Décisions
CA Bordeaux, 2e ch. civ., 30 mai 2024, n° 21/00844
BORDEAUX
Arrêt
Autre
COUR D'APPEL DE BORDEAUX
2ème CHAMBRE CIVILE
--------------------------
ARRÊT DU : 30 MAI 2024
N° RG 21/00844 - N° Portalis DBVJ-V-B7F-L55W
[X] [E]
[Z] [T] épouse [E]
S.C.I. ESTAUL
c/
[G] [C]
S.C.I. MJMPB
Nature de la décision : AU FOND
Grosse délivrée le :
aux avocats
Décision déférée à la cour : jugement rendu le 22 décembre 2020 par le TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de LIBOURNE (RG : 19/00035) suivant déclaration d'appel du 11 février 2021
APPELANTS :
[X] [E]
né le 13 Avril 1962 à [Localité 10]
de nationalité Française,
demeurant [Adresse 8]
[Z] [T] épouse [E]
née le 19 Avril 1965 à [Localité 12]
de nationalité Française,
demeurant [Adresse 8]
S.C.I. ESTAUL
[Adresse 6]
agissant en la personne de son liquidateur amiable Madame [Z] [T] épouse [E] demeurant en cette qualité [Adresse 8]
Représentés par Me Annie TAILLARD de la SCP ANNIE TAILLARD AVOCAT, avocat au barreau de BORDEAUX
et assistés de Me Laure BONNEVIALLE - HALLER de la SELARL CABINET LAURE BONNEVIALLE -HALLER, avocat au barreau de DRAGUIGNAN
INTIMÉS :
[G] [C]
né le 27 Juin 1954 à [Localité 9]
de nationalité Française
Profession : Notaire,
demeurant [Adresse 5]
Représenté par Me HARDY substituant Me Xavier LAYDEKER de la SCP LAYDEKER - SAMMARCELLI - MOUSSEAU, avocat au barreau de BORDEAUX
S.C.I. MJMPB
immatriculée au RCS de Libourne sous le n° 834 727 752, ayant son siège [Adresse 6], prise en la personne de ses représentants légaux
Représentée par Me Jacques-Brice MOMNOUGUI de la SELARL JURIS TIME, avocat au barreau de BORDEAUX
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 04 avril 2024 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Rémi FIGEROU, Conseiller, qui a fait un rapport oral de l'affaire avant les plaidoiries,
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Président : Monsieur Jacques BOUDY
Conseiller : Monsieur Alain DESALBRES
Conseiller : Monsieur Rémi FIGEROU
Greffier lors des débats : Madame Audrey COLLIN
ARRÊT :
- contradictoire
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
* * *
FAITS ET PROCÉDURE :
Par acte authentique dressé par Maître [C], notaire à [Localité 11], le 16 février 2018, la SCI Estaul représentée par ses deux associés M. et Mme [E], a vendu à la SCI MJMPB un bâtiment à usage mixte de bar restaurant et d'habitation sis à [Adresse 6], cadastré section AP n°[Cadastre 2],[Cadastre 3] et [Cadastre 4] et section ZP n°[Cadastre 1], moyennant le prix de 160 000 euros.
Aux termes de l'acte, il était indiqué que le vendeur déclarait que l'immeuble n'était pas situé dans une zone où existait un réseau public de collecte des eaux usées et qu'il disposait d'une installation d'assainissement individuel. Un diagnostic réalisé par la Saur et annexé à l'acte, précisait que l'installation n'était pas conforme, qu'elle était fonctionnelle en l'état, mais pouvait présenter des risques de dysfonctionnement majeurs et que des travaux de mise en conformité devaient être réalisés sous un an en cas de vente ou de saturation.
Il était par ailleurs précisé dans l'acte que l'acquéreur devrait procéder aux travaux de mise en conformité dans le délai d'un an prescrit par l'article L271-4 alinéa 3 du code de la construction et de l'habitation. Il reconnaissait avoir été informé que la commune pourrait, à l'expiration de ce délai, le mettre en demeure de procéder aux dits travaux. Il s'engageait à assurer l'entretien régulier de l'installation et à faire réaliser la vidange périodique.
La SCI MJMPB s'est rapprochée de la SCP MC BIO pour entreprendre les travaux de rénovation de l'immeuble, notamment du restaurant devant y être exploité par la Sarl le Bouchon de Troquereau.
Parallèlement, elle a pris contact avec une entreprise habilitée à mettre en conformité le système d'assainissement individuel.
Lors de la venue de M. [U] gérant de la Sarl ATPJ pour l'établissement d'un devis de travaux, M et Mme [S], associés gérant de la SCI MJMBPB ont constaté que le système d'assainissement individuel ne se situait pas sur les parcelles qu'ils venaient d'acquérir mais sur la parcelle appartenant à un tiers et bordant l'immeuble côté sud-est sur laquelle passait une voie ferrée.
La SCI MJMPB ne pouvant entreprendre les travaux de mise en conformité de l'assainissement sur un terrain ne lui appartenant pas, se serait trouvée contrainte de devoir faire édifier un nouveau système d'assainissement sur sa propre parcelle et de le faire raccorder, ce qui aurait représenté des coûts importants imprévus.
La SCI MJMPB s'est alors adressé au notaire, Maître [C], pour lui exposer la situation et signaler que son acte ne mentionnait aucune servitude au profit de la propriété sur le terrain bordant la propriété et paraissant appartenir à la SNCF.
Considérant que l'acte paraissait comporter une irrégularité manifeste dont la SCI MJMPB ne saurait assumer les conséquences en raison du coût des travaux engendrés du fait de la modification de l'assiette du système d'assainissement, elle a demandé au notaire de lui faire une proposition pour remédier à cette situation.
Le notaire a répondu par courrier du 22 mai 2018 en indiquant que le vendeur lui avait fourni le contrôle établi par le service public d'assainissement non collectif datant de moins de 3 ans que ce document, pas plus que le vendeur, ne précisaient que l'assainissement n'était pas situé sur la parcelle vendue, qu'il ne pouvait donc avoir une information exacte si elle ne lui était pas donnée. Les titres de propriété ne mentionnaient aucune servitude. En conséquence, le notaire considérait son acte comme complet sur le plan juridique.
Dans un courrier du 8 juin 2018, Ia SCI MJMPB a estimé que son vendeur ayant indiqué que l'immeuble disposait d'une installation d'assainissement individuel, il appartenait au notaire de vérifier que le système d'assainissement individuel dont le vendeur indiquait que l'immeuble était équipé, se trouvait bien sur la propriété afin de proposer, dans le cas contraire, la régularisation d'une servitude permettant à l'acquéreur d'user du système tel qu'il était prévu à l'acte de vente.
À défaut, la SCI MJMPB ajoutait qu'elle serait contrainte d'engager des travaux importants dont le coût ne saurait rester à sa charge car elle n'aurait pas acquis l'immeuble aux mêmes conditions si elle en avait été informée. Le prix aurait nécessairement dû être diminué du montant des travaux supplémentaires.
La SCI Estaul a fait l'objet d'une dissolution amiable le 18 février 2018 à la suite de la vente de l'immeuble, Mme [E] étant désignée comme liquidateur.
Par acte du 10 janvier 2019, la SCI MJMPB a assigné la SCI Estaul, M. et Mme [E] et Maître [C] devant le tribunal de grande instance de Libourne aux fins de les voir condamnés in solidum à lui payer la somme de 35 251,60 euros au titre de dommages et intérêts, et la somme de 2500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Par jugement du 22 décembre 2020 , le tribunal judiciaire de Libourne a :
- condamné in solidum la SCI Estaul, M. et Mme [E] à payer à la SCI MJMPB la somme de 31 921, 60 euros à titre de dommages et intérêts pour le préjudice subi,
- condamné in solidum la SCI Estaul, M. et Mme [E] à payer à la SCO MJMPB la somme de 1000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné la SCI MJMPB à payer à Maître [C] la somme de 1000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- rejeté les demandes plus amples ou contraires,
- condamné in solidum la SCI Estaul, M. et Mme [E] aux entiers dépens.
M. et Mme [E] ainsi que la SCI Estaul ont relevé appel de ce jugement, le 11 février 2021.
Aux termes de leurs dernières conclusions notifiées le 9 février 2024, M. et Mme [E] et , la SCI Estaul demandent à la cour, sur le fondement des articles1603 et 1604 du code civil et 9 du code de procédure civile :
- de réformer l'intégralité du jugement rendu par le tribunal de grande instance de Libourne le 22 décembre 2020,
- de dire et de juger que la SCI Estaul et les époux [E] ont satisfait à leurs obligations contractuelles sur la délivrance et constater que la SCI MJMPB ne rapporte pas la preuve d'un défaut d'implantation de l'installation sanitaire dont il se prévaut,
en conséquence,
- de débouter la SCI MJMPB de l'intégralité de ses prétentions,
- de condamner la SCI MJMPB à payer aux époux [E] une somme de 8 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens de première instance et d'appel,
subsidiairement,
- de réformer le jugement entrepris sur le montant de la condamnation, et vu l'article 1343 ' 5 du code civil,
- de dire et de juger que la réparation du préjudice qu'aurait subi par la SCI MJMPB se limite au coût du déplacement de l'installation de la fosse sur la parcelle ZP [Cadastre 7],
en conséquence,
- de condamner les appelants à payer à la SCI MJMPB la somme de 4320 €
représentant le coût du déplacement et constatant que le litige n'a fait l'objet d'aucune tentative amiable préalablement à l'assignation ou en cours de procédure de première instance et en conséquence, de débouter la SCI MJMPB de sa demande d'indemnité pour frais irrépétibles tant de première instance que d'appel,
- dans cette hypothèse, de partager les dépens entre les parties au litige.
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 25 janvier 2023, M. [C] demande à la cour :
- de confirmer le jugement du 22 décembre 2021 en ce qu'il a jugé qu'aucun manquement ne pouvait être reproché à Maître [C] au regard des textes et de ses obligations, a rejeté la demande de la SCI MJMPB à son encontre et a condamné cette dernière à lui payer la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
par conséquent,
- de débouter la SCI MJMPB de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions à l'encontre de Maître [C],
y ajoutant,
- de condamner toute partie succombante à payer à Maître [C] une indemnité de 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- de condamner toute partie succombante aux entiers dépens, dont distraction au profit de la SCP Laydeker Sammarcelli Mousseau, avocat, sur ses affirmations de droit.
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 10 décembre 2021, la SCI MJMPB demande à la cour, sur le fondement des articles 31, 122 et 564 du code de procédure civile, 551, 552, 555, 1112-1, 1240, 1603, 1604, 1641, 1644 du code civil :
- de confirmer le jugement du 22 décembre 2020 (RG n° 19/00035) en ce qu'il a condamné in solidum la SCI Estaul et les époux [E] à lui payer la somme principale de 31 921,60 euros sur le fondement du non-respect de l'obligation de délivrance conforme du vendeur et de la garantie des vices cachés, outre 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et les entiers dépens,
- d'infirmer le jugement du 22 décembre 2020 (RG n° 19/00035) pour le surplus, soit en ce qu'il a rejeté son argumentation relative à l'obligation d'information du vendeur, et l'a déboutée de ses demandes à l'encontre de Me [C] et l'a condamnée à payer à Me [C] la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
et, statuant à nouveau sur ces points, sur la responsabilité du vendeur,
A titre infiniment subsidiaire, dans le cas où la cour réformerait le jugement entrepris en ce qu'il a reconnu l'absence de délivrance conforme et l'existence d'un vice caché,
- de dire et de juger qu'elle a manqué à son obligation d'information,
- de condamner in solidum la SCI Estaul et les époux [E] à lui payer la somme de 31 921,60 euros en réparation de son préjudice,
sur la responsabilité du notaire,
- de dire et de juger que Maître [C] a manqué à son devoir de conseil et de vérification de l'efficacité de son acte de vente,
- de condamner Maître [C], in solidum avec la SCI Estaul et les époux [E] à lui payer la somme de 31 921,60 euros en réparation de son préjudice subi,
en tout état de cause,
- de débouter la SCI Estaul et les époux [E] de toutes leurs demandes,
- de condamner in solidum SCI Estaul, les époux [E] et Me [C] à lui payer la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- de les condamner pareillement aux entiers dépens de première instance et d'appel, en ce compris les éventuels frais d'exécution forcée de la décision à intervenir.
Le 27 mai 2021, la SCI MJMPB a revendu le bien litigieux à la SCI FP.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 21 mars 2024.
MOTIFS
Sur l'intérêt à agir de la SCI MJMPB
Dans leurs dernières écritures les appelants ont fait valoir que la SCI MJMPB n'avait plus d'intérêt à agir dans la mesure où elle avait revendu l'immeuble litigieux à un tiers à la procédure.
Aux termes de l'acte de vente de l'immeuble à une SCI FP, il est notamment précisé en page 9 que'«' le vendeur informe L'acquéreur qu'au cours de l'année 2018, il a engagé une procédure judiciaire à l'encontre notamment de son propre vendeur, et par conséquent précédent propriétaire, compte tenu du fait qu'aucune information ne lui avait été donnée lors de l'acquisition, relativement au fait que l'installation d'assainissement individuel était en outre implantée sur la propriété voisine appartenant à la SNCF, le tout sans que pour autant, le propriétaire vendeur à l'époque bénéficie à ce titre d'une servitude. Cette procédure est toujours en cours. En ce qui concerne l'acquéreur, celui-ci déclare ne pas vouloir la poursuivre, pour être au jour des présentes, parfaitement informés, comme indiqué ci-dessus au paragraphe « désignation'», que le bien vendu n'est équipé d'aucun système d'assainissement individuel, et qu'il lui appartiendra d'en créer un intégralement sur sa propriété privative. À toutes fins utiles, et pour la complète information de l'acquéreur, demeurant annexer aux présentes après mention, un courrier émanant de Me Jacques Brice Momnougui , avocat de la société demanderesse, en date du 19 mai 2021, expliquant également la situation du bien en ce qui concerne la problématique de l'implantation de son installation d'assainissement sur une parcelle ne lui appartenant pas, pour être la propriété de la SNCF, et confirmant entre autres, que la procédure de ce chef, est toujours en cours devant la cour d'appel de Bordeaux, aux fins d'obtenir une indemnisation de son préjudice par la SCI Estaul, précédent propriétaire. Sont également demeurés ci annexés, le courrier de Nexity auquel il est fait référence dans le courrier de l'avocat, ainsi que les documents fournis par la SNCF au sujet des « servitudes de type T1 grevant les propriétés riveraines des voies ferrées'». De convention expresse entre les parties, tous les frais liés à la nécessité, le cas échéant dans l'avenir, de procéder à la neutralisation de l'installation, incomberont exclusivement au vendeur, savoir la société MJMPB, ce qu'elle reconnaît et accepte expressément » (piéce n° 19 de la société MJMPB)
Dans ces conditions la SCI MJMPB ne peut plus solliciter que l'indemnisation du préjudice qu'elle aurait supporté en raison de la présence de l'installation d'assainissement individuelle sur le terrain d'un tiers, puisqu'elle n'aura plus à supporter les frais de création d'une nouvelle installation.
Sur la responsabilité des vendeurs de l'immeuble et celle du notaire
Le tribunal a considéré que le vendeur de l'immeuble avait manqué à son obligation de délivrance conforme de celui-ci alors qu'il était écrit dans l'acte de vente que celui-ci bénéficiait d'une installation d'assainissement individuel alors qu'en réalité celle-ci se trouvait sur un terrain appartenant à un tiers sans qu'il existe au profit de son propriétaire une servitude, si bien que l'acquéreur ne pouvait entreprendre les travaux de mise aux normes qu'il devait entreprendre. Par ailleurs, le tribunal a mis le notaire hors de cause, considérant qu'aucun manquement ne pouvait lui être reproché.
Les époux [E] et la SCI Estaul soutiennent qu'ils ont satisfait à leur obligation de délivrance conforme. L'article 1603 du code civil met à la charge du vendeur l'obligation de délivrer la chose vendue conforme au contrat. Ils ont vendu la chose telle qu'elle leur a été vendue et telle qu'elle a toujours été, à l'occasion des ventes successives de leurs prédécesseurs. La fosse fait partie de l'assiette du bien vendu. Tous les propriétaires successifs ont usé du bien et l'ont exploité dans des conditions normales jusqu'à l'intervention d'un incendie en 2019, détruisant l'installation. La mise aux normes de la fosse septique était contractuellement à la charge de l'acquéreur et non à la charge du vendeur. D'ailleurs, rien ne prouve que la fosse septique ne serait pas située sur la parcelle vendue.
Pour sa part Me [C] expose qu'il a satisfait à ses obligations. Il rappelle qu'un notaire n'a pas l'obligation de se déplacer sur les lieux pour vérifier les déclarations des parties. Il n'appartient pas au notaire de procéder à des investigations complémentaires au regard du contenu du document relatif à l'installation d'assainissement, ce qui ne saurait en tout état de cause entrer dans sa sphère juridique de compétence et d'intervention. Il n'a commis aucun manquement à son obligation d'assurer l'efficacité de l'acte rédigé.
La SCI MJMPB considère au contraire que son vendeur a manqué à son obligation de délivrance conforme du bien puisque l'installation d'assainissement du bien vendu était située, non sur la parcelle où se situe l'immeuble, mais sur la parcelle voisine, dont elle n'est pas propriétaire. Aussi, elle ne peut effectuer les travaux de remise en état évoqués dans l'acte d'acquisition. Le vendeur peut être mis en cause sur le fondement de la garantie des vices cachés. En effet, l'immeuble vendu ne disposerait pas d'un système d'assainissement évoqué dans l'acte d'acquisition, ce qui rend cet immeuble impropre à sa destination normale. Le vendeur est encore responsable au titre de son manquement à son obligation d'information, sur le fondement de l'article 1112-1 du code civil. En outre le notaire a commis une faute en s'abstenant de demander à l'acquéreur s'il avait fait établir un devis pour les travaux à réaliser pour s'assurer de leur coût et de leur faisabilité. Enfin les appelants ne peuvent devant la cour demander des dommages et intérêts, s'agissant d'une demande nouvelle devant la cour d'appel.
***
Si le tribunal a considéré qu'il résultait de l'attestation de M. [U], du procés-verbal de constat de Me [J] et de la lettre de la société Nexity que l'installation d'assainissement individuelle litigieuse était située sur le terrain d'un tiers, la cour ne trouve pas dans ces trois pièces la preuve que l'installation d'assainissement individuelle se trouverait sur le fonds d'un tiers, en l'espèce celui de la SNCF.
En effet, il résulte de l'attestation de M. [U] du 12 décembre 2018 que celui-ci trouvait que «'l'assainissement» se trouvait placé dans une zone qui lui paraissait trop proche de la voie ferrée si bien qu'il avait demandé à la SCI MJMPB de faire venir un géomètre expert.
Manifestement cette dernière n'a pas cru utile de faire intervenir un tel professionnel. En toute hypothèse, si M. [D] a pu avoir un doute sur l'emplacement de l'installation litigieuse, il ne s'est nullement prononcé sur celui-ci.
Par ailleurs, il résulte de la lettre de Mme la chargée du patrimoine de la SA Nexity du 28 octobre 2020 que celle-ci aurait constaté que le système d'assainissement litigieux se trouverait sur une parcelle appartenant à la SNCF. Elle ne précise toutefois pas sur quelles pièces elle a pu fonder son jugement. En conséquence, ce courrier ne permet pas de rapporter la preuve de l'emplacement de l'installation litigieuse.
Enfin le procés-verbal de constat d'huissier dressé le 4 décembre 2019 qui ne se réfère à aucun procés-verbal de bornage ne permet pas davantage de faire la preuve de l'emplacement du système d'assainissement alors que d'autre part il n'est pas démontré que les deux couvercles de fosses septiques photographiées par l'huissier soient celles du système d'assainissement litigieux, alors qu'en outre l'absence apparente de toute canalisation d'évacuation des eaux usées ou vannes dans les trois petites cours de l'immeuble ne prouve pas leur absence en sous-sol.
En conséquence, la SCI MJMPB ne prouve pas les faits nécessaires au succès de sa prétention conformément aux dispositions de l'article 9 du code de procédure.
Dès lors, elle sera déboutée de toutes ses demandes.
Sur les dépens et les frais non compris dans les dépens
La SCI MJMPB succombant devant la cour d'appel sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel.
Par ailleurs, il serait inéquitable que les appelants ainsi que Me [G] [C] supportent les frais irrépétibles qu'ils ont engagés pour faire valoir leurs droits devant le tribunal puis devant la cour d'appel.
En conséquence, le jugement sera confirmé en ce qu'il a condamné la SCI MJMPB à payer à Me [G] [C] la somme de 1000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile. En outre, elle sera également condamnée à lui payer une somme complémentaire de 2000 euros au titre des frais irrépétibles qu'il a du exposer devant la cour.
En outre la SCI MJMPB sera condamnée à payer à la SCI Estaul et à M.et Mme [E], ensemble, la somme de 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais irrépétibles qu'ils ont exposés devant le tribunal puis devant la cour.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Réforme le jugement entrepris sauf en ce qu'il a condamné la SCI MJMPB à payer à Maître Benoît Guilhot la somme de 1000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, et statuant à nouveau':
Déboute la SCI MJMPB de toutes ses demandes, y ajoutant':
Condamne la SCI MJMPB à payer à Maître Benoît Guilhot la somme de 2000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles qu'il a engagés devant la cour d'appel,
Condamne la SCI MJMPB à payer à payer à la SCI ESTAUL, M. [X] [E] et Mme [Z] [T] épouse [E], ensemble, la somme de 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles qu'il ont engagés devant le tribunal et devant la cour d'appel,
Condamne la SCI MJMPB aux dépens d'instance et d'appel.
Le présent arrêt a été signé par Monsieur Jacques BOUDY, président, et par Madame Audrey COLLIN, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le Greffier, Le Président,
2ème CHAMBRE CIVILE
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ARRÊT DU : 30 MAI 2024
N° RG 21/00844 - N° Portalis DBVJ-V-B7F-L55W
[X] [E]
[Z] [T] épouse [E]
S.C.I. ESTAUL
c/
[G] [C]
S.C.I. MJMPB
Nature de la décision : AU FOND
Grosse délivrée le :
aux avocats
Décision déférée à la cour : jugement rendu le 22 décembre 2020 par le TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de LIBOURNE (RG : 19/00035) suivant déclaration d'appel du 11 février 2021
APPELANTS :
[X] [E]
né le 13 Avril 1962 à [Localité 10]
de nationalité Française,
demeurant [Adresse 8]
[Z] [T] épouse [E]
née le 19 Avril 1965 à [Localité 12]
de nationalité Française,
demeurant [Adresse 8]
S.C.I. ESTAUL
[Adresse 6]
agissant en la personne de son liquidateur amiable Madame [Z] [T] épouse [E] demeurant en cette qualité [Adresse 8]
Représentés par Me Annie TAILLARD de la SCP ANNIE TAILLARD AVOCAT, avocat au barreau de BORDEAUX
et assistés de Me Laure BONNEVIALLE - HALLER de la SELARL CABINET LAURE BONNEVIALLE -HALLER, avocat au barreau de DRAGUIGNAN
INTIMÉS :
[G] [C]
né le 27 Juin 1954 à [Localité 9]
de nationalité Française
Profession : Notaire,
demeurant [Adresse 5]
Représenté par Me HARDY substituant Me Xavier LAYDEKER de la SCP LAYDEKER - SAMMARCELLI - MOUSSEAU, avocat au barreau de BORDEAUX
S.C.I. MJMPB
immatriculée au RCS de Libourne sous le n° 834 727 752, ayant son siège [Adresse 6], prise en la personne de ses représentants légaux
Représentée par Me Jacques-Brice MOMNOUGUI de la SELARL JURIS TIME, avocat au barreau de BORDEAUX
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 04 avril 2024 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Rémi FIGEROU, Conseiller, qui a fait un rapport oral de l'affaire avant les plaidoiries,
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Président : Monsieur Jacques BOUDY
Conseiller : Monsieur Alain DESALBRES
Conseiller : Monsieur Rémi FIGEROU
Greffier lors des débats : Madame Audrey COLLIN
ARRÊT :
- contradictoire
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
* * *
FAITS ET PROCÉDURE :
Par acte authentique dressé par Maître [C], notaire à [Localité 11], le 16 février 2018, la SCI Estaul représentée par ses deux associés M. et Mme [E], a vendu à la SCI MJMPB un bâtiment à usage mixte de bar restaurant et d'habitation sis à [Adresse 6], cadastré section AP n°[Cadastre 2],[Cadastre 3] et [Cadastre 4] et section ZP n°[Cadastre 1], moyennant le prix de 160 000 euros.
Aux termes de l'acte, il était indiqué que le vendeur déclarait que l'immeuble n'était pas situé dans une zone où existait un réseau public de collecte des eaux usées et qu'il disposait d'une installation d'assainissement individuel. Un diagnostic réalisé par la Saur et annexé à l'acte, précisait que l'installation n'était pas conforme, qu'elle était fonctionnelle en l'état, mais pouvait présenter des risques de dysfonctionnement majeurs et que des travaux de mise en conformité devaient être réalisés sous un an en cas de vente ou de saturation.
Il était par ailleurs précisé dans l'acte que l'acquéreur devrait procéder aux travaux de mise en conformité dans le délai d'un an prescrit par l'article L271-4 alinéa 3 du code de la construction et de l'habitation. Il reconnaissait avoir été informé que la commune pourrait, à l'expiration de ce délai, le mettre en demeure de procéder aux dits travaux. Il s'engageait à assurer l'entretien régulier de l'installation et à faire réaliser la vidange périodique.
La SCI MJMPB s'est rapprochée de la SCP MC BIO pour entreprendre les travaux de rénovation de l'immeuble, notamment du restaurant devant y être exploité par la Sarl le Bouchon de Troquereau.
Parallèlement, elle a pris contact avec une entreprise habilitée à mettre en conformité le système d'assainissement individuel.
Lors de la venue de M. [U] gérant de la Sarl ATPJ pour l'établissement d'un devis de travaux, M et Mme [S], associés gérant de la SCI MJMBPB ont constaté que le système d'assainissement individuel ne se situait pas sur les parcelles qu'ils venaient d'acquérir mais sur la parcelle appartenant à un tiers et bordant l'immeuble côté sud-est sur laquelle passait une voie ferrée.
La SCI MJMPB ne pouvant entreprendre les travaux de mise en conformité de l'assainissement sur un terrain ne lui appartenant pas, se serait trouvée contrainte de devoir faire édifier un nouveau système d'assainissement sur sa propre parcelle et de le faire raccorder, ce qui aurait représenté des coûts importants imprévus.
La SCI MJMPB s'est alors adressé au notaire, Maître [C], pour lui exposer la situation et signaler que son acte ne mentionnait aucune servitude au profit de la propriété sur le terrain bordant la propriété et paraissant appartenir à la SNCF.
Considérant que l'acte paraissait comporter une irrégularité manifeste dont la SCI MJMPB ne saurait assumer les conséquences en raison du coût des travaux engendrés du fait de la modification de l'assiette du système d'assainissement, elle a demandé au notaire de lui faire une proposition pour remédier à cette situation.
Le notaire a répondu par courrier du 22 mai 2018 en indiquant que le vendeur lui avait fourni le contrôle établi par le service public d'assainissement non collectif datant de moins de 3 ans que ce document, pas plus que le vendeur, ne précisaient que l'assainissement n'était pas situé sur la parcelle vendue, qu'il ne pouvait donc avoir une information exacte si elle ne lui était pas donnée. Les titres de propriété ne mentionnaient aucune servitude. En conséquence, le notaire considérait son acte comme complet sur le plan juridique.
Dans un courrier du 8 juin 2018, Ia SCI MJMPB a estimé que son vendeur ayant indiqué que l'immeuble disposait d'une installation d'assainissement individuel, il appartenait au notaire de vérifier que le système d'assainissement individuel dont le vendeur indiquait que l'immeuble était équipé, se trouvait bien sur la propriété afin de proposer, dans le cas contraire, la régularisation d'une servitude permettant à l'acquéreur d'user du système tel qu'il était prévu à l'acte de vente.
À défaut, la SCI MJMPB ajoutait qu'elle serait contrainte d'engager des travaux importants dont le coût ne saurait rester à sa charge car elle n'aurait pas acquis l'immeuble aux mêmes conditions si elle en avait été informée. Le prix aurait nécessairement dû être diminué du montant des travaux supplémentaires.
La SCI Estaul a fait l'objet d'une dissolution amiable le 18 février 2018 à la suite de la vente de l'immeuble, Mme [E] étant désignée comme liquidateur.
Par acte du 10 janvier 2019, la SCI MJMPB a assigné la SCI Estaul, M. et Mme [E] et Maître [C] devant le tribunal de grande instance de Libourne aux fins de les voir condamnés in solidum à lui payer la somme de 35 251,60 euros au titre de dommages et intérêts, et la somme de 2500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Par jugement du 22 décembre 2020 , le tribunal judiciaire de Libourne a :
- condamné in solidum la SCI Estaul, M. et Mme [E] à payer à la SCI MJMPB la somme de 31 921, 60 euros à titre de dommages et intérêts pour le préjudice subi,
- condamné in solidum la SCI Estaul, M. et Mme [E] à payer à la SCO MJMPB la somme de 1000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné la SCI MJMPB à payer à Maître [C] la somme de 1000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- rejeté les demandes plus amples ou contraires,
- condamné in solidum la SCI Estaul, M. et Mme [E] aux entiers dépens.
M. et Mme [E] ainsi que la SCI Estaul ont relevé appel de ce jugement, le 11 février 2021.
Aux termes de leurs dernières conclusions notifiées le 9 février 2024, M. et Mme [E] et , la SCI Estaul demandent à la cour, sur le fondement des articles1603 et 1604 du code civil et 9 du code de procédure civile :
- de réformer l'intégralité du jugement rendu par le tribunal de grande instance de Libourne le 22 décembre 2020,
- de dire et de juger que la SCI Estaul et les époux [E] ont satisfait à leurs obligations contractuelles sur la délivrance et constater que la SCI MJMPB ne rapporte pas la preuve d'un défaut d'implantation de l'installation sanitaire dont il se prévaut,
en conséquence,
- de débouter la SCI MJMPB de l'intégralité de ses prétentions,
- de condamner la SCI MJMPB à payer aux époux [E] une somme de 8 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens de première instance et d'appel,
subsidiairement,
- de réformer le jugement entrepris sur le montant de la condamnation, et vu l'article 1343 ' 5 du code civil,
- de dire et de juger que la réparation du préjudice qu'aurait subi par la SCI MJMPB se limite au coût du déplacement de l'installation de la fosse sur la parcelle ZP [Cadastre 7],
en conséquence,
- de condamner les appelants à payer à la SCI MJMPB la somme de 4320 €
représentant le coût du déplacement et constatant que le litige n'a fait l'objet d'aucune tentative amiable préalablement à l'assignation ou en cours de procédure de première instance et en conséquence, de débouter la SCI MJMPB de sa demande d'indemnité pour frais irrépétibles tant de première instance que d'appel,
- dans cette hypothèse, de partager les dépens entre les parties au litige.
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 25 janvier 2023, M. [C] demande à la cour :
- de confirmer le jugement du 22 décembre 2021 en ce qu'il a jugé qu'aucun manquement ne pouvait être reproché à Maître [C] au regard des textes et de ses obligations, a rejeté la demande de la SCI MJMPB à son encontre et a condamné cette dernière à lui payer la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
par conséquent,
- de débouter la SCI MJMPB de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions à l'encontre de Maître [C],
y ajoutant,
- de condamner toute partie succombante à payer à Maître [C] une indemnité de 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- de condamner toute partie succombante aux entiers dépens, dont distraction au profit de la SCP Laydeker Sammarcelli Mousseau, avocat, sur ses affirmations de droit.
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 10 décembre 2021, la SCI MJMPB demande à la cour, sur le fondement des articles 31, 122 et 564 du code de procédure civile, 551, 552, 555, 1112-1, 1240, 1603, 1604, 1641, 1644 du code civil :
- de confirmer le jugement du 22 décembre 2020 (RG n° 19/00035) en ce qu'il a condamné in solidum la SCI Estaul et les époux [E] à lui payer la somme principale de 31 921,60 euros sur le fondement du non-respect de l'obligation de délivrance conforme du vendeur et de la garantie des vices cachés, outre 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et les entiers dépens,
- d'infirmer le jugement du 22 décembre 2020 (RG n° 19/00035) pour le surplus, soit en ce qu'il a rejeté son argumentation relative à l'obligation d'information du vendeur, et l'a déboutée de ses demandes à l'encontre de Me [C] et l'a condamnée à payer à Me [C] la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
et, statuant à nouveau sur ces points, sur la responsabilité du vendeur,
A titre infiniment subsidiaire, dans le cas où la cour réformerait le jugement entrepris en ce qu'il a reconnu l'absence de délivrance conforme et l'existence d'un vice caché,
- de dire et de juger qu'elle a manqué à son obligation d'information,
- de condamner in solidum la SCI Estaul et les époux [E] à lui payer la somme de 31 921,60 euros en réparation de son préjudice,
sur la responsabilité du notaire,
- de dire et de juger que Maître [C] a manqué à son devoir de conseil et de vérification de l'efficacité de son acte de vente,
- de condamner Maître [C], in solidum avec la SCI Estaul et les époux [E] à lui payer la somme de 31 921,60 euros en réparation de son préjudice subi,
en tout état de cause,
- de débouter la SCI Estaul et les époux [E] de toutes leurs demandes,
- de condamner in solidum SCI Estaul, les époux [E] et Me [C] à lui payer la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- de les condamner pareillement aux entiers dépens de première instance et d'appel, en ce compris les éventuels frais d'exécution forcée de la décision à intervenir.
Le 27 mai 2021, la SCI MJMPB a revendu le bien litigieux à la SCI FP.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 21 mars 2024.
MOTIFS
Sur l'intérêt à agir de la SCI MJMPB
Dans leurs dernières écritures les appelants ont fait valoir que la SCI MJMPB n'avait plus d'intérêt à agir dans la mesure où elle avait revendu l'immeuble litigieux à un tiers à la procédure.
Aux termes de l'acte de vente de l'immeuble à une SCI FP, il est notamment précisé en page 9 que'«' le vendeur informe L'acquéreur qu'au cours de l'année 2018, il a engagé une procédure judiciaire à l'encontre notamment de son propre vendeur, et par conséquent précédent propriétaire, compte tenu du fait qu'aucune information ne lui avait été donnée lors de l'acquisition, relativement au fait que l'installation d'assainissement individuel était en outre implantée sur la propriété voisine appartenant à la SNCF, le tout sans que pour autant, le propriétaire vendeur à l'époque bénéficie à ce titre d'une servitude. Cette procédure est toujours en cours. En ce qui concerne l'acquéreur, celui-ci déclare ne pas vouloir la poursuivre, pour être au jour des présentes, parfaitement informés, comme indiqué ci-dessus au paragraphe « désignation'», que le bien vendu n'est équipé d'aucun système d'assainissement individuel, et qu'il lui appartiendra d'en créer un intégralement sur sa propriété privative. À toutes fins utiles, et pour la complète information de l'acquéreur, demeurant annexer aux présentes après mention, un courrier émanant de Me Jacques Brice Momnougui , avocat de la société demanderesse, en date du 19 mai 2021, expliquant également la situation du bien en ce qui concerne la problématique de l'implantation de son installation d'assainissement sur une parcelle ne lui appartenant pas, pour être la propriété de la SNCF, et confirmant entre autres, que la procédure de ce chef, est toujours en cours devant la cour d'appel de Bordeaux, aux fins d'obtenir une indemnisation de son préjudice par la SCI Estaul, précédent propriétaire. Sont également demeurés ci annexés, le courrier de Nexity auquel il est fait référence dans le courrier de l'avocat, ainsi que les documents fournis par la SNCF au sujet des « servitudes de type T1 grevant les propriétés riveraines des voies ferrées'». De convention expresse entre les parties, tous les frais liés à la nécessité, le cas échéant dans l'avenir, de procéder à la neutralisation de l'installation, incomberont exclusivement au vendeur, savoir la société MJMPB, ce qu'elle reconnaît et accepte expressément » (piéce n° 19 de la société MJMPB)
Dans ces conditions la SCI MJMPB ne peut plus solliciter que l'indemnisation du préjudice qu'elle aurait supporté en raison de la présence de l'installation d'assainissement individuelle sur le terrain d'un tiers, puisqu'elle n'aura plus à supporter les frais de création d'une nouvelle installation.
Sur la responsabilité des vendeurs de l'immeuble et celle du notaire
Le tribunal a considéré que le vendeur de l'immeuble avait manqué à son obligation de délivrance conforme de celui-ci alors qu'il était écrit dans l'acte de vente que celui-ci bénéficiait d'une installation d'assainissement individuel alors qu'en réalité celle-ci se trouvait sur un terrain appartenant à un tiers sans qu'il existe au profit de son propriétaire une servitude, si bien que l'acquéreur ne pouvait entreprendre les travaux de mise aux normes qu'il devait entreprendre. Par ailleurs, le tribunal a mis le notaire hors de cause, considérant qu'aucun manquement ne pouvait lui être reproché.
Les époux [E] et la SCI Estaul soutiennent qu'ils ont satisfait à leur obligation de délivrance conforme. L'article 1603 du code civil met à la charge du vendeur l'obligation de délivrer la chose vendue conforme au contrat. Ils ont vendu la chose telle qu'elle leur a été vendue et telle qu'elle a toujours été, à l'occasion des ventes successives de leurs prédécesseurs. La fosse fait partie de l'assiette du bien vendu. Tous les propriétaires successifs ont usé du bien et l'ont exploité dans des conditions normales jusqu'à l'intervention d'un incendie en 2019, détruisant l'installation. La mise aux normes de la fosse septique était contractuellement à la charge de l'acquéreur et non à la charge du vendeur. D'ailleurs, rien ne prouve que la fosse septique ne serait pas située sur la parcelle vendue.
