Décisions
CA Aix-en-Provence, ch. 1-1, 5 juin 2024, n° 23/14892
AIX-EN-PROVENCE
Arrêt
Autre
COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
Chambre 1-1
ARRÊT AU FOND
DU 05 JUIN 2024
N° 2024/ 234
N° RG 23/14892 - N° Portalis DBVB-V-B7H-BMHUT
[K] [U] [F]
C/
[T] [Y] [W]-[P]
[O] [L]
[J] [S]
[H] [E] épouse [S]
[G] [D] veuve [N]
[J] [C]
S.A. BPCE ASSURANCES
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me Joseph MAGNAN Me Paul GUEDJ
Me Ingrid OLIVER-D'OLLONNE
Me Laure ATIAS
Me Florence ADAGAS-CAOU
Décision déférée à la Cour :
Ordonnance du Juge de la mise en état de DRAGUIGNAN en date du 27 Novembre 2023 enregistré (e) au répertoire général sous le n° 22/02654.
APPELANT
Monsieur [K] [U] [F]
né le 21 Novembre 1969 à [Localité 16], demeurant [Adresse 6] - [Localité 10]
représenté par Me Joseph MAGNAN de la SCP PAUL ET JOSEPH MAGNAN, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, et plaidant par Me Veronica VECCHIONI, avocat au barreau de NICE
INTIMES
Madame [T] [Y] [W]-[P]
née le 02 Juillet 1952 à [Localité 14], demeurant [Adresse 5] - [Localité 2]
représentée par Me Paul GUEDJ de la SCP COHEN GUEDJ - MONTERO - DAVAL GUEDJ, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, et plaidant par Me Sarah JOURNO, avocat au barreau de GRASSE
Madame [O] [L]
née le 01 Mars 1977 à [Localité 14], demeurant [Adresse 4] - [Localité 2]
représentée par Me Paul GUEDJ de la SCP COHEN GUEDJ - MONTERO - DAVAL GUEDJ, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, et plaidant par Me Sarah JOURNO, avocat au barreau de GRASSE
Monsieur [J] [S]
né le 16 Février 1954 à [Localité 12], demeurant [Adresse 7], [Localité 15]
représenté et plaidant par Me Ingrid OLIVER-D'OLLONNE, avocat au barreau de GRASSE
Madame [H] [E] épouse [S]
née le 18 Août 1956 à [Localité 12], demeurant [Adresse 7], [Localité 15]
représenté et plaidant par Me Ingrid OLIVER-D'OLLONNE, avocat au barreau de GRASSE
Madame [D] veuve [N] [G] personnellement et en sa qualité d'ayant-droit de Feu [A] [N]
née le 08 Novembre 1960 à [Localité 11], demeurant [Adresse 3] - [Localité 1]
représentée par Me Laure ATIAS de la SELARL LAMBERT ATIAS & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, et plaidant Me Jérôme BRUNET-DEBAINES, avocat au barreau de DRAGUIGNAN
Monsieur [J] [C]
né le 09 Juillet 1946 à [Localité 13], demeurant [Adresse 3] - [Localité 1]
représentée par Me Laure ATIAS de la SELARL LAMBERT ATIAS & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, et plaidant Me Jérôme BRUNET-DEBAINES, avocat au barreau de DRAGUIGNAN
SA BCPCE ASSURANCES prise en la personne de son représentant légal domicilié de droit audit siège.
demeurant [Adresse 8] - [Localité 9]
représentée par Me Florence ADAGAS-CAOU de la SCP DUHAMEL ASSOCIES, avocat au barreau de DRAGUIGNAN
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 804, 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 03 Avril 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Fabienne ALLARD, Conseillère, chargé du rapport, qui a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Olivier BRUE, Président
Madame Catherine OUVREL, Conseillère
Madame Fabienne ALLARD, Conseillère
Greffier lors des débats : Madame Céline LITTERI.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 05 Juin 2024.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 05 Juin 2024
Signé par Monsieur Olivier BRUE, Président et Madame Céline LITTERI,, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
Exposé des faits et de la procédure
Par acte authentique du 25 avril 1986, M. [A] [N] et son épouse, Mme [G] [D], ont acquis à [Localité 10] un terrain sur lequel ils ont fait construire une villa suivant permis accordé le 22 septembre 1986.
Cette parcelle est voisine d'une parcelle appartenant à M. [J] [S] et Mme [H] [E] épouse [S] (les époux [S]).
M. [N] est décédé le 25 mai 1989, laissant pour lui succéder sa veuve, Mme [D] et ses trois enfants, Mme [V] [N], M. [R] [N], issus de son union avec Mme [D], et M. [I] [N], issu d'une première union, qui a cédé ses droits sur le bien immobilier à Mme [D].
M. [R] [N] est décédé le 13 août 2003, laissant pour lui succéder sa mère, Mme [D] veuve [N], sa soeur, Mme [V] [N] et son frère M. [I] [N].
Le 22 mai 2012, le bien immobilier a été vendu à Mme [T] [W]-[P] et Mme [O] [L], qui l'ont elles-mêmes revendu le 20 juillet 2015 à M. [K] [F] et Mme [X] [M].
Le 27 novembre 2016, se plaignant de l'apparition de fissures, M. [F] a déclaré le sinistre à son assureur, la SA BPCE Assurances qui a désigné un expert amiable, lequel a déposé son rapport le 8 décembre 2016.
M. [F] a ensuite saisi le juge des référés qui, par ordonnance du 13 février 2019, a désigné un expert.
L'expert judiciaire a déposé son rapport le 5 novembre 2021.
Par actes des 18, 22 et 29 mars 2022, M. [F] a assigné Mme [W]-[P], Mme [L], Mme [D] veuve [N] et M. [C], son conjoint, la SA BPCE Assurances, et les époux [S] devant le tribunal judiciaire de Draguignan afin d'obtenir l'indemnisation de ses préjudices.
Par conclusions d'incident notifiées le 24 juin 2022, M. [F] a saisi le juge de la mise en état afin d'obtenir la condamnation des défendeurs à lui payer une provision de 80 000 €, à valoir sur l'indemnisation de ses préjudices.
Mmes [W] [P] et [L], d'une part, Mme [D] et M. [C] d'autre part ont soulevé une fin de non recevoir tenant à la prescription des actions engagées à leur encontre par M. [F].
Par ordonnance du 27 novembre 2023, le juge de la mise en état a rejeté les fins de non-recevoir et déclaré les demandes de M. [F] recevables, débouté M. [F] de sa demande de provision, en le condamnant aux dépens de l'incident et à payer à chacun des défendeurs la somme de 400 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Pour statuer ainsi, il a considéré que :
- l'action en garantie des vices cachés, exercée par M. [F] à l'encontre de Mmes [W]-[P] et [L] n'est pas prescrite en ce que le délai n'a commencé à courir qu'à compter du dépôt du rapport d'expertise qui lui a permis de découvrir les vices dans toute leur ampleur ;
- l'action en responsabilité civile délictuelle exercée par M. [F] à l'encontre Mme [D] et M. [C] n'est pas prescrite en ce que le délai n'a commencé à courir qu'au jour de la déclaration du sinistre par M. [F] à son assureur et a été interrompu par l'assignation en référé du 4 octobre 2018 ;
- la demande de provision se heurte à des contestations sérieuses, afférentes à la détermination des fautes, des conditions de mise en oeuvre de la garantie des vices cachés et à l'étendue de la garantie de son assureur, dont l'appréciation relève du juge du fond.
