Cass. 3e civ., 30 mai 2024, n° 22-22.981
COUR DE CASSATION
Autre
Cassation
PARTIES
Défendeur :
Previmmo (SCI)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Teiller
Rapporteur :
M. David
Avocats :
Me Foussard et Froger, Me Piwnica et Molinié, Me Claire Leduc et Solange Vigand
Faits et procédure
2. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 15 septembre 2022), le 22 juillet 2005, la société civile immobilière Previmmo, aux droits de laquelle est venue la société civile immobilière [Adresse 3] (la bailleresse), a donné en location à la société civile professionnelle [K] associés, devenue la société d'exercice libéral à responsabilité limitée [K] associés (la locataire), des locaux à usage de bureaux.
3. Le bail comportait une clause d'indexation du loyer ne jouant qu'en cas de hausse de l'indice de référence.
4. Le 16 août 2017, la locataire a assigné la bailleresse en constatation du caractère réputé non écrit en son entier de la clause d'indexation, restitution des loyers payés en exécution de celle-ci et remboursement de diverses charges. M. [D] est intervenu volontairement à l'instance.
5. Le 26 octobre 2017, la locataire a signifié à la bailleresse un congé à effet au 31 janvier 2018.
Examen des moyens
Sur les premier, deuxième, troisième, cinquième et septième moyens
6. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Mais sur le quatrième moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
7. La locataire fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande en restitution de charges indûment payées, alors « que seules les charges expressément mises à la charge du preneur dans le contrat de bail peuvent être réclamées à ce dernier ; qu'en l'espèce, en rejetant la demande en restitution des charges, sans rechercher, comme elle y avait été invitée, si le bail du 22 juillet 2005 mettait à la charge du preneur les frais de câblage, de maintien en fonction des ascenseurs, la taxe de voirie, dont elle constatait qu'ils avaient l'objet d'un appel de charge adressé au preneur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'entrée en vigueur de l'ordonnance du 10 février 2016 et 1754 du code civil. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 1134, alinéa 1er, du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 :
8. Aux termes de ce texte, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.
9. Pour rejeter la demande de la locataire en restitution de charges, l'arrêt énonce que les frais de dératisation, de désinfection, de câblage, de maintien en fonction des ascenseurs et la taxe de voirie ont été mis à la charge de la locataire au titre de sa quote-part des charges de l'immeuble.
10. En se déterminant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, si les sommes contestées par la locataire avaient été mises à sa charge par une stipulation expresse du contrat de bail, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.
Et sur le sixième moyen
Enoncé du moyen
11. La locataire fait grief à l'arrêt de confirmer le jugement en ce qu'il dit que la bailleresse aura droit au paiement de l'intérêt défini à l'article relatif au loyer, alinéa 3, du bail commercial, si les comptes entre les parties font apparaître que le loyer et ses accessoires n'ont pas été réglés à bonne date par la locataire, alors « que tout jugement doit être motivé et le défaut de réponse à conclusions équivaut à un défaut de motifs ; qu'en confirmant la disposition du jugement ayant dit que la SCI [Adresse 3] aura droit au paiement de l'intérêt défini à l'article du loyer (alinéa 3), du bail commercial, si les comptes entre les parties font apparaître que le loyer et ses accessoires n'ont pas été réglés à bonne date par la locataire, sans répondre aux conclusions d'appel de M. [D] et de la Selarl [K] et associés selon lesquelles le taux d'intérêt contractuellement prévu devait s'analyser en une clause pénale, dont le montant devait être réduit, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 455 du code de procédure civile :
12. Selon ce texte, tout jugement doit être motivé. Le défaut de réponse aux conclusions constitue un défaut de motifs.
13. Pour confirmer le jugement en ce qu'il dit que la bailleresse aurait droit au paiement de l'intérêt défini à l'article relatif au loyer, alinéa 3, du bail commercial, si les comptes entre les parties font apparaître que le loyer et ses accessoires n'ont pas été réglés à bonne date par la locataire, l'arrêt n'énonce aucun motif.
14. En statuant ainsi, sans répondre aux conclusions de la locataire selon lesquelles le taux d'intérêt contractuellement prévu constituait une clause pénale dont le montant devait être réduit, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief du quatrième moyen, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette la demande de la société d'exercice libéral à responsabilité limitée [K] associés en restitution de charges et en ce qu'il dit que la société civile immobilière [Adresse 3] aura droit au paiement de l'intérêt défini à l'article relatif au loyer, alinéa 3, du bail commercial, si les comptes entre les parties font apparaître que le loyer et ses accessoires n'ont pas été réglés à bonne date par la locataire, l'arrêt rendu le 15 septembre 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ;
Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Versailles autrement composée ;
Condamne la société civile immobilière Villa Laferrière aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trente mai deux mille vingt-quatre.