Décisions
CA Paris, Pôle 5 - ch. 6, 5 juin 2024, n° 22/05722
PARIS
Autre
Autre
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 6
ARRET DU 05 JUIN 2024
(n° , 23 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/05722 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CFPSG
Décision déférée à la Cour : Jugement du 03 Février 2022 - tribunal judiciaire de Paris - 9ème chambre 3ème section - RG n° 18/11348
APPELANTES
Madame [V] [G]
[Adresse 3]
[Adresse 3]
S.C.I. SCI 3A
[Adresse 3]
[Adresse 3]
N° SIRET : 498 058 767
agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège
Représentées par Me Matthieu BOCCON GIBOD de la SELARL LX PARIS-VERSAILLES-REIMS, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477
Ayant pour avocat plaidant Me Lucas LOPEZ, avocat au barreau de PARIS, substitué à l'audience par Me Cécile DUNAND, avocat au barreau de PARIS, toque : E1111
INTIMÉES
Société CAISSE D'EPARGNE ET DE PREVOYANCE ILE DE FRANCE
[Adresse 4]
[Adresse 4]
N° SIRET : 382 900 942
agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Représentée par Me Gachucha COURREGE de la SELARL M&C Avocats, avocat au barreau de PARIS, toque : P0159
S.A. CNP ASSURANCES
[Adresse 5]
[Adresse 5]
N° SIRET : 341 737 062
agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Représentée par Me Virginie SANDRIN, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE, toque : C2474, substituée à l'audience par Me Stéphanie COUILBAULT de la SELARL CABINET MESSAGER - COUILBAULT, avocat au barreau de PARIS, toque : D1590
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 02 Avril 2024, en audience publique, devant la Cour composée de :
M. Marc BAILLY, président de chambre
M. Vincent BRAUD, président
MME Laurence CHAINTRON, conseillère
qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par MME Laurence CHAINTRON dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.
Greffier, lors des débats : Mme Mélanie THOMAS
ARRET :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Marc BAILLY, président de chambre et par Mélanie THOMAS, greffier, présent lors de la mise à disposition.
* * * * *
Par actes sous seing privé du 3 mai 2007, la société Caisse d'Epargne et de Prévoyance d'Ile de France (CEIDF) a consenti à la société SCI 3A deux prêts pour l'acquisition et les travaux d'un complexe hôtelier :
- un premier prêt destiné à financer les travaux d'un montant de 2 260 000 euros remboursable en 186 mois, dont une période de préfinancement de 12 mois et de différé d'amortissement de 6 mois, au taux d'intérêt fixe de 4,50 % l'an, et au taux effectif global de 5,29 %, le taux de période étant de 1,32 % et les échéances trimestrielles de 54 614,99 euros en période d'amortissement,
- un second prêt destiné à financer une partie du prix d'acquisition des murs d'un montant de 2 829 000 euros remboursable en 192 mois, dont une période de préfinancement d'un mois et de différé d'amortissement de 12 mois, au taux d'intérêt fixe de 4,50 % l'an et au taux effectif global de 5,27 %, le taux de période étant de 1,32 % et les échéances trimestrielles de 65 094,85 euros en période d'amortissement.
Mme [V] [G] et M. [E] [L], co-gérants et associés de la SCI 3A, ont adhéré au contrat d'assurance groupe souscrit auprès de la société CNP Assurances pour être assurés, selon une quotité de 50 % chacun, en cas de décès, perte totale et irréversible d'autonomie (PTIA) et incapacité temporaire totale de travail (ITT). Les primes d'assurances mensuelles s'élevaient, pour Mme [G], à 907,65 euros pour le prêt de 2 829 000 euros et à 715,67 euros pour le prêt de 2 260 000 euros.
Le 2 octobre 2013, Mme [G] a été victime d'un accident vasculaire cérébral.
Par courrier du 6 juin 2014, la société CNP Assurances a refusé de prendre en charge le remboursement des deux prêts au titre de l'incapacité totale de travail au motif de l'absence de souscription de Mme [G] au contrat d'assurance et de paiement des primes d'assurance.
Par courrier du 19 décembre 2014, la Caisse d'Epargne et de Prévoyance d'Ile de France a admis la perte des dossiers d'assurance décès invalidité et a proposé un accord dans les termes suivants:
« (') Aussi sur notre intervention, la CNP a examiné votre demande afin que l'assurance sollicitée à l'origine soit éventuellement effective de manière rétroactive.
Nous sommes donc convenus que, sous réserve du paiement de toutes les primes dues depuis mai 2007 à ce jour, la CNP et notre Etablissement accepteraient de faire produire leurs effets aux contrats d'assurance à compter de mai 2007 aux conditions du contrat groupe n° 9259 P.
Sous la condition de votre accord sur ces modalités, la CNP procédera au prélèvement, sur le compte de la SCI 3A n°[XXXXXXXXXX01], des primes dues sur les deux derniers exercices, soit approximativement la somme de 50.000 euros qu'il conviendra de créditer préalablement sur le compte de la société. Elle procédera dans nos livres au versement de vos indemnités journalières (sous réserve de l'accord de la CNP sur cette prise en charge). (')
Afin de tenir compte de vos difficultés actuelles, la Caisse d'Epargne Ile de France fera l'avance, de manière exceptionnelle, des primes dues à compter de mai 2007, déduction faite de celles des deux dernières exercices prélevées directement par la CNP, pour un montant estimé à octobre 2014 inclus (à parfaire en fonction de la date de règlement effective) de 138.000,00 euros.
Nous vous précisons que le décompte total des primes dues de mai 2007 à octobre 2014 s'élève à 188.595 euros (').
Les prestations perçues de la CNP s'imputeront prioritairement en déduction de la somme avancée par notre Etablissement vous rappelant que la CEIDF reste contractuellement bénéficiaire des sommes versées par l'assureur, ou par prélèvement sur le compte de la SCI 3A (').
Cette créance devra, en tout état de cause, être remboursée au plus tard le 30/06/2016. À défaut, elle deviendra exigible et produira des intérêts au taux des prêts (4,50 % pour rappel à ce jour) majoré de trois points.
Enfin, nous vous informons qu'à titre exceptionnel, le comité de crédit de la CEIDF a marqué son accord pour la diminution du taux des emprunts de la SCI avec différé rétroactif de l'amortissement du capital pendant 12 mois, soit à compter du 05/05/2014 pour le prêt n°1369079 et à compter du 05/06/2014 pour le prêt n°121766, par prorogation d'autant de leurs durées.
Les avenants correspondants feront l'objet d'un envoi séparé ce jour dans les conditions que nous avons octroyées et qui constituent un geste commercial de la part de notre Etablissement ('). »
Mme [G] a signé cette proposition en mentionnant « sous réserve de la mise en place d'un échéancier pour les 50 000 € demandés préalablement ».
Par avenants du 29 décembre 2014, il a été convenu d'un différé d'amortissement de 12 mois et une prolongation de la durée des contrats de prêt de 12 mois dans les conditions précitées, outre une diminution du taux d'intérêts à 3,50 % l'an. Y sont stipulés, pour le prêt de 2 260 000 euros, un taux effectif global de 3,50 % l'an hors assurance et de 4,64 % l'an assurances CNP comprises et pour le prêt de 2 829 000 euros, un taux effectif global de 3,50 % l'an hors assurance et de 4,68 % l'an assurances CNP comprises.
La société CNP Assurances a pris en charge le remboursement des échéances des deux prêts en appliquant la franchise contractuelle pour la période du 2 octobre au 31 décembre 2013. La SCI 3A a perçu la somme totale de 186 971 euros versée entre le 11 septembre 2015 et le 21 juillet 2016.
Par lettres recommandées du 14 juin 2018, la société Caisse d'Epargne et de Prévoyance d'Ile de France a mis en demeure la SCI 3A de régler, sous quinzaine, les sommes de 172 828,59 euros au titre des échéances impayées du prêt de 2 829 000 euros et de 106 354,77 euros au titre des échéances impayées du prêt de 2 260 000 euros, et dit qu'à défaut, la déchéance du terme des prêts lui sera acquise.
Par lettres recommandées du même jour, la société CEIDF a mis également en demeure Mme [G] de lui payer les mêmes sommes en sa qualité de caution solidaire.
Par exploit d'huissier du 1er octobre 2018, Mme [G] et la SCI 3A ont fait assigner la société Caisse d'Epargne et de Prévoyance d'Ile de France et la société CNP Assurances devant le tribunal judiciaire de Paris en responsabilité pour manquement à leur devoir de conseil et d'information et en remboursement des primes d'assurances versées.
Par exploit d'huissier du 18 septembre 2019, la société Caisse d'Epargne et de Prévoyance d'Ile de France a fait assigner M. [L] en intervention forcée devant le tribunal judiciaire de Paris en sa qualité de caution, en paiement des deux prêts litigieux. Cette procédure a été jointe à la première procédure par ordonnance du juge de la mise en état du 12 décembre 2019.
Par exploit d'huissier du 27 décembre 2019, Mme [G] et la SCI 3A ont fait assigner la Caisse d'Epargne et de Prévoyance d'Ile de France devant le tribunal judiciaire de Paris en annulation des stipulations d'intérêts conventionnels dans les deux avenants aux contrats de prêts, et à défaut en déchéance du droit aux intérêts, au motif notamment d'un taux effectif global erroné en l'absence de prise en compte des arriérés de primes d'assurances.
Par décision du 22 octobre 2020, le juge de la mise en état a ordonné la jonction des procédures.
À la suite de la vente du bien immobilier le 14 avril 2021, la Caisse d'Epargne et de Prévoyance d'Ile de France a été désintéressée de ses demandes au titre du remboursement du prêt.
Par jugement contradictoire du 3 février 2022, le tribunal judiciaire de Paris a :
- déclaré irrecevables les demandes formées par M. [E] [L] ;
- condamné la Caisse d'Epargne et de Prévoyance d'Ile de France à payer à Mme [V] [G] la somme de 5 000 euros en réparation de son préjudice moral ;
- débouté la SCI 3A et Mme [V] [G] du surplus de leurs demandes ;
- condamné la Caisse d'Epargne et de Prévoyance d'Ile de France à payer à la SCI 3A et Mme [V] [G] la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile;
- condamné la SCI 3A et Mme [V] [G] à payer à la société CNP Assurances la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamné la Caisse d'Epargne et de Prévoyance d'Ile de France aux dépens, dont distraction au profit de Me Virginie Sandrin ;
- ordonné l'exécution provisoire de la présente décision.
Par déclaration remise au greffe de la cour le 16 mars 2022, la SCI 3A et Mme [G] ont interjeté appel de cette décision contre la société Caisse d'Epargne et de Prévoyance d'Ile de France et la SA CNP Assurances.
Par conclusions notifiées par voie électronique le 19 mars 2024, la SCI 3A et Mme [G] demandent au visa des articles 1907, 1147 ancien (1231-1 nouveau), 1382 ancien (1240 nouveau), 1315 et 1290 anciens (1353 et 1347-1 nouveau) et 1342-2 du code civil, des articles 1140 à 1143 et 1240 du code civil, de l'article L. 313-4 du code monétaire et financier dans sa version applicable au présent litige, des articles L. 313-2, L. 313-1 et R. 313-1 du code de la consommation, dans leur version applicable au présent litige et de l'article 700 du code de procédure civile, à la cour de :
- les déclarer recevables en leur appel,
- les dire bien fondées,
- infirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Paris le 3 février 2022 en qu'il a :
- condamné la Caisse d'Epargne et de Prévoyance d'Ile de France à payer à Mme [V] [G] la somme de 5 000 euros en réparation de son préjudice moral ;
- débouté la SCI 3A et Mme [V] [G] du surplus de leurs demandes ;
Et statuant à nouveau :
I. Sur la réparation des préjudices
- condamner solidairement les sociétés Caisse d'Epargne et de Prévoyance Ile de France et CNP Assurances à leur verser la somme de 2 500 000 euros en réparation du préjudice financier subi du fait des manquements commis (perte des contrats d'assurance, gestion fautive du sinistre et inadéquation des assurances proposées à la signature des avenants), montant majoré de l'intérêt au taux d'intérêt légal à compter de la date de la décision à intervenir,
- condamner solidairement les sociétés Caisse d'Epargne et de Prévoyance Ile de France et CNP Assurances à verser à Mme [V] [G] la somme de 150 000 euros en réparation de son préjudice moral subi du fait des manquements commis (perte des contrats d'assurance, gestion fautive du sinistre et inadéquation des assurances proposées à la signature des avenants),
- condamner solidairement la société Caisse d'Epargne et de Prévoyance Ile de France et CNP Assurances à leur verser la somme de 1 845 675,54 euros en réparation du préjudice financier subi du fait du fait de l'inadéquation des garanties initiales avec la situation personnelle des emprunteurs, montant majoré de l'intérêt au taux d'intérêt légal à compter de la date de la décision à intervenir,
- constater l'acquiescement de la Caisse d'Epargne et de Prévoyance Ile de France à leur demande de leur verser la somme de 137 929 euros et prendre acte de ce que ce versement a été effectué le 10 mai 2022 et à titre subsidiaire condamner la société Caisse d'Epargne et de Prévoyance Ile de France à leur verser la somme de 137 929 euros, montant majoré de l'intérêt au taux d'intérêt légal,
II. Sur les TEG afférents aux avenants aux prêts
S'agissant du prêt n° 0189401 devenu 1321766 puis 9425954 selon avenant du 29 décembre 2014
A titre principal
- prononcer la nullité de la stipulation d'intérêts conventionnels fixée dans l'avenant au prêt n°0189401 devenu n°9425954,
- ordonner la substitution du taux d'intérêt légal au taux conventionnel à la date de souscription de l'avenant soit 0,04 %,
- condamner la Caisse d'Epargne Ile de France à rembourser à la SCI 3A les intérêts trop-perçus correspondant à l'écart entre les intérêts au taux conventionnel et les intérêts au taux légal, soit la somme de 405 498,36 euros avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation,
- ordonner la capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1342-2 du code civil,
A titre subsidiaire
- prononcer la déchéance totale des intérêts conventionnels fixés dans l'avenant au prêt n° 0189401 devenu n° 9425954,
- ordonner la substitution du taux d'intérêt légal au taux conventionnel à la date de souscription de l'avenant soit 0,04 %,
- condamner la Caisse d'Epargne Ile de France à rembourser à la SCI 3A les intérêts trop-perçus correspondant à l'écart entre les intérêts au taux conventionnel et les intérêts au taux légal, soit la somme de 405 498,36 euros avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation,
- ordonner la capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1342-2 du code civil,
S'agissant du prêt n°0189409 devenu 1369079 puis 9426024 selon avenant du 29 décembre 2014
A titre principal
- prononcer la nullité de la stipulation d'intérêts conventionnels fixée dans l'avenant au prêt n° 0189409 devenu n° 9426024,
- ordonner la substitution du taux d'intérêt légal au taux conventionnel à la date de souscription de l'avenant soit 0,04 %,
- condamner la Caisse d'Epargne Ile de France à rembourser à la SCI 3A les intérêts trop-perçus correspondant à l'écart entre les intérêts au taux conventionnel et les intérêts au taux légal, soit la somme de 324 995,14 euros avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation,
- ordonner la capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1342-2 du code civil ;
A titre subsidiaire
- prononcer la déchéance totale des intérêts conventionnels fixés dans l'avenant au prêt n° 0189409 devenu n° 9426024 ;
- ordonner la substitution du taux d'intérêt légal au taux conventionnel à la date de souscription de l'avenant soit 0,04 % ;
- condamner la Caisse d'Epargne Ile de France à rembourser à la SCI 3A les intérêts trop-perçus correspondant à l'écart entre les intérêts au taux conventionnel et les intérêts au taux légal, soit la somme de 324 995,14 euros, avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation ;
- ordonner la capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1342-2 du code civil ;
III) En tout état de cause
- condamner la Caisse d'Epargne Ile de France à leur payer la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la Caisse d'Epargne Ile de France aux entiers dépens
Par conclusions notifiées par voie électronique le 14 mars 2024, la société Caisse d'Epargne et de Prévoyance d'Ile de France demande au visa des articles 1193 et 1872 du code civil, à la cour de :
- juger la SCI 3A et Mme [V] [G] mal fondées en leurs demandes et en conséquence les en débouter,
- confirmer en toutes ses dispositions le jugement dont appel,
- condamner solidairement la SCI 3A et Mme [V] [G] à lui payer la somme de 10 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner solidairement la SCI 3A et Mme [V] [G] aux entiers dépens.
Par conclusions notifiées par voie électronique le 18 mars 2024, la société CNP Assurances demande à la cour de :
A titre principal,
- confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Paris le 2 février 2022 en ce qu'il a débouté Mme [G], la SCI 3A de l'ensemble de leurs demandes de condamnations formées à l'encontre de CNP Assurances,
En tout état de cause,
- débouter la SCI 3A et Mme [G] de l'intégralité de leurs demandes,
- rejeter les demandes de dommages et intérêts,
- condamner tout succombant à lui verser la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- le condamner aux entiers dépens dont distraction au profit de Me Virginie Sandrin.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et des prétentions des parties, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux dernières conclusions écrites déposées en application de l'article 455 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 19 mars 2024 et l'audience fixée au 2 avril 2024.
MOTIFS
Sur la responsabilité de la Caisse d'Epargne et de Prévoyance d'Ile de France et de la CNP Assurances
Sur la perte des contrats d'assurance
La SCI 3A et Mme [G] font valoir que la Caisse d'Epargne Ile de France a reconnu avoir « égaré » les dossiers d'assurance groupe de Mme [G] et de M. [L]. Or, un courrier du 20 décembre 2007 indique que l'obligation de transmission des contrats d'assurance pesait sur la banque. La Caisse d'Epargne Ile de France a donc commis une faute en ne s'assurant pas de la bonne transmission des dossiers à la société CNP Assurances.
La Caisse d'Epargne et de Prévoyance d'Ile de France fait valoir que Mme [G] a été assurée et l'assurance a été mise en 'uvre au titre des deux prêts. Le fait que les documents d'acceptation par Mme [G] des propositions de la société CNP Assurances se soient égarés ne saurait constituer une faute dès lors que l'adhésion de Mme [G] a été effective et que la société CNP Assurances a procédé au versement des indemnités prévues par les contrats. De plus la SCI 3A et Mme [G] ne rapportent pas la preuve d'un lien de causalité entre la faute invoquée et le préjudice allégué dont le montant serait de 2 500 000 euros.
Aux termes de l'article 1147 du code civil, dans sa version applicable au litige, le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de sa part.
En l'espèce, il est constant que Mme [G] a adhéré, par l'intermédiaire de la société Caisse d'Epargne et de Prévoyance d'Ile de France, au contrat d'assurance groupe de la société CNP Assurances, dont elle a accepté les conditions particulières d'assurance le 3 mai 2007 (pièce de la banque n° 6)
Il est également constant que la société Caisse d'Epargne et de Prévoyance d'Ile de France a égaré les dossiers de souscription ainsi qu'elle l'a reconnu dans son courrier précité adressé à Mme [G] le 19 décembre 2014 (pièce n° 9), dans lequel elle lui confirmait que 'les dossiers d'assurance décès-invalidité vous permettant la couverture de ces prêts ont été égarés au cours de leur acheminement postal.'