Par acte du 5 décembre 2023, dont la régularité et la recevabilité ne sont pas contestées, M. [F] a relevé appel de cette décision, en visant chacun des chefs de son dispositif, sauf en ce qu'elle a rejeté les fins de non-recevoir et déclaré ses demandes recevables.
Prétentions et moyens des parties
Dans ses dernières conclusions, régulièrement notifiées le 25 mars 2024, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des moyens, M. [F] demande à la cour de :
' confirmer la décision entreprise en ce qu'elle a rejeté les fins de non-recevoir et déclaré ses demandes recevables ;
' l'infirmer en ce qu'elle l'a débouté de sa demande de provision et condamné aux dépens de l'incident ainsi qu'au règlement de la somme de 400 € à chaque défendeur au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Statuant à nouveau,
' débouter l'ensemble des intimés de leur appel incident, ainsi que de toutes leurs demandes ;
' condamner solidairement les époux [S], Mme [W]-[P], Mme [L] et Mme [D] à lui verser une provision de 103 800 € ;
' subsidiairement, condamner les époux [S], Mme [W]-[P], Mme [L] et Mme [D] à lui verser, chacun, la totalité de la provision de 103 800 € ;
' condamner solidairement les époux [S], Mme [W]-[P], Mme [L] et Mme [D], M. [C] et la SA BPCE assurances à lui payer une indemnité de 8 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
Il fait valoir que :
- les obligations des défendeurs ne sont pas sérieusement contestables en ce que :
' la villa vendue par Mmes [W]-[P] et [L] est affectée d'un vice caché dont elles doivent la garantie en leur qualité de venderesses, professionnelles de l'immobilier ;
' le mur de soutènement appartenant aux époux [S], à l'origine des désordres et qui menace de s'effondrer, rendant l'ouvrage impropre à sa destination, lui cause un trouble anormal de voisinage ;
' Mme [D] et M. [C], en leur qualité de constructeurs initiaux du mur litigieux, sont responsables de ses dommages en ce qu'ils n'ont pas respecté les règles de l'art ;
' la garantie de la SA BPCE assurances est acquise, dès lors que le contrat couvre les préjudices liés aux murs de soutènement, qu'aucune condition particulière n'en exclut l'indemnisation et que le sinistre a été régulièrement déclaré.
Il précise que l'expert a évalué les travaux nécessaires à la remise en état à 346 144 €, de sorte que la somme réclamée correspond à 30 % du coût, soit la provision qui est d'usage en la matière.
Selon lui, il appartient au juge de la mise en état, en application de l'article 789 alinéa 3 du code de procédure civile, de se prononcer sur l'existence d'obligations non sérieusement contestables permettant de lui allouer une provision.
Dans leurs dernières conclusions d'intimées, régulièrement notifiées le 28 mars 2024, auxquelles il convient de renvoyer pour un exposé plus exhaustif des moyens, Mme [W]-[P] et Mme [L] demandent à la cour de :
' confirmer l'ordonnance de mise en état en ce qu'elle a débouté M. [F] de sa demande de provision, l'a condamné aux dépens de l'incident et à payer à chacun des défendeurs la somme de 400 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, a déclaré le juge de la mise en état incompétent pour connaître des demandes au fond et renvoyé l'affaire à la mise en état du 11 mars 2024 pour conclusions au fond de M. [F] ;
En tout état de cause,
' dire que leur responsabilité n'est pas en cause et débouter M. [F] de l'intégralité de ses demandes ;
' condamner M. [F] à leur verser la somme de 4 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens d'appel.
Elles font valoir que l'obligation au nom de laquelle M. [F] leur réclame une provision est sérieusement contestable en ce qu'elles contestent lui devoir une quelconque garantie, dès lors qu'elles n'ont pas réalisé de travaux sur le mur de soutènement litigieux et que l'expert judiciaire l'a confirmé. Elles soutiennent que, dans ces conditions, elles ne pouvaient avoir connaissance du vice caché et qu'en tout état de cause, le vice, à le supposer démontré, n'était pas caché puisque les visites ont lieu en hiver, alors que les plantes recouvrant la façade avaient perdu leurs feuilles et que M. [F] avait pris la précaution de se faire accompagner de professionnels du bâtiment qui ont établi des devis, au vu desquels elles ont accepté une baisse de prix de 21 000 €.
Elles font également remarquer que le désordre allégué par M. [F] ne les concerne pas, puisqu'il ressort de ses propres conclusions que le mur de soutènement litigieux appartient au voisin.
Dans leurs dernières conclusions d'intimés, régulièrement notifiées le 29 mars 2024, auxquelles il convient de renvoyer pour un exposé plus exhaustif des moyens, les époux [S] demandent à la cour, de :
' confirmer l'ordonnance en toutes ses dispositions ;
' débouter M. [F] de sa demande de provision ;
' condamner M. [F] à leur verser la somme de 2 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
' condamner M. [F] aux entiers dépens de l'incident.
Ils font valoir que les diverses responsabilités invoquées par M. [F] soulèvent des contestations sérieuses qui ne relèvent pas de la compétence du juge de la mise en état et qu'en ce qui les concerne, ils contestent être propriétaires du mur litigieux, dont le rapport d'expertise révèle qu'il a été construit par les époux [N], premiers propriétaires de la villa.
Ils ajoutent que le permis de construire accordé à ces derniers prévoyait la construction de deux enrochements indispensables pour retenir une terre dont la stabilité avait été modifiée par le décaissement réalisé par eux sans autorisation et que M. [F] était au courant, tant de l'absence d'enrochements, que de l'état du terrain.
Ils font observer que l'expert judiciaire ne les désigne pas comme les responsables directs et principaux de l'état du mur, et que les travaux qu'ils ont eux-mêmes réalisés ont une part très faible dans la survenance des dommages, mais qu'en tout état de cause, la problématique de répartition des responsabilités consacre également une contestation sérieuse justifiant de dire n'y avoir lieu à provision.
Dans leurs dernières conclusions d'intimés et d'appel incident, régulièrement notifiées le 9 janvier 2024, auxquelles il convient de renvoyer pour un exposé plus exhaustif des moyens, Mme [D], prise à titre personnel et en qualité d'ayant droit de [A] [N], et M. [C] demandent à la cour, de :
' confirmer l'ordonnance en ce qu'elle a débouté M. [F] de ses demandes provisionnelles ;
' réformer l'ordonnance en ce qu'elle a rejeté les fins de non-recevoir ;
Statuant à nouveau,
' leur déclarer inopposable le rapport d'expertise judiciaire ;
' déclarer irrecevable comme prescrite l'action de M. [F] à leur encontre au visa des dispositions des articles 1792 et suivants du code civil ;
' condamner M. [F] à leur payer une indemnité de 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
Ils soutiennent que :
- le rapport d'expertise judiciaire ne leur est pas opposable, puisqu'ils n'ont pas participé aux opérations ;
- puisque M. [F] considère que les travaux réalisés par M. [C] l'ont été sous la maîtrise d'ouvrage de Mme [D], leur responsabilité relève des articles 1792 et suivants du code civil, en vertu du principe selon lequel le droit spécial déroge au droit général, ainsi que du principe de non-cumul des responsabilités, et qu'en l'espèce, la garantie décennale ne peut plus être invoquée au regard de la prescription de l'action puisque l'ouvrage a été construit dans les années 1990 ;
- le juge de la mise n'étant pas compétent pour trancher les contestations sérieuses, aucune provision ne peut être allouée état en l'état du caractère sérieux des contestations opposées à M. [F], étant précisé que le mur qu'ils ont construit était un simple muret de clôture et a été rehaussé à plusieurs reprises.
