a jamais été destinataire de la mise en demeure évoquée par l'Urssaf et que celle-ci n'est pas en mesure de démontrer le contraire. Elle n'est donc plus en mesure de demander le paiement de la cotisation.
Subsidiairement, Mme [K] fait valoir l'inexactitude de la période à laquelle se rapporte la cotisation dont il est demandé le paiement. Ainsi, la mise en demeure vise le 4ème trimestre de l'année 2017 alors que la cotisation subsidiaire maladie porte sur l'année entière. Cette indication de période erronée induit en erreur l'assujetti qui pense être alors redevable de la somme multipliée par 4 pour l'année entière.
Mme [K] en conclut que la mise en demeure doit être annulée.
L'Urssaf rétorque qu'il est de jurisprudence constante que l'absence de réception de la mise en demeure n'entache pas celle-ci de sa validité. L'article L. 244-2 précise d'ailleurs que la mise en demeure doit être 'adressée par lettre recommandée ou par tout moyen donnant date certaine à sa réception par l'employeur ou le travailleur indépendant', ce qui induit que le législateur n'exige la réception effective de la mise demeure par l'employeur que dans le cas où celle-ci n'a pas été envoyée par voie de lettre recommandée. En l'espèce, la mise en demeure a été adressée par lettre recommandée le 25 octobre 2019 et Mme [K] en a accusé réception le 26 octobre suivant.
S'agissant de la mention « 4ème trimestre 2017 » dans la colonne « période », l'Urssaf soutient qu'elle n'est pas de nature à tromper les cotisants ou à les induire en erreur dans la mesure où la CSM est redevable annuellement et qu'ils savent qu'ils n'ont reçu aucun appel de cotisation durant les précédents trimestres. L'appel du quatrième trimestre ne peut donc que correspondre à la cotisation annuelle appelée au cours du quatrième trimestre de l'année. De ce fait, la mise en demeure du 25 octobre 2019 notifiée le 26 octobre 2019 à la requérante est bien régulière, et la cotisation n'est pas prescrite.
Réponse de la cour
Aux termes de l'article L. 244-2 du code de la sécurité sociale dans sa version en vigueur depuis le 23 décembre 2018
Toute action ou poursuite effectuée en application de l'article précédent ou des articles L. 244-6 et L. 244-8-1 est obligatoirement précédée, si elle a lieu à la requête du ministère public, d'un avertissement par lettre recommandée de l'autorité compétente de l'Etat invitant l'employeur ou le travailleur indépendant à régulariser sa situation dans le mois. Si la poursuite n'a pas lieu à la requête du ministère public, ledit avertissement est remplacé par une mise en demeure adressée par lettre recommandée ou par tout moyen donnant date certaine à sa réception par l'employeur ou le travailleur indépendant.
Le contenu de l'avertissement ou de la mise en demeure mentionnés au premier alinéa doit être précis et motivé, dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat.
Il résulte de ce texte que la mise en demeure doit être adressée soit par lettre recommandée soit par tout moyen donnant date certaine à sa réception et c'est dans ce dernier cas seulement que l'Urssaf doit justifier de sa réception effective.
Il sera rappelé que la mise en demeure n'étant pas de nature contentieuse, elle n'est pas soumise aux exigences du code de procédure civile et, dès lors, sa validité n'est pas entachée par son défaut de réception, sous réserve qu'elle ait été adressée au bon destinataire et à son adresse.
Au cas présent, la mise en demeure établie par l'Urssaf le 19 avril 2019 a été bien été adressée à Mme [K] par lettre recommandée mais à une date qui n'apparaît effectivement pas sur le récépissé postal remis par la Poste.
Pour autant, cette absence de précision de date d'envoi et de réception de la mise en demeure n'a pour effet que de ne pas faire courir le délai de forclusion pour saisir la commission de recours amiable. Elle n'affecte pas la mise en demeure elle-même. Et il sera relevé par la cour que Mme [K] [C] a pu contester le montant réclamé dans la mise en demeure devant la commission de recours amiable.
La cour constate par ailleurs, au regard de la chronologie des recours rappelée ci-avant, que les sommes sollicitées dans la mise en demeure n'encourent pas la prescription.
S'agissant des mentions portées sur la mise en demeure, l'article R. 244-1 du même code dans sa version en vigueur du 01 janvier 2017 au 16 décembre 2018 précisant
L'avertissement ou la mise en demeure précise la cause, la nature et le montant des sommes réclamées, les majorations et pénalités qui s'y appliquent ainsi que la période à laquelle elles se rapportent.
(...) Lorsque l'employeur ou le travailleur indépendant qui fait l'objet de l'avertissement ou de la mise en demeure prévus à l'article L. 244-2, saisit la juridiction compétente dans les conditions prévues à l'article R. 133-2, la prescription des actions mentionnées aux articles L. 244-7 et L. 244-11 est interrompue et de nouveaux délais recommencent à courir à compter du jour où le jugement est devenu définitif.
L'avertissement ou la mise en demeure, qui constitue une invitation impérative adressée au débiteur d'avoir à régulariser sa situation dans le délai imparti, et la contrainte délivrée à la suite de cette mise en demeure restée sans effet, doivent permettre à l'intéressé d'avoir connaissance de la nature, de la cause et de l'étendue de son obligation ; qu'à cette fin il importe qu'elles précisent, à peine de nullité, outre la nature et le montant des cotisations réclamées, la période à laquelle elles se rapportent, sans que soit exigée la preuve d'un préjudice. Elle doit également précisé le délai d'un mois pour régulariser la situation.
Ce faisant, la mise en demeure contestée comporte les mentions suivantes :
- la date de son établissement, à savoir le 19 avril 2019,
- la nature des cotisations concernées en l'occurrence la cotisation subsidiaire maladie,
- le motif de la mise en recouvrement en l'espèce, ce qui n'est pas contesté, une absence de versement de cette cotisation obligatoire,
- la période, en l'espèce le 4ème trimestre 2017,
- et le montant réclamé soit 14 222 euros.
Cette mise en demeure porte mention du délai d'un mois pour s'acquitter du paiement des cotisations ainsi que la possibilité de saisir la commission de recours amiable en cas de contestation.
De même, si la mise en demeure doit fournir les éléments de calcul des différentes cotisations et contributions pour permettre à l'assujetti de connaître l'étendue de son obligation cela n'entraîne pas d'obligation pour l'organisme de faire mention des taux appliqués et du détail des calculs dès lors que figurent les informations nécessaires permettant au cotisant de comprendre ce qui lui est réclamé et de pouvoir le vérifier. Au cas présent, le calcul de la seule cotisation appelée est prévue par les dispositions de l'article D. 380-1 et 2 du code de la sécurité sociale.
Enfin, s'agissant de la période, en mentionnant '4ème trimestre 2017', Mme [K]-[C] ne peut valablement soutenir qu'elle a pu en déduire que d'autres appels à cotisations lui seraient adressées puisque la CSM est redevable annuellement, le dernier trimestre et qu'elle n'avait jamais reçu d'appel de cotisation pour les trimestres précédents. La mention ne peut donc correspondre qu'à la cotisation annuelle appelée au cours du quatrième trimestre de l'année, ainsi qu'il le lui avait été indiqué dans les courriers l'informant de son affiliation à la CSM et l'appel de cotisation du 26 novembre 2018. Il n'existe donc aucune ambiguïté sur le montant demandé et, en tout état de cause, il sera relevé que cette mention n'est pas susceptible d'entraîner une confusion dans la compréhension du montant de la cotisation justifiant que l'appel de cotisations soit annulé.
Il résulte de ce qui précède que la mise en demeure n'encoure pas la nullité, Mme [K]-[C] ayant parfaitement été en mesure d'avoir connaissance de la nature, de la cause et de l'étendue de son obligation.
Ce moyen sera rejeté.
Sur la demande reconventionnelle en paiement
L'Urssaf ayant justifié du bien fondé de sa créance, et son montant n'étant pas remis en cause par Mme [K]-[C], il sera fait droit à la demande reconventionnelle en paiement pour la somme de 14 222 euros.
Sur les dépens et les demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile
Mme [K]-[C], qui succombe à l'instance, sera condamnée aux dépens conformément aux dispositions de l'article 696 du code de procédure civile et sera déboutée de la demande qu'elle a formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour, après en avoir délibéré, par arrêt contradictoire,
DÉCLARE l'appel formé par l'union pour le recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales Centre Val-de-Loire recevable,
INFIRME le jugement rendu le 16 juin 2020 par le pôle social du tribunal judiciaire de Paris (RG19-10544) en toutes ses dispositions ;
STATUANT À NOUVEAU ET Y AJOUTANT,
JUGE que Madame [G] [K] est redevable de la cotisation subsidiaire maladie au titre de l'année 2017 ;
VALIDE l'appel de cotisation subsidiaire maladie adressé à Mme [G] [K] par l'union pour le recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales du Centre Val-de-Loire le 26 novembre 2018 pour son entier montant de 14 222 euros ;
VALIDE la mise en demeure établie le 25 octobre 2019 par l'union pour le recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales Centre Val-de-Loire et adressée à Mme [G] [K] pour un montant de 14 222 euros au titre de la contribution subsidiaire maladie pour l'année 2017 ;
DÉBOUTE les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires ;
DÉBOUTE Mme [G] [K] de sa demande au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE [G] [K] aux dépens d'instance et d'appel.
PRONONCÉ par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
La greffière La présidente
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 13
ARRÊT DU 31 Mai 2024
(n° , 20 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 20/04810 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CCEXN
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 16 Juin 2020 par le Pole social du TJ de PARIS RG n° 19/10544
APPELANTE
URSSAF CENTRE VAL DE LOIRE
[Adresse 1]
[Localité 2]
représentée par Mme [B] [I] en vertu d'un pouvoir spécial
INTIMEE
Madame [G] [K]-[C]
[Adresse 3]
[Localité 4]
représentée par Me Lucien FLAMENT, avocat au barreau de PARIS
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 28 Mars 2024, en audience publique et double rapporteur, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Carine TASMADJIAN, présidente de chambre chargée du rapport et Monsieur Gilles REVELLES, conseiller.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de:
Mme Carine TASMADJIAN, présidente de chambre
M. Gilles REVELLES, Conseiller
M. Philippe BLONDEAU, conseiller
qui en ont délibéré
Greffier : Mme Fatma DEVECI, lors des débats
ARRÊT :
- CONTRADICTOIRE
- prononcé
par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Mme CarineTASMADJIAN, présidente de chambre et Mme Fatma DEVECI, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La cour statue sur l'appel interjeté par l'Urssaf Centre Val-de-Loire d'un jugement rendu le 16 juin 2020 par le pôle social du tribunal judiciaire de Paris dans un litige l'opposant à Mme [K]-[C].
FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :
Les circonstances de la cause ayant été rapportées par le tribunal dans son jugement au contenu duquel la cour entend se référer pour un plus ample exposé, il convient de préciser que par courrier du 26 novembre 2018, l'union pour le recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales du Centre (ci-après désignée 'l'Urssaf' ou 'l'organisme') a adressé à Mme [K]-[C] un appel de cotisation au titre de la cotisation subsidiaire maladie (CSM) de l'année 2017 d'un montant de 14 222 euros que celle-ci a contesté par courrier du 3 décembre 2018 puis du 29 mars 2019 devant la commission de recours amiable.
A défaut de décision explicite, Mme [K] a porté sa contestation devant le tribunal de grande instance de Paris.
Entre temps, l'Urssaf a, par courrier du 25 octobre 2019, adressé à Mme [K]-[C] une mise en demeure d'avoir à payer la somme de 14 222 euros.
Finalement, la CRA rendait sa décision le 26 septembre 2019, déboutant Mme [K] de son recours et confirmant la décision de l'Urssaf tant sur le principe de la créance que sur son montant.
Par jugement du 16 juin 2020, le tribunal judiciaire a :
- déclaré inopposable à Mme [G] [K] l'appel de cotisations du 26 novembre 2018,
- annulé la mise en demeure du 25 octobre 2019 ordonnant à Mme [K] de payer la somme de 14 222 euros,
- débouté l'Urssaf de l'intégralité de ses prétentions,
- dit n'y avoir lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- ordonné l'exécution provisoire de la décision,
- condamné l'Urssaf à supporter les éventuels dépens de l'instance.
Pour statuer ainsi le tribunal, après avoir rappelé les dispositions de l'article R.380-4 du code de la sécurité sociale, a retenu que le courrier du 26 novembre 2018 ordonnant à Mme [K]-[C] de payer la somme de 14 222 euros ne valait appel à cotisation que s'il avait été émis, daté puis régulièrement notifié avant la date fixée par l'article susvisé. Or, il relevait que si le courrier litigieux portait la date du 26 novembre 2018, l'Urssaf ne rapportait pas la preuve qu'elle l'avait rédigé à cette date, ni qu'elle l'avait expédié avant le 1er décembre 2018 de sorte que l'appel de cotisation devait être annulé.
L'Urssaf a le 10 juillet 2020 interjeté appel de ce jugement qui lui avait été notifié le 26 juin 2020.
Par ses conclusions écrites n° 2, soutenues oralement par son représentant, l'Urssaf demande à la cour de :
- infirmer le jugement déféré,
- à titre reconventionnel, condamner Mme [K]-[C] au paiement de la cotisation subsidiaire maladie pour un montant de 14 222 euros,
- valider la mise en demeure du 25 octobre 2019 d'un montant de 14 222 euros au titre de la CSM 2017,
- valider l'appel de cotisation subsidiaire maladie du 26 novembre 2018 pour son montant dû de 14 222 euros,
- confirmer la décision de la commission de recours amiable du 26 septembre 2019 notifiée le 4 octobre 2019,
- rejeter toutes les demandes de Mme [K]-[C].
Par ses conclusions écrites d'intimé soutenues oralement et déposées à l'audience par son conseil, Mme [K]-[C] demande à la cour, de :
- confirmer la décision déférée en toutes ses dispositions et notamment en ce qu'elle a annulé l'appel de cotisation du 26 novembre 2018 et la mise en demeure du 25 octobre 2019,
- rejeter l'intégralité des demandes adverses,
- condamner l'Urssaf au paiement de la somme de 3 300 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Pour un exposé complet des prétentions et moyens des parties, la cour renvoie à leurs conclusions écrites visées par le greffe à l'audience du 13 avril 2023 qu'elles ont respectivement soutenues oralement.
Par arrêt du 22 septembre 2023, la cour, autrement composée, a :
- ordonné la réouverture des débats aux fins d'inviter l'Urssaf à conclure sur le moyen tiré de la nullité de la mise en demeure, de communiquer et produire toute pièce utile au soutien de ses prétentions et de recueillir les explications des parties,
- réservé les demandes.
A l'audience du 28 mars 2024, l'Urssaf, au visa de ses conclusions n°3, demande à la cour, s'agissant de la mise en demeure de la valider pour son montant de 14 222 euros et de rejeter le moyen tiré de sa nullité. Le reste des conclusions demeurent inchangées.
Mme [K]-[C], reprenant le bénéfice de ses précédentes conclusions, demande à la cour de constater que l'Urssaf ne produit pas de justificatif d'envoi et de réception de la mise en demeure. Elle précise ne rien modifier à ses écritures précédentes.
Pour un exposé complet des prétentions et moyens des parties, et en application du deuxième alinéa de l'article 446-2 et de l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie à leurs conclusions écrites visées par le greffe à l'audience du 28 mars 2024 qu'elles ont respectivement soutenues oralement.
Après s'être assurée de l'effectivité d'un échange préalable des pièces et écritures, la cour a retenu l'affaire et mis son arrêt en délibéré au 31 mai 2024.
MOTIVATION DE LA COUR
Sur la portée de la réserve d'interprétation formulée par le Conseil constitutionnel dans sa décision du 27 septembre 2018
Moyen des parties
Mme [K] fait plaider le caractère inconstitutionnel de la CSM au motif que le Conseil Constitutionnel a émis une réserve de constitutionnalité invitant le pouvoir réglementaire à fixer le taux et les modalités de cette contribution de façon à éviter une rupture caractérisée de l'égalité devant les charges publiques. Or, le décret n°2016-976 instituant un taux de 8 % pour la cotisation maladie subsidiaire ne prévoit pas de plafond ce qui contrevient aux exigences du Conseil Constitutionnel. Elle entend préciser que la réserve s'incorpore à la loi et que les juridictions ont l'obligation de l'appliquer dès lors qu'il n'était pas prévu une application reportée dans le temps. Elle estime que cette réserve s'applique aux cotisations dues au titre des années 2016, 2017 et 2018 et que le décret est donc inconstitutionnel.
L'Urssaf conteste la pertinence de cette analyse et fait valoir que la réserve d'interprétation du Conseil constitutionnel ne peut pas conduire à écarter purement et simplement l'application des articles D. 380-1 et D. 380-2 code de la sécurité sociale qui régissent les modalités de calcul de la contribution au présent litige. Elle expose que la seule réserve posée par le Conseil constitutionnel est que le pouvoir réglementaire fixe les taux et modalités de détermination de l'assiette de la cotisation de façon à ce que celle-ci n'entraîne pas de rupture caractérisée de l'égalité devant les charges publiques. Il s'agit d'une réserve d'interprétation dite « directive » c'est-à-dire que le Conseil donne l'interprétation à retenir et s'adresse exclusivement au pouvoir réglementaire chargé de l'application de la loi et non aux justiciables qui ne peuvent l'invoquer à l'appui de leur contestation de la PUMa. En outre, la décision ayant été rendue le 27 septembre 2018, elle ne vaut que pour l'avenir, aucune disposition ne permettant de considérer que le Conseil a entendu déclarer rétroactivement non conformes à la Constitution les dispositions réglementaires portées dans le décret n°2016-979 du 19 juillet 2016.
A l'inverse, l'Urssaf relève que le Conseil constitutionnel a déclaré les dispositions relatives à la CSM conformes à la Constitution, en utilisant la technique de la réserve d'interprétation pour l'avenir afin de concourir à une meilleure sécurité juridique des situations passées. Celle-ci ne saurait donc être remise en cause par Mme [K] pour bénéficier d'une décharge de la cotisation.
L'Urssaf relève encore qu'il est inexact de considérer que les modifications de l'article L. 380-2 introduites par la loi de financement de la sécurité (dite 'LFSS') pour 2019 auraient été prises uniquement en application de la réserve d'interprétation du Conseil constitutionnel puisqu'elles avaient pour unique effet d'atténuer les effets de seuil et de mettre un terme aux difficultés ou incohérences relevées par ailleurs. D'ailleurs, l'article 12 de la loi n°2018-1203 du 22 décembre 2018 de financement de la sécurité sociale pour 2019 a modifié les dispositions de l'article L. 380-2 code de la sécurité sociale.
Réponse de la cour
Aux termes des dispositions de l'article L. 160-1 du code de la sécurité sociale dans sa version en vigueur du 01 janvier au 25 décembre 2016
Toute personne travaillant ou, lorsqu'elle n'exerce pas d'activité professionnelle, résidant en France de manière stable et régulière bénéficie, en cas de maladie ou de maternité, de la prise en charge de ses frais de santé dans les conditions fixées au présent livre.
L'exercice d'une activité professionnelle et les conditions de résidence en France sont appréciées selon les règles prévues, respectivement, aux articles L. 111-2-2 et L. 111-2-3.
l'article L. 380-2 du code de la sécurité sociale, précisant
Les personnes mentionnées à l'article L. 160-1 sont redevables d'une cotisation annuelle lorsqu'elles remplissent les conditions suivantes :
1° Leurs revenus tirés, au cours de l'année considérée, d'activités professionnelles exercées en France sont inférieurs à un seuil fixé par décret. En outre, lorsqu'elles sont mariées ou liées à un partenaire par un pacte civil de solidarité, les revenus tirés d'activités professionnelles exercées en France de l'autre membre du couple sont également inférieurs à ce seuil ;
2° Elles n'ont perçu ni pension de retraite, ni rente, ni aucun montant d'allocation de chômage au cours de l'année considérée. Il en est de même, lorsqu'elles sont mariées ou liées à un partenaire par un pacte civil de solidarité, pour l'autre membre du couple.
Cette cotisation est fixée en pourcentage du montant des revenus fonciers, de capitaux mobiliers, des plus-values de cession à titre onéreux de biens ou de droits de toute nature, des bénéfices industriels et commerciaux non professionnels et des bénéfices des professions non commerciales non professionnels, définis selon les modalités fixées au IV de l'article 1417 du code général des impôts, qui dépasse un plafond fixé par décret. Servent également au calcul de l'assiette de la cotisation , lorsqu'ils ne sont pas pris en compte en application du IV de l'article 1417 du code général des impôts, l'ensemble des moyens d'existence et des éléments de train de vie, notamment les avantages en nature et les revenus procurés par des biens mobiliers et immobiliers, dont le bénéficiaire de la couverture maladie universelle a disposé, en quelque lieu que ce soit, en France ou à l'étranger, et à quelque titre que ce soit. Ces éléments de train de vie font l'objet d'une évaluation dont les modalités sont fixées par décret en Conseil d'Etat. Un décret détermine le taux et les modalités de calcul de cette cotisation ainsi que les obligations déclaratives incombant aux assujettis.
Lorsque les revenus d'activité mentionnés au 1° sont inférieurs au seuil défini au même 1° mais supérieurs à la moitié de ce seuil, l'assiette de la cotisation fait l'objet d'un abattement dans des conditions fixées par décret. Cet abattement croît à proportion des revenus d'activité, pour atteindre 100 % à hauteur du seuil défini audit 1°.
La cotisation est recouvrée l'année qui suit l'année considérée, mentionnée aux 1° et 2° du présent article, selon les dispositions des sections 2 à 4 du chapitre III et du chapitre IV du titre IV du livre II du présent code, sous réserve des adaptations prévues par décret du Conseil d'Etat.
Les agents des administrations fiscales communiquent aux organismes mentionnés aux articles L. 213-1 et L. 752-2 les informations nominatives déclarées pour l'établissement de l'impôt sur le revenu par les personnes remplissant les conditions mentionnées au premier alinéa de l'article L. 380-2, conformément à l'article L. 152 du livre des procédures fiscales.
Le Conseil constitutionnel, dans sa décision QPC du 27 septembre 2018, a déclaré ce texte conforme à la Constitution, sous la réserve d' interprétation énoncée au paragraphe 19, aux termes duquel la seule absence de plafonnement d'une cotisation dont les modalités de détermination de l'assiette ainsi que le taux sont fixés par voie réglementaire n'est pas, en elle-même, constitutive d'une rupture caractérisée de l'égalité devant les charges publiques. Toutefois, il appartient au pouvoir réglementaire de fixer ce taux et ces modalités de façon à ce que la cotisation n'entraîne pas de rupture caractérisée de l'égalité devant les charges publiques.
Le Conseil constitutionnel a donc validé l'article L. 380-2 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable à l'espèce.
Les réserves d'interprétation dont une décision du Conseil constitutionnel assortit la déclaration de conformité à la Constitution d'une disposition législative sont revêtues de l'autorité absolue de la chose jugée et lient tant les autorités administratives que le juge pour l'application et l'interprétation de cette disposition.
Or, les articles D. 380-1 et D. 380-2 du code de la sécurité sociale, modifiés par le décret 2016 -979 du 19 juillet 2016, fixent bien le taux de la cotisation et ses modalités.
Ainsi, aux termes de l'article D. 380-1, dans sa rédaction issue du décret n°2016-979 du 19 juillet 2016 :
I.-Le montant de la cotisation mentionné à l'article L. 380-2 due par les assurés dont les revenus tirés d'activités professionnelles sont inférieurs à un seuil fixé à 10 % du plafond annuel de la sécurité sociale est déterminé selon les formules suivantes :
1° Si les revenus tirés d'activités professionnelles sont inférieurs à 5 % du plafond annuel de la sécurité sociale : Montant de la cotisation = 8 % × (A-D)
où :
A est l'assiette des revenus définie au quatrième alinéa de l'article L. 380-2 ;
D, qui correspond au plafond mentionné au quatrième alinéa du même article, est égal à 25 % du plafond annuel de la sécurité sociale ;
2° Si les revenus tirés d'activités professionnelles sont compris entre 5 % et 10 % du plafond annuel de la sécurité sociale :
Montant de la cotisation = 8 % × (A-D) × 2 × (1-R/ S)
où :
R est le montant des revenus tirés d'activités professionnelles ;
S, qui correspond au seuil des revenus tirés d'activités professionnelles mentionné au deuxième alinéa de l'article L. 380-2, est égal à 10 % du plafond annuel de la sécurité sociale.
II.-Lorsque le redevable de cette cotisation ne remplit les conditions mentionnées à l'article L. 160-1 que pour une partie de l'année civile, le montant de la cotisation due est calculé au prorata de cette partie de l'année.
III.-Si, au titre d'une période donnée, l'assuré est redevable de la cotisation prévue à l'article L. 380-3-1, il ne peut être redevable de la cotisation prévue à l'article L. 380-2 pour la même période. Le montant de celle-ci est alors calculé dans les conditions prévues au II.
l'article D. 380-2 poursuivant
I.-La cotisation due par les personnes mentionnées à l'article L. 380-3-1 au titre d'une année civile est calculée selon la formule définie au 1° du I de l'article D. 380-1, la valeur A correspondant alors à l'assiette des revenus définis au deuxième alinéa du IV de l'article L. 380-3-1 perçus au cours de la dernière année civile pour laquelle ces revenus sont connus.
II.-Cette cotisation est due à compter de la date à laquelle la personne remplit les conditions énoncées au premier alinéa de l'article L. 380-3-1 et cesse d'être due à compter du lendemain de la date à laquelle elles ne sont plus remplies. Lorsque la période entre ces deux dates est inférieure à une année, le montant de la cotisation est calculé au prorata de la durée de cette période.
III.-Les caisses primaires d'assurance maladie communiquent aux organismes chargés du recouvrement la liste des personnes redevables de la cotisation prévue à l'article L. 380-3-1.
C'est d'ailleurs ce qu'a rappelé le Conseil d'Etat, saisi d'un recours en excès de pouvoir concernant une circulaire du 15 novembre 2017, dans un arrêt du 10 juillet 2019, n°417919. Il a ainsi jugé « qu'en fixant, dans le cadre déterminé par les dispositions de l'article L. 380-2 précité, le seuil de revenus professionnels prévu au deuxième alinéa de cet article, en-deçà duquel la cotisation est due, à 10 % du plafond annuel de la sécurité sociale, soit 3 861,60 euros en 2016, le montant des revenus du patrimoine mentionné au quatrième alinéa du même article, au-delà duquel s'applique le prélèvement, à 25 % de ce même plafond, soit 9 654 euros en 2016, et le taux de la cotisation en cause à 8 %, le pouvoir réglementaire a défini les modalités de calcul de cette cotisation dans des conditions qui n'entraînent pas de rupture caractérisée de l'égalité devant les charges publiques ». Les requérants ne sont donc pas fondés à soutenir que l'article D. 380-1 du code de la sécurité sociale aurait méconnu le principe d'égalité devant les charges publiques garanti par l'article 13 de la Déclaration des droits de l'homme et des citoyens de 1789, non plus que les dispositions de l'article L. 380-2 du code de la sécurité sociale telles qu'interprétées par le Conseil Constitutionnel.
Par suite, l'article D. 380-1 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue du décret du 19 juillet 2016 précité, ne méconnaît pas le principe d'égalité devant les charges publiques ni celui d'égalité devant la loi garantis par les dispositions de l'article L. 380-2 du code de la sécurité sociale telles qu'interprétées par le Conseil constitutionnel dans sa décision QPC du 27 septembre 2018, qui, contrairement à ce qui est soutenu, n'impliquait pas l'adoption de mesures réglementaires pour le passé.
Mme [K]-[C] ne donne aucun élément pour remettre en cause cette appréciation ni ne justifie concrètement en quoi, au regard de sa situation personnelle, l'absence de plafond dans la fixation de la cotisation subsidiaire maladie pour l'année 2017 serait susceptible de porter atteinte au principe d'égalité devant les charges publiques.
Le moyen tiré de l'inconstitutionnalité du décret sera en conséquence rejeté.
Sur le calcul de la CSM
Moyens des parties
L'Urssaf rappelle qu'à la suite des éléments transmis par la Direction générale des finances publiques et au regard des conditions d'assujettissement à la CSM prévues par l'article D. 380-1 du code de la sécurité sociale, Mme [K] a été informée qu'elle était redevable de la somme de 14 222 euros au titre de la CSM 2017. Ainsi que le prévoit la circulaire interministérielle n°DSS/5B/2017/322 du 15 novembre 2017 relative à la CSM prévue à l'article L.380-2 du code de la sécurité sociale, les bases de calcul de la CSM 2017 pour Mme [K] sont composées de ses revenus du capital c'est-à-dire les revenus des valeurs et capitaux immobiliers. La cotisante ayant effectué une seule déclaration de revenus avec M. [C] pour l'année 2017 et ne démontrant pas que les revenus des époux étaient individualisés, la part de revenus de chacun est égale à la moitié des revenus du couple. Ainsi, pour l'année 2017, la base de calcul de la CSM pour Mme [K] s'élève à 187 580 euros après déduction de la CSG. Pour sa part, son époux a déclaré un revenu de 5 500 euros au titre des revenus d'activités professionnelles duquel un abattement de 34 % a été opéré conformément aux dispositions régissant le régime micro-BNC, ce qui donne la somme de 3 630 euros. Les revenus d'activités professionnelles de l'époux étant inférieurs à 10 % du PASS (3 923 euros) ils ne pouvaient pas être pris en compte pour le calcul de la CSM de Mme [K]. Cette dernière dispose donc de revenus d'activités inférieurs à 5 % du plafond annuel de la sécurité sociale et des revenus du capital supérieurs à 25 % du PASS. Pour la détermination de l'assiette, ces revenus sont abattus d'un montant égal à 25 % du PASS soit 9 807 euros au titre de 2017. Le montant de la cotisation de la cotisante est donc de 8 % x (187 580 - 9 807) = 14 222 euros.
Mme [K]-[C] estime qu'elle n'est pas redevable de la CSM puisque seules en sont redevables les personnes disposant de revenus tirés d'activités professionnelles supérieurs à 3 923 euros, soit 10 % du PASS en 2017. Or, en 2017, son époux a déclaré 5 500 euros de revenus d'activités professionnelles et l'intégralité de ce montant a été soumis à cotisations sociales sans aucun abattement. Elle soutient que l'Urssaf applique un abattement de 34 % à ces revenus uniquement pour réduire le montant des revenus d'activité à la somme de 3 630 euros et le soumettre indûment à la CSM. Elle estime que l'application par l'Urssaf de cet abattement de 34 % réservé au calcul de l'assiette imposable au barème progressif de l'impôt sur le revenu des travailleurs indépendants est contraire aux textes susvisés et que seul le montant de 5 500 euros ayant donné lieu à cotisations sociales doit être pris en compte, ce qui doit conduire à l'exclure du champ des personnes redevables de la CSM.
Réponse de la cour
Aux termes de l'article D. 380-1 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable au litige,
I- Le montant de la cotisation mentionné à l'article L. 380-2 due par les assurés dont les revenus tirés d'activités professionnelles sont inférieurs à un seuil fixé à 10 % du plafond annuel de la sécurité sociale est déterminé selon les formules suivantes :
1°) Si les revenus tirés d'activités professionnelles sont inférieurs à 5 % du plafond annuel de la sécurité sociale : Montant de la cotisation = 8 % x (A-D) où A est l'assiette des revenus définie au quatrième alinéa de l'article L. 380-2 ; D, qui correspond au plafond mentionné au quatrième alinéa du même article, est égal à 25 % du plafond annuel de la sécurité sociale ;
2°) Si les revenus tirés d'activités professionnelles sont compris entre 5 % et 10 % du plafond annuel de la sécurité sociale : Montant de la cotisation = 8 % x (A-D) x 2 x (1-R/S) où : R est le montant des revenus tirés d'activités professionnelles ; S, qui correspond au seuil des revenus tirés d'activités professionnelles mentionné au deuxième alinéa de l'article L. 380-2, est égal à 10 % du plafond annuel de la sécurité sociale.
II- Lorsque le redevable de cette cotisation ne remplit les conditions mentionnées à l'article L 160-1 que pour une partie de l'année civile, le montant de [a cotisation due est calculé au prorata de cette partie de l'année.
III. Si, au titre d'une période donnée, l'assuré est redevable de la cotisation prévue à l'article L 380-3-1, il ne peut être redevable de la cotisation prévue à l'article L 380-2 pour la même période. Le montant de celle-ci est alors calculé dans les conditions prévues au Il. "
Par ailleurs, la circulaire interministérielle n°DSS/5B/2017/322 du 15 novembre 2017 relative à la cotisation subsidiaire maladie prévue à l'article L.380-2 du code de la sécurité sociale indique
La cotisation subsidiaire maladie est notamment assise sur les revenus fonciers, de capitaux mobiliers, des plus-values de cession à titre onéreux de biens ou de droits de toute nature, les bénéfices industriels et commerciaux non professionnels et les bénéfices des professions non commerciales non professionnels, retenus pour le calcul du revenu fiscal de référence selon les modalités fixées au IV de l'article 1417 du code général des impôts. Le tableau annexé en précise les composantes (annexe 2).
En cas de décaration commune au sein d'un même foyer fiscal, l'assiette retenue est la part de revenus qui peut être attribuée à chaque membre du couple. Lorsque les revenus des époux ou partenaires de pacte civil de solidarité ne sont pas individualisés dans l'avis d'imposition, la part de revenus de chaque redevable est égale à la moitié des revenus. Toutefois, si le redevable est titulaire d'une part supérieure ou inférieure à 50 % des revenus, il peut fournir aux organismes de recouvrement tout élément probant permettant de déterminer la part exacte des revenus qui lui revient (cf. III. 2).
Pour la détermination de l'assiette, ces revenus sont abattus d'un montant égal à 25% du PASS, soit 9 654 € au titre de 2016, conformément à l'article D. 380-1 du code de la sécurité sociale. Dans le cas d'un foyer composé de deux redevables de la cotisation, cet abattement est appliqué à chacune des parts de revenu attribué à chacun des membres du couple.
Il résulte des pièces produites par l'Urssaf et qui ne sont pas contestées, que Mme [K] a perçu des revenus d'actions et parts pour 121 819 euros, du produit d'un contrats assurance-vie pour 11 99 euros, des intérêts et autres produits de placement à revenu fixe pour 4 euros soit, après un abattement sur les plus-value imposable pour 113 242 euros et un abattement net durée détention appliquée sur des plus-values pour 138 896 euros.
Mme [K]-[C] ne conteste pas davantage avoir effectué une déclaration de revenus commune avec son conjoint M. [C] pour l'année 2017.
Elle ne verse aux débats aucun élément permettant de considérer que les revenus du couple étaient individualisés.
Pour sa part, Mme [K]-[C] a des revenus d'activités inférieurs à 5 % du plafond annuel de la sécurité sociale et des revenus du capital supérieurs à 25 % du PASS, soit 187 580 euros.
M. [C] a déclaré un revenu de 5 500 euros de revenus d'activités professionnelles duquel s'applique un abattement de 34 % au titre du régime micro-BNC, soit 3 630 euros. Ces revenus étant inférieurs à 10 % du PASS, ils ne pouvaient être pris en compte pour le calcul de la CSM de son conjoint.
Au regard de la règle de calcul rappelé ci-avant, c'est à juste titre que le montant de la cotisation a été fixée par l'Urssaf à la somme de 14 222 euros.
Sur l'application rétroactive du décret
Moyen des parties
Mme [K] fait valoir le principe de non-rétroactivité des actes administratifs prévu à l'article L. 221-4 du code des relations entre le public et l'administration qui dispose que « sauf s'il en est disposé autrement par la loi, une nouvelle réglementation ne s'applique pas aux situations juridiques définitivement constituées avant son entrée en vigueur ou aux contrats formés avant cette date ». Dès lors, un décret n'est rétroactif que si la loi le prévoit. Au cas de la PUMa, elle fait valoir que tous les textes qui la régissent sont parus postérieurement au début de l'année 2017 puisque :
- la possibilité pour la caisse de procéder à une affiliation d'office n'a été prévue que par l'article 6, 1° du décret no 2017-736 du 3 mai 2017 relatif aux règles d'identification, d'affiliation et de rattachement des bénéficiaires des prestations de sécurité sociale portant modifications de diverses dispositions relatives à l'assurance maladie,
- la définition de la condition de résidence en France n'a été formulée que par le décret n°2017-240 du 24 février 2017 relatif au contrôle des conditions permettant de bénéficier de la protection universelle maladie,
- la liste des titres de séjour ouvrant droit à la PUMa n'a été précisée que par un arrêté du 10 mai 2017,
- le formulaire de demande de PUMa a été publié le 1er novembre 2017.
Aucun de ces textes ne prévoyant une quelconque rétroactivité quant à leur application, Mme [K] indique qu'elle ne pouvait avoir connaissance de l'exigibilité de la cotisation et en déduit que l'appel de cotisation afférent à l'année 2017 doit être annulée.
L'Urssaf fait valoir que le décret n°2016-979 du 19 juillet 2016 relatif aux modalités de calcul de la CSM est entré en vigueur le 22 juillet 2016, soit bien avant le premier appel de cotisation et la première exigibilité. Dès cette date, Mme [K]-[C] connaissait les conditions d'assujettissement ou non à la cotisation subsidiaire maladie par article L. 380-2 alinéas 2 et 3, les revenus constitutifs de l'assiette de la cotisation et les modalités de prise en compte de ces revenus par son alinéa 2, les formules de calcul retenues, l'abattement d'assiette appliqué et le taux de la cotisation grâce au décret du 19 juillet 2016, les principales modalités de recouvrement par l'article L. 380-2 alinéa 6 et les modalités retenues pour la déclaration des éléments d'assiette par son derniers alinéa.
De même, les articles 7 et 8 du décret n°2017-736 du 3 mai 2017 qui, au demeurant, ont uniquement précisé les modalités d'appel de paiement, de recouvrement et de contrôle de la cotisation, sont entrés en vigueur le 6 mai 2017, là encore avant le premier appel de la cotisation subsidiaire maladie et la première exigibilité de la cotisation. Mme [K]-[C] est mal fondée à invoquer une prétendue rétroactivité des dispositions réglementaires susvisées pour solliciter l'annulation de l'appel de cotisation.
Réponse de la cour
Il n'est pas contestable, comme le plaide Mme [K]-[C], que les lois entrent en vigueur à compter de leur publication au Journal Officiel ou de la date qu'elles fixent et que seule l'entrée en vigueur du décret d'application d'une loi est susceptible de différer l'entrée en vigueur de celle-ci.
Mais il est tout aussi constant, comme le rappelle la Cour de cassation, qu'une disposition légale se suffisant à elle-même est applicable sans attendre la publication d'un décret, à la date d'entrée en vigueur de cette loi.
Au cas présent, le sixième alinéa de l'article L. 380-2 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue de la loi du 21 décembre 2015, dispose que : « La cotisation est recouvrée l'année qui suit l'année considérée, mentionnée aux 1 et 2 du présent article, selon les dispositions des sections 2 à 4 du chapitre III et du chapitre IV du titre IV du livre II du présent code, sous réserve des adaptations prévues par décret du Conseil d'Etat ».
Il sera relevé que cette disposition ne dépendait pas, pour la mise en oeuvre immédiate de ses principes, de son décret d'application du 19 juillet 2016 .
Ensuite, il est constant que le décret n°2016-979 du 19 juillet 2016 relatif aux modalités de calcul de la CSM est entré en vigueur le 22 juillet 2016, soit bien avant l'appel de cotisation de l'Urssaf et son exigibilité. Ses dispositions, qui au demeurant prévoient simplement les deux formules de calcul applicables pour les assurés redevables de la cotisation en fonction du montant des revenus d'activités professionnelles perçus, s'appliquent donc à des situations juridiques non définitivement constituées avant leur entrée en vigueur.
Enfin, le décret du 3 mai 2017 relatif aux règles d'identification, d'affiliation et de rattachement des bénéficiaires des prestations de sécurité sociale et portant modification de diverses dispositions relatives à l'assurance maladie, publié au Journal Officiel de la République française du 5 mai 2017, a modifié les articles R. 380-3 à R. 380-7 du code de la sécurité sociale, en prévoyant, notamment, que la cotisation mentionnée à l'article L. 380-2 est appelée au plus tard le dernier jour ouvré du mois de novembre de l'année suivant celle au titre de laquelle elle est due et qu'elle est exigible dans les trente jours suivant la date à laquelle elle est appelée.
Ces dispositions réglementaires se limitent à préciser les modalités de recouvrement intervenant, pour l'année 2016, première année d'assujettissement à cette cotisation, à la fin de l'année 2017, et force est de constater qu'elles ne modifient pas le principe, les conditions d'assujettissement, ni l'assiette dans son étendue de la cotisation subsidiaire maladie, qui sont exclusivement prévues par les dispositions issues de la loi du 21 décembre 2015 et du décret n° 2016 -976 du 19 juillet 2016.
Ainsi, dès 2016, l'article L. 380-2 du code de la sécurité sociale, complété par l'article D. 380-1, comportait les précisions nécessaires à la détermination de l'assiette, du taux et du mode de calcul de la cotisation subsidiaire maladie dont il était indiqué, dès le 1er janvier 2016, qu'elle serait recouvrée l'année suivante, soit courant 2017, de sorte que les dispositions du décret 2017-736 du 3 mai 2017, qui ne portent que sur les modalités de recouvrement de la cotisation, n'étaient pas nécessaires à l'entrée en vigueur de la cotisation.
En conséquence, le moyen tiré de ce que les dispositions de la circulaire prescrivant l'application des dispositions de l'article L. 380-2 et des articles R. 380-3 à R. 380-7 du code de la sécurité sociale pour le recouvrement de la cotisation due au titre de l'année 2017 méconnaîtraient le principe de non-rétroactivité des actes réglementaires doit être écarté.
Sur l'information concernant le transfert de données et leur traitement par l'Urssaf
Mme [K]-[C] fait valoir que la loi informatique et liberté pose le principe de l'information de la personne soumise à un recueil de données à caractère personnel et que la CNIL, dans son avis n°2017-279 du 26 octobre 2017, a spécifiquement insisté sur l'obligation d'information de la DGFIP et de l'Acoss s'agissant de la PUMa. L'Acoss comme la DGFIP, en application de la loi informatique et liberté, issue de la directive européenne 95/46/CE, avaient l'obligation d'informer les personnes concernées par le traitement de données ainsi que l'a rappelé la CJUE dans sa décision du 1er octobre 2015. Or, la concernant, ni les lettres circulaires adressées en 2017 par les Urssaf, ni les appels de cotisations ne mentionnaient d'information concernant ce traitement pas plus qu'ils ne faisaient mention du droit à la modification et à la consultation de ces données.L'obligation d'information des personnes concernées n'a donc été respectée ni par l'Acoss ni par la DGFIP. Elle conclut qu'une violation de la loi informatique et liberté a été commise par l'Urssaf et par la DGFIP ce qui rend le traitement des données illégal et l'appel de cotisation contraire aux exigences de la CNIL.
L'Urssaf soutient que contrairement à l'argumentation de Mme [K]-[C], les dispositions de l'article 27 de la loi Informatique et Libertés ont bien été respectées. Ainsi, le traitement de données à caractère personnel destiné au calcul de la CSM a été autorisé par décret n°2017-1530 du 3 novembre 2017 pris après avis motivé et publié de la CNIL du 26 octobre 2017. Il ressort de cet avis et des décrets du 3 novembre 2017 et du 24 mai 2018 que pour la cotisation 2016 appelée en 2017, sont autorisés un traitement de données entre la DGFIP et l'Acoss et un traitement de ces données par l'Acoss et les Urssaf pour le calcul de la CSM. L'Urssaf a respecté son obligation d'information générale des assurés sociaux concernant la CSM, conformément à l'article R. 112-2 du code de la sécurité sociale, une campagne d'information ayant été menée auprès des personnes concernées au mois de novembre 2018. Elle indique que Mme [K]-[C] ne peut soutenir ne pas avoir été informée des transferts de données entre l'administration fiscale et l'Urssaf pour solliciter l'annulation de l'appel de cotisation. En tout état de cause, si une atteinte à la loi Informatique et Libertés était avérée, seule la CNIL pourrait en faire le constat et prononcer une éventuelle sanction, qui ne saurait consister en une annulation de l'appel de cotisation litigieux.
Réponse de la cour
L'article 11 de la directive 95/46CE du Parlement européen et du Conseil, du 24 octobre 1995, relative à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données, intitulé « Informations lorsque les données n'ont pas été collectées auprès de la personne concernée », est ainsi libellé :
1. Lorsque les données n'ont pas été collectées auprès de la personne concernée, les États membres prévoient que le responsable du traitement ou son représentant doit, dès l'enregistrement des données ou, si une communication de données à un tiers est envisagée, au plus tard lors de la première communication de données, fournir à la personne concernée au moins les informations énumérées ci-dessous, sauf si la personne en est déjà informée:
a) l'identité du responsable du traitement et, le cas échéant, de son représentant;
b) les finalités du traitement;
c) toute information supplémentaire telle que:
- les catégories de données concernées,
- les destinataires ou les catégories de destinataires des données,
- l'existence d'un droit d'accès aux données la concernant et de rectification de ces données,
dans la mesure où, compte tenu des circonstances particulières dans lesquelles les données sont collectées, ces informations supplémentaires sont nécessaires pour assurer à l'égard de la personne concernée un traitement loyal des données.
De même, l'article 32 III de la loi informatique et libertés, dans sa version en vigueur avant le 1er juin 2019, prévoit que « lorsque les données à caractère personnel n'ont pas été recueillies auprès de la personne concernée, le responsable du traitement ou son représentant doit fournir à cette dernière les informations énumérées au I dès l'enregistrement des données ou, si une communication des données à des tiers est envisagée, au plus tard lors de la première communication des données ».
Dans l'arrêt C-201/14 du 1er octobre 2015, qu'invoque Ainsi, le transfert des données entre la DGFIP et l'Acoss puis entre l'Acoss et les Urssaf a bien été autorisé pour le recouvrement des cotisations subsidiaires maladie., la Cour de justice de l'Union européenne a jugé « que les articles 10, 11 et 13 de la directive 95/46 doivent être interprétés en ce sens qu'ils s'opposent à des mesures nationales, telles que celles en cause au principal, qui permettent à une administration publique d'un État membre de transmettre des données personnelles à une autre administration publique et leur traitement subséquent, sans que les personnes concernées n'aient été informées de cette transmission ou de ce traitement ».
Au cas de la présente cotisation, la Commission nationale informatique et liberté a été saisie pour avis sur un projet de décret autorisant la mise en oeuvre d'un traitement de données à caractère personnel destiné au calcul de la cotisation prévue par l'article L. 380-2 du code de la sécurité sociale (demande d'avis n°17012620).
Dans sa délibération 2017-279 du 26 octobre 2017, la CNIL a, notamment, autorisé cette mise en 'uvre. Elle constatait que « Les catégories de données à caractère personnel qui seront traitées sont listées à l'article 1er Il du projet qui distingue les données relatives à l'état civil, l'identité ou l'identification des personnes, des données d'ordre économique et financier. En pratique, l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS) recevra les données en provenance de la direction générale des finances publiques (DGFIP). En effet, les personnes étant assujetties à la cotisation subsidiaire maladie sous conditions de ressources spécifiques, seule l'ACOSS est en mesure de connaître la population des résidents fiscaux et peut vérifier les conditions d'assujettissement afin d'en soustraire la population assujettie. La commission prend acte que seules les données à caractère personnel relatives à des personnes identifiées, par la DGFIP, comme redevables de cette cotisation seront transmises à l'ACOSS ».
Elle a observé que l'article 1er-IV du projet de décret prévoyait que seront destinataires des données à caractère personnel, à raison de leurs attributions et du besoin d'en connaître :
« - les agents habilités de l'ACOSS ;
- les agents habilités des organismes mentionnés aux articles L. 213-1 et L. 752-2 du code de la sécurité sociale en charge du calcul, du recouvrement et du contrôle de la cotisation. S'agissant de ces organismes, la commission prend acte de ce qu'ils ne seront destinataires que des données concernant les cotisants pour lesquels ils sont territorialement compétents » et en conclut que « Un tel accès aux données apparaît justifié au regard des finalités du traitement ».
La CNIL a enfin observé, sur « l'information et les droits des personnes », que « le projet demeure silencieux sur les modalités d'information des personnes concernées. La commission observe dans le dossier joint à la saisine que le ministère renvoie au décret visant à autoriser le traitement mis en oeuvre par la DGFIP relatif au transfert de données fiscales concernant les redevables de la cotisation annuelle subsidiaire. Elle rappelle toutefois que, si la DGFIP a pour obligation d'informer les personnes en ce qui concerne le traitement automatisé de transfert de données fiscales dont elle est responsable de traitement, l'ACOSS devra également assurer l'information des personnes concernées pour le traitement qu'elle met en oeuvre ».
Aussi, le décret n°2017-1530 du 3 novembre 2017 est venu autoriser le traitement par l'Acoss et les Urssaf des informations nominatives déclarées pour l'établissement de l'impôt sur le revenu par les personnes remplissant les conditions pour verser la CSM et a mis à la charge de l'Acoss l'obligation d'informer les personnes concernées du traitement mis en oeuvre.
Ensuite, suivant l'article L. 380-2 du code de la sécurité sociale, « les agents des administrations fiscales communiquent aux organismes mentionnés aux articles L. 213-1 et L. 752-2 les informations nominatives déclarées pour l'établissement de l'impôt sur le revenu par les personnes remplissant les conditions mentionnées au premier alinéa de l'article L. 380-2, conformément à l'article L. 152 du livre des procédures fiscales ».
L'article R. 380-3 du code de la sécurité sociale dispose, notamment, que la CSM est « calculée, appelée et recouvrée par les organismes chargés du recouvrement des cotisations du régime général au vu des éléments transmis par l'administration fiscale ou par les personnes redevables de ces cotisations ».
L'article D. 380-5 I du code de la sécurité sociale prévoit que « les éléments nécessaires à la détermination des revenus mentionnés aux articles D. 380-1 et D. 380-2 sont communiqués par l'administration fiscale aux organismes chargés du calcul et du recouvrement des cotisations mentionnées à l'article L. 380-2 et au deuxième alinéa du IV de l'article L. 380-3-1 ».
Ainsi, le transfert des données entre la DGFIP et l'Acoss puis entre l'Acoss et les Urssaf a bien été autorisé pour le recouvrement des cotisations subsidiaires maladie.
Dès lors, Mme [K] ne peut se prévaloir de l'arrêt du 1er octobre 2015 de la CJUE puisqu'à la différence de la situation ayant donné lieu à cet arrêt, le principe et les modalités de transmission des données de revenus par l'administration fiscale vers les organismes de sécurité sociale concernés procèdent de la loi et de textes réglementaires, régulièrement publiés au journal officiel qui, par les indications portées notamment par le décret du 4 novembre 2017, prévoient des mesures appropriées visant à protéger les intérêts légitimes de la personne concernée. En effet au regard de la règle d'assiette de cette contribution, la transmission des informations en cause apparaît nécessaire, limitée dans le temps et circonscrite aux données strictement nécessaires pour ce faire.
En tout état de cause, et à supposer même l'existence d'un manquement de l'Urssaf, Mme [K]-[C], qui se borne à invoquer un traitement illégal, n'explique pas en quoi il aurait pu, au regard de la question en litige portant sur l'obligation à la dette de cotisation, influer sur le sens de la décision prise ou l'aurait privée d'une garantie particulière d'autant qu'il résulte des pièces produites que Mme [K] a eu la possibilité d'obtenir les informations fiscales afin d'obtenir la réduction des sommes en cause.
S'agissant de l'obligation d'informer les personnes concernées par le traitement automatisé de transfert de leurs données fiscales résultant de l'article 32 de la loi du 6 janvier 1978 et de l'avis de la CNIL du 26 octobre 2017, il y a lieu de relever, qu'outre le fait que la transmission des données a été portée à la connaissance de l'intéressée par la publication de la loi ayant institué la cotisation subsidiaire maladie au Journal officiel, que nul n'est censé ignorer, elle a fait l'objet d'une communication sur le site internet Urssaf.fr qui indiquait que les redevables de la contribution étaient identifiés à partir des données transmises par l'administration fiscale sur la base des éléments de revenus pris en compte pour l'impôt sur le revenu.
Au demeurant, l'obligation d'information a été mise à la charge de l'Acoss, qui n'est pas partie à la présente instance, par la CNIL.
Néanmoins, l'appel à cotisation du 26 novembre 2018 reçu par Mme [K] l'informe que les revenus financiers ayant servis de base au calcul de la CSM ont été transmis par la direction générale des finances publiques et prévoit une procédure contradictoire en cas de contestation de la prise en compte des revenus par le cotisant.
Il ressort ainsi des termes du courrier que l'intéressée a été informée préalablement à l'appel de cotisation de l'utilisation et du transfert de ses données fiscales personnelles auprès de l'Urssaf, de sorte que la violation de la loi Informatique et Libertés n'est pas établie.
En tout état de cause, en application des dispositions de l'article R.112-2 du code de la sécurité sociale, à défaut de toute demande de Mme [K] sur ses droits et ses obligations, l'Urssaf n'était tenue à aucune obligation d'information individuelle à son égard dès lors que l'obligation générale d'information pesant sur elle à l'égard des assurés ne lui impose, en l'absence de demandes précises de ces derniers, ni de prendre l'initiative de les renseigner sur leurs droits éventuels, ni de porter à leur connaissance les textes publiés au Journal Officiel. C'est ce que juge de manière constante la Cour de cassation qui rappelle que « l'obligation générale d'information dont les organismes de sécurité sociale sont débiteurs envers leurs assurés ne leur impose, en l'absence de demande de ceux-ci, ni de prendre l'initiative de les renseigner sur leurs droits éventuels, ni de porter à leur connaissance des textes officiels publiés au Journal Officiel ».
Enfin, l'éventuelle absence d'information ne saurait être sanctionnée par la nullité de l'appel à cotisation régulièrement notifié, Mme [K]-[C] ayant eu la possibilité de le contester et de se voir communiquer l'ensemble des pièces.
Le moyen titré d'une violation des dispositions de la loi informatique et liberté sera en conséquence rejeté.
Sur la compétence de l'union pour le recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales Centre Val de Loire
Moyens des parties
Mme [K]-[C] fait valoir que les Urssaf ont pour ressort territorial la région administrative dont elles portent le nom de sorte qu'elles ne peuvent recouvrer les cotisations que des redevables résidant dans leurs ressorts territoriaux respectifs. L'Urssaf du Centre n'avait donc aucune compétence pour émettre un appel à cotisation pour une cotisante demeurant à [Localité 5]. Si une délégation de compétence entre unions est autorisée, elle doit prendre la forme d'une convention qui prend effet après approbation par le directeur de l'organisme national de chaque branche concernée, cette convention devant être antérieure au contrôle effectué ou au recouvrement diligenté par la délégataire, sous peine de nullité.
Mme [K]-[C] rappelle que par une délibération publique n°2017-279, la CNIL n'a autorisé le transfert de données et leurs exploitations qu'aux Urssaf territorialement compétentes. La concernant, dépendant de l'Urssaf Île-de-France, l'Urssaf Centre ne pouvait valablement traiter un fichier contenant des données personnelles sans en avoir eu l'autorisation, celle-ci ne pouvant être donnée que par décret pris en Conseil d'Etat après avis de la CNIL.
Mme [K] excipe d'une décision de la chambre criminelle de la Cour de cassation qui a jugé, le 27 novembre 2013, qu'un organisme chargé de la gestion d'un service public ne peut pas participer directement ou indirectement à l'appréhension illicite de données informatique. Il ne peut donc a fortiori être l'auteur lui-même d'une telle infraction. Dès lors, n'étant compétente ni pour traiter des données informatiques ni pour émettre un appel à cotisation à destination de cotisant ne résidant pas dans son ressort, celui-ci doit être annulé.
L'Urssaf fait valoir qu'elle était compétente territorialement pour adresser l'appel de cotisation litigieux puisqu'une convention relative à la centralisation du recouvrement de la cotisation d'assurance maladie visée à l'article L. 380-2 du code de la sécurité sociale avait été conclue le 1er décembre 2017 entre l'Urssaf d'Ile de France et l'Urssaf du Centre qui autorisait cette dernière, par délégation, à appeler la cotisation litigieuse auprès d'une personne résidant en Île-de-France. Elle précise que la convention de mutualisation du 1er décembre 2017, approuvée par décision du directeur de l'Acoss du 11 décembre 2017, qui confie à l'Urssaf Centre Val de Loire 'l'ensemble des droits et obligations afférents à l'exercice des missions de recouvrement résultant des articles R.380-3 et suivants du code de la sécurité sociale sur le champ de la cotisation d'assurance maladie visée à l'article L.380-2 du code de la sécurité sociale' est régulière et applicable à l'appel de cotisation daté du 26 novembre 2018. Si l''avis de la CNIL du 26 octobre 2017 a pour vocation de protéger les redevables de la CSM d'une utilisation abusive de leurs données à caractère personnel elle n'a en revanche pas vocation à décider des règles de compétence territoriale des Urssaf.
Réponse de la cour
Aux termes de l'alinéa 1 de l'article L. 122-7 du code de la sécurité sociale, dans sa version modifiée par la loi n° 2016 -1827 du 23 décembre 2016 prévoit
Le directeur d'un organisme local ou régional peut déléguer à un organisme local ou régional la réalisation des missions ou activités liées à la gestion des organismes, au service des prestations, au recouvrement et à la gestion des activités de trésorerie, par une convention qui prend effet après approbation par le directeur de l'organisme national de chaque branche concernée.
Lorsque la mutualisation inclut des activités comptables, financières ou de contrôle relevant de l'agent comptable, la convention est également signée par les agents comptables des organismes concernés.'
En l'espèce, la convention relative à la centralisation du recouvrement de la cotisation d'assurance maladie visée à l'article L. 380-2 du code de la sécurité sociale, communiquée par l'Urssaf , a été signée le 1er décembre 2017 entre, notamment, les directeurs de l'Urssaf d'Ile-de-France et celle du Centre Val-de-Loire ainsi que par les agents comptables de ces Urssaf.
Elle stipule que « la présente convention est applicable à compter de la décision d'approbation du Directeur de l'Acoss et conclue pour une durée indéterminée », que « les URSSAF délégantes transfèrent à l'URSSAF délégataire l'ensemble des droits et obligations afférents à l'exercice des missions de recouvrement résultant des articles R. 380-3 et suivants du code de la sécurité sociale sur le champ de la cotisation d'assurance maladie visée à l'article L. 380-2 du code de la sécurité sociale » et enfin que « l'Urssaf délégataire assure l'encaissement centralisé et la gestion du recouvrement de la cotisation visée à l'article L. 380-2 du code de la sécurité sociale, dont le contrôle et les suites amiables et judiciaires des contestations soulevées par les cotisants ».
En outre, par décision du 11 décembre 2017 prise par le directeur de l'Acoss en application de l'article L. 122-7 du code de la sécurité sociale et relative au recouvrement des cotisations dues en application de l'article L. 380-2 du code de la sécurité sociale, « sont approuvées les conventions de mutualisation interrégionales, prises en application de l'article L. 122-7 du code de la sécurité sociale et conclues entre les unions pour le recouvrement des cotisations de sécurité sociale aux fins de délégation de calcul, de l'appel et du recouvrement des cotisations dues en application de l'article L. 380-2 du code de la sécurité sociale, à des Urssaf délégataires conformément à la répartition figurant sur le tableau annexé à la présente décision ».
Figure parmi ces conventions une convention relative à la centralisation du recouvrement de la cotisation d'assurance maladie visée à l'article L. 380-2 du code de la sécurité sociale datée du 1er décembre 2017 entre l'Urssaf Ile Île-de-France et l'Urssaf Centre Val-de-Loire.
La cour constate en effet que le tableau annexé aux pièces de l'Urssaf précise que l'Urssaf Ile-de-France est « l'Urssaf délégante » et que l'Urssaf Centre, devenue en cours de procédure l'Urssaf Centre Val-de-Loire, est « l'Urssaf délégataire » de la première.
Par ailleurs, aux termes de l'article 1 du code civil,
Les lois et, lorsqu'ils sont publiés au Journal officiel de la République française, les actes administratifs entrent en vigueur à la date qu'ils fixent ou, à défaut, le lendemain de leur publication. Toutefois, l'entrée en vigueur de celles de leurs dispositions dont l'exécution nécessite des mesures d'application est reportée à la date d'entrée en vigueur de ces mesures.
En cas d'urgence, entrent en vigueur dès leur publication les lois dont le décret de promulgation le prescrit et les actes administratifs pour lesquels le Gouvernement l'ordonne par une disposition spéciale.
Les dispositions du présent article ne sont pas applicables aux actes individuels.
La décision du 11 décembre 20217, qui n'est ni une loi ni un acte administratif publié au Journal officiel, a été publiée au bulletin officiel santé, protection sociale, solidarité le 15 janvier 2018.
Elle concerne les relations entre deux organismes publics, est destinée à la mise en oeuvre de leurs prérogatives de puissance publique et est donc d'application immédiate.
L'Urssaf du Centre Val-de-Loire était donc territorialement compétente et a été régulièrement désignée pour le recouvrement de la cotisation subsidiaire maladie .
L'appel de cotisation reçu par Mme [K] étant daté du 26 novembre 2018, c'est-à-dire postérieurement à la décision du 11 décembre 2017, l'Urssaf Centre Val-de-Loire avait bien reçue délégation pour calculer, appeler et recouvrer les cotisations subsidiaires maladie au jour de l'appel de cotisation.
Le fait que la décision du 11 décembre 2017 du directeur de l'Acoss ait été publiée au BO Santé - Protection sociale - Solidarité le 15 janvier 2018 n'a pas d'incidence sur la validité de l'appel de cotisations de Mme [K] puisque la convention précitée a, conformément aux dispositions de l'article L. 122-7 du code de la sécurité sociale, pris effet le 12 décembre 2017 après approbation par le directeur de l'Acoss, soit antérieurement à l'appel de cotisation litigieux
Dès lors, le moyen tiré de la violation des dispositions de l'article 27 de la loi Informatique et Liberté invoquée par Mme [K]-[C], ne saurait être retenu puisque, contrairement à l'interprétation qu'elle en fait, les organismes territorialement compétents évoqués dans l'avis de la CNIL du 26 octobre 2017 ne désignent pas uniquement l'Urssaf du lieu de résidence du cotisant, mais également les organismes territorialement compétents par voie de délégation, conformément à l'article L. 122-7 précité, soit en l'espèce l'Urssaf Centre Val-de-Loire s'agissant des cotisants résidents en Île-de-France.
Il convient en conséquence de rejeter la demande de Mme [K]-[C] tendant à l'annulation de l'appel à cotisation fondée de ces chefs, l'Urssaf du Centre Val-de-Loire étant bien compétente pour calculer, appeler et recouvrer les cotisations subsidiaires maladies dont elle était redevable au jour de l'appel de cotisation et, par voie de conséquence, de traiter les données informatiques légalement collectées.
Sur la tardiveté de l'appel de cotisations
Mme [K]-[C] fait valoir qu'en application de l'article L. 380-2 du code de la sécurité sociale, la cotisation PUMa a vocation à être recouvrée l'année qui suit l'année considérée à savoir, pour les personnes ne percevant pas de revenus salariés, l'année qui suit l'encaissement des revenus non professionnels. Le délai imparti à l'organisme de sécurité sociale pour exercer son action en recouvrement prévu à l'article R. 380-4 du code de la sécurité sociale est au plus tard le dernier jour ouvré du mois de novembre de l'année suivant celle au titre de laquelle elle est due. Elle en conclut que les cotisations dues au titre d'une année civile ne peuvent être réclamées que si l'Urssaf se manifeste avant le mois de décembre de l'année suivante. Dans le cas contraire, l'organisme est déchu de son droit à agir en recouvrement. L'Urssaf l avait donc jusqu'au 30 novembre 2018 pour lui adresser un appel de cotisation au titre de l'année 2017. Celui qu'elle a reçu étant daté du 26 novembre 2018, elle n'a pu le recevoir que courant du mois de décembre et l'Urssaf, qui doit apporter la preuve d'une réception du courrier au mois de novembre 2018, échoue à le faire.
L'Urssaf rétorque que, contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges, la Cour de cassation a eu à juger que le non-respect par l'organisme de recouvrement de la date limite mentionnée par ce texte a pour seul effet de reporter le délai au terme duquel la cotisation devient exigible. Elle relève que l'article R. 380-4 envisage un appel de la cotisation « au plus tard le dernier jour ouvré du mois de novembre de l'année suivant celle au titre de laquelle elle est due » mais que nulle sanction n'est prévue à cet égard. L'appel de cotisation ne constitue pas un acte administratif faisant grief à Mme [K] et ne peut donc être annulé. Le non-respect de la date d'appel de cotisation prévue par l'article R. 380-4 n'est sanctionné par aucune nullité, n'entraîne aucun préjudice pour Mme [K] tandis que l'Urssaf dispose d'un délai de trois ans pour recouvrer les cotisations à compter de la fin de l'année civile au titre de laquelle elles sont dues.
Elle considère que l'appel de cotisation n'encoure ni forclusion ni péremption de sorte qu'elle demeure en droit d'appeler et de recouvrer la cotisation solidaire maladie y compris lorsqu'elle procède à cet appel au-delà de la date ainsi mentionnée.
Réponse de la cour
L'alinéa 1er de l'article R.380-4 du code de la sécurité sociale dispose :
La cotisation mentionnée à l'article L. 380-2 est appelée au plus tard le dernier jour ouvré du mois de novembre de l'année suivant celle au titre de laquelle elle est due. Elle est exigible dans les trente jours suivant la date à laquelle elle est appelée.
Ce faisant, la Cour de cassation a eu l'occasion de rappeler que le non-respect par l'organisme de recouvrement de la date limite mentionnée par l'article R. 380-4 a pour seul effet de reporter le délai au terme duquel la cotisation devient exigible (Civ. 2 - 6 janvier 2022 n° 20-16.379) et il n'y a pas lieu, comme le demande Mme [K], de ne pas reprendre cette position : le texte cité ne prévoit aucune sanction au non-respect du délai en termes de nullité de l'appel à cotisation.
Par ailleurs, la prévision du délai de l'appel à cotisation est immédiatement suivie d'une disposition visant le caractère exigible de la cotisation dans les trente jours de l'appel, le dépassement du délai prévu entraînant donc le report de l'exigibilité et du point de départ de calcul des majorations de retard. Et, comme le relève l'Urssaf, aucun préjudice n'est démontré par Mme [K] du seul fait de l'appel tardif de cotisations auxquelles elle était tenue par la loi.
Il s'ensuit que la circonstance selon laquelle l'appel de la cotisation en cause soit intervenu le 26 noc 2018 ne saurait faire obstacle à son recouvrement selon les modalités prévues à l'article R. 380-4, y compris si l'Urssaf n'est pas en mesure de justifier de son envoi à cette date.
Cette solution porte nullement atteinte au principe d'effectivité ni aux principes constitutionnels de sécurité juridique et d'égalité dans l'application de la loi puisqu'aucune sanction de nullité n'est prévue au délai indicatif prévu par les textes qui, en outre, ne constitue pas une garantie des droits de l'assuré mais une simple indication pour l'organisme de recouvrement.
Par contre, les délais de prescription du recouvrement des cotisations à compter de la fin de l'année civile au titre de laquelle elles sont dues constituent cette garantie de sécurité juridique et d'égalité dans l'application de la loi. Au cas présent, ils ont bien été respectés.
Ce moyen sera en conséquence rejeté et le jugement réformé de ce chef.
Sur la mise en demeure
Mme [K] soulève tout d'abord la nullité de la mise en demeure en l'absence de justificatif de sa réception, étant rappelé que ce document doit être adressé par lettre recommandée ou par tout moyen donnant date certaine à sa réception. Elle soutient qu'elle n'a jamais été destinataire de la mise en demeure évoquée par l'Urssaf et que celle-ci n'est pas en mesure de démontrer le contraire. Elle n'est donc plus en mesure de demander le paiement de la cotisation.
Subsidiairement, Mme [K] fait valoir l'inexactitude de la période à laquelle se rapporte la cotisation dont il est demandé le paiement. Ainsi, la mise en demeure vise le 4ème trimestre de l'année 2017 alors que la cotisation subsidiaire maladie porte sur l'année entière. Cette indication de période erronée induit en erreur l'assujetti qui pense être alors redevable de la somme multipliée par 4 pour l'année entière.
Mme [K] en conclut que la mise en demeure doit être annulée.
L'Urssaf rétorque qu'il est de jurisprudence constante que l'absence de réception de la mise en demeure n'entache pas celle-ci de sa validité. L'article L. 244-2 précise d'ailleurs que la mise en demeure doit être 'adressée par lettre recommandée ou par tout moyen donnant date certaine à sa réception par l'employeur ou le travailleur indépendant', ce qui induit que le législateur n'exige la réception effective de la mise demeure par l'employeur que dans le cas où celle-ci n'a pas été envoyée par voie de lettre recommandée. En l'espèce, la mise en demeure a été adressée par lettre recommandée le 25 octobre 2019 et Mme [K] en a accusé réception le 26 octobre suivant.
S'agissant de la mention « 4ème trimestre 2017 » dans la colonne « période », l'Urssaf soutient qu'elle n'est pas de nature à tromper les cotisants ou à les induire en erreur dans la mesure où la CSM est redevable annuellement et qu'ils savent qu'ils n'ont reçu aucun appel de cotisation durant les précédents trimestres. L'appel du quatrième trimestre ne peut donc que correspondre à la cotisation annuelle appelée au cours du quatrième trimestre de l'année. De ce fait, la mise en demeure du 25 octobre 2019 notifiée le 26 octobre 2019 à la requérante est bien régulière, et la cotisation n'est pas prescrite.
Réponse de la cour
Aux termes de l'article L. 244-2 du code de la sécurité sociale dans sa version en vigueur depuis le 23 décembre 2018
Toute action ou poursuite effectuée en application de l'article précédent ou des articles L. 244-6 et L. 244-8-1 est obligatoirement précédée, si elle a lieu à la requête du ministère public, d'un avertissement par lettre recommandée de l'autorité compétente de l'Etat invitant l'employeur ou le travailleur indépendant à régulariser sa situation dans le mois. Si la poursuite n'a pas lieu à la requête du ministère public, ledit avertissement est remplacé par une mise en demeure adressée par lettre recommandée ou par tout moyen donnant date certaine à sa réception par l'employeur ou le travailleur indépendant.
Le contenu de l'avertissement ou de la mise en demeure mentionnés au premier alinéa doit être précis et motivé, dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat.
Il résulte de ce texte que la mise en demeure doit être adressée soit par lettre recommandée soit par tout moyen donnant date certaine à sa réception et c'est dans ce dernier cas seulement que l'Urssaf doit justifier de sa réception effective.
Il sera rappelé que la mise en demeure n'étant pas de nature contentieuse, elle n'est pas soumise aux exigences du code de procédure civile et, dès lors, sa validité n'est pas entachée par son défaut de réception, sous réserve qu'elle ait été adressée au bon destinataire et à son adresse.
Au cas présent, la mise en demeure établie par l'Urssaf le 19 avril 2019 a été bien été adressée à Mme [K] par lettre recommandée mais à une date qui n'apparaît effectivement pas sur le récépissé postal remis par la Poste.
Pour autant, cette absence de précision de date d'envoi et de réception de la mise en demeure n'a pour effet que de ne pas faire courir le délai de forclusion pour saisir la commission de recours amiable. Elle n'affecte pas la mise en demeure elle-même. Et il sera relevé par la cour que Mme [K] [C] a pu contester le montant réclamé dans la mise en demeure devant la commission de recours amiable.
La cour constate par ailleurs, au regard de la chronologie des recours rappelée ci-avant, que les sommes sollicitées dans la mise en demeure n'encourent pas la prescription.
S'agissant des mentions portées sur la mise en demeure, l'article R. 244-1 du même code dans sa version en vigueur du 01 janvier 2017 au 16 décembre 2018 précisant
L'avertissement ou la mise en demeure précise la cause, la nature et le montant des sommes réclamées, les majorations et pénalités qui s'y appliquent ainsi que la période à laquelle elles se rapportent.
(...) Lorsque l'employeur ou le travailleur indépendant qui fait l'objet de l'avertissement ou de la mise en demeure prévus à l'article L. 244-2, saisit la juridiction compétente dans les conditions prévues à l'article R. 133-2, la prescription des actions mentionnées aux articles L. 244-7 et L. 244-11 est interrompue et de nouveaux délais recommencent à courir à compter du jour où le jugement est devenu définitif.
L'avertissement ou la mise en demeure, qui constitue une invitation impérative adressée au débiteur d'avoir à régulariser sa situation dans le délai imparti, et la contrainte délivrée à la suite de cette mise en demeure restée sans effet, doivent permettre à l'intéressé d'avoir connaissance de la nature, de la cause et de l'étendue de son obligation ; qu'à cette fin il importe qu'elles précisent, à peine de nullité, outre la nature et le montant des cotisations réclamées, la période à laquelle elles se rapportent, sans que soit exigée la preuve d'un préjudice. Elle doit également précisé le délai d'un mois pour régulariser la situation.
Ce faisant, la mise en demeure contestée comporte les mentions suivantes :
- la date de son établissement, à savoir le 19 avril 2019,
- la nature des cotisations concernées en l'occurrence la cotisation subsidiaire maladie,
- le motif de la mise en recouvrement en l'espèce, ce qui n'est pas contesté, une absence de versement de cette cotisation obligatoire,
- la période, en l'espèce le 4ème trimestre 2017,
- et le montant réclamé soit 14 222 euros.
Cette mise en demeure porte mention du délai d'un mois pour s'acquitter du paiement des cotisations ainsi que la possibilité de saisir la commission de recours amiable en cas de contestation.
De même, si la mise en demeure doit fournir les éléments de calcul des différentes cotisations et contributions pour permettre à l'assujetti de connaître l'étendue de son obligation cela n'entraîne pas d'obligation pour l'organisme de faire mention des taux appliqués et du détail des calculs dès lors que figurent les informations nécessaires permettant au cotisant de comprendre ce qui lui est réclamé et de pouvoir le vérifier. Au cas présent, le calcul de la seule cotisation appelée est prévue par les dispositions de l'article D. 380-1 et 2 du code de la sécurité sociale.
Enfin, s'agissant de la période, en mentionnant '4ème trimestre 2017', Mme [K]-[C] ne peut valablement soutenir qu'elle a pu en déduire que d'autres appels à cotisations lui seraient adressées puisque la CSM est redevable annuellement, le dernier trimestre et qu'elle n'avait jamais reçu d'appel de cotisation pour les trimestres précédents. La mention ne peut donc correspondre qu'à la cotisation annuelle appelée au cours du quatrième trimestre de l'année, ainsi qu'il le lui avait été indiqué dans les courriers l'informant de son affiliation à la CSM et l'appel de cotisation du 26 novembre 2018. Il n'existe donc aucune ambiguïté sur le montant demandé et, en tout état de cause, il sera relevé que cette mention n'est pas susceptible d'entraîner une confusion dans la compréhension du montant de la cotisation justifiant que l'appel de cotisations soit annulé.
Il résulte de ce qui précède que la mise en demeure n'encoure pas la nullité, Mme [K]-[C] ayant parfaitement été en mesure d'avoir connaissance de la nature, de la cause et de l'étendue de son obligation.
Ce moyen sera rejeté.
Sur la demande reconventionnelle en paiement
L'Urssaf ayant justifié du bien fondé de sa créance, et son montant n'étant pas remis en cause par Mme [K]-[C], il sera fait droit à la demande reconventionnelle en paiement pour la somme de 14 222 euros.
Sur les dépens et les demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile
Mme [K]-[C], qui succombe à l'instance, sera condamnée aux dépens conformément aux dispositions de l'article 696 du code de procédure civile et sera déboutée de la demande qu'elle a formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour, après en avoir délibéré, par arrêt contradictoire,
DÉCLARE l'appel formé par l'union pour le recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales Centre Val-de-Loire recevable,
INFIRME le jugement rendu le 16 juin 2020 par le pôle social du tribunal judiciaire de Paris (RG19-10544) en toutes ses dispositions ;
STATUANT À NOUVEAU ET Y AJOUTANT,
JUGE que Madame [G] [K] est redevable de la cotisation subsidiaire maladie au titre de l'année 2017 ;
VALIDE l'appel de cotisation subsidiaire maladie adressé à Mme [G] [K] par l'union pour le recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales du Centre Val-de-Loire le 26 novembre 2018 pour son entier montant de 14 222 euros ;
VALIDE la mise en demeure établie le 25 octobre 2019 par l'union pour le recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales Centre Val-de-Loire et adressée à Mme [G] [K] pour un montant de 14 222 euros au titre de la contribution subsidiaire maladie pour l'année 2017 ;
DÉBOUTE les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires ;
DÉBOUTE Mme [G] [K] de sa demande au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE [G] [K] aux dépens d'instance et d'appel.
PRONONCÉ par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
La greffière La présidente