C'est donc à juste titre que le tribunal a considéré que la société Caisse d'Epargne et de Prévoyance d'Ile de France qui devait, en sa qualité d'intermédiaire, transmettre les dossiers de souscription à la compagnie d'assurance afin de donner effet à l'adhésion au contrat d'assurance, a commis une faute en ne s'assurant pas de la transmission effective du dossier, peu important que comme le relève la banque, l'assurance ait finalement été mise en 'uvre au titre des deux prêts.
Sur le traitement du sinistre de Mme [G]
La SCI 3A et Mme [G] soutiennent en premier lieu que, contrairement à ce qu'a relevé le tribunal, les contrats de prêt stipulaient dans leur article 2 'caractéristiques du prêt' que les échéances trimestrielles d'un montant de 65 094,85 euros pour le prêt d'un montant de 2 829 000 euros et de 54 615,99 euros pour le prêt d'un montant de 2 260 000 euros étaient entendues assurance incluse, tel que cela ressort de la mention 'échéance Assur. Incluse'.
Elles font valoir que le traitement du sinistre de Mme [G] est fautif car le devoir d'information et de conseil en matière d'assurance ne s'arrête pas au moment de la souscription du contrat d'assurance, mais s'étend pendant tout le temps de son exécution et notamment après la survenance du sinistre. Or, les institutions financières ont commis des manquements après la survenance du sinistre de Mme [G] en manquant à leur devoir de conseil et d'information en la faisant adhérer à une 'solution' qui ne servait en réalité que leurs seuls intérêts alors qu'elle se trouvait dans un état de détresse et de faiblesse du fait de l'absence d'indemnisation du sinistre survenu plus d'un an auparavant. La solution subordonnant la prise en charge du sinistre de Mme [G] au règlement, par les assurés et par la SCI 3A, de l'intégralité des primes d'assurance de Mme [G] et de M. [L] depuis 2007 était abusive au motif que le non-prélèvement des primes à échéances résultait d'une faute de la banque qui avait 'égaré' les contrats d'assurance, le rappel de primes ne pouvait porter que sur deux années au regard des règles de prescription applicables en matière d'assurance et enfin l'indemnisation était subordonnée au règlement des primes de Mme [G] et de M. [L] alors que le sinistre ne concernait que Mme [G]. Par ailleurs, ni la Caisse d'Epargne, ni la CNP Assurances ne l'ont informée d'une part, du montant précis de l'indemnité versée avant son acceptation de la solution proposée, et d'autre part, du fait que la solution 'négociée' ne lui ouvrait droit qu'à une indemnisation limitée de son sinistre. In fine, la SCI 3A n'a perçu qu'une infime partie (186 971 euros) des indemnités versées par la société CNP Assurances dans les livres de la banque d'un montant de 324 900 euros, la banque ayant conservé la somme de 137 929 euros correspondant au montant indiqué dans la proposition du 19 décembre 2014 comme étant le montant des primes d'assurances dues à la CNP Assurances sur la période de mai 2007 à mai 2012, estimé alors à 138 000 euros dont elle se proposait de faire l'avance auprès de l'assureur. Cependant, la banque n'a jamais apporté la preuve d'avoir réellement procédé au règlement de cette somme à la CNP Assurances, de sorte qu'elle ne prouve pas qu'elle détenait une créance sur la SCI 3A et sur Mme [G] et qu'elle était dès lors bien fondée à opérer cette retenue. La banque a finalement fini par rembourser cette somme à la SCI 3A le 10 mai 2022, de sorte que la retenue pendant plusieurs années de la somme de 137 929 euros sur les indemnités versées constitue une faute de la Caisse d'Epargne. En outre, les indemnités versées à la SCI 3A d'un montant de 186 971 euros ont été utilisées, dans leur quasi-totalité, pour régler les 'arriérés' de primes d'octobre 2012 à mars 2015 et les primes courantes de sorte que la banque n'a pas dépensé le moindre euro pour réparer sa faute d'une particulière gravité. Elle a, au contraire, abusé de la situation de détresse et de vulnérabilité de Mme [G] liée à son AVC et à l'absence de toute indemnisation financière 14 mois après la survenance du sinistre pour surprendre son consentement ce qui constitue une 'violence' au sens des articles 1140 à 1143 du code civil et un délit civil source de responsabilité au sens des dispositions de l'article 1240 du code civil.
La Caisse d'Epargne et de Prévoyance d'Ile de France réplique qu'elle n'a pas, durant 7 ans recouvré les primes d'assurance car les échéances des prêts n'étaient pas entendues 'assurance incluse', conformément aux stipulations du contrat de prêt.
Elle fait valoir que les demandes tant de Mme [G] que de la SCI 3A sont irrecevables en ce qui concerne les contrats de M. [L], nul ne plaidant par procureur. Si la banque a un devoir d'éclairer son client lors de la souscription d'un contrat d'assurance sur l'adéquation des risques couverts à sa situation personnelle, celle-ci s'apprécie en premier lieu à la date de la souscription initiale du contrat. Le contrat souscrit le 3 mai 2007 couvrait Mme [G] pour les garanties ITT et PTIA jusqu'au 10 août 2018, soit pendant plus de 11 ans, et couvrait le risque décès jusqu'au 10 août 2023, soit pendant plus de 16 ans. Or, les prêts souscrits le 3 mai 2007 avaient été souscrits pour des durées respectives de 15 ans pour le crédit travaux et de 16 ans pour le crédit acquisition, de sorte que dès l'origine, les garanties ITT et PTIA ne couvraient pas la totalité de la durée des prêts. Mme [G], femme d'affaires avisée, n'a pu se méprendre à la lecture de la notice, qui communiquait une information claire et précise tant sur le montant que sur la durée des garanties. En 2014, après avoir refusé dans un premier temps de prendre en charge le sinistre à la suite de l'AVC dont avait été victime Mme [G] le 2 octobre 2013, la CNP Assurances a finalement accepté de faire produire leurs effets aux contrats d'assurance, pour autant qu'elle reçoive le paiement de l'intégralité des primes arriérées, lesquelles ne pouvaient être acquittées par la SCI 3A que dans la limite des primes non prescrites. Mme [G] était, en 2014, assistée d'un avocat et en possession de ses moyens. Elle ne saurait donc soutenir que les 'institutions financières' se seraient 'bien gardées' de l'informer que la 'solution négociée ne lui ouvrait droit qu'à une indemnisation limitée de son sinistre', dès lors que cette 'solution' consistait à la faire bénéficier du bénéfice du contrat d'assurance groupe initialement souscrit à la garantie du remboursement des prêts dans les conditions de cette souscription. Au surplus, la solution proposée à Mme [G] et la SCI 3A consistant à régulariser la situation n'a pas été préjudiciable à la SCI 3A. Bien plus, et contrairement aux affirmations de Mme [G] et de la SCI 3A, la SCI n'a pas supporté la charge du paiement réclamé par la société CNP Assurances des primes dues au titre de la période allant du mois de mai 2007 au mois de septembre 2012. L'examen des relevés de comptes de la SCI 3A démontrent qu'elle a bénéficié de l'intégralité des fonds versés par la société CNP Assurances en exécution de l'accord intervenu à raison du sinistre.
La société CNP Assurances fait valoir qu'à la date de l'AVC de Mme [G] le 2 octobre 2013, elle n'avait pas connaissance de l'acceptation de la proposition d'assurance. Par ailleurs, aucune prime d'assurance n'avait été prélevée. Ainsi, en application des article 4-1 et 9 de la notice d'information relative au contrat d'assurance groupe, l'assurance n'avait pas pris effet et Mme [G] ne pouvait bénéficier d'aucune prise en charge puisque son adhésion était caduque. Conformément au courrier de la société Caisse d'Epargne du 19 décembre 2014, eu égard à la situation particulière de Mme [G], la société CNP Assurances a accepté, à titre dérogatoire et commercial et sous réserve du paiement des primes dues depuis mai 2007, de faire produire ses effets au contrat d'assurance auquel Mme [G] avait demandé à adhérer, et ce à compter de mai 2007. Cette proposition a été acceptée par Mme [G]. La société CNP Assurances a ainsi pris en charge les prêts de la SCI 3A, au titre de la garantie ITT à compter du 31 décembre 2013 (date d'expiration du délai de franchise de 90 jours) et a versé à ce titre la somme de 324 900 euros, soit 162 450 euros au titre de chaque prêt. L'argument relatif à l'absence d'information de Mme [G] sur le montant d'indemnité d'assurance qui allait finalement être allouée ne saurait prospérer en application de l'article 6-4 de la notice d'information. Par ailleurs, après avoir sollicité et obtenu la prise en charge, Mme [G] et la SCI 3A ne peuvent sérieusement soutenir que la société CNP Assurances aurait commis des fautes qui justifieraient l'allocation de dommages et intérêts à hauteur de 4 495 675,54 euros. L'abus de la situation invoqué pour la première fois en appel par Mme [G] et la SCI 3A ne saurait prospérer car la société CNP Assurances n'a commis aucune violence ni aucun délit. Comme l'a relevé le tribunal, il ne peut lui être reproché d'avoir accepté de mettre en place le contrat d'assurance auquel Mme [G] avait demandé à adhérer en mai 2007, sous réserve du paiement des primes, et d'avoir pris en charge les prêts de la SCI 3A au titre de la garantie ITT. En outre, conformément à l'article 6-2 de la notice d'information, le risque décès était garanti jusqu'au 70ème anniversaire de Mme [G]. La société CNP Assurances n'a commis aucune faute et comme l'a relevé le tribunal, 'il n'est pas établi que les impayés seraient en lien avec la perte des dossiers de souscription à l'assurance (').'
Il est de jurisprudence constante que le banquier, qui propose à son client auquel il consent un prêt, d'adhérer au contrat d'assurance de groupe qu'il a souscrit à l'effet de garantir, en cas de survenance de divers risques, l'exécution de tout ou partie de ses engagements, est tenu de l'éclairer sur l'adéquation des risques couverts à sa situation personnelle d'emprunteur, la remise de la notice ne suffisant pas à satisfaire à cette obligation (Cass. Ass. Plén. 2 mars 2007, n° 06-15267).
En l'espèce, Mme [G] reproche aux intimées, d'une part, un manquement à leur devoir d'information et de conseil dans la gestion du sinistre et, d'autre part, un abus de son état de détresse qui aurait vicié son consentement.
A titre liminaire, il y a lieu de relever que, comme l'a retenu le tribunal, il ressort des conditions particulières des contrats de prêts que le montant des échéances trimestrielles en période d'amortissement, de 54 615,99 euros pour le prêt d'un montant de 2 260 000 euros et de 65 094,85 euros pour le prêt d'un montant de 2 829 000 euros, n'incluaient pas les primes d'assurance et il est mentionné dans chacun des prêts, dans la partie réservée à l'assurance, que le montant des primes sera prélevé directement par la compagnie d'assurance sur un compte désigné par l'emprunteur. Les conditions particulières d'assurance signées par Mme [G] le 3 mai 2007 (pièce de la banque n° 6) mentionnaient le montant annuel des primes, à savoir 8 588 euros pour le prêt de 2 260 000 euros et 10 891,65 euros pour le prêt de 2 829 000 euros. Mme [G] soutient donc vainement avoir cru que les primes étaient incluses dans les échéances.
L'article 4-1 de la notice d'information relative au contrat d'assurance groupe auquel Mme [G] a demandé à adhérer et dont elle ne conteste pas avoir eu connaissance stipule que : 'L'assurance prend effet, sous réserve de l'encaissement de la première prime et de la signature de l'offre de crédit, à la date d'acceptation des conditions particulières d'assurance par l'Emprunteur (signature des conditions particulières d'assurance communiquées par l'Assureur).'
L'article 9 de cette notice d'information stipule en outre que : 'Les garanties sont consenties moyennant le paiement d'une prime annuelle exprimée en pourcentage, assise sur le capital initial du prêt.'
En l'espèce, il n'est pas établi qu'avant la déclaration de sinistre de Mme [G] à la suite de l'AVC dont elle a été victime le 2 octobre 2013, la société CNP Assurances ait eu connaissance de l'acceptation par Mme [G] de sa proposition d'assurance, compte tenu de la perte des contrats d'assurance par la banque.
Par ailleurs, il est constant qu'à cette date, aucune prime d'assurance n'avait été prélevée, de sorte qu'en application des dispositions précitées, l'assurance n'avait pas pris effet.
C'est donc à juste titre que le tribunal a considéré qu'en l'absence de paiement des primes, le refus initial de la société CNP Assurances émis le 6 juin 2014 de prendre en charge le sinistre déclaré par Mme [G] était fondé.
Par ailleurs, il ressort du courrier précité du 19 décembre 2014, qu'eu égard à la situation de Mme [G], les intimées sont convenues que : 'sous réserve du paiement de toutes les primes dues depuis mai 2007 à ce jour, la CNP et notre Etablissement accepteraient de faire produire leurs effets aux contrats d'assurance à compter de mai 2007 aux conditions du contrat groupe n° 9259.
Sous la condition de votre accord sur ces modalités, la CNP procédera au prélèvement, sur le compte de la SCI 3A (') des primes dues sur les deux derniers exercices, soit approximativement la somme de 50 000 euros ('). Elle procédera dans nos livres au versement des indemnités journalières (sous réserve de l'accord de la CNP sur cette prise en charge).
Afin de tenir compte de vos difficultés actuelles, la Caisse d'Epargne Ile de France fera l'avance, de manière exceptionnelle, des primes dues à compter de mai 2007, déduction faite de celles des deux derniers exercices prélevés directement par la CNP(').'
Mme [G] a accepté expressément cette proposition en portant à ce courrier la mention manuscrite suivante : 'sous réserve de la mise en place d'un échéancier pour les 50 000 euros demandés préalablement', suivie de sa signature.
Il ne saurait être reproché à la société CNP Assurances d'avoir accepté, à la demande de Mme [G], sous réserve du paiement des primes dues depuis 2007 et des primes courantes, de faire produire ses effets au contrat d'assurance auquel l'appelante avait demandé à adhérer et ce, à compter de mai 2007.
Toutes les informations relatives tant au coût des assurances qu'à leur étendue apparaissent clairement dans les conditions particulières d'assurance et dans la notice d'information dont Mme [G] a paraphé chaque page, de sorte qu'elle n'a pu se méprendre sur le champ des garanties souscrites en mai 2007 et les conditions de leur mise en oeuvre.
Par ailleurs, comme l'a relevé à juste titre le tribunal, la proposition du 19 décembre 2014 est très détaillée sur les conditions de prise en charge du sinistre.
Mme [G] est une femme d'affaires avisée qui dirige plusieurs sociétés. Elle était accompagnée lors des négociations avec la banque d'un avocat qui avait connaissance de l'ensemble des engagements contractuels de sa cliente ainsi qu'en atteste son courrier de réclamation adressé à la société CNP Assurances le 11 juin 2014 versé aux débats par la banque (pièce n° 8). Les courriers adressés à la banque les 2 janvier et 18 décembre 2014 avant la signature de l'accord du 19 décembre 2014 démontrent qu'elle était en parfaite possession de ses moyens.
Mme [G] soutient donc vainement, en cause d'appel, que 'les institutions financières' auraient abusé de sa situation de détresse et de vulnérabilité induite par son AVC pour surprendre son consentement, ce qui serait constitutif de 'violence' viciant son consentement, étant relevé de surcroît qu'elle ne tire pas les conséquences juridiques du vice du consentement allégué dès lors qu'elle ne sollicite pas la nullité de l'accord conclu le 19 décembre 2014.
En tout état de cause, il est constant que la société CNP Assurances a pris en charge les prêts de la SCI 3A, au titre de la garantie ITT à compter du 31 décembre 2013 (date d'expiration du délai de franchise contractuel de 90 jours) et a versé à ce titre la somme de 324 900 euros, soit 162 450 euros au titre de chaque prêt.
Mme [G] soutient vainement qu'elle n'aurait pas eu d'information sur le montant d'indemnité qui allait lui être versé par la société CNP Assurances alors que l'article 6-4 de la notice d'information stipule que :'en cas d'ITT de l'Assuré reconnue par l'Assureur, ce dernier verse, à l'issue du délai de franchise, un forfait journalier défini par l'Assuré (') au prorata du nombre de jours d'incapacité temporaire Totale de travail dûment justifiés. Ce forfait journalier est limité à 1/30ème du montant de la mensualité du prêt due et ne peut excéder 720 jours de prise en charge au titre d'une même période d'indemnisation.'
Du reste, dans son courrier du 7 mai 2014 (pièce n° 9 de l'appelante), Mme [G] faisait expressément référence au délai de franchise prévu par les stipulations contractuelles et le courrier de son conseil du 11 juin 2014 visait également la notice d'information et les conditions particulières du contrat d'assurance souscrit.
Mme [G] était donc ainsi informée dès l'origine du montant de l'indemnité susceptible de lui être versée en fonction de la durée de son arrêt de travail.
C'est donc à juste titre que le tribunal a considéré que la société CNP Assurances n'a commis aucune faute dans le traitement du sinistre de Mme [G].
En revanche, s'il résulte des développements qui précédent que la société Caisse d'Epargne et de Prévoyance d'Ile de France n'a pas commis de faute lors de la conclusion de l'accord du 19 décembre 2014, force est de constater que le versement tardif par la banque à la SCI 3 A des indemnités versées par la société CNP Assurances est fautif, dès lors qu'il ressort des relevés de compte de la SCI 3A qu'elle a perçu, d'une part, la somme de 186 971 euros, de manière fractionnée et des années après le sinistre survenu le 2 octobre 2013 (soit 113 621 euros le 11 septembre 2015, 32 850 euros le 7 octobre 2015, 13 500 euros le 27 mai 2016 et 27 000 euros le 21 juillet 2016) et d'autre part, la somme de 137 929 euros le 10 mai 2022.
Sur les assurances proposées à la signature des avenants
La SCI 3A et Mme [G] font valoir que les assurances proposées à la signature des avenants du 29 décembre 2014 étaient inadéquates. En effet, ces avenants prévoyaient un différé d'amortissement sur 12 mois et un allongement de la durée des prêts jusqu'au 5 juin 2024. Compte tenu du sinistre subi par Mme [G], l'obligation de conseil et de mise en garde des institutions financières leur imposaient de procéder à un réexamen des conditions d'assurance avant de procéder à la signature des avenants. Ce réexamen était également prévu par les conditions particulières d'assurance émises le 20 avril 2007 et signées le 3 mai 2007 ainsi que par l'article 3.3 de la notice d'information. Or aucun conseil et aucune mise en garde n'a été délivrée par les institutions financières sur la nécessité de réexaminer les conditions de l'assurance. Les avenants aux contrats de prêts n'ont pas abordé les questions cruciales d'assurance décès, invalidité et incapacité de Mme [G], alors que la CEIDF et la CNP Assurances savaient que cette dernière continuait à souffrir de son AVC et qu'elle se trouvait toujours en arrêt de travail plus de deux ans après. Les conditions de l'assurance proposées en 2007 étaient totalement inadaptées aux besoins de Mme [G] au moment de la conclusion des avenants en 2014, dans la mesure où:
- puisqu'elle avait plus de 60 ans en décembre 2014, elle n'était pas éligible à la garantie ITT offerte dans le cadre du contrat groupe, l'adhérent devant être âgé de moins de 60 ans à la date de l'adhésion,
- de même, les garanties PTIA et ITT cessaient au 65ème anniversaire de l'assuré, soit le 10 août 2018, soit avant le terme des deux prêts ayant fait l'objet des deux avenants du 29 décembre 2014 dont les termes étaient fixés au 5 juin 2024, Mme [G] ne pouvant ainsi être assurée que pendant une période de près de 6 ans, contrairement aux exigences des deux contrats de prêts,
- elle ne pouvait non plus être couverte au titre de la garantie décès à compter du [Date naissance 2] 2023, date de ses 70 ans, de sorte que près de douze mois ne pouvaient donc être garantis par rapport aux termes des prêts le 5 juin 2024,
- enfin, aucune garantie n'était offerte dans le contrat de groupe n° 9259 P pour couvrir les risques futurs d'invalidité partielle ou totale alors que Mme [G] encourait un risque à terme d'être placée en invalidité partielle voire totale, dès lors qu'au moment des avenants, elle était en incapacité de travail depuis plus d'un an.