Dans ses dernières conclusions d'intimée, régulièrement notifiées le 22 janvier 2024, auxquelles il convient de renvoyer pour un exposé plus exhaustif des moyens, la SA BPCE Assurances, demande à la cour de :
' confirmer l'ordonnance en toutes ses dispositions ;
En conséquence,
' débouter M. [F] de sa demande de provision ;
' condamner M. [F] à payer à chacun des défendeurs la somme de 400 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
' se déclarer incompétent pour connaître des autres demandes formées par les parties dans leurs conclusions ;
Y ajoutant,
' condamner M. [F], ou tout succombant, à lui verser la somme de 2 000 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.
Elle fait valoir que la demande de provision se heurte à des contestations sérieuses, au motif que M. [F] ne précise pas le fondement juridique des demandes qu'il formule à son encontre, se contentant de se prévaloir de l'assiette du contrat et que l'interprétation d'une clause de la police d'assurance consacre une contestation sérieuse que seul le juge du fond a le pouvoir de trancher. Elle ajoute qu'il est également nécessaire de déterminer la nature de la garantie, relevant que les contrats d'assurance garantissent des événements aléatoires et soudains, alors qu'en l'espèce, il s'agit de dommages apparus au fur et à mesure du temps, suite à des défauts constructifs et non d'un événement aléatoire susceptible d'être garanti. Elle rappelle que les fissures en cause étaient présentes avant la vente, soit antérieurement à la prise d'effet du contrat d'assurance de M. [F].
Motifs de la décision
A titre liminaire, par conclusions remises au greffe le 2 avril 2024 à 18 h 03, M. [F] sollicite le rejet des conclusions remises au greffe par les époux [S] le 2 avril 2024 à 9 h 53 au motif qu'elles sont tardives.
Les parties ont été avisées le 8 décembre 2023 de la date de fixation de l'affaire au 3 avril 2024.
M. [F] soutient que les conclusions remises au greffe la veille du jour fixé pour l'audience de plaidoirie sont tardives, en ce qu'il n'a pas été en mesure d'en prendre connaissance et de préparer sa défense.
Dans leurs conclusions, les époux [S] ajoutent à leur argumentation des éléments nouveaux, ainsi que des photographies réalisées le 29 mars 2024.
M. [F] n'a pas été en mesure, dans les 24 h ayant précédé l'audience, de prendre connaissance de ces conclusions et d'y répliquer.
Certes, M. [F] avait lui-même conclu le lundi 25 mars 2024 et produit une pièce nouvelle, mais ces conclusions ont été remises dans un délai suffisant pour que ses adversaires puissent en prendre connaissance et y répliquer.
Tel n'est pas le cas de conclusions remises au greffe par les époux [S] le 2 avril 2024.
Le respect du principe du contradictoire, auquel la cour doit veiller, impose en conséquence le rejet de ces conclusions.
Sur la fin de non recevoir
Devant la cour, Mesdames [W]-[P] et [L] ne sollicitent pas l'infirmation de l'ordonnance en ce qu'elle a rejeté leur fin de non recevoir et déclaré l'action de M. [F] à leur encontre recevable.
Mme [D] et M. [C] sollicitent l'infirmation de l'ordonnance en ce qu'elle a écarté la fin de non recevoir tirée de la prescription de l'action engagée par M. [F] à leur encontre.
M. [F] fonde ses demandes à leur encontre sur la responsabilité civile délictuelle.
En conséquence, l'action est régie par les dispositions de l'article 2224 du code civil selon lesquelles les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.
En matière de responsabilité délictuelle, le jour où la victime a connu ou aurait dû connaitre les faits lui permettant d'agir doit être fixé au jour où elle a connu, non seulement la faute, mais également le dommage qui en résulte.
En l'espèce, M. [F] a déclaré le sinistre dont il demande réparation le 27 novembre 2016 à son assureur.
Il appartient à celui qui se prévaut d'une fin de non recevoir tirée de la prescription, de démontrer la date à laquelle, selon lui, le demandeur était en mesure d'agir.
En l'espèce, Mme [D] et M. [C] ne démontrent par aucune pièce que M. [F] a eu connaissance du dommage dont il demande réparation avant cette date.
Le point de départ du délai de prescription de l'action se situe donc au 27 novembre 2016 et a été interrompu, en application de l'article 2241 du code civil, par l'assignation devant le juge des référés aux fins d'expertise. Un nouveau délai a couru à compter de l'ordonnance du 13 février 2019 ayant fait droit à sa demande et désigné un expert.
Dans ces conditions, l'action, initiée en mars 2022, n'est pas prescrite et l'ordonnance doit être confirmée sur ce point.
Sur la demande de Mme [D] et M. [C] afin que le rapport d'expertise leur soit déclaré inopposable
Cette demande, qui consacre une contestation de la valeur probatoire de l'expertise, ne relève pas des pouvoirs du juge de la mise en état, mais du juge du fond.
Sur la demande de provision
En application de l'article 789 du code de procédure civile, lorsque la demande est présentée postérieurement à sa désignation, le juge de la mise en état est, jusqu'à son dessaisissement, compétent pour accorder une provision au créancier lorsque l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable.
Une provision peut être allouée même si le montant de l'obligation est encore sujet à controverse, mais à la condition que le principe même de l'obligation ne soit pas sérieusement contestable.
L'invocation d'une cause d'exonération de responsabilité ou de garantie constitue une contestation dont le sérieux doit être examiné par le juge saisi d'une demande de provision à valoir sur le montant des dommages-intérêts réclamés.
En revanche, si le juge de la mise en état doit qualifier le caractère sérieux de la contestation opposée à la demande de provision, il n'a pas le pouvoir de trancher cette contestation, dont l'examen relève des seuls pouvoirs du juge du fond.
En l'espèce, M. [F] agit à l'encontre de Mmes [W]-[P] et [L] sur le fondement de la garantie des vices cachés, précisant qu'en leur qualité de professionnelles, elles ne pouvaient ignorer les vices cachés dont l'existence est retenue par l'expert.
S'agissant des époux [S], de Mme [D] et M. [C], il recherche leur responsabilité sur le fondement de la responsabilité civile délictuelle.
Quant à la société BPCE, qui est son assureur multirisques habitation, il sollicite la mise en oeuvre des garanties stipulées au contrat qu'il a souscrit auprès d'elle.
Les responsabilités invoquées par M. [F] ne sont pas des responsabilités de plein droit.
La responsabilité civile délictuelle suppose la preuve d'une faute et d'un dommage en lien de causalité avec cette faute.
Les constatations de l'expert judiciaire ont pour vocation d'éclairer le juge sur des questions de fait relevant d'une spécialité qui échappe à la compétence du juge. Pour autant, l'expert n'a pas pour mission de se prononcer sur les aspects juridiques des questions qui lui sont soumises et le juge n'est pas tenu par ses conclusions.
Les époux [S] contestent avoir commis une faute à l'origine des préjudices allégués par M. [F] au motif, principal, qu'ils ne sont pas propriétaires du mur litigieux, construit par Mme [D] et que c'est cette dernière et son époux qui n'auraient pas assuré sa stabilité par les enrochements nécessaires.
De même, Mme [D] et M. [C] contestent leur responsabilité non seulement au regard de l'absence de valeur probatoire de l'expertise à leur égard, mais également de l'histoire du muret litigieux qui, selon eux, aurait été rehaussé à plusieurs reprises dans des conditions contestables, après qu'ils aient vendu le bien immobilier.
Dès lors que leur responsabilité, qui n'est pas de plein droit, suppose la démonstration d'une faute et d'un préjudice en lien de causalité avec cette faute, que, tant l'existence que la qualification de cette faute, mais également le lien de causalité avec celle-ci sont contestés, la reconnaissance de la créance suppose une analyse préalable du comportement des personnes concernées afin de déterminer si elles ont manqué à une obligation qui leur incombait. Dans l'affirmative, l'analyse devra se poursuivre par un examen du lien de causalité des dites fautes avec le dommage allégué. Par ailleurs, les conclusions de l'expert sont elles-même discutées, de sorte que le juge devra se livrer à une analyse de son travail et, s'agissant de Mme [D] et de M. [C], rechercher si les opérations de l'expert se sont déroulées à leur contradictoire et dans la négative, si elles sont corroborées par d'autres pièces.
Sans ce travail d'analyse, la créance revendiquée par M. [F] sur les époux [S], Mme [D] et M. [C] doit être considérée comme sérieusement contestable et ne peut donner lieu à l'allocation d'une avance sur les dommages-intérêts qu'il revendique, étant observé qu'il existe en l'espèce une chaîne d'intervenants et de contrats successifs compliquant l'analyse des responsabilités.
S'agissant de Mmes [W]-[P] et [L], en leur qualité de venderesses du bien immobilier, elles sont tenues à la garantie des vices cachés. L'acte de vente stipule une clause d'exclusion de garantie des vices cachés, cependant inapplicable au vendeur professionnel ou qui connaissait l'existence des vices dissimulés à l'acheteur.
Si la garantie des vices cachés s'impose à tout vendeur d'un bien immobilier, sa mise en oeuvre suppose de la part de l'acheteur qui la revendique la preuve d'un vice rendant l'immeuble impropre à son usage et dissimulé lors de la vente. Dans l'hypothèse où l'acte de vente contient une clause d'exclusion de garantie, l'acheteur doit établir, pour que celle-ci soit écartée, que le vendeur est un professionnel ou, à défaut, qu'il connaissait les vices.
Or, Mmes [W]-[P] contestent que le désordre allégué soit constitutif d'un vice caché au sens de l'article 1641 du code civil, soulignant notamment que M. [F] a visité le bien pendant une période de l'année où le mur litigieux n'était recouvert d'aucune végétation, et en présence de professionnels du bâtiment, de sorte qu'il ne peut, selon elles, soutenir avoir ignoré les désordres dont il se plaint désormais. Elles ajoutent que, n'ayant elles-mêmes réalisé aucun travaux sur le mur pendant la période où elles ont occupé la villa, elles ignoraient qu'il était affecté de vices.
Ces éléments consacrent une contestation sérieuse de la garantie revendiquée par M. [F] et le juge du fond devra, à partir des éléments de preuve qui lui sont soumis, se livrer à une analyse approfondie afin de déterminer si les désordres allégués sont susceptibles d'être qualifiés de vices cachés au sens du texte précité. La réponse à cette interrogation suppose l'analyse des conditions dans lesquelles M. [F] a visité le bien avant de l'acheter et des conséquences du désordre sur l'usage du bien immobilier.
Cette analyse relève des seuls pouvoirs du juge du fond.
En l'état, les contestations élevées doivent être considérées comme sérieuses en ce qu'elles nécessitent une analyse préalable et minutieuse de multiples éléments afin de déterminer si la garantie a, ou non, vocation à jouer en faveur de M. [F].
Enfin, s'agissant de la SA BPCE assurances, si elle ne conteste pas avoir conclu avec M. [F] un contrat garantissant les dommages causés au bien immobilier assuré, elle soutient que cette garantie n'est pas mobilisable au regard des conclusions de l'expert selon lesquelles le litige est évolutif.
Là encore, la mise en jeu de la garantie contractuelle nécessite une analyse préalable du contrat, notamment de l'étendue de la garantie, de la clause d'exclusion dont l'assureur invoque le bénéfice, mais également des conclusions de l'expert, afin de déterminer si le désordre procède d'une cause antérieure à la souscription du contrat.
Cette analyse, indispensable pour la mise en jeu de la garantie, relève des seuls pouvoirs du juge du fond et caractérise une contestation sérieuse faisant obstacle à l'allocation d'une provision à valoir sur l'indemnité.
Au regard de l'ensemble de ces éléments et sans qu'il soit nécessaire d'entrer plus avant dans le détail de l'argumentation des parties relatives aux responsabilités, dont l'analyse relève du tribunal statuant au fond, c'est à juste titre que le premier juge a considéré que l'existence des obligations revendiquées par M. [F] était sérieusement contestable et rejeté la demande de provision.
Sur les dépens et frais irrépétibles
Les dispositions de l'ordonnance relatives aux dépens et aux frais irrépétibles sont confirmées.
M. [F], qui succombe, supportera la charge des entiers dépens d'appel et n'est pas fondé à solliciter une indemnité, au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
L'équité commande de dire n'y avoir lieu à une indemnité, en application de l'article 700 du code de procédure civile au profit des intimés, au titre des frais irrépétibles exposés devant la cour.
Par ces motifs
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort
Déclare irrecevables les conclusions remises au greffe le 2 avril 2024 par les époux [S] ;
Confirme en toutes ses dispositions soumises à la cour l'ordonnance rendue le 27 novembre 2023 par le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Draguignan ;
Y ajoutant,
Dit n'y avoir lieu de statuer sur la demande de Mme [D] et de M. [C], afin que le rapport d'expertise leur soit déclaré inopposable ;
Déboute M. [K] [F] de sa demande en application de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles exposés en appel ;
Dit n'y avoir lieu à condamnation, en application de l'article 700 du code de procédure civile, au profit de Mmes [T] [W]-[P], [O] [L], [H] [E] épouse [S], [G] [D], de MM. [E] [S] et [J] [C] et de la SA BPCE assurances, au titre des frais exposés en appel ;
Condamne M. [K] [F] aux entiers dépens d'appel et accorde aux avocats qui en ont fait la demande le bénéfice de l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRESIDENT
Chambre 1-1
ARRÊT AU FOND
DU 05 JUIN 2024
N° 2024/ 234
N° RG 23/14892 - N° Portalis DBVB-V-B7H-BMHUT
[K] [U] [F]
C/
[T] [Y] [W]-[P]
[O] [L]
[J] [S]
[H] [E] épouse [S]
[G] [D] veuve [N]
[J] [C]
S.A. BPCE ASSURANCES
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me Joseph MAGNAN Me Paul GUEDJ
Me Ingrid OLIVER-D'OLLONNE
Me Laure ATIAS
Me Florence ADAGAS-CAOU
Décision déférée à la Cour :
Ordonnance du Juge de la mise en état de DRAGUIGNAN en date du 27 Novembre 2023 enregistré (e) au répertoire général sous le n° 22/02654.
APPELANT
Monsieur [K] [U] [F]
né le 21 Novembre 1969 à [Localité 16], demeurant [Adresse 6] - [Localité 10]
représenté par Me Joseph MAGNAN de la SCP PAUL ET JOSEPH MAGNAN, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, et plaidant par Me Veronica VECCHIONI, avocat au barreau de NICE
INTIMES
Madame [T] [Y] [W]-[P]
née le 02 Juillet 1952 à [Localité 14], demeurant [Adresse 5] - [Localité 2]
représentée par Me Paul GUEDJ de la SCP COHEN GUEDJ - MONTERO - DAVAL GUEDJ, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, et plaidant par Me Sarah JOURNO, avocat au barreau de GRASSE
Madame [O] [L]
née le 01 Mars 1977 à [Localité 14], demeurant [Adresse 4] - [Localité 2]
représentée par Me Paul GUEDJ de la SCP COHEN GUEDJ - MONTERO - DAVAL GUEDJ, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, et plaidant par Me Sarah JOURNO, avocat au barreau de GRASSE
Monsieur [J] [S]
né le 16 Février 1954 à [Localité 12], demeurant [Adresse 7], [Localité 15]
représenté et plaidant par Me Ingrid OLIVER-D'OLLONNE, avocat au barreau de GRASSE
Madame [H] [E] épouse [S]
née le 18 Août 1956 à [Localité 12], demeurant [Adresse 7], [Localité 15]
représenté et plaidant par Me Ingrid OLIVER-D'OLLONNE, avocat au barreau de GRASSE
Madame [D] veuve [N] [G] personnellement et en sa qualité d'ayant-droit de Feu [A] [N]
née le 08 Novembre 1960 à [Localité 11], demeurant [Adresse 3] - [Localité 1]
représentée par Me Laure ATIAS de la SELARL LAMBERT ATIAS & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, et plaidant Me Jérôme BRUNET-DEBAINES, avocat au barreau de DRAGUIGNAN
Monsieur [J] [C]
né le 09 Juillet 1946 à [Localité 13], demeurant [Adresse 3] - [Localité 1]
représentée par Me Laure ATIAS de la SELARL LAMBERT ATIAS & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, et plaidant Me Jérôme BRUNET-DEBAINES, avocat au barreau de DRAGUIGNAN
SA BCPCE ASSURANCES prise en la personne de son représentant légal domicilié de droit audit siège.
demeurant [Adresse 8] - [Localité 9]
représentée par Me Florence ADAGAS-CAOU de la SCP DUHAMEL ASSOCIES, avocat au barreau de DRAGUIGNAN
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 804, 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 03 Avril 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Fabienne ALLARD, Conseillère, chargé du rapport, qui a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Olivier BRUE, Président
Madame Catherine OUVREL, Conseillère
Madame Fabienne ALLARD, Conseillère
Greffier lors des débats : Madame Céline LITTERI.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 05 Juin 2024.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 05 Juin 2024
Signé par Monsieur Olivier BRUE, Président et Madame Céline LITTERI,, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
Exposé des faits et de la procédure
Par acte authentique du 25 avril 1986, M. [A] [N] et son épouse, Mme [G] [D], ont acquis à [Localité 10] un terrain sur lequel ils ont fait construire une villa suivant permis accordé le 22 septembre 1986.
Cette parcelle est voisine d'une parcelle appartenant à M. [J] [S] et Mme [H] [E] épouse [S] (les époux [S]).
M. [N] est décédé le 25 mai 1989, laissant pour lui succéder sa veuve, Mme [D] et ses trois enfants, Mme [V] [N], M. [R] [N], issus de son union avec Mme [D], et M. [I] [N], issu d'une première union, qui a cédé ses droits sur le bien immobilier à Mme [D].
M. [R] [N] est décédé le 13 août 2003, laissant pour lui succéder sa mère, Mme [D] veuve [N], sa soeur, Mme [V] [N] et son frère M. [I] [N].
Le 22 mai 2012, le bien immobilier a été vendu à Mme [T] [W]-[P] et Mme [O] [L], qui l'ont elles-mêmes revendu le 20 juillet 2015 à M. [K] [F] et Mme [X] [M].
Le 27 novembre 2016, se plaignant de l'apparition de fissures, M. [F] a déclaré le sinistre à son assureur, la SA BPCE Assurances qui a désigné un expert amiable, lequel a déposé son rapport le 8 décembre 2016.
M. [F] a ensuite saisi le juge des référés qui, par ordonnance du 13 février 2019, a désigné un expert.
L'expert judiciaire a déposé son rapport le 5 novembre 2021.
Par actes des 18, 22 et 29 mars 2022, M. [F] a assigné Mme [W]-[P], Mme [L], Mme [D] veuve [N] et M. [C], son conjoint, la SA BPCE Assurances, et les époux [S] devant le tribunal judiciaire de Draguignan afin d'obtenir l'indemnisation de ses préjudices.
Par conclusions d'incident notifiées le 24 juin 2022, M. [F] a saisi le juge de la mise en état afin d'obtenir la condamnation des défendeurs à lui payer une provision de 80 000 €, à valoir sur l'indemnisation de ses préjudices.
Mmes [W] [P] et [L], d'une part, Mme [D] et M. [C] d'autre part ont soulevé une fin de non recevoir tenant à la prescription des actions engagées à leur encontre par M. [F].
Par ordonnance du 27 novembre 2023, le juge de la mise en état a rejeté les fins de non-recevoir et déclaré les demandes de M. [F] recevables, débouté M. [F] de sa demande de provision, en le condamnant aux dépens de l'incident et à payer à chacun des défendeurs la somme de 400 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Pour statuer ainsi, il a considéré que :
- l'action en garantie des vices cachés, exercée par M. [F] à l'encontre de Mmes [W]-[P] et [L] n'est pas prescrite en ce que le délai n'a commencé à courir qu'à compter du dépôt du rapport d'expertise qui lui a permis de découvrir les vices dans toute leur ampleur ;
- l'action en responsabilité civile délictuelle exercée par M. [F] à l'encontre Mme [D] et M. [C] n'est pas prescrite en ce que le délai n'a commencé à courir qu'au jour de la déclaration du sinistre par M. [F] à son assureur et a été interrompu par l'assignation en référé du 4 octobre 2018 ;
- la demande de provision se heurte à des contestations sérieuses, afférentes à la détermination des fautes, des conditions de mise en oeuvre de la garantie des vices cachés et à l'étendue de la garantie de son assureur, dont l'appréciation relève du juge du fond.
Par acte du 5 décembre 2023, dont la régularité et la recevabilité ne sont pas contestées, M. [F] a relevé appel de cette décision, en visant chacun des chefs de son dispositif, sauf en ce qu'elle a rejeté les fins de non-recevoir et déclaré ses demandes recevables.
Prétentions et moyens des parties
Dans ses dernières conclusions, régulièrement notifiées le 25 mars 2024, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des moyens, M. [F] demande à la cour de :
' confirmer la décision entreprise en ce qu'elle a rejeté les fins de non-recevoir et déclaré ses demandes recevables ;
' l'infirmer en ce qu'elle l'a débouté de sa demande de provision et condamné aux dépens de l'incident ainsi qu'au règlement de la somme de 400 € à chaque défendeur au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Statuant à nouveau,
' débouter l'ensemble des intimés de leur appel incident, ainsi que de toutes leurs demandes ;
' condamner solidairement les époux [S], Mme [W]-[P], Mme [L] et Mme [D] à lui verser une provision de 103 800 € ;
' subsidiairement, condamner les époux [S], Mme [W]-[P], Mme [L] et Mme [D] à lui verser, chacun, la totalité de la provision de 103 800 € ;
' condamner solidairement les époux [S], Mme [W]-[P], Mme [L] et Mme [D], M. [C] et la SA BPCE assurances à lui payer une indemnité de 8 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
Il fait valoir que :
- les obligations des défendeurs ne sont pas sérieusement contestables en ce que :
' la villa vendue par Mmes [W]-[P] et [L] est affectée d'un vice caché dont elles doivent la garantie en leur qualité de venderesses, professionnelles de l'immobilier ;
' le mur de soutènement appartenant aux époux [S], à l'origine des désordres et qui menace de s'effondrer, rendant l'ouvrage impropre à sa destination, lui cause un trouble anormal de voisinage ;
' Mme [D] et M. [C], en leur qualité de constructeurs initiaux du mur litigieux, sont responsables de ses dommages en ce qu'ils n'ont pas respecté les règles de l'art ;
' la garantie de la SA BPCE assurances est acquise, dès lors que le contrat couvre les préjudices liés aux murs de soutènement, qu'aucune condition particulière n'en exclut l'indemnisation et que le sinistre a été régulièrement déclaré.
Il précise que l'expert a évalué les travaux nécessaires à la remise en état à 346 144 €, de sorte que la somme réclamée correspond à 30 % du coût, soit la provision qui est d'usage en la matière.
Selon lui, il appartient au juge de la mise en état, en application de l'article 789 alinéa 3 du code de procédure civile, de se prononcer sur l'existence d'obligations non sérieusement contestables permettant de lui allouer une provision.
Dans leurs dernières conclusions d'intimées, régulièrement notifiées le 28 mars 2024, auxquelles il convient de renvoyer pour un exposé plus exhaustif des moyens, Mme [W]-[P] et Mme [L] demandent à la cour de :
' confirmer l'ordonnance de mise en état en ce qu'elle a débouté M. [F] de sa demande de provision, l'a condamné aux dépens de l'incident et à payer à chacun des défendeurs la somme de 400 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, a déclaré le juge de la mise en état incompétent pour connaître des demandes au fond et renvoyé l'affaire à la mise en état du 11 mars 2024 pour conclusions au fond de M. [F] ;
En tout état de cause,
' dire que leur responsabilité n'est pas en cause et débouter M. [F] de l'intégralité de ses demandes ;
' condamner M. [F] à leur verser la somme de 4 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens d'appel.
Elles font valoir que l'obligation au nom de laquelle M. [F] leur réclame une provision est sérieusement contestable en ce qu'elles contestent lui devoir une quelconque garantie, dès lors qu'elles n'ont pas réalisé de travaux sur le mur de soutènement litigieux et que l'expert judiciaire l'a confirmé. Elles soutiennent que, dans ces conditions, elles ne pouvaient avoir connaissance du vice caché et qu'en tout état de cause, le vice, à le supposer démontré, n'était pas caché puisque les visites ont lieu en hiver, alors que les plantes recouvrant la façade avaient perdu leurs feuilles et que M. [F] avait pris la précaution de se faire accompagner de professionnels du bâtiment qui ont établi des devis, au vu desquels elles ont accepté une baisse de prix de 21 000 €.
Elles font également remarquer que le désordre allégué par M. [F] ne les concerne pas, puisqu'il ressort de ses propres conclusions que le mur de soutènement litigieux appartient au voisin.
Dans leurs dernières conclusions d'intimés, régulièrement notifiées le 29 mars 2024, auxquelles il convient de renvoyer pour un exposé plus exhaustif des moyens, les époux [S] demandent à la cour, de :
' confirmer l'ordonnance en toutes ses dispositions ;
' débouter M. [F] de sa demande de provision ;
' condamner M. [F] à leur verser la somme de 2 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
' condamner M. [F] aux entiers dépens de l'incident.
Ils font valoir que les diverses responsabilités invoquées par M. [F] soulèvent des contestations sérieuses qui ne relèvent pas de la compétence du juge de la mise en état et qu'en ce qui les concerne, ils contestent être propriétaires du mur litigieux, dont le rapport d'expertise révèle qu'il a été construit par les époux [N], premiers propriétaires de la villa.
Ils ajoutent que le permis de construire accordé à ces derniers prévoyait la construction de deux enrochements indispensables pour retenir une terre dont la stabilité avait été modifiée par le décaissement réalisé par eux sans autorisation et que M. [F] était au courant, tant de l'absence d'enrochements, que de l'état du terrain.
Ils font observer que l'expert judiciaire ne les désigne pas comme les responsables directs et principaux de l'état du mur, et que les travaux qu'ils ont eux-mêmes réalisés ont une part très faible dans la survenance des dommages, mais qu'en tout état de cause, la problématique de répartition des responsabilités consacre également une contestation sérieuse justifiant de dire n'y avoir lieu à provision.
Dans leurs dernières conclusions d'intimés et d'appel incident, régulièrement notifiées le 9 janvier 2024, auxquelles il convient de renvoyer pour un exposé plus exhaustif des moyens, Mme [D], prise à titre personnel et en qualité d'ayant droit de [A] [N], et M. [C] demandent à la cour, de :
' confirmer l'ordonnance en ce qu'elle a débouté M. [F] de ses demandes provisionnelles ;
' réformer l'ordonnance en ce qu'elle a rejeté les fins de non-recevoir ;
Statuant à nouveau,
' leur déclarer inopposable le rapport d'expertise judiciaire ;
' déclarer irrecevable comme prescrite l'action de M. [F] à leur encontre au visa des dispositions des articles 1792 et suivants du code civil ;
' condamner M. [F] à leur payer une indemnité de 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
Ils soutiennent que :
- le rapport d'expertise judiciaire ne leur est pas opposable, puisqu'ils n'ont pas participé aux opérations ;
- puisque M. [F] considère que les travaux réalisés par M. [C] l'ont été sous la maîtrise d'ouvrage de Mme [D], leur responsabilité relève des articles 1792 et suivants du code civil, en vertu du principe selon lequel le droit spécial déroge au droit général, ainsi que du principe de non-cumul des responsabilités, et qu'en l'espèce, la garantie décennale ne peut plus être invoquée au regard de la prescription de l'action puisque l'ouvrage a été construit dans les années 1990 ;
- le juge de la mise n'étant pas compétent pour trancher les contestations sérieuses, aucune provision ne peut être allouée état en l'état du caractère sérieux des contestations opposées à M. [F], étant précisé que le mur qu'ils ont construit était un simple muret de clôture et a été rehaussé à plusieurs reprises.
Dans ses dernières conclusions d'intimée, régulièrement notifiées le 22 janvier 2024, auxquelles il convient de renvoyer pour un exposé plus exhaustif des moyens, la SA BPCE Assurances, demande à la cour de :
' confirmer l'ordonnance en toutes ses dispositions ;
En conséquence,
' débouter M. [F] de sa demande de provision ;
' condamner M. [F] à payer à chacun des défendeurs la somme de 400 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
' se déclarer incompétent pour connaître des autres demandes formées par les parties dans leurs conclusions ;
Y ajoutant,
' condamner M. [F], ou tout succombant, à lui verser la somme de 2 000 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.
Elle fait valoir que la demande de provision se heurte à des contestations sérieuses, au motif que M. [F] ne précise pas le fondement juridique des demandes qu'il formule à son encontre, se contentant de se prévaloir de l'assiette du contrat et que l'interprétation d'une clause de la police d'assurance consacre une contestation sérieuse que seul le juge du fond a le pouvoir de trancher. Elle ajoute qu'il est également nécessaire de déterminer la nature de la garantie, relevant que les contrats d'assurance garantissent des événements aléatoires et soudains, alors qu'en l'espèce, il s'agit de dommages apparus au fur et à mesure du temps, suite à des défauts constructifs et non d'un événement aléatoire susceptible d'être garanti. Elle rappelle que les fissures en cause étaient présentes avant la vente, soit antérieurement à la prise d'effet du contrat d'assurance de M. [F].
Motifs de la décision
A titre liminaire, par conclusions remises au greffe le 2 avril 2024 à 18 h 03, M. [F] sollicite le rejet des conclusions remises au greffe par les époux [S] le 2 avril 2024 à 9 h 53 au motif qu'elles sont tardives.
Les parties ont été avisées le 8 décembre 2023 de la date de fixation de l'affaire au 3 avril 2024.
M. [F] soutient que les conclusions remises au greffe la veille du jour fixé pour l'audience de plaidoirie sont tardives, en ce qu'il n'a pas été en mesure d'en prendre connaissance et de préparer sa défense.
Dans leurs conclusions, les époux [S] ajoutent à leur argumentation des éléments nouveaux, ainsi que des photographies réalisées le 29 mars 2024.
M. [F] n'a pas été en mesure, dans les 24 h ayant précédé l'audience, de prendre connaissance de ces conclusions et d'y répliquer.
Certes, M. [F] avait lui-même conclu le lundi 25 mars 2024 et produit une pièce nouvelle, mais ces conclusions ont été remises dans un délai suffisant pour que ses adversaires puissent en prendre connaissance et y répliquer.
Tel n'est pas le cas de conclusions remises au greffe par les époux [S] le 2 avril 2024.
Le respect du principe du contradictoire, auquel la cour doit veiller, impose en conséquence le rejet de ces conclusions.
Sur la fin de non recevoir
Devant la cour, Mesdames [W]-[P] et [L] ne sollicitent pas l'infirmation de l'ordonnance en ce qu'elle a rejeté leur fin de non recevoir et déclaré l'action de M. [F] à leur encontre recevable.
Mme [D] et M. [C] sollicitent l'infirmation de l'ordonnance en ce qu'elle a écarté la fin de non recevoir tirée de la prescription de l'action engagée par M. [F] à leur encontre.
M. [F] fonde ses demandes à leur encontre sur la responsabilité civile délictuelle.
En conséquence, l'action est régie par les dispositions de l'article 2224 du code civil selon lesquelles les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.
En matière de responsabilité délictuelle, le jour où la victime a connu ou aurait dû connaitre les faits lui permettant d'agir doit être fixé au jour où elle a connu, non seulement la faute, mais également le dommage qui en résulte.
En l'espèce, M. [F] a déclaré le sinistre dont il demande réparation le 27 novembre 2016 à son assureur.
Il appartient à celui qui se prévaut d'une fin de non recevoir tirée de la prescription, de démontrer la date à laquelle, selon lui, le demandeur était en mesure d'agir.
En l'espèce, Mme [D] et M. [C] ne démontrent par aucune pièce que M. [F] a eu connaissance du dommage dont il demande réparation avant cette date.
Le point de départ du délai de prescription de l'action se situe donc au 27 novembre 2016 et a été interrompu, en application de l'article 2241 du code civil, par l'assignation devant le juge des référés aux fins d'expertise. Un nouveau délai a couru à compter de l'ordonnance du 13 février 2019 ayant fait droit à sa demande et désigné un expert.
Dans ces conditions, l'action, initiée en mars 2022, n'est pas prescrite et l'ordonnance doit être confirmée sur ce point.
Sur la demande de Mme [D] et M. [C] afin que le rapport d'expertise leur soit déclaré inopposable
Cette demande, qui consacre une contestation de la valeur probatoire de l'expertise, ne relève pas des pouvoirs du juge de la mise en état, mais du juge du fond.
Sur la demande de provision
En application de l'article 789 du code de procédure civile, lorsque la demande est présentée postérieurement à sa désignation, le juge de la mise en état est, jusqu'à son dessaisissement, compétent pour accorder une provision au créancier lorsque l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable.
Une provision peut être allouée même si le montant de l'obligation est encore sujet à controverse, mais à la condition que le principe même de l'obligation ne soit pas sérieusement contestable.
L'invocation d'une cause d'exonération de responsabilité ou de garantie constitue une contestation dont le sérieux doit être examiné par le juge saisi d'une demande de provision à valoir sur le montant des dommages-intérêts réclamés.
En revanche, si le juge de la mise en état doit qualifier le caractère sérieux de la contestation opposée à la demande de provision, il n'a pas le pouvoir de trancher cette contestation, dont l'examen relève des seuls pouvoirs du juge du fond.
En l'espèce, M. [F] agit à l'encontre de Mmes [W]-[P] et [L] sur le fondement de la garantie des vices cachés, précisant qu'en leur qualité de professionnelles, elles ne pouvaient ignorer les vices cachés dont l'existence est retenue par l'expert.
S'agissant des époux [S], de Mme [D] et M. [C], il recherche leur responsabilité sur le fondement de la responsabilité civile délictuelle.
Quant à la société BPCE, qui est son assureur multirisques habitation, il sollicite la mise en oeuvre des garanties stipulées au contrat qu'il a souscrit auprès d'elle.
Les responsabilités invoquées par M. [F] ne sont pas des responsabilités de plein droit.
La responsabilité civile délictuelle suppose la preuve d'une faute et d'un dommage en lien de causalité avec cette faute.
Les constatations de l'expert judiciaire ont pour vocation d'éclairer le juge sur des questions de fait relevant d'une spécialité qui échappe à la compétence du juge. Pour autant, l'expert n'a pas pour mission de se prononcer sur les aspects juridiques des questions qui lui sont soumises et le juge n'est pas tenu par ses conclusions.
Les époux [S] contestent avoir commis une faute à l'origine des préjudices allégués par M. [F] au motif, principal, qu'ils ne sont pas propriétaires du mur litigieux, construit par Mme [D] et que c'est cette dernière et son époux qui n'auraient pas assuré sa stabilité par les enrochements nécessaires.
De même, Mme [D] et M. [C] contestent leur responsabilité non seulement au regard de l'absence de valeur probatoire de l'expertise à leur égard, mais également de l'histoire du muret litigieux qui, selon eux, aurait été rehaussé à plusieurs reprises dans des conditions contestables, après qu'ils aient vendu le bien immobilier.
Dès lors que leur responsabilité, qui n'est pas de plein droit, suppose la démonstration d'une faute et d'un préjudice en lien de causalité avec cette faute, que, tant l'existence que la qualification de cette faute, mais également le lien de causalité avec celle-ci sont contestés, la reconnaissance de la créance suppose une analyse préalable du comportement des personnes concernées afin de déterminer si elles ont manqué à une obligation qui leur incombait. Dans l'affirmative, l'analyse devra se poursuivre par un examen du lien de causalité des dites fautes avec le dommage allégué. Par ailleurs, les conclusions de l'expert sont elles-même discutées, de sorte que le juge devra se livrer à une analyse de son travail et, s'agissant de Mme [D] et de M. [C], rechercher si les opérations de l'expert se sont déroulées à leur contradictoire et dans la négative, si elles sont corroborées par d'autres pièces.
Sans ce travail d'analyse, la créance revendiquée par M. [F] sur les époux [S], Mme [D] et M. [C] doit être considérée comme sérieusement contestable et ne peut donner lieu à l'allocation d'une avance sur les dommages-intérêts qu'il revendique, étant observé qu'il existe en l'espèce une chaîne d'intervenants et de contrats successifs compliquant l'analyse des responsabilités.
S'agissant de Mmes [W]-[P] et [L], en leur qualité de venderesses du bien immobilier, elles sont tenues à la garantie des vices cachés. L'acte de vente stipule une clause d'exclusion de garantie des vices cachés, cependant inapplicable au vendeur professionnel ou qui connaissait l'existence des vices dissimulés à l'acheteur.
Si la garantie des vices cachés s'impose à tout vendeur d'un bien immobilier, sa mise en oeuvre suppose de la part de l'acheteur qui la revendique la preuve d'un vice rendant l'immeuble impropre à son usage et dissimulé lors de la vente. Dans l'hypothèse où l'acte de vente contient une clause d'exclusion de garantie, l'acheteur doit établir, pour que celle-ci soit écartée, que le vendeur est un professionnel ou, à défaut, qu'il connaissait les vices.
Or, Mmes [W]-[P] contestent que le désordre allégué soit constitutif d'un vice caché au sens de l'article 1641 du code civil, soulignant notamment que M. [F] a visité le bien pendant une période de l'année où le mur litigieux n'était recouvert d'aucune végétation, et en présence de professionnels du bâtiment, de sorte qu'il ne peut, selon elles, soutenir avoir ignoré les désordres dont il se plaint désormais. Elles ajoutent que, n'ayant elles-mêmes réalisé aucun travaux sur le mur pendant la période où elles ont occupé la villa, elles ignoraient qu'il était affecté de vices.
Ces éléments consacrent une contestation sérieuse de la garantie revendiquée par M. [F] et le juge du fond devra, à partir des éléments de preuve qui lui sont soumis, se livrer à une analyse approfondie afin de déterminer si les désordres allégués sont susceptibles d'être qualifiés de vices cachés au sens du texte précité. La réponse à cette interrogation suppose l'analyse des conditions dans lesquelles M. [F] a visité le bien avant de l'acheter et des conséquences du désordre sur l'usage du bien immobilier.
Cette analyse relève des seuls pouvoirs du juge du fond.
En l'état, les contestations élevées doivent être considérées comme sérieuses en ce qu'elles nécessitent une analyse préalable et minutieuse de multiples éléments afin de déterminer si la garantie a, ou non, vocation à jouer en faveur de M. [F].
Enfin, s'agissant de la SA BPCE assurances, si elle ne conteste pas avoir conclu avec M. [F] un contrat garantissant les dommages causés au bien immobilier assuré, elle soutient que cette garantie n'est pas mobilisable au regard des conclusions de l'expert selon lesquelles le litige est évolutif.
Là encore, la mise en jeu de la garantie contractuelle nécessite une analyse préalable du contrat, notamment de l'étendue de la garantie, de la clause d'exclusion dont l'assureur invoque le bénéfice, mais également des conclusions de l'expert, afin de déterminer si le désordre procède d'une cause antérieure à la souscription du contrat.
Cette analyse, indispensable pour la mise en jeu de la garantie, relève des seuls pouvoirs du juge du fond et caractérise une contestation sérieuse faisant obstacle à l'allocation d'une provision à valoir sur l'indemnité.
Au regard de l'ensemble de ces éléments et sans qu'il soit nécessaire d'entrer plus avant dans le détail de l'argumentation des parties relatives aux responsabilités, dont l'analyse relève du tribunal statuant au fond, c'est à juste titre que le premier juge a considéré que l'existence des obligations revendiquées par M. [F] était sérieusement contestable et rejeté la demande de provision.
Sur les dépens et frais irrépétibles
Les dispositions de l'ordonnance relatives aux dépens et aux frais irrépétibles sont confirmées.
M. [F], qui succombe, supportera la charge des entiers dépens d'appel et n'est pas fondé à solliciter une indemnité, au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
L'équité commande de dire n'y avoir lieu à une indemnité, en application de l'article 700 du code de procédure civile au profit des intimés, au titre des frais irrépétibles exposés devant la cour.
Par ces motifs
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort
Déclare irrecevables les conclusions remises au greffe le 2 avril 2024 par les époux [S] ;
Confirme en toutes ses dispositions soumises à la cour l'ordonnance rendue le 27 novembre 2023 par le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Draguignan ;
Y ajoutant,
Dit n'y avoir lieu de statuer sur la demande de Mme [D] et de M. [C], afin que le rapport d'expertise leur soit déclaré inopposable ;
Déboute M. [K] [F] de sa demande en application de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles exposés en appel ;
Dit n'y avoir lieu à condamnation, en application de l'article 700 du code de procédure civile, au profit de Mmes [T] [W]-[P], [O] [L], [H] [E] épouse [S], [G] [D], de MM. [E] [S] et [J] [C] et de la SA BPCE assurances, au titre des frais exposés en appel ;
Condamne M. [K] [F] aux entiers dépens d'appel et accorde aux avocats qui en ont fait la demande le bénéfice de l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRESIDENT