CA Nîmes, 4e ch. com., 7 juin 2024, n° 23/03349
NÎMES
Arrêt
Infirmation
PARTIES
Demandeur :
Z
Défendeur :
J
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Codol
Conseillers :
Mme Ougier, Mme Vareilles
Avocats :
Me Brun, Me Melmoux, Me Divisia, Me Le Targat
Vu la déclaration d'appel effectuée au greffe le 22 juin 2023 par Madame [S] [A] épouse [Z] et Monsieur [T] [Z] à l'encontre de l'ordonnance rendue le 9 juin 2023 par le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Nîmes, dans l'instance n°23/136,
Vu les dernières conclusions remises par la voie électronique le 25 avril 2024 par les appelants et le bordereau de pièces qui y est annexé,
Vu les dernières conclusions remises par la voie électronique le 25 avril 2024 par Madame [W] [X] [L] [I] [Y]-[K], intimée, et le bordereau de pièces qui y est annexé,
Vu les conclusions du Ministère Public remises par la voie électronique le 21 mars 2024,
Vu la demande de note en délibéré adressée aux parties le 2 mai 2024 sur le moyen relevé d'office par la cour de son incompétence territoriale pour statuer sur la demande d'autorisation de saisie conservatoire des comptes bancaires de Madame [C] [K] et de Monsieur [G] [K],
Vu la note en délibéré transmise par la voie électronique le 7 mai 2024 par les appelants
Suivant acte notarié du 25 mai 2022, Madame [W] [X] [L] [I] [J], Madame [C] [H] [W] [K] et Monsieur [G] [O] [K] (les vendeurs) ont vendu à Madame [S] [Z] et Monsieur [T] [Z] (les acquéreurs) une maison de plain-pied à usage d'habitation avec jardin attenant sise [Adresse 9] (34) au prix de 300 000 euros.
Il était stipulé dans l'acte de vente que l'acquéreur prendrait le bien dans l'état où il se trouvait au jour de l'entrée en jouissance, sans recours contre le vendeur pour quelque cause que ce soit notamment en raison des vices apparents et des vices cachés.
Les vendeurs ont déclaré qu'à leur connaissance, aucune construction ou rénovation n'avait été effectuée dans les dix dernières années, à l'exception de travaux de rénovation intérieurs réalisés par le vendeur lui-même, et qu'aucun élément constitutif d'ouvrage ou équipement indissociable de l'ouvrage au sens de l'article 1792 du code civil n'avait été réalisé dans ce délai.
Invoquant l'apparition de désordres importants, les acquéreurs ont saisi, par exploit du 17 mai 2023, le juge des référés du tribunal judiciaire de Béziers d'une demande de mesure d'expertise à laquelle il a été fait droit, par ordonnance du 23 juin 2023.
Par requête datée du 29 mai 2023, reçue au greffe le 31 mai 2023, les acquéreurs ont sollicité auprès du juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Nîmes l'autorisation de procéder à une inscription d'hypothèque judiciaire provisoire sur le bien immobilier de Madame [W] [Y]-[K], l'autorisation d'effectuer les recherches nécessaires sur le fichier Ficoba et d'effectuer une saisie conservatoire sur tous comptes bancaires appartenant aux trois vendeurs pour sûreté, conservation et paiement de la somme de 280 026,64 euros.
Par ordonnance du 9 juin 2023, le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Nîmes a rejeté la requête aux motifs que les manoeuvres dolosives alléguées n'étaient pas suffisamment démontrées.
Par déclaration effectuée au greffe le 22 juin 2023, Madame [S] [Z] et Monsieur [T] [Z] ont interjeté appel de cette décision aux fins de la voir réformer en toutes ses dispositions et voir réparer une erreur matérielle sur les dates de dépôt et de la requête, ainsi qu'une omission de statuer sur la demande d'hypothèque judiciaire.
EXPOSE DES PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Dans leurs dernières conclusions notifiées par voie électronique, les appelants demandent à la cour, au visa des articles L. 511-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution, des articles R. 511-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution, des articles L. 523-1 et suivants et R. 523-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution, des articles 1792 et 1792-2 du code civil, des articles 1131,1134,1137 et 1141 du code civil, de l'article 1641 du code civil, des articles 122, 323, 493 et suivants, 496, 547 et 950 et suivants du code de procédure civile, de :
- Déclarer irrecevables la constitution d'intimée et les conclusions de Madame [W] [Y]-[K]
- Réformer l'ordonnance rendue par le juge de l'exécution de [Localité 22] le 9 juin 2023,
- Constater que la créance des consorts [Z] paraît fondée en son principe,
- Constater que les consorts [Z] justifient de circonstances propres à menacer le recouvrement de leur créance,
- Autoriser les consorts [Z] à prendre une inscription d'hypothèque judiciaire provisoire sur les biens immobiliers appartenant à Madame [W] [X] [L] [I] [J], née le [Date naissance 10] 1963 à [Localité 19] ([Localité 11]), de nationalité française, fonctionnaire de police, divorcée, domiciliée [Adresse 5], sis sur la commune de [Localité 22], cadastrés section [Cadastre 17] et [Cadastre 18], 28 à 29, pour sûreté conservation et avoir paiement de sa créance que la cour voudra bien évaluer provisoirement à la somme de 161 832,64 euros ou pour telle somme qu'il plaira à la cour d'évaluer ;
- Autoriser l'huissier de justice à effectuer les recherches nécessaires sur le fichier Ficoba aux fins de pratiquer une saisie conservatoire de créance ;
- Autoriser les requérants à effectuer une saisie conservatoire sur tous comptes bancaires appartenant à :
Madame [W] [X] [L] [I] [Y]-[K], née le [Date naissance 10] 1963 à [Localité 19] ([Localité 11]), de nationalité française, fonctionnaire de police, divorcée, domiciliée [Adresse 5] ;
Madame [C] [H] [W] [K], née le [Date naissance 1] 1968 à [Localité 23] ([Localité 16]), de nationalité française, célibataire, technicienne de laboratoire, demeurant [Adresse 24] ;
Monsieur [G] [O] [K], né le [Date naissance 12] 1969 à [Localité 21] ([Localité 2]), de nationalité française, célibataire, électricien, demeurant au [Adresse 6].
en garantie de sa créance que la cour voudra bien évaluer provisoirement à la somme de 161 832,64 euros ou pour telle somme qu'il plaira à la cour d'évaluer ;
- Dire que la mesure autorisée sera exécutée dans le délai de trois mois et que la procédure ou les mesures nécessaires à l'obtention d'un titre exécutoire seront introduites dans le délai d'un mois qui suit cette exécution.
Au soutien de leurs prétentions, les appelants font valoir que leur demande en indemnisation est fondée sur la responsabilité pour faute présumée des vendeurs, dans le cadre de la garantie décennale (1792 et 1792-2 du code civil). En effet, des travaux importants ont été réalisés dans le bien vendu, dans un délai de 10 ans, sans en informer les acquéreurs et sans souscrire une assurance responsabilité décennale. Leur demande est également fondée sur la responsabilité des vendeurs qui peuvent être assimilés à des constructeurs, et qui, à ce titre, auraient dû souscrire une assurance responsabilité décennale. Enfin, leur demande est fondée sur le dol, les vendeurs ayant parfaitement connaissance des désordres qu'ils ont choisi de ne pas révéler aux acquéreurs. La clause d'exonération de responsabilité pour vices cachées ne peut s'appliquer, les vendeurs étant des professionnels et ayant caché des vices aux acquéreurs. Les fissures apparaissant dans le constat d'huissier de 2023 n'étaient pas visibles en 2022 et ont été découvertes par les acquéreurs, lors de leurs travaux de rénovation. La créance s'élève à 280 026,64 euros. Il ressort du comportement dolosif des vendeurs que la mise en place de man'uvres pour échapper au paiement de la dette n'est pas à exclure. En outre, leur situation financière peut susciter une forte crainte quant au recouvrement en raison de l'évaluation, à ce stade, de leur solvabilité. En effet, Madame [W] [Y]-[K] ne règle pas ses charges de copropriété et une hypothèque légale a été déposée en 2014 par le syndicat des copropriétaires de sa résidence pour une dette de 5 743,27 euros. Sa solvabilité semble donc compromise. Monsieur [G] [O] [K] serait au chômage. Les acquéreurs ont pris une hypothèque judiciaire provisoire sur le bien de Madame [C] [K] pour une somme totale de 200 000 euros mais la valeur de ce bien de 118 194 euros ne couvrira pas la créance dont le recouvrement est périlleux pour 161 832,64 euros.
Dans leur note en délibéré, les appelants soutiennent que la cour d'appel de Nîmes est compétente pour apprécier la décision rendue par le juge de l'exécution au titre de l'hypothèque judiciaire et de la saisie conservatoire sur les comptes bancaires.
Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique, l'intimée demande à la cour de :
- Statuer ce que de droit sur la recevabilité de l'appel, en la forme
- Au fond, le rejeter
- Confirmer la décision en toutes ses dispositions
Y ajoutant,
- Condamner les consorts [Z] au paiement de la somme de 4.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.
L'intimée réplique qu'après le décès de leur père, son frère et un ami ont entrepris des travaux de rafraîchissement à l'intérieur de la maison ; les matériaux nécessaires ont été acquis pour un montant global de 1 907,08 euros. Le notaire a omis de mentionner dans l'acte de vente les travaux concernant la reprise de fissure apparente en façade confiée à l'entreprise [...] alors que la facture d'un montant de 2 744,50 euros avait été réglée par la comptabilité du notaire. Par la suite, les acquéreurs ont entamé des travaux 'pharaoniques' dans la maison qui ont eu pour effet de la déstabiliser et de créer des mouvements de structure. Il est donc mensonger de prétendre comme le font les acquéreurs que tout a été refait dans la maison avant la vente et que des travaux de gros oeuvre ont été réalisés. La fissure qui a été reprise est le seul vice qui était connu des vendeurs ; elle n'est pas ré-apparue, prouvant ainsi que son traitement a été efficace.
Dans ses conclusions notifiées par voie électronique, le Ministère Public sollicite la confirmation de la décision entreprise dans la mesure où la créance des requérants n'apparaît pas certaine.
Le Ministère Public indique que l'erreur matérielle affectant la requête ne saurait constituer un motif d'appel. Les termes mêmes de la décision du juge de l'exécution sont clairs quant au fait que ce magistrat considère que la créance n'apparaît pas fondée en son principe et que, dès lors, toute demande de mesure conservatoire doit être refusée. Les différents fondements de la demande sont de simples affirmations des appelants. Le caractère important des travaux qui auraient été réalisés et octroyant la qualité de professionnels (constructeurs) à des particuliers qui ont vendu leur maison, et qui auraient donc dû souscrire une assurance de responsabilité décennale n'est pas démontré, et n'est donc pas certain. De cette absence de certitude de la réalisation de travaux importants, découle l'absence de preuve d'un dol ; la garantie des vices cachés ne trouve pas à s'appliquer lorsque les désordres sont apparents, ce qui est le cas pour une grande partie des fissures, dont on peut voir à l''il nu sur les photos qu'elles ont été rebouchées de manière "artisanale" et étaient donc apparentes lors de la visite de la maison ; l'achat d'une maison nécessite quand même un minimum de vérification par l'acquéreur.
Pour un plus ample exposé, il convient de se référer à la décision déférée et aux conclusions visées supra.
MOTIFS
1) Sur la recevabilité de la constitution d'intimée et des conclusions de
Madame [W] [J] a été avisée par les services du greffe, par lettre recommandée dont elle a accusé de réception le 22 novembre 2023, des lieu, jour et heure de l'audience à laquelle l'affaire serait examinée, en application de l'article 955-1 du code de procédure civile.
Le caractère gracieux de la procédure d'ordonnance sur requête n'est que provisoire et une contestation manifestant un litige peut être émise à tout moment, aboutissant à intervertir la procédure qui devient contentieuse.
La constitution d'intimée de Madame [W] [J] et ses conclusions sont, par conséquent, recevables.
2) Sur la demande d'autorisation de saisie conservatoire des comptes bancaires de Madame [C] [K] et de Monsieur [G] [K]
Aux termes de l'article R.511-2 du code des procédures civiles d'exécution, le juge compétent pour autoriser une mesure conservatoire est celui du lieu où demeure le débiteur.
L'article R. 511-3 précise que le juge saisi doit relever d'office son incompétence.
En l'occurrence, Madame [C] [K] est domiciliée à Aix-en Provence tandis que Monsieur [G] [K] est domicilié à Montpellier, soit en dehors du ressort de la cour d'appel de Nîmes.
Par conséquent, la cour ne peut que se déclarer incompétente territorialement pour statuer sur la demande d'autorisation de saisie conservatoire de comptes bancaires de Madame [C] [K] au profit de la cour d'appel d'Aix-en Provence et de Monsieur [G] [K] au profit de la cour d'appel de Montpellier.
3) Sur le caractère fondé en son principe de la créance des requérants
L'article L. 511-1 du code des procédures civiles d'exécution dispose que:
« Toute personne dont la créance paraît fondée en son principe peut solliciter du juge l'autorisation de pratiquer une mesure conservatoire sur les biens de son débiteur, sans commandement préalable, si elle justifie de circonstances susceptibles d'en menacer le recouvrement.
La mesure conservatoire prend la forme d'une saisie conservatoire ou d'une sûreté judiciaire.'
Il appartient au juge de rechercher l'existence, non pas d'un principe certain de créance mais seulement d'une créance paraissant fondée dans son principe (2e Civ, 3 mars 2022, n° 21-19.298).
En l'espèce, les requérants produisent un procès-verbal dressé le 24 mars 2023 par commissaire de justice accompagné de photographies montrant des fissures sur les murs de la maison vendue et sur la dalle en béton située devant le garage ainsi qu'un affaissement du sol dans la véranda et sur la terrasse. Le commissaire de justice a également constaté une fissure importante dans un poteau béton, une fissure sur une brique rouge en partie supérieure et des micro-fissures du plancher béton du vide sanitaire.
Le diagnostic structurel réalisé le 15 décembre 2022 par le cabinet EBGC ingénierie a notamment mis en évidence un phénomène de tassements différentiels se traduisant par l'apparition de multiples fissures sur les murs extérieurs et intérieurs, sur le côté Sud de la maison et au niveau de la terrasse et du garage, nécessitant une reprise générale des fondations sur l'ensemble du bâtiment dans les règles de l'art.
L'expertise judiciaire en cours permettra de confirmer ou non ce diagnostic et de déterminer de manière contradictoire l'origine et l'étendue des désordres ainsi que, le cas échéant, la nature et le montant des travaux de remise en état.
Il est stipulé dans l'acte authentique de vente que la clause d'exclusion de la garantie des vices cachés ne s'applique pas s'il est prouvé par l'acquéreur, dans les délais légaux, que les vices cachés étaient en réalité connus du vendeur.
En l'occurrence, Monsieur [P], agent commercial ayant procédé à l'estimation de la maison en juin 2021, a indiqué, dans son témoignage écrit, avoir remarqué et signalé les fissures aux propriétaires qui lui ont fait part de leur volonté de réaliser des travaux.
Monsieur [V], qui a effectué les diagnostics obligatoires en vue de la vente immobilière, a expliqué avoir constaté de nombreuses fissures en façade comme à l'intérieur du bâtiment lesquelles ont été, selon lui, ensuite sciemment masquées pour parvenir à la vente.
Madame [D] a attesté avoir visité la maison des consorts [K] le 27 juillet 2021 et avoir constaté une grosse fissure verticale sur la façade, côté porte d'entrée, des fissures horizontales d'au moins un centimètre de large sur les murs du fond de certaines chambres, des fissures plus petites dans la cuisine, le salon et sur le sol du garage. L'agent immobilier qui l'accompagnait, lors de la visite, lui a expliqué que la terrasse avait été sinistrée et qu'elle avait été refaite ainsi que les piliers avec de meilleures fondations.
Dans un message électronique adressé le 8 septembre 2021 au notaire en charge du règlement de la succession de Monsieur [F] [K], Madame [C] [K] a indiqué qu'actuellement, la maison ne pouvait être vendue à cause d'une fissure sur le devant et sur l'arrière et que les héritiers avaient donc stoppé les visites. Il résulte de la facture de l'entreprise [...] du 27 septembre 2021 que les consorts [K] ont fait procéder à des travaux de création de six coutures en béton armé avec reprise du parement et du crépi afin de reprendre les fissures apparentes sur l'immeuble en vue de sa vente.
Dès lors, il apparaît que les fissures étaient bien connues des vendeurs qui n'ont pas signalé, lors de la vente, aux acquéreurs les travaux entrepris afin de tenter d'y remédier.
Monsieur [N], agent immobilier, et Madame [M], sa collaboratrice, ont témoigné avoir visité en février 2022 la maison litigieuse et n'avoir constaté aucune fissure apparente, ce qui laisse penser que les vendeurs auraient pu avoir masqué les fissures de manière telle qu'elles ne soient pas apparentes aux yeux des acquéreurs, lors de la visite des lieux. La grosse fissure sur le mur à côté de la véranda qui figurait dans le diagnostic immobilier semble désormais recouverte d'un parement en pierre qui la cache. La fissure sur le mur intérieur de la salle de bains n'a été découverte que lorsque les acquéreurs ont enlevé le carrelage mural. Et il est plausible que les acquéreurs n'aient été alertés par l'ampleur des autres fissures telles que visibles sur le constat du 24 mars 2023, que plusieurs mois à la vente, après qu'elles aient évolué.
Dans l'acte authentique de vente, les vendeurs ont déclaré qu'à leur connaissance, aucune construction ou rénovation n'avait été effectuée dans les dix dernières années, à l'exception de travaux de rénovation intérieurs réalisés par eux-mêmes, et qu'aucun élément constitutif d'ouvrage ou équipement indissociable de l'ouvrage au sens de l'article 1792 du code civil n'avait été réalisé dans ce délai.
Ces déclarations semblent, à tout le moins, inexactes voire mensongères. En effet, selon facture du 20 décembre 2016 versée au débat, Monsieur [F] [K] avait fait de son vivant procéder à la réfection de la terrasse, information qui pourrait avoir été donnée par ses héritiers à l'agent immobilier chargé de la vente en juillet 2021, d'après le témoignage de Madame [D]. De plus, dans un message électronique du 10 décembre 2021, Madame [C] [K] a indiqué au notaire que 90% des travaux avaient été effectués et qu'il restait un bac à douche à changer et le sol du garage à refaire. Le 11 janvier 2022, Madame [C] [K] a précisé qu'il restait notamment la seconde moitié du garage à faire et la descente qui mène au garage à bétonner.
Au vu de ces éléments rendant vraisemblable la rétention intentionnelle par les vendeurs d'informations importantes ayant pu induire en erreur les acquéreurs sur l'état de l'immeuble vendu, ces derniers justifient d'une créance paraissant fondée en son principe à leur égard.
Les acquéreurs estiment que leur créance s'élève à 280 026,64 euros et que, compte-tenu de l'évaluation à 118 194 euros du bien immobilier de Madame [C] [K] sur lequel ils ont pris une garantie, ils sont confrontés à un recouvrement périlleux de 161 832,64 euros.
Les acquéreurs communiquent un devis de la société [...] d'un montant de 153 954 euros pour la reprise des fondations et la pose des micropieux ainsi qu'un devis d'un montant de 48 072 euros de la société [...] pour la reprise des fissures des façades et de la terrasse; ces devis semblent partiellement faire double emploi en ce qu'ils comprennent tous deux la reprise des fissures extérieures ; de plus, l'existence d'un lien entre les désordres alléguées et la réalisation d'un trottoir périphérique n'est pas manifeste. Enfin, les acquéreurs se prévalent d'un préjudice de jouissance de 1 000 euros par mois pendant deux ans, soit d'un montant total de 24 000 euros alors qu'ils l'ont comptabilisé pour un montant de 48 000 euros.
Par conséquence, il convient de considérer que leur créance paraît fondée en son principe à hauteur de 228 000 euros.
4) Sur les circonstances susceptibles de menacer le recouvrement de la créance
Les manoeuvres dolosives reprochées aux vendeurs, si elles sont avérées, laissent craindre qu'ils ne cherchent à échapper à l'exécution de leurs obligations. Le risque d'insolvabilité est d'autant plus avéré que le montant de la créance paraissant fondée en son principe des acquéreurs est élevé. Par ailleurs, le bien immobilier de Madame [W] [Y]-[K] est grevé d'une hypothèque légale inscrite en 2014 par un syndicat des copropriétaires pour une créance de 5 743,27 euros laissant craindre qu'elle se soit trouvée dans l'incapacité de régler une somme aussi modique.
L'ensemble de ces circonstances constituent une menace pour le recouvrement de la créance paraissant fondée en son principe des acquéreurs.
Cependant, une inscription d'hypothèque judiciaire conservatoire sur le bien immobilier de Madame [W] [Y]-[K] est suffisante pour garantir la créance paraissant fondée en son principe des acquéreurs, sans qu'il ne soit nécessaire d'autoriser en sus la saisie de ses comptes bancaires.
Il résulte de la demande de renseignements du 10 novembre 2023 formée auprès des services de la publicité foncière qu'une hypothèque judiciaire conservatoire a été inscrite par les acquéreurs sur le bien immobilier de Madame [R] [K], en vertu d'une autorisation donnée par arrêt du 9 novembre 2023 de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, pour sûreté et conservation de la somme de 200 000 euros.
Eu égard à la garantie déjà prise sur le bien immobilier de Madame [C] [K], l'inscription d'hypothèque judiciaire provisoire sera autorisée sur le bien de Madame [W] [Y]-[K] pour sûreté et garantie de la somme de 110 000 euros.
5) Sur les frais du procès
La demande de mesure conservatoire a été formée pour préserver les droits des acquéreurs alors qu'il existe une incertitude sur le succès de l'instance au fond qu'ils vont introduire à l'encontre des vendeurs.
Les dépens de l'instance d'appel seront, par conséquent, mis à la charge des acquéreurs appelants.
L'équité ne commande pas de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en faveur de l'intimée.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR,
Déclare recevables la constitution d'intimée et les conclusions de Madame [W] [J],
Se déclare incompétente territorialement pour statuer sur la demande d'autorisation de saisie conservatoire de comptes bancaires de Madame [C] [K] au profit de la cour d'appel d'Aix-en Provence,
Ordonne, par conséquent, le renvoi de l'affaire devant la cour d'appel d'Aix-en Provence, en application de l'article 90 du code de procédure civile,
Se déclare incompétente territorialement pour statuer sur la demande d'autorisation de saisie conservatoire de comptes bancaires de Monsieur [G] [K] au profit de la cour d'appel de Montpellier,
Ordonne, par conséquent, le renvoi de l'affaire devant la cour d'appel de Montpellier, en application de l'article 90 du code de procédure civile,
Infirme l'ordonnance en ses dispositions soumises à la cour sauf en ce qu'elle a rejeté la demande d'autorisation de saisie conservatoire des comptes bancaires de Madame [W] [Y]-[K] et de recherches nécessaires sur le fichier Ficoba,
Statuant à nouveau,
Autorise Madame [S] [A] épouse [Z] et Monsieur [T] [Z] à prendre une inscription d'hypothèque judiciaire provisoire sur les biens immobiliers appartenant à Madame [W] [X] [L] [I] [J], née le [Date naissance 10] 1963 à [Localité 19] ([Localité 11]), de nationalité française, fonctionnaire de police, divorcée, domiciliée [Adresse 5], sis sur la commune de [Localité 22], cadastrés section [Cadastre 17] et [Cadastre 18], 28 à 29, pour sûreté conservation et avoir paiement de leur créance évaluée provisoirement à la somme de 110 000 euros,
Dit que la présente autorisation sera caduque si l'inscription provisoire n'a pas été effectuée dans un délai de trois mois à compter de la présente décision,
Rappelle que, par application de l'article R. 511-7 du code des procédures civiles d'exécution, le créancier doit, à peine de caducité, introduire une procédure ou accomplir les formalités nécessaires à l'obtention d'un titre exécutoire dans le mois de l'inscription,
Dit que, conformément à l'article R.532-5 du code des procédures civiles d'exécution, la présente décision sera notifiée dans les huit jours de l'inscription,
Y ajoutant,
Déboute Madame [W] [J] de sa demande d'indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne Madame [S] [A] épouse [Z] et Monsieur [T] [Z] aux dépens de l'instance d'appel.
Arrêt signé par le présidente et par la greffiere.