La Caisse d'Epargne et de Prévoyance d'Ile de France fait valoir qu'il n'y a pas inadéquation des assurances proposées à la signature des avenants car la signature de ceux-ci n'a pas donné lieu à une modification de la police d'assurance. Le terme 'vous venez d'adhérer' figurant au début du courrier du 18 mai 2015 ne saurait constituer la preuve d'une "nouvelle adhésion", au contraire, ce courrier concrétise l'accord des parties pour faire produire ses effets au contrat d'assurance auquel Mme [G] avait adhéré en 2007. Dès lors, il n'y avait pas de 'défaut de conseil et/ou de mise en garde' en 2015 sur le caractère inadapté des assurances souscrites en 2007 et dont la SCI 3A et Mme [G] entendaient obtenir le bénéfice. Contrairement aux affirmations de la SCI 3A et de Mme [G], la question d'un réexamen des conditions d'assurance ne se posait pas car à la date de la signature des avenants aux contrats de prêt, il n'est pas contestable que Mme [G] n'était plus éligible au contrat d'assurance groupe tant au regard de son âge que de sa situation médicale. Il est artificiel de critiquer le fait que Mme [G] ne pouvait bénéficier de certaines garanties à son 65ème ou à son 70ème anniversaire car s'agissant de la couverture du risque ITT et PTIA de Mme [G], celle-ci a pris fin le 10 août 2018 et devait dès l'origine prendre fin à son 65ème anniversaire. A l'égard de ce risque, la prolongation d'une durée de 12 mois du prêt est sans incidence. S'agissant de la couverture décès de Mme [G] qui devait cesser le [Date naissance 2] 2023 à son 70ème anniversaire, il n'est pas contestable que la prorogation de la durée du prêt faisait peser le risque en cas de décès entre le 5 septembre 2023 et le 5 septembre 2024 de ne pas voir couvrir par l'assurance le montant de ce capital tel qu'il se présenterait. Or, si les premiers juges ont considéré que la banque aurait dû 'éclairer Mme [G] afin de lui permettre d'envisager la souscription d'une assurance complémentaire auprès d'un assureur de son choix', ils ont également relevé que si Mme [G] a pu perdre une chance de bénéficier de cette garantie jusqu'au terme des prêts, la cession par la SCI 3A du complexe immobilier intervenue au mois d'avril 2021 a fait disparaître le risque invoqué. En outre, Mme [G] et la SCI 3A n'établissent pas la faute de la banque. Aux mois de mars/mai 2015, Mme [G] n'était plus éligible au contrat d'assurance groupe, tant au regard de son âge que de sa situation médicale, de sorte que l'intérêt économique pour la SCI 3A et Mme [G] de la solution proposée était évidente.
Il est de jurisprudence constante que la banque doit conseiller explicitement son client sur les possibilités de souscription individuelle, auprès de toute compagnie d'assurance de son choix, d'une assurance adaptée garantissant certains risques non couverts par l'assurance groupe qu'elle propose ou s'assurer que le refus de souscrire une telle assurance est parfaitement éclairé et ne résulte pas d'un éventuel manque d'information (Civ. 2ème, 23 juin 2016, n° 15-12133).
Aux termes des avenants conclus le 29 décembre 2014 entre d'une part, la Caisse d'Epargne et de Prévoyance d'Ile de France et d'autre part, la SCI 3A, Mme [G] et M. [L], le taux d'intérêt des prêts a été ramené de 4,50 % à 3,50 %, la durée des prêts d'un montant de 2 829 000 euros et de 2 260 000 euros a été allongée pour être respectivement portée au 5 juin 2024 au lieu du 5 juin 2023 et au 5 février 2024 au lieu du 5 février 2023, un différé d'amortissement en capital de 12 mois a été accordé et le taux effectif global de ces prêts a été fixé respectivement à 3,50 % hors assurance et 4,68 % (assurance CNP comprise) pour le premier prêt et 3,50 % hors assurance et 4,64 % (assurance CNP comprise) pour le second prêt (pièces n° 15 et 16 des appelantes).
Les parties ont par ailleurs expressément reconnues que : 'Le présent avenant ne consacre qu'un accord de réaménagement du contrat d'origine ci-dessus mentionné et qu'il n'apporte, en conséquence, aucune novation aux autres conditions de ce dernier ; tout particulièrement les garanties recueillies et attachées à ce prêt continuent à produire leur plein et entier effet et sont entièrement et expressément réservées'.
C'est donc à juste titre que le tribunal a retenu que la mention indiquée dans les conditions particulières d'assurance signées et approuvées par Mme [G] le 3 mai 2007 aux termes de laquelle 'Toute modification de montant, de durée, de quotité d'un prêt objet du financement ainsi que toute modification de son mode d'amortissement entraîne de plein droit l'annulation de la présente proposition et implique un renouvellement des formalités d'entrée dans l'assurance' n'était pas de nature à faire naître une obligation de conseil ou de mise en garde lors de la modification par avenants des contrats de prêt, la proposition d'assurance ayant déjà été acceptée lors de la proposition des avenants.
Enfin, comme l'a relevé le tribunal par des motifs pertinents que la cour adopte, 'compte tenu du différé d'amortissement de douze mois accordé aux termes des avenants litigieux et de l'âge de Mme [G]' qui avait 61 ans à la date de leur signature dès lors qu'elle est née le [Date naissance 2] 1953, 'la signature de ces avenants n'a eu aucune incidence sur les risques d'ITT et PTIA dont la couverture, admise dès 2007, cessait en 2018, au 65ème anniversaire de l'assurée.
En revanche, le risque de décès n'était plus garanti entre la date du 70ème anniversaire de l'assurée, en août 2023, et le nouveau terme des contrats de prêts, en février et juin 2024 selon les termes des avenants, tandis qu'il l'était avant la conclusion des avenants, et il n'est pas établi que la banque ait attiré l'attention de Mme [G] sur ce point, alors que le banquier qui propose à son client, auquel il consent un prêt, d'adhérer au contrat d'assurance de groupe, reste tenu d'éclairer l'assuré sur l'adéquation des risques couverts à sa situation personnelle.
La société Caisse d'Epargne et de Prévoyance d'Ile de France était ainsi tenue, en cours d'exécution du contrat et compte tenu de la modification des contrats de prêt susceptible de modifier la couverture des risques, d'éclairer Mme [G] afin de lui permettre d'envisager la souscription d'une assurance complémentaire auprès d'un assureur de son choix, ce dont elle ne justifie pas, engageant ainsi sa responsabilité contractuelle.'
La banque étant à l'origine des avenants modifiant la situation de l'assurée, la responsabilité de la société CNP Assurances n'est pas engagée de ce chef.
Il résulte de l'ensemble de ces éléments que la Caisse d'Epargne et de Prévoyance d'Ile de France a commis des manquements contractuels en ne vérifiant pas la transmission effective à l'assureur du dossier de souscription de Mme [G] à l'assurance groupe, en reversant tardivement à la SCI 3A les indemnités versées par la société CNP Assurances et en s'abstenant d'éclairer Mme [G] sur l'adéquation des risques couverts à sa situation personnelle au regard de la modification des contrats de prêts.
Aucune faute n'étant établie à l'encontre de la société CNP Assurances, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a débouté Mme [G] et la SCI 3A des demandes formées à son encontre.
Sur les préjudices
Sur le préjudice financier
La SCI 3A et Mme [G] sollicitent l'infirmation du jugement déféré en ce qu'il les a déboutés de leur demande en réparation de leur préjudice financier au motif que le lien de causalité entre les fautes de la CEIDF et le préjudice subi par la SCI 3 A ne serait pas établi.
Elles font valoir que si la CEIDF n'avait pas 'égaré' les contrats d'assurance de Mme [G] et de M. [L], et avait satisfait à son devoir d'information et de conseil en matière d'assurance, Mme [G] aurait été indemnisée dès le 31 décembre 2013 a minima aux conditions du contrat de groupe et aurait donc perçu, a minima, la somme de 41 850 euros par trimestre, ce qui aurait pu permettre de la remplacer pour assurer la pérennité de la SCI 3A et des sociétés d'exploitation, et par voie de conséquence de bénéficier des loyers et de régler les sommes dues au titre des prêts. Or, en l'absence d'indemnisation, les difficultés à régler les prêts ont commencé à se faire sentir dès le mois de février 2014. Dès le mois d'avril 2014, la CEIDF a constaté un impayé de 59 000 euros. Depuis la souscription des prêts en 2007, la SCI 3A n'avait jamais connu aucun incident de paiement. Dans le cadre de la solution proposé par la Caisse d'Epargne, la SCI 3A a dû supporter le poids de plus de sept années de primes (264 589 euros) à un moment où elle avait besoin d'être indemnisée et ce alors que le montant des échéances des prêts s'élevait à 480 000 euros par an. Les appelantes n'ont eu d'autre choix, pour régler les sommes réclamées par la CEIDF, que de brader le bien immobilier de la SCI 3A qui a été cédé le 14 avril 2021 pour un prix de 4 450 000 euros, alors que celui-ci était évalué entre 7,9 millions d'euros et 8,3 millions d'euros. Cette vente était également rendue indispensable par le fait que les prêts n'étaient plus assurés contre l'ITT et la PTIA depuis le 10 août 2018 et n'étaient bientôt plus assurés contre le décès, du fait des conditions d'assurance inadaptées prévus dans les avenants de 2014. Le prix de vente de 4 450 000 euros n'a même pas permis de couvrir le coût de revient du bien immobilier qui s'est élevé à la somme de 5 740 000 euros. Quatorze années après l'acquisition du bien immobilier et alors qu'elle y avait fait des travaux de rénovation, la SCI 3A a été contrainte de céder son bien immobilier 1,3 millions d'euros en dessous de son prix de revient et près de 3,8 millions d'euros en dessous du prix du marché, de sorte que son préjudice s'élève au minimum à la somme de 2 500 000 euros dont elle sollicite le versement par la CEIDF et la CNP Assurances à titre de dommages et intérêts sur le fondement de l'ancien article 1147 du code civil et, subsidiairement, sur le fondement des dispositions de l'article 1382 ancien du code civil. L'absence de prise en charge du sinistre au moment de sa survenance et la gestion désastreuse et fautive de
ce sinistre par les institutions financières sont incontestablement à l'origine de la dette abyssale de la SCI 3A qui était inexistante avant ces fautes puisque la SCI avait toujours honoré les échéances des prêts depuis 2007. Le fait que la CEIDF ait finalement versé le 10 mai 2022 à la SCI 3A la somme de 137 929 euros au titre du prélèvement qu'elle avait indûment opéré sur les indemnités versées dans ses livres par la société CNP Assurances est sans incidence sur l'obligation de réparation qui pèse sur la CEIDF dès lors que le 10 mai 2022 les préjudices étaient déjà réalisés.
La Caisse d'Epargne et de Prévoyance d'Ile de France fait valoir que la SCI 3A et Mme [G] ne rapportent pas la preuve d'un lien de causalité entre les fautes invoquées et le préjudice évalué à la somme de 2 500 000 euros. Le fait que les actes d'adhésion de Mme [G] aux contrats d'assurance se soient égarés a été sans incidence sur la prise en charge par la CNP Assurances du sinistre à la suite de l'accord négocié entre les parties. Si la perte de ces contrats a été la source d'un retard dans le versement des indemnités d'assurance, ce seul retard ne saurait justifier la demande d'indemnisation d'un montant de 2 500 000 euros.
Elle soutient également que, comme l'on relevé le tribunal, la SCI 3A et Mme [G] ne produisent pas de pièce révélant que la SCI 3A connaissait des difficultés financières importantes l'ayant empêchée de régler les échéances des prêts à la suite de l'accident de Mme [G] et de l'absence initiale de prise en charge du sinistre par l'assurance. Par ailleurs, la situation des sociétés d'exploitation ne saurait être prise en compte dans la détermination du préjudice de la SCI 3 A, les conditions d'exploitation des hôtels et du restaurant en l'absence de Mme [G] n'étant pas établies.
Comme le relève la banque, la perte des contrats d'assurance n'a pas eu d'incidence sur la prise en charge par la société CNP Assurances du sinistre à la suite de l'accord négocié entre les parties le 19 décembre 2014 et c'est à juste titre que le tribunal a considéré qu'il n'est pas démontré que la perte des contrats d'assurance, en 2007, serait à l'origine de l'aggravation de la situation de la SCI 3A ayant conduit aux impayés survenus en décembre 2017.
C'es également à juste titre que le tribunal a considéré, ensuite, que n'ayant pu être éclairée sur l'absence de couverture du risque de décès avant le terme des contrats de prêts, Mme [G] a pu perdre une chance de bénéficier de cette garantie jusqu'au terme des prêts, en sollicitant soit la société CNP Assurances, soit un autre assureur de son choix, mais que toutefois, le bien immobilier, objet des prêts, ayant été revendu le 14 avril 2021, soit avant la période où le risque de décès n'était plus couvert, et alors que la SCI 3A tentait depuis 2015 de le revendre, il s'en déduit que les appelantes n'ont subi aucun dommage en lien avec la faute commise.
Toutefois, comme l'a relevé le tribunal sans en tirer les conséquences qui s'imposaient, il est constant que l'indemnisation du sinistre a été tardive puisque le premier versement partiel n'a été effectué que le 11 septembre 2015 pour un montant de 113 621 euros, et les suivants le 7 octobre 2015 pour la somme de 32 850 euros, le 27 mai 2016 pour la somme de 13 500 euros, le 21 juillet 2016 pour la somme de 27 000 euros et, enfin, ainsi qu'indiqué la somme de 137 929 euros n'a été versée à la SCI 3A que le 10 mai 2022 et ce, alors que le sinistre avait été déclaré à la banque dès le 11 novembre 2013 et de manière réitérée le 2 janvier 2014, l'assureur en ayant accusé réception le 4 février 2014 et qu'un accord était intervenu entre les parties dès le 19 décembre 2014.
Il en résulte que la SCI 3A a subi un préjudice direct et certain induit par le manque de trésorerie dont elle aurait pu bénéficier dès le 31 décembre 2013 aux conditions du contrat de groupe.
Ce préjudice sera justement réparé par l'allocation des intérêts de retard au taux légal ayant couru entre le 31 décembre 2013 et le 11 septembre 2015 sur la somme de 113 621 euros, entre le 31 décembre 2013 et le 7 octobre 2015 sur la somme de 32 850 euros, entre le 31 décembre 2013 et le 27 mai 2016 sur la somme de 13 500 euros, entre le 31 décembre 2013 et le 21 juillet 2016 sur la somme de 27 000 euros et enfin entre le 31 décembre 2013 et le 10 mai 2022 sur la somme de 137 920 euros, le jugement déféré étant infirmé de ce chef.
Sur le préjudice moral
Mme [G] sollicite l'infirmation du jugement déféré sur en ce qu'il a limité son préjudice moral à la somme de 5 000 euros.
Elle fait notamment valoir qu'elle a dû, du fait de la perte des contrats d'assurance par la banque, vivre d'octobre 2013 à décembre 2014 avec l'idée que pesait sur elle et sur son patrimoine des prêts de plusieurs millions d'euros non assurés et ce alors que son état de santé était totalement incompatible avec cette situation. De plus, cette situation l'a plongée dans une dépression pour laquelle elle fait l'objet d'un suivi psychiatrique et d'un traitement médicamenteux lourd. Elle sollicite en réparation de son préjudice moral une indemnisation d'un montant de 150 000 euros à la charge de la CEIDF et de la CNP Assurances sur le fondement de l'ancien article 1147 du code civil et, subsidiairement, sur le fondement des dispositions de l'article 1382 ancien du code civil.
La banque réplique que Mme [G] ne justifie pas qu'elle aurait plongé dans une dépression pour laquelle elle fait l'objet depuis lors d'un suivi psychiatrique et d'un traitement médicamenteux lourd. Elle relève que l'appelante a constamment participé aux négociations et enfin que l'état de détresse allégué trouve son origine dans le projet monté par Mme [G] et M. [L] et l'accident de santé de Mme [G], le remboursement par la SCI 3A des prêts rendant définitivement sans objet l'examen du préjudice.
C'est cependant à juste titre que le tribunal a considéré que la faute commise par la banque dans le défaut de vérification de la transmission effective du dossier de souscription a engendré des démarches multiples ainsi qu'un retard dans l'indemnisation du sinistre subi par Mme [G] à l'origine d'un préjudice moral qu'il a justement évalué à la somme de 5 000 euros.
Le jugement déféré sera par conséquent confirmé en ce qu'il a condamné la Caisse d'Epargne et de Prévoyance d'Ile de France à payer à Mme [V] [G] la somme de 5 000 euros en réparation de son préjudice moral.
Sur la demande de remboursement de la somme de 137 929 euros
La SCI 3A et Mme [G] sollicitent l'infirmation du jugement déféré en ce qu'il les a déboutées de leur demande de condamnation de la Caisse d'Epargne et de Prévoyance Ile de France à leur verser la somme de 137 929 euros, et statuant à nouveau, de constater, à titre principal, l'acquiescement de la Caisse d'Epargne et de Prévoyance Ile de France à la demande de la SCI 3A et de Mme [G] de leur verser la somme de 137 929 euros et prendre acte de ce que ce versement a été effectué le 10 mai 2022 et, à titre subsidiaire, de condamner la société Caisse d'Epargne et de Prévoyance Ile de France à leur verser la somme de 137 929 euros majorée de l'intérêt au taux d'intérêt légal à la date de la décision à intervenir.
La banque réplique, notamment, que c'est sur instruction de Mme [G] du 12 septembre 2015 qu'il a été procédé à un "virement interne" d'un montant de 137 706,57 euros, ces fonds ont été retrouvés sur un compte d'attente et ont depuis lors été crédités au compte de la SCI 3A, de sorte que les appelantes ne peuvent qu'être déboutées de leur demande de remboursement de la somme de 137 929 euros.
Il ressort des développements qui précédent, sans qu'il soit nécessaire de rentrer dans le détail de l'argumentation des parties, que la banque a versé la somme de 137 929 euros à la SCI 3A le 10 mai 2022, de sorte que la demande de remboursement de cette somme formée en première instance est désormais sans objet.
Sur le la responsabilité des intimées en raison de l'inadéquation des garanties avec la situation personnelle de l'emprunteur
La SCI 3A et Mme [G] sollicitent la condamnation solidaire de la CEIDF et de CNP Assurances à leur verser la somme de 1 845 675,54 euros "en réparation du préjudice financier subi du fait de l'inadéquation des garanties initiales avec la situation personnelle des emprunteurs, montant majoré de l'intérêt au taux légal à compter de la date de la décision à intervenir".
Les appelantes allèguent que les garanties proposées étaient manifestement inadaptées à la situation personnelle de Mme [G], à son âge, à son caractère 'd'homme-clef' et à la charge des échéances des prêts et qu'il existait une inadéquation entre le risque et la couverture proposée dès lors, notamment, que la couverture au titre de l'incapacité de travail était limitée dans le temps à 720 jours et que l'assurance souscrite "ne couvrait aucun risque intermédiaire au titre de l'invalidité permanente totale (IPT) et de l'invalidité permanente partielle (IPP)". La perte de chance de souscrire des garanties adaptées doit être évaluée à 100 % dans la mesure où de nombreux établissements proposaient des garanties qui auraient permis la prise en charge de 50 % du capital restant dû au titre des deux prêts, comme le démontrent les devis de la Générali et d'Allianz.
S'agissant du montant du préjudice allégué, il correspond à 50 % du montant du capital restant dû au titre des deux prêts à la date du 2 octobre 2013.
La banque réplique que les appelantes ne contestent pas avoir eu connaissance en 2007, antérieurement à l'octroi des prêts, des garanties accordées et de leurs limites qui apparaissent clairement dans les conditions particulières d'assurance et dans la notice d'information, de sorte qu'elle a rempli ses obligations d'information. Elle expose qu'il incombe aux appelantes d'établir qu'à l'époque de la souscription des garanties, soit au mois de mai 2007, elles auraient pu souscrire des garanties couvrant 100 % de la moitié des échéances des prêts, d'une part, et pour une durée excédant les deux années de couverture du contrat CNP Assurances d'autre part et qu'elles ne rapportent pas ces preuves. Elle relève qu'il n'est nullement établi que d'autres compagnies, qu'il aurait été à l'époque possible à Mme [G] de rechercher, auraient proposé une meilleure couverture pour un moindre coût. Les deux "simulations" produites par les appelantes concernent des situations différentes de celle de la présente affaire et le contrat groupe auquel Mme [G] a adhéré couvrait la situation dans laquelle elle s'est trouvée, de sorte que les appelantes n'établissent pas l'existence de la "perte de chance" qu'elles invoquent.
La CNP Assurances fait valoir que le devoir de conseil et de mise en garde ne pèse pas sur l'assureur. La solidarité est légale ou conventionnelle. Elle ne se présume pas et ne peut s'appliquer au cas d'espèce. Les simulations de garanties versées par la SCI 3A et Mme [G] ont été réalisées en 2019. Or, les prêts ont été contractés en 2007. En outre, ces simulations ont été réalisées sur la base de données erronées sur les dates de naissance des personnes à assurer. Ces simulations ne permettent pas non plus de démontrer que les compagnies d'assurance citées par les demanderesses auraient pris en charge 50 % du capital restant dû au titre des prêts, à la suite du sinistre de Mme [G]. Par conséquent, et en tout état de cause, Mme [G] et la SCI 3A ne démontrent ni l'existence d'une faute, ni celle d'un préjudice et d'un lien de causalité.
Il ressort des développements qui précédent que toutes les informations relatives tant au coût des assurances qu'à leur étendue apparaissent clairement dans les conditions particulières d'assurance acceptées et signées par Mme [G] le 3 mai 2007 et dans la notice d'information dont Mme [G] a paraphé chaque page, de sorte qu'elle n'a pu se méprendre sur le champ des garanties souscrites en mai 2007 et les conditions de leur mise en oeuvre.
Comme le relève la banque, Mme [G] ne démontre pas qu'elle aurait pu souscrire une meilleure couverture pour un moindre coût.
Ainsi que le souligne la société CNP Assurances, les simulations de garanties versées aux débats par la SCI 3A et Mme [G] ont été réalisées en 2019 (pièces n° 38 et 39), alors que les contrats de prêts ont été contractés en 2007 et ces simulations ne permettent pas de démontrer que les compagnies d'assurance Générali et Allianz auraient pris en charge 50 % du capital restant dû au titre des prêts à la suite du sinistre de Mme [G].
En tout état de cause, la garantie souscrite couvrait la situation d'ITT dans laquelle Mme [G] s'est trouvée à la suite de l'AVC dont elle a été victime le 2 octobre 2013, de sorte qu'elle n'établit pas la perte de chance alléguée.
Dans ces conditions, il ya lieu de débouter les appelantes de leur demande tendant à voir condamner solidairement la société Caisse d'Epargne et de Prévoyance Ile de France et CNP Assurances à leur verser la somme de 1 845 675,54 euros en réparation du préjudice financier subi du fait de l'inadéquation des garanties initiales avec la situation personnelle des emprunteurs, le jugement déféré étant confirmé sur le rejet de cette demande.
Sur les demandes relatives aux stipulations d'intérêts dans les avenants
Les appelantes demandent à titre principal la nullité de la stipulation d'intérêts contenue dans les deux avenants aux prêts et à titre subsidiaire, la déchéance totale de la stipulation d'intérêts. Elles expliquent n'avoir pas renoncé à soulever les erreurs affectant les stipulations d'intérêts mentionnées aux avenants tenant à 'l'absence de prise en compte des arriérés de primes d'assurance pour la détermination du TEG" et au 'défaut de communication du taux de période et de la durée de la période", déniant l'exécution volontaire des contrats de prêts dès lors que le prélèvement des sommes réclamées sur le prix de vente a été effectué par le notaire, que l'exécution volontaire ne vaut confirmation qu'en l'absence de réserves et qu'en l'occurrence elles avaient assigné en nullité des taux d'intérêts et ne se sont pas désistées de leur instance, et qu'enfin, la confirmation ne peut intervenir, en cas de violence qu'après qu'elle ait cessé, soulignant la violence économique exercée par la banque.
Sur le fond, elles font valoir, d'une part, que les primes d'assurance afférentes à la période de 2007 à 2014 n'ont pas été prises en compte pour la détermination du taux effectif global alors qu'il s'agissait bien de frais conditionnant l'octroi des avenants et de frais réglés après l'octroi des avenants, seuls ont été pris en compte les frais d'assurance afférents à la période postérieure, ce que ne conteste d'ailleurs pas la banque dans ses écritures et que le taux est ainsi erroné, l'erreur dépassant nécessairement la décimale compte tenu du montant non pris en compte. Elles soulèvent d'autre part le défaut de communication du taux et de la durée de la période.
La Caisse d'Epargne et de Prévoyance d'Ile de France fait valoir qu'a l'occasion de la vente du complexe hôtelier, la SCI 3A a exécuté les contrats en procédant au remboursement des deux prêts objets du litige. Cette exécution volontaire du contrat, en connaissance de la 'cause de nullité' invoquée par les appelantes, vaut confirmation au sens des dispositions de l'article 1182 du code civil. Cette confirmation a emporté renonciation aux moyens et exceptions que les appelantes pouvaient opposer au prêteur. Elle rappelle que le paiement sans réserve emporte nécessairement confirmation. De plus, l'acte notarié stipule que le remboursement a été effectué 'conformément aux décomptes transmis par le créancier' et que 'Le vendeur donne dès à présent d'ores et déjà tous pouvoirs au notaire soussigné aux effets ci-dessus.' Au surplus, il est de jurisprudence que 'en cas de renégociation du prêt les modifications du contrat initial sont apportées sous la seule forme d'un avenant comprenant diverses informations sans que soit exigée la communication du taux et de la durée de la période.' Dès lors, Mme [G] et la SCI 3A sont mal fondées à invoquer une prétendue nullité de la stipulation d'intérêts pour un défaut de communication du 'taux de période et de la durée de la période.' Enfin, les appelantes ne contestent pas que 'les frais d'assurances à venir' ont bien été pris en compte dans le calcul du TEG.
Sur la demande en nullité
C'est par des motifs pertinents que la cour adopte que le tribunal a considéré que :
'L'article L.312-33 du code de la consommation dit que le prêteur, qui ne respecte pas les obligations qu'il tient de l'article L.312-8, lequel renvoie concernant le taux de période et le taux effectif global aux prescriptions de l'article L.313-1 du même code en définissant le contenu comprenant les frais qui conditionnent l'octroi du prêt, pourra être déchu du droit aux intérêts en totalité ou dans la proportion fixée par le juge.
Dès lors, en ce que la mention dans une offre de prêt d'un taux effectif global erroné et l'absence d'un taux de période ne peuvent emporter que la déchéance du droit aux intérêts au regard des dispositions de l'article L.312-33 du code de la consommation, seul applicable en la cause, les demanderesses ne sauraient utilement, de ce motif, poursuivre l'annulation de la clause d'intérêts conventionnels des deux avenants, leurs prétentions doivent être rejetées, sans qu'il n'y ait lieu d'examiner l'éventuelle confirmation de la cause de nullité soulevée.'
Le jugement déféré sera par conséquent confirmé en ce qu'il a débouté la SCI 3A et Mme [G] de leurs demandes tendant à prononcer la nullité de la stipulation d'intérêts conventionnels fixée dans l'avenant au prêt n°0189401 devenu n°9425954 et dans l'avenant au prêt n° 0189409 devenu n° 9426024 et ordonner la substitution du taux d'intérêt légal au taux conventionnel à la date de souscription de l'avenant soit 0,04 %.
Sur la demande en déchéance du droit aux intérêts
Sur le défaut de mention dans les avenants du taux de période
C'est par des motifs pertinents que la cour adopte et qu'il convient de confirmer que le tribunal a considéré que :
'En application des dispositions de l'article L.312-14-1 du code de la consommation, en cas de renégociation du prêt, les modifications du contrat initial sont apportées sous la seule forme d'un avenant comprenant diverses informations sans que ne soit exigée la communication du taux et de la durée de la période.
Il en résulte que les demanderesses ne peuvent se prévaloir d'aucune irrégularité à ce titre.'
Sur le caractère erroné du taux effectif global
Aux termes de l'article L. 313-2 alinéa premier ancien du code de la consommation, le taux effectif global déterminé comme il est dit à l'article L. 313-1 doit être mentionné dans tout écrit constatant un contrat de prêt régi par la présente section.
Il résulte des dispositions des articles L. 313-1 et R. 313-1 anciens du code de la consommation que le taux effectif global, s'agissant d'un crédit immobilier, est un taux annuel, proportionnel au taux de période, et que doivent être intégrées dans le calcul de ce taux l'ensemble des charges rendues obligatoires et ayant un lien direct et exclusif avec l'octroi du prêt, les charges liées aux garanties ou les honoraires d'officiers ministériels en étant toutefois exclus lorsque leur montant ne peut être indiqué avec précision antérieurement à la conclusion définitive du contrat.
Il résulte ensuite des dispositions de l'article 1315, ancien, du code civil qu'il appartient à l'emprunteur qui se prévaut d'une erreur dans le calcul du coût total du crédit ou du taux effectif global sur le fondement de ces dispositions de rapporter la preuve que les frais dont il invoque l'omission par la banque constituaient une condition d'octroi du prêt et qu'il les a effectivement supportés.
Par ailleurs, si l'annexe à l'article R. 313-1, ancien, du code de la consommation n'a pour objet que de définir la méthode dite 'd'équivalence' de calcul du taux effectif global visée par ce texte, non la méthode dite 'proportionnelle' seule applicable aux crédits immobiliers, la précision figurant au paragraphe d) de cette annexe, aux termes duquel le résultat du calcul de ce taux est exprimé avec une exactitude d'au moins une décimale, est d'application générale et impose à l'emprunteur, pour l'ensemble des contrats de prêt et quelle que soit la méthode de calcul du taux effectif global dont ils relèvent, de démontrer que l'erreur alléguée entraîne un écart d'au moins une décimale entre le taux réel et le taux mentionné dans l'offre ou le contrat.
En l'espèce, c'est à tort que le tribunal a considéré que, 'si l'adhésion au contrat d'assurance du groupe pouvait être, lors de la conclusion des contrats de prêt, une condition de leur octroi, il ne ressort ni de la proposition faite le 19 décembre 2014 ni des avenants signés le 29 décembre 2014 que le paiement des primes d'assurances passées était une condition d'octroi des avenants, n'étant qu'une condition d'exécution des contrats d'assurance. Ainsi, il n'y a pas lieu d'en tenir compte dans le calcul du taux effectif global mentionné dans les avenants.'
S'agissant de l'avenant au prêt d'un montant de 2 829 000 euros n° 0189401 devenu 1321766 puis 425954, comme le relèvent les appelantes, cet avenant prévoyait une baisse du taux d'intérêt ramené de 4,50 % à 3,50 %, pour un TEG annoncé de 4,68 % 'assurance CNP comprise.' L'avenant octroyé prévoyait l'adhésion de manière rétroactive à l'assurance CNP Assurances dans les conditions signées en 2007. Dans la mesure où les primes d'assurance n'avaient jamais été prélevées compte tenu de la perte des contrats d'assurance par la CEIDF, cette adhésion rétroactive impliquait le paiement des primes courantes jusqu'au nouveau terme du prêt et le règlement des primes correspondant à la période de mai 2007 à octobre 2014. Or, dans l'avenant au prêt n°0189401, les primes d'assurance afférentes à la période de 2007 à 2014, soit la somme totale de 104 908,65 euros, n'ont pas été prises en compte pour la détermination du taux effectif global de 4,68 %, alors qu'il s'agissait bien de frais conditionnant l'octroi de l'avenant et de frais réglés après l'octroi de l'avenant.
Il n'est d'ailleurs pas contesté par la banque qu'ont été pris en compte les seuls frais d'assurance afférents à la période postérieure à l'émission de l'avenant.
Ainsi, le taux effectif global de 4,68 % mentionné dans l'avenant au prêt n°0189401 devenu 1321766 puis 9425954 est nécessairement erroné car il ne mentionne pas tous les frais d'assurance.
De plus, en omettant de prendre en compte la somme de 104 908,65 euros dans le calcul du TEG, l'erreur alléguée entraîne un écart d'au moins une décimale entre le taux réel et le taux mentionné dans l'avenant, cette analyse étant confirmée dans le rapport d'expertise amiable du 28 mai 2020 rendu par Mme [H] [Y], experte inscrite sur la liste des experts judiciaires près la cour d'appel d'Angers et la cour administrative d'appel de Nantes (pièce des appelantes n° 41).
De plus, il est de jurisprudence constate que seuls les frais d'assurance facultative, sont considérés comme une simple modalité d'exécution du prêt et n'ont pas à être compris dans le calcul du TEG. Or il est constant, en l'espèce, que l'assurance groupe n'était pas facultative.
Il y a donc lieu prononcer la déchéance des intérêts conventionnels fixés dans l'avenant au prêt n° 0189401 devenu 1321766 puis 425954 à hauteur de la somme de 30 000 euros et de condamner la société Caisse d'Epargne et de Prévoyance Ile de France à rembourser à la SCI 3A la somme de 30 000 euros avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt.
S'agissant de l'avenant au prêt d'un montant de 2 260 000 euros n° 0189409 devenu 1369079 puis 9426024, comme le relèvent les appelantes, cet avenant prévoyait une baisse du taux d'intérêt ramené de 4,50 % à 3,50 %, pour un TEG annoncé de 4,64 % 'assurance CNP comprise' Comme le précédent, cet avenant prévoyait l'adhésion de manière rétroactive à l'assurance CNP Assurances dans les conditions signées en 2007 et dans la mesure où les primes d'assurance n'avaient jamais été prélevées, cette adhésion rétroactive impliquait également le paiement des primes courantes jusqu'au nouveau terme du prêt et le règlement des primes correspondant à la période mai 2007 à octobre 2014. Or, dans l'avenant au prêt n° 0189409, les primes d'assurance afférentes à la période de mai 2007 à 2014, soit la somme de 83 684,92 euros n'ont pas été prises en compte pour la détermination du taux effectif global de 4,64 % et il n'est pas contesté qu'ont été pris en compte les seuls frais d'assurance afférents à la période postérieure à l'émission de l'avenant. Ainsi, le taux effectif global de 4,64 % mentionné dans l'avenant au prêt n° 0189409 devenu 1369079 puis 9426024 est erroné car il ne mentionne pas tous les frais d'assurance. De plus en omettant de prendre en compte la somme de 83 684,92 euros dans le calcul du TEG, la décimale est nécessairement atteinte. Cette analyse est également confirmée par le rapport précité.
Il y a donc lieu prononcer la déchéance des intérêts conventionnels fixés dans l'avenant au prêt n° 0189409 devenu 1369079 puis 9426024 à hauteur de la somme de 25 000 euros et de condamner la société Caisse d'Epargne et de Prévoyance Ile de France à rembourser à la SCI 3A la somme dswe 25 000 euros avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt.
Sur la capitalisation des intérêts
Il ya lieu d'ordonner la capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1342-2 du code civil.
Sur les autres demandes
Aux termes de l'article 696, alinéa premier, du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie. La société Caisse d'Epargne et de Prévoyance Ile de France sera donc condamnée aux entiers dépens, la décision déférée étant confirmée de ce chef.
En application de l'article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
En l'espèce, la SCI 3A et Mme [G] seront condamnées à payer à la société CNP Assurances la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
La Caisse d'Epargne et de Prévoyance d'Ile de France sera condamnée à payer à la SCI 3A et Mme [V] [G] la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
CONFIRME le jugement du tribunal judiciaire de Paris du 3 février 2022 en ce qu'il a condamné la Caisse d'Epargne et de Prévoyance d'Ile de France à payer à Mme [V] [G] la somme de 5 000 euros en réparation de son préjudice moral, débouté la SCI 3A et Mme [V] [G] de leur demande tendant à voir condamner solidairement la société Caisse d'Epargne et de Prévoyance Ile de France et CNP Assurances à leur verser la somme de 1 845 675,54 euros en réparation du préjudice financier subi du fait du fait de l'inadéquation des garanties initiales avec la situation personnelle des emprunteurs, rejeté la demande de nullité de la stipulation d'intérêts conventionnels fixée dans l'avenant au prêt n°0189401 devenu n°9425954 et dans l'avenant au prêt n° 0189409 devenu n° 9426024 et sur les montants alloués au titre de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens ;
L'INFIRME pour le surplus ;
Statuant à nouveau des chefs de la décision infirmée et y ajoutant,
CONDAMNE la Caisse d'Epargne et de Prévoyance d'Ile de France à payer à la société SCI 3A les intérêts de retard au taux légal ayant couru entre le 31 décembre 2013 et le 11 septembre 2015 sur la somme de 113 621 euros, entre le 31 décembre 2013 et le 7 octobre 2015 sur la somme de 32 850 euros, entre le 31 décembre 2013 et le 27 mai 2016 sur la somme de 13 500 euros, entre le 31 décembre 2013 et le 21 juillet 2016 sur la somme de 27 000 euros et enfin entre le 31 décembre 2013 et le 10 mai 2022 sur la somme de 137 920 euros en réparation du préjudice financier subi ;
PRONONCE la déchéance des intérêts conventionnels fixés dans l'avenant au prêt n°0189401 devenu 1321766 puis 425954 à hauteur de la somme de 30 000 euros ;
CONDAMNE la société Caisse d'Epargne et de Prévoyance Ile de France à rembourser à la SCI 3A la somme de 30 000 euros avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt ;
PRONONCE la déchéance des intérêts conventionnels fixés dans l'avenant au prêt n° 0189409 devenu 1369079 puis 9426024 à hauteur de la somme de 25 000 euros ;
CONDAMNE la société Caisse d'Epargne et de Prévoyance Ile de France à rembourser à la SCI 3A la somme de 25 000 euros avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt ;
ORDONNE la capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1342-2 du code civil ;
CONDAMNE la SCI 3A et Mme [G] à payer à la société CNP Assurances la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE la Caisse d'Epargne et de Prévoyance d'Ile de France à payer à la SCI 3A et Mme [V] [G] la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile;
CONDAMNE la Caisse d'Epargne et de Prévoyance Ile de France aux entiers dépens ;
REJETTE toute autre demande.
* * * * *
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 6
ARRET DU 05 JUIN 2024
(n° , 23 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/05722 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CFPSG
Décision déférée à la Cour : Jugement du 03 Février 2022 - tribunal judiciaire de Paris - 9ème chambre 3ème section - RG n° 18/11348
APPELANTES
Madame [V] [G]
[Adresse 3]
[Adresse 3]
S.C.I. SCI 3A
[Adresse 3]
[Adresse 3]
N° SIRET : 498 058 767
agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège
Représentées par Me Matthieu BOCCON GIBOD de la SELARL LX PARIS-VERSAILLES-REIMS, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477
Ayant pour avocat plaidant Me Lucas LOPEZ, avocat au barreau de PARIS, substitué à l'audience par Me Cécile DUNAND, avocat au barreau de PARIS, toque : E1111
INTIMÉES
Société CAISSE D'EPARGNE ET DE PREVOYANCE ILE DE FRANCE
[Adresse 4]
[Adresse 4]
N° SIRET : 382 900 942
agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Représentée par Me Gachucha COURREGE de la SELARL M&C Avocats, avocat au barreau de PARIS, toque : P0159
S.A. CNP ASSURANCES
[Adresse 5]
[Adresse 5]
N° SIRET : 341 737 062
agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Représentée par Me Virginie SANDRIN, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE, toque : C2474, substituée à l'audience par Me Stéphanie COUILBAULT de la SELARL CABINET MESSAGER - COUILBAULT, avocat au barreau de PARIS, toque : D1590
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 02 Avril 2024, en audience publique, devant la Cour composée de :
M. Marc BAILLY, président de chambre
M. Vincent BRAUD, président
MME Laurence CHAINTRON, conseillère
qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par MME Laurence CHAINTRON dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.
Greffier, lors des débats : Mme Mélanie THOMAS
ARRET :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Marc BAILLY, président de chambre et par Mélanie THOMAS, greffier, présent lors de la mise à disposition.
* * * * *
Par actes sous seing privé du 3 mai 2007, la société Caisse d'Epargne et de Prévoyance d'Ile de France (CEIDF) a consenti à la société SCI 3A deux prêts pour l'acquisition et les travaux d'un complexe hôtelier :
- un premier prêt destiné à financer les travaux d'un montant de 2 260 000 euros remboursable en 186 mois, dont une période de préfinancement de 12 mois et de différé d'amortissement de 6 mois, au taux d'intérêt fixe de 4,50 % l'an, et au taux effectif global de 5,29 %, le taux de période étant de 1,32 % et les échéances trimestrielles de 54 614,99 euros en période d'amortissement,
- un second prêt destiné à financer une partie du prix d'acquisition des murs d'un montant de 2 829 000 euros remboursable en 192 mois, dont une période de préfinancement d'un mois et de différé d'amortissement de 12 mois, au taux d'intérêt fixe de 4,50 % l'an et au taux effectif global de 5,27 %, le taux de période étant de 1,32 % et les échéances trimestrielles de 65 094,85 euros en période d'amortissement.
Mme [V] [G] et M. [E] [L], co-gérants et associés de la SCI 3A, ont adhéré au contrat d'assurance groupe souscrit auprès de la société CNP Assurances pour être assurés, selon une quotité de 50 % chacun, en cas de décès, perte totale et irréversible d'autonomie (PTIA) et incapacité temporaire totale de travail (ITT). Les primes d'assurances mensuelles s'élevaient, pour Mme [G], à 907,65 euros pour le prêt de 2 829 000 euros et à 715,67 euros pour le prêt de 2 260 000 euros.
Le 2 octobre 2013, Mme [G] a été victime d'un accident vasculaire cérébral.
Par courrier du 6 juin 2014, la société CNP Assurances a refusé de prendre en charge le remboursement des deux prêts au titre de l'incapacité totale de travail au motif de l'absence de souscription de Mme [G] au contrat d'assurance et de paiement des primes d'assurance.
Par courrier du 19 décembre 2014, la Caisse d'Epargne et de Prévoyance d'Ile de France a admis la perte des dossiers d'assurance décès invalidité et a proposé un accord dans les termes suivants:
« (') Aussi sur notre intervention, la CNP a examiné votre demande afin que l'assurance sollicitée à l'origine soit éventuellement effective de manière rétroactive.
Nous sommes donc convenus que, sous réserve du paiement de toutes les primes dues depuis mai 2007 à ce jour, la CNP et notre Etablissement accepteraient de faire produire leurs effets aux contrats d'assurance à compter de mai 2007 aux conditions du contrat groupe n° 9259 P.
Sous la condition de votre accord sur ces modalités, la CNP procédera au prélèvement, sur le compte de la SCI 3A n°[XXXXXXXXXX01], des primes dues sur les deux derniers exercices, soit approximativement la somme de 50.000 euros qu'il conviendra de créditer préalablement sur le compte de la société. Elle procédera dans nos livres au versement de vos indemnités journalières (sous réserve de l'accord de la CNP sur cette prise en charge). (')
Afin de tenir compte de vos difficultés actuelles, la Caisse d'Epargne Ile de France fera l'avance, de manière exceptionnelle, des primes dues à compter de mai 2007, déduction faite de celles des deux dernières exercices prélevées directement par la CNP, pour un montant estimé à octobre 2014 inclus (à parfaire en fonction de la date de règlement effective) de 138.000,00 euros.
Nous vous précisons que le décompte total des primes dues de mai 2007 à octobre 2014 s'élève à 188.595 euros (').
Les prestations perçues de la CNP s'imputeront prioritairement en déduction de la somme avancée par notre Etablissement vous rappelant que la CEIDF reste contractuellement bénéficiaire des sommes versées par l'assureur, ou par prélèvement sur le compte de la SCI 3A (').
Cette créance devra, en tout état de cause, être remboursée au plus tard le 30/06/2016. À défaut, elle deviendra exigible et produira des intérêts au taux des prêts (4,50 % pour rappel à ce jour) majoré de trois points.
Enfin, nous vous informons qu'à titre exceptionnel, le comité de crédit de la CEIDF a marqué son accord pour la diminution du taux des emprunts de la SCI avec différé rétroactif de l'amortissement du capital pendant 12 mois, soit à compter du 05/05/2014 pour le prêt n°1369079 et à compter du 05/06/2014 pour le prêt n°121766, par prorogation d'autant de leurs durées.
Les avenants correspondants feront l'objet d'un envoi séparé ce jour dans les conditions que nous avons octroyées et qui constituent un geste commercial de la part de notre Etablissement ('). »
Mme [G] a signé cette proposition en mentionnant « sous réserve de la mise en place d'un échéancier pour les 50 000 € demandés préalablement ».
Par avenants du 29 décembre 2014, il a été convenu d'un différé d'amortissement de 12 mois et une prolongation de la durée des contrats de prêt de 12 mois dans les conditions précitées, outre une diminution du taux d'intérêts à 3,50 % l'an. Y sont stipulés, pour le prêt de 2 260 000 euros, un taux effectif global de 3,50 % l'an hors assurance et de 4,64 % l'an assurances CNP comprises et pour le prêt de 2 829 000 euros, un taux effectif global de 3,50 % l'an hors assurance et de 4,68 % l'an assurances CNP comprises.
La société CNP Assurances a pris en charge le remboursement des échéances des deux prêts en appliquant la franchise contractuelle pour la période du 2 octobre au 31 décembre 2013. La SCI 3A a perçu la somme totale de 186 971 euros versée entre le 11 septembre 2015 et le 21 juillet 2016.
Par lettres recommandées du 14 juin 2018, la société Caisse d'Epargne et de Prévoyance d'Ile de France a mis en demeure la SCI 3A de régler, sous quinzaine, les sommes de 172 828,59 euros au titre des échéances impayées du prêt de 2 829 000 euros et de 106 354,77 euros au titre des échéances impayées du prêt de 2 260 000 euros, et dit qu'à défaut, la déchéance du terme des prêts lui sera acquise.
Par lettres recommandées du même jour, la société CEIDF a mis également en demeure Mme [G] de lui payer les mêmes sommes en sa qualité de caution solidaire.
Par exploit d'huissier du 1er octobre 2018, Mme [G] et la SCI 3A ont fait assigner la société Caisse d'Epargne et de Prévoyance d'Ile de France et la société CNP Assurances devant le tribunal judiciaire de Paris en responsabilité pour manquement à leur devoir de conseil et d'information et en remboursement des primes d'assurances versées.
Par exploit d'huissier du 18 septembre 2019, la société Caisse d'Epargne et de Prévoyance d'Ile de France a fait assigner M. [L] en intervention forcée devant le tribunal judiciaire de Paris en sa qualité de caution, en paiement des deux prêts litigieux. Cette procédure a été jointe à la première procédure par ordonnance du juge de la mise en état du 12 décembre 2019.
Par exploit d'huissier du 27 décembre 2019, Mme [G] et la SCI 3A ont fait assigner la Caisse d'Epargne et de Prévoyance d'Ile de France devant le tribunal judiciaire de Paris en annulation des stipulations d'intérêts conventionnels dans les deux avenants aux contrats de prêts, et à défaut en déchéance du droit aux intérêts, au motif notamment d'un taux effectif global erroné en l'absence de prise en compte des arriérés de primes d'assurances.
Par décision du 22 octobre 2020, le juge de la mise en état a ordonné la jonction des procédures.
À la suite de la vente du bien immobilier le 14 avril 2021, la Caisse d'Epargne et de Prévoyance d'Ile de France a été désintéressée de ses demandes au titre du remboursement du prêt.
Par jugement contradictoire du 3 février 2022, le tribunal judiciaire de Paris a :
- déclaré irrecevables les demandes formées par M. [E] [L] ;
- condamné la Caisse d'Epargne et de Prévoyance d'Ile de France à payer à Mme [V] [G] la somme de 5 000 euros en réparation de son préjudice moral ;
- débouté la SCI 3A et Mme [V] [G] du surplus de leurs demandes ;
- condamné la Caisse d'Epargne et de Prévoyance d'Ile de France à payer à la SCI 3A et Mme [V] [G] la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile;
- condamné la SCI 3A et Mme [V] [G] à payer à la société CNP Assurances la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamné la Caisse d'Epargne et de Prévoyance d'Ile de France aux dépens, dont distraction au profit de Me Virginie Sandrin ;
- ordonné l'exécution provisoire de la présente décision.
Par déclaration remise au greffe de la cour le 16 mars 2022, la SCI 3A et Mme [G] ont interjeté appel de cette décision contre la société Caisse d'Epargne et de Prévoyance d'Ile de France et la SA CNP Assurances.
Par conclusions notifiées par voie électronique le 19 mars 2024, la SCI 3A et Mme [G] demandent au visa des articles 1907, 1147 ancien (1231-1 nouveau), 1382 ancien (1240 nouveau), 1315 et 1290 anciens (1353 et 1347-1 nouveau) et 1342-2 du code civil, des articles 1140 à 1143 et 1240 du code civil, de l'article L. 313-4 du code monétaire et financier dans sa version applicable au présent litige, des articles L. 313-2, L. 313-1 et R. 313-1 du code de la consommation, dans leur version applicable au présent litige et de l'article 700 du code de procédure civile, à la cour de :
- les déclarer recevables en leur appel,
- les dire bien fondées,
- infirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Paris le 3 février 2022 en qu'il a :
- condamné la Caisse d'Epargne et de Prévoyance d'Ile de France à payer à Mme [V] [G] la somme de 5 000 euros en réparation de son préjudice moral ;
- débouté la SCI 3A et Mme [V] [G] du surplus de leurs demandes ;
Et statuant à nouveau :
I. Sur la réparation des préjudices
- condamner solidairement les sociétés Caisse d'Epargne et de Prévoyance Ile de France et CNP Assurances à leur verser la somme de 2 500 000 euros en réparation du préjudice financier subi du fait des manquements commis (perte des contrats d'assurance, gestion fautive du sinistre et inadéquation des assurances proposées à la signature des avenants), montant majoré de l'intérêt au taux d'intérêt légal à compter de la date de la décision à intervenir,
- condamner solidairement les sociétés Caisse d'Epargne et de Prévoyance Ile de France et CNP Assurances à verser à Mme [V] [G] la somme de 150 000 euros en réparation de son préjudice moral subi du fait des manquements commis (perte des contrats d'assurance, gestion fautive du sinistre et inadéquation des assurances proposées à la signature des avenants),
- condamner solidairement la société Caisse d'Epargne et de Prévoyance Ile de France et CNP Assurances à leur verser la somme de 1 845 675,54 euros en réparation du préjudice financier subi du fait du fait de l'inadéquation des garanties initiales avec la situation personnelle des emprunteurs, montant majoré de l'intérêt au taux d'intérêt légal à compter de la date de la décision à intervenir,
- constater l'acquiescement de la Caisse d'Epargne et de Prévoyance Ile de France à leur demande de leur verser la somme de 137 929 euros et prendre acte de ce que ce versement a été effectué le 10 mai 2022 et à titre subsidiaire condamner la société Caisse d'Epargne et de Prévoyance Ile de France à leur verser la somme de 137 929 euros, montant majoré de l'intérêt au taux d'intérêt légal,
II. Sur les TEG afférents aux avenants aux prêts
S'agissant du prêt n° 0189401 devenu 1321766 puis 9425954 selon avenant du 29 décembre 2014
A titre principal
- prononcer la nullité de la stipulation d'intérêts conventionnels fixée dans l'avenant au prêt n°0189401 devenu n°9425954,
- ordonner la substitution du taux d'intérêt légal au taux conventionnel à la date de souscription de l'avenant soit 0,04 %,
- condamner la Caisse d'Epargne Ile de France à rembourser à la SCI 3A les intérêts trop-perçus correspondant à l'écart entre les intérêts au taux conventionnel et les intérêts au taux légal, soit la somme de 405 498,36 euros avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation,
- ordonner la capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1342-2 du code civil,
A titre subsidiaire
- prononcer la déchéance totale des intérêts conventionnels fixés dans l'avenant au prêt n° 0189401 devenu n° 9425954,
- ordonner la substitution du taux d'intérêt légal au taux conventionnel à la date de souscription de l'avenant soit 0,04 %,
- condamner la Caisse d'Epargne Ile de France à rembourser à la SCI 3A les intérêts trop-perçus correspondant à l'écart entre les intérêts au taux conventionnel et les intérêts au taux légal, soit la somme de 405 498,36 euros avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation,
- ordonner la capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1342-2 du code civil,
S'agissant du prêt n°0189409 devenu 1369079 puis 9426024 selon avenant du 29 décembre 2014
A titre principal
- prononcer la nullité de la stipulation d'intérêts conventionnels fixée dans l'avenant au prêt n° 0189409 devenu n° 9426024,
- ordonner la substitution du taux d'intérêt légal au taux conventionnel à la date de souscription de l'avenant soit 0,04 %,
- condamner la Caisse d'Epargne Ile de France à rembourser à la SCI 3A les intérêts trop-perçus correspondant à l'écart entre les intérêts au taux conventionnel et les intérêts au taux légal, soit la somme de 324 995,14 euros avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation,
- ordonner la capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1342-2 du code civil ;
A titre subsidiaire
- prononcer la déchéance totale des intérêts conventionnels fixés dans l'avenant au prêt n° 0189409 devenu n° 9426024 ;
- ordonner la substitution du taux d'intérêt légal au taux conventionnel à la date de souscription de l'avenant soit 0,04 % ;
- condamner la Caisse d'Epargne Ile de France à rembourser à la SCI 3A les intérêts trop-perçus correspondant à l'écart entre les intérêts au taux conventionnel et les intérêts au taux légal, soit la somme de 324 995,14 euros, avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation ;
- ordonner la capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1342-2 du code civil ;
III) En tout état de cause
- condamner la Caisse d'Epargne Ile de France à leur payer la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la Caisse d'Epargne Ile de France aux entiers dépens
Par conclusions notifiées par voie électronique le 14 mars 2024, la société Caisse d'Epargne et de Prévoyance d'Ile de France demande au visa des articles 1193 et 1872 du code civil, à la cour de :
- juger la SCI 3A et Mme [V] [G] mal fondées en leurs demandes et en conséquence les en débouter,
- confirmer en toutes ses dispositions le jugement dont appel,
- condamner solidairement la SCI 3A et Mme [V] [G] à lui payer la somme de 10 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner solidairement la SCI 3A et Mme [V] [G] aux entiers dépens.
Par conclusions notifiées par voie électronique le 18 mars 2024, la société CNP Assurances demande à la cour de :
A titre principal,
- confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Paris le 2 février 2022 en ce qu'il a débouté Mme [G], la SCI 3A de l'ensemble de leurs demandes de condamnations formées à l'encontre de CNP Assurances,
En tout état de cause,
- débouter la SCI 3A et Mme [G] de l'intégralité de leurs demandes,
- rejeter les demandes de dommages et intérêts,
- condamner tout succombant à lui verser la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- le condamner aux entiers dépens dont distraction au profit de Me Virginie Sandrin.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et des prétentions des parties, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux dernières conclusions écrites déposées en application de l'article 455 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 19 mars 2024 et l'audience fixée au 2 avril 2024.
MOTIFS
Sur la responsabilité de la Caisse d'Epargne et de Prévoyance d'Ile de France et de la CNP Assurances
Sur la perte des contrats d'assurance
La SCI 3A et Mme [G] font valoir que la Caisse d'Epargne Ile de France a reconnu avoir « égaré » les dossiers d'assurance groupe de Mme [G] et de M. [L]. Or, un courrier du 20 décembre 2007 indique que l'obligation de transmission des contrats d'assurance pesait sur la banque. La Caisse d'Epargne Ile de France a donc commis une faute en ne s'assurant pas de la bonne transmission des dossiers à la société CNP Assurances.
La Caisse d'Epargne et de Prévoyance d'Ile de France fait valoir que Mme [G] a été assurée et l'assurance a été mise en 'uvre au titre des deux prêts. Le fait que les documents d'acceptation par Mme [G] des propositions de la société CNP Assurances se soient égarés ne saurait constituer une faute dès lors que l'adhésion de Mme [G] a été effective et que la société CNP Assurances a procédé au versement des indemnités prévues par les contrats. De plus la SCI 3A et Mme [G] ne rapportent pas la preuve d'un lien de causalité entre la faute invoquée et le préjudice allégué dont le montant serait de 2 500 000 euros.
Aux termes de l'article 1147 du code civil, dans sa version applicable au litige, le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de sa part.
En l'espèce, il est constant que Mme [G] a adhéré, par l'intermédiaire de la société Caisse d'Epargne et de Prévoyance d'Ile de France, au contrat d'assurance groupe de la société CNP Assurances, dont elle a accepté les conditions particulières d'assurance le 3 mai 2007 (pièce de la banque n° 6)
Il est également constant que la société Caisse d'Epargne et de Prévoyance d'Ile de France a égaré les dossiers de souscription ainsi qu'elle l'a reconnu dans son courrier précité adressé à Mme [G] le 19 décembre 2014 (pièce n° 9), dans lequel elle lui confirmait que 'les dossiers d'assurance décès-invalidité vous permettant la couverture de ces prêts ont été égarés au cours de leur acheminement postal.'
C'est donc à juste titre que le tribunal a considéré que la société Caisse d'Epargne et de Prévoyance d'Ile de France qui devait, en sa qualité d'intermédiaire, transmettre les dossiers de souscription à la compagnie d'assurance afin de donner effet à l'adhésion au contrat d'assurance, a commis une faute en ne s'assurant pas de la transmission effective du dossier, peu important que comme le relève la banque, l'assurance ait finalement été mise en 'uvre au titre des deux prêts.
Sur le traitement du sinistre de Mme [G]
La SCI 3A et Mme [G] soutiennent en premier lieu que, contrairement à ce qu'a relevé le tribunal, les contrats de prêt stipulaient dans leur article 2 'caractéristiques du prêt' que les échéances trimestrielles d'un montant de 65 094,85 euros pour le prêt d'un montant de 2 829 000 euros et de 54 615,99 euros pour le prêt d'un montant de 2 260 000 euros étaient entendues assurance incluse, tel que cela ressort de la mention 'échéance Assur. Incluse'.
Elles font valoir que le traitement du sinistre de Mme [G] est fautif car le devoir d'information et de conseil en matière d'assurance ne s'arrête pas au moment de la souscription du contrat d'assurance, mais s'étend pendant tout le temps de son exécution et notamment après la survenance du sinistre. Or, les institutions financières ont commis des manquements après la survenance du sinistre de Mme [G] en manquant à leur devoir de conseil et d'information en la faisant adhérer à une 'solution' qui ne servait en réalité que leurs seuls intérêts alors qu'elle se trouvait dans un état de détresse et de faiblesse du fait de l'absence d'indemnisation du sinistre survenu plus d'un an auparavant. La solution subordonnant la prise en charge du sinistre de Mme [G] au règlement, par les assurés et par la SCI 3A, de l'intégralité des primes d'assurance de Mme [G] et de M. [L] depuis 2007 était abusive au motif que le non-prélèvement des primes à échéances résultait d'une faute de la banque qui avait 'égaré' les contrats d'assurance, le rappel de primes ne pouvait porter que sur deux années au regard des règles de prescription applicables en matière d'assurance et enfin l'indemnisation était subordonnée au règlement des primes de Mme [G] et de M. [L] alors que le sinistre ne concernait que Mme [G]. Par ailleurs, ni la Caisse d'Epargne, ni la CNP Assurances ne l'ont informée d'une part, du montant précis de l'indemnité versée avant son acceptation de la solution proposée, et d'autre part, du fait que la solution 'négociée' ne lui ouvrait droit qu'à une indemnisation limitée de son sinistre. In fine, la SCI 3A n'a perçu qu'une infime partie (186 971 euros) des indemnités versées par la société CNP Assurances dans les livres de la banque d'un montant de 324 900 euros, la banque ayant conservé la somme de 137 929 euros correspondant au montant indiqué dans la proposition du 19 décembre 2014 comme étant le montant des primes d'assurances dues à la CNP Assurances sur la période de mai 2007 à mai 2012, estimé alors à 138 000 euros dont elle se proposait de faire l'avance auprès de l'assureur. Cependant, la banque n'a jamais apporté la preuve d'avoir réellement procédé au règlement de cette somme à la CNP Assurances, de sorte qu'elle ne prouve pas qu'elle détenait une créance sur la SCI 3A et sur Mme [G] et qu'elle était dès lors bien fondée à opérer cette retenue. La banque a finalement fini par rembourser cette somme à la SCI 3A le 10 mai 2022, de sorte que la retenue pendant plusieurs années de la somme de 137 929 euros sur les indemnités versées constitue une faute de la Caisse d'Epargne. En outre, les indemnités versées à la SCI 3A d'un montant de 186 971 euros ont été utilisées, dans leur quasi-totalité, pour régler les 'arriérés' de primes d'octobre 2012 à mars 2015 et les primes courantes de sorte que la banque n'a pas dépensé le moindre euro pour réparer sa faute d'une particulière gravité. Elle a, au contraire, abusé de la situation de détresse et de vulnérabilité de Mme [G] liée à son AVC et à l'absence de toute indemnisation financière 14 mois après la survenance du sinistre pour surprendre son consentement ce qui constitue une 'violence' au sens des articles 1140 à 1143 du code civil et un délit civil source de responsabilité au sens des dispositions de l'article 1240 du code civil.
La Caisse d'Epargne et de Prévoyance d'Ile de France réplique qu'elle n'a pas, durant 7 ans recouvré les primes d'assurance car les échéances des prêts n'étaient pas entendues 'assurance incluse', conformément aux stipulations du contrat de prêt.
Elle fait valoir que les demandes tant de Mme [G] que de la SCI 3A sont irrecevables en ce qui concerne les contrats de M. [L], nul ne plaidant par procureur. Si la banque a un devoir d'éclairer son client lors de la souscription d'un contrat d'assurance sur l'adéquation des risques couverts à sa situation personnelle, celle-ci s'apprécie en premier lieu à la date de la souscription initiale du contrat. Le contrat souscrit le 3 mai 2007 couvrait Mme [G] pour les garanties ITT et PTIA jusqu'au 10 août 2018, soit pendant plus de 11 ans, et couvrait le risque décès jusqu'au 10 août 2023, soit pendant plus de 16 ans. Or, les prêts souscrits le 3 mai 2007 avaient été souscrits pour des durées respectives de 15 ans pour le crédit travaux et de 16 ans pour le crédit acquisition, de sorte que dès l'origine, les garanties ITT et PTIA ne couvraient pas la totalité de la durée des prêts. Mme [G], femme d'affaires avisée, n'a pu se méprendre à la lecture de la notice, qui communiquait une information claire et précise tant sur le montant que sur la durée des garanties. En 2014, après avoir refusé dans un premier temps de prendre en charge le sinistre à la suite de l'AVC dont avait été victime Mme [G] le 2 octobre 2013, la CNP Assurances a finalement accepté de faire produire leurs effets aux contrats d'assurance, pour autant qu'elle reçoive le paiement de l'intégralité des primes arriérées, lesquelles ne pouvaient être acquittées par la SCI 3A que dans la limite des primes non prescrites. Mme [G] était, en 2014, assistée d'un avocat et en possession de ses moyens. Elle ne saurait donc soutenir que les 'institutions financières' se seraient 'bien gardées' de l'informer que la 'solution négociée ne lui ouvrait droit qu'à une indemnisation limitée de son sinistre', dès lors que cette 'solution' consistait à la faire bénéficier du bénéfice du contrat d'assurance groupe initialement souscrit à la garantie du remboursement des prêts dans les conditions de cette souscription. Au surplus, la solution proposée à Mme [G] et la SCI 3A consistant à régulariser la situation n'a pas été préjudiciable à la SCI 3A. Bien plus, et contrairement aux affirmations de Mme [G] et de la SCI 3A, la SCI n'a pas supporté la charge du paiement réclamé par la société CNP Assurances des primes dues au titre de la période allant du mois de mai 2007 au mois de septembre 2012. L'examen des relevés de comptes de la SCI 3A démontrent qu'elle a bénéficié de l'intégralité des fonds versés par la société CNP Assurances en exécution de l'accord intervenu à raison du sinistre.
La société CNP Assurances fait valoir qu'à la date de l'AVC de Mme [G] le 2 octobre 2013, elle n'avait pas connaissance de l'acceptation de la proposition d'assurance. Par ailleurs, aucune prime d'assurance n'avait été prélevée. Ainsi, en application des article 4-1 et 9 de la notice d'information relative au contrat d'assurance groupe, l'assurance n'avait pas pris effet et Mme [G] ne pouvait bénéficier d'aucune prise en charge puisque son adhésion était caduque. Conformément au courrier de la société Caisse d'Epargne du 19 décembre 2014, eu égard à la situation particulière de Mme [G], la société CNP Assurances a accepté, à titre dérogatoire et commercial et sous réserve du paiement des primes dues depuis mai 2007, de faire produire ses effets au contrat d'assurance auquel Mme [G] avait demandé à adhérer, et ce à compter de mai 2007. Cette proposition a été acceptée par Mme [G]. La société CNP Assurances a ainsi pris en charge les prêts de la SCI 3A, au titre de la garantie ITT à compter du 31 décembre 2013 (date d'expiration du délai de franchise de 90 jours) et a versé à ce titre la somme de 324 900 euros, soit 162 450 euros au titre de chaque prêt. L'argument relatif à l'absence d'information de Mme [G] sur le montant d'indemnité d'assurance qui allait finalement être allouée ne saurait prospérer en application de l'article 6-4 de la notice d'information. Par ailleurs, après avoir sollicité et obtenu la prise en charge, Mme [G] et la SCI 3A ne peuvent sérieusement soutenir que la société CNP Assurances aurait commis des fautes qui justifieraient l'allocation de dommages et intérêts à hauteur de 4 495 675,54 euros. L'abus de la situation invoqué pour la première fois en appel par Mme [G] et la SCI 3A ne saurait prospérer car la société CNP Assurances n'a commis aucune violence ni aucun délit. Comme l'a relevé le tribunal, il ne peut lui être reproché d'avoir accepté de mettre en place le contrat d'assurance auquel Mme [G] avait demandé à adhérer en mai 2007, sous réserve du paiement des primes, et d'avoir pris en charge les prêts de la SCI 3A au titre de la garantie ITT. En outre, conformément à l'article 6-2 de la notice d'information, le risque décès était garanti jusqu'au 70ème anniversaire de Mme [G]. La société CNP Assurances n'a commis aucune faute et comme l'a relevé le tribunal, 'il n'est pas établi que les impayés seraient en lien avec la perte des dossiers de souscription à l'assurance (').'
Il est de jurisprudence constante que le banquier, qui propose à son client auquel il consent un prêt, d'adhérer au contrat d'assurance de groupe qu'il a souscrit à l'effet de garantir, en cas de survenance de divers risques, l'exécution de tout ou partie de ses engagements, est tenu de l'éclairer sur l'adéquation des risques couverts à sa situation personnelle d'emprunteur, la remise de la notice ne suffisant pas à satisfaire à cette obligation (Cass. Ass. Plén. 2 mars 2007, n° 06-15267).
En l'espèce, Mme [G] reproche aux intimées, d'une part, un manquement à leur devoir d'information et de conseil dans la gestion du sinistre et, d'autre part, un abus de son état de détresse qui aurait vicié son consentement.
A titre liminaire, il y a lieu de relever que, comme l'a retenu le tribunal, il ressort des conditions particulières des contrats de prêts que le montant des échéances trimestrielles en période d'amortissement, de 54 615,99 euros pour le prêt d'un montant de 2 260 000 euros et de 65 094,85 euros pour le prêt d'un montant de 2 829 000 euros, n'incluaient pas les primes d'assurance et il est mentionné dans chacun des prêts, dans la partie réservée à l'assurance, que le montant des primes sera prélevé directement par la compagnie d'assurance sur un compte désigné par l'emprunteur. Les conditions particulières d'assurance signées par Mme [G] le 3 mai 2007 (pièce de la banque n° 6) mentionnaient le montant annuel des primes, à savoir 8 588 euros pour le prêt de 2 260 000 euros et 10 891,65 euros pour le prêt de 2 829 000 euros. Mme [G] soutient donc vainement avoir cru que les primes étaient incluses dans les échéances.
L'article 4-1 de la notice d'information relative au contrat d'assurance groupe auquel Mme [G] a demandé à adhérer et dont elle ne conteste pas avoir eu connaissance stipule que : 'L'assurance prend effet, sous réserve de l'encaissement de la première prime et de la signature de l'offre de crédit, à la date d'acceptation des conditions particulières d'assurance par l'Emprunteur (signature des conditions particulières d'assurance communiquées par l'Assureur).'
L'article 9 de cette notice d'information stipule en outre que : 'Les garanties sont consenties moyennant le paiement d'une prime annuelle exprimée en pourcentage, assise sur le capital initial du prêt.'
En l'espèce, il n'est pas établi qu'avant la déclaration de sinistre de Mme [G] à la suite de l'AVC dont elle a été victime le 2 octobre 2013, la société CNP Assurances ait eu connaissance de l'acceptation par Mme [G] de sa proposition d'assurance, compte tenu de la perte des contrats d'assurance par la banque.
Par ailleurs, il est constant qu'à cette date, aucune prime d'assurance n'avait été prélevée, de sorte qu'en application des dispositions précitées, l'assurance n'avait pas pris effet.
C'est donc à juste titre que le tribunal a considéré qu'en l'absence de paiement des primes, le refus initial de la société CNP Assurances émis le 6 juin 2014 de prendre en charge le sinistre déclaré par Mme [G] était fondé.
Par ailleurs, il ressort du courrier précité du 19 décembre 2014, qu'eu égard à la situation de Mme [G], les intimées sont convenues que : 'sous réserve du paiement de toutes les primes dues depuis mai 2007 à ce jour, la CNP et notre Etablissement accepteraient de faire produire leurs effets aux contrats d'assurance à compter de mai 2007 aux conditions du contrat groupe n° 9259.
Sous la condition de votre accord sur ces modalités, la CNP procédera au prélèvement, sur le compte de la SCI 3A (') des primes dues sur les deux derniers exercices, soit approximativement la somme de 50 000 euros ('). Elle procédera dans nos livres au versement des indemnités journalières (sous réserve de l'accord de la CNP sur cette prise en charge).
Afin de tenir compte de vos difficultés actuelles, la Caisse d'Epargne Ile de France fera l'avance, de manière exceptionnelle, des primes dues à compter de mai 2007, déduction faite de celles des deux derniers exercices prélevés directement par la CNP(').'
Mme [G] a accepté expressément cette proposition en portant à ce courrier la mention manuscrite suivante : 'sous réserve de la mise en place d'un échéancier pour les 50 000 euros demandés préalablement', suivie de sa signature.
Il ne saurait être reproché à la société CNP Assurances d'avoir accepté, à la demande de Mme [G], sous réserve du paiement des primes dues depuis 2007 et des primes courantes, de faire produire ses effets au contrat d'assurance auquel l'appelante avait demandé à adhérer et ce, à compter de mai 2007.
Toutes les informations relatives tant au coût des assurances qu'à leur étendue apparaissent clairement dans les conditions particulières d'assurance et dans la notice d'information dont Mme [G] a paraphé chaque page, de sorte qu'elle n'a pu se méprendre sur le champ des garanties souscrites en mai 2007 et les conditions de leur mise en oeuvre.
Par ailleurs, comme l'a relevé à juste titre le tribunal, la proposition du 19 décembre 2014 est très détaillée sur les conditions de prise en charge du sinistre.
Mme [G] est une femme d'affaires avisée qui dirige plusieurs sociétés. Elle était accompagnée lors des négociations avec la banque d'un avocat qui avait connaissance de l'ensemble des engagements contractuels de sa cliente ainsi qu'en atteste son courrier de réclamation adressé à la société CNP Assurances le 11 juin 2014 versé aux débats par la banque (pièce n° 8). Les courriers adressés à la banque les 2 janvier et 18 décembre 2014 avant la signature de l'accord du 19 décembre 2014 démontrent qu'elle était en parfaite possession de ses moyens.
Mme [G] soutient donc vainement, en cause d'appel, que 'les institutions financières' auraient abusé de sa situation de détresse et de vulnérabilité induite par son AVC pour surprendre son consentement, ce qui serait constitutif de 'violence' viciant son consentement, étant relevé de surcroît qu'elle ne tire pas les conséquences juridiques du vice du consentement allégué dès lors qu'elle ne sollicite pas la nullité de l'accord conclu le 19 décembre 2014.
En tout état de cause, il est constant que la société CNP Assurances a pris en charge les prêts de la SCI 3A, au titre de la garantie ITT à compter du 31 décembre 2013 (date d'expiration du délai de franchise contractuel de 90 jours) et a versé à ce titre la somme de 324 900 euros, soit 162 450 euros au titre de chaque prêt.
Mme [G] soutient vainement qu'elle n'aurait pas eu d'information sur le montant d'indemnité qui allait lui être versé par la société CNP Assurances alors que l'article 6-4 de la notice d'information stipule que :'en cas d'ITT de l'Assuré reconnue par l'Assureur, ce dernier verse, à l'issue du délai de franchise, un forfait journalier défini par l'Assuré (') au prorata du nombre de jours d'incapacité temporaire Totale de travail dûment justifiés. Ce forfait journalier est limité à 1/30ème du montant de la mensualité du prêt due et ne peut excéder 720 jours de prise en charge au titre d'une même période d'indemnisation.'
Du reste, dans son courrier du 7 mai 2014 (pièce n° 9 de l'appelante), Mme [G] faisait expressément référence au délai de franchise prévu par les stipulations contractuelles et le courrier de son conseil du 11 juin 2014 visait également la notice d'information et les conditions particulières du contrat d'assurance souscrit.
Mme [G] était donc ainsi informée dès l'origine du montant de l'indemnité susceptible de lui être versée en fonction de la durée de son arrêt de travail.
C'est donc à juste titre que le tribunal a considéré que la société CNP Assurances n'a commis aucune faute dans le traitement du sinistre de Mme [G].
En revanche, s'il résulte des développements qui précédent que la société Caisse d'Epargne et de Prévoyance d'Ile de France n'a pas commis de faute lors de la conclusion de l'accord du 19 décembre 2014, force est de constater que le versement tardif par la banque à la SCI 3 A des indemnités versées par la société CNP Assurances est fautif, dès lors qu'il ressort des relevés de compte de la SCI 3A qu'elle a perçu, d'une part, la somme de 186 971 euros, de manière fractionnée et des années après le sinistre survenu le 2 octobre 2013 (soit 113 621 euros le 11 septembre 2015, 32 850 euros le 7 octobre 2015, 13 500 euros le 27 mai 2016 et 27 000 euros le 21 juillet 2016) et d'autre part, la somme de 137 929 euros le 10 mai 2022.
Sur les assurances proposées à la signature des avenants
La SCI 3A et Mme [G] font valoir que les assurances proposées à la signature des avenants du 29 décembre 2014 étaient inadéquates. En effet, ces avenants prévoyaient un différé d'amortissement sur 12 mois et un allongement de la durée des prêts jusqu'au 5 juin 2024. Compte tenu du sinistre subi par Mme [G], l'obligation de conseil et de mise en garde des institutions financières leur imposaient de procéder à un réexamen des conditions d'assurance avant de procéder à la signature des avenants. Ce réexamen était également prévu par les conditions particulières d'assurance émises le 20 avril 2007 et signées le 3 mai 2007 ainsi que par l'article 3.3 de la notice d'information. Or aucun conseil et aucune mise en garde n'a été délivrée par les institutions financières sur la nécessité de réexaminer les conditions de l'assurance. Les avenants aux contrats de prêts n'ont pas abordé les questions cruciales d'assurance décès, invalidité et incapacité de Mme [G], alors que la CEIDF et la CNP Assurances savaient que cette dernière continuait à souffrir de son AVC et qu'elle se trouvait toujours en arrêt de travail plus de deux ans après. Les conditions de l'assurance proposées en 2007 étaient totalement inadaptées aux besoins de Mme [G] au moment de la conclusion des avenants en 2014, dans la mesure où:
- puisqu'elle avait plus de 60 ans en décembre 2014, elle n'était pas éligible à la garantie ITT offerte dans le cadre du contrat groupe, l'adhérent devant être âgé de moins de 60 ans à la date de l'adhésion,
- de même, les garanties PTIA et ITT cessaient au 65ème anniversaire de l'assuré, soit le 10 août 2018, soit avant le terme des deux prêts ayant fait l'objet des deux avenants du 29 décembre 2014 dont les termes étaient fixés au 5 juin 2024, Mme [G] ne pouvant ainsi être assurée que pendant une période de près de 6 ans, contrairement aux exigences des deux contrats de prêts,
- elle ne pouvait non plus être couverte au titre de la garantie décès à compter du [Date naissance 2] 2023, date de ses 70 ans, de sorte que près de douze mois ne pouvaient donc être garantis par rapport aux termes des prêts le 5 juin 2024,
- enfin, aucune garantie n'était offerte dans le contrat de groupe n° 9259 P pour couvrir les risques futurs d'invalidité partielle ou totale alors que Mme [G] encourait un risque à terme d'être placée en invalidité partielle voire totale, dès lors qu'au moment des avenants, elle était en incapacité de travail depuis plus d'un an.
La Caisse d'Epargne et de Prévoyance d'Ile de France fait valoir qu'il n'y a pas inadéquation des assurances proposées à la signature des avenants car la signature de ceux-ci n'a pas donné lieu à une modification de la police d'assurance. Le terme 'vous venez d'adhérer' figurant au début du courrier du 18 mai 2015 ne saurait constituer la preuve d'une "nouvelle adhésion", au contraire, ce courrier concrétise l'accord des parties pour faire produire ses effets au contrat d'assurance auquel Mme [G] avait adhéré en 2007. Dès lors, il n'y avait pas de 'défaut de conseil et/ou de mise en garde' en 2015 sur le caractère inadapté des assurances souscrites en 2007 et dont la SCI 3A et Mme [G] entendaient obtenir le bénéfice. Contrairement aux affirmations de la SCI 3A et de Mme [G], la question d'un réexamen des conditions d'assurance ne se posait pas car à la date de la signature des avenants aux contrats de prêt, il n'est pas contestable que Mme [G] n'était plus éligible au contrat d'assurance groupe tant au regard de son âge que de sa situation médicale. Il est artificiel de critiquer le fait que Mme [G] ne pouvait bénéficier de certaines garanties à son 65ème ou à son 70ème anniversaire car s'agissant de la couverture du risque ITT et PTIA de Mme [G], celle-ci a pris fin le 10 août 2018 et devait dès l'origine prendre fin à son 65ème anniversaire. A l'égard de ce risque, la prolongation d'une durée de 12 mois du prêt est sans incidence. S'agissant de la couverture décès de Mme [G] qui devait cesser le [Date naissance 2] 2023 à son 70ème anniversaire, il n'est pas contestable que la prorogation de la durée du prêt faisait peser le risque en cas de décès entre le 5 septembre 2023 et le 5 septembre 2024 de ne pas voir couvrir par l'assurance le montant de ce capital tel qu'il se présenterait. Or, si les premiers juges ont considéré que la banque aurait dû 'éclairer Mme [G] afin de lui permettre d'envisager la souscription d'une assurance complémentaire auprès d'un assureur de son choix', ils ont également relevé que si Mme [G] a pu perdre une chance de bénéficier de cette garantie jusqu'au terme des prêts, la cession par la SCI 3A du complexe immobilier intervenue au mois d'avril 2021 a fait disparaître le risque invoqué. En outre, Mme [G] et la SCI 3A n'établissent pas la faute de la banque. Aux mois de mars/mai 2015, Mme [G] n'était plus éligible au contrat d'assurance groupe, tant au regard de son âge que de sa situation médicale, de sorte que l'intérêt économique pour la SCI 3A et Mme [G] de la solution proposée était évidente.
Il est de jurisprudence constante que la banque doit conseiller explicitement son client sur les possibilités de souscription individuelle, auprès de toute compagnie d'assurance de son choix, d'une assurance adaptée garantissant certains risques non couverts par l'assurance groupe qu'elle propose ou s'assurer que le refus de souscrire une telle assurance est parfaitement éclairé et ne résulte pas d'un éventuel manque d'information (Civ. 2ème, 23 juin 2016, n° 15-12133).
Aux termes des avenants conclus le 29 décembre 2014 entre d'une part, la Caisse d'Epargne et de Prévoyance d'Ile de France et d'autre part, la SCI 3A, Mme [G] et M. [L], le taux d'intérêt des prêts a été ramené de 4,50 % à 3,50 %, la durée des prêts d'un montant de 2 829 000 euros et de 2 260 000 euros a été allongée pour être respectivement portée au 5 juin 2024 au lieu du 5 juin 2023 et au 5 février 2024 au lieu du 5 février 2023, un différé d'amortissement en capital de 12 mois a été accordé et le taux effectif global de ces prêts a été fixé respectivement à 3,50 % hors assurance et 4,68 % (assurance CNP comprise) pour le premier prêt et 3,50 % hors assurance et 4,64 % (assurance CNP comprise) pour le second prêt (pièces n° 15 et 16 des appelantes).
Les parties ont par ailleurs expressément reconnues que : 'Le présent avenant ne consacre qu'un accord de réaménagement du contrat d'origine ci-dessus mentionné et qu'il n'apporte, en conséquence, aucune novation aux autres conditions de ce dernier ; tout particulièrement les garanties recueillies et attachées à ce prêt continuent à produire leur plein et entier effet et sont entièrement et expressément réservées'.
C'est donc à juste titre que le tribunal a retenu que la mention indiquée dans les conditions particulières d'assurance signées et approuvées par Mme [G] le 3 mai 2007 aux termes de laquelle 'Toute modification de montant, de durée, de quotité d'un prêt objet du financement ainsi que toute modification de son mode d'amortissement entraîne de plein droit l'annulation de la présente proposition et implique un renouvellement des formalités d'entrée dans l'assurance' n'était pas de nature à faire naître une obligation de conseil ou de mise en garde lors de la modification par avenants des contrats de prêt, la proposition d'assurance ayant déjà été acceptée lors de la proposition des avenants.
Enfin, comme l'a relevé le tribunal par des motifs pertinents que la cour adopte, 'compte tenu du différé d'amortissement de douze mois accordé aux termes des avenants litigieux et de l'âge de Mme [G]' qui avait 61 ans à la date de leur signature dès lors qu'elle est née le [Date naissance 2] 1953, 'la signature de ces avenants n'a eu aucune incidence sur les risques d'ITT et PTIA dont la couverture, admise dès 2007, cessait en 2018, au 65ème anniversaire de l'assurée.
En revanche, le risque de décès n'était plus garanti entre la date du 70ème anniversaire de l'assurée, en août 2023, et le nouveau terme des contrats de prêts, en février et juin 2024 selon les termes des avenants, tandis qu'il l'était avant la conclusion des avenants, et il n'est pas établi que la banque ait attiré l'attention de Mme [G] sur ce point, alors que le banquier qui propose à son client, auquel il consent un prêt, d'adhérer au contrat d'assurance de groupe, reste tenu d'éclairer l'assuré sur l'adéquation des risques couverts à sa situation personnelle.
La société Caisse d'Epargne et de Prévoyance d'Ile de France était ainsi tenue, en cours d'exécution du contrat et compte tenu de la modification des contrats de prêt susceptible de modifier la couverture des risques, d'éclairer Mme [G] afin de lui permettre d'envisager la souscription d'une assurance complémentaire auprès d'un assureur de son choix, ce dont elle ne justifie pas, engageant ainsi sa responsabilité contractuelle.'
La banque étant à l'origine des avenants modifiant la situation de l'assurée, la responsabilité de la société CNP Assurances n'est pas engagée de ce chef.
Il résulte de l'ensemble de ces éléments que la Caisse d'Epargne et de Prévoyance d'Ile de France a commis des manquements contractuels en ne vérifiant pas la transmission effective à l'assureur du dossier de souscription de Mme [G] à l'assurance groupe, en reversant tardivement à la SCI 3A les indemnités versées par la société CNP Assurances et en s'abstenant d'éclairer Mme [G] sur l'adéquation des risques couverts à sa situation personnelle au regard de la modification des contrats de prêts.
Aucune faute n'étant établie à l'encontre de la société CNP Assurances, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a débouté Mme [G] et la SCI 3A des demandes formées à son encontre.
Sur les préjudices
Sur le préjudice financier
La SCI 3A et Mme [G] sollicitent l'infirmation du jugement déféré en ce qu'il les a déboutés de leur demande en réparation de leur préjudice financier au motif que le lien de causalité entre les fautes de la CEIDF et le préjudice subi par la SCI 3 A ne serait pas établi.
Elles font valoir que si la CEIDF n'avait pas 'égaré' les contrats d'assurance de Mme [G] et de M. [L], et avait satisfait à son devoir d'information et de conseil en matière d'assurance, Mme [G] aurait été indemnisée dès le 31 décembre 2013 a minima aux conditions du contrat de groupe et aurait donc perçu, a minima, la somme de 41 850 euros par trimestre, ce qui aurait pu permettre de la remplacer pour assurer la pérennité de la SCI 3A et des sociétés d'exploitation, et par voie de conséquence de bénéficier des loyers et de régler les sommes dues au titre des prêts. Or, en l'absence d'indemnisation, les difficultés à régler les prêts ont commencé à se faire sentir dès le mois de février 2014. Dès le mois d'avril 2014, la CEIDF a constaté un impayé de 59 000 euros. Depuis la souscription des prêts en 2007, la SCI 3A n'avait jamais connu aucun incident de paiement. Dans le cadre de la solution proposé par la Caisse d'Epargne, la SCI 3A a dû supporter le poids de plus de sept années de primes (264 589 euros) à un moment où elle avait besoin d'être indemnisée et ce alors que le montant des échéances des prêts s'élevait à 480 000 euros par an. Les appelantes n'ont eu d'autre choix, pour régler les sommes réclamées par la CEIDF, que de brader le bien immobilier de la SCI 3A qui a été cédé le 14 avril 2021 pour un prix de 4 450 000 euros, alors que celui-ci était évalué entre 7,9 millions d'euros et 8,3 millions d'euros. Cette vente était également rendue indispensable par le fait que les prêts n'étaient plus assurés contre l'ITT et la PTIA depuis le 10 août 2018 et n'étaient bientôt plus assurés contre le décès, du fait des conditions d'assurance inadaptées prévus dans les avenants de 2014. Le prix de vente de 4 450 000 euros n'a même pas permis de couvrir le coût de revient du bien immobilier qui s'est élevé à la somme de 5 740 000 euros. Quatorze années après l'acquisition du bien immobilier et alors qu'elle y avait fait des travaux de rénovation, la SCI 3A a été contrainte de céder son bien immobilier 1,3 millions d'euros en dessous de son prix de revient et près de 3,8 millions d'euros en dessous du prix du marché, de sorte que son préjudice s'élève au minimum à la somme de 2 500 000 euros dont elle sollicite le versement par la CEIDF et la CNP Assurances à titre de dommages et intérêts sur le fondement de l'ancien article 1147 du code civil et, subsidiairement, sur le fondement des dispositions de l'article 1382 ancien du code civil. L'absence de prise en charge du sinistre au moment de sa survenance et la gestion désastreuse et fautive de
ce sinistre par les institutions financières sont incontestablement à l'origine de la dette abyssale de la SCI 3A qui était inexistante avant ces fautes puisque la SCI avait toujours honoré les échéances des prêts depuis 2007. Le fait que la CEIDF ait finalement versé le 10 mai 2022 à la SCI 3A la somme de 137 929 euros au titre du prélèvement qu'elle avait indûment opéré sur les indemnités versées dans ses livres par la société CNP Assurances est sans incidence sur l'obligation de réparation qui pèse sur la CEIDF dès lors que le 10 mai 2022 les préjudices étaient déjà réalisés.
La Caisse d'Epargne et de Prévoyance d'Ile de France fait valoir que la SCI 3A et Mme [G] ne rapportent pas la preuve d'un lien de causalité entre les fautes invoquées et le préjudice évalué à la somme de 2 500 000 euros. Le fait que les actes d'adhésion de Mme [G] aux contrats d'assurance se soient égarés a été sans incidence sur la prise en charge par la CNP Assurances du sinistre à la suite de l'accord négocié entre les parties. Si la perte de ces contrats a été la source d'un retard dans le versement des indemnités d'assurance, ce seul retard ne saurait justifier la demande d'indemnisation d'un montant de 2 500 000 euros.
Elle soutient également que, comme l'on relevé le tribunal, la SCI 3A et Mme [G] ne produisent pas de pièce révélant que la SCI 3A connaissait des difficultés financières importantes l'ayant empêchée de régler les échéances des prêts à la suite de l'accident de Mme [G] et de l'absence initiale de prise en charge du sinistre par l'assurance. Par ailleurs, la situation des sociétés d'exploitation ne saurait être prise en compte dans la détermination du préjudice de la SCI 3 A, les conditions d'exploitation des hôtels et du restaurant en l'absence de Mme [G] n'étant pas établies.
Comme le relève la banque, la perte des contrats d'assurance n'a pas eu d'incidence sur la prise en charge par la société CNP Assurances du sinistre à la suite de l'accord négocié entre les parties le 19 décembre 2014 et c'est à juste titre que le tribunal a considéré qu'il n'est pas démontré que la perte des contrats d'assurance, en 2007, serait à l'origine de l'aggravation de la situation de la SCI 3A ayant conduit aux impayés survenus en décembre 2017.
C'es également à juste titre que le tribunal a considéré, ensuite, que n'ayant pu être éclairée sur l'absence de couverture du risque de décès avant le terme des contrats de prêts, Mme [G] a pu perdre une chance de bénéficier de cette garantie jusqu'au terme des prêts, en sollicitant soit la société CNP Assurances, soit un autre assureur de son choix, mais que toutefois, le bien immobilier, objet des prêts, ayant été revendu le 14 avril 2021, soit avant la période où le risque de décès n'était plus couvert, et alors que la SCI 3A tentait depuis 2015 de le revendre, il s'en déduit que les appelantes n'ont subi aucun dommage en lien avec la faute commise.
Toutefois, comme l'a relevé le tribunal sans en tirer les conséquences qui s'imposaient, il est constant que l'indemnisation du sinistre a été tardive puisque le premier versement partiel n'a été effectué que le 11 septembre 2015 pour un montant de 113 621 euros, et les suivants le 7 octobre 2015 pour la somme de 32 850 euros, le 27 mai 2016 pour la somme de 13 500 euros, le 21 juillet 2016 pour la somme de 27 000 euros et, enfin, ainsi qu'indiqué la somme de 137 929 euros n'a été versée à la SCI 3A que le 10 mai 2022 et ce, alors que le sinistre avait été déclaré à la banque dès le 11 novembre 2013 et de manière réitérée le 2 janvier 2014, l'assureur en ayant accusé réception le 4 février 2014 et qu'un accord était intervenu entre les parties dès le 19 décembre 2014.
Il en résulte que la SCI 3A a subi un préjudice direct et certain induit par le manque de trésorerie dont elle aurait pu bénéficier dès le 31 décembre 2013 aux conditions du contrat de groupe.
Ce préjudice sera justement réparé par l'allocation des intérêts de retard au taux légal ayant couru entre le 31 décembre 2013 et le 11 septembre 2015 sur la somme de 113 621 euros, entre le 31 décembre 2013 et le 7 octobre 2015 sur la somme de 32 850 euros, entre le 31 décembre 2013 et le 27 mai 2016 sur la somme de 13 500 euros, entre le 31 décembre 2013 et le 21 juillet 2016 sur la somme de 27 000 euros et enfin entre le 31 décembre 2013 et le 10 mai 2022 sur la somme de 137 920 euros, le jugement déféré étant infirmé de ce chef.
Sur le préjudice moral
Mme [G] sollicite l'infirmation du jugement déféré sur en ce qu'il a limité son préjudice moral à la somme de 5 000 euros.
Elle fait notamment valoir qu'elle a dû, du fait de la perte des contrats d'assurance par la banque, vivre d'octobre 2013 à décembre 2014 avec l'idée que pesait sur elle et sur son patrimoine des prêts de plusieurs millions d'euros non assurés et ce alors que son état de santé était totalement incompatible avec cette situation. De plus, cette situation l'a plongée dans une dépression pour laquelle elle fait l'objet d'un suivi psychiatrique et d'un traitement médicamenteux lourd. Elle sollicite en réparation de son préjudice moral une indemnisation d'un montant de 150 000 euros à la charge de la CEIDF et de la CNP Assurances sur le fondement de l'ancien article 1147 du code civil et, subsidiairement, sur le fondement des dispositions de l'article 1382 ancien du code civil.
La banque réplique que Mme [G] ne justifie pas qu'elle aurait plongé dans une dépression pour laquelle elle fait l'objet depuis lors d'un suivi psychiatrique et d'un traitement médicamenteux lourd. Elle relève que l'appelante a constamment participé aux négociations et enfin que l'état de détresse allégué trouve son origine dans le projet monté par Mme [G] et M. [L] et l'accident de santé de Mme [G], le remboursement par la SCI 3A des prêts rendant définitivement sans objet l'examen du préjudice.
C'est cependant à juste titre que le tribunal a considéré que la faute commise par la banque dans le défaut de vérification de la transmission effective du dossier de souscription a engendré des démarches multiples ainsi qu'un retard dans l'indemnisation du sinistre subi par Mme [G] à l'origine d'un préjudice moral qu'il a justement évalué à la somme de 5 000 euros.
Le jugement déféré sera par conséquent confirmé en ce qu'il a condamné la Caisse d'Epargne et de Prévoyance d'Ile de France à payer à Mme [V] [G] la somme de 5 000 euros en réparation de son préjudice moral.
Sur la demande de remboursement de la somme de 137 929 euros
La SCI 3A et Mme [G] sollicitent l'infirmation du jugement déféré en ce qu'il les a déboutées de leur demande de condamnation de la Caisse d'Epargne et de Prévoyance Ile de France à leur verser la somme de 137 929 euros, et statuant à nouveau, de constater, à titre principal, l'acquiescement de la Caisse d'Epargne et de Prévoyance Ile de France à la demande de la SCI 3A et de Mme [G] de leur verser la somme de 137 929 euros et prendre acte de ce que ce versement a été effectué le 10 mai 2022 et, à titre subsidiaire, de condamner la société Caisse d'Epargne et de Prévoyance Ile de France à leur verser la somme de 137 929 euros majorée de l'intérêt au taux d'intérêt légal à la date de la décision à intervenir.
La banque réplique, notamment, que c'est sur instruction de Mme [G] du 12 septembre 2015 qu'il a été procédé à un "virement interne" d'un montant de 137 706,57 euros, ces fonds ont été retrouvés sur un compte d'attente et ont depuis lors été crédités au compte de la SCI 3A, de sorte que les appelantes ne peuvent qu'être déboutées de leur demande de remboursement de la somme de 137 929 euros.
Il ressort des développements qui précédent, sans qu'il soit nécessaire de rentrer dans le détail de l'argumentation des parties, que la banque a versé la somme de 137 929 euros à la SCI 3A le 10 mai 2022, de sorte que la demande de remboursement de cette somme formée en première instance est désormais sans objet.
Sur le la responsabilité des intimées en raison de l'inadéquation des garanties avec la situation personnelle de l'emprunteur
La SCI 3A et Mme [G] sollicitent la condamnation solidaire de la CEIDF et de CNP Assurances à leur verser la somme de 1 845 675,54 euros "en réparation du préjudice financier subi du fait de l'inadéquation des garanties initiales avec la situation personnelle des emprunteurs, montant majoré de l'intérêt au taux légal à compter de la date de la décision à intervenir".
Les appelantes allèguent que les garanties proposées étaient manifestement inadaptées à la situation personnelle de Mme [G], à son âge, à son caractère 'd'homme-clef' et à la charge des échéances des prêts et qu'il existait une inadéquation entre le risque et la couverture proposée dès lors, notamment, que la couverture au titre de l'incapacité de travail était limitée dans le temps à 720 jours et que l'assurance souscrite "ne couvrait aucun risque intermédiaire au titre de l'invalidité permanente totale (IPT) et de l'invalidité permanente partielle (IPP)". La perte de chance de souscrire des garanties adaptées doit être évaluée à 100 % dans la mesure où de nombreux établissements proposaient des garanties qui auraient permis la prise en charge de 50 % du capital restant dû au titre des deux prêts, comme le démontrent les devis de la Générali et d'Allianz.
S'agissant du montant du préjudice allégué, il correspond à 50 % du montant du capital restant dû au titre des deux prêts à la date du 2 octobre 2013.
La banque réplique que les appelantes ne contestent pas avoir eu connaissance en 2007, antérieurement à l'octroi des prêts, des garanties accordées et de leurs limites qui apparaissent clairement dans les conditions particulières d'assurance et dans la notice d'information, de sorte qu'elle a rempli ses obligations d'information. Elle expose qu'il incombe aux appelantes d'établir qu'à l'époque de la souscription des garanties, soit au mois de mai 2007, elles auraient pu souscrire des garanties couvrant 100 % de la moitié des échéances des prêts, d'une part, et pour une durée excédant les deux années de couverture du contrat CNP Assurances d'autre part et qu'elles ne rapportent pas ces preuves. Elle relève qu'il n'est nullement établi que d'autres compagnies, qu'il aurait été à l'époque possible à Mme [G] de rechercher, auraient proposé une meilleure couverture pour un moindre coût. Les deux "simulations" produites par les appelantes concernent des situations différentes de celle de la présente affaire et le contrat groupe auquel Mme [G] a adhéré couvrait la situation dans laquelle elle s'est trouvée, de sorte que les appelantes n'établissent pas l'existence de la "perte de chance" qu'elles invoquent.
La CNP Assurances fait valoir que le devoir de conseil et de mise en garde ne pèse pas sur l'assureur. La solidarité est légale ou conventionnelle. Elle ne se présume pas et ne peut s'appliquer au cas d'espèce. Les simulations de garanties versées par la SCI 3A et Mme [G] ont été réalisées en 2019. Or, les prêts ont été contractés en 2007. En outre, ces simulations ont été réalisées sur la base de données erronées sur les dates de naissance des personnes à assurer. Ces simulations ne permettent pas non plus de démontrer que les compagnies d'assurance citées par les demanderesses auraient pris en charge 50 % du capital restant dû au titre des prêts, à la suite du sinistre de Mme [G]. Par conséquent, et en tout état de cause, Mme [G] et la SCI 3A ne démontrent ni l'existence d'une faute, ni celle d'un préjudice et d'un lien de causalité.
Il ressort des développements qui précédent que toutes les informations relatives tant au coût des assurances qu'à leur étendue apparaissent clairement dans les conditions particulières d'assurance acceptées et signées par Mme [G] le 3 mai 2007 et dans la notice d'information dont Mme [G] a paraphé chaque page, de sorte qu'elle n'a pu se méprendre sur le champ des garanties souscrites en mai 2007 et les conditions de leur mise en oeuvre.
Comme le relève la banque, Mme [G] ne démontre pas qu'elle aurait pu souscrire une meilleure couverture pour un moindre coût.
Ainsi que le souligne la société CNP Assurances, les simulations de garanties versées aux débats par la SCI 3A et Mme [G] ont été réalisées en 2019 (pièces n° 38 et 39), alors que les contrats de prêts ont été contractés en 2007 et ces simulations ne permettent pas de démontrer que les compagnies d'assurance Générali et Allianz auraient pris en charge 50 % du capital restant dû au titre des prêts à la suite du sinistre de Mme [G].
En tout état de cause, la garantie souscrite couvrait la situation d'ITT dans laquelle Mme [G] s'est trouvée à la suite de l'AVC dont elle a été victime le 2 octobre 2013, de sorte qu'elle n'établit pas la perte de chance alléguée.
Dans ces conditions, il ya lieu de débouter les appelantes de leur demande tendant à voir condamner solidairement la société Caisse d'Epargne et de Prévoyance Ile de France et CNP Assurances à leur verser la somme de 1 845 675,54 euros en réparation du préjudice financier subi du fait de l'inadéquation des garanties initiales avec la situation personnelle des emprunteurs, le jugement déféré étant confirmé sur le rejet de cette demande.
Sur les demandes relatives aux stipulations d'intérêts dans les avenants
Les appelantes demandent à titre principal la nullité de la stipulation d'intérêts contenue dans les deux avenants aux prêts et à titre subsidiaire, la déchéance totale de la stipulation d'intérêts. Elles expliquent n'avoir pas renoncé à soulever les erreurs affectant les stipulations d'intérêts mentionnées aux avenants tenant à 'l'absence de prise en compte des arriérés de primes d'assurance pour la détermination du TEG" et au 'défaut de communication du taux de période et de la durée de la période", déniant l'exécution volontaire des contrats de prêts dès lors que le prélèvement des sommes réclamées sur le prix de vente a été effectué par le notaire, que l'exécution volontaire ne vaut confirmation qu'en l'absence de réserves et qu'en l'occurrence elles avaient assigné en nullité des taux d'intérêts et ne se sont pas désistées de leur instance, et qu'enfin, la confirmation ne peut intervenir, en cas de violence qu'après qu'elle ait cessé, soulignant la violence économique exercée par la banque.
Sur le fond, elles font valoir, d'une part, que les primes d'assurance afférentes à la période de 2007 à 2014 n'ont pas été prises en compte pour la détermination du taux effectif global alors qu'il s'agissait bien de frais conditionnant l'octroi des avenants et de frais réglés après l'octroi des avenants, seuls ont été pris en compte les frais d'assurance afférents à la période postérieure, ce que ne conteste d'ailleurs pas la banque dans ses écritures et que le taux est ainsi erroné, l'erreur dépassant nécessairement la décimale compte tenu du montant non pris en compte. Elles soulèvent d'autre part le défaut de communication du taux et de la durée de la période.
La Caisse d'Epargne et de Prévoyance d'Ile de France fait valoir qu'a l'occasion de la vente du complexe hôtelier, la SCI 3A a exécuté les contrats en procédant au remboursement des deux prêts objets du litige. Cette exécution volontaire du contrat, en connaissance de la 'cause de nullité' invoquée par les appelantes, vaut confirmation au sens des dispositions de l'article 1182 du code civil. Cette confirmation a emporté renonciation aux moyens et exceptions que les appelantes pouvaient opposer au prêteur. Elle rappelle que le paiement sans réserve emporte nécessairement confirmation. De plus, l'acte notarié stipule que le remboursement a été effectué 'conformément aux décomptes transmis par le créancier' et que 'Le vendeur donne dès à présent d'ores et déjà tous pouvoirs au notaire soussigné aux effets ci-dessus.' Au surplus, il est de jurisprudence que 'en cas de renégociation du prêt les modifications du contrat initial sont apportées sous la seule forme d'un avenant comprenant diverses informations sans que soit exigée la communication du taux et de la durée de la période.' Dès lors, Mme [G] et la SCI 3A sont mal fondées à invoquer une prétendue nullité de la stipulation d'intérêts pour un défaut de communication du 'taux de période et de la durée de la période.' Enfin, les appelantes ne contestent pas que 'les frais d'assurances à venir' ont bien été pris en compte dans le calcul du TEG.
Sur la demande en nullité
C'est par des motifs pertinents que la cour adopte que le tribunal a considéré que :
'L'article L.312-33 du code de la consommation dit que le prêteur, qui ne respecte pas les obligations qu'il tient de l'article L.312-8, lequel renvoie concernant le taux de période et le taux effectif global aux prescriptions de l'article L.313-1 du même code en définissant le contenu comprenant les frais qui conditionnent l'octroi du prêt, pourra être déchu du droit aux intérêts en totalité ou dans la proportion fixée par le juge.
Dès lors, en ce que la mention dans une offre de prêt d'un taux effectif global erroné et l'absence d'un taux de période ne peuvent emporter que la déchéance du droit aux intérêts au regard des dispositions de l'article L.312-33 du code de la consommation, seul applicable en la cause, les demanderesses ne sauraient utilement, de ce motif, poursuivre l'annulation de la clause d'intérêts conventionnels des deux avenants, leurs prétentions doivent être rejetées, sans qu'il n'y ait lieu d'examiner l'éventuelle confirmation de la cause de nullité soulevée.'
Le jugement déféré sera par conséquent confirmé en ce qu'il a débouté la SCI 3A et Mme [G] de leurs demandes tendant à prononcer la nullité de la stipulation d'intérêts conventionnels fixée dans l'avenant au prêt n°0189401 devenu n°9425954 et dans l'avenant au prêt n° 0189409 devenu n° 9426024 et ordonner la substitution du taux d'intérêt légal au taux conventionnel à la date de souscription de l'avenant soit 0,04 %.
Sur la demande en déchéance du droit aux intérêts
Sur le défaut de mention dans les avenants du taux de période
C'est par des motifs pertinents que la cour adopte et qu'il convient de confirmer que le tribunal a considéré que :
'En application des dispositions de l'article L.312-14-1 du code de la consommation, en cas de renégociation du prêt, les modifications du contrat initial sont apportées sous la seule forme d'un avenant comprenant diverses informations sans que ne soit exigée la communication du taux et de la durée de la période.
Il en résulte que les demanderesses ne peuvent se prévaloir d'aucune irrégularité à ce titre.'
Sur le caractère erroné du taux effectif global
Aux termes de l'article L. 313-2 alinéa premier ancien du code de la consommation, le taux effectif global déterminé comme il est dit à l'article L. 313-1 doit être mentionné dans tout écrit constatant un contrat de prêt régi par la présente section.
Il résulte des dispositions des articles L. 313-1 et R. 313-1 anciens du code de la consommation que le taux effectif global, s'agissant d'un crédit immobilier, est un taux annuel, proportionnel au taux de période, et que doivent être intégrées dans le calcul de ce taux l'ensemble des charges rendues obligatoires et ayant un lien direct et exclusif avec l'octroi du prêt, les charges liées aux garanties ou les honoraires d'officiers ministériels en étant toutefois exclus lorsque leur montant ne peut être indiqué avec précision antérieurement à la conclusion définitive du contrat.
Il résulte ensuite des dispositions de l'article 1315, ancien, du code civil qu'il appartient à l'emprunteur qui se prévaut d'une erreur dans le calcul du coût total du crédit ou du taux effectif global sur le fondement de ces dispositions de rapporter la preuve que les frais dont il invoque l'omission par la banque constituaient une condition d'octroi du prêt et qu'il les a effectivement supportés.
Par ailleurs, si l'annexe à l'article R. 313-1, ancien, du code de la consommation n'a pour objet que de définir la méthode dite 'd'équivalence' de calcul du taux effectif global visée par ce texte, non la méthode dite 'proportionnelle' seule applicable aux crédits immobiliers, la précision figurant au paragraphe d) de cette annexe, aux termes duquel le résultat du calcul de ce taux est exprimé avec une exactitude d'au moins une décimale, est d'application générale et impose à l'emprunteur, pour l'ensemble des contrats de prêt et quelle que soit la méthode de calcul du taux effectif global dont ils relèvent, de démontrer que l'erreur alléguée entraîne un écart d'au moins une décimale entre le taux réel et le taux mentionné dans l'offre ou le contrat.
En l'espèce, c'est à tort que le tribunal a considéré que, 'si l'adhésion au contrat d'assurance du groupe pouvait être, lors de la conclusion des contrats de prêt, une condition de leur octroi, il ne ressort ni de la proposition faite le 19 décembre 2014 ni des avenants signés le 29 décembre 2014 que le paiement des primes d'assurances passées était une condition d'octroi des avenants, n'étant qu'une condition d'exécution des contrats d'assurance. Ainsi, il n'y a pas lieu d'en tenir compte dans le calcul du taux effectif global mentionné dans les avenants.'
S'agissant de l'avenant au prêt d'un montant de 2 829 000 euros n° 0189401 devenu 1321766 puis 425954, comme le relèvent les appelantes, cet avenant prévoyait une baisse du taux d'intérêt ramené de 4,50 % à 3,50 %, pour un TEG annoncé de 4,68 % 'assurance CNP comprise.' L'avenant octroyé prévoyait l'adhésion de manière rétroactive à l'assurance CNP Assurances dans les conditions signées en 2007. Dans la mesure où les primes d'assurance n'avaient jamais été prélevées compte tenu de la perte des contrats d'assurance par la CEIDF, cette adhésion rétroactive impliquait le paiement des primes courantes jusqu'au nouveau terme du prêt et le règlement des primes correspondant à la période de mai 2007 à octobre 2014. Or, dans l'avenant au prêt n°0189401, les primes d'assurance afférentes à la période de 2007 à 2014, soit la somme totale de 104 908,65 euros, n'ont pas été prises en compte pour la détermination du taux effectif global de 4,68 %, alors qu'il s'agissait bien de frais conditionnant l'octroi de l'avenant et de frais réglés après l'octroi de l'avenant.
Il n'est d'ailleurs pas contesté par la banque qu'ont été pris en compte les seuls frais d'assurance afférents à la période postérieure à l'émission de l'avenant.
Ainsi, le taux effectif global de 4,68 % mentionné dans l'avenant au prêt n°0189401 devenu 1321766 puis 9425954 est nécessairement erroné car il ne mentionne pas tous les frais d'assurance.
De plus, en omettant de prendre en compte la somme de 104 908,65 euros dans le calcul du TEG, l'erreur alléguée entraîne un écart d'au moins une décimale entre le taux réel et le taux mentionné dans l'avenant, cette analyse étant confirmée dans le rapport d'expertise amiable du 28 mai 2020 rendu par Mme [H] [Y], experte inscrite sur la liste des experts judiciaires près la cour d'appel d'Angers et la cour administrative d'appel de Nantes (pièce des appelantes n° 41).
De plus, il est de jurisprudence constate que seuls les frais d'assurance facultative, sont considérés comme une simple modalité d'exécution du prêt et n'ont pas à être compris dans le calcul du TEG. Or il est constant, en l'espèce, que l'assurance groupe n'était pas facultative.
Il y a donc lieu prononcer la déchéance des intérêts conventionnels fixés dans l'avenant au prêt n° 0189401 devenu 1321766 puis 425954 à hauteur de la somme de 30 000 euros et de condamner la société Caisse d'Epargne et de Prévoyance Ile de France à rembourser à la SCI 3A la somme de 30 000 euros avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt.
S'agissant de l'avenant au prêt d'un montant de 2 260 000 euros n° 0189409 devenu 1369079 puis 9426024, comme le relèvent les appelantes, cet avenant prévoyait une baisse du taux d'intérêt ramené de 4,50 % à 3,50 %, pour un TEG annoncé de 4,64 % 'assurance CNP comprise' Comme le précédent, cet avenant prévoyait l'adhésion de manière rétroactive à l'assurance CNP Assurances dans les conditions signées en 2007 et dans la mesure où les primes d'assurance n'avaient jamais été prélevées, cette adhésion rétroactive impliquait également le paiement des primes courantes jusqu'au nouveau terme du prêt et le règlement des primes correspondant à la période mai 2007 à octobre 2014. Or, dans l'avenant au prêt n° 0189409, les primes d'assurance afférentes à la période de mai 2007 à 2014, soit la somme de 83 684,92 euros n'ont pas été prises en compte pour la détermination du taux effectif global de 4,64 % et il n'est pas contesté qu'ont été pris en compte les seuls frais d'assurance afférents à la période postérieure à l'émission de l'avenant. Ainsi, le taux effectif global de 4,64 % mentionné dans l'avenant au prêt n° 0189409 devenu 1369079 puis 9426024 est erroné car il ne mentionne pas tous les frais d'assurance. De plus en omettant de prendre en compte la somme de 83 684,92 euros dans le calcul du TEG, la décimale est nécessairement atteinte. Cette analyse est également confirmée par le rapport précité.
Il y a donc lieu prononcer la déchéance des intérêts conventionnels fixés dans l'avenant au prêt n° 0189409 devenu 1369079 puis 9426024 à hauteur de la somme de 25 000 euros et de condamner la société Caisse d'Epargne et de Prévoyance Ile de France à rembourser à la SCI 3A la somme dswe 25 000 euros avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt.
Sur la capitalisation des intérêts
Il ya lieu d'ordonner la capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1342-2 du code civil.
Sur les autres demandes
Aux termes de l'article 696, alinéa premier, du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie. La société Caisse d'Epargne et de Prévoyance Ile de France sera donc condamnée aux entiers dépens, la décision déférée étant confirmée de ce chef.
En application de l'article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
En l'espèce, la SCI 3A et Mme [G] seront condamnées à payer à la société CNP Assurances la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
La Caisse d'Epargne et de Prévoyance d'Ile de France sera condamnée à payer à la SCI 3A et Mme [V] [G] la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
CONFIRME le jugement du tribunal judiciaire de Paris du 3 février 2022 en ce qu'il a condamné la Caisse d'Epargne et de Prévoyance d'Ile de France à payer à Mme [V] [G] la somme de 5 000 euros en réparation de son préjudice moral, débouté la SCI 3A et Mme [V] [G] de leur demande tendant à voir condamner solidairement la société Caisse d'Epargne et de Prévoyance Ile de France et CNP Assurances à leur verser la somme de 1 845 675,54 euros en réparation du préjudice financier subi du fait du fait de l'inadéquation des garanties initiales avec la situation personnelle des emprunteurs, rejeté la demande de nullité de la stipulation d'intérêts conventionnels fixée dans l'avenant au prêt n°0189401 devenu n°9425954 et dans l'avenant au prêt n° 0189409 devenu n° 9426024 et sur les montants alloués au titre de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens ;
L'INFIRME pour le surplus ;
Statuant à nouveau des chefs de la décision infirmée et y ajoutant,
CONDAMNE la Caisse d'Epargne et de Prévoyance d'Ile de France à payer à la société SCI 3A les intérêts de retard au taux légal ayant couru entre le 31 décembre 2013 et le 11 septembre 2015 sur la somme de 113 621 euros, entre le 31 décembre 2013 et le 7 octobre 2015 sur la somme de 32 850 euros, entre le 31 décembre 2013 et le 27 mai 2016 sur la somme de 13 500 euros, entre le 31 décembre 2013 et le 21 juillet 2016 sur la somme de 27 000 euros et enfin entre le 31 décembre 2013 et le 10 mai 2022 sur la somme de 137 920 euros en réparation du préjudice financier subi ;
PRONONCE la déchéance des intérêts conventionnels fixés dans l'avenant au prêt n°0189401 devenu 1321766 puis 425954 à hauteur de la somme de 30 000 euros ;
CONDAMNE la société Caisse d'Epargne et de Prévoyance Ile de France à rembourser à la SCI 3A la somme de 30 000 euros avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt ;
PRONONCE la déchéance des intérêts conventionnels fixés dans l'avenant au prêt n° 0189409 devenu 1369079 puis 9426024 à hauteur de la somme de 25 000 euros ;
CONDAMNE la société Caisse d'Epargne et de Prévoyance Ile de France à rembourser à la SCI 3A la somme de 25 000 euros avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt ;
ORDONNE la capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1342-2 du code civil ;
CONDAMNE la SCI 3A et Mme [G] à payer à la société CNP Assurances la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE la Caisse d'Epargne et de Prévoyance d'Ile de France à payer à la SCI 3A et Mme [V] [G] la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile;
CONDAMNE la Caisse d'Epargne et de Prévoyance Ile de France aux entiers dépens ;
REJETTE toute autre demande.
* * * * *
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT