Décisions
CA Paris, Pôle 4 - ch. 2, 5 juin 2024, n° 20/00590
PARIS
Arrêt
Autre
Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 4 - Chambre 2
ARRET DU 05 JUIN 2024
(n° , 2 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/00590 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CBHVR
Décision déférée à la Cour : Jugement du 07 Novembre 2019 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 15/07047
APPELANTES
Madame [B] [H] veuve [C]
née le 15 novembre 1924 à [Localité 6]
[Adresse 5]
[Localité 4]
Représentée par Me Laurent SIDOBRE, avocat au barreau de PARIS, toque : D0514
Madame [P] [C] épouse [E]
née le 24 janvier 1950 à [Localité 6]
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représentée par Me Laurent SIDOBRE, avocat au barreau de PARIS, toque : D0514
INTIMES
SYNDICAT DES COPROPRIÉTAIRES [Adresse 5] représenté par son syndic, la société GECOTRA, enseigne commerciale 'GROUPE LRDI VICTOR HUGO', SARL immatriculée au RCS de Nanterre sous le numéro 491 868 279
C/O Société GECOTRA 'GROUPE LRDI VICTOR HUGO'
[Adresse 3]
[Localité 4]
Représenté par Me Delphine MONTBOBIER, avocat au barreau de PARIS, toque : D1600
Société CARREFOUR PROXIMITE FRANCE
SAS immatriculée au RCS de Caen sous le numéro 345 130 488
[Adresse 7]
[Localité 1]
Représentée par Me Marie-Hélène DUJARDIN, avocat au barreau de PARIS, toque : D2153
ayant pour avocat plaidant : Me François MEUNIER, avocat au barreau du VAL DE MARNE, toque : PN49
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 12 Mars 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame PerrineVERMONT,Conseillère, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :
M. Jean-Loup CARRIERE, Président de Chambre
Mme Perrine VERMONT, Conseillère
Mme Caroline BIANCONI-DULIN, Conseillère
Greffier, lors des débats : Mme Dominique CARMENT
ARRET :
- CONTRADICTOIRE
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par M. Jean-Loup CARRIERE, Président de Chambre, et par Mme Dominique CARMENT, Greffière présente lors de la mise à disposition.
* * * * * * * * * *
FAITS & PROCÉDURE
Mmes [B] [H] veuve [C] et Mme [P] [C] épouse [E], sa fille, sont propriétaires indivises des lots 102 (un local commercial avec réserve), 125 (une réserve au sous-sol), 122 (une chambre de service au 7ème étage) et 156 (deux chambres froides).
Par acte sous signature privée du 15 janvier 2013, la société Charif a cédé son fonds de commerce, emportant cession du droit au bail, à la société par actions simplifiée Carrefour Proximité France afin d'y exploiter un magasin alimentaire sous l'enseigne [J] Express.
Compte tenu des travaux engagés dès le 23 janvier 2013 par la société Carrefour Proximité France et portant, selon le syndicat des copropriétaires sur les parties communes, ce dernier a obtenu par ordonnance sur requête la désignation d'un huissier de justice ayant établi le 21 février 2013 un procès-verbal de constat révélant la fissuration d'un plafond de cave, la présence d'équipements de plomberie et d'un extracteur d'air en attente de pose en sous-sol, le percement d'un mur porteur pour passage de câbles, la pose d'une poutre métallique sur la poutre maîtresse des caves, le percement d'une trémie entre rez-de-chaussée et sous-sol, et l'obturation de soupiraux.
Par ordonnance de référé du 2 avril 2013, M. [W], expert judiciaire, a été désigné à l'initiative du syndicat afin d'examiner, notamment, l'impact des travaux sur les parties communes.
Il a déposé son rapport le 18 novembre 2014 et a relevé, notamment, des modifications d'affectation de locaux, l'agrandissement de la trémie, le remplacement de la porte d'accès au sous-sol, l'obturation des soupiraux, et la modification des portes d'accès à l'immeuble.
Alors que M. [W] avait établi sa note de synthèse le 29 avril 2014, ont été notamment portées à l'ordre du jour de l'assemblée générale spéciale tenue en date du 20 juin 2014, et adoptées par cette assemblées, deux résolutions n°25-1 et 29.
La résolution n° 25-1 avait essentiellement pour objet de supprimer la mention d'immeuble à usage mixte, pour lui substituer la mention 'immeuble à usage principalement d'habitation' et pour les lots n°101 et 102 'à usage commercial' tels que définis dans le règlement de copropriété.
La résolution n° 29, portée à l'ordre du jour par Mme [C], tendait à voir autoriser l'indivision [C] à faire réaliser des travaux touchant les parties communes, et modifiant l'aspect extérieur de l'immeuble, et tenant plus précisément à faire réaliser les travaux suivants :
- aménagement des vitrines en façade avec porte automatique, sans toucher à la structure porteuse de l'immeuble,
- pose d'une enseigne à plat et d'une enseigne drapeau et remplacement du store existant suivant les plans descriptifs joints à la convocation et qui sont annexés au procès-verbal de l'assemblée générale et conformément aux autorisations administratives obtenues,
- création d'une pente à 3% à l'entrée du magasin en conformité avec la réglementation sur l'accessibilité aux personnes à mobilité réduite,
- agrandissement des deux grilles existantes en façade,
- utilisation de la porte existante donnant dans la cour de l'immeuble en tant qu'issue de secours,
- percement de 100 mm de diamètre du plancher séparatif des lots du rez de chaussée avec ceux du sous-sol pour le passage des canalisations de froid alimentaire.
Les résolutions n° 25-1 et 29 ont été respectivement rejetées et adoptées aux conditions de majorité des articles 24 et 25-1 de la loi du 10 juillet 1965.
Mme [B] [C] et Mme [P] [E] ont assigné à jour fixe, sur requête les y ayant autorisées, le syndicat des copropriétaires, aux fins d'annulation de ces résolutions, ainsi qu'aux fins d'autorisation judiciaire de travaux sous la surveillance de l'architecte de l'immeuble si besoin était.
Par jugement du tribunal de grande instance de Paris en date du 29 janvier 2015, Mme [C] et Mme [E] ont été admises en leur demande de contestation de la résolution n° 25-1 pour avoir été adoptée à des conditions de majorité irrégulières, déboutées de leur contestation formée à l'encontre de la résolution n° 29, déclarées recevables et fondées en leur demande d'autorisation judiciaire de travaux, en ce qu'ils portaient sur l'aménagement des vitrines en façade sans toucher à la structure porteuse de l'immeuble, pose d'une enseigne à plat et d'une enseigne drapeau, remplacement du store existant suivant les plans descriptifs joints à la convocation à l'assemblée générale du 20 juin 2014 et conformément aux autorisations administratives obtenues, et autorisation d'utiliser la porte existante donnant sur la cour de l'immeuble en tant qu'issue de secours, sous réserve de la modification de son sens d'ouverture; conformément aux préconisation de l'expert [W] au terme de son rapport du 18 novembre 2014, le tout à leurs frais et sous le contrôle de l'architecte de l'immeuble, et enfin déboutées de leur demande d'autorisation judiciaire de travaux quant au surplus des travaux réclamés.
Ce jugement a été confirmé en toutes ses dispositions par arrêt de la cour d'appel de Paris du 28 juin 2017. Le pourvoi formé par le syndicat des copropriétaires à l'encontre de cette décision a été rejeté par arrêt de la 3ème chambre civile de la cour de cassation du 6 septembre 2018.
Une assemblée générale spéciale s'est tenue le 9 février 2015 à la suite du dépôt du rapport d'expertise judiciaire et du prononcé du jugement du 29 janvier 2015, ayant eu pour objet essentiel de donner mandat au syndic, ou à son conseil, de se voir communiquer les documents et informations techniques concernant l'exécution, en conformité avec les préconisations de l'expert, des travaux judiciairement autorisés.
Après assignation délivrée au syndicat des copropriétaires par Mme [B] [C] et Mme [P] [E] aux fins d'annulation de cette assemblée générale, objet de la présente procédure, une assemblée générale spéciale s'est tenue le 23 juin 2015 sur le même ordre du jour, qui a de même été contestée.
Par acte d'huissier de justice en date du 29 mars 2016, le syndicat des copropriétaires a assigné Mme [B] [H] veuve [C] et Mme [P] [C] épouse [E], ainsi que la société [J] Proximité France, en ouverture du rapport d'expertise de M. [W], en vue de les voir déclarer responsables des désordres constatés.
Cette instance, enrolée sous le n° de RG 16/05299, a donné lieu à un jugement du tribunal judiciaire de Paris le 30 juin 2022. Un appel de cette décision est actuellement pendant devant la cour d'appel de céans.
* Par acte d'huissier de justice du 21 mai 2015, Mme [B] [H] veuve [C] et Mme [P] [C] épouse [E] ont assigné le syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [Adresse 5], représenté par son syndic, la société Cabinet [N], aux fins de voir annuler, dans son ensemble, l'assemblée générale spéciale tenue le 9 février 2015, et voir condamner le syndicat des copropriétaires aux dépens ainsi qu'au paiement de la somme de 2.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile, avec exécution provisoire du jugement à intervenir.
Par acte d'huissier de justice du 14 septembre 2015, elles ont assigné le même syndicat des copropriétaires, représenté par son syndic, aux fins de voir annuler, dans son ensemble, l'assemblée générale spéciale tenue le 23 juin 2015, ordonner la jonction de cette instance avec celle inscrite au rôle sous le n° RG 15/07047, et voir condamner le syndicat des copropriétaires aux dépens ainsi qu'au paiement de la somme de 2.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile, avec exécution provisoire du jugement à intervenir.
Par acte d'huissier de justice du 11 avril 2017, elles ont assigné la société par actions simplifiée Carrefour Proximité France aux fins de l'entendre condamner à leur payer la somme de 10.000 € à titre de dommages-intérêts, ordonner la jonction de cette instance avec celle inscrite au rôle sous le n° RG 15/07047, et voir condamner la société [J] Proximité France aux dépens ainsi qu'au paiement de la somme de 5.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile, avec exécution provisoire du jugement à intervenir.
Les trois instances ont été jointes.
Par jugement du 7 novembre 2019, le tribunal judiciaire de Paris a :
- déclaré Mme [C] et Mme [E] irrecevables en leur demande de sursis à statuer dans l'attente de la décision à intervenir dans l'instance n° RG 16/05299,
- débouté la société Carrefour Proximité France de sa demande de sursis à statuer formée aux mêmes fins,
- débouté Mme [C] et Mme [E] de leur demande d'annulation, dans leur ensemble, des assemblées générales de copropriétaires de l'immeuble du [Adresse 5] tenues en date des 9 février et 23 juin 2015,
- débouté Mme [C] et Mme [E] de leur demande d'annulation des résolutions n°3, 4, 5, 6, 7, 8, et 12 de l'assemblée générale des copropriétaires du 9 février 2015,
- annulé la résolution n°9 de cette assemblée générale,
- annulé la résolution n°3 de l'assemblée générale des copropriétaires du 23 juin 2015, en tant qu'elle porte, notamment, réitération dans les mêmes termes de la résolution n°9 de l'assemblée générale du 9 février 2015,
- dit sans objet la demande afin d'annulation des résolutions n° 10 et 11 de l'assemblée générale des copropriétaires du 9 février 2015,
- débouté Mme [C] et Mme [E] de leur demande indemnitaire formée à l'encontre de la société [J] Proximité France,
- débouté le syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [Adresse 5] de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive formée à l'encontre de Mme [C] et Mme [E],
- condamné Mme [C] et Mme [E] in solidum à payer au syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [Adresse 5] la somme de 3.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- débouté les parties de tout autre demande à ce titre,
- condamné in solidum Mme [C] et Mme [E] épouse [E] aux dépens,
- autorisé Maître Montbobier, avocat, à recouvrer directement les dépens dont il aurait été fait l'avance sans avoir reçu provision,
- ordonné l'exécution provisoire.
Mme [C] et Mme [E] ont relevé appel de ce jugement par déclaration remise au greffe le 24 décembre 2019.
La procédure devant la cour a été clôturée le 6 décembre 2023.
PRÉTENTIONS DES PARTIES
Vu les conclusions notifiées le 18 septembre 2020 par lesquelles Mme [B] [H] veuve [C] et Mme [P] [C] épouse [E], appelantes, invitent la cour, au visa des articles 42 de la loi du 10 juillet 1965, 75 de la loi du 10 juillet 1991, à :
- confirmer le jugement en ce qu'il a annulé la résolution n°9 de l'assemblée générale spéciale du 9 février 2015, et n°3 de l'assemblée générale spéciale en tant qu'elle porte, notamment, réitération dans les mêmes termes de la résolution n°9 de l'assemblée générale du 9 février 2015,
- infirmer pour le surplus le jugement en ce qu'il :
les a déclarées irrecevables en leur demande de sursis à statuer dans l'attente de la décision à intervenir dans l'instance n° RG 16/05299,
a débouté la société Carrefour Proximité France de sa demande de sursis à statuer formée aux mêmes fins,
les a déboutées de leur demande d'annulation, dans leur ensemble, des assemblées générales de copropriétaires de l'immeuble du [Adresse 5] tenues en date des 9 février et 23 juin 2015,
les a déboutées de leur demande d'annulation des résolutions n°3, 4, 5, 6, 7, 8, et 12 de l'assemblée générale des copropriétaires du 9 février 2015,
à dit sans objet la demande afin d'annulation des résolutions n° 10 et 11 de l'assemblée générale des copropriétaires du 9 février 2015,
les a déboutées de leur demande indemnitaire formée à l'encontre de la société [J] Proximité France,
les a condamnées in solidum à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 3.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,
les a condamnées in solidum aux dépens, et autorisé Maître Montbobier, avocat, à recouvrer directement les dépens dont il aurait été fait l'avance sans avoir reçu provision,
ordonné l'exécution provisoire,
statuant à nouveau,
- ordonner le sursis à statuer dans l'attente du jugement à intervenir dans l'instance enrôlée devant le tribunal de grande instance de Paris sous le numéro 16/05299,
à défaut,
- annuler l'ensemble de l'assemblée générale spéciale du 9 février 2015 et du 23 juin 2015 celles-ci n'étant pas fondées et étant abusives dans leur principe, et en tout état de cause les résolutions n°3 à 12 de l'assemblée du 9 février 2015 et la résolution n°3 de l'assemblée du 23 juin 2015 (qui réitère l'ensemble de l'assemblée du 9 février 2015),
- condamner la société Carrefour Proximité France à les relever et les garantir de toute condamnation pouvant être prononcée à leur encontre, y compris au titre des frais irrépétibles et des dépens de première instance et d'appel,
- condamner en outre la société [J] Proximité France à leur verser la somme de 10.000 € à titre de dommages intérêts,
- dire qu'il n'y avait pas lieu à exécution provisoire,
- condamner le syndicat des copropriétaires et la société Carrefour Proximité France, à leur payer la somme de 8.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais irrépétibles de première instance et d'appel, aux dépens de première instance et d'appel en application de l'article 699 du même code,
- débouter de plus fort le syndicat des copropriétaires et [J] Proximité France de toutes leurs demandes ;
Vu les conclusions notifiées le 14 octobre 2020 par lesquelles le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 5], intimé ayant formé appel incident, demande à la cour de :
- confirmer la décision sauf en ce qu'elle a :
annulé la résolution 9 de l'AGS du 9 février 2015,
annulé la résolution 3 de l'AGS du 23 juin 2015 qui réitère la résolution 9 de l'AGS du 9 février 2015,
débouté le syndicat des copropriétaires de leur demande de dommages et intérêts,
débouté le syndicat des copropriétaires de toutes autres demandes,
- confirmer que les consorts [C] [E] sont irrecevables à demander le sursis à statuer et, à titre subsidiaire, la dire infondée et en conséquence, les débouter de cette demande,
- confirmer le débouté de Carrefour Proximité France de sa demande de sursis à statuer, et en conséquence rejeter l'appel incident formé sur ce point,
- comme le tribunal, constater que Mmes [C] et [E] ne déterminent pas, dans les 2 AGS des 9 février et 23 juin 2015, les résolutions qui devraient, selon elles, être annulées, et ne justifient pas en quoi elles seraient contraires à l'intérêt collectif,
- confirmer le débouté de Mmes [C] et [E] de toutes leurs demandes, fins et conclusions tendant à voir annuler l'intégralité des AGS du 9 février et 23 juin 2015 alors que notamment certaines résolutions ont depuis été exécutées et que certaines n'ont rien à voir tant avec l'expertise contestée par les [C] que les locaux loués par ces dernières à Carrefour,
- confirmer le débouté de Mmes [C] et [E] de leur demande d'annulation des résolutions 3, 4, 5, 6, 7, 8 et 12 de l'AGS du 9 février 2015,
- confirmer qu'est sans objet la demande d'annulation des résolutions 10 et 11,
- confirmer la condamnation des consorts [C] [E] à payer 3.000 € au syndicat des copropriétaires au titre de l'article 700 outre les dépens,
- réformer le jugement en ce qu'il :
a annulé la résolution 9 de l'AGS du 9 février 2015,
a annulé la résolution 3 de l'AGS du 23 juin 2015 qui réitère la résolution 9 de l'AGS du 9 février 2015,
l'a débouté de sa demande de dommages et intérêts,
l'a débouté de toutes autres demandes,
statuant à nouveau,
- débouter Mmes [C] et [E] de leur demande d'annulation de la résolution 9 de l'AGS du 9 février 2015, et de leur demande d'annulation de la résolution 3 de l'AGS du 23 juin 2015 qui réitère la résolution 9 de l'AGS du 9 février 2015,
- juger que la demande de nullité des AGS 2015 formée par les consorts [C]/[E] ne concerne pas [J], qui n'est pas copropriétaire du syndicat des copropriétaires,
- juger que Carrefour Proximité n'a aucun droit ni titre tant pour s'exprimer sur cette demande formée par les [C] [E] qui concerne exclusivement les 2 AGS de 2015 que pour former une demande de sursis à statuer sur cette demande en nullité des deux assemblées générales 2015,
- renvoyer Mmes [C] & [E] et [J] Proximité France à développer leurs arguments sur le rapport d'expertise devant le tribunal saisi de l'assignation au fond en ouverture du rapport d'expertise (8ème chambre, 2ème section, RG 16/05299),
- condamner solidairement Mmes [C] et [E] à lui payer la somme de 20.000 € à titre de dommages et intérêts,
en tout état de cause,
- débouter Mmes [C] et [E] et [J] de toutes leurs demandes, fins et conclusions,
- débouter Carrefour Proximité France de toute demande formée à son encontre,
- condamner solidairement Mmes [C] et [E] aux dépens avec application de l'article 699 du code de procédure civile, ainsi qu'à lui payer chacune la somme de 7.000 € par application de l'article 700 du même code ;
Vu les conclusions notifiées le 23 juillet 2020 par lesquelles la société par actions simplifiée [J] Proximité France, intimée ayant formé appel incident, invite la cour, au visa des articles 9 et 24 de la loi du 10 juillet 1965, à :
- infirmer le jugement,
statuant à nouveau,
- ordonner le sursis à statuer de l'arrêt à intervenir dans l'attente de la décision qui doit être rendue par le tribunal de grande instance de Paris dans la procédure en ouverture de rapport qui a été enrôlée sous le numéro RG 15/05299,
subsidiairement,
- dire que les résolutions n° 3, 4, 5, 6, 7 et 8 adoptées par l'assemblée générale de la copropriété du 9 février 2015 présentent un caractère abusif et discriminatoire et que Mmes [B] [C] et [P] [E] sont fondées à demander d'en prononcer la nullité,
- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a prononcé l'annulation de la résolution n°9 et dit sans objet les demandes d'annulation des résolutions n°10 et 11 de l'assemblée générale du 9 février,
- débouter Mmes [B] [C] et [P] [E] de leur demande de dommages-intérêts firmulée contre elle,
- condamner Mmes [B] [C] et [P] [E] aux dépens avec application de l'article 699 du code de procédure civile ;
SUR CE,
La cour se réfère, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens échangés et des prétentions des parties, à la décision déférée et aux dernières conclusions échangées en appel ;
En application de l'article 954 alinéa 2 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions ;
Sur la demande de sursis à statuer
Mme [C] et Mme [E] font valoir que c'est à tort que le tribunal a estimé qu'elles auraient dû conclure sur ce point avant toute défense au fond dans la mesure où, lorsqu'elles ont engagé l'action en cause, le syndicat des copropriétaires n'avait pas encore assigné au fond en ouverture de rapport d'expertise ;
Elles excipent d'un risque de contrariété de décisions entre la présente instance afin d'annulation des assemblées générales des 9 février et 23 juin 2015 et l'instance engagée par le syndicat des copropriétaires en ouverture du rapport d'expertise de M. [W] ;
La société Carrefour Proximité France, qui forme la même demande de sursis à statuer soutient que les deux juridictions se trouvent saisies de procédures ayant trait aux mêmes travaux d'aménagement du magasin, en ce que les résolutions n° 3 à 9 portent sur des aspects techniques de ces travaux qui sont en lien direct avec le rapport de M. [W] ;
Le syndicat des copropriétaires soulève l'irrecevabilité de cette demande au motif que Mmes [C] et [E] l'ont formulée dans leurs dernières conclusions devant le tribunal, signifées en mars 2019, et ne l'ont pas soulevé in limine litis, alors que l'assignation en ouverture de rapport a été délivrée en mars 2016 ;
Il fait valoir sur le fond que les instances en cause, aux fins d'une part d'annulation de deux assemblées générales, d'autre part de réparation des préjudices subis par le syndicat des copropriétaires et d'exécution de travaux destinés à mettre fin aux désordres subis dans les parties communes à raison des travaux réalisés dans les locaux donnés à bail à la société [J] Proximité France, ont un objet distinct et indépendant l'un de l'autre, en sorte que la décision à intervenir dans l'instance en annulation n'est pas de nature à affecter la décision à intervenir dans l'instance en indemnisation du syndicat des copropriétaires ;
Le tribunal a constaté, et ce point n'est pas contesté, qu'aucune fin de non-recevoir n'a été soulevée à l'encontre de la demande de sursis à statuer formée avant tout moyen de fond par la société Carrefour Proximité France dans ses premières écritures en défense notifiées le 9 février 2018 ;
L'article 73 du code de procédure civile dispose que constitue une exception de procédure tout moyen qui tend, soit à faire déclarer la procédure irrégulière ou éteinte, soit à en suspendre le cours ;
L'article 74 du même code dispose en son premier alinéa que les exceptions doivent, à peine d'irrecevabilité, être soulevées simultanément et avant toute défense au fond ou fin de non-recevoir, et qu'il en est ainsi alors même que les règles soulevées au soutien de l'exception seraient d'ordre public ;
En application de ces dispositions, la demande tendant à faire suspendre le cours de l'instance, qu'elle émane du demandeur ou d'un défendeur, est une exception de procédure qui doit être présentée, à peine d'irrecevabilité, avant toute défense au fond ou fin de non-recevoir de son auteur ;
L'instance inscrite au rôle sous le n° RG 16/05299 a été engagée sur l'assignation délivrée à Mmes [C] et [E] ainsi qu'à la société [J] Proximité France par le syndicat des copropriétaires le 29 mars 2016 ; elle a donné lieu à un jugement rendu par le tribunal judiciaire de Paris le 30 juin 2022, lequel a été frappé d'appel
Mmes [C] et [E] ne contestent pas avoir sollicité, pour la première fois et dans la forme d'une demande subsidiaire, au terme de leurs écritures notifiées le 28 mars 2019, le prononcé d'un sursis à statuer dans l'attente de la décision à intervenir dans cette instance, alors qu'elles avaient précédemment conclu au fond, tant dans la présente instance que dans l'instance n° 16/05299 ;
Par conséquent, le jugement doit être confirmé en ce qu'il a déclaré leur demande de sursis à statuer irrecevable ;
Cette demande de sursis à statuer est donc irrecevable ;
Sur le fond de l'exception soulevée par la société Carrefour, il doit être relevé, comme l'a fait le tribunal, que Mmes [C] et [E] et le syndicat des copropriétaires ne forment que des demandes indemnitaires à l'encontre de cette société ; la société [J] n'indique pas en quoi la décision à intervenir sur appel du jugement du 30 juin 2022, et portant sur un litige relatif à l'indemnisation d'un préjudice allégué par le syndicat des copropriétaires en raison des travaux effectués dans les locaux loués à la société Carrefour, serait de nature à affecter le sens de la décision à intervenir dans la présente instance portant sur des demandes d'annulation d'assemblées générales ;
Le tribunal a justement retenu que le risque allégué de contrariété de décisions n'était pas démontré ; le jugement doit être confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de sursis à statuer formée par la société [J] ;
Sur la demande afin d'annulation comme irrégulièrement convoquée de l'assemblée générale du 9 février 2015
Mmes [C] et [E] soutiennent que l'assemblée générale du 9 février 2015 est entachée de nullité dans son ensemble, dès lors que Mme [E], nue-copropriétaire, n'y a pas été convoquée et n'y a pas été davantage représentée, alors qu'usufruitier et nu-propriétaire doivent être convoqués à l'assemblée générale ;
Elles font valoir que le juge des référés a constaté l'existence d'un mandataire commun par ordonnance du 18 juin 2015 et que la désignation de ce mandataire, en la personne de Mme [C], était parfaitement explicite dans le courrier remis lors de l'assemblée générale du 20 juin 2014 par le mari de Mme [E], mais que le syndic devait nécessairement convoquer le nu-propriétaire et l'usufruitier puisqu'il ne reconnaissait pas la désignation de Mme [C] comme mandataire commun de la propriété démembrée de cette dernière et sa fille Mme [E] ;
Le syndicat des copropriétaires allègue que les appelantes ont dissimulé au syndic, jusqu'au 27 novembre 2014, le démembrement de propreté affectant leurs lots, date à laquelle elles ont communiqué l'acte notarié de donation de la nue-propriété de certains lots de Mme [C] à Mme [E], et que ce n'est que dans le cadre de la procédure judiciaire de désignation d'un mandataire commun sur l'initiative du syndic qu'elles ont produit un mandat, daté du 5 juin 2015, désignant Mme [C] comme mandataire commun et 'réitérant le mandat remis au syndic le 20 juin 2014' ;
L'article 23 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1965, dans sa rédaction applicable au litige, dispose qu'en cas d'indivision ou de démembrement du droit de propriété, les intéressés doivent être représentés par un mandataire commun qui est, à défaut d'accord, désigné par le président du tribunal de grande instance à la requête de l'un d'eux ou du syndic ;
En application de ces dispositions, à la date de convocation de l'assemblée générale du 9 février 2015, dans le cas de lots grevés de droits de propriété démembrés, mais à défaut de notification du mandataire commun amiablement ou judiciairement désigné, il appartenait au syndic de convoquer à l'assemblée générale chacun des titulaires de droits sur les lots démembrés, à peine de nullité de l'assemblée dans son ensemble ;
Il est constant que suivant acte reçu en date du 2 décembre 1997, Mme [C] a fait donation à Mme [E] de la nue-propriété des lots alors dénommés n° 2, 22, 31 et 58 de l'état descriptif de division, devenus les lots n° 102, 122, 125 et 156 selon modificatif au règlement de copropriété et constitués, dans le bâtiment A, d'un local commercial en rez de chaussée, au 7ème étage d'une chambre sur rue, au sous-sol d'une cave communiquant avec le lot n° 2, et dans le bâtiment C au rez de chaussée, de la totalité du bâtiment à usage de chambre froide ;
En premier lieu, il doit être rappelé, comme l'a fait le tribunal, que la seule information reçue par le syndic du démembrement de propriété d'un ou plusieurs lots, sans qu'il ait été satisfait aux exigences de formes prévues par l'article 6 du décret du 17 mars 1967 combiné aux articles 64 et 65 du même décret en leurs dispositions en vigueur à la date de l'assemblée querellée, serait de nature à rendre ce démembrement inopposable au syndicat des copropriétaires ;
Par ailleurs, chaque copropriétaire ou titulaire d'un droit d'usufruit ou de nue-propriété est tenu de notifier au syndic son domicile réel ou élu, ou s'il le souhaite son numéro de télécopie ; les notifications et mises en demeure prévues par l'article 64 sont valablement faites au dernier domicile ou au dernier numéro de télécopie notifié au syndic ;
Il convient de reprendre les faits ainsi exposés par les premiers juges :
'Au cas d'espèce, Mme [B] [H] veuve [C] et Mme [P] [C] épouse [E] n'ont fait part, pour la première fois, de leur qualité d'usufruitière et de nue-propriétaire des lots susvisés en vertu de la donation précitée, que dans le cadre de l'instance en annulation de l'assemblée générale du 17 octobre 2012 ;
L'assignation délivrée le 18 janvier 2013 au syndicat, représenté par son syndic en exercice, qui fait certes mention du titre translatif de nue-propriété au bénéfice de Mme [P] [C] épouse [E] sur les lots donnés à bail à la société Carrefour Proximité France, ainsi que le domicile de chacun des titulaires de droits réels sur ces lots, mais non la dénomination exacte de ces lots, ne vaut pas à elle seule notification au syndic de la constitution ou de la cession de ces droits d'usufruit et de nue-propriété au sens de l'article 6 du décret du 17 mars 1967, dès lors que Mme [B] [H] veuve [C] conservait la qualité de titulaire de droits en pleine propriété sur d'autres lots du même immeuble non donnés à bail affectés de 1.716/10.003 tantièmes de parties communes, et que les écritures notifiées dans le cadre de cette instance n'explicitaient pas, voir démentaient l'existence de ce démembrement de propriété, et ne désignaient pas, au surplus, autrement que de façon allusive et par l'indication de ce qu'ils représentaient 25 % des tantièmes de copropriété, les lots objets de ce démembrement ;
Le syndic demandait ainsi à Mmes [C] et [E], les 16 et 19 juin 2014, en vue de l'assemblée générale convoquée à la date du 20 juin 2014, de lui faire connaître si les lots donnés à bail à la société [J] Proximité France faisaient ou non l'objet d'un démembrement de propriété ;
Mme [B] [C] lui répondait le même jour, au terme d'une correspondance remise en séance et revêtue de la mention 'bon pour accord' suivie de la signature de Mme [P] [E], que le démembrement de propriété des lots anciennement numérotés 2, 22, 31 et 58 (et devenus n° 102, 122, 156 au terme du modificatif au règlement de copropriété en date du 22 novembre 2006) ne pouvait être ignoré du cabinet [N], quand bien même le notaire instrumentaire n'aurait-il pas procédé à une notification non retrouvée dans les archives de son étude, et qu'elle trouvait 'étrange' que cette 'situation [existant] depuis 17 ans, ait appelé de sa part des interrogations' ;
Elle ajoutait qu''en accord avec sa fille', Mme [P] [E] née [C], elle n'avait 'jamais cessé de les représenter en assemblée générale de copropriété' ;
Titulaire d'un pouvoir délivré par Mme [C], M. [E] n'en était pour autant admis à voter, au titre de ce pouvoir, que pour les lots détenus par sa mandante en pleine propriété, soit à hauteur de 1.716/10.003 tantièmes' ;
Le tribunal en a justement déduit qu'à défaut même de notification au syndic par le notaire instrumentaire du démembrement de propriété des lots n° 102, 122, 125 et 156, cette notification résultait bien de l'assignation délivrée le 18 janvier 2013 complétée par la lettre remise en séance le 20 juin 2014 sous la signature de Mme [C] et de Mme [E], qui font mention des lots donnés en nue-propriété et grevés d'usufruit, de l'identité des titulaires de droits sur ces lots, et de leur domicile réel ou élu ;
Il en a également justement déduit que les appelantes ne pouvaient reprocher au syndicat des copropriétaires de ne pas avoir convoqué Mme [E] à l'assemblée générale du 9 février 2015, alors que leur correspondance du 20 juin 2014 constitue bien le rappel de la désignation antérieure de Mme [C] en qualité de mandataire commun du démembrement de propriété ;
C'est donc à juste titre que le tribunal a retenu que le syndic, ayant bien reçu notification de mandataire commun avant la convocation de l'assemblée générale tenue le 9 février 2015, était fondé, comme il l'a fait, à notifier cette convocation à Mme [C] seule, exclusivement admise a participer au vote des résolutions soumises à l'ordre du jour de cette assemblée, tant en sa qualité de mandataire commun du démembrement de propriété que de titulaire de droits en pleine propriété sur les lots non donnés à bail, et qu'il a rejeté la demande d'annulation de l'assemblée générale du 9 février 2015 de ce chef ;
Le jugement sera donc confirmé sur ce point ;
Sur les demandes d'annulation des assemblées générales des 9 février et 23 juin 2015, et subsidiairement des résolutions n°3 à 12, comme étant infondées et abusives en leur principe
A titre liminaire, il sera rappelé les termes du jugement dont appel ci-après :
'L'assemblée générale tenue du 9 février 2015 a adopté aux conditions de majorité de l'article 25.1 de la loi du 10 juillet 1965 ses résolutions n°3 à 12 ;
Ces résolutions ont eu pour objet essentiel de donner mandat au syndic, ou à son conseil :
1° de se voir communiquer par les copropriétaires bailleresses, faute de les avoir obtenues de leur locataire commercial dans le délai précédemment imparti par le syndic, les documents et informations techniques concernant l'exécution des travaux de façade, la création d'une pente inclinée, la ventilation du sous-sol, en tenant compte des préconisations de l'expert judiciaire concernant la création d'une VMC rendue nécesssaire par la suppression de deux soupiraux, et l'aménagement du système de production de froid et de ses canalisations en conformité avec les règles de l'art, la modification du sens d'ouverture de la porte de sortie de secours sur cour, le renforcement de la rive de plancher consécutif à l'agrandissement de la trémie entre rez de chaussée et sous-sol du magasin, et la remise en état de la porte de sortie donnant dans le hall de l'immeuble rendue conforme aux prescriptions en matière de sécurité incendie,
2° de donner mandat au syndic d'assigner Mmes [C] et [E] aux fins d'annulation des résolutions numéros 4 et 5 de l'assemblée générale du 14 décembre 2006 et 22 de l'assemblée générale du 2 avril 2009 en raison de leur adoption à des conditions de majorité irrégulières par suite du non-respect, par les titulaires de droit de propriété démembrées, des exigences de notification édictées par les articles 25 de la loi du 10 juillet 1905 et 5 du décret du 17 mars 1967 ;
L'assemblée générale spéciale du 23 juin 2015 a soumis au vote des copropriétaires et dans les mêmes termes, au terme de sa résolution n°3, l'intégralité des résolutions portées à l'ordre du jour de l'assemblée du 9 février 2015 ;
Cette même résolution n°3 a repoussé au 10 septembre 2015 le délai initialement fixé au 25 avril 2015 par les résolutions n°3 et 11 de l'assemblée du 9 février 2015 pour communication au syndic du dossier comportant les éléments techniques sollicités du locataire commercial concernant les travaux envisagés ;
L'assemblée susvisée a enfin donné mandat au syndic, au terme de sa résolution n° 2 d'introduire en justice toute procédure nécessaire à l'égard des dames [C] et [E] pour .../... obtenir les éléments et informations techniques mentionnés dans le rapports d'expertise aux frais et charges des dames [C] et [E] et .../... obtenir de façon générale réparation de tous les préjudices subis' ;
Sur la recevabilité à agir de la société Carrefour
Le syndicat des copropriétaires fait valoir que la société [J] n'a ni droit, ni titre, ni compétence pour argumenter et plaider sur la demande d'annulation des assemblée générales ;
L'article 42 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1965, dans sa version applicable au litige, dispose que les actions qui ont pour objet de contester les décisions des assemblées générales doivent, à peine de déchéance, être introduites par les copropriétaires opposants ou défaillants, dans un délai de deux mois à compter de la notification desdites décisions qui leur est faite à la diligence du syndic, dans un délai de deux mois à compter de la tenue de l'assemblée générale ;
Il en résulte que l'action en contestation d'une assemblée générale est une action attitrée qui ne peut être exercée par les tiers ne justifiant pas, à la date de tenue de l'assemblée, de leur qualité de copropriétaire ;
Par ailleurs, il résulte de l'article 367 du code de procédure civile que la jonction d'instances ne crée pas, à elle seule, de liens juridiques entre les parties en cause ;
Dès lors, et contrairement à ce qu'a retenu le tribunal, la société Carrefour n'a pas qualité à agir en annulation des assemblée générales, même pour la défense de ses propres droits ;
Ses demandes doivent être déclarées irrecevables et le jugement sera infirmé sur ce point ;
Il doit néanmoins être rappelé que sa demande visant à dire que les résolutions n° 3, 4, 5, 6, 7 et 8 adoptées par l'assemblée générale de la copropriété du 9 février 2015 présentent un caractère abusif et discriminatoire et que Mmes [B] [C] et [P] [E] sont fondées à demander d'en prononcer la nullité ne constitue pas une prétention au sens des dispositions du code de procédure civile ;
Sur la demande d'annulation des assemblées générales des 9 février 23 juin 2015 dans leur ensemble de Mmes [C] et [E]
Mmes [C] et [E] soutiennent que les résolutions adoptées par les assemblées générales spéciales du 9 février 2015 et du 23 juin 2015 ont toutes pour postulat que le rapport d'expertise déposé par M. [W] serait exempt de toute critique, ce qu'elles contestent ; elles excipent du comportement intrusif du syndicat des copropriétaires qui n'a eu de cesse de vouloir obtenir des informations sur leur locataire commercial et allèguent que ces résolutions démontrent la volonté de la copropriété de nuire à la société [J] ;
Elles estiment que les résolutions dont il est demandé l'annulation leur causent un grief puisqu'elles imposent des travaux préconisés par l'expert, alors que ces travaux devraient être validés par les juges du fond dans le cadre de l'instance en ouverture de rapport et non par voie d'assemblée générale ; elles invoquent à ce titre un détournement de procédure, et qu'elles ont pour but de contrer le jugement rendu le 29 janvier 2015 ;
Le syndicat des copropriétaires allègue que les appelantes ne justifient pas en quoi les décisions prises constitueraient un abus de majorité et souligne que le commerce de la société Carrefour n'a pas été entravé ;
L'article 42 de la loi du 10 juillet 1965 prévoit que 'les actions qui ont pour objet de contester les décisions des assemblées générales doivent, à peine de déchéance, être introduites par les copropriétaires opposants ou défaillants, dans un délai de deux mois à compter de la notification desdites décisions qui leur est faite à la diligence du syndic, dans un délai de deux mois à compter de la tenue de l'assemblée générale' ;
Comme l'a rappelé le tribunal, une décision d'assemblée générale ne peut être annulée pour abus de majorité que s'il est établi qu'elle est contraire aux intérêts collectifs des copropriétaires ou qu'elle a été prise dans le seul but de favoriser les intérêts personnels des copropriétaires majoritaires au détriment des copropriétaires minoritaires, voire lorsqu'elle rompt l'égalité entre les copropriétaires ; une décision non contraire aux intérêts collectifs des copropriétaires ne constitue pas un abus de droit ; de même, une résolution votée sans intention de nuire n'est pas une décision abusive ; il incombe à celui qui allègue l'abus de majorité de la décision de l'assemblée générale de rapporter la preuve du caractère abusif de celle-ci, lequel ne peut en revanche être écarté, comme le soutient le syndicat défendeur, par le motif que les résolutions querellées auraient recueilli une majorité qualifiée de copropriétaires non liés d'intérêts entre eux ;
Par ailleurs, la demande d'annulation, dans son ensemble, d'une assemblée générale, fondée sur l'abus de majorité, ne peut être admise que si l'ensemble des résolutions adoptées sont indistinctement viciées par le même abus de droit ;
En l'espèce, l'assemblée générale spéciale du 9 février 2015 s'est vue soumettre un point d'information et a adopté 11 résolutions, dont celles querellées n° 3 à 12 ; Mme [C], représentant 2.302 tantièmes, c'est-à-dire ceux de ses lots en pleine propriété et ceux des lots dont elle est propriétaire avec Mme [E], était absente et non représentée ;
Comme l'a relevé le tribunal, n'est ni établi, ni davantage soutenu, que les résolutions n°1-1, 1-2, 1-3, et 1-4 portant désignation des membres du bureau et du secrétaire de séances aient été adoptées en méconnaissance de l'intérêt collectif et dans le seul but de favoriser les intérêts personnels des copropriétaires majoritaires ;
L'assemblée générale spéciale du 23 juin 2015 a adopté 3 résolutions, dont la résolution n° 3 par laquelle elle a confirmé le vote de l'intégralité des résolutions de l'assemblée générale du 9 février 2015 mais repoussé le délai mentionné aux résolutions n° 3 et 11 ;
Il n'est pas davantage établi ni soutenu, que les résolutions n°1-1, 1-2, 1-3, et 1-4 de cette assemblée, portant désignation des membres du bureau et du secrétaire de séance aient été adoptées en méconnaissance de l'intérêt collectif et dans le seul but de favoriser les intérêts personnels des copropriétaires majoritaires ;
En outre, comme l'ont relevé les premiers juges, il doit être constaté que Mme [C], agissant tant en qualité de mandataire commun de l'indivision des lots commerciaux, que de titulaire de droits en pleine propriété sur d'autres lots, a voté en faveur de ces résolutions, et serait donc en toute hypothèse irrecevable à contester cette assemblée générale ;
Par conséquent, le tribunal a justement considéré que la demande d'annulation, dans leur ensemble, des assemblées générales des 9 février et 23 juin 2015 devait être rejetée ; le jugement sera confirmé sur ce point ;
Sur la demande d'annulation de résolutions des assemblées générales des 9 février 23 juin 2015
Le tribunal a rappelé les points suivants :
'Au terme du jugement précité du 9 janvier 2015, Mme [B] [H] veuve [C] et Mme [P] [C] épouse [E] ont été autorisées, au bénéfice de l'exécution provisoire, et par suite du rejet de la résolution n°29 portée à l'ordre du jour complémentaire de l'assemblée générale du 20 juin 2014, à réaliser les travaux :
- d'aménagement des vitrines en façade, sans toucher à la structure porteuse de l'immeuble,
- de pose d'une enseigne à plat et d'une enseigne drapeau,
- de remplacement du store existant suivant les plans descriptifs joints a la convocation à l'assemblée générale du 20 juin 2014 et conformément aux autorisations administratives obtenues,
- de transformation de la porte existante donnant sur la cour de l'immeuble en tant qu'issue de secours, sous réserve de la modification de son sens d'ouverture, conformément aux préconisations de l'expert [W] au terme de son rapport du 18 novembre 2014, le tout à leurs frais et sous le contrôle de l'architecte de l'immeuble ;
Il est ainsi constant que les travaux judiciairement autorisés affectaient les parties communes et modifiaient l'aspect extérieur de l'immeuble, et que les modalités techniques de leur réalisation, précédemment soumises à l'examen de l'expert [W] en l'état d'imprécision du projet sur ce point, ont été subordonnées pour une part, aux préconisations de l'expert judiciaire au terme de son rapport déposé depuis la décision de refus de l'assemblée générale du 20 juin 2014, et pour le surplus au contrôle de l'architecte de la copropriété' ;
¿ Sur la résolution n° 3 de l'assemblée générale du 9 février 2015
Il y a lieu d'adopter les motifs adoptés par le tribunal, qui en a à juste titre déduit que le seul mandat conféré au syndic de se voir communiquer des documents techniques sur des travaux de façade à réaliser ne préjugeait pas d'une décision future relevant du pouvoir souverain de l'assemblée, et n'avait pas été adopté dans le but exclusif de satisfaire les intérêts des copropriétaires majoritaires au détriment des copropriétaires minoritaires, bailleurs de locaux commerciaux, et ne caractérise ainsi aucune atteinte à l'intérêt collectif ;
Le jugement doit par conséquent être confirmé en ce qu'il a rejeté la demande aux fins d'annulation de la résolution n°3 adoptée par l'assemblée du 9 février 2015 ;
¿ Sur la résolution n° 4 de l'assemblée générale du 9 février 2015
Il y a lieu d'adopter les motifs adoptés par le tribunal, qui en a justement déduit que cette résolution n'avait pas été adoptée dans le but exclusif de satisfaire les intérêts des copropriétaires majoritaires au détriment des copropriétaires minoritaires, bailleurs de locaux commerciaux, et ne caractérise ainsi aucune atteinte à l'intérêt collectif, après avoir souligné ce les travaux concerné n'avait pas été autorisé par le jugement du 29 janvier 2015 et ayant constaté que les documents sollicités, contrairement à ce qu'affirmait la société [J], n'avaient pas été remis ;
Le jugement doit par conséquent être confirmé en ce qu'il a rejeté la demande aux fins d'annulation de la résolution n°4 adoptée par l'assemblée du 9 février 2015 ;
¿ Sur la résolution n° 5 de l'assemblée générale du 9 février 2015
Mmes [C] et [E] allèguent que leur preneur, la société Carrefour, a proposé dans le cadre de l'expertise une solution permettant de rétablir une ventilation normale mais que la copropriété l'a ignorée ;
Il y a lieu d'adopter les motifs adoptés par le tribunal, qui a justement relevé que Mmes [C] et [E] ne démontraient pas que cette résolution avait été votée par un abus de majorité ;
Le jugement doit par conséquent être confirmé en ce qu'il a rejeté la demande aux fins d'annulation de la résolution n° 5 adoptée par l'assemblée du 9 février 2015 ;
¿ Sur les résolutions n° 6 et 8 de l'assemblée générale du 9 février 2015
Mmes [C] et [E] font valoir que le tribunal n'a pas pris en compte le fait que les travaux avaient déjà été effectués et qu'une telle résolution ne pouvait être considérée comme pertinente ;
Les appelantes n'invoquent ni ne démontrent aucun abus de majorité dans le vote de ces résolutions, n'invoquant que leur manque de pertinence, dont la cour n'a pas à juger, dès lors, comme l'a justement relevé le tribunal, que l'objet de ces résolutions, la réalisation de travaux et la communication de documents, relevait des pouvoirs d'administration et de gestion des parties communes ;
Pour ces motifs, et ceux pertinents et circonstanciés des premiers juges que la cour adopte, le jugement doit être confirmé en ce qu'il a rejeté les demandes d'annulation des résolutions n° 6 et 8 de l'assemblée générale du 9 février 2015 ;
¿ Sur la résolution n° 7 de l'assemblée générale du 9 février 2015
Mmes [C] et [E] allèguent que la société [J] n'a pas modifié les dimensions de la trémie de l'escalier d'accès au sous-sol, mais a visiblement uniquement refait à neuf l'escalier qui était vétuste, de sorte qu'il n'y a pas lieu à remise en état, contrairement à ce que soutient la copropriété dans la résolution n° 7 ;
Il y a lieu d'adopter les motifs adoptés par le tribunal, qui en a justement déduit que la résolution litigieuse, votée dans l'exercice des pouvoirs d'administration des parties communes légalement dévolus au syndicat des copropriétaires, ne caractérisait aucune atteinte à l'intérêt collectif ;
Le jugement doit par conséquent être confirmé en ce qu'il a rejeté la demande aux fins d'annulation de la résolution n°7 adoptée par l'assemblée du 9 février 2015 ;
¿ Sur la résolution n° 9 de l'assemblée générale du 9 février 2015
Mmes [C] et [E] font valoir que la société Carrefour ne dispose d'aucun compteur d'eau et que le règlement de copropriété stipule que la consommation d'eau est facturée pour l'ensemble des lots au prorata des tantièmes ;
Le syndicat des copropriétaires soutient qu'il existe un compteur divisionnaire commun installé pour le fonds de commerce loué par les appelantes, qui lui permet de refacturer à ces dernières la consommation d'eau de leur locataire, et que le relevé de compteur a d'ailleurs été produit en cours d'expertise ; il estime que c'est à tort que le tribunal a annulé la résolution n° 9 et qu'il a ainsi statué sur un point relevant de l'instance en ouverture de rapport ;
La résolution n° 9 avait pour objet, au vu du constat par l'expert judiciaire du remplacement de la tuyauterie en plomb existante par une tuyauterie en cuivre et de son raccordement au compteur divisionnaire installé en sous-sol, de mettre en demeure Mmes [C] [E] de communiquer au syndic les consommations d'eau de leur locataire commercial depuis son entrée dans les lieux en janvier 2013, et donner mandat au syndic d'engager en cas de besoin toute voie de droit à cet effet, y compris d'agir en justice ;
Le tribunal a relevé que la répartition d'eau froide devait, en application du règlement de copropriété, être réalisée au prorata des tantièmes de parties communes, et qu'il apparaissait que le compteur divisionnaire n'était pas en état de fonctionnement ;
Toutefois, c'est à tort qu'il en a déduit que cette résolution, prise dans l'objectif d'imputer en charges communes spéciales ces consommations d'eau, devait être annulée, dès lors que, sans égard pour la pertinence de l'objectif au regard des stipulations du règlement de copropriété, aucun abus de majorité n'a pu être démontré en ce qu'il n'est pas établi que cette résolution a été prise dans le seul but de favoriser les intérêts personnels des copropriétaires majoritaires au détriment des copropriétaires minoritaires ;
Par conséquent, le jugement doit être infirmé en ce qu'il a annulé la résolution n° 9 de l'assemblée générale du 9 février 2015 ;
¿ Sur la résolution n° 10 de l'assemblée générale du 9 février 2015
Comme l'a relevé le tribunal, cette résolution avait pour seuls objets d'une part de constater qu'aucun renseignement technique, ni plan, ni descriptif, n'était fourni sur ces travaux et d'autre part de constater que l'assemblée générale ne disposait d'aucun dossier technique ni justification pour permettre un vote éclairé sur les travaux envisagés d'agrandissement de deux grilles en façade et de percement de 100 mm du plancher séparatif des lots en rez-de-chaussée et en sous-sol pour passage des canalisations de froid alimentaire ;
Si l'absence d'effet décisoire de cette résolution emporte nécessairement l'absence de tout abus de majorité, il n'en reste pas moins qu'elle a fait l'objet d'un vote ;
Dès lors, c'est à tort que le tribunal a jugé que la demande d'annulation de cette résolution était sans objet ;
Aucun abus de majorité n'étant démontré, la demande doit être rejetée ; le jugement sera infirmé sur ce point ;
¿ Sur la résolution n° 11 de l'assemblée générale du 9 février 2015
Le tribunal a justement jugé que le rejet de la demande d'annulation des résolutions précédentes de l'assemblée générale du 9 février 2015 rend sans objet la demande afin d'annulation de sa résolution n°11, celle-ci ayant eu pour objet de donner mandat au syndic ou à son conseil de se faire communiquer par la société [J], par l'entremise de leurs bailleresses, avant le 25 avril 2015, les documents et renseignements techniques visés dans ces résolutions, estimés indispensables au vote éclairé de l'assemblée ;
Le jugement doit être confirmé sur ce point ;
¿ Sur la résolution n° 12 de l'assemblée générale du 9 février 2015
Cette résolution vise à valider le mandat donné en urgence au syndic, le cabinet [N], et à l'avocat du syndicat des copropriétaires, Maître [Z], d'assigner les appelantes en annulation des résolutions n° 4 et 5 de l'assemblée générale du 14 décembre 2006 ;
Le fait d'autoriser le syndic à agir en justice contre des copropriétaires ne peut, en lui-même, être constitutif d'un abus de majorité, et Mmes [C] et [E], ne démontrent pas en quoi cette résolution aurait été votée dans le seul but de favoriser les intérêts personnels des copropriétaires majoritaires au détriment des copropriétaires minoritaires ;
Le jugement doit dès lors être confirmé en ce qu'il a rejeté la demande d'annulation de la résolution n° 12 de l'assemblée générale du 9 février 2015 ;
¿ Sur la résolution n° 3 de l'assemblée générale du 23 juin 2015
L'ensemble des demandes d'annulation des résolutions de l'assemblée générale du 9 février ayant été rejeté, il y a lieu de rejeter, pour les mêmes motifs, la demande d'annulation de la résolution n° 3 de l'assemblée générale du 23 juin 2015, laquelle, comme cela a été exposé, vise à confirmer le vote de l'intégralité des résolutions votées lors de l'assemblée générale spéciale du 9 février 2015 ;
Le jugement doit être infirmé sur ce point ;
Sur la demande indemnitaire formée par Mme [B] [H] veuve [C] et Mme [P] [C] épouse [E] à l'encontre de la société Carrefour Proximité
Mmes [C] et [E] allèguent que la médiation judiciaire ordonnée dans le cadre de l'instance n° RG 16/05299 engagée par le syndicat des copropriétaires en ouverture du rapport d'expertise ayant échoué, faute de propositions de règlement amiable formulées par leur locataire commercial, elles sont fondées à être indemnisées du préjudice causé par leur locataire qui, n'ayant pas satisfait aux demandes de communication au syndic de documents et renseignements techniques qu'elles lui ont transmises, et par son inertie, les ont exposées à subir de multiples instances, mises en demeure, et sommations, sans préjudice des frais abusivement engagés par le syndicat lui-même, notamment après désignation d'expert à son initiative ;
La société [J] fait valoir qu'elle n'est pas à l'origine de la multiplication de ces procédures, ni de l'introduction de la présente instance ;
Le tribunal a justement relevé les points suivants :
'Il résulte de l'article 48 du modificatif au règlement de copropriété que les baux consentis par les copropriétaires doivent comporter l'obligation pour les locataires de se conformer à toutes les prescriptions du règlement, dont ils auront pris connaissance et qu'ils s'engageront à exécuter, cette obligation pesant sur les copropriétaires concernés ou leur mandataire ;
Il résulte ensuite du bail renouvelé cédé à la société Carrefour Proximité France que dans le cadre de son activité autorisée, le preneur doit obtenir, sous son entière responsabilité et à sa charge exclusive, toutes les autorisations nécessaires, administratives, de la copropriété, ou autre, qu'aucune plaque, enseigne, ou installation quelconque intéressant l'aspect extérieur de l'immeuble ne pourrait être placée sans avoir été soumise au préalable l'agrément du bailleur qui solliciterait en tant que de besoin les autorisations prévues au règlement de copropriété, qu'il ne pourrait modifier ou faire modifier lesdites façades sans avoir au préalable soumis les plans au bailleur et sans que celui-ci ait autorisé la transformation projetée et ceci sous la surveillance de l'architecte du bailleur, que le preneur devrait effectuer après accord écrit du bailleur toutes formalités, demander toute autorisation administrative et auprès de la copropriété en cas de besoin, et enfin que tout travaux de transformation, de percement ou de démolition, changement de distribution, aménagements et installations effectués à l'entrée en jouissance ou ultérieurement, qui ne pourraient changer la destination de l'immeuble ou sa solidité, ne pourraient être exécutés qu'après accord écrit du bailleur, et sous la surveillance de son architecte ou de celui de la copropriété' ;
Les premiers juges ont à juste titre retenu que Mmes [C] et [E] étaient mal fondées à exciper du préjudice subi par suite de l'engagement par le syndicat des copropriétaires d'instances distinctes, étrangères au contentieux de la légalité des assemblées générales des 9 février et 23 juin 2015 qu'elles contestent dans le cadre de la présente instance, dont elles sont à l'origine ;
Il doit d'ailleurs être relevé que, dans l'instance ayant donné lieu au jugement du 30 juin 2022, actuellement pendante devant cette cour, elles formulent les mêmes demandes à l'encontre de la société [J] en développant les mêmes moyens ;
En tout état de cause, elles procèdent par simple affirmation et ne démontrent pas qu'elles auraient mis en demeure leur locataire commercial de satisfaire à leur égard, conformément aux clauses du bail, à la demande de communication de pièces du syndic, ainsi que d'exécution des travaux de remise en état visés par l'autorisation judiciaire du 29 janvier 2015, qui sont l'objet des résolutions qu'elles contestent ; par ailleurs, le préjudice qu'elles invoquent n'est ni précisé ni étayé ;
Dès lors, c'est à juste titre que le tribunal a retenu qu'elles ne démontraient ni leur préjudice ni le lien de causalité avec un comportement fautif de la société Carrefour ;
Le jugement doit donc être confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de dommages et intérêts formée par Mmes [C] et [E] à l'encontre de la société [J] ;
Sur la demande reconventionnelle du syndicat des copropriétaires en dommages et intérêts
Le syndicat des copropriétaires ne précise pas le fondement de sa demande ; il soutient que les appelantes ont engagé hâtivement cette énième procédure manifestement infondée et abusive et que, par une collusion avec la société Carrefour, elles ont tout mis en 'uvre pour le priver de l'exercice de ses droits et porter atteinte à ses droits, en lui communiquant des arrêtés de la ville de Paris concernant la façade de l'immeuble après la tenue des assemblées générales et après l'expiration des délais de recours, puis en refusant de communiquer à l'assemblée générale spéciale les informations techniques réclamées par l'expert judiciaire et le tribunal ;
L'article 32-1 du code de procédure civile dispose que celui qui agit en justice de manière dilatoire ou abusive peut être condamné à une amende civile d'un maximum de 10 000 euros, sans préjudice des dommages-intérêts qui seraient réclamés ;
L'exercice d'une action en justice, de même que la défense à une telle action, constituent un droit, qui n'est susceptible de dégénérer en abus pouvant donner lieu à des dommages-intérêts qu'en cas de malice, de mauvaise foi ou d'erreur grossière équipollente au dol ;
L'appréciation erronée par une partie de la portée de ses droits ne dégénère en abus que si elle s'évince d'une mauvaise foi persistante ou d'une légèreté blâmable ;
De même, le fait de succomber en ses prétentions, comme en l'espèce, ne suffit pas à démontrer l'abus de procédure ; le syndicat des copropriétaires ne faisant valoir aucun argument détaillé à l'appui de ce moyen, celui-ci doit être rejeté ;
Par ailleurs, en vertu de l'article 1240 du code civil, tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ;
En l'espèce, le syndicat des copropriétaires ne démontre pas en quoi les agissements de Mmes [C] et [E] seraient fautifs ni en quoi ils lui auraient causé un préjudice ; ce moyen doit par conséquent être rejeté ;
Le jugement doit donc être confirmé en ce qu'il a débouté le syndicat des copropriétaires de sa demande de dommage-intérêts ;
Sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile
Le sens du présent arrêt conduit à confirmer le jugement sur les dépens et l'application qui y a été équitablement faite de l'article 700 du code de procédure civile ;
Mmes [C] et [E], parties perdantes, doivent être condamnées in solidum aux dépens d'appel, ainsi qu'à payer au syndicat des copropriétaires la somme supplémentaire de 4.000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;
Le sens du présent arrêt conduit à rejeter la demande par application de l'article 700 du code de procédure civile formulée par Mmes [C] et [E] ;
PAR CES MOTIFS
LA COUR
Statuant par mise à disposition au greffe, contradictoirement,
Réforme le jugement ce qu'il a :
- rejeté la fin-de nous recevoir tirée du défaut de qualité à agir de [J] en annulation des assemblées générales,
- annulé la résolution n°9 de l'assemblée générale du 9 février 2015,
dit sans objet la demande afin d'annulation des résolutions n° 10 de l'assemblée générale du 9 février 2015,
- annulé la résolution n°3 de l'assemblée générale du 23 juin 2015, en tant qu'elle porte, notamment, réitération dans les mêmes termes de la résolution n°9 de l'assemblée générale du 9 février 2015 ;
Statuant à nouveau sur les seuls chefs réformés,
Déclare irrecevable la demande de la société Carrefour Proximité France de confirmation du jugement en ce qu'il a prononcé l'annulation de la résolution n° 9 et dit sans objet les demandes d'annulation des résolutions n° 10 et 11 de l'assemblée générale du 9 février 2015 ;
Déboute Mme [B] [H] veuve [C] et Mme [P] [C] épouse [E] de leur demande d'annulation des résolutions n° 9 et 10 de l'assemblée générale du 9 février 2015 ;
Déboute Mme [B] [H] veuve [C] et Mme [P] [C] épouse [E] de leur demande d'annulation de la résolution n° 3 de l'assemblée générale du 23 juin 2015 ;
Confirme le jugement pour le surplus ;
Y ajoutant,
Condamne in solidum Mme [B] [H] veuve [C] et Mme [P] [C] épouse [E] aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile, ainsi qu'à payer au syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 5] la somme supplémentaire de 4.000 € par application de l'article 700 du même code en cause d'appel ;
Rejette toute autre demande.
LA GREFFIERE LE PRESIDENT
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 4 - Chambre 2
ARRET DU 05 JUIN 2024
(n° , 2 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/00590 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CBHVR
Décision déférée à la Cour : Jugement du 07 Novembre 2019 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 15/07047
APPELANTES
Madame [B] [H] veuve [C]
née le 15 novembre 1924 à [Localité 6]
[Adresse 5]
[Localité 4]
Représentée par Me Laurent SIDOBRE, avocat au barreau de PARIS, toque : D0514
Madame [P] [C] épouse [E]
née le 24 janvier 1950 à [Localité 6]
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représentée par Me Laurent SIDOBRE, avocat au barreau de PARIS, toque : D0514
INTIMES
SYNDICAT DES COPROPRIÉTAIRES [Adresse 5] représenté par son syndic, la société GECOTRA, enseigne commerciale 'GROUPE LRDI VICTOR HUGO', SARL immatriculée au RCS de Nanterre sous le numéro 491 868 279
C/O Société GECOTRA 'GROUPE LRDI VICTOR HUGO'
[Adresse 3]
[Localité 4]
Représenté par Me Delphine MONTBOBIER, avocat au barreau de PARIS, toque : D1600
Société CARREFOUR PROXIMITE FRANCE
SAS immatriculée au RCS de Caen sous le numéro 345 130 488
[Adresse 7]
[Localité 1]
Représentée par Me Marie-Hélène DUJARDIN, avocat au barreau de PARIS, toque : D2153
ayant pour avocat plaidant : Me François MEUNIER, avocat au barreau du VAL DE MARNE, toque : PN49
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 12 Mars 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame PerrineVERMONT,Conseillère, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :
M. Jean-Loup CARRIERE, Président de Chambre
Mme Perrine VERMONT, Conseillère
Mme Caroline BIANCONI-DULIN, Conseillère
Greffier, lors des débats : Mme Dominique CARMENT
ARRET :
- CONTRADICTOIRE
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par M. Jean-Loup CARRIERE, Président de Chambre, et par Mme Dominique CARMENT, Greffière présente lors de la mise à disposition.
* * * * * * * * * *
FAITS & PROCÉDURE
Mmes [B] [H] veuve [C] et Mme [P] [C] épouse [E], sa fille, sont propriétaires indivises des lots 102 (un local commercial avec réserve), 125 (une réserve au sous-sol), 122 (une chambre de service au 7ème étage) et 156 (deux chambres froides).
Par acte sous signature privée du 15 janvier 2013, la société Charif a cédé son fonds de commerce, emportant cession du droit au bail, à la société par actions simplifiée Carrefour Proximité France afin d'y exploiter un magasin alimentaire sous l'enseigne [J] Express.
Compte tenu des travaux engagés dès le 23 janvier 2013 par la société Carrefour Proximité France et portant, selon le syndicat des copropriétaires sur les parties communes, ce dernier a obtenu par ordonnance sur requête la désignation d'un huissier de justice ayant établi le 21 février 2013 un procès-verbal de constat révélant la fissuration d'un plafond de cave, la présence d'équipements de plomberie et d'un extracteur d'air en attente de pose en sous-sol, le percement d'un mur porteur pour passage de câbles, la pose d'une poutre métallique sur la poutre maîtresse des caves, le percement d'une trémie entre rez-de-chaussée et sous-sol, et l'obturation de soupiraux.
Par ordonnance de référé du 2 avril 2013, M. [W], expert judiciaire, a été désigné à l'initiative du syndicat afin d'examiner, notamment, l'impact des travaux sur les parties communes.
Il a déposé son rapport le 18 novembre 2014 et a relevé, notamment, des modifications d'affectation de locaux, l'agrandissement de la trémie, le remplacement de la porte d'accès au sous-sol, l'obturation des soupiraux, et la modification des portes d'accès à l'immeuble.
Alors que M. [W] avait établi sa note de synthèse le 29 avril 2014, ont été notamment portées à l'ordre du jour de l'assemblée générale spéciale tenue en date du 20 juin 2014, et adoptées par cette assemblées, deux résolutions n°25-1 et 29.
La résolution n° 25-1 avait essentiellement pour objet de supprimer la mention d'immeuble à usage mixte, pour lui substituer la mention 'immeuble à usage principalement d'habitation' et pour les lots n°101 et 102 'à usage commercial' tels que définis dans le règlement de copropriété.
La résolution n° 29, portée à l'ordre du jour par Mme [C], tendait à voir autoriser l'indivision [C] à faire réaliser des travaux touchant les parties communes, et modifiant l'aspect extérieur de l'immeuble, et tenant plus précisément à faire réaliser les travaux suivants :
- aménagement des vitrines en façade avec porte automatique, sans toucher à la structure porteuse de l'immeuble,
- pose d'une enseigne à plat et d'une enseigne drapeau et remplacement du store existant suivant les plans descriptifs joints à la convocation et qui sont annexés au procès-verbal de l'assemblée générale et conformément aux autorisations administratives obtenues,
- création d'une pente à 3% à l'entrée du magasin en conformité avec la réglementation sur l'accessibilité aux personnes à mobilité réduite,
- agrandissement des deux grilles existantes en façade,
- utilisation de la porte existante donnant dans la cour de l'immeuble en tant qu'issue de secours,
- percement de 100 mm de diamètre du plancher séparatif des lots du rez de chaussée avec ceux du sous-sol pour le passage des canalisations de froid alimentaire.
Les résolutions n° 25-1 et 29 ont été respectivement rejetées et adoptées aux conditions de majorité des articles 24 et 25-1 de la loi du 10 juillet 1965.
Mme [B] [C] et Mme [P] [E] ont assigné à jour fixe, sur requête les y ayant autorisées, le syndicat des copropriétaires, aux fins d'annulation de ces résolutions, ainsi qu'aux fins d'autorisation judiciaire de travaux sous la surveillance de l'architecte de l'immeuble si besoin était.
Par jugement du tribunal de grande instance de Paris en date du 29 janvier 2015, Mme [C] et Mme [E] ont été admises en leur demande de contestation de la résolution n° 25-1 pour avoir été adoptée à des conditions de majorité irrégulières, déboutées de leur contestation formée à l'encontre de la résolution n° 29, déclarées recevables et fondées en leur demande d'autorisation judiciaire de travaux, en ce qu'ils portaient sur l'aménagement des vitrines en façade sans toucher à la structure porteuse de l'immeuble, pose d'une enseigne à plat et d'une enseigne drapeau, remplacement du store existant suivant les plans descriptifs joints à la convocation à l'assemblée générale du 20 juin 2014 et conformément aux autorisations administratives obtenues, et autorisation d'utiliser la porte existante donnant sur la cour de l'immeuble en tant qu'issue de secours, sous réserve de la modification de son sens d'ouverture; conformément aux préconisation de l'expert [W] au terme de son rapport du 18 novembre 2014, le tout à leurs frais et sous le contrôle de l'architecte de l'immeuble, et enfin déboutées de leur demande d'autorisation judiciaire de travaux quant au surplus des travaux réclamés.
Ce jugement a été confirmé en toutes ses dispositions par arrêt de la cour d'appel de Paris du 28 juin 2017. Le pourvoi formé par le syndicat des copropriétaires à l'encontre de cette décision a été rejeté par arrêt de la 3ème chambre civile de la cour de cassation du 6 septembre 2018.
Une assemblée générale spéciale s'est tenue le 9 février 2015 à la suite du dépôt du rapport d'expertise judiciaire et du prononcé du jugement du 29 janvier 2015, ayant eu pour objet essentiel de donner mandat au syndic, ou à son conseil, de se voir communiquer les documents et informations techniques concernant l'exécution, en conformité avec les préconisations de l'expert, des travaux judiciairement autorisés.
Après assignation délivrée au syndicat des copropriétaires par Mme [B] [C] et Mme [P] [E] aux fins d'annulation de cette assemblée générale, objet de la présente procédure, une assemblée générale spéciale s'est tenue le 23 juin 2015 sur le même ordre du jour, qui a de même été contestée.
Par acte d'huissier de justice en date du 29 mars 2016, le syndicat des copropriétaires a assigné Mme [B] [H] veuve [C] et Mme [P] [C] épouse [E], ainsi que la société [J] Proximité France, en ouverture du rapport d'expertise de M. [W], en vue de les voir déclarer responsables des désordres constatés.
Cette instance, enrolée sous le n° de RG 16/05299, a donné lieu à un jugement du tribunal judiciaire de Paris le 30 juin 2022. Un appel de cette décision est actuellement pendant devant la cour d'appel de céans.
* Par acte d'huissier de justice du 21 mai 2015, Mme [B] [H] veuve [C] et Mme [P] [C] épouse [E] ont assigné le syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [Adresse 5], représenté par son syndic, la société Cabinet [N], aux fins de voir annuler, dans son ensemble, l'assemblée générale spéciale tenue le 9 février 2015, et voir condamner le syndicat des copropriétaires aux dépens ainsi qu'au paiement de la somme de 2.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile, avec exécution provisoire du jugement à intervenir.
Par acte d'huissier de justice du 14 septembre 2015, elles ont assigné le même syndicat des copropriétaires, représenté par son syndic, aux fins de voir annuler, dans son ensemble, l'assemblée générale spéciale tenue le 23 juin 2015, ordonner la jonction de cette instance avec celle inscrite au rôle sous le n° RG 15/07047, et voir condamner le syndicat des copropriétaires aux dépens ainsi qu'au paiement de la somme de 2.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile, avec exécution provisoire du jugement à intervenir.
Par acte d'huissier de justice du 11 avril 2017, elles ont assigné la société par actions simplifiée Carrefour Proximité France aux fins de l'entendre condamner à leur payer la somme de 10.000 € à titre de dommages-intérêts, ordonner la jonction de cette instance avec celle inscrite au rôle sous le n° RG 15/07047, et voir condamner la société [J] Proximité France aux dépens ainsi qu'au paiement de la somme de 5.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile, avec exécution provisoire du jugement à intervenir.
Les trois instances ont été jointes.
Par jugement du 7 novembre 2019, le tribunal judiciaire de Paris a :
- déclaré Mme [C] et Mme [E] irrecevables en leur demande de sursis à statuer dans l'attente de la décision à intervenir dans l'instance n° RG 16/05299,
- débouté la société Carrefour Proximité France de sa demande de sursis à statuer formée aux mêmes fins,
- débouté Mme [C] et Mme [E] de leur demande d'annulation, dans leur ensemble, des assemblées générales de copropriétaires de l'immeuble du [Adresse 5] tenues en date des 9 février et 23 juin 2015,
- débouté Mme [C] et Mme [E] de leur demande d'annulation des résolutions n°3, 4, 5, 6, 7, 8, et 12 de l'assemblée générale des copropriétaires du 9 février 2015,
- annulé la résolution n°9 de cette assemblée générale,
- annulé la résolution n°3 de l'assemblée générale des copropriétaires du 23 juin 2015, en tant qu'elle porte, notamment, réitération dans les mêmes termes de la résolution n°9 de l'assemblée générale du 9 février 2015,
- dit sans objet la demande afin d'annulation des résolutions n° 10 et 11 de l'assemblée générale des copropriétaires du 9 février 2015,
- débouté Mme [C] et Mme [E] de leur demande indemnitaire formée à l'encontre de la société [J] Proximité France,
- débouté le syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [Adresse 5] de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive formée à l'encontre de Mme [C] et Mme [E],
- condamné Mme [C] et Mme [E] in solidum à payer au syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [Adresse 5] la somme de 3.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- débouté les parties de tout autre demande à ce titre,
- condamné in solidum Mme [C] et Mme [E] épouse [E] aux dépens,
- autorisé Maître Montbobier, avocat, à recouvrer directement les dépens dont il aurait été fait l'avance sans avoir reçu provision,
- ordonné l'exécution provisoire.
Mme [C] et Mme [E] ont relevé appel de ce jugement par déclaration remise au greffe le 24 décembre 2019.
La procédure devant la cour a été clôturée le 6 décembre 2023.
PRÉTENTIONS DES PARTIES
Vu les conclusions notifiées le 18 septembre 2020 par lesquelles Mme [B] [H] veuve [C] et Mme [P] [C] épouse [E], appelantes, invitent la cour, au visa des articles 42 de la loi du 10 juillet 1965, 75 de la loi du 10 juillet 1991, à :
- confirmer le jugement en ce qu'il a annulé la résolution n°9 de l'assemblée générale spéciale du 9 février 2015, et n°3 de l'assemblée générale spéciale en tant qu'elle porte, notamment, réitération dans les mêmes termes de la résolution n°9 de l'assemblée générale du 9 février 2015,
- infirmer pour le surplus le jugement en ce qu'il :
les a déclarées irrecevables en leur demande de sursis à statuer dans l'attente de la décision à intervenir dans l'instance n° RG 16/05299,
a débouté la société Carrefour Proximité France de sa demande de sursis à statuer formée aux mêmes fins,
les a déboutées de leur demande d'annulation, dans leur ensemble, des assemblées générales de copropriétaires de l'immeuble du [Adresse 5] tenues en date des 9 février et 23 juin 2015,
les a déboutées de leur demande d'annulation des résolutions n°3, 4, 5, 6, 7, 8, et 12 de l'assemblée générale des copropriétaires du 9 février 2015,
à dit sans objet la demande afin d'annulation des résolutions n° 10 et 11 de l'assemblée générale des copropriétaires du 9 février 2015,
les a déboutées de leur demande indemnitaire formée à l'encontre de la société [J] Proximité France,
les a condamnées in solidum à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 3.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,
les a condamnées in solidum aux dépens, et autorisé Maître Montbobier, avocat, à recouvrer directement les dépens dont il aurait été fait l'avance sans avoir reçu provision,
ordonné l'exécution provisoire,
statuant à nouveau,
- ordonner le sursis à statuer dans l'attente du jugement à intervenir dans l'instance enrôlée devant le tribunal de grande instance de Paris sous le numéro 16/05299,
à défaut,
- annuler l'ensemble de l'assemblée générale spéciale du 9 février 2015 et du 23 juin 2015 celles-ci n'étant pas fondées et étant abusives dans leur principe, et en tout état de cause les résolutions n°3 à 12 de l'assemblée du 9 février 2015 et la résolution n°3 de l'assemblée du 23 juin 2015 (qui réitère l'ensemble de l'assemblée du 9 février 2015),
- condamner la société Carrefour Proximité France à les relever et les garantir de toute condamnation pouvant être prononcée à leur encontre, y compris au titre des frais irrépétibles et des dépens de première instance et d'appel,
- condamner en outre la société [J] Proximité France à leur verser la somme de 10.000 € à titre de dommages intérêts,
- dire qu'il n'y avait pas lieu à exécution provisoire,
- condamner le syndicat des copropriétaires et la société Carrefour Proximité France, à leur payer la somme de 8.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais irrépétibles de première instance et d'appel, aux dépens de première instance et d'appel en application de l'article 699 du même code,
- débouter de plus fort le syndicat des copropriétaires et [J] Proximité France de toutes leurs demandes ;
Vu les conclusions notifiées le 14 octobre 2020 par lesquelles le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 5], intimé ayant formé appel incident, demande à la cour de :
- confirmer la décision sauf en ce qu'elle a :
annulé la résolution 9 de l'AGS du 9 février 2015,
annulé la résolution 3 de l'AGS du 23 juin 2015 qui réitère la résolution 9 de l'AGS du 9 février 2015,
débouté le syndicat des copropriétaires de leur demande de dommages et intérêts,
débouté le syndicat des copropriétaires de toutes autres demandes,
- confirmer que les consorts [C] [E] sont irrecevables à demander le sursis à statuer et, à titre subsidiaire, la dire infondée et en conséquence, les débouter de cette demande,
- confirmer le débouté de Carrefour Proximité France de sa demande de sursis à statuer, et en conséquence rejeter l'appel incident formé sur ce point,
- comme le tribunal, constater que Mmes [C] et [E] ne déterminent pas, dans les 2 AGS des 9 février et 23 juin 2015, les résolutions qui devraient, selon elles, être annulées, et ne justifient pas en quoi elles seraient contraires à l'intérêt collectif,
- confirmer le débouté de Mmes [C] et [E] de toutes leurs demandes, fins et conclusions tendant à voir annuler l'intégralité des AGS du 9 février et 23 juin 2015 alors que notamment certaines résolutions ont depuis été exécutées et que certaines n'ont rien à voir tant avec l'expertise contestée par les [C] que les locaux loués par ces dernières à Carrefour,
- confirmer le débouté de Mmes [C] et [E] de leur demande d'annulation des résolutions 3, 4, 5, 6, 7, 8 et 12 de l'AGS du 9 février 2015,
- confirmer qu'est sans objet la demande d'annulation des résolutions 10 et 11,
- confirmer la condamnation des consorts [C] [E] à payer 3.000 € au syndicat des copropriétaires au titre de l'article 700 outre les dépens,
- réformer le jugement en ce qu'il :
a annulé la résolution 9 de l'AGS du 9 février 2015,
a annulé la résolution 3 de l'AGS du 23 juin 2015 qui réitère la résolution 9 de l'AGS du 9 février 2015,
l'a débouté de sa demande de dommages et intérêts,
l'a débouté de toutes autres demandes,
statuant à nouveau,
- débouter Mmes [C] et [E] de leur demande d'annulation de la résolution 9 de l'AGS du 9 février 2015, et de leur demande d'annulation de la résolution 3 de l'AGS du 23 juin 2015 qui réitère la résolution 9 de l'AGS du 9 février 2015,
- juger que la demande de nullité des AGS 2015 formée par les consorts [C]/[E] ne concerne pas [J], qui n'est pas copropriétaire du syndicat des copropriétaires,
- juger que Carrefour Proximité n'a aucun droit ni titre tant pour s'exprimer sur cette demande formée par les [C] [E] qui concerne exclusivement les 2 AGS de 2015 que pour former une demande de sursis à statuer sur cette demande en nullité des deux assemblées générales 2015,
- renvoyer Mmes [C] & [E] et [J] Proximité France à développer leurs arguments sur le rapport d'expertise devant le tribunal saisi de l'assignation au fond en ouverture du rapport d'expertise (8ème chambre, 2ème section, RG 16/05299),
- condamner solidairement Mmes [C] et [E] à lui payer la somme de 20.000 € à titre de dommages et intérêts,
en tout état de cause,
- débouter Mmes [C] et [E] et [J] de toutes leurs demandes, fins et conclusions,
- débouter Carrefour Proximité France de toute demande formée à son encontre,
- condamner solidairement Mmes [C] et [E] aux dépens avec application de l'article 699 du code de procédure civile, ainsi qu'à lui payer chacune la somme de 7.000 € par application de l'article 700 du même code ;
Vu les conclusions notifiées le 23 juillet 2020 par lesquelles la société par actions simplifiée [J] Proximité France, intimée ayant formé appel incident, invite la cour, au visa des articles 9 et 24 de la loi du 10 juillet 1965, à :
- infirmer le jugement,
statuant à nouveau,
- ordonner le sursis à statuer de l'arrêt à intervenir dans l'attente de la décision qui doit être rendue par le tribunal de grande instance de Paris dans la procédure en ouverture de rapport qui a été enrôlée sous le numéro RG 15/05299,
subsidiairement,
- dire que les résolutions n° 3, 4, 5, 6, 7 et 8 adoptées par l'assemblée générale de la copropriété du 9 février 2015 présentent un caractère abusif et discriminatoire et que Mmes [B] [C] et [P] [E] sont fondées à demander d'en prononcer la nullité,
- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a prononcé l'annulation de la résolution n°9 et dit sans objet les demandes d'annulation des résolutions n°10 et 11 de l'assemblée générale du 9 février,
- débouter Mmes [B] [C] et [P] [E] de leur demande de dommages-intérêts firmulée contre elle,
- condamner Mmes [B] [C] et [P] [E] aux dépens avec application de l'article 699 du code de procédure civile ;
SUR CE,
La cour se réfère, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens échangés et des prétentions des parties, à la décision déférée et aux dernières conclusions échangées en appel ;
En application de l'article 954 alinéa 2 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions ;
Sur la demande de sursis à statuer
Mme [C] et Mme [E] font valoir que c'est à tort que le tribunal a estimé qu'elles auraient dû conclure sur ce point avant toute défense au fond dans la mesure où, lorsqu'elles ont engagé l'action en cause, le syndicat des copropriétaires n'avait pas encore assigné au fond en ouverture de rapport d'expertise ;
Elles excipent d'un risque de contrariété de décisions entre la présente instance afin d'annulation des assemblées générales des 9 février et 23 juin 2015 et l'instance engagée par le syndicat des copropriétaires en ouverture du rapport d'expertise de M. [W] ;
La société Carrefour Proximité France, qui forme la même demande de sursis à statuer soutient que les deux juridictions se trouvent saisies de procédures ayant trait aux mêmes travaux d'aménagement du magasin, en ce que les résolutions n° 3 à 9 portent sur des aspects techniques de ces travaux qui sont en lien direct avec le rapport de M. [W] ;
Le syndicat des copropriétaires soulève l'irrecevabilité de cette demande au motif que Mmes [C] et [E] l'ont formulée dans leurs dernières conclusions devant le tribunal, signifées en mars 2019, et ne l'ont pas soulevé in limine litis, alors que l'assignation en ouverture de rapport a été délivrée en mars 2016 ;
Il fait valoir sur le fond que les instances en cause, aux fins d'une part d'annulation de deux assemblées générales, d'autre part de réparation des préjudices subis par le syndicat des copropriétaires et d'exécution de travaux destinés à mettre fin aux désordres subis dans les parties communes à raison des travaux réalisés dans les locaux donnés à bail à la société [J] Proximité France, ont un objet distinct et indépendant l'un de l'autre, en sorte que la décision à intervenir dans l'instance en annulation n'est pas de nature à affecter la décision à intervenir dans l'instance en indemnisation du syndicat des copropriétaires ;
Le tribunal a constaté, et ce point n'est pas contesté, qu'aucune fin de non-recevoir n'a été soulevée à l'encontre de la demande de sursis à statuer formée avant tout moyen de fond par la société Carrefour Proximité France dans ses premières écritures en défense notifiées le 9 février 2018 ;
L'article 73 du code de procédure civile dispose que constitue une exception de procédure tout moyen qui tend, soit à faire déclarer la procédure irrégulière ou éteinte, soit à en suspendre le cours ;
L'article 74 du même code dispose en son premier alinéa que les exceptions doivent, à peine d'irrecevabilité, être soulevées simultanément et avant toute défense au fond ou fin de non-recevoir, et qu'il en est ainsi alors même que les règles soulevées au soutien de l'exception seraient d'ordre public ;
En application de ces dispositions, la demande tendant à faire suspendre le cours de l'instance, qu'elle émane du demandeur ou d'un défendeur, est une exception de procédure qui doit être présentée, à peine d'irrecevabilité, avant toute défense au fond ou fin de non-recevoir de son auteur ;
L'instance inscrite au rôle sous le n° RG 16/05299 a été engagée sur l'assignation délivrée à Mmes [C] et [E] ainsi qu'à la société [J] Proximité France par le syndicat des copropriétaires le 29 mars 2016 ; elle a donné lieu à un jugement rendu par le tribunal judiciaire de Paris le 30 juin 2022, lequel a été frappé d'appel
Mmes [C] et [E] ne contestent pas avoir sollicité, pour la première fois et dans la forme d'une demande subsidiaire, au terme de leurs écritures notifiées le 28 mars 2019, le prononcé d'un sursis à statuer dans l'attente de la décision à intervenir dans cette instance, alors qu'elles avaient précédemment conclu au fond, tant dans la présente instance que dans l'instance n° 16/05299 ;
Par conséquent, le jugement doit être confirmé en ce qu'il a déclaré leur demande de sursis à statuer irrecevable ;
Cette demande de sursis à statuer est donc irrecevable ;
Sur le fond de l'exception soulevée par la société Carrefour, il doit être relevé, comme l'a fait le tribunal, que Mmes [C] et [E] et le syndicat des copropriétaires ne forment que des demandes indemnitaires à l'encontre de cette société ; la société [J] n'indique pas en quoi la décision à intervenir sur appel du jugement du 30 juin 2022, et portant sur un litige relatif à l'indemnisation d'un préjudice allégué par le syndicat des copropriétaires en raison des travaux effectués dans les locaux loués à la société Carrefour, serait de nature à affecter le sens de la décision à intervenir dans la présente instance portant sur des demandes d'annulation d'assemblées générales ;
Le tribunal a justement retenu que le risque allégué de contrariété de décisions n'était pas démontré ; le jugement doit être confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de sursis à statuer formée par la société [J] ;
Sur la demande afin d'annulation comme irrégulièrement convoquée de l'assemblée générale du 9 février 2015
Mmes [C] et [E] soutiennent que l'assemblée générale du 9 février 2015 est entachée de nullité dans son ensemble, dès lors que Mme [E], nue-copropriétaire, n'y a pas été convoquée et n'y a pas été davantage représentée, alors qu'usufruitier et nu-propriétaire doivent être convoqués à l'assemblée générale ;
Elles font valoir que le juge des référés a constaté l'existence d'un mandataire commun par ordonnance du 18 juin 2015 et que la désignation de ce mandataire, en la personne de Mme [C], était parfaitement explicite dans le courrier remis lors de l'assemblée générale du 20 juin 2014 par le mari de Mme [E], mais que le syndic devait nécessairement convoquer le nu-propriétaire et l'usufruitier puisqu'il ne reconnaissait pas la désignation de Mme [C] comme mandataire commun de la propriété démembrée de cette dernière et sa fille Mme [E] ;
Le syndicat des copropriétaires allègue que les appelantes ont dissimulé au syndic, jusqu'au 27 novembre 2014, le démembrement de propreté affectant leurs lots, date à laquelle elles ont communiqué l'acte notarié de donation de la nue-propriété de certains lots de Mme [C] à Mme [E], et que ce n'est que dans le cadre de la procédure judiciaire de désignation d'un mandataire commun sur l'initiative du syndic qu'elles ont produit un mandat, daté du 5 juin 2015, désignant Mme [C] comme mandataire commun et 'réitérant le mandat remis au syndic le 20 juin 2014' ;
L'article 23 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1965, dans sa rédaction applicable au litige, dispose qu'en cas d'indivision ou de démembrement du droit de propriété, les intéressés doivent être représentés par un mandataire commun qui est, à défaut d'accord, désigné par le président du tribunal de grande instance à la requête de l'un d'eux ou du syndic ;
En application de ces dispositions, à la date de convocation de l'assemblée générale du 9 février 2015, dans le cas de lots grevés de droits de propriété démembrés, mais à défaut de notification du mandataire commun amiablement ou judiciairement désigné, il appartenait au syndic de convoquer à l'assemblée générale chacun des titulaires de droits sur les lots démembrés, à peine de nullité de l'assemblée dans son ensemble ;
Il est constant que suivant acte reçu en date du 2 décembre 1997, Mme [C] a fait donation à Mme [E] de la nue-propriété des lots alors dénommés n° 2, 22, 31 et 58 de l'état descriptif de division, devenus les lots n° 102, 122, 125 et 156 selon modificatif au règlement de copropriété et constitués, dans le bâtiment A, d'un local commercial en rez de chaussée, au 7ème étage d'une chambre sur rue, au sous-sol d'une cave communiquant avec le lot n° 2, et dans le bâtiment C au rez de chaussée, de la totalité du bâtiment à usage de chambre froide ;
En premier lieu, il doit être rappelé, comme l'a fait le tribunal, que la seule information reçue par le syndic du démembrement de propriété d'un ou plusieurs lots, sans qu'il ait été satisfait aux exigences de formes prévues par l'article 6 du décret du 17 mars 1967 combiné aux articles 64 et 65 du même décret en leurs dispositions en vigueur à la date de l'assemblée querellée, serait de nature à rendre ce démembrement inopposable au syndicat des copropriétaires ;
Par ailleurs, chaque copropriétaire ou titulaire d'un droit d'usufruit ou de nue-propriété est tenu de notifier au syndic son domicile réel ou élu, ou s'il le souhaite son numéro de télécopie ; les notifications et mises en demeure prévues par l'article 64 sont valablement faites au dernier domicile ou au dernier numéro de télécopie notifié au syndic ;
Il convient de reprendre les faits ainsi exposés par les premiers juges :
'Au cas d'espèce, Mme [B] [H] veuve [C] et Mme [P] [C] épouse [E] n'ont fait part, pour la première fois, de leur qualité d'usufruitière et de nue-propriétaire des lots susvisés en vertu de la donation précitée, que dans le cadre de l'instance en annulation de l'assemblée générale du 17 octobre 2012 ;
L'assignation délivrée le 18 janvier 2013 au syndicat, représenté par son syndic en exercice, qui fait certes mention du titre translatif de nue-propriété au bénéfice de Mme [P] [C] épouse [E] sur les lots donnés à bail à la société Carrefour Proximité France, ainsi que le domicile de chacun des titulaires de droits réels sur ces lots, mais non la dénomination exacte de ces lots, ne vaut pas à elle seule notification au syndic de la constitution ou de la cession de ces droits d'usufruit et de nue-propriété au sens de l'article 6 du décret du 17 mars 1967, dès lors que Mme [B] [H] veuve [C] conservait la qualité de titulaire de droits en pleine propriété sur d'autres lots du même immeuble non donnés à bail affectés de 1.716/10.003 tantièmes de parties communes, et que les écritures notifiées dans le cadre de cette instance n'explicitaient pas, voir démentaient l'existence de ce démembrement de propriété, et ne désignaient pas, au surplus, autrement que de façon allusive et par l'indication de ce qu'ils représentaient 25 % des tantièmes de copropriété, les lots objets de ce démembrement ;
Le syndic demandait ainsi à Mmes [C] et [E], les 16 et 19 juin 2014, en vue de l'assemblée générale convoquée à la date du 20 juin 2014, de lui faire connaître si les lots donnés à bail à la société [J] Proximité France faisaient ou non l'objet d'un démembrement de propriété ;
Mme [B] [C] lui répondait le même jour, au terme d'une correspondance remise en séance et revêtue de la mention 'bon pour accord' suivie de la signature de Mme [P] [E], que le démembrement de propriété des lots anciennement numérotés 2, 22, 31 et 58 (et devenus n° 102, 122, 156 au terme du modificatif au règlement de copropriété en date du 22 novembre 2006) ne pouvait être ignoré du cabinet [N], quand bien même le notaire instrumentaire n'aurait-il pas procédé à une notification non retrouvée dans les archives de son étude, et qu'elle trouvait 'étrange' que cette 'situation [existant] depuis 17 ans, ait appelé de sa part des interrogations' ;
Elle ajoutait qu''en accord avec sa fille', Mme [P] [E] née [C], elle n'avait 'jamais cessé de les représenter en assemblée générale de copropriété' ;
Titulaire d'un pouvoir délivré par Mme [C], M. [E] n'en était pour autant admis à voter, au titre de ce pouvoir, que pour les lots détenus par sa mandante en pleine propriété, soit à hauteur de 1.716/10.003 tantièmes' ;
Le tribunal en a justement déduit qu'à défaut même de notification au syndic par le notaire instrumentaire du démembrement de propriété des lots n° 102, 122, 125 et 156, cette notification résultait bien de l'assignation délivrée le 18 janvier 2013 complétée par la lettre remise en séance le 20 juin 2014 sous la signature de Mme [C] et de Mme [E], qui font mention des lots donnés en nue-propriété et grevés d'usufruit, de l'identité des titulaires de droits sur ces lots, et de leur domicile réel ou élu ;
Il en a également justement déduit que les appelantes ne pouvaient reprocher au syndicat des copropriétaires de ne pas avoir convoqué Mme [E] à l'assemblée générale du 9 février 2015, alors que leur correspondance du 20 juin 2014 constitue bien le rappel de la désignation antérieure de Mme [C] en qualité de mandataire commun du démembrement de propriété ;
C'est donc à juste titre que le tribunal a retenu que le syndic, ayant bien reçu notification de mandataire commun avant la convocation de l'assemblée générale tenue le 9 février 2015, était fondé, comme il l'a fait, à notifier cette convocation à Mme [C] seule, exclusivement admise a participer au vote des résolutions soumises à l'ordre du jour de cette assemblée, tant en sa qualité de mandataire commun du démembrement de propriété que de titulaire de droits en pleine propriété sur les lots non donnés à bail, et qu'il a rejeté la demande d'annulation de l'assemblée générale du 9 février 2015 de ce chef ;
Le jugement sera donc confirmé sur ce point ;
Sur les demandes d'annulation des assemblées générales des 9 février et 23 juin 2015, et subsidiairement des résolutions n°3 à 12, comme étant infondées et abusives en leur principe
A titre liminaire, il sera rappelé les termes du jugement dont appel ci-après :
'L'assemblée générale tenue du 9 février 2015 a adopté aux conditions de majorité de l'article 25.1 de la loi du 10 juillet 1965 ses résolutions n°3 à 12 ;
Ces résolutions ont eu pour objet essentiel de donner mandat au syndic, ou à son conseil :
1° de se voir communiquer par les copropriétaires bailleresses, faute de les avoir obtenues de leur locataire commercial dans le délai précédemment imparti par le syndic, les documents et informations techniques concernant l'exécution des travaux de façade, la création d'une pente inclinée, la ventilation du sous-sol, en tenant compte des préconisations de l'expert judiciaire concernant la création d'une VMC rendue nécesssaire par la suppression de deux soupiraux, et l'aménagement du système de production de froid et de ses canalisations en conformité avec les règles de l'art, la modification du sens d'ouverture de la porte de sortie de secours sur cour, le renforcement de la rive de plancher consécutif à l'agrandissement de la trémie entre rez de chaussée et sous-sol du magasin, et la remise en état de la porte de sortie donnant dans le hall de l'immeuble rendue conforme aux prescriptions en matière de sécurité incendie,
2° de donner mandat au syndic d'assigner Mmes [C] et [E] aux fins d'annulation des résolutions numéros 4 et 5 de l'assemblée générale du 14 décembre 2006 et 22 de l'assemblée générale du 2 avril 2009 en raison de leur adoption à des conditions de majorité irrégulières par suite du non-respect, par les titulaires de droit de propriété démembrées, des exigences de notification édictées par les articles 25 de la loi du 10 juillet 1905 et 5 du décret du 17 mars 1967 ;
L'assemblée générale spéciale du 23 juin 2015 a soumis au vote des copropriétaires et dans les mêmes termes, au terme de sa résolution n°3, l'intégralité des résolutions portées à l'ordre du jour de l'assemblée du 9 février 2015 ;
Cette même résolution n°3 a repoussé au 10 septembre 2015 le délai initialement fixé au 25 avril 2015 par les résolutions n°3 et 11 de l'assemblée du 9 février 2015 pour communication au syndic du dossier comportant les éléments techniques sollicités du locataire commercial concernant les travaux envisagés ;
L'assemblée susvisée a enfin donné mandat au syndic, au terme de sa résolution n° 2 d'introduire en justice toute procédure nécessaire à l'égard des dames [C] et [E] pour .../... obtenir les éléments et informations techniques mentionnés dans le rapports d'expertise aux frais et charges des dames [C] et [E] et .../... obtenir de façon générale réparation de tous les préjudices subis' ;
Sur la recevabilité à agir de la société Carrefour
Le syndicat des copropriétaires fait valoir que la société [J] n'a ni droit, ni titre, ni compétence pour argumenter et plaider sur la demande d'annulation des assemblée générales ;
L'article 42 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1965, dans sa version applicable au litige, dispose que les actions qui ont pour objet de contester les décisions des assemblées générales doivent, à peine de déchéance, être introduites par les copropriétaires opposants ou défaillants, dans un délai de deux mois à compter de la notification desdites décisions qui leur est faite à la diligence du syndic, dans un délai de deux mois à compter de la tenue de l'assemblée générale ;
Il en résulte que l'action en contestation d'une assemblée générale est une action attitrée qui ne peut être exercée par les tiers ne justifiant pas, à la date de tenue de l'assemblée, de leur qualité de copropriétaire ;
Par ailleurs, il résulte de l'article 367 du code de procédure civile que la jonction d'instances ne crée pas, à elle seule, de liens juridiques entre les parties en cause ;
Dès lors, et contrairement à ce qu'a retenu le tribunal, la société Carrefour n'a pas qualité à agir en annulation des assemblée générales, même pour la défense de ses propres droits ;
Ses demandes doivent être déclarées irrecevables et le jugement sera infirmé sur ce point ;
Il doit néanmoins être rappelé que sa demande visant à dire que les résolutions n° 3, 4, 5, 6, 7 et 8 adoptées par l'assemblée générale de la copropriété du 9 février 2015 présentent un caractère abusif et discriminatoire et que Mmes [B] [C] et [P] [E] sont fondées à demander d'en prononcer la nullité ne constitue pas une prétention au sens des dispositions du code de procédure civile ;
Sur la demande d'annulation des assemblées générales des 9 février 23 juin 2015 dans leur ensemble de Mmes [C] et [E]
Mmes [C] et [E] soutiennent que les résolutions adoptées par les assemblées générales spéciales du 9 février 2015 et du 23 juin 2015 ont toutes pour postulat que le rapport d'expertise déposé par M. [W] serait exempt de toute critique, ce qu'elles contestent ; elles excipent du comportement intrusif du syndicat des copropriétaires qui n'a eu de cesse de vouloir obtenir des informations sur leur locataire commercial et allèguent que ces résolutions démontrent la volonté de la copropriété de nuire à la société [J] ;
Elles estiment que les résolutions dont il est demandé l'annulation leur causent un grief puisqu'elles imposent des travaux préconisés par l'expert, alors que ces travaux devraient être validés par les juges du fond dans le cadre de l'instance en ouverture de rapport et non par voie d'assemblée générale ; elles invoquent à ce titre un détournement de procédure, et qu'elles ont pour but de contrer le jugement rendu le 29 janvier 2015 ;
Le syndicat des copropriétaires allègue que les appelantes ne justifient pas en quoi les décisions prises constitueraient un abus de majorité et souligne que le commerce de la société Carrefour n'a pas été entravé ;
L'article 42 de la loi du 10 juillet 1965 prévoit que 'les actions qui ont pour objet de contester les décisions des assemblées générales doivent, à peine de déchéance, être introduites par les copropriétaires opposants ou défaillants, dans un délai de deux mois à compter de la notification desdites décisions qui leur est faite à la diligence du syndic, dans un délai de deux mois à compter de la tenue de l'assemblée générale' ;
Comme l'a rappelé le tribunal, une décision d'assemblée générale ne peut être annulée pour abus de majorité que s'il est établi qu'elle est contraire aux intérêts collectifs des copropriétaires ou qu'elle a été prise dans le seul but de favoriser les intérêts personnels des copropriétaires majoritaires au détriment des copropriétaires minoritaires, voire lorsqu'elle rompt l'égalité entre les copropriétaires ; une décision non contraire aux intérêts collectifs des copropriétaires ne constitue pas un abus de droit ; de même, une résolution votée sans intention de nuire n'est pas une décision abusive ; il incombe à celui qui allègue l'abus de majorité de la décision de l'assemblée générale de rapporter la preuve du caractère abusif de celle-ci, lequel ne peut en revanche être écarté, comme le soutient le syndicat défendeur, par le motif que les résolutions querellées auraient recueilli une majorité qualifiée de copropriétaires non liés d'intérêts entre eux ;
Par ailleurs, la demande d'annulation, dans son ensemble, d'une assemblée générale, fondée sur l'abus de majorité, ne peut être admise que si l'ensemble des résolutions adoptées sont indistinctement viciées par le même abus de droit ;
En l'espèce, l'assemblée générale spéciale du 9 février 2015 s'est vue soumettre un point d'information et a adopté 11 résolutions, dont celles querellées n° 3 à 12 ; Mme [C], représentant 2.302 tantièmes, c'est-à-dire ceux de ses lots en pleine propriété et ceux des lots dont elle est propriétaire avec Mme [E], était absente et non représentée ;
Comme l'a relevé le tribunal, n'est ni établi, ni davantage soutenu, que les résolutions n°1-1, 1-2, 1-3, et 1-4 portant désignation des membres du bureau et du secrétaire de séances aient été adoptées en méconnaissance de l'intérêt collectif et dans le seul but de favoriser les intérêts personnels des copropriétaires majoritaires ;
L'assemblée générale spéciale du 23 juin 2015 a adopté 3 résolutions, dont la résolution n° 3 par laquelle elle a confirmé le vote de l'intégralité des résolutions de l'assemblée générale du 9 février 2015 mais repoussé le délai mentionné aux résolutions n° 3 et 11 ;
Il n'est pas davantage établi ni soutenu, que les résolutions n°1-1, 1-2, 1-3, et 1-4 de cette assemblée, portant désignation des membres du bureau et du secrétaire de séance aient été adoptées en méconnaissance de l'intérêt collectif et dans le seul but de favoriser les intérêts personnels des copropriétaires majoritaires ;
En outre, comme l'ont relevé les premiers juges, il doit être constaté que Mme [C], agissant tant en qualité de mandataire commun de l'indivision des lots commerciaux, que de titulaire de droits en pleine propriété sur d'autres lots, a voté en faveur de ces résolutions, et serait donc en toute hypothèse irrecevable à contester cette assemblée générale ;
Par conséquent, le tribunal a justement considéré que la demande d'annulation, dans leur ensemble, des assemblées générales des 9 février et 23 juin 2015 devait être rejetée ; le jugement sera confirmé sur ce point ;
Sur la demande d'annulation de résolutions des assemblées générales des 9 février 23 juin 2015
Le tribunal a rappelé les points suivants :
'Au terme du jugement précité du 9 janvier 2015, Mme [B] [H] veuve [C] et Mme [P] [C] épouse [E] ont été autorisées, au bénéfice de l'exécution provisoire, et par suite du rejet de la résolution n°29 portée à l'ordre du jour complémentaire de l'assemblée générale du 20 juin 2014, à réaliser les travaux :
- d'aménagement des vitrines en façade, sans toucher à la structure porteuse de l'immeuble,
- de pose d'une enseigne à plat et d'une enseigne drapeau,
- de remplacement du store existant suivant les plans descriptifs joints a la convocation à l'assemblée générale du 20 juin 2014 et conformément aux autorisations administratives obtenues,
- de transformation de la porte existante donnant sur la cour de l'immeuble en tant qu'issue de secours, sous réserve de la modification de son sens d'ouverture, conformément aux préconisations de l'expert [W] au terme de son rapport du 18 novembre 2014, le tout à leurs frais et sous le contrôle de l'architecte de l'immeuble ;
Il est ainsi constant que les travaux judiciairement autorisés affectaient les parties communes et modifiaient l'aspect extérieur de l'immeuble, et que les modalités techniques de leur réalisation, précédemment soumises à l'examen de l'expert [W] en l'état d'imprécision du projet sur ce point, ont été subordonnées pour une part, aux préconisations de l'expert judiciaire au terme de son rapport déposé depuis la décision de refus de l'assemblée générale du 20 juin 2014, et pour le surplus au contrôle de l'architecte de la copropriété' ;
¿ Sur la résolution n° 3 de l'assemblée générale du 9 février 2015
Il y a lieu d'adopter les motifs adoptés par le tribunal, qui en a à juste titre déduit que le seul mandat conféré au syndic de se voir communiquer des documents techniques sur des travaux de façade à réaliser ne préjugeait pas d'une décision future relevant du pouvoir souverain de l'assemblée, et n'avait pas été adopté dans le but exclusif de satisfaire les intérêts des copropriétaires majoritaires au détriment des copropriétaires minoritaires, bailleurs de locaux commerciaux, et ne caractérise ainsi aucune atteinte à l'intérêt collectif ;
Le jugement doit par conséquent être confirmé en ce qu'il a rejeté la demande aux fins d'annulation de la résolution n°3 adoptée par l'assemblée du 9 février 2015 ;
¿ Sur la résolution n° 4 de l'assemblée générale du 9 février 2015
Il y a lieu d'adopter les motifs adoptés par le tribunal, qui en a justement déduit que cette résolution n'avait pas été adoptée dans le but exclusif de satisfaire les intérêts des copropriétaires majoritaires au détriment des copropriétaires minoritaires, bailleurs de locaux commerciaux, et ne caractérise ainsi aucune atteinte à l'intérêt collectif, après avoir souligné ce les travaux concerné n'avait pas été autorisé par le jugement du 29 janvier 2015 et ayant constaté que les documents sollicités, contrairement à ce qu'affirmait la société [J], n'avaient pas été remis ;
Le jugement doit par conséquent être confirmé en ce qu'il a rejeté la demande aux fins d'annulation de la résolution n°4 adoptée par l'assemblée du 9 février 2015 ;
¿ Sur la résolution n° 5 de l'assemblée générale du 9 février 2015
Mmes [C] et [E] allèguent que leur preneur, la société Carrefour, a proposé dans le cadre de l'expertise une solution permettant de rétablir une ventilation normale mais que la copropriété l'a ignorée ;
Il y a lieu d'adopter les motifs adoptés par le tribunal, qui a justement relevé que Mmes [C] et [E] ne démontraient pas que cette résolution avait été votée par un abus de majorité ;
Le jugement doit par conséquent être confirmé en ce qu'il a rejeté la demande aux fins d'annulation de la résolution n° 5 adoptée par l'assemblée du 9 février 2015 ;
¿ Sur les résolutions n° 6 et 8 de l'assemblée générale du 9 février 2015
Mmes [C] et [E] font valoir que le tribunal n'a pas pris en compte le fait que les travaux avaient déjà été effectués et qu'une telle résolution ne pouvait être considérée comme pertinente ;
Les appelantes n'invoquent ni ne démontrent aucun abus de majorité dans le vote de ces résolutions, n'invoquant que leur manque de pertinence, dont la cour n'a pas à juger, dès lors, comme l'a justement relevé le tribunal, que l'objet de ces résolutions, la réalisation de travaux et la communication de documents, relevait des pouvoirs d'administration et de gestion des parties communes ;
Pour ces motifs, et ceux pertinents et circonstanciés des premiers juges que la cour adopte, le jugement doit être confirmé en ce qu'il a rejeté les demandes d'annulation des résolutions n° 6 et 8 de l'assemblée générale du 9 février 2015 ;
¿ Sur la résolution n° 7 de l'assemblée générale du 9 février 2015
Mmes [C] et [E] allèguent que la société [J] n'a pas modifié les dimensions de la trémie de l'escalier d'accès au sous-sol, mais a visiblement uniquement refait à neuf l'escalier qui était vétuste, de sorte qu'il n'y a pas lieu à remise en état, contrairement à ce que soutient la copropriété dans la résolution n° 7 ;
Il y a lieu d'adopter les motifs adoptés par le tribunal, qui en a justement déduit que la résolution litigieuse, votée dans l'exercice des pouvoirs d'administration des parties communes légalement dévolus au syndicat des copropriétaires, ne caractérisait aucune atteinte à l'intérêt collectif ;
Le jugement doit par conséquent être confirmé en ce qu'il a rejeté la demande aux fins d'annulation de la résolution n°7 adoptée par l'assemblée du 9 février 2015 ;
¿ Sur la résolution n° 9 de l'assemblée générale du 9 février 2015
Mmes [C] et [E] font valoir que la société Carrefour ne dispose d'aucun compteur d'eau et que le règlement de copropriété stipule que la consommation d'eau est facturée pour l'ensemble des lots au prorata des tantièmes ;
Le syndicat des copropriétaires soutient qu'il existe un compteur divisionnaire commun installé pour le fonds de commerce loué par les appelantes, qui lui permet de refacturer à ces dernières la consommation d'eau de leur locataire, et que le relevé de compteur a d'ailleurs été produit en cours d'expertise ; il estime que c'est à tort que le tribunal a annulé la résolution n° 9 et qu'il a ainsi statué sur un point relevant de l'instance en ouverture de rapport ;
La résolution n° 9 avait pour objet, au vu du constat par l'expert judiciaire du remplacement de la tuyauterie en plomb existante par une tuyauterie en cuivre et de son raccordement au compteur divisionnaire installé en sous-sol, de mettre en demeure Mmes [C] [E] de communiquer au syndic les consommations d'eau de leur locataire commercial depuis son entrée dans les lieux en janvier 2013, et donner mandat au syndic d'engager en cas de besoin toute voie de droit à cet effet, y compris d'agir en justice ;
Le tribunal a relevé que la répartition d'eau froide devait, en application du règlement de copropriété, être réalisée au prorata des tantièmes de parties communes, et qu'il apparaissait que le compteur divisionnaire n'était pas en état de fonctionnement ;
Toutefois, c'est à tort qu'il en a déduit que cette résolution, prise dans l'objectif d'imputer en charges communes spéciales ces consommations d'eau, devait être annulée, dès lors que, sans égard pour la pertinence de l'objectif au regard des stipulations du règlement de copropriété, aucun abus de majorité n'a pu être démontré en ce qu'il n'est pas établi que cette résolution a été prise dans le seul but de favoriser les intérêts personnels des copropriétaires majoritaires au détriment des copropriétaires minoritaires ;
Par conséquent, le jugement doit être infirmé en ce qu'il a annulé la résolution n° 9 de l'assemblée générale du 9 février 2015 ;
¿ Sur la résolution n° 10 de l'assemblée générale du 9 février 2015
Comme l'a relevé le tribunal, cette résolution avait pour seuls objets d'une part de constater qu'aucun renseignement technique, ni plan, ni descriptif, n'était fourni sur ces travaux et d'autre part de constater que l'assemblée générale ne disposait d'aucun dossier technique ni justification pour permettre un vote éclairé sur les travaux envisagés d'agrandissement de deux grilles en façade et de percement de 100 mm du plancher séparatif des lots en rez-de-chaussée et en sous-sol pour passage des canalisations de froid alimentaire ;
Si l'absence d'effet décisoire de cette résolution emporte nécessairement l'absence de tout abus de majorité, il n'en reste pas moins qu'elle a fait l'objet d'un vote ;
Dès lors, c'est à tort que le tribunal a jugé que la demande d'annulation de cette résolution était sans objet ;
Aucun abus de majorité n'étant démontré, la demande doit être rejetée ; le jugement sera infirmé sur ce point ;
¿ Sur la résolution n° 11 de l'assemblée générale du 9 février 2015
Le tribunal a justement jugé que le rejet de la demande d'annulation des résolutions précédentes de l'assemblée générale du 9 février 2015 rend sans objet la demande afin d'annulation de sa résolution n°11, celle-ci ayant eu pour objet de donner mandat au syndic ou à son conseil de se faire communiquer par la société [J], par l'entremise de leurs bailleresses, avant le 25 avril 2015, les documents et renseignements techniques visés dans ces résolutions, estimés indispensables au vote éclairé de l'assemblée ;
Le jugement doit être confirmé sur ce point ;
¿ Sur la résolution n° 12 de l'assemblée générale du 9 février 2015
Cette résolution vise à valider le mandat donné en urgence au syndic, le cabinet [N], et à l'avocat du syndicat des copropriétaires, Maître [Z], d'assigner les appelantes en annulation des résolutions n° 4 et 5 de l'assemblée générale du 14 décembre 2006 ;
Le fait d'autoriser le syndic à agir en justice contre des copropriétaires ne peut, en lui-même, être constitutif d'un abus de majorité, et Mmes [C] et [E], ne démontrent pas en quoi cette résolution aurait été votée dans le seul but de favoriser les intérêts personnels des copropriétaires majoritaires au détriment des copropriétaires minoritaires ;
Le jugement doit dès lors être confirmé en ce qu'il a rejeté la demande d'annulation de la résolution n° 12 de l'assemblée générale du 9 février 2015 ;
¿ Sur la résolution n° 3 de l'assemblée générale du 23 juin 2015
L'ensemble des demandes d'annulation des résolutions de l'assemblée générale du 9 février ayant été rejeté, il y a lieu de rejeter, pour les mêmes motifs, la demande d'annulation de la résolution n° 3 de l'assemblée générale du 23 juin 2015, laquelle, comme cela a été exposé, vise à confirmer le vote de l'intégralité des résolutions votées lors de l'assemblée générale spéciale du 9 février 2015 ;
Le jugement doit être infirmé sur ce point ;
Sur la demande indemnitaire formée par Mme [B] [H] veuve [C] et Mme [P] [C] épouse [E] à l'encontre de la société Carrefour Proximité
Mmes [C] et [E] allèguent que la médiation judiciaire ordonnée dans le cadre de l'instance n° RG 16/05299 engagée par le syndicat des copropriétaires en ouverture du rapport d'expertise ayant échoué, faute de propositions de règlement amiable formulées par leur locataire commercial, elles sont fondées à être indemnisées du préjudice causé par leur locataire qui, n'ayant pas satisfait aux demandes de communication au syndic de documents et renseignements techniques qu'elles lui ont transmises, et par son inertie, les ont exposées à subir de multiples instances, mises en demeure, et sommations, sans préjudice des frais abusivement engagés par le syndicat lui-même, notamment après désignation d'expert à son initiative ;
La société [J] fait valoir qu'elle n'est pas à l'origine de la multiplication de ces procédures, ni de l'introduction de la présente instance ;
Le tribunal a justement relevé les points suivants :
'Il résulte de l'article 48 du modificatif au règlement de copropriété que les baux consentis par les copropriétaires doivent comporter l'obligation pour les locataires de se conformer à toutes les prescriptions du règlement, dont ils auront pris connaissance et qu'ils s'engageront à exécuter, cette obligation pesant sur les copropriétaires concernés ou leur mandataire ;
Il résulte ensuite du bail renouvelé cédé à la société Carrefour Proximité France que dans le cadre de son activité autorisée, le preneur doit obtenir, sous son entière responsabilité et à sa charge exclusive, toutes les autorisations nécessaires, administratives, de la copropriété, ou autre, qu'aucune plaque, enseigne, ou installation quelconque intéressant l'aspect extérieur de l'immeuble ne pourrait être placée sans avoir été soumise au préalable l'agrément du bailleur qui solliciterait en tant que de besoin les autorisations prévues au règlement de copropriété, qu'il ne pourrait modifier ou faire modifier lesdites façades sans avoir au préalable soumis les plans au bailleur et sans que celui-ci ait autorisé la transformation projetée et ceci sous la surveillance de l'architecte du bailleur, que le preneur devrait effectuer après accord écrit du bailleur toutes formalités, demander toute autorisation administrative et auprès de la copropriété en cas de besoin, et enfin que tout travaux de transformation, de percement ou de démolition, changement de distribution, aménagements et installations effectués à l'entrée en jouissance ou ultérieurement, qui ne pourraient changer la destination de l'immeuble ou sa solidité, ne pourraient être exécutés qu'après accord écrit du bailleur, et sous la surveillance de son architecte ou de celui de la copropriété' ;
Les premiers juges ont à juste titre retenu que Mmes [C] et [E] étaient mal fondées à exciper du préjudice subi par suite de l'engagement par le syndicat des copropriétaires d'instances distinctes, étrangères au contentieux de la légalité des assemblées générales des 9 février et 23 juin 2015 qu'elles contestent dans le cadre de la présente instance, dont elles sont à l'origine ;
Il doit d'ailleurs être relevé que, dans l'instance ayant donné lieu au jugement du 30 juin 2022, actuellement pendante devant cette cour, elles formulent les mêmes demandes à l'encontre de la société [J] en développant les mêmes moyens ;
En tout état de cause, elles procèdent par simple affirmation et ne démontrent pas qu'elles auraient mis en demeure leur locataire commercial de satisfaire à leur égard, conformément aux clauses du bail, à la demande de communication de pièces du syndic, ainsi que d'exécution des travaux de remise en état visés par l'autorisation judiciaire du 29 janvier 2015, qui sont l'objet des résolutions qu'elles contestent ; par ailleurs, le préjudice qu'elles invoquent n'est ni précisé ni étayé ;
Dès lors, c'est à juste titre que le tribunal a retenu qu'elles ne démontraient ni leur préjudice ni le lien de causalité avec un comportement fautif de la société Carrefour ;
Le jugement doit donc être confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de dommages et intérêts formée par Mmes [C] et [E] à l'encontre de la société [J] ;
Sur la demande reconventionnelle du syndicat des copropriétaires en dommages et intérêts
Le syndicat des copropriétaires ne précise pas le fondement de sa demande ; il soutient que les appelantes ont engagé hâtivement cette énième procédure manifestement infondée et abusive et que, par une collusion avec la société Carrefour, elles ont tout mis en 'uvre pour le priver de l'exercice de ses droits et porter atteinte à ses droits, en lui communiquant des arrêtés de la ville de Paris concernant la façade de l'immeuble après la tenue des assemblées générales et après l'expiration des délais de recours, puis en refusant de communiquer à l'assemblée générale spéciale les informations techniques réclamées par l'expert judiciaire et le tribunal ;
L'article 32-1 du code de procédure civile dispose que celui qui agit en justice de manière dilatoire ou abusive peut être condamné à une amende civile d'un maximum de 10 000 euros, sans préjudice des dommages-intérêts qui seraient réclamés ;
L'exercice d'une action en justice, de même que la défense à une telle action, constituent un droit, qui n'est susceptible de dégénérer en abus pouvant donner lieu à des dommages-intérêts qu'en cas de malice, de mauvaise foi ou d'erreur grossière équipollente au dol ;
L'appréciation erronée par une partie de la portée de ses droits ne dégénère en abus que si elle s'évince d'une mauvaise foi persistante ou d'une légèreté blâmable ;
De même, le fait de succomber en ses prétentions, comme en l'espèce, ne suffit pas à démontrer l'abus de procédure ; le syndicat des copropriétaires ne faisant valoir aucun argument détaillé à l'appui de ce moyen, celui-ci doit être rejeté ;
Par ailleurs, en vertu de l'article 1240 du code civil, tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ;
En l'espèce, le syndicat des copropriétaires ne démontre pas en quoi les agissements de Mmes [C] et [E] seraient fautifs ni en quoi ils lui auraient causé un préjudice ; ce moyen doit par conséquent être rejeté ;
Le jugement doit donc être confirmé en ce qu'il a débouté le syndicat des copropriétaires de sa demande de dommage-intérêts ;
Sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile
Le sens du présent arrêt conduit à confirmer le jugement sur les dépens et l'application qui y a été équitablement faite de l'article 700 du code de procédure civile ;
Mmes [C] et [E], parties perdantes, doivent être condamnées in solidum aux dépens d'appel, ainsi qu'à payer au syndicat des copropriétaires la somme supplémentaire de 4.000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;
Le sens du présent arrêt conduit à rejeter la demande par application de l'article 700 du code de procédure civile formulée par Mmes [C] et [E] ;
PAR CES MOTIFS
LA COUR
Statuant par mise à disposition au greffe, contradictoirement,
Réforme le jugement ce qu'il a :
- rejeté la fin-de nous recevoir tirée du défaut de qualité à agir de [J] en annulation des assemblées générales,
- annulé la résolution n°9 de l'assemblée générale du 9 février 2015,
dit sans objet la demande afin d'annulation des résolutions n° 10 de l'assemblée générale du 9 février 2015,
- annulé la résolution n°3 de l'assemblée générale du 23 juin 2015, en tant qu'elle porte, notamment, réitération dans les mêmes termes de la résolution n°9 de l'assemblée générale du 9 février 2015 ;
Statuant à nouveau sur les seuls chefs réformés,
Déclare irrecevable la demande de la société Carrefour Proximité France de confirmation du jugement en ce qu'il a prononcé l'annulation de la résolution n° 9 et dit sans objet les demandes d'annulation des résolutions n° 10 et 11 de l'assemblée générale du 9 février 2015 ;
Déboute Mme [B] [H] veuve [C] et Mme [P] [C] épouse [E] de leur demande d'annulation des résolutions n° 9 et 10 de l'assemblée générale du 9 février 2015 ;
Déboute Mme [B] [H] veuve [C] et Mme [P] [C] épouse [E] de leur demande d'annulation de la résolution n° 3 de l'assemblée générale du 23 juin 2015 ;
Confirme le jugement pour le surplus ;
Y ajoutant,
Condamne in solidum Mme [B] [H] veuve [C] et Mme [P] [C] épouse [E] aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile, ainsi qu'à payer au syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 5] la somme supplémentaire de 4.000 € par application de l'article 700 du même code en cause d'appel ;
Rejette toute autre demande.
LA GREFFIERE LE PRESIDENT