Pour sa part Me [C] expose qu'il a satisfait à ses obligations. Il rappelle qu'un notaire n'a pas l'obligation de se déplacer sur les lieux pour vérifier les déclarations des parties. Il n'appartient pas au notaire de procéder à des investigations complémentaires au regard du contenu du document relatif à l'installation d'assainissement, ce qui ne saurait en tout état de cause entrer dans sa sphère juridique de compétence et d'intervention. Il n'a commis aucun manquement à son obligation d'assurer l'efficacité de l'acte rédigé.
La SCI MJMPB considère au contraire que son vendeur a manqué à son obligation de délivrance conforme du bien puisque l'installation d'assainissement du bien vendu était située, non sur la parcelle où se situe l'immeuble, mais sur la parcelle voisine, dont elle n'est pas propriétaire. Aussi, elle ne peut effectuer les travaux de remise en état évoqués dans l'acte d'acquisition. Le vendeur peut être mis en cause sur le fondement de la garantie des vices cachés. En effet, l'immeuble vendu ne disposerait pas d'un système d'assainissement évoqué dans l'acte d'acquisition, ce qui rend cet immeuble impropre à sa destination normale. Le vendeur est encore responsable au titre de son manquement à son obligation d'information, sur le fondement de l'article 1112-1 du code civil. En outre le notaire a commis une faute en s'abstenant de demander à l'acquéreur s'il avait fait établir un devis pour les travaux à réaliser pour s'assurer de leur coût et de leur faisabilité. Enfin les appelants ne peuvent devant la cour demander des dommages et intérêts, s'agissant d'une demande nouvelle devant la cour d'appel.
***
Si le tribunal a considéré qu'il résultait de l'attestation de M. [U], du procés-verbal de constat de Me [J] et de la lettre de la société Nexity que l'installation d'assainissement individuelle litigieuse était située sur le terrain d'un tiers, la cour ne trouve pas dans ces trois pièces la preuve que l'installation d'assainissement individuelle se trouverait sur le fonds d'un tiers, en l'espèce celui de la SNCF.
En effet, il résulte de l'attestation de M. [U] du 12 décembre 2018 que celui-ci trouvait que «'l'assainissement» se trouvait placé dans une zone qui lui paraissait trop proche de la voie ferrée si bien qu'il avait demandé à la SCI MJMPB de faire venir un géomètre expert.
Manifestement cette dernière n'a pas cru utile de faire intervenir un tel professionnel. En toute hypothèse, si M. [D] a pu avoir un doute sur l'emplacement de l'installation litigieuse, il ne s'est nullement prononcé sur celui-ci.
Par ailleurs, il résulte de la lettre de Mme la chargée du patrimoine de la SA Nexity du 28 octobre 2020 que celle-ci aurait constaté que le système d'assainissement litigieux se trouverait sur une parcelle appartenant à la SNCF. Elle ne précise toutefois pas sur quelles pièces elle a pu fonder son jugement. En conséquence, ce courrier ne permet pas de rapporter la preuve de l'emplacement de l'installation litigieuse.
Enfin le procés-verbal de constat d'huissier dressé le 4 décembre 2019 qui ne se réfère à aucun procés-verbal de bornage ne permet pas davantage de faire la preuve de l'emplacement du système d'assainissement alors que d'autre part il n'est pas démontré que les deux couvercles de fosses septiques photographiées par l'huissier soient celles du système d'assainissement litigieux, alors qu'en outre l'absence apparente de toute canalisation d'évacuation des eaux usées ou vannes dans les trois petites cours de l'immeuble ne prouve pas leur absence en sous-sol.
En conséquence, la SCI MJMPB ne prouve pas les faits nécessaires au succès de sa prétention conformément aux dispositions de l'article 9 du code de procédure.
Dès lors, elle sera déboutée de toutes ses demandes.
Sur les dépens et les frais non compris dans les dépens
La SCI MJMPB succombant devant la cour d'appel sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel.
Par ailleurs, il serait inéquitable que les appelants ainsi que Me [G] [C] supportent les frais irrépétibles qu'ils ont engagés pour faire valoir leurs droits devant le tribunal puis devant la cour d'appel.
En conséquence, le jugement sera confirmé en ce qu'il a condamné la SCI MJMPB à payer à Me [G] [C] la somme de 1000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile. En outre, elle sera également condamnée à lui payer une somme complémentaire de 2000 euros au titre des frais irrépétibles qu'il a du exposer devant la cour.
En outre la SCI MJMPB sera condamnée à payer à la SCI Estaul et à M.et Mme [E], ensemble, la somme de 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais irrépétibles qu'ils ont exposés devant le tribunal puis devant la cour.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Réforme le jugement entrepris sauf en ce qu'il a condamné la SCI MJMPB à payer à Maître Benoît Guilhot la somme de 1000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, et statuant à nouveau':
Déboute la SCI MJMPB de toutes ses demandes, y ajoutant':
Condamne la SCI MJMPB à payer à Maître Benoît Guilhot la somme de 2000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles qu'il a engagés devant la cour d'appel,
Condamne la SCI MJMPB à payer à payer à la SCI ESTAUL, M. [X] [E] et Mme [Z] [T] épouse [E], ensemble, la somme de 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles qu'il ont engagés devant le tribunal et devant la cour d'appel,
Condamne la SCI MJMPB aux dépens d'instance et d'appel.
Le présent arrêt a été signé par Monsieur Jacques BOUDY, président, et par Madame Audrey COLLIN, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le Greffier, Le